Bref Aéro 364, mai/juin 2017

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BREF Mai/juin 2017 • N° 364

AÉRO

ÉDITO

VOUS AUREZ BESOIN DE NOUS AUTANT QUE NOUS AURONS BESOIN DE VOUS !

À la rentrée, le contexte juridique dans lequel nous vivons aura sans doute évolué. Nous faire croire que le dialogue social est un frein à l’embauche et à la réforme est une hérésie. Surtout, si d’aventure, le Gouvernement entend donner la primeur aux accords d’entreprise sur les accords de branches. Dans les grosses entreprises où les syndicats sont structurés, formés pour négocier, cela marcherait peut être. Mais dans les PME où les militants sont souvent à la peine par manque de temps, ce serait un massacre. Premier chantier.

Sommaire Actualités

Les nouvelles désignations

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Nouvelle section

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Le mot de la santé

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Élections et représentativité

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Lecture enrichie de Bref Aéro

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Liebherr Aerospace : une magnifique prise de guerre !

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Vie des entreprises Thales, projet d’évolution juridique 4 Transmettre les passions, un atout pour les générations futures 5 Gemini : une fusion mettant à rouge les salariés

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Dossier Mouvement social historique en Guyane

C’est dans l’air Tous céphalopodes !

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On ne peut passer sous silence la renégociation actuelle de notre convention de la métallurgie et de son système de classifications. Un système vieux de 40 ans qui a sans doute besoin d’être modernisé et adapté aux enjeux contemporains et surtout futurs du monde du travail. La négociation a démarré voici 6 mois et se place sur les fonts baptismaux. Elle sera longue. Ce sont nos fondamentaux qui pourraient changer. Deuxième chantier. Le système des classifications pouvant évoluer, il devra s’adapter intelligemment aux nouveaux process de gestion de carrières. Les DRH sont en train les inventer. Hélas, les premiers essais ne sont guère concluants, en particulier dans les grandes entreprises. La raison en est simple : ils clonent un modèle Start Up sans toujours essayer de l’adapter et SURTOUT sans donner le sens et la vision à ces changements. Les salariés ne comprendront pas que les organigrammes s’aplatissent, que les fonctions managériales évoluent d’un rôle de contrôle à un rôle de formation et/ou de conseil, que leur «grade » évolue (à la hausse comme à la baisse) en fonction de leur seul poids de poste, sans qu’ils connaissent la finalité, les raisons et surtout si les garanties nécessaires sur leurs droits ne sont pas verrouillées, en particulier leur rémunération. Ils comprendront encore moins si la seule finalité est un EBIT à deux chiffres. Le modèle Silicon Valley marche dans la Silicon Valley, car les Start Up y proposent une vision qui comprend entre autre le droit à l’erreur et à la prise de risque. Nous sommes à 180 degrés des indicateurs pastèques (vert dehors, rouge dedans) de nos tableaux de visual management… Management 4.0 ? Allons-y, mais attention ! Sans jouer les apprentis sorciers. Troisième chantier. L’aéronautique vit des années fastes. Cela ne nous met pas à l’abri des évolutions juridiques nationales ou de notre branche de la métallurgie. Tous nos DRH, années fastes ou pas, réfléchissent à implémenter ces nouveaux modèles de management 4.0. Les trois chantiers évoqués ci-dessus vont nous frapper de plein fouet. En parallèle de quoi, nous devrons continuer à gérer la transformation du monde de l’aéronautique, espace et défense avec des dossiers aussi engageants que la fusion Safran/Zodiac, les évolutions d’Ariane Group, la transformation du Groupe Airbus, les trous d’air chez Dassault et la filière hélicoptères, le bouleversement de la supply chain... La liste n’est pas exhaustive.. « Ne pas subir l’avenir, le construire, reprendre confiance, compter dans le débat, défendre les mêmes valeurs » : éternel ADN de la CFE-CGC AED. Pour cela, vous aurez besoin de nous. Mais nous aurons aussi besoin de vous, car c’est votre nombre qui construit notre légitimité. Vous lisez Bref aéro ? Vous êtes syndiqué à la CFE-CGC. Peut -être avez- vous des collègues de travail qui ne le lisent pas. Et si vous leur demandiez d’adhérer ?

