Nos clefs pour plus de démocratie

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clefs

NOS POUR PLUS DE DÉMOCRATIE


ÉDITEUR RESPONSABLE : LAURENT COSTAS Avenue de la Toison d’Or, 84 - 86 1060 Bruxelles

GRAPHISME : Daphné Algrain

TEXTE : La Fédération des Étudiants Libéraux Johan Browet Laurent Costas John De Coster Arnaud Devos Antoine Dutry Corentin Lucifora


SOMMAIRE INTRODUCTION .............................................................................................4 Osons plus de démocratie !

01 Pour une circonscription électorale fédérale .........................................6 02 Pour une simplification du droit .............................................................8 03 Pour le droit de vote des étrangers ........................................................10 04 L’obligation du droit de vote ....................................................................12 05 Le vote obligatoire, une abrogation désirable ? ...................................14 06 Pour le maintien du spitzenkandidat .....................................................18 07 Pour plus de transparence des lobbies ..................................................22 3


INTRODUCTION OSONS PLUS DE DÉMOCRATIE ! À l’heure actuelle, qui osera prétendre que la démocratie n’est pas en crise ? Le citoyen, en mal avec la politique dite « traditionnelle », se réfugie dans un désintérêt pour la chose publique et dans une contestation de notre modèle de société. Dans le monde, on ne compte plus les pays qui font le choix de dirigeants ayant exprimé un dédain unanime sur les valeurs démocratiques. Les Orban, Salvini, Trump, Bolsonaro, Erdogan ne sont pas arrivés là par hasard. Ils ont été élus par le peuple. Ce même peuple qui souhaiterait plus de démocratie mais qui, d’une certaine manière, condamne toute perspective d’évolution positive en portant aux nues des hommes beaucoup trop peu scrupuleux. Des hommes qui sont généreux en simplismes à outrance, qui se font chantre du (vrai) populisme et qui multiplient les affirmations contraires à la réalité. C’est comme si, à chaque fois, ce même peuple se condamnait volontairement. Comme si, le peuple remettait en question tout ce qui (devrait) fonde(r) notre démocratie. D’un autre côté, qui serions-nous pour décider de ce qui est, ou pas, une « bonne démocratie » ? Plus encore, qui serions-nous pour pointer du doigt ces mêmes pays, alors que, même en Belgique, la démocratie gagnerait à être qualitativement améliorée ? Car oui, la Belgique n’est pas en reste. Plutôt que de jouer les « donneurs de leçons » (ça vaut pour tout l’Occident, en fait), on devrait peut-être balayer devant 4


notre porte. Revenons au cas belge. Les affaires liées à Publifin ou au Samusocial constituent l’exemple le plus frappant du mal qui frappe notre pays. On ne peut, résolument, demander aux citoyens de faire preuve d’une exemplarité totale, quand dans le même temps, les agissements réalisés vont totalement à l’encontre des règles de bonne gouvernance. On ne peut, raisonnablement, se regarder dans un miroir alors que, au même moment, on dupe le citoyen. Attention, il ne s’agit pas de clouer au pilori quiconque fait de la politique. Le temps devrait permettre de séparer « le bon grain de l’ivraie ». On utilise le conditionnel, car rien n’est moins sûr. Rien ne l’a jamais moins été, en fait. Ce que l’on attend de nos dirigeants, c’est qu’ils prennent pleine mesure de l’enjeu sociétal et des innombrables fissures de notre démocratie. Ce que l’on attend d’eux, en Belgique, mais aussi en Europe, c’est qu’ils fassent du citoyen un élément central du système démocratique. Qu’on mette de côté les broutilles que constituent les jeux politiques et autres questions personnelles liées aux mandats et autres cumuls. Désormais, le seul mandat auquel les politiciens devraient tous s’atteler, c’est de rendre les lettres de noblesse à un mot qui a traversé les époques, à bien des degrés divers, mais qui signifie tant pour les Étudiants Libéraux : la Démocratie.

