Blue Line #12

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BLUE LINE JUILLET 2022

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SOMMAIR

BLUE LINE

N°12

JUILLET 2022

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30 INTERNATIONAL KMER ROUGE

Le génocide Khmer : la paranoïa d’un régime

DOSSIER LE GOÛT DE L'AVENIR

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Penser l'optimisme La précarité, diminution ou langue de bois ?

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La démocratie ne meurt pas, elle se régénère

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Un partage de rôles pour plus d’épanouissement !

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D’autres fenêtres

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OCCIDENT LIBERTÉS

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FEL LYMEC

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ÉTÉ JEUX

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DÉRISION

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BIBLIOGRAPHIE

Les libertés en Occident

Louis n’a pas encore diné Pause Détente Le syndrome de Calimero ou l'orgasme du cochon


ÉDITO

Chères lectrices, Chers lecteurs,

L’Avenir. Ce demain, beaucoup de jeunes de notre génération en ont peur. Les observateurs et les médias nous le dépeignent comme sombre et sans espoir. L’Avenir serait donc ainsi fait de guerres, d’épidémies, de crises économiques et sociales, de changements climatiques, de famines, de pauvreté… – tous ces problèmes auxquels nous n’avons bien sûr aucune solution. Seulement… est-ce bien le cas ? En effet, les tendances statistiques montrent l’inverse. Jamais dans l’histoire, l’humanité n’a été aussi riche qu’à présent (et ce, malgré le covid). L’éducation fait des progrès à pas de géant de part le monde, la pauvreté est en recul partout – l’extrême pauvreté touchait près de 90% de la population au XIXe siècle, elle ne touche maintenant plus que 10% de cette dernière –, le nombre de famines n’a jamais été aussi faible… Toutes ces évolutions sont les fruits des efforts globaux et individuels en faveur de la Liberté, du progrès et de la démocratie. Elles ne doivent donc pas favoriser un optimisme béat et oisif, mais doivent nous enjoindre à conserver ces acquis et surtout, à pérenniser la dynamique qui les a permis en l’adaptant aux réalités de notre temps. Nous avons le droit d’être positifs, nous avons le droit d’être optimistes, mais nous devons cultiver un optimisme conditionnel car il ne dépend que de nous. C’est un optimisme de combat ! C’est dans cette lignée que ce dernier Blue Line de l’année académique a été pensé. Dans notre dossier central, vous pourrez lire des articles abordant : l’optimisme et sa philosophie ; la régression de la pauvreté ; la façon dont la démocratie se nourrit de ses critiques pour se régénérer ou encore l’évolution du partage des rôles au sein des familles. Hors dossier, vous pourrez profiter d’un portrait du régime brutal des Khmers rouges, du 4e volet d’articles sur les limites modernes de nos libertés, d’un retour sur la participation de notre fédération au dernier congrès du Lymec, et enfin, d’une dérision, sorte de réquisitoire contre les jérémiades. Il s’agit ici de mon dernier Blue Line en tant que Rédacteur en Chef, j’en profite donc pour remercier l’équipe permanente de la rédaction pour son travail tout au long de l’année, ainsi que nos différents rédacteurs pour la qualité de leurs contributions. C’était un vrai plaisir de vous proposer ce magazine. En vous souhaitant une bonne lecture,

Constantin


{ INTERNATIONAL KMER ROUGE }

LE GÉNOCIDE

KHMER

LA PARANOÏA D’UN RÉGIME PAR ARNAUD MARLAIR ET ARTHUR WATILLON

Récemment, le film First They Killed My Father revient sur une des pages les plus sombres du communisme en Asie du Sud-Est. Ce long métrage, réalisé par Angelina Jolie et sorti en 2017, se base sur le récit de Loung Ung, rescapée du génocide khmer lorsqu’elle était enfant. Nous avons donc jugé intéressant de rappeler les événements et les atrocités survenues au Cambodge entre 1975 et 1979 sous le régime brutal des Khmers rouges. Tout d’abord, nous parlerons du contexte politique cambodgien tumultueux qui a permis la mise en place d’un tel régime. Ensuite, il sera question d’évoquer les crimes commis sous le régime de Pol Pot. Et, d’aborder la délicate question des poursuites pénales des instigateurs de cette frénésie meurtrière.

1.LA MISE EN PLACE DU KAMPUCHÉA DÉMOCRATIQUE C’est à la suite de la guerre civile cambodgienne (1967-1975) opposant le gouvernement cambodgien et les Khmers rouges, que ces derniers s’emparent du pouvoir. Dans cet article, lorsque nous évoquons le « gouvernement cambodgien », nous désignons le gouvernement dirigé par le roi Norodom Sihanouk entre 1967 et 1970 ainsi que la République khmère dirigée par Lon Nol à partir de l’éviction du roi en 1970. En reprenant les rênes du pouvoir, Lon Nol a aisément pu trouver

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le soutien des Américains – alors en pleine guerre du Vietnam – en montrant son ardente volonté de débarrasser son pays des groupes communistes (dont les Khmers rouges). Dans les régions qu’ils contrôlent, les Khmers rouges appliquent déjà à petite échelle leur idéologie basée sur l’égalitarisme et le contrôle des populations. Certains villages sont vidés de leur population, les maisons brûlées pour ôter toute envie de retour et les villageois sont emmenés de force dans les forêts. Ce genre d’agissements leur permet d’avoir toujours un nombre suffisant de « partisans » pour poursuivre la guerre contre le régime de Lon Nol. Celui-ci agonise d’ailleurs rapidement ; la population découvre la corruption et les luttes de clan de la nouvelle République


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{ INTERNATIONAL KMER ROUGE }

khmère. De plus, la situation économique ne fait qu’empirer ; les campagnes étant dévastées et l’arrivage de denrées étrangères se raréfiant, les prix n’ont de cesse d’augmenter… Sur le plan militaire, la situation n’est pas meilleure, les troupes d’élite du gouvernement ayant été décimées par les rebelles Khmers rouges. Plus encore, les désertions au sein de l’armée contraignent Lon Nol à recourir au service militaire obligatoire… La situation tournant finalement à l’avantage des Khmers rouges, Lon Nol s’exile aux États-Unis le 1er avril 1975. Seize jours plus tard, les troupes qui défendent encore la capitale laissent finalement entrer les rebelles dans la ville. Cependant, l’espoir d’unité nationale s’estompera dès les premières mesures des nouveaux maîtres du pays… Les exactions commencent dès la prise de la capitale. Les villes, et notamment Phnom Penh, sont vidées de leurs habitants, les populations drainées vers les campagnes… Les Khmers rouges et le « Parti communiste du Kampuchéa », également surnommé l’Angkar (trad. « L’organisation ») ont désormais l'œil sur tout…

2. UN GÉNOCIDE : LES CRIMES DU RÉGIME KHMER ROUGE L’objectif du régime des Khmers rouges est avant tout d’ordre

sociétal : édifier une société communautaire, égalitariste, fondée sur un retour à la civilisation agricole. Les commodités modernes (machines à coudre, bicyclettes, radios…) sont abandonnées et interdites. La monnaie est éliminée. Toute propriété privée, jusqu’aux enfants séparés de leurs parents, est abolie. Pour ce faire, il faut créer un homme nouveau, calqué sur le modèle du « simple paysan ». Une politique eugéniste se met en place, distinguant trois catégories au sein de la population cambodgienne. Tout d’abord, le « vieux peuple », composé de paysans ayant su rester purs, naturellement compatibles avec l’idéologie du nouveau régime. Ceux-ci servent d’appui à la Révolution et forment la classe des dirigeants et des guerriers. Ensuite, vient le « peuple nouveau ». Ce sont d’anciens ouvriers et paysans plus aisés, qu’il convient de rééduquer. Cet apprentissage passe par la dispersion forcée de dizaines de milliers de personnes à travers les campagnes. Femmes, vieillards ou enfants à partir de 5 ans n’échappent pas aux travaux forcés harassants de dix à douze heures par jour. Enfin, le « sous-peuple », constitué de supposés partisans du régime de Lon Nol, mais surtout des professions libérales : cadres, intellectuels, médecins, enseignants. Ceux-ci ne peuvent être sauvés, car gangrenés par le vice capitaliste et libéral. Ils sont appelés à disparaître via les travaux forcés ou des exécutions sans jugement. Le simple fait de porter des lunettes est considéré comme suspect ; révélateur d’un penchant intellectuel, c’est un acte condamnable en soi. Après sa victoire de 1975, le Kampuchea démocratique se coupe totalement du monde, rompant tout lien diplomatique avec les pays étrangers (à commencer par

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{ INTERNATIONALE KMER ROUGE }

les territoires frontaliers). Les ressortissants étrangers sont expulsés de force, certains sont tués. Seuls quelques conseillers sont encore tolérés sur le territoire khmer, tous issus de pays eux-mêmes communistes. Isolé, le régime met en place un système de terreur, nécrosé par une paranoïa généralisée. La grande épuration peut commencer. Le pays s’imperméabilise, condamnant à mort toute personne désireuse de quitter le pays. La presse, les postes de radio ou de télécommunication sont interdits hormis, bien sûr, pour les cadres du régime. Toute parole la plus anodine ou pensée la plus intime est considérée comme politique. Il s’agit, pour survivre, de se conformer à l’orthodoxie du régime. Selon les estimations les plus vraisemblables, en l’espace de quatre années seulement, le régime Khmer a causé la mort de 17 à 30 % de la population, soit entre 1,3 et 2,3 millions de victimes. L’usage des munitions étant réservé à l’armée, les ennemis de l’État sont matraqués à la crosse des fusils dans les killing fields, puis jetés (souvent encore en vie) dans les fosses communes. Plusieurs centres d’interrogatoires et de mises à mort sont installés, dont le tristement célèbre camp S-21 de Phnom Penh, où certains gardiens n’ont parfois que 16 ans.