POUR VOUS AVEC VOUS

PARTOUT

Ludovic ANDREVON Président de la CFE-CGC AED


Actualités ÉLECTIONS ET REPRÉSENTATIVITÉ ÇA GAGNE AVEC Excellents résultats chez Auvergne Aéronautique où la CFE-CGC rafle 100 % des voix au 3ème collège !

n°4 LE MOT DE LA SANTÉ :

Anticipez dès aujourd’hui les risques de demain

Et ça gagne, également, chez Ratier Figeac où la CFE-CGC progresse de 4,5 % sur l’ensemble 2ème et 3ème collèges (avec une représentativité de 62,4 %) et franchit la barre des 30 % tous collèges confondus. La CFE-CGC conserve pour la durée du mandat (2 ans) le secrétariat du C.E. Liebherr, la CFE-CGC obtient une représentativité de 45,84 %, les six sièges au 3ème collège et un des deux sièges du 2ème collège. Zodiac Aerosafety Loches : la CFE-CGC remporte le siège du 3ème collège. Figeac Aéro Picardie, la CFE-CGC remporte le siège C.E. du 3ème collège, elle devient la 1 ère organisation syndicale en 2ème collège D.P. Bravo et bon courage à tous pour la suite !

Les besoins en santé sont propres à chacun. Selon les antécédents, l’hérédité, l’activité, le mode de vie... certains seront davantage sujets aux ennuis de santé. Les problèmes de vue et d’audition, à différents degrés, restent néanmoins une constante que l’on observe avec l’avancée de l’âge, et qui représentent d’importants frais médicaux, très mal remboursés par la Sécurité sociale.

Christophe Dumas Secrétaire général CFE-CGC AED

NOUVELLES DÉSIGNATIONS

NOUVELLE SECTION

RATIER-FI0GEAC : Arnaud Soulie, Thierry Faragou et Hervé Bertrand sont reconduits dans leurs postes de délégués syndicaux.

ZODIAC AEROSAFETY SYSTEMS LOCHES :

LIEBHERR AEROSPACE Toulouse Philippe Anseur et Nicolas ST Martin sont reconduits en qualité de délégués syndicaux. DERICHEBOURG ATIS AVIATION Blagnac : Carine Adam remplace Roger Bonnan (départ retraite) en qualité de déléguée syndicale.

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Grégory Bonvin est désigné délégué syndical de la section.

Des prothèses dentaires peuvent coûter entre 500 et 900 euros, et des prothèses auditives entre 750 et 2 000 euros. Tentez de dresser un bilan de vos besoins actuels et d’anticiper vos besoins futurs, afin que les garanties de votre contrat de complémentaire individuelle Sénior soient au plus près de ces derniers. Patrick Frodefond Expert CFE-CGC AED Protection sociale

L’IPECA NOUVEAU EST ARRIVÉ. Rappel des épisodes précédents : par courrier ou par mail, chaque assuré (« adhérent ») a pu, entre le 24 mars et le 9 avril 2017, participer aux élections des 100 délégués à l’Assemblée Générale de l’IPECA. Au terme du dépouillement, la liste CFE-CGC obtient 43 délégués sur les 100 désignés.

Bref Aéro en lecture enrichie :

Parmi ceux-ci, 7 (sur 15 sièges) seront membres du Conseil d’administration et 2 (sur 4 sièges) seront membres du Bureau. La CFE-CGC remercie tous celles et ceux qui l’ont soutenue et assure l’ensemble des adhérents à l’IPECA de sa volonté d’agir pour le bien commun à la tête de l’Institution.


Actualités

Liebherr Aerospace :

UNE MAGNIFIQUE PRISE DE GUERRE À l’occasion des élections professionnelles d’avril 2017, les salariés de Liebherr Aerospace à Toulouse ont mis fin à 47 ans de main mise de la CGT sur le comité d’entreprise. Un tremblement de terre dans ce fief cégétiste au profit de la CFE-CGC qui a raflé la mise avec 6 sièges sur 7 possibles (10 au total) au CE à l’issue d’une intense campagne de terrain. Une équipe volontaire à fort potentiel Une section syndicale, c’est toujours une histoire d’Hommes et de Femmes, d’envie partagée et de militantisme. La section Liebherr en est la parfaite illustration. Longtemps portée par Stéphane Benoit, défendant seul les populations des 2ème et 3ème collèges, cerné par la CGT, la section s’est développée contre vents et marées. « Avec Claude Banes, nous venions régulièrement soutenir Stéphane, se souvient Félix Chiaramonte, Expert Développement à l’AED. Nous le poussions à développer sa section et à s’entourer d’adhérents qui viendraient partager son militantisme. Ce fut chose faite lorsqu’il recruta son premier adhérent : Philippe Anseur, militant de terrain et négociateur né ! » Le binôme, très complémentaire et complice, se mit en ordre de marche et le développement de la section crût. Aujourd’hui, la section atteint une cinquantaine d’adhérents. « En terme de développement, la section Liebherr a un beau potentiel (700 salariés dans nos populations), poursuit Félix Chiaramonte. Ils devraient être aux environs de 200 adhérents d’ici 4 ans ». Lors des élections de 2015, la CFECGC avait failli créer la surprise au CE et s’était contentée de la seconde place, avec 4 sièges sur 10 au CE. Mais la machine à gagner était lancée ! Une campagne au plus près du terrain Pour partir à la conquête du CE, c’est une équipe volontaire et motivée qui a retroussé ses manches. «Depuis