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POUR UNE CIRCONSCRIPTION ÉLECTORALE FÉDÉRALE CONTEXTE

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Tout d’abord, dressons un constat sans équivoque : la succession des réformes de l’État a mené à une division de la Belgique en deux blocs électoraux : l’un wallon, l’autre flamand. En d’autres termes, au fil des années, chaque entité fédérée a bénéficié d’une autonomie plus importante. Dans le paysage belge, seule la tristement célèbre zone de Bruxelles-Hal-Vilvorde, plus connue sous l’acronyme de BHV, représente une circonscription électorale dite « mixte ». Malheureusement, à cause de cette configuration, il est de plus en plus difficile de gouverner en Belgique, tant le système électoral actuel contribue à renforcer la confrontation entre Flamands et Wallons. Les récentes élections et autres sondages/baromètres sont des exemples supplémentaires qui illustrent cette division, avec une Flandre pourvoyeuse de voix à droite et une Wallonie toujours plus encline à voter à gauche. Au final, cette collaboration entre communautés, nous l’estimons peu saine et assez conflictuelle. Ne gagneraitelle pas à faire place à une collaboration plus efficace. Pour y arriver, nous prônons l’instauration d’une circonscription électorale fédérale, et ce pour plusieurs raisons.


NOS ARGUMENTS Premièrement, il s’agirait là d’une avancée démocratique ainsi qu’une manière de garantir la légitimité du gouvernement en place. Il est vrai et n’est-il pas injuste que les électeurs ne puissent voter que pour des partis relatifs à leur communauté ? C’est un non-sens. En tant qu’électeur wallon, nous devrions pouvoir voter pour un parti situé de l’autre côté de la frontière linguistique, ne serait-ce que pour démontrer notre avis favorable à la politique menée, ou même, pour la dénoncer. A fortiori, si ces politiques nous impactent, nous, électeurs de l’autre communauté. En d’autres termes, le citoyen aurait une véritable fonction de contrôle envers les mandataires politiques fédéraux, qu’ils soient du Nord ou du Sud du pays. Plus qu’une fonction, il serait en fait question du véritable exercice d’un pouvoir citoyen. Deuxièmement, nous ne vous apprenons certainement rien en disant que les divisions sont grandissantes entre les deux communautés linguistiques – les récentes élections communales et provinciales en sont le témoin le plus évocateur. Notre avis, c’est de dire que le système électoral en place renforce cette polarisation, étant donné que l’élu ne doit rendre des comptes qu’à une partie de la population, et qu’il ne s’intéresse/prend en compte que les revendications de son propre électorat. Tout ceci nous amène à un point : la polarisation grandissante était à deux doigts de faire flancher le pays en 2011, la circonscription électorale fédérale permettrait justement de raviver le sentiment de « Belgique », de calmer les ardeurs communautaires et d’amoindrir l’instabilité politique. Les partis nationalistes y seraient forcément opposés, même face à ces arguments. Cela va forcément à l’encontre de leur souhait de détricoter, doucement mais sûrement, la Belgique. Par ailleurs, ces dernières années, d’autres se sont posés en faveur d’une circonscription électorale fédérale, tels que des jeunesses politiques belges, des académiciens et même certains politiciens… Il existe donc bel et bien une force mobilisable et une possibilité d’agir en faveur de plus de démocratie, en Belgique. Encore faut-il, pour chaque parti, mettre de côté ses aspirations stratégiques et penser, en premier lieu, à l’intérêt du citoyen. Doux rêve diront certains. Mais n’oublions pas : la démocratie, c’est le peuple, c’est nous tous. 7


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POUR UNE SIMPLIFICATION DU DROIT CONTEXTE

Peu de lois suffisent à des hommes honnêtes ; il n’en est jamais assez pour les méchants ; et lorsque la science des lois devient un dédale où le plus habile se perd, le méchant triomphe avec les armes mêmes de la Justice.

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C’est en ces termes que s’exprimait Jean-Jacques-Régis de Cambacérès (1753-1824), artisan du code civil et grand Jurisconsulte de son temps. Plus que tout autre, il avait compris que le droit se devait d’être clair et accessible afin que tous puissent connaître leurs droits. C’est dans cette vision qu’a été rédigé le code Napoléon, modèle d’ingénierie juridique jusqu’à nos jours. Mais la simplicité des origines a laissé place à l’inflation législative et à la lenteur du droit et à son incapacité à s’adapter efficacement face à la rapidité de l’évolution de nos sociétés. Dès lors, n’est-il pas opportun de se demander, pourquoi ? Pourquoi un des plus beaux outils créés par l’homme a de plus en plus de mal à être efficace et inclusif ?