3. CRIMES CONTRE L’HUMANITÉ : UNE APATHIE GÉNÉRALE Comble de l’histoire, en janvier 1979, ce sont les troupes du Vietnam communiste qui renversent le régime des Khmers rouges. Le Cambodge, après quatre années de terreur imposée par l’Angkar, change de régime et devient… la République populaire du Kampuchéa. Le gouvernement mis en place par les troupes d’occupation sera, en partie,

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composé d’anciens Khmers rouges ayant fait défection. Révélées, les atrocités créent l’émoi au sein de la population et à l’étranger. Pour les victimes, l’heure des comptes a sonné, il est temps de traduire les responsables de cette terreur devant la justice. Cependant, non reconnu par la plupart des pays étrangers, le nouveau régime ne parvient pas à traduire les chefs Khmer rouges devant la justice internationale. En effet, alors en pleine guerre froide, l’invasion du Cambodge par les troupes vietnamiennes est discréditée par une grande partie de la communauté internationale. Le bloc de l’Ouest, principalement, soupçonne un rapprochement entre l’URSS et le Viêtnam. Ce déni de légitimité du nouveau gouvernement ralentit les procédures, permettant même aux Khmers rouges de représenter le Cambodge au sein de l’ONU jusqu’en 1989. Peu de responsables de ces crimes ont été inquiétés par la justice. La plupart des condamnés se révèlent être davantage des exécutants que de véritables bourreaux. La lenteur de la justice et plusieurs manœuvres politiques ont obligé la coexistence entre les victimes et les anciens criminels, ne rendant que plus difficiles la sortie du traumatisme, la réconciliation et la reconstruction de la société cambodgienne. Ainsi, aucune institution internationale n’appuiera les efforts du pays afin de juger les dirigeants khmers, alors même que les massacres de communautés villageoises et de minorités ethniques continueront dans les régions restées sous leur contrôle. Ce n’est qu’en 2007 que cinq des plus grands responsables de crimes du régime khmer rouge seront condamnés pour crimes contre l’humanité. Il faudra attendre 2018, soit près de quarante après les faits, pour que les deux anciens dirigeants khmers rouges encore en vie soient reconnus coupables de génocide par les chambres extraordinaires des tribunaux cambodgiens. Pol Pot, pourtant le principal instigateur du génocide, meurt en 1998 sans avoir été jugé. 


DOSSIER LE GOÛT DE L'AVENIR La guerre est à nouveau aux portes de l’Europe. Nous sortons à peine d’une longue pandémie qui a bouleversé nos vies, et à présent, nous faisons face à un mur inflatoire qui ne cesse de se hisser. L’espoir appartient désormais au passé et il ne reste à la jeunesse des années 2020 que la résignation et la contemplation d’un monde qui brule et agonise. Ne nous parlez point d’optimisme, la collapsologie est déjà en marche. Notre seule issue est de se serrer les coudes pour survivre, ce serait déjà bien... Oui, mais ! Ce postulat qui est si cher à nos concurrents extrémistes doit être selon nous davantage nuancé. Bien que nous ne négligions pas les inégalités et les problèmes de notre temps qui sont bien réels, nous estimons qu’énormément de choses évoluent dans la bonne direction ou, a minima, ne se dégradent pas aussi vite qu’on le prétend. Nous pouvons en effet observer de nombreux progrès, que ce soit au niveau de l’égalité des genres dans notre société, de notre foi en la démocratie, de la diminution de la pauvreté extrême. Face à des discours négatifs, il est primordial de pointer ce qui est positif. Nos rédacteurs vous feront part dans ce dossier central des observations qu’ils ont pu faire sur des sujets divers et variés. La réflexion et l’optimise sont nos meilleures armes face à des discours extrémistes qui pullulent parmi les jeunes. C’est important et c’est également dans nos valeurs de dire aussi que certaines choses vont bien et nous avons décidé de vous les souligner.

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{ DOSSIER OPTIMISME }

PENSER L’OPTIMISME

E M S I M I T OP PAR LOUIS MARESCHAL

Qu’il s’agisse du jeune ou du moins jeune, du sourd-muet ou de l’aveugle, du savant ou du sot, du sage ou du fougueux, il est un fait indéniable que tout le monde pense. Cogito ergo sum comme l’a si bien dit Descartes. La faculté d’être capable de penser, de « cogiter » et surtout de réfléchir de manière introspective, c’est d’ailleurs l’une des principales distinctions entre l’Humain et l’animal. Mais au fond, qu’est-ce que penser ? Y avez-vous déjà songé ?

La pensée, consiste en l’exercice d’une activité rationnelle. L’esprit qui pense prend soin de dire non aux préjugés, avant qu’il ne se soit instruit, avant qu’il n’ait appris. La pensée comme démarche philosophique se caractérise par le souci de se référer à une réflexion lucide, un véritable savoir revenant sur lui-même en totale transparence par rapport au cogito. En résumé et dans un vocable peut-être plus spontané aussi, penser c’est d’abord et avant tout « mettre des mots sur des maux ». D’emblée, l’on peut opérer une distinction grossière entre les pensées dites optimistes et celles qualifiées de pessimistes. Les premières par nature positives procurent le bonheur tandis que les secondes, négatives de surcroît, induisent sinon l’angoisse, à tout le moins une certaine affliction. L’épithète « optimiste » ou « pessimiste » qui sert à qualifier l’attitude d’un individu, relève moins d’une condition que d’un état d’esprit. À ce stade, l’état présuppose qu’un regard soit posé tant sur le monde que sur soi-même au travers des fameuses « fenêtres de l’âme » comme l’a dit Shakespeare. Ces yeux qui démontrent que les relations entre l’individu et le monde sont liées, qu’elles résultent d’une influence mutuelle et presque symétrique. Le sentiment d’optimisme ou de pessimisme des

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sociétés occidentalisées n’est certainement pas déterminé par les mêmes causes que celui des dernières tribus isolées de la jungle équatoriale. L’incidence médiatique, laquelle donne l’impression non plus de rendre compte de l’état du monde tel qu’il est mais du monde tel qu’il ne va pas bien, n’est sans doute pas étrangère au pessimisme des civilisations modernes. Les populations reculées quant à elles, semblent être en mesure de puiser dans la position des astres, l’heure d’une naissance ou encore la qualité d’une récolte, une interprétation de nature suffisante pour jeter les bases de leur propre optimisme. En général, au cours de son existence l’individu se retrouve pris au dépourvu par les perspectives d’avenir, acculé face à des questions qui demeurent tantôt confuses, tantôt abstraites et souvent sans réponse. Pourtant en parallèle, il subsiste aussi ordinairement une pulsion de vie. Une foi presque inaltérable en l’espoir d’assister à des jours meilleurs et autres « lendemains qui chantent ». Dès lors, en étant confronté à un dilemme qui augmente considérablement le champ d’application à défaut de rendre possible une définition concise, comment continuer à envisager la vie avec optimisme ? Une occasion toute trouvée pour s’enquérir de quelques pistes de réponse auprès de deux philosophes français.


VOLTAIRE, réaliste et… libéral ! Avec Candide ou l’optimisme, Voltaire signe assurément l’œuvre la plus paradigmatique de la philosophie des Lumières. Il s’agit d’une réflexion monumentale, qui couvre toute une série de sujets philosophiques divers et variés : bonheur et fatalité, liberté politique et tyrannie, religion et fanatisme, connaissance et obscurantisme, etc. Tant de questions qui demeurent encore d’actualité aujourd’hui ! Avant toute chose, prenons d’ailleurs soin de préciser que voltaire est un libéral. L’occasion de réaffirmer quels sont ceux qui dans l’histoire, se préoccupent de l’optimisme et du réalisme… Loin de moi l’idée de vouloir indiquer qu’il n’y a que la gauche qui fasse choux gras du pessimisme ; je rappelle tout de même que gauche se traduit en italien : sinistra, ce qui convenons-en, oriente tout de même les hypothèses de réponse. Blague à part, que le lecteur distrait ne s’y méprenne pas ; le véritable thème sous-jacent comme objectif ultime des Lumières auquel Voltaire invite à réfléchir est le bonheur hic et nunc. Par antagonisme avec les philosophes de la Renaissance – lesquels ancrés dans la tradition chrétienne promettent le bonheur après la mort –, la raison d’être des Lumières est d’offrir aux hommes et aux femmes les conditions pour accéder à un bonheur immédiat. Les malheureuses aventures du héros Candide s’inscrivent ainsi dans une authentique poursuite du bonheur en dépit des obstacles du destin, de la folie et de la déraison des hommes. Pour l’auteur de Zadig ou la Destinée, l’optimisme n’est que niaiserie et faribole. Dans Candide ou l’optimisme, le personnage de Pangloss est en réalité une parfaite caricature de Leibniz, le précurseur de la pensée optimiste. À la manière d’un syllogisme, l'optimisme de Pangloss tient ainsi : « Dieu est parfait et Dieu a créé le monde, or un être parfait créerait un monde parfait donc le monde est parfait ». À supposer que Dieu existe bel et bien, pareil paralogisme induit l’idée qu’un être parfait créerait tout ce qui pourrait être créé et que donc tout ce qui pourrait exister existe. C’est ainsi que chemin faisant, l’on en arrive à la conclusion que ce monde est le meilleur des mondes possibles. Le philosophe Voltaire dénonce au travers de la désillusion

vécue par le héros Candide, l’optimisme comme une manie de dire que les choses sont bien alors qu’il n’en est rien. En d’autres termes, il s’agit d’un déni de la réalité car le monde parfait n’est qu’une utopie. Faute de mieux, l’homme rationnel doit se contenter du réalisme et du monde tel qu’il est. Le réalisme doit au bout du compte, prévaloir sur la croyance en une société harmonieuse, qui n’existe pas et ne peut exister. Cette remise en question métaphysique bien amère, l’auteur la doit au séisme de Lisbonne de 1755 lors duquel près de 70 000 personnes perdent la vie. En mal de réponse face à l’horreur de cette catastrophe, Voltaire doute. L’auteur de Candide ou l’optimisme se demande si Dieu est réellement bon et s’il est vraiment aussi omnipotent qu’il ne semble le laisser croire. Finalement, en anticlérical mais déiste, Voltaire se tourne vers Dieu non pas pour justifier les évènements du monde mais au contraire, parce que celui-ci agit comme un architecte qui conçoit et puis livre ses créatures à elles-mêmes. Le destin, le bien, le mal, le bonheur et le malheur sont fluides, ils sont entre les mains des hommes.