6 ans, nous avons amplifié notre communication avec les salariés, explique Nicolas St Martin, délégué syndical CFE-CGC Liebherr. Après 47 ans de cégétisme intense, les salariés avaient un besoin de renouveau. Grâce à notre syndicalisme constructif, nous avons su les séduire et leur montrer un autre visage du syndicalisme, contrastant avec le syndicalisme de blocage mené par la CGT », poursuit le délégué syndical. À l’approche des élections professionnelles, la section intensifie sa communication en s’appuyant sur les ressources du Pôle développement de la CFE-CGC AED. Mise en place d’une charte graphique, tracts avec des messages forts, profession de foi avec un véritable projet pour les salariés et le CE, autant d’éléments qui jalonnent une campagne électorale intense sur le terrain. « En dehors des périodes d’élections, nous tenons informés les salariés de nos avancées lors des négociations, via l’intranet syndical de l’entreprise. En parallèle, nos adhérents qui ont des informations privilégiées, sont des relais formidables auprès de leurs collègues ! Pendant la campagne, nous sommes restés nous-mêmes avec cette honnêteté qui nous caractérise. Les salariés ont vu que nous étions dans la construction tout au long de la campagne alors que la CGT n’a fait qu’un bilan de son mandat passé au CE, et que la CFDT (3ème organisation syndicale dans l’entreprise) s’est pris les pieds dans le tapis avec des erreurs de communication », conclut Nicolas St Martin. Une victoire sans conteste Ce qui devait arriver arriva : à l’issue d’une campagne électorale rondement menée, la CFE-CGC est ar-

Nicolas St Martin Délégué syndical Liebherr Aerospace

rivée en tête des élections d’avril 2017, raflant les 5 sièges du 3ème collège, 1 siège sur 2 au 2nd et laissant les 3 sièges du 1 er collège à la CGT. Avec une représentativité à 60 % au 2ème et 3ème collèges, la CFE-CGC met ainsi fin à la dictature cégétiste dans l’entreprise. « Nous avons décidé de mettre en place un bureau collégial au CE, nous avons laissé le poste de trésorier-adjoint à la CGT, commente le délégué syndical. Nous ne souhaitions pas agir comme la CGT qui avait refusé un bureau collégial, il y a deux ans, alors que la situation était inversée. Le secrétariat du CE est assuré par une femme, Christine Stephan, une militante CFE-CGC chevronnée, dont ce sera le 2 ème mandat au CE. À présent, nous allons dérouler le projet pour lequel les salariés nous ont élus pour les 2 années à venir et c’est un gros travail ». L’Expert développement AED revient sur ce résultat : « leur réussite ? Ils la doivent à leur envie, leur pugnacité, leur volonté d’être sur le terrain, proches des salariés, c’est une magnifique section. Il serait formidable que la section Liebherr Toulouse serve d’exemple à d’autres et se démultiplie. Cette prise de guerre est la juste récompense du travail sérieux effectué depuis des années ». Une victoire chez Liebherr qui n’est pas sans rappeler celle de la section Ratier Figeac, menée par Hervé Bertrand et son équipe, qui avait ravi le comité d’entreprise à la CGT, en 2015. La CFE-CGC Ratier Figeac a conforté sa victoire de 2015 en remportant les élections professionnelles d’avril 2017, Carole Trémoulet devient secrétaire du CE. Le printemps de l’AED est en marche !

Felix Chiramonte Expert développement CFE-CGC AED

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Vie des entreprises

THALES,

Projet d’évolution juridique de son organisation en France Aujourd’hui, THALES, en France, ce sont 18 sociétés et 24 domaines opérationnels. Cette organisation est le résultat d’une construction progressive du Groupe à la suite de séries d’acquisitions et de fusions répondant à la stratégie de conquête de marchés ou de technologies (Sextant Avionique, Crouzet, Sintra Alcatel, Alcatel Lucent, Dassault Electronique …). Le Projet de regroupement des activités France En 2011, déjà, Thales avait créé en France un premier « mastodonte » avec la société Thales Communications and Security qui regroupe plus de 7 000 salariés sur 7 sites Français. En 2017, étape suivante, avec le regroupement de la majorité des autres sociétés françaises en trois grandes entités de plus de 5 000 salariés chacune. Le périmètre France regrouperait ainsi plus de 70 % des salariés français du Groupe dans 4 grosses sociétés, le tout mis en œuvre par le biais de fusions-absorptions.

