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Amphithéâtre des Trois Gaules (l’
En décembre 1949, la communauté accueille une première famille; en 1950, elle réalise une première construction; en 1951, les compagnons bâtisseurs deviennent les compagnons chiffonniers. Le 1er février 1954, l’abbé Pierre lance son fameux appel, qui fera voler en éclats les réticences gouvernementales face à l’urgence : un plan de financement de 10 milliards de francs est voté pour faire construire 10000 logements d’urgence et la trêve hivernale des expulsions est instaurée.
Beaucoup de pays dans le monde vont faire appel à son expertise. En 1963, il est l’initiateur d’Emmaüs International avec un principe simple : tout devient possible si l’on s’appuie sur les hommes. Jusqu’à sa mort, le 22 janvier 2007, il ne cessera de se battre contre la faim dans le monde, contre les dictatures et pour la démocratie, pour le droit d’asile, pour le droit au logement, pour le dialogue interreligieux. Il laisse derrière lui une œuvre immense et bien vivante s’inscrivant dans la grande tradition humaniste lyonnaise.
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L’AMPHITHÉÂTRE DES TROIS GAULES
Rares sont les conquérants qui ont autant la science des peuples vaincus que les Romains. La Gaule conquise et la paix acquise «ad augusta per angusta», le processus civilisationnel se met en place et l’on commence par construire une ville et ses bâtiments publics. Auguste (63 av. J.-C.-14), Claude (10 av. J.C.-54) – le Lyonnais – et Vespasien (règne de 69 à 79) se mettent à l’ouvrage avec une volonté et une continuité sans faille. À Lyon comme dans les autres points de la Gaule, on fait descendre les Gaulois de leurs «oppida» pour les installer en ville. Ces peuples sont aussi fougueux par jeu, que dociles par intérêt. Ils abandonnent ainsi leurs lances pour prendre les manchons de la charrue (voir le «calendrier rustique» des belles mosaïques de SaintRomain-en-Gal!) ou ouvrir une échoppe, voire un atelier. L’oppidum du mont Verdun est oublié au profit des échoppes de Condate, en bord de Saône. Il est étonnant de constater la réussite de l’entreprise, puisque sur les 60 cités créées ou développées dans les Trois Gaules du Haut-Empire, près de la moitié sont aujourd’hui une préfecture de département; ce chiffre grimpe aux deux tiers si l’on compte les sous-préfectures. De plus, les routes romaines semblent déjà dessiner le réseau routier français.
Les Gaulois sont également attachés à un certain art de vivre et aux honneurs : la ville de Lugdunum va leur offrir ce qu’ils désirent. L’eau à volonté amenée par un grand aqueduc, des thermes, des places, des rues commerçantes bien achalandées avec les produits remontant le Rhône ou descendant la Saône, autant de «merveilles» qui font oublier bien vite la rusticité de la hutte gauloise.
La puissance ne dure pas si elle n’est accompagnée de quelque reconnaissance qui contribue plus fortement encore à la romanisation des esprits. Ce sera sur le bas des pentes de la Croix-Rousse que la marque de l’organisation et de l’influence romaines sera la plus éclatante. En l’an 12 av. J.-C., on y construit tout d’abord un sanctuaire pour honorer le culte impérial, les dieux romains, mais aussi leurs «homologues» gaulois dans une sorte d’œcuménisme diplomatique et bienveillant. Quelques années plus tard et sous l’autorité du grand prêtre fédéral Julius Rufus, on entreprend la construction d’un vaste amphithéâtre dont l’emprise au sol dépassera les 15000 m2 lors de son extension. Le lieu cumule des fonctions politiques, administratives et d’agréments. Il est prestigieux et tout de pierres taillées.
Chaque 1er août – le mois d’Auguste – débute un grand rassemblement des 60 tribus gauloises réparties entre la Gaule Belgique (15 peuples), la Gaule Lyonnaise (25) et la Gaule Aquitaine (20). Leurs délégués apprennent ici et progressivement leur nouveau statut de sujets de l’empereur et de Rome. Ils peuvent exprimer leurs doléances, leurs souhaits, mais également actualiser les codes et le tribut de leur soumission. Certains pourront même accéder à quelques fonctions publiques impériales. C’est à cet endroit que les Gaulois apprennent les mots (latins) et les règles (droit romain) du débat public et de la recherche de solutions partagées, comme une sorte d’origine lointaine du parlement national. Mais on ne fait pas que croiser les mots dans cette enceinte, on y croise également le fer dans une mise en scène très étudiée des combats guerriers : les jeux du cirque.
Durant une quinzaine de jours, en effet, se succèdent les combats de gladiateurs, les supplices de martyrs (en 177 quarante-cinq chrétiens, dont Pothin et Blandine) et les scènes plus légères de comédies et de pantomimes. Vienne, la «florissante» ne tarde pas à se voir supplanter par ces spectacles lyonnais, comme un avant-goût de l’émulation actuelle entre les festivals présentés dans les théâtres romains de «Jazz à Vienne» et des «Nuits de Fourvière». Néanmoins, toutes deux, grâce à leurs «nautes», serviront et desserviront Rome en produits et en impôts plus facilement mobilisables et contrôlables à l’occasion de tels rassemblements.