Et si le ciel était vide ? Les Propos d’ALAIN Pour certains esprits cartésiens dont la propension à croire au « grand ordonnateur » est moins évidente, Dieu comme seule explication du bonheur peut s’avérer être une bien maigre consolation. Quelques philosophes se sont bien sûr départis de toute considération divine, tel est le cas d’Alain lequel développe soit dit en passant, une approche nuancée à l’endroit de l’optimisme. >>

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{ DOSSIER OPTIMISME }

La philosophie d’Alain consiste moins en une philosophie de système qu’en une véritable méthode intellectuelle. À l’instar de Descartes, son maître à penser, Alain distingue la conscience du psychisme. Il fustige de la sorte l’inconscient, ce mythe dangereux issu de Freud et selon lequel existeraient pour l’individu, des représentations psychiques ignorantes d’elles-mêmes et imperceptibles. Selon l’auteur des Propos, toute la morale de l’être consiste à « se savoir esprit » et à ce titre, « obligé absolument ». Il faut entendre par là le fait de pouvoir accéder à l’universalité caractéristique du devoir et commune en droit à tous les esprits. Alain se réfère à la morale de Kant, par laquelle le philosophe allemand définit le devoir comme une conduite dotée d’un caractère d’obligation et d’universalité : « tout le monde devrait penser et agir comme je le décide et comme je le fais moi-même ». Lors de cet exercice moral qui a trait à la pensée et au devoir, l’individu expérimente sa liberté. À ce stade, Alain en tant que philosophe de la liberté, rejette le fatalisme. Il refuse d’admettre qu’il puisse exister une doctrine affirmant que toute chose est soumise à un destin irrévocable. Au demeurant, Alain pose un regard positif sur la société et se considère comme un être optimiste. Selon lui, « le pessimisme est d’humeur ; l’optimisme est de volonté » ce qui atteste de l’importance que revêt la liberté dans la façon d’aborder les choses. Il va jusqu’à considérer que l'hypocrisie propre à la société est positive en ce qu'elle permet à tous d'en extraire du bien-être. L’auteur des Libres propos relativise : « (…) la vie de société, les visites, les cérémonies et les fêtes sont toujours aimées ; c’est une occasion de mimer le bonheur ; et ce genre de comédie nous délivre certainement de la tragédie ; ce qui n’est pas peu ». Aussi, par la grâce de la philosophie, l’individu apprend à réfléchir, à penser rationnellement en évitant préjugés et autres idées préconçues et parvient ainsi à accéder à ce qui peut s’apparenter à sa rédemption. La croyance religieuse est un parangon de pensée irrationnelle. Dans Les Saisons de l'esprit, Alain affirme : « Le propre d'une religion est de n'être ni raisonnable ni croyable ; c'est un remède de l'imagination pour des maux d'imagination. Or, se croire fanatique est la source de tous les maux humains ; car on ne mesure point le croire, on s'y jette, on s'y enferme, et jusqu'à ce point extrême de folie où l'on enseigne qu'il est bon de croire aveuglément. C'est toujours religion ; et religion, par le poids même, descend à superstition ».

Alors, impossible d’être optimiste ? SO (DON’T) HELP ME GOD On l’aura compris, sur la question de l’optimisme, il importe de dénoncer les vendeurs de rêve mais quelles sont les solutions pour orienter son existence vers le plus de bonheur possible ? Pour sa petite affaire privée, l’individu quant à lui doit arriver à faire le tri parmi toutes choses, entre celles qui méritent notre attention, celles sur lesquelles nos choix et actions ont une influence et celles où nous sommes impuissants. Le fait est que la capacité de jugement que donne la perception doit non pas être bâtie à partir d'un système théorique mais être en préhension directe avec la réalité du monde. Une invitation à mettre les idéaux de côté pour se concentrer sur le réel. Est-ce un manque cruel de réalisme que d’avoir abandonné l’Ukraine à un dessein funeste et presque chaotique alors que le président russe ne prenait même plus soin de cacher ses intentions belliqueuses depuis des années ! Est-ce faire preuve d’irrationalité crasse que de constater avec effroi les ravages de l’industrialisation humaine sur l’écosystème ! Est-ce se borner d’illusions que de se croire immortels et ainsi refuser de consentir à l’ordre du monde ! Ni plus ni moins qu’un manque criant d’adhésion au réel, purement et simplement. 

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L'École d'Athènes est une fresque décorant la salle appelée Camera della Segnatura au Vatican à Rome. Cette pièce servait alors de bibliothèque privée au pape. Elle a été peinte de 1509 à 1512, par Raphaël à la demande du pape Jules II.


{ DOSSIER OPTIMISME }

LA PRÉCARITÉ,

DIMINUTION OU LANGUE DE BOIS ? PAR DIEGO D’ADDATO

1,9 $ soit près de 0,95 €. Pourriez-vous vivre avec une telle somme par jour ? Entre 1990 et 2015, on relève que la quantité de personnes vivant sous le seuil international de pauvreté a considérablement baissé, de presque 36% à 10%. Certes, cela fait toujours environ 730 millions de personnes, soit 66 fois la population de notre pays, qui doivent continuer à vivre ou plutôt survivre avec si peu. Bien entendu cela demeure élevé et des efforts restent à faire.

De nombreux organismes continuent à œuvrer dans l’intention de réduire ce chiffre chaque année et ils méritent d’être salués pour le travail qu’ils ont d’ores et déjà fait jusqu’ici. Cette situation de pauvreté est évidemment bien plus ancrée dans les pays du Tiers-monde ou certains autres grands états connus pour leurs conditions de travail déplorables, où la population ne bénéficie pas du confort matériel, sanitaire ou légal que nous avons en Occident. La pauvreté ne s'exprime pas seulement par le nombre écrit sur notre fiche de paie. En effet, comme le redéfinit le gouvernement de la Fédération Wallonie-Bruxelles, elle passe aussi par une dimension matérielle, immatérielle, relationnelle ou par les ressources dites symboliques. Le concept de pauvreté est multidimensionnel et interconnecté puisqu’une quantité importante de causes externes ou internes peuvent impacter les conditions de vie de la population.

D’un mot, un exemple avec la crise militaire qui a pris cours à la fin du mois de février de cette année opposant l’Ukraine et la Russie. Ce conflit entre deux pays, pourtant à des milliers de kilomètres de nous, entraîne une hausse des prix sur les marchés de l'énergie, des métaux et des produits agricoles. Le journal français La Tribune annonce même que cette hausse des prix devrait se prolonger jusqu’en 2024. Cette crise aux frontières de l’Europe nous replonge dans un climat tendu sur cette question de la précarité. Quelque temps après avoir assisté aux manifestations des gilets jaunes qui luttaient pour le pouvoir d’achat et contre l’augmentation du prix des carburants, nous voyons les prix à la pompe s’envoler bien plus loin qu’ils ne l’avaient jamais fait. Quand on pense qu’il y a 20 ans, le prix du diesel était à 0,80 €/L, on pourrait effectivement se dire que « c’était mieux

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{ DOSSIER OPTIMISME }

avant ». Cependant au cours des dernières années, tout ne s’est pas complètement aggravé, restons positif. On constate que la misère dans le monde a diminué de plus de 25%, que le salaire moyen d’un Belge a augmenté de plus de 150%, que le taux d’éducation pour l’année 2019-2020 était de quasiment 100% pour les enfants âgés entre 7 et 17 ans et supérieur à 90% pour ceux âgés entre 3 et 6 ans. Selon un article du journal Le Soir, ce taux d’éducation influerait directement sur l’espérance de vie de nos concitoyens. Les Belges ayant un diplôme vivraient jusqu’entre 18 à 25 ans de plus que les autres. Sur le plan international, de nombreux pays ne parviennent pas à sortir de la précarité. C’est pourquoi l’Organisation des Nations Unies (NU) poursuit son travail. L’élimination de la pauvreté dans le monde est le premier objectif du Programme de Développement Durable à l’horizon 2030. Les objectifs du Développement Durable des NU visent notamment à introduire des droits plus précis pour les populations des pays en voie de développement comme l’accès à la propriété foncière, aux ressources économiques de base, au contrôle des terres, etc. Symboliquement, l’assemblée générale des NU a fixé la date du 17 octobre comme étant la journée internationale pour l’élimination de la pauvreté.

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À l'échelle de notre pays aussi des mesures sont prises pour apporter du soutien aux nations qui en ont besoin. L’Aide Publique au Développement (APD) est le mécanisme fédéral belge qui se charge de contribuer à l’aide au développement dans les pays en difficulté. Une norme, un objectif de 0,7% du revenu national brut (RNB) est fixé et nous essayons de contribuer à hauteur de nos moyens à l’amélioration des conditions de vie à l’étranger. En 2020, la Belgique a financé pour près de 2 milliards d’euros l’APD, ce qui représente 0,46% du RNB, soit bien moins que la norme fixée. La précarité n’est pas encore éradiquée, l’enseignement de qualité pas encore accessible pour tous les jeunes, les denrées essentielles encore trop rares dans certaines régions de la planète et l’argent abonde parfois à outrance dans les poches des riches. Nous avons la responsabilité d’amener cette précarité au minimum, de faire en sorte qu’à l’horizon 2030 elle soit arrivée à son seuil le plus bas. Nous avons le devoir d'œuvrer intelligemment pour redresser la situation de la planète, pas avec des plans miraculeux et irréalisables mais avec pragmatisme. Nous avons commencé et nous continuerons. « Car dans l’homme jamais l’espérance n’est vaine. » (Victor Hugo) 


{ DOSSIER OPTIMISME }

NON !

! N O N

LA DÉMOCRATIE NE MEURT PAS,

ELLE SE RÉGÉNÈRE ! PAR DEVILLERS NOHA

Alors qu’un quart des Belges souhaitent sa fin, que la guerre fait rage à nos portes, la démocratie semble plus que jamais menacée. Il serait aisé, même, d’hypostasier qu’elle a fait « son temps ». Nonobstant, il semble que nous vivions aujourd’hui le moment paroxystique de son renouveau. Une révolution aux airs d’obligation.

EN MOUVEMENT PERPÉTUEL ? « Pour prévoir l'avenir, il faut connaître le passé, car les événements de ce monde ont en tout temps des liens aux temps qui les ont précédés » disait Machiavel. Ainsi, il nous semble essentiel de se replonger dans ce qu’était la conjoncture de 1830 afin de tenter de comprendre les problèmes que l’on peut rencontrer aujourd’hui. En outre, on pourrait facilement croire que le système que l’on connait de nos jours n’est que la perpétuation de ce qui fut convenu lors de la création de notre pays. Toutefois, et heureusement, cette assertion est tout ce qu’il y a de plus faux, notre démocratie belge qui soufflera bientôt sa 200e bougie, n’a eu de cesse de se réinventer. Ainsi, revenons sur les grandes étapes qui nous ont menés jusqu’ici.