Quelles conséquences industrielles et sociales ? La Direction se veut rassurante en précisant que cette réorganisation des entités légales ne remet pas en cause la vocation des établissements, ni les implantations géographiques et n’aura pas de conséquences sur l’emploi. Seules conséquences, le transfert légal des contrats de travail des salariés des sociétés absorbées vers la société absorbante et ainsi la remise en cause des statuts collectifs propres à chacune des sociétés absorbées. Autre effet du projet, au niveau des IRP : les mandats au niveau des établissements seront maintenus (DS, RS …), mais il y aura une recomposition des CCE. La démarche des relations sociales THALES souhaite concrétiser la fusion en novembre 2017, calendrier donc très serré des cycles d’expertises et de consultations des différentes sociétés. C’est ensuite sous un délai de 15 mois maximum, que nous aurons à converger vers de nouveaux statuts collectifs. Si les discussions avec la Direction du Groupe ont débuté par les principes généraux (niveaux des expertises, choix des cabinets …), les équipes CFE-CGC des entités respectives se sont immédiatement rapprochées pour démarrer les travaux d’inventaire et d’analyse des différents accords.

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Avionique : Avionique de vol, multimédia de cabine, entrainement et simulation, imagerie et sous-système d’hyperfréquence

Systèmes Terrestres et Aériens : Contrôle du trafic aérien civil et militaire, défense aérienne et combat terrestre

Systèmes Mission de Défense : Combat électronique, surveillance et reconnaissance terrain, et combat naval

Système de Communication Sécurisé et de Transport Terrestre : Sécurité des systèmes d’information, renseignements et surveillance, système de supervision signalisation ferroviaire, billettique -> Regroupement fait depuis 2011

Espace : Satellites, équipements et systèmes pour les programmes spatiaux -> Joint Venture (non concerné)

Ce que la CFE-CGC va défendre :  l’efficacité opérationnelle : on peut craindre que des structures plus importantes conduisent à éloigner les décideurs des activités, et sous couvert d’harmonisation, à appliquer des processus moins adaptés aux réalités locales, ce qui pourrait fragiliser la compétitivité de la société (fonctionnement, savoirfaire …) et surtout fragiliser les plus petites entités. Nous aurons également à veiller à l’avenir des entreprises écartées du projet, pour cause de difficultés techniques et industrielles, comme Thales Electrical System ;  les emplois : dans un contexte de carnets de commandes bien remplis, pas question de réduction des effectifs. La CFE-CGC s’appuiera sur l’Accord Croissance Emploi qu’elle a récemment signé et qui prévoit, entre-autre, la création de 1 000 postes supplémentaires ;  une représentation équilibrée des IRP : nous veillerons que les entités absorbées puissent trouver une représentation adaptée, notamment en CCE. Cette concrétisation serait la preuve d’un engagement fort de notre Direction pour promouvoir le dialogue social. Christelle Thieffinne, déléguée syndicale CFE-CGC Thales, Secrétaire géneral adjointe AED


Vie des entreprises

TRANSMETTRE LES PASSIONS, UN ATOUT POUR LES GÉNÉRATIONS FUTURES À la retraite, les activités ne manquent pas. Jean-Pierre Gibeau, dynamique retraité, responsable du Pôle Séniors de la CFE-CGC AED, est allé à la rencontre des collégiens en classe de 4ème à Saint Joseph de Tivoli (à Bordeaux) afin de leur transmettre la passion des métiers de l‘aéronautique. Bref Aéro : Jean- Pierre, cette année encore, tu vas présenter les différents métiers de l’aéronautique à des collégiens de la région bordelaise. Comment a débuté cette aventure ? Jean-Pierre Gibeau : depuis déjà deux ans, dans le cadre de la semaine de la découverte des métiers, j’ai accepté avec joie de présenter les différents métiers du secteur Aéronautique. C’est une très belle occasion de parler de nos métiers, de nos savoir-faire, de nos passions. Lors de cet événement, de nombreux métiers sont présentés. Bref Aéro : quelle est ton approche auprès des élèves pour les séduire ? Jean-Pierre Gibeau : en premier lieu, je les sensibilise à la valorisation de tous les métiers et en particulier les métiers dits « manuels » (trop souvent délaissés

par manque d’information). Chaque personne n’as pas le même potentiel ni la même envie, mais par le biais du travail, chacun peut s’épanouir dans un métier qui leur demandera forcément de solides bases, car les techniques comportent des éléments mathématiques, informatiques, ainsi que de raisonnements indispensables à la résolution des problèmes. Pour appuyer ma présentation, j’utilise le support de communication audiovisuel d’une grande entreprise aéronautique que je connais bien. Cette projection montre chronologiquement les métiers qui composent les équipes dans les domaines des Études, de la production, des essais en vols sans oublier la gestion administrative (DRH), de la formation, des achats, de la logistique, du support aux clients, sans oublier les gestions financière et sociale.