NOS ARGUMENTS Depuis de nombreuses années, nos sociétés font face à de tels phénomènes. En effet, on cloisonne le droit, on le rend hermétique alors qu’il est censé se nourrir de lui-même. Et malgré les efforts entamés depuis de nombreuses années (en partie sous impulsion européenne)1 , on peine à offrir une législation claire et accessible au citoyen voire même au praticien. Rien ne semble pouvoir freiner l’inflation législative dont souffrent nos sociétés. Mais alors, qu’avons-nous perdu du génie du législateur d’autrefois ? Cela tient en un mot : simplicité. Des formulations simples, à la limite de la poésie ainsi que l’utilisation de catégories. Recourir à des catégories, ne pas tout définir, là résidait le génie des Anciens. En s’assurant que les concepts soient suffisamment précis tout en étant suffisamment vagues pour englober toute une série cas résiduels, ils s’assuraient l’éternité de leur législation et la stabilité de leur société. C’est donc ici que nous pêchons. Dans l’excès de vouloir tout prévoir, nous nous sommes égarés dans notre propre droit. Pas une réforme ou une loi ne sort sans que l’on pense déjà à la simplifier, voire à la corriger. Le monde est ainsi fait qu’il faut désormais être rapide et ne plus s’embarrasser de détails, et c’est là toute l’erreur, car « tout prévoir est un but qu’il est impossible à atteindre ».2 Finalement, et si la solution était de simplifier le droit ? C’est le pari du langage juridique clair que nous choisissons de prendre. Revenir à la simplicité des origines (dans la mesure du possible). Redonner au citoyen la possibilité d’agir en connaissant ses droits et ses devoirs. Il s’agit là du droit de tout un chacun. C’est pourquoi des juristes et de nombreuses associations dont « droits quotidiens » en Belgique, se battent pour que le droit soit plus accessible, plus démocratique. En aidant le citoyen à comprendre ses droits et à se familiariser avec ceux-ci, on lui offre une réelle sécurité juridique et un gage sûr d’indépendance. On évite ainsi que les méchants triomphent avec les armes mêmes de la justice.

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Cfr. « Accords mieux légiférer » I

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Portalis dans son discours préliminaire sur le code civil

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POUR LE DROIT DE VOTE DES ÉTRANGERS CONTEXTE

Depuis l’an 2000, tout citoyen communautaire a le droit de voter aux élections communales (ou tout niveau de pouvoir local équivalent) au sein des États membres de l’UE. Depuis 2004, ce droit a été élargi aux habitants légaux non européens. Faut-il en rester là ? Ou bien pouvons-nous envisager d’élargir plus encore le droit de vote des étrangers ? Je pense en effet que c’est le cas.

NOS ARGUMENTS Comment justifie-t-on l’octroi du droit de vote aux étrangers (même non européens) aux élections communales. Le raisonnement est somme toute assez logique. Les communes, en tant que niveau de pouvoir local, sont les entités politiques les plus proches du citoyen. La proximité qu’elles entretiennent avec leurs habitants donne à ses derniers le droit de faire entendre leur voix. Si l’on admet cela, force est de constater que le niveau communal n’est pas le seul niveau de pouvoir à avoir un impact direct sur la vie quotidienne du citoyen. Tel est aussi le cas pour la 10