De l’aristocratie à la démocratie

Il est important de saisir que nos founding fathers belges n’avaient point la démocratie en tête lors de la conception de nos institutions. Tout du contraire même, puisque celle-ci avait encore mauvaise presse. En effet, pour paraphraser Xénophon, la loi qu’impose la majorité démocratique ne serait que violence, démocratie équivaudrait à tyrannie du peuple. De sorte que dès que l’indépendance de notre petit pays fut déclarée, celui-ci choisit de s’inscrire plutôt dans une tendance aristocratique ou tout du moins élective. Ce choix sera décisif attendu que par la suite, les actions

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{ DOSSIER OPTIMISME }

politiques n’auront de cesse de tenter de pousser cette aristocratie le plus possible vers sa cousine démocrate. Partant, plusieurs moments marqueront ce métissage. Pour commencer, la révision constitutionnelle de 1893, qui établira le suffrage universel avec vote plural ainsi que le vote obligatoire, caractéristique singulière de notre modèle. Par suite, la révision constitutionnelle de 1921, qui, elle, mettra en place le suffrage universel pur (tout du moins masculin, puisqu’il faudra encore attendre La Loi du 27 mars 1948 pour accorder ce droit également aux femmes) et la représentation proportionnelle. Conséquemment, nous pouvons considérer ces deux actes législatifs comme l’avènement concret de la démocratie chez nous. Néanmoins, cela ne marquait pas la fin des tourments pour ce système dont l’héritage est lourd.

Vers toujours plus de participation ?

Par conséquent, on est en droit de se demander si notre régime issu de 1830, et ce, malgré ses innovations, est compatible avec la démocratie. Cette interrogation semble d’ailleurs prendre d’autant plus sens au sein du climat contemporain de perte de confiance en l’institution politique qu’est le nôtre. Eh bien, nous avançons, ici, que l’optimisme est de mise. En effet, nous avons pu esquisser l’évolution qu’a toujours connue notre cadre institutionnel. Une fuite en avant démocrate qui, justement, connait une accélération sans précédent de nos jours.

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DES INITIATIVES QUI SE DÉMULTIPLIENT La démocratie belge connait une réelle effervescence en la matière ces derniers temps. Des initiatives intégrant toujours plus le citoyen fleurissent dans toutes nos institutions. Avant toute chose, l’outil le plus ancien de participation citoyenne, c’est-à-dire le droit de pétition inscrit à l’article 28 de notre constitution, connait une vraie métamorphose. Au niveau fédéral d’abord, depuis 2019, une pétition récoltant 25 000 signatures permet désormais de mettre à l’agenda une proposition de loi et donc d’astreindre les parlementaires à une prise en considération certaine. En outre, cette initiative citoyenne à part entière peut mêmement dorénavant être soumise par voie électronique. Les régions ont également adopté des mesures similaires en la matière, évidemment adaptées à leurs démographies respectives. Par exemple, seulement mille signatures sont nécessaires pour qu’une pétition soit entendue au Parlement wallon.

Les Mini-Publics

Cependant, les projets les plus enthousiasmants sont sans aucun doute les assemblées citoyennes. Cellesci se démultiplient depuis vingt-ans (38 entre 2001 et 2018) recouvrant des formes des fois bien différentes. Toutefois, certains points communs sont inaliénables selon la dichotomie du CRISP, le tirage au sort nécessaire


{ DOSSIER OPTIMISME }

à leurs compositions et le caractère délibératif de leurs actions. De surcroit, nous avons décidé dans le présent article de nous concentrer sur une des variantes les plus prometteuses qu’on pu prendre ces mini-publics : les commissions délibératives.

Les Commissions délibératives

Cette mouture de panel citoyen prend racine dans les institutions bruxelloises et plus précisément la COCOF et la COCOM. Les commissions délibératives consistent en la réunion entre parlementaires et simples citoyens à hauteur d’un quart, trois quarts. Celles-ci sont instiguées soit par le parlementaire soit par le citoyen lui-même par le biais de suggestions (un processus qui nécessite mille signatures avant de pouvoir être considéré). La thématique est ensuite débattue et des recommandations qui feront l’objet d’un débat parlementaire sont établies. De sorte que ce processus puisse aboutir à des actes législatifs concrets. De plus, il est intéressant de noter que dans cette version de mini-public, le suivi parlementaire est obligatoire et qu’un état de non-suite doit être justifié. Si bien que ce système nous apparait plus que séduisant, pour nous, il ne fait nul doute, d’ailleurs, qu’il s’étendra au reste du pays. En effet, le syncrétisme entre considérations citoyennes et expertise parlementaire qu’il représente, nous apparait comme plus qu’engageant. Nonobstant, est-ce pour autant la panacée ?

CONCLUSION, UN AVENIR RADIEUX MAIS HOULEUX Il est clair que les prodromes d’une crise institutionnelle sont là. Néanmoins, nous ne pouvons nous résoudre à abandonner la démocratie au seul motif d’une conjoncture singulière complexe. En effet, les solutions sont là. Nous n'avons pu, dans cet article, que réaliser une ébauche de tous les mécanismes disponibles à dessein d’impliquer la population, néanmoins, il en existe une myriade. Certes, les efforts à fournir seront massifs. Toutefois, comme le disait Nicolas Sarkozy : « C’est ça le sens de la politique, voir large, voir grand, voir pour demain. » 

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{ DOSSIER OPTIMISME }

UN PARTAGE DE RÔLES POUR PLUS

D’ÉPANOUISSEMENT ! PAR LINA DAIF

En ce mois de juin ensoleillé, je voudrais mettre en lumière les papas et principalement l’évolution de leur place dans la société. Nous constatons de légères évolutions en Belgique quant au congé de paternité et à l’instinct paternel. Les papas d’aujourd’hui sont des héros de l’ombre qui gèrent leurs foyers. Ils peuvent être célibataires ou en couple, hétérosexuels ou homosexuels, présents au quotidien ou parfois en voyage, jonglant entre vie professionnelle et personnelle. La paternité se décline de tellement de façons qu’il est difficile de la définir. Évidemment, nous n’oublions pas nos héroïnes de tous les jours : les femmes, qui, sans leur émancipation, n’auraient pas permis aux hommes de redéfinir leur place. Grâce à un meilleur partage des tâches entre partenaires, beaucoup d’entre elles reprennent les études, bâtissent une carrière ou simplement poursuivent leurs rêves.

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Le goût de l’avenir pour certains se traduit par le goût de la paternité. La présence du père auprès de son enfant dès la naissance est importante pour certains. Cela leur permet de créer un lien et de connaître dès le tout début les joies de la paternité. Les papas bénéficient aujourd’hui de quinze jours de congé depuis le 1er janvier 2021. Il a fallu parcourir un long chemin pour arriver à ces deux semaines. Tout commence en 1978, le congé de paternité est alors appelé « congé de circonstance ». Les hommes peuvent manquer trois jours de travail sans préjudice financier dans les douze jours qui suivent la naissance. Le 1er juillet 2002, le congé de paternité passe de trois à dix jours. Ces jours peuvent être pris dans les trente jours à partir de la date d’accouchement. Les trois premiers jours sont entièrement payés par l’employeur et les autres par la mutuelle. Le revenu de l’allocation dépend du salaire. Sept ans plus tard, la durée durant laquelle les congés peuvent être déposés passe à quatre mois. Le 20 mai 2011, le concept même de paternité évolue. Le statut de père n’est plus seulement défini par le sang et apparaît le congé de coparentalité. Le principe de ce congé est le même que celui de paternité sauf qu’il faut remplir certaines conditions. Le co-parent doit avoir un lien clair avec la personne à l’égard de laquelle le lien de filiation est établi : il doit soit être marié soit cohabiter légalement, ou depuis plus de trois ans, avec celle-ci. C’est un long chemin dont les étapes évoluent positivement. En effet, bientôt, toute personne qui deviendra parent à partir du 1er janvier 2023 bénéficiera de vingt jours de congé. Tandis que le mot « paternité » voit son sens s’élargir, on voit également émerger la notion « d’instinct paternel ». De manière générale, il se définit comme un sentiment inné presque animal poussant le père à prendre soin du bébé. Des études en éthologie et sociobiologie suggèrent que la testostérone joue un rôle de médiateur entre l'accouplement et la parentalité chez l'homme, comme cela a été observé chez d'autres espèces où les pères s'occupent des jeunes. Passer trois à quatre heures avec son nouveau-né diminuerait le taux


{ DOSSIER OPTIMISME }

de testostérone chez l’homme ; par conséquent, l’organisme s’adapterait émotionnellement, psychologiquement et physiquement. À l’arrivée du bébé, d’autres changements hormonaux s’opèrent : les jeunes papas développeraient de la prolactine, une hormone intervenant dans la production du lait maternel, et subiraient une augmentation du cortisol associé à l’attachement d’une femme à son enfant. Tous ces changements aident les hommes à endosser le rôle de la paternité. Ils passent plus de temps avec leur enfant, ce qui renforce l’attachement, allant jusqu’à avoir une facilité pour reconnaître ses cris, ses pleurs… Les congés de paternité permettent aux jeunes pères de développer cet instinct paternel. En outre, les jeunes mères, étant davantage accompagnées par leur partenaire, sont moins susceptibles de souffrir de dépression post-partum ou de surcharge mentale. Elles se sentent mieux et prennent moins de jours d’arrêt maladie. Les mentalités évoluent : alors que les congés de paternité et de co-parentalité sont de plus en plus répandus, le rôle des hommes devient plus important au sein du foyer et dans l’éducation des enfants. Beaucoup prennent conscience de l’aide qu’ils peuvent apporter, ils participent aux tâches ménagères et s’impliquent davantage dans la vie de famille. La progression de la place des hommes au sein du foyer permet d’approcher une égalité parentale et d’améliorer la qualité de vie de nombreuses femmes. Dans le milieu professionnel, les femmes aidées par leur partenaire sont plus susceptibles de développer une carrière, elles peuvent se permettre certains déplacements et des horaires de travail plus conséquents. Ainsi, les hommes prennent plus de place dans le milieu privé et les femmes dans le monde du travail amenant à la valorisation des compétences interpersonnelles. En conclusion, les changements de ces dernières années nous les devons indirectement aux femmes et à leur envie de liberté. Bien que je sois totalement consciente que ces changements ne s’illustrent pas chez tout le monde. Il existe en effet toujours des pères absents, moins ou différemment impliqués dans l’éducation. Mais, nous constatons malgré tout une évolution des mentalités, des lois. Des petites avancées qui ont des effets considérables à toutes les échelles. Ce n’est que le début, d’autres évolutions positives se profilent à l’horizon car il n’y a rien de plus constant que le changement. 