Bref Aéro : ton objectif séduction est-il atteint ? Jean-Pierre Gibeau : je pense que la présentation de nos métiers séduits ces jeunes élèves. Ils posent beaucoup de questions, lesquelles ont permis de passionner certains et de permettre à d’autres de faire d’autres choix. Pour moi, c’est une grande satisfaction d’avoir modestement informé et sensibilisé des jeunes aux métiers que beaucoup d’entre nous ont pratiqué avec passion. J’invite tous nos retraités à participer à ce type d’événement en milieu scolaire, car la transmission des passions est primordiale et un formidable atout pour les générations futures. Jean-Pierre Gibeau Pôle Séniors CFE-CGC AED

GEMINI : une fusion mettant à rouge les salariés d’Airbus ! Initialement présenté comme la simple fusion des sociétés Airbus Group SAS (siège d’Airbus) et Airbus SAS (siège d’Airbus Avions), GEMINI s’avère être la somme de projets indépendants, pour rendre le groupe plus efficace face aux futurs challenges, le tout sur fond de digitalisation : refonte de la recherche ; suppression des postes en doublon ; amélioration de l’efficacité des fonctions centrales. La refonte de la recherche comporte des aspects challengeants, pleins de promesses pour l’avenir. Mais pourquoi commencer par tout casser et ne pas devenir un acteur majeur dans le laboratoire parisien qu’est Saclay, pôle mondial reconnu ? Les dogmes de la direction entrainent déjà une fuite des savoirs et des compétences avec le départ de salariés expérimentés et reconnus.

L’optimisation peut s’entendre dans l’environnement compétitif auquel est confronté Airbus. Mais pourquoi réduire le nombre de salariés, dont c’est le 3e plan social consécutif ? La CFE-CGC demandait, depuis longtemps, des solutions organisationnelles, une politique de mobilité adaptée et une réelle GPEC qui auraient permis d’anticiper cette situation. Les conséquences sont donc importantes et supportées exclusivement par les salariés : - 546 postes supprimés en France ; - 184 postes transférés principalement de la région Parisienne vers Toulouse ; - la fermeture de l’établissement de Suresnes qui compte 600 salariés ; - le recours éventuel à des licenciements contraints. La CFE-CGC s’oppose à l’ensemble de ces points.

Afin de minimiser les impacts, les élus CFE-CGC ont négocié un Plan de Sauvegarde de l’Emploi (mesures d’âge, aide aux mobilités, télétravail et solutions alternatives temporaires) avec un déploiement à partir du 1er juillet. Tout le réseau CFE-CGC se tient à la disposition des salariés concernés pour répondre à leurs questions et les supporter dans leurs démarches . Christophe Berthiau Délégué syndical Airbus SAS

Patrick de Percin Délégué syndical central Airbus Group SAS

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Dossier

Mouvement social historique en Guyane…

Chronique d’une grève annoncée

UNE MENACE POUR LE CENTRE SPATIAL GUYANAIS ET LE PROGRAMME SPATIAL EUROPÉEN Le mouvement social de 2017 en Guyane débute le 20 mars à Kourou, initié par le collectif des Toukans dont les revendications portent sur la vente à un opérateur privé du Centre médico-chirurgical de Kourou (CMCK) géré par la Croix-Rouge. Il est suivi par des syndicalistes de l’Union des Travailleurs Guyanais (UTG) au sein de l’entreprise EDF dénonçant, notamment, le manque d’infrastructures énergétiques. Des barrages sont érigés à l’entrée du Centre Spatial Guyanais rendant impossible l’accès direct au site. Nous sommes alors à J-1 du lancement Ariane VA236, qui doit mettre sur orbite deux satellites de communication pour le compte d’opérateurs brésiliens et coréens. Le collectif des 500 frères rejoint le mouvement le lendemain et bloque l’accès à la ville de Kourou. Plus personne ne peut alors ni entrer ni sortir de la ville pendant la journée. Le mouvement de protestation se généralise sur tout le territoire guyanais dans les jours suivants, et la grève générale, associée à la mise en place de barrages routiers filtrant sur l’ensemble du réseau routier, paralyse totalement le département.