région… pour l’État fédéral même dans lequel l’étranger s’est établi et vit jour après jour. Pourquoi donc ne pas lui accorder le droit de vote aux élections de ces niveaux-là aussi ? Parce qu’il n’est pas citoyen belge me répondrezvous probablement. Ma réflexion n’est en aucun cas juridique, mais intégralement philosophique. Elle rejoint, qui plus est, le fil de celle que j’ai tenu dans notre campagne du mois de mai 2018 (Humani’Blues – État-Nation & Citoyenneté), que je vous invite d’ailleurs à aller la (re)lire en complément de ceci. En tant que démocratie libérale dans un monde globalisé, que nous préconise le libéralisme philosophique dont nous nous revendiquons (dont je me revendique personnellement en tout cas) ? La liberté de mouvement, le droit d’être représenté politiquement et le droit de participer à la vie politique. Cet enseignement nous enjoint donc à revoir notre conception de la citoyenneté (en tant que statut), et de la désolidariser de son existence jusqu’ici combinée à cette construction qu’est la nationalité. Il nous faut sortir d’une conception de l’État où seuls les nationaux bénéficieraient des droits de citoyenneté, surtout ceux aussi élémentaires que le droit de vote. Il nous faut actualiser la représentation que nous avons de nos communautés politiques, passée à l’idée d’open societies dans lesquelles « il semble alors logique de définir la notion de citoyen par « habitant », auquel il est sans doute judicieux d’ajouter le qualificatif « légal », indépendamment de sa nationalité. […] Le simple fait d’habiter au sein d’une communauté politique, et d’en respecter les lois, vous octroierait automatiquement le statut de citoyen. Une définition moderne, une conception de l’individu en tant qu’être libre, mobile, que plus aucune barrière nationale ne semble arrêter. L’individu universel, en quelque sorte ». Prônons un libéralisme ambitieux et accueillant. Pour ce faire, promouvons le droit de vote de l’étranger, car l’étranger peut tout aussi bien être considéré comme « citoyen non national », mais donc nécessairement comme citoyen. Passons à la symbolique de « citoyenneté identifiante », comme je l’ai proposé il y a quelques mois. Une identification qui passe par l’inclusion, qui elle-même, s’incarne dans le droit à la représentation politique au travers du droit de vote.

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POUR

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L’OBLIGATION DU DROIT DE VOTE

CONTEXTE

L’article 62 de notre constitution. Qui n’en connaît pas, sinon le contenu, du moins les implications. « Le vote est obligatoire […]». Pourtant, de nos jours, ce bref extrait du texte juridique fondamental de notre état pousse à réfléchir. Une question ô combien épineuse, celle de son maintien ou de sa suppression. Je me positionne ici en faveur de son maintien.

NOS ARGUMENTS

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Avant d’aborder le caractère obligatoire, convenons de l’importance du droit de vote à proprement parler. Sans sombrer dans le cliché politique, une « bonne démocratie » nécessite que le peuple (qui est-il au juste, le peuple ?) puisse s’exprimer sur toute une série de domaines investis par le politique. En fonction du système politique étudié, leur nombre et étendue varient, mais leur incarnation la plus répandue concerne la constitution, via le suffrage, des


assemblées législatives, quel que soit le niveau de pouvoir. Il est généralement admis que le rôle politique de ces assemblées est de représenter le peuple (souverain) dans l’exercice du pouvoir (ici législatif). La qualité de la représentativité du peuple au sein de l’assemblée dépend de plusieurs facteurs, notamment de scrutin et des découpages des circonscriptions (l’idéal étant d’ailleurs une circonscription générale – fédérale en Belgique – à scrutin proportionnel). Un dernier facteur est tout aussi capital, la participation des citoyens au processus électoral. En vulgarisant un maximum, pour que l’assemblée reflète au mieux le peuple qu’elle représente, il faut que les citoyens qui composent ce peuple votent. Cela relève en quelque sorte de leur devoir (moral) de citoyen. Ce raisonnement (normalement connu de tous) permet dès lors d’aborder l’obligation de voter sous la forme d’une amplification (bénéfique selon moi) de la responsabilité du citoyen : le devoir qui incombe au citoyen n’est plus que moral, il devient moral et légal. Outre l’amplification, l’obligation du droit de vote fait état d’un second avantage, ayant trait cette fois-ci à la représentativité des assemblées. La sociologie nous enseigne l’existence de classes (ou catégories) sociales. La sociologie politique, et plus précisément la sociologie électorale, nous enseigne qu’il est possible d’identifier des attitudes électorales en fonction des catégories étudiées, que toutes ne sont pas égales face à l’exercice du vote, et que certaines sont loin d’avoir une propension à aller exprimer d’eux-mêmes leurs votes. Par conséquent, l’obligation du droit de vote permet de prévenir une rupture entre assemblée censée être représentative et peuple. Elle permet d’assurer une certaine représentativité en ce qu’elle tend à forcer l’expression de l’avis de toutes les catégories sociales, même s’il est évident qu’une catégorie sociale ne vote pas exclusivement pour un parti bien particulier. L’obligation empêche que l’une d’entre elle, pour une raison quelconque, se détourne (subitement ou progressivement) des isoloirs et que les équilibres sociétaux que contiennent les assemblées soient complètement déphasés. Bien sûr, cette idée à ses détracteurs. D’aucuns prétendent, et l’argument est recevable à mes yeux, qu’assez paradoxalement, obliger un citoyen à l’être en remplissant les devoirs attachés à ce statut serait antidémocratique. Cela dit, qu’est-ce que l’existence même de ce débat dit de notre société ? Des citoyens qui la composent ? L’obligation n’est-elle pas au minimum un mal pour un bien ?