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{ DOSSIER OPTIMISME }

D’AUTRES FENÊTRES… PAR CONSTANTIN DECHAMPS

Pour poursuivre notre réflexion sur ce que l’avenir nous réserve, voici quelques fenêtres, ouvertes sur les grandes tendances de l’évolution de l’histoire, afin d’éclairer demain pour que nous puissions en retrouver le goût !

LIVRE

Factfulness

de Hans Rosling, Flammarion, 2018. Dans son ouvrage publié à titre posthume, le professeur de santé publique Hans Rosling, rendu célèbre par ses nombreuses interventions lors des conférences TED, nous énonces « dix raisons pour lesquelles nous avons tort concernant le monde et pourquoi il va mieux que nous ne le pensons ». Tout au long de son livre, il s’attache à démonter, une par une, ces raisons. La tendance à dramatiser les différences, à ne voir que les extrêmes alors que tout dépend de la perspective, à réagir dans l’urgence… En mettant tous ces gap en lumière, on se rend compte que l’on perd de vue l’essentiel : tous les progrès qui ont eu lieu dans le monde ces cinquante dernières années.

Si vous pensez que notre planète est au bord de la surpopulation, que l’accès à l’éducation n’a pas évolué ou bien que les inégalités sociales augmentent partout alors n’hésitez pas à lire cet ouvrage et soyez prêts à changer d’avis. Sur beaucoup de sujets.

LIVRE

Non, ce n’était pas mieux avant

Johan Norberg, Plon, 2016.

L’écrivain et journaliste Johan Norberg, nous livre, dans ce plaidoyer de la confiance en l’avenir, dix raisons qui nous permettent avec assurance de contrer les réactionnaires et les déclinistes, de gauche comme de droite. Partant du constat que l’humanité a « davantage progressé au cours des cent dernières années que depuis l’apparition d’Homo sapiens » ; et ce, grâce à la démocratie, au progrès, à la mondialisation et à la liberté, Norberg dresse un état des lieux de notre monde. Sans nier, les situations malheureuses qui perdurent de par le monde, et en nombre toujours trop important, les faits sont là. Augmentation de l’espérance de vie, progrès de l’hygiène, pauvreté en recul permanent et partout, progression de l’éducation, progression globale de la Liberté. La liste est (heureusement) longue.

Tous les progrès mis en avant par Norberg ont été rendus possibles par la démocratie et la Liberté. Ainsi, on peut affirmer que malgré les apparences suggérées par les discours ambiants, « c’est mieux maintenant ». Et pour peu que nous soyons attentifs – car les obstacles et les ennemis sont nombreux – forts de nos idées, de nos convictions et de notre confiance, on peut également avancer que… « ce sera mieux demain » !

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{ DOSSIER OPTIMISME }

CONTE-PHILOSOPHIQUE C’était mieux avant !

Michel Serres, Le Pommier, 2017. L’auteur, écrivain et historien des sciences, membre de l’Académie française, nous raconte dans ce court essai, le temps d’avant. Celui des dictateurs, des guerres et des famines. Bien sûr, actuellement, tout n’est pas rose. Des progrès restent à faire, du travail doit être accompli. Mais cela va mieux.

Ce livre est un dernier « coup de gueule » de l’auteur adressé aux « grands-papas ronchons » qui, en ayant peur de l’avenir risquent de nous ramener dans le passé.

LIVRE

Le triomphe des Lumières Steven Pinker, Les Arènes, 2018.

Ne pas oublier que le monde progresse. En dépit de tout, il progresse. Nous progressons. Voici en filigrane le message que cherche à nous faire passer l’auteur et professeur à l’Université d’Harvard. Sur près de 600 pages, il nous démontre, données à l’appui, comment la science, la raison, l’humanisme, la Liberté, les idées des Lumières ont permis les progrès dont nous pouvons profiter. Réduction de la pauvreté, de la faim, de la maladie, de la violence, augmentation de l’alphabétisme, de la santé, de la prospérité, de la sécurité… « Nous n’aurons jamais un monde parfait, et il serait dangereux de nous fixer cet objectif. Mais il n’y a pas de limites aux avancées qu’il nous est possible d’accomplir dès lors que nous continuons de mettre nos connaissances au service de l’épanouissement humain. »

LIVRE

Véritable plaidoyer en faveur des Lumières et de leur héritage tant intellectuel que matériel, ce livre est une bouffée d’air frais dans un monde où l’actualité anxiogène en continu nous fait penser que tout va de mal en pis. Alors que c’est l’inverse. Pour autant, l’auteur n’est pas candide, il nous fait part ici d’une confiance et d’un optimiste conditionnel car le progrès ne dépend que de notre volonté. Il n’appartient qu’à nous de faire en sorte qu’il continue, notamment, en tenant éloigné ces ennemis et en ne nous égarant pas nousmêmes en chemin.

Rationalité

Steven Pinker, Les Arènes, 2021. La Raison, nous lui devons peu ou prou ce que nous sommes et tout ce que nous avons. Pourtant nous n’arrêtons pas de la dénigrer au profit des fake news ou des idéologies mortifères et déclinistes. Qu’est-ce qui explique cette ingratitude vis-à-vis de cette merveilleuse faculté, qui nous a pourtant tant apporté ? C’est justement à cette question que Steven Pinker cherche à répondre tout du long de son dernier livre.

Toutes les évolutions et avancées positives énoncées dans cette rubrique ont été permises par les idées humanistes et libérales, mais de façon plus essentielle, par la pensée rationnelle. Il est dès lors plus qu’important de se soucier de son devenir et d’ériger en impératif sa défense et sa promotion. Si l’on souhaite que nos idéaux de Progrès et de Liberté puissent perdurer. 19


{ OCCIDENT LIBERTÉS }

SOMMES-NOUS ENCORE RÉELLEMENT

LIBRES EN OCCIDENT ? PAR DYLAN N’KITA ET MARIE VAN OVERMEERE

Épisode 4 :

QUELQUES PISTES À EXPLORER AFIN DE SOULAGER CE SENTIMENT DE DÉCLIN Dans les trois derniers volets, nous avons modestement expliqué les origines de ce sentiment généralisé de déclin de nos libertés en Occident en passant par l’histoire du libéralisme, la montée des nouvelles idéologies et les ravages que cela a entrainé. Dans cette dernière partie, nous tenterons de développer certaines observations sous l’angle de la philosophie et de la sociologie politique, et de proposer des solutions qui nous semblent être des pistes intéressantes afin de préserver, dans nos sociétés occidentales, ces libertés qui nous sont si chères.

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{ OCCIDENT LIBERTÉS }

La première observation est plutôt d’ordre philosophique. Les individus, en tant qu’êtres dotés de capacités réflexives, doivent accepter qu’une vision commune du monde, où tous les individus sont d’accord, est utopiste. Tous les individus occidentaux naissent fondamentalement libres et différents les uns des autres. À ces particularités initiales, s’ajoutent différents parcours de vie. C’est en cela que nous reconnaissons la singularité de la nature humaine. L’inscrit primitif de l’être humain qui animait ses actions à l’origine, a été remplacé par ses idéologies, ses valeurs qui lui sont propres et qui, aujourd'hui, donnent du sens à ses actions. C’est en cela que la liberté est fondamentale, elle permet à chaque être humain de donner à ses actions, un sens qui correspond à ses valeurs, ce qui lui permet de s’épanouir. En acceptant absolument cette idée, les individus, n’étant plus convaincus que leur vision du monde est universelle, peuvent vivre ensemble dans un monde où ils sont libres de communiquer leur vision du monde aux autres. L’idéologie que tous devraient accepter est que le monde est rempli d’individus complexes devant communiquer mais ne pouvant pas être absolument d’accord. Un individu n’étant pas libre de communiquer sa vision du monde ne peut pas s’épanouir pleinement et affronter le monde. Étant donné que l’être humain est également un individu essentiellement social, il a besoin du contact avec les autres pour vivre. C’est pour cela qu’il est nécessaire, qu’en plus de leur système de valeurs personnels, les individus aient un système de valeurs communément admises. C’est là que ça coince. En effet, les groupes d’individus partageant des systèmes de valeurs personnelles similaires, dû à des ressemblances de parcours de vie ou de situation socio-économique, se rassemblent et forment des groupes (pouvant devenir des groupes politiques ou des groupes d’intérêt). Les valeurs personnelles se renforcent en devenant des valeurs de groupe et ce groupe renforce ce système de valeurs. Les individus allant jusqu’à se persuader que ce système de valeurs doit être communément admis de tous en dépit des valeurs des autres. Certains groupes se placent aux extrêmes de leurs idéologies, se fermant aux autres afin d’obtenir, parfois même par la contrainte, un monde utopiste où tous vivent selon le même système de valeurs. Un monde où les individus sont dans l’impossibilité de se réaliser. Pour que chacun puisse s’épanouir, il faut préserver la liberté de chacun de vivre selon ses idéaux et de s’exprimer librement pour trouver un terrain d’entente avec les autres. Un certain nombre de valeurs se transmettant par la tradition et l’éducation, un grand clivage général partage le monde en deux grands groupes. Les conservateurs, attachés au passé, et les progressistes, ne se retrouvant pas dans les valeurs véhiculées. Étant donné que mettre

tout le monde d’accord est utopiste, le tout est de trouver un juste milieu. Pour cela, les individus doivent garder une position relativement neutre et l’esprit ouvert, dans leurs rapports avec les autres. Les conservateurs doivent accepter, par le dialogue avec les progressistes, que les mœurs ont évolué et doivent encore évoluer pour que tout le monde se sente accepté et puisse vivre libre et s’épanouir en tant qu'individu unique et singulier. Mais les progressistes n’ont pas raison sur toute la ligne, tout n’est pas à refaire et communiquer avec les conservateurs pourrait également leur être bénéfique. Effectivement, un bon nombre d’enseignements proviennent de notre bagage culturel et nier celui-ci conduira à reproduire les mêmes erreurs. Les erreurs de nos ancêtres sont sources d’enseignement et d’améliorations et il est important d’accepter notre passé aussi imparfait qu’il soit, car c’est grâce à ces événements passés que nous sommes arrivés à ce niveau d’évolution. On peut donc en conclure que préserver la liberté est primordial, mais il ne faut pas non plus laisser tout le monde faire tout ce qu’il veut, au risque de nuire aux libertés des autres ou aux intérêts de la collectivité, il faut poser des limites et c’est là que l’État intervient.