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Le Centre Spatial Guyanais est clairement montré du doigt, fustigé et pris en otage comme symbole représentant l’État et la Communauté Européenne sur le territoire guyanais. « On ne fait pas décoller une fusée sur fond de bidonvilles. » – François Mitterrand 1985… Alors comment une industrie de pointe synonyme de progrès, de succès, d’excellence et aux apparences si prospères, peut-elle faire décoller ses lanceurs dans un département qui cumule tant de difficultés dans tous les domaines et peine tellement à se développer ? On l’aura entendu maintes et maintes fois pendant ce mouvement, les fusées décollent, mais la Guyane reste au sol créant ainsi une fracture entre les salariés du spatial et le reste de la population…comment les grands acteurs du Spatial, l’ESA, le CNES, Arianespace et Airbus Safran Launchers peuvent-ils s’en satisfaire ? Comment en est-on arrivé là, alors que tous les signes précurseurs ne faisaient qu’annoncer, depuis de nombreuses années, l’émergence d’un tel mouvement traduisant un ras le bol général de l’ensemble de la population guyanaise, toutes catégories sociales et origines confondues, salariés du Centre Spatial Guyanais inclus ?

LA GUYANE, UN TERRITOIRE EN CRISE La Guyane est minée par le chômage et l’insécurité, en dépit d’atouts importants comme son Centre Spatial de Kourou et sa forêt équatoriale, une des plus riches du monde en matière de biodiversité animale et végétale. La population est très diversifiée : 35 % est de nationalité étrangère et le nombre d’habitants est en hausse constante, en raison notamment de l’immigration venue du Brésil, d’Haïti ou du Surinam. La Guyane est la région où la population croît le plus rapidement : 2,4 % en moyenne alors qu’elle n’augmente que de 0,5 % dans l’hexagone. 23 % de cette population est au chômage, 16 % de la population active se trouve à Kourou à travers le Centre Spatial Guyanais, poumon économique du département. Les bénéficiaires des minima sociaux sont trois fois plus nombreux en Guyane. Les prix à la consommation sont supérieurs de près de 12 % à ceux de la métropole, l’écart est considérable sur les produits alimentaires : 45 % plus chers en Guyane qu’en France métropolitaine, les logements y sont 20 % plus chers. On compte deux fois moins de médecins qu’en métropole et moins de personnels de santé. La Guyane détient le triste privilège d’être le territoire français le plus meurtrier par nombre d’habitants. L’orpaillage illégal est un réel fléau. Il a de lourdes conséquences sur l’environnement (déboisement, mercure dans les rivières…), l’économie et l’insécurité (agressions, prostitution, contrebande…). Face à ce constat accablant, dont l’ensemble de la population guyanaise est bien consciente, la CFECGC, à travers l’Union Régionale de Guyane et compte tenu du fond des revendications clairement légitime, s’est ralliée au mouvement avec, toutefois, la crainte de voir perdurer cette situation de blocage pénalisant l’économie du département et ainsi mettre davantage dans la difficulté de nombreuses entreprises et salariés dans un contexte déjà particulièrement fragile .


Dossier CHRONIQUE D’UNE CRISE SOCIALE ANNONCÉE… La réponse peut donc se résumer en quelques chiffres qui traduisent une crise réelle face à laquelle les politiques menées par les gouvernements successifs depuis la départementalisation de la Guyane en 1946, associées à des politiques locales inappropriées, n’ont jamais pu apporter de réponses satisfaisantes. L’industrie spatiale européenne demeure dans une situation particulièrement délicate à l’aube de la naissance d’Airbus Safran Launchers (Ariane Group au 1er juillet prochain) dans un contexte mondial de l’industrie des lanceurs devenu particulièrement concurrentiel…

une menace pour l’industrie spatiale européenne ? ? ? Guyane, au travers de ses différentes sections au sein de la base spatiale et en dehors, a été, est et sera acteur de cette reconquête.

Le Centre Spatial Guyanais est-il en danger face à cette crise sociale alarmante ? Les clients satellites dans un tel contexte continueront -ils à faire confiance à Arianespace qui, seule, ne peut leur garantir un accès permanent et en toute sécurité à la base de lancement, rôle de l’État à travers le CNES ? Le Centre Spatial Guyanais est, aujourd’hui, plus que jamais indissociable du programme spatial européen tel que défini pour les prochaines années (Ariane 5, 6 et Vega) comme il est indissociable de la Guyane, et si l’un de ces trois acteurs tousse, les autres s’enrhument… C’est donc dans ce contexte que les 1 700 salariés de la Base Spatiale ainsi que les nombreux missionnaires venant en campagne de lancement évoluent au quotidien. Le port Spatial de Kourou est la dernière étape de la longue chaine de production et de mise en œuvre des lanceurs, ce mouvement a clairement mis en évidence sa fragilité au sein d’un dé-