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CONTRE

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LE VOTE OBLIGATOIRE, UNE ABROGATION DÉSIRABLE ? CONTEXTE

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En 1893, la Belgique instaure le vote obligatoire. Celui-ci est une nouveauté sur le plan international. Pour rappel, au cours de l’année 1893, on délaisse le suffrage censitaire pour privilégier le suffrage universel tempéré par le vote plural. Cette évolution est entérinée suite aux nombreuses grèves survenues en 1890, mais surtout suite aux pressions de plusieurs formations politiques, parmi lesquelles : les libéraux progressistes (en opposition au groupe « doctrinaire » du parti), le Parti catholique (qui sera nettement avantagé par ce vote universel mais plural) et le Parti ouvrier belge (instigateur de la grève générale de 1893 pour obtenir le suffrage universel). Par la même occasion, on adopte le vote obligatoire pour contrer l’absentéisme croissant et criant lors des dernières élections sous le suffrage censitaire. Celui-ci s’explique par diverses raisons : de trop longues distances, des opérations électorales relativement lentes et un nombre insuffisant de formations politiques. En optant pour cette solution, le Parti catholique permet d’éviter des éventuels bouleversements politiques en poussant les paysans à voter. Bien entendu, cette obligation a apporté une réponse positive face aux probables intimidations du patronat à l’encontre des ouvriers


souhaitant participer aux élections. Pour autant, au-delà des considérations de lutte contre l’absentéisme ou des éventuelles pressions du patronat, il est le fruit d’un calcul politique mûrement réfléchi.

NOS ARGUMENTS Le vote obligatoire est consacré par l’article 62, aliéna 3 de la Constitution. Cependant, sur le plan du droit positif, cette obligation est affaiblie. En effet, une catégorie d’électeurs n’est pas soumise à cette règle. Les étrangers européens ou noneuropéens et les Belges vivant à l’étranger n’ont aucune obligation s’ils ne se sont pas préalablement inscrits. En outre, la participation aux consultations populaires communales et provinciales n’est pas imposée. En Belgique, à cause de ce vote obligatoire, le taux d’abstentionnisme est régulièrement plus élevé que dans les autres pays. Par ailleurs, suite à l’encombrement des tribunaux et aux délais de prescription, la condamnation prévue n’est plus exécutée depuis 2003. Cette impunité de fait n’engendre aucune répercussion sur le taux de participation.

Actuellement, même si le débat n’est pas enterré, de nombreuses formations politiques rejettent l’idée d’une suppression du vote obligatoire. En effet, cellesci craignent une poussée des extrêmes. Cette idée semble infondée car selon un sondage, paru dans La Libre Belgique en septembre 2016, le Vlaams Belang et le Parti du travail de Belgique ne profiteraient pas nécessairement de cette éventuelle abrogation. Plus encore, les électeurs du Vlaams Belang sont largement favorables à cette suppression. D’après le même sondage, du côté francophone, le Mouvement Réformateur sortirait grand vainqueur contrairement au Parti Socialiste et au Centre Démocrate Humaniste. Par ailleurs, selon le Grand baromètre Le Soir-RTLIpsos-Het Laaste Nieuws-VTM du 9 octobre 2018, près de 40% des Belges seraient enclin à ne plus se rendre aux urnes en cas de suppression du vote obligatoire. Le principal danger de cette éventuelle 15


réforme est la perte de l’électorat davantage défavorisé. Si cet argument ne peut évidemment pas être balayé d’un revers de la main, devons-nous, pour autant, obliger certaines personnes à voter lorsque celles-ci n’ont aucun choix de conviction, en sachant que 50% des Belges sont opposés à ce droit de vote obligatoire ? En tant que libéral, l’obligation ne constitue-t-elle pas une entrave au libre choix des électeurs, d’aller voter ou non ? Afin de susciter l’intérêt pour la chose politique, n’est-il pas plus efficace de privilégier la voie d’une formation civique dans le cadre de l’enseignement secondaire pour mieux appréhender l’organisation institutionnelle et le rôle des hommes/femmes politiques dans notre pays ? Voilà un débat bien ouvert pour quelques années encore…