La seconde observation est d’ordre politique et étatique. Nous devons revenir à une conception libérale de l’État. En effet, nous avons vu que les idéologies liberticides (le wokisme, l'autoritarisme, etc.) utilisaient les prérogatives de l'appareil étatique pour restreindre les libertés individuelles. L’État-providence du XXIe siècle, une forme de politique où l’État intervient dans les domaines sociaux et économiques, notamment avec la protection sociale, pose problème : un État tout puissant est source de danger. En effet, les activités étatiques se caractérisent par la contrainte puisque l’État détient le monopole de la violence légitime. En outre, l'État se distingue par l’empiètement croissant des structures étatiques sur les libertés individuelles qui aboutit à un régime paralysant et inefficace. Face à ça, nous préconisons un État minarchiste décentralisé moderne présenté sous forme de compromis entre libéralisme et biens publics dont la légitimité est enserrée par des limites constitutionnelles strictes en vue de préserver les libertés individuelles. Dans la conception libérale de l’État, les leaders politiques, de manière générale, n’ont pas plus le droit que les autres d’exercer la contrainte sur leurs confrères. L’exercice de la contrainte par l’État ne doit viser qu’un but de protection des libertés. En l’état actuel des choses, étant donné que cette entité a la maitrise de l’exercice mais aussi de la légitimation de la contrainte, le risque que les leaders politiques qui la dirigent en abusent est permanent. Pour les libéraux, l’État est le gardien des libertés individuelles mais, en même temps, >>

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{ OCCIDENT LIBERTÉS }

la plus grande menace pour ces mêmes libertés qu’il est censé préserver. L’histoire et la simple constatation de notre monde actuel nous prouvent malheureusement suffisamment que les autorités publiques oppriment et affament leurs citoyens infiniment plus souvent qu’ils ne les protègent ou ne les servent. Par conséquent, l’action de l’État doit être strictement limitée à la défense des libertés individuelles qui est sa raison d’être. La contrepartie nécessaire à ce monopole du pouvoir coercitif est de limiter son domaine d’action rigoureusement en l’enfermant dans des limites étroites, par des institutions appropriées, comme la démocratie, l’État de droit et la séparation des pouvoirs. Si on laisse aux Hommes de l’État la possibilité de décider où et quand ils doivent intervenir, ils finiront par intervenir toujours et partout. Pas parce qu’ils sont nécessairement plus mauvais que les autres, mais parce qu’ils ont le pouvoir d’imposer leur intervention, souvent avec la conviction de bien faire au nom d’un dogme, d’une idéologie. Et l’approbation de la majorité ne fait qu’aggraver le danger. Le seul rôle légitime de l’État est de permettre aux humains de vivre ensemble, même s’ils ne sont d’accord sur rien d’autre que cette volonté de vivre ensemble. L’État doit être neutre, sans opinion et sans projet autre que celui de faire régner un ordre impersonnel spontané permettant à chacun d’exercer sa liberté au maximum et de vivre conformément à ses préférences, et non imposer à tous des options qui ne sont jamais que celles de quelques-uns, même s’ils sont en majorité. Précisément parce que les citoyens confient à l’État des pouvoirs exorbitants dans certains domaines, il doit lui être interdit d’utiliser ces pouvoirs dans d’autres domaines, par exemple la vie privée, la morale, la religion ou encore l’économie. Le pouvoir de l’État minarchiste doit être limité par les principes de subsidiarité et de proportionnalité. Le principe de subsidiarité signifie qu’une instance étatique d’un niveau supérieur ne doit intervenir que lorsque les autorités situées hiérarchiquement en dessous ne sont pas en mesure d’agir pour l’objet concerné. Le principe de proportionnalité pose quant à lui trois conditions quant aux mesures utilisées par l’État pour atteindre un but donné : la convenance de la nature du but, la

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nécessité du but et l’acceptabilité du but poursuivi. Ces deux principes doivent être ancrés dans les Constitutions occidentales. S’il est vrai que l’État minarchiste dispose du monopole dans les fonctions régaliennes (justice, défense, diplomatie, affaires intérieures et finance) justifiant son intervention directe, ce n’est pas le cas dans les autres domaines d’activité. Si l’État veut intervenir dans un domaine non étatique (c’est-à-dire non régalien), il devra respecter les deux principes susmentionnés en vue de ne pas porter atteintes aux libertés individuelles. Nous terminerons notre thèse en concluant que malgré le constat d’une diminution des libertés individuelles dans la société occidentale, des solutions existent. La

solution la plus significative doit venir du monde éducatif. La tolérance et l’empathie sont des valeurs qui doivent être instituées dès le plus jeune âge dans les milieux scolaires. Cela permettrait de mieux faire comprendre aux enfants et aux générations futures l’importance de leurs libertés et des conséquences de leurs actes sur les libertés d’autrui. La liberté des uns ne doit pas venir écraser la liberté des autres. Notre société individualiste a entrainé un repli sur soi causant une montée de l’égoïsme au détriment de la coopération, la tolérance et l’empathie. Attention, nous ne prônons pas pour autant un retour à une société collectiviste. Face aux effets négatifs de l’individualisme, l’éducation doit avoir pour rôle de tempérer ces effets négatifs dès le plus jeune âge. Un système éducatif de type libéral doit se mettre en place : cet enseignement repose sur une méthode scandinave mettant l’accent sur l’inclusion, le bien-être, le suivi personnel de l’enfant, l’homogénéité sociale, l’autonomie de l’établissement dans sa manière d’enseigner et la valorisation des enseignants. Nous consacrons une liberté d’enseignement quasi-totale du XXIe siècle où l’État prend le moins de place possible. L’État aurait uniquement pour mission de subventionner l’enseignement et d’instaurer un cadre général au nom du principe de subsidiarité et de proportionnalité (c’est la consécration de l’État minarchiste décentralisé trouvant un juste milieu entre le libéralisme et la protection de nos biens publics).

La seconde solution doit venir des libéraux. Les partis se revendiquant du libéralisme classique sur le plan


{ OCCIDENT LIBERTÉS }

formel doivent également appliquer le libéralisme classique sur le plan matériel. Les libéraux doivent contester la légitimité de l’État-providence, un État à bout de souffle (augmentation de la dette publique, constat d’un déficit public permanent, charge fiscale toujours plus importante pour le contribuable) et prenant énormément de place dans la société civile (l’État s’occupe des domaines non étatiques au détriment des fonctions régaliennes causant un manque de budget pour la justice, la défense, la sécurité publique ; en d’autres termes, nous avons une justice défaillante, un manque d’effectif dans la défense et un sentiment d’insécurité qui se généralise). Cet État lourd et défaillant légitimise la montée en puissance des mouvements liberticides et le manque de confiance des citoyens envers les partis démocratiques. Les libéraux doivent donc défendre une conception libérale de l’État sans pour autant revenir à l’État-gendarme du XIXe siècle (l’État-gendarme est un État qui n’intervient jamais dans les affaires sociales et économiques causant d’importantes inégalités entre les classes sociales). Le défi

des libéraux sera de convaincre de changer de paradigme car il y a ce mythe chez les citoyens que l’État-providence est bienveillant et que davantage d’État est la solution à tous nos problèmes. L’État-providence doit laisser place à l’État minarchiste décentralisé. À l’heure actuel, seule la Suisse peut être qualifiée d’État minarchiste. En effet, les deux principes clés y sont des principes à valeurs constitutionnelles et les dépenses publiques de l’État suisse représentent seulement 33% de son PIB (en comparaison, les dépenses publiques de la Belgique représentent 55% de son PIB). Malgré cela, la Suisse dispose d’une grande sécurité sociale et de services publics de qualité. Les PaysBas également s’en approchent progressivement depuis que les libéraux (VDD) sont au pouvoir. Nous pouvons d’ailleurs constater la réussite économique, politique et sociale de ces deux pays. En outre, selon des rapports de sciences politiques, ces deux pays sont des démocraties libérales parfaites non défaillantes accordant une place importante aux libertés individuelles car celles-ci sont justement bien protégées. 

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{ FEL LYMEC }

LOUIS N’A PAS ENCORE DINÉ PAR LOUIS-SULIAC RUFFIER D'EPENOUX

ALDE : Alliance des libéraux et des démocrates pour l’Europe, Parti libéral européen participant au groupe Renew au Parlement européen et dont fait partie le MR LYMEC : Association des jeunesses libérales européennes dont fait partie la FEL IFLRY : Fédération internationale de la jeunesse libérale dont fait partie la FEL

Je vous écris alors que Nicolas Heynderickx et moi-même – tous deux délégués de la FEL aux Relations Internationales – venons de rentrer du Congrès du printemps du LYMEC se déroulant à Prague du 20 au 22 mai. Pour tout vous dire, je n’ai même pas encore défait mon sac de voyage de l’ALDE que j’ai reçu lors d’un évènement des Jeunes MR. C'était un Congrès électif visant à constituer un nouveau Bureau du LYMEC pour 2 ans. Le rôle du Bureau est de représenter le LYMEC et ses membres auprès de l’ALDE et de faire en sorte que cette dernière adopte nos positions. Ainsi, nos positions peuvent être reprises par un député européen de Renew Europe et potentiellement devenir lois. C’est pourquoi, nous intervenons dans les élections des membres du bureau. L’Alliance des organisations du Benelux membres du LYMEC n’est pas parvenu à faire élire le Hollandais Marten Porte (membre de Jonge Democraten et anciennement trésorier du LYMEC) au poste de vice-président, comme nous le souhaitions. Mais nous espérons qu’il sera nommé à celui de représentant du LYMEC à IFLRY, dont nous faisons aussi partie. En revanche, nous avons réussi à faire élire le Luxembourgeois Daniel Ruiz (membre de Jonk Demokraten Luxembourg) au poste d’Internal Auditor et surtout le Belge Alexandre Servais des Jeunes MR, au poste de membre du Bureau. Alexandre a représenté la FEL à l’international entre 2018 et 2019, après en avoir été le secrétaire politique l’année précédente, et a représenté les Jeunes MR de 2019 à 2022. Avec tout ça, nous n’avons malheureusement pas eu le temps de débattre sur la résolution déposée par la FEL, et rédigée par Nicolas Heynderickx, visant à demander une augmentation de la taille des bourses accordées aux étudiants partant en