partement plongé dans une crise sociale majeure. Ce mouvement aura créé une fracture au sein de la population Guyanaise considérant les salariés de la base comme des nantis par rapport au reste de la population. Le CSG est victime de son succès et de sa renommée en Guyane, la population perçoit cette industrie en local comme rapportant des milliards d’euros chaque année à ses acteurs français et européens, ne laissant retomber que quelques miettes sur le département. La vision de la population souffre de la méconnaissance de l’activité spatiale et de ses retombées locales, ainsi que du contexte hyper concurrentiel dans lequel il se trouve aujourd’hui. Bloquer la Guyane, paralyser le Spatial en Guyane, c’est comme faire des crocs en jambes à un marathonien à la recherche d’un second souffle menaçant ainsi de le faire chuter en pleine course face à des compétiteurs qui le talonnent... La situation s’est débloquée avec la signature de l’accord de Guyane par lequel le Gouvernement Cazeneuve a accordé plus d’un milliard d’euros pour financer des projets visant notamment à améliorer les soins, la sécurité, l’économie et le fonctionnement de la justice dans le département. Arianespace, qui aura perdu plus de 500 K€ par jour de blocage, doit maintenant rattraper son retard et prouver à ses clients qu’il est capable de reprendre la main sur une situation qu’elle ne maîtrisait pas en assurant pas moins de 4 lancements en 2 mois pendant lesquels les salariés vont devoir faire les efforts nécessaires pour y parvenir. La CFE-CGC

Dès les premiers jours, nous savions que ce mouvement social risquait d’être long. Depuis longtemps déjà, nos collègues, résidents ou en mission, nous faisaient part d’une montée de l’insécurité et des problèmes sociaux (école, pauvreté, chômage …).Ces cinq semaines ont été longues. Il était temps de revenir à une situation « normale », car certaines activités étaient sur le point de se gripper en métropole : impossibilité de continuer à produire le perchlorate d’ammonium à Toulouse (composant majeur du carburant des boosters), blocage des expéditions de sous-ensembles vers la Guyane en raison du blocage de son port et du manque d’outillages faisant d’incessants allersretours …Pour autant, nous n’avons pas

été des spectateurs inactifs. Nos contacts avec nos collègues d’ArianeGroup, Arianespace, Europropulsion et Regulus furent fréquents et avec les moyens du bord (merci WhatsApp !) ; ils nous ont permis de mieux sentir les difficultés du quotidien face à une communication presse quasi absente durant la première partie du conflit, et de relayer leurs attentes. Nous avons sensibilisé nos Directions, le Gouvernement et la presse, et avons d’ailleurs reçu un large écho. Nous avons expliqué que, sans remettre en cause la légitimité de ce mouvement – à laquelle la CFE-CGC s’est associée au niveau régional – il fallait préserver notre outil de travail : 80 % des vols d’Ariane sont effectués pour le compte de clients privés.

La confiance des clients, patiemment acquise au fil des années, pouvait se rompre. L’activité a redémarré à un rythme très soutenu et nous sommes aux côtés de nos collègues pour définir des conditions de redémarrage acceptables de tous.

Vu de métropole

DES CONSÉQUENCES SOCIALES ET ÉCONOMIQUES Un mois après la fin du conflit, le bilan est lourd pour les entreprises guyanaises. De nombreux entrepreneurs ont déposé leur bilan et 1 700 entreprises ont eu recours au chômage partiel, soit un tiers des 5 000 établissements pouvant être concernés, mettant ainsi en difficulté plus de 12 000 salariés. Au Centre Spatial Guyanais, le recours au chômage partiel, bien qu’abordé au tout début du mouvement, n’a pas pu être mis en œuvre compte tenu de la complexité d’avoir recours à un dispositif commun pour l’ensemble des employeurs de la Base Spatiale. Depuis la fin du mouvement, la direction du CNES et celle d’Arianespace tentent d’aboutir à un accord de reprise avec les organisations syndicales de la base, en vain, la CFECGC s’opposant à valider un accord dans lequel ne figure aucune clause relative aux forfaits jours . Sébastien Savreux Délégué syndical ASL Kourou

Marie Villaréal Déléguée syndicale Arianespace Kourou

Bruno Ferry et Philippe Géry – Délégués Syndicaux Centraux CFECGC Arianespace et ArianeGroup* * ArianeGroup, nouveau nom d’Airbus Safran Launchers, à compter du Salon du Bourget de juin 2017

Retrouvez l’intégralité de ce Dossier « Spécial Guyane » via l’appli PictureExtend.