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POUR LE MAINTIEN DU SPITZENKANDIDAT

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CONTEXTE

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C’est lors des élections européennes de 2014 et suite au souhait du Parlement européen (principal défenseur de ce modèle), que le principe du spitzenkandidat a vu le jour. Le spitzenkandidat, c’est la possibilité donnée à chaque parti européen (PPE, S&D, ALDE…) de choisir, en leur sein, une tête de liste, candidate au poste de présidence de la Commission. Une fois désignés, ces candidats font alors campagne dans les pays membres. Avec ce système, c’est l’électeur qui est censé être gagnant, vu que le parti européen qui recueille le plus de voix/sièges lors des élections voit alors sa tête de liste être élue comme Président de la Commission. En revanche, du point de vue légal, c’est assez flou. De fait, le Traité de Lisbonne ne dit pas qu’il est obligatoire de respecter l’automaticité dans la désignation du spitzenkandidat, mais plutôt que le Président doit être élu suivant le résultat des élections. Par conséquent, le Conseil et le Parlement sont donc condamnés à être plus ou moins sur la même longueur d’ondes. À l’approche des élections européennes de 2019, la Fédération des Étudiants Libéraux souhaite réitérer son soutien au maintien et au renforcement du principe de spitzenkandidat, et ce pour plusieurs raisons.


NOS ARGUMENTS Premièrement, l’Europe telle que nous la connaissons aujourd’hui est souvent pointée du doigt pour son manque de légitimité, et pour son fonctionnement, trop souvent considéré comme inaccessible et complexe par le citoyen lambda. Il est primordial de réinventer l’Europe. Cela passe inévitablement par des mesures telles que le principe du spitzenkandidat. Ce dernier, bien que critiqué par un certain nombre d’États membres, confère pourtant plus de transparence aux élections européennes et un fonctionnement de l’UE plus démocratique. Il permet aux citoyens européens d’avoir une emprise directe, par le biais du vote, sur l’élection du Président de la Commission européenne. Plutôt que de réserver cette prérogative à un nombre restreint de personnes, le principe évoqué rend plus légitime l’action de la Commission européenne. De fait, cette dernière possède alors un mandat plus fort pour prendre les décisions qui s’imposent. Deuxièmement, en tant que défenseurs d’une Union européenne plus intégrée et plus fédérale,

nous voyons en ce principe un moyen d’élever le débat européen et d’éviter que seules les questions nationales ne soient débattues. En effet, les différents partis européens ont l’occasion de proposer de véritables programmes pour l’avenir de l’UE. Ce système leur confère alors une couverture médiatique plus importante (débats télévisés, déplacements dans les pays européens, etc.), ce qui, in fine, bénéficie au citoyen vu que ce dernier sera plus au fait des grands enjeux européens, qu’il se sentira écouté/concerné et qu’il pourra plus facilement identifier les différents candidats à la Présidence. On parlera également de campagne personnifiée. En outre, toujours dans l’idée de rendre l’UE plus démocratique, le principe du spitzenkandidat permet, selon nous, d’insuffler un nouveau souffle aux élections européennes, pour lesquelles les citoyens expriment parfois un désintérêt fort. Contrairement à d’autres, nous nous opposons à tout retour en arrière à ce sujet. Au contraire, nous souhaiterions renforcer le principe du 19


spitzenkandidat. Ceci passe notamment par une plus grande visibilité des candidats à travers les États membres. Évidemment, à lui seul, il ne résoudra pas les nombreux challenges démocratiques de l’UE, mais il donne une direction à suivre… Il doit être suivi et complété par d’autres pratiques telles que les dialogues citoyens, les conventions démocratiques, etc. Gageons que l’UE poursuivra cette voie.