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Erasmus. Néanmoins certains amendements que nous avions déposés sur d’autres résolutions ont pu être traités, notamment concernant les efforts de communication que doit mettre en place le LYMEC. Nous avons également pu bloquer une résolution visant à affirmer le caractère libéral classique que devrait avoir le LYMEC pour certains membres. Nous pensons en effet que la multitude des libéralismes présents au LYMEC et en Europe font sa richesse. Durant ce congrès, une nouvelle organisation a rejoint le LYMEC – y introduisant d’ailleurs une nouvelle forme de libéralisme qui n’était pas présente jusque-là –, l’éco-libéralisme des Young Green Liberals Switzerland. Ce ne sont pas les seuls à s’être ralliés à l’Association ; les jeunes Ukrainiens du Parti de Zelensky nous ont notamment rejoints, ainsi que Vesna, une organisation russe si active dans l’opposition au gouvernement de Poutine qu’on dit que chacun de ses membres a fait de la prison. Enfin, nous avons travaillé à approfondir les relations avec nos partenaires actuels, notamment les Catalans, les Bulgares et les Anglais. Nous en avons également initié avec des organisations scandinaves. Ainsi, certains de nos partenaires disent préparer un voyage prochain à Bruxelles pour leurs membres, et nous nous ferons un plaisir de les accueillir. C’était mon dernier congrès au LYMEC pour la FEL, cela a été un plaisir de travailler pour vous. Les candidats au poste de délégués de la FEL aux Relations Internationales pour l’année prochaine sont formés et n’attendent plus que leur cooptation au sein du bureau. À bientôt camarades, je m’en vais diner… 


{ ÉTÉ JEUX }

PAUSE DÉTENTE Pour profiter d’un petit moment de divertissement qui booste les neurones, rien de tel que les casse-têtes et jeux de logique !

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MOTS-CROISÉS

Remplis cette grille de mots-croisés à l’aide des définitions données.

HORIZONTAL

VERTICAL

3. Les lieux où la FEL mène principalement ses actions. 4. Le forum d'échange, de discussion et de débat de la FEL. 7. Figure de proue du libéralisme en Belgique. 9. Faculté dont dispose l'être humain de se déterminer librement et par lui seul, d'agir et de penser, par opposition au déterminisme ou au fatalisme. 12. Doctrine opposée au libéralisme qui s'appuie sur la constatation d'un chômage involontaire permanent. 13. La plus ancienne section de la FEL. 15. Personnalité libérale auteur de L'esprit des lois. Plaide pour instaurer une séparation des pouvoirs et limiter les abus du pouvoir exécutif et garantir ainsi les libertés du Parlement.

1. C eux que nous représentons et pour qui nous militons. 2. Souvent confondu avec le libéralisme alors que ce dernier lutte pourtant contre les monopoles. 5. Valeur propre au libéralisme. Tous ses fruits bénéficient à court comme à long terme, à la collectivité. 6. Il est le président de notre Fédération. 8. Le magazine de la FEL dans lequel tous les étudiants peuvent rédiger des articles. 10. Parti libéral européen. 11. Notre belle couleur ! 14. L a valeur la plus importante de notre projet.

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{ ÉTÉ JEUX }

CHARADES

Devine le mot caché dans chacune de ces charades à partir des syllabes qui le composent. Mon 1er est exact Mon 2e fait monter Mon tout est le bon droit

Mon 1er est un halo enveloppant le corps Mon 2e est une partie de moteur Mon tout est un homme éloquent

Mon 1er est bien élevé Mon 2e est une fâcheuse habitude Mon tout concerne l’exercice du pouvoir

Mon 1er est entouré de la croûte Mon 2e bouquine Mon 3e sert à mesurer les minutes et les jours Mon tout défend une cause ou une idéologie

Mon 1er est heureux Mon 2e a de la chance Mon 3e filtre Mon tout est actuel

Mon 1er n’est ni rayé ni à pois Mon 2e n’est pas toujours solitaire Mon 3e est du chlorure de sodium Mon tout s’étend à tout et tous

MOTS-MÊLÉS

Retrouve dans cette grille de lettres les mots de la liste. Ces derniers peuvent être à l'horizontal, à la verticale, à la diagonale et même à l'envers. D O S D G U V Y U N R

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avenir - Belgique - campus - débattre - démocratie - discours - élection - engagement études - européen - libre - ministre - opinion - optimisme - responsabilité - solidarité

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{ ÉTÉ JEUX }

ÉNIGMES

Exerce ton cerveau tout en t’amusant en tentant de trouver la réponse à ces énigmes.

 Un homme politique est invité à une garden-party. Il a à peine le temps de serrer quelques mains, de grignoter une

poignée de petits-fours, que son téléphone portable sonne : il doit faire un communiqué urgent devant la presse. Il avale le verre qu’on vient de lui servir et file. Le lendemain, il apprend que tous les invités sont morts empoisonnés. Pourquoi pas lui ? .................................................................................

 Si 9 étudiants boivent 12 fûts de bière en 8 jours, combien 24 étudiants boiront de fûts en 30 jours ? .................................................................................

 Curieusement, 3 des 5 premiers présidents des États-Unis sont morts un 4 juillet, jour de la fête nationale américaine. Ces présidents sont, dans l’ordre : George Washington, John Adams, Thomas Jefferson, James Madison et James Monroe. Si tu devais en désigner 1 des 3, quel nom donnerais-tu ? .................................................................................

 Peut-on disposer ces 7 logos de façon à obtenir 4 rangées de 3 logos chacune ?

 Sur le plateau d’un débat télévisé, Sacha Daout accueille deux invités. Le premier ne ment jamais, le second toujours. Au cours du débat, l’un des deux déclare : « Ce n’est pas la première fois que je dis ce que je dis en ce moment. » Est-ce le premier ou le second invité ? .................................................................................

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{ ÉTÉ JEUX }

ÉQUATION

Résous cette équation en images et trouve la valeur de l’inconnue.

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= 22

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SOLUTIONS MOTS-CROISÉS 1

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Statue de la liberté = sta Chapeau = cha Colombe = col Moustache = mou

juste – hisse : Justice poli – tic : Politique content – pot – rein : Contemporain aura – teur : Orateur mie – lit – temps : Militant uni – vers – sel : Universel

ÉQUATION

CHARADES

(1) (3 sta + cha) = 24 sta + cha = 8 (2) (2 (col + mou) + (sta + cha) = 22 2 col + 2 mou + sta + ch = 22 (3) (2 mou + 2 mou + (col + mou) = 19 5 mou + col = 19 (4) (2 cha + 2 cha + (sta + cha) = 16 5 cha + sta = 16 DONC : (5) (5 cha + (8 – cha) = 16 4 cha = 8 chapeau = 2 (6) (sta + 2 = 8 statue = 6 (7) (2 col + 2 mou + 6 + 2 = 22 2 col + 2 mou = 14 col + mou = 7 (8) (5 mou + (7 – mou) = 19 4 mou = 12 moustache = 3 (9) col + 3 = 7 colombe = 4 SOLUTION : (10) (sta + mou) + (cha + mou) x (col + cha) (6 + 3) + (2 +3) x (4 + 2) 9 + 5 x 6 = 39

ÉNIGMES  Le poison était dans les glaçons qu’on lui a servis avec sa boisson, ils n’avaient pas eu le temps de fondre.  120 fûts de bière. Car, 1 étudiant boit 9/12 ou 3/4 de fût en 8 jours, soit : (3/4 x 30 jours) : 8 jours = 5 fûts ; pour 24 étudiants : 5 x 24 = 120 fûts.  Monroe, sinon on dirait 3 des 4 premiers.  Voilà 3 arrangements possibles :

 Le second. Supposons que ce soit le premier invité, celui qui ne ment jamais, qui ait fait cette déclaration. Auquel cas, ce qu’il dit est vrai. Alors, il a déjà dit cela. Mais lorsqu’il l’avait dit, c’était également vrai puisqu’il l’avait dit avant cela… Ce qui est impossible sans mentir puisque, pour le dire, il faut l’avoir déjà dit une infinité de fois auparavant ; or, personne n’est éternel. { ÉTÉ JEUX }


{ DÉRISION }

PAR CORALIE BOTERDAEL

Le syndrome de Calimero ou l’orgasme du cochon Se plaindre, c’est un peu le sport favori du moment. Il est labélisé « Monde de merdre ». Les gens se plaignent sans cesse de tout : « le chien du voisin aboie trop fort, les files d’attente sont trop longues, le frigo du Colruyt est trop froid… les transports en commun ne sont jamais à l’heure ou toujours en grève, les jeunes font n’importe quoi, les politiques disent n’importe quoi, l’inflation galope et les salaires trainent… le pays court à sa perte, la terre ne tourne pas rond, l’univers se déchaine… on est totally foutu ! » Et s’il est vrai que les gens n’ont pas toujours tout à fait tort, ont-ils raison pour autant de vitupérer interminablement ? Le plus horripilant dans tout ça, ce sont les gens qui se lamentent de la météo, car s’il y a bien quelque chose pour lequel nous ne savons rien faire dans l’immédiat, c’est bien le temps qu’il fait. Pourtant, il y a continuellement quelque chose à dire : « On se les gèle, ça cogne, il pleut des cordes depuis trois jours, il faut gratter le parebrise ce matin… » Bref, la météo est un sujet inépuisable qui m’épuise. Car quoi de plus exténuant que d’écouter les gens chouiner sur ce thème tellement bateau que nous l’abordons d’office et inlassablement chez notre coiffeur, à la supérette, avec nos potes ? Sans compter que les jérémiades demandent du temps et de l’effort, les gens vont bientôt se plaindre d’être fatigués de se plaindre. Entre mon ado qui beugle : « Peux pas rapprocher la table ?! je dois me lever pour attraper la télécommande » ; ma moitié qui rouspète : « Tu as dormi en mode rouleau de printemps, je n’ai pas eu droit à la couette » ; et ma collègue qui renchérit : « L’internet est toudis trop lent, comment veux-tu que je travaille ? », j’ai vraiment la tête qui tourne. À tel point que maintenant, dès que je vois quelqu’un se plaindre, il se transforme littéralement sous mes yeux en petit poussin noir et ronchon une coquille brisée sur la tête.