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C’est dans l’air

Tous céphalopodes ! Christophe Dumas Secrétaire général CFE-CGC AED

Céphalopode : du grec ancien képhalé, « tête », et pous, « pied ». En langage moderne, nous pourrions compléter cette étymologie par une définition très centrée sur l’humain : « prédisposition à marcher sur la tête ». Car enfin, nous le vivons tous, nous le sentons tous, notre bon vieux monde marche sur la tête. Prenons l’exemple des réseaux sociaux. L’un des plus connus était à l’origine une version informatisée et optimisée d’un trombinoscope pour étudiants américains mâles, au travers duquel ils pouvaient apprécier leurs consœurs. Après une phase jubilatoire où il a permis à tout un chacun de retrouver ses vieux amis ou d’exhiber ses photos de vacances, il est utilisé sans scrupule pour déballer des tombereaux de soi-disant vérités. Et plus les mensonges sont gros, plus ils ont de succès, c’est bien connu. Restons cependant optimistes : face aux dits tombereaux, on a ceux qui transfèrent les informations sans les vérifier, mais en y adjoignant leur dose de scandale, ou ceux qui cherchent à vérifier. Et pour vérifier, quoi de mieux que des vrais amis (dérivé du latin amare, « aimer ») ? Allez, si la médaille a son revers, ne boudons cependant pas l’avers trop vite. Prenons un autre exemple de céphalodéambulation (inutile de chercher une étymologie pour ce mot là, il est autoporteur). Notre pays achève une lourde période électorale. La saturation gagne bon nombre de citoyens, après des mois et des mois de campagnes pendant lesquelles chacun a prétendu pouvoir tout faire et a tout promis, pour un résultat prévisible et une déception assurée. Au fil des décennies, l’élan démocratique s’étiole, l’abstention monte. Ceci sans que nous nous rendions compte, pour la plupart, que dans d’autres pays des gens sont prêts à mourir pour glisser un misérable bout de papier dans une urne. Partis comme nous le sommes dans une

BREF

AÉRO ÉRO 8

surenchère quinquennale, les urnes électorales deviendront, si nous ne réagissons pas, les urnes funéraires de la démocratie (du grec ancien dêmos « peuple » et kratos « pouvoir »). Restons cependant optimistes : une société humaine a d’instinct le souci de sa survie. Le 14 juillet prochain, le drapeau tricolore refleurira les rues. Nous aurons une pensée sincère pour les victimes des attentats visant à agresser la société française … et le soir, les feux d’artifice coloreront l’avers de la médaille de toutes les couleurs. Nous pourrions continuer longtemps à énumérer des exemples de cette marche incompréhensible du monde : la persistance de l’exploitation des énergies fossiles, la faim dans le monde, et ainsi de suite. Le problème n’est pas forcément dans les défis auxquels nous soumettons notre bonne vieille planète. Il réside dans notre peu d’appétence à les relever. Pourtant nombre de bonnes volontés tentent de tirer les choses dans le bon sens. Mais justement, le bon sens semble se perdre !

Mai/juin 2017 • n°364 Directeur de la publication : Ludovic Andrevon Ont participé à la rédaction : C. Dumas, P. Frodefond, JP. Gibeau, F.Chiaramonte, N. St Martin, C.Thieffinne, P.Géry, S.Savreux, M.Villareal, B.Ferry, C.Berthiau, P. de Percin. Crédits photos: Quentin Reytinas ©THALES ; Arianespace Enrichissement : Picture Extend by L’œil et la plume Bref Aéro est une publication bimestrielle de la CFE-CGC AED 10-12 avenue de la Marne- 92120 Montrouge- contact@snctaa.fr Rédaction, conception, réalisation : Agence L’Œil et la plume www.loeiletlaplume.com Impression : Imprimerie La Centrale de Lens Dépôt légal : juin 2017 - ISNN : 0293-8251 - CPPAP : 0114S 08080

Alors ne lâchons rien. La France, à l’automne, va vivre un moment tendu où le monde politique tentera de convaincre le monde citoyen de la nécessité de faire tel ou tel sacrifice. Et le monde citoyen exigera une exemplarité. La confrontation peut s’avérer explosive. Collectivement et individuellement, chacun (e) devra faire le tri de ses valeurs et les prioriser. Le monde syndical sera aux premières loges. Il sera alors important que l’AED tienne sa place et dans cette optique, il est déjà pertinent que vous mobilisiez votre voisin de bureau ou votre collègue d’atelier pour nous rejoindre. Restons cependant optimistes : les vacances arrivent ! Alors, prenez des forces ! Si vous allez à la plage, essayez de nager les pieds en avant comme un céphalopode. Et si vous voyez quelqu’un le faire, ditesvous que c’est un lecteur de Bref Aéro ! Chouette, quelqu’un du syndicat (dérivé du grec sun, « avec » , et dike, « justice » ) !


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