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QUELQUES SPITZENKANDIDATEN

MANFRED WEBER

Parti populaire européen

FRANS TIMMERMANS

BAS EICKHOUT

Groupe des Verts/ALE

Groupe des Verts/ALE

Socialistes & Démocrates

SKA KELLER

JAN ZAHRADIL

Conservateurs et Réformistes européens

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POUR PLUS DE TRANSPARENCE DES LOBBIES CONTEXTE

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Vantés par certains, décriés par d’autres, les lobbies ne laissent personne indifférent. On le perçoit, par exemple, dans le traitement qui est fait des médias, ou même, de la représentation collective qui en résulte. Ainsi, les exemples ne manquent pas s’agissant de l’action « occulte » et « douteuse » des lobbies, qui nous déposséderaient de notre contrôle démocratique. Cela peut aller du délai dans la date du changement d’heure d’hiver aux États-Unis suite aux pressions des lobbies du BBQ et de l’industrie du golf, jusqu’aux actions de FoodDrinkEurope, qui a dépensé plus d’un milliard d’euro en 2010 afin de contrer la mise en place d’étiquettes sur le contenu nutritionnel en Europe. Ceci étant, s’il n’est pas faux que le lobby possède une mauvaise face, il serait aussi important de rappeler que les groupes d’intérêt ne sont pas nécessairement une influence à contrer absolument, et qu’ils peuvent, par le biais de leurs interventions, contribuer à l’amélioration des politiques publiques mises en place. En ce sens, il agit également en tant que « contre-pouvoir » et peut être assimilé à un outil démocratique. Il existe, en effet, des good lobbies que sont par exemple des ONG comme Zero Waste Europe (ZWE) ou la Fondation Européenne du Climat.


NOS ARGUMENTS Vous l’aurez compris, le lobbying est donc à double tranchant. Alors, faut-il interdire les lobbies ? Bien sûr que non ! Il s’agirait ni plus ni moins d’une atteinte aux droits fondamentaux. Mais il est néanmoins fortement nécessaire de les encadrer, de les contrôler et de régulariser l’activité des lobbies, et ce, pour justement « séparer le bon grain de l’ivraie » et veiller à l’intérêt général. En d’autres termes, rendons les lobbies plus transparents, tant au niveau belge qu’européen. Voici, ci-dessous, quelques pistes à suivre. En Belgique, depuis juillet 2018, un registre et un code de conduite, visant la Chambre des Représentants et ses relations avec les lobbyistes, ont été mis en place. Si on peut évidemment saluer cette avancée qui concerne le niveau législatif, nous souhaiterions que le registre en question ne s’applique pas seulement à la Chambre, mais aussi au pouvoir exécutif. En bref, que le registre soit généralisé. Quitte à jouer la transparence, autant que cela ne soit pas à géométrie variable. En Europe, un registre de transparence a bel et bien été lancé en 2011. En revanche, celui-ci ne s’applique qu’au Parlement et à la Commission et est facultatif. En d’autres termes, pour les responsables européens, il est toujours possible de rencontrer un groupe d’intérêt non enregistré. Là aussi, il est indispensable qu’un registre de transparence tripartite (comprenant le Conseil) et obligatoire soit mis en place, car actuellement l’objectif de transparence est bien difficile à atteindre. Il va également sans dire qu’un tel registre, que ce soit en Belgique ou dans l’UE, doit être complet et vérifié, et ce afin de garantir l’efficacité de l’outil et sa totale transparence. Une autre manière de renforcer la transparence des dits lobbies serait d’imposer le principe « d’empreinte législative ». Plus exactement, il s’agirait d’imposer aux institutions européennes et aux différents niveaux de pouvoirs belges que leurs textes normatifs soient accompagnés d’une liste indiquant les groupes d’intérêt qui ont été consultés dans le cadre de la rédaction/préparation dudit texte normatif. Une nouvelle fois, il ne s’agit pas de clouer au pilori les lobbies, mais plutôt de garantir au citoyen toute la transparence de l’élaboration du texte normatif. Cette « empreinte législative » serait, au final, le parfait complément du registre de transparence.

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Avenue de la Toison d’Or, 84 - 86 1060 Bruxelles Tél : +32 (0)2 500 50 55 E-mail : info@etudiantsliberaux.be www.etudiantsliberaux.be facebook.com/etudiantsliberaux @etulib


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