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Pratiquer l’art délicat des joutes plaintives, c’est oublier que l’on ne peut avoir le beurre et l’argent du beurre. J’imagine déjà Cyril Lignac, en train de pâtisser, solliciter sa crémière : « Dis, peux-tu m’apporter du beurre s’te plait ? Avec le sourire, et puis tout ça gratos, hein ! » Non, je vous le confirme, l’on ne peut pas avoir le lard et le cochon. L’on


{ DÉRISION }

ne peut d’ailleurs atteindre l’orgasme du cochon sans vivre aussi son existence. L’orgasme du cochon est vraiment très long, jusqu’à une trentaine de minutes. C’est enviable, mais tout à un prix. Envisagerions-nous réellement de nous réincarner en cet animal afin de profiter d’une incroyable jouissance tout en sachant que nous nous vautrerions d’instinct dans la fange le reste du temps ?! Il est donc de bon ton d’arrêter de râler, il n’existe pas de médaille sans revers. Pourtant, aujourd’hui, le plus petit sujet devient matière à contrariété. L’autre jour par exemple, je lisais le titre suivant : « Les images d’enfants sous les jets d’eau n’ont rien à faire dans les sujets canicule des JT. Il est temps que les chaines télé se rendent compte de la réalité des épisodes de forte chaleur. » Et si nous arrêtions de nous tromper de débat !? Les gamins jouent dans l’eau quand il fait chaud, mais c’est une réalité sur laquelle les médias sérieux n’arrêteront pas leur reportage. Ne conviendrait-il pas plutôt de traiter plus intelligemment les thèmes importants sans se faire laid à tout bout de champ pour des futilités ? J’ai vraiment l’impression que les gens s’ennuient tellement qu’ils éprouvent l’irréfrénable besoin de trouver à redire sur tout et surtout le plus fort possible. Vous l’aurez compris, je n’en peux plus des gens qui se plaignent. Et comme il n’y a plus que ça, je crois que j’ai un problème avec les gens. Mais comme cette présente rubrique s’apparente dangereusement à une plainte, je crois que j’ai un problème avec moi aussi. Néanmoins, je me dois bien d’avouer que râler peut se révéler positif, que rouspéter un bon coup permet de libérer les tensions. Telle une cocotte-minute, pour ne pas exploser et tout réduire en bouillie, nous avons le droit de siffler de temps à autre. Se plaindre sert parfois de cataplasme à nos inquiétudes, nos amertumes et nos mauvaises journées. Car la plainte est l’aveu de notre impuissance face à ce qui ne va pas. Par chance, le rire n’est-il pas le refus de se laisser engloutir par cette impuissance ? Alors, en bonnes gens que nous sommes, continuons à nous plaindre, plaignons-nous mais avec humour ! 

TOP 5 DES COMPORTEMENTS QUI DONNENT UNE BO NNE RAISON AUX GENS DE SE PLAI NDRE  !  DANS LE TRAIN :

S’installer en heure de pointe avec son énorm e violoncelle et prendre 4 places alors que des compartiments sont déd iés aux vélos et gros bagages.

 AU BUREAU :

Jouer avec son bic à 4 couleurs, tournoyer sur sa chaise et mettre en bo ucle Maria Carey à la période de Noël pendant que les collègues travaillent.

 LORS D’UN FESTIV AL :

Se placer bien dans l’ax e, devant la scène et jus te au centre, quand on me sure 2 mètres, puis pre ndre sa fille sur ses épaules.

 DANS SON APPART

’:

Mixer 1,5 litres de smoo thie détox au chou Kal e dans un blender à 5h00 du matin alors que les colocs ont le sommeil léger.

 SUR LA ROUTE :

Coller la voiture de dev ant parce que l’on rou le 10km/h au-dessus de la vitesse autorisée, ma is piler sur les freins dev ant chaque radar avant de réaccélérer.

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{ BIBLIOGRAPHIE }

/ BIBLIOGRAPHIE / Le génocide Khmer : la paranoïa d’un régime PAR ARNAUD MARLAIR ET ARTHUR WATILLON KIERNAN B., VIGNE É., « Le communisme racial des Khmers rouges : Un génocide et son négationnisme : le cas du Cambodge », dans Esprit, n°252, p. 93-127. Le communisme racial des Khmers rouges: Un génocide et son négationnisme : le cas du Cambodge on JSTOR (ucl.ac.be) LE GAL A., « Cambodge : pourquoi le terme “génocide” a mis quarante ans à s’imposer ? », sur Le Monde, (lemonde.fr)https://www.lemonde.fr/ asie-pacifique/article/2018/11/16/cambodge-pourquoi-le-terme-de-genocide-a-mis-quarante-ans-a-s-imposer_5384642_3216.html, consulté le 31 mai 2022. MARGOLIN J.-L., « L’amémoire du génocide cambodgien, ou comment s’en débarasser », dans Revue d’Histoire de la Shoah, n°181, 2004, p. 317-337. L'amémoire du génocide cambodgien, ou comment s'en débarrasser | Cairn.info MARGOLIN J.-L., « Le Cambodge des Khmers rouges : de la logique de guerre totale au génocide », dans Vingtième siècle. Revue d’histoire, n°77, 2003, p. 3-18. https://www.cairn.info/revue-vingtieme-siecle-revue-d-histoire-2003-1-page-3.htm#no10 MARTIN A., « La politique alimentaire des Khmers rouges », dans Études rurales, n°99, 1985, p. 347-365. https://www.jstor.org/stable/20122242?casa_ token=P9CmKeqUTrwAAAAA%3ACUke6bYaL2G7M3d-MOiD53KM0vZL3fG_TkWr-ey7ibLyY0GkBEfxrfQ4tdug28WAIxadL0VLgtALJgxnALv1y2QGqJinzbCm65A_BSbndYnscEZuiA&seq=1 QUANG B.-X., « Le totalitarisme des Khmers rouges : idéologie autonome ou modèle importé ? », dans Cahiers Internationaux de Sociologie, vol. 94, 1993, p. 161-188. https://www.jstor.org/stable/40690537?casa_token=gttxjSFvmh0AAAAA%3ArvFqjzTMwbtaNMEyGZ7jJckMpVykTQ8Ee44gV4v1PQ8bZZiWMvDXYK6 kao_--gg-4MK3uSOmFTNhcaC3ZvHNNedGA98maMh-Gwi2IejGU6wiSgub2VM&seq=2 RASZELENBERG P., « The Khmers Rouges and the Final Solution », dans History and Memory, vol. 11, 1999, p. 62-93. h t t p s : // w w w. j s t o r. o r g / t c /a c c e p t ? o r i g i n = % 2 F s t a b l e % 2 F p d f % 2 F 1 0 . 2 9 7 9 % 2 F h i s . 1 9 9 9 . 1 1 . 2 . 6 2 . pdf%3Frefreqid%3Dexcelsior%253Aca4b4a21973b150c2c8e7e188e7cf4bb%26ab_segments%3D%26origin%3D&is_image=False

Penser l’optimisme PAR LOUIS MARESCHAL ALAIN, « Propos sur le bonheur », in Cahiers du Capricorne, Paris, Gallimard, 1925, pp. 5 et s. REBOUL O., « L'homme et ses passions d'après Alain », in La passion, vol. 1, Paris, P.U.F, 1968, pp. 175 et s. TROUSSON R., et VERCRUYSSE J., Dictionnaire général de Voltaire, Paris, Champion, 2003, pp. 11 et s. VOLTAIRE, « Candide ou l’optimisme », in Œuvres complètes, tome 21, Paris, éd. Baudouin Frères, 1826, pp. 436-597.

Non, la démocratie ne meurt pas, elle se régénère ! PAR DEVILLERS NOHA Sondage RTBF : Un quart des Belges veulent la fin de notre démocratie parlementaire, RTBF 2021. Consulté le 15 mai 2022, à l’adresse https://www. rtbf.be/article/sondage-rtbf-un-quart-des-belges-veulent-la-fin-de-notre-democratie-parlementaire-10852475 Democratie.brussels, Une commission délibérative, c’est quoi ?, 2020. Consulté 15 mai 2022, à l’adresse https://democratie.brussels/pages/cd VRYDAGH J., DEVILLERS S., TALUKDER D., JACQUET V., & BOTTIN J., « Les mini-publics en Belgique (2001-2018) : Expériences de panels citoyens délibératifs », Courrier hebdomadaire du CRISP, 2020, 24772478(32), 572. https://www.cairn.info/revue-courrier-hebdomadaire-du-crisp-202032-page-5.htm BELGA, « La loi d’initiative citoyenne approuvée en commission de la Chambre », La Libre.be, 2020. Consulté 15 mai 2022, à l’adresse https://www.lalibre. be/belgique/politique-belge/2020/11/18/la-loi-dinitiative-citoyenne-approuvee-en-commission-de-la-chambre-ZGISHJV2KJE3PI2EI7MK2L3BBY/ VRYDAGH J., BOTTIN J., REUCHAMPS M., BOUHON F., & DEVILLERS S., « Les commissions délibératives entre parlementaires et citoyens tirés au sort au sein des assemblées bruxelloises », Courrier hebdomadaire du CRISP, 2021, 2492(7), 568. https://www.cairn.info/revue-courrier-hebdomadairedu-crisp-2021-7-page-5.htm

Un partage de rôles pour plus d’épanouissement ! PAR LINA DAIF GETTLER, MCDADE, T. W., FERANIL, A. B., & KUZAWA, C. W., « Longitudinal evidence that fatherhood decreases testosterone in human males », Proceedings of the National Academy of Sciences, 2011, PNAS, 108(39), 16194–16199, sur https://doi.org/10.1073/pnas.1105403108 ONE, « Le congé de paternité », sur https://www.one.be/public/0-1-an/mes-droits/le-conge-de-paternite/#:~:text=Depuis%20le%201er%20 janvier,%C3%A0%20partir%20de%20cette%20date, consulté le vendredi 13 mai 2022.

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Le syndrome de Calimero ou l’orgasme du cochon PAR CORALIE BOTERDAEL PROUST J.-M., « Les images d’enfants sous les jets d’eau n’ont rien à voir avec les thèmes de la canicule du JT », édité par Natacha Zimmermann, 15 juin 2022, sur http://www.slate.fr/story/229185/canicule-pas-enfants-jouent-eau-jt-illustration-television-rechauffement-climatique, consulté le 16 juin.

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DIRECTION ARTISTIQUE : Daphné ALGRAIN

AVEC LE SOUTIEN :


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