Mars / avril 2014 • N° 345
ÉDITO
Génération Y, entreprise et syndicalisme
Sommaire Actualités Les scores de représentativité dans les entreprises 2 Nouvelles sections / nouvelles désignations 2
Vie des entreprises Lu dans la presse : Dépêche AEF du 3 avril 2014 MBDA : la dynamique franco-anglaise est en marche ARIANE 6 : la confiance, l’autre carburant d’ARIANE 6
3 3 4
Le Dossier Je suis jeune, ingénieur et adhérent à la CFE-CGC
5-7
C’est dans l’air En raison de l’arrivée tardive de l’appareil 8
e 20ème siècle aura vu la mise en place de l'hégémonie de l'actionnaire. Les entreprises rendent principalement des comptes à leurs actionnaires et, en particulier, en termes de profit. Cela est si vrai que, dans les entreprises côtées, l'information des marchés précède toujours celle des salariés... La crise financière a brutalement remis en question ce paradigme. Les entreprises doivent prendre en compte les autres parties prenantes que sont les sous-traitants, les clients, les collectivités, les salariés et la société dans son ensemble. Mais il y a loin de la prise de conscience à la pratique ! Aujourd'hui, cependant, les entreprises se préoccupent de “ Une génération qui a grandi plus en plus de développement durable et de Responsabilité Sociétale des Entreprises (RSE), à l'heure de la mondialisation mais de façon encore largement embryonnaire. et dont le destin semble lié Le 20ème siècle aura vu, de même, l'émergence d'un bout à l'autre d'une de la génération Y qui regroupe les personnes nées entre la fin des années 70 et la fin des planète de plus en plus petite années 90. C'est la première génération gloet interconnectée. ” bale. Une génération qui a grandi à l'heure de la mondialisation et dont le destin semble lié d'un bout à l'autre d'une planète de plus en plus petite et interconnectée. Elle a dû et doit affronter de nombreuses crises - économiques, sociales, environnementales ou politiques - dont l'ampleur n'invite pas spontanément à l'espoir. Mais, malgré cela, ces défis sont autant d'opportunités pour se réinventer, imaginer des solutions alternatives. Tant que l'actionnaire sera seul maître du jeu et que les autres parties prenantes seront mises à l'écart, les entreprises continueront à en subir les conséquences. La bonne nouvelle est que la génération Y a le pouvoir de rompre avec la tradition et de bâtir un nouveau récit autour de l'entreprise et sa raison d'être. Partout dans le monde de jeunes adultes, de culture et de nationalité différente, entament ces petites révolutions. Ingénieurs, architectes, entrepreneurs, politiques ou simples citoyens, ils innovent et trouvent des solutions pour changer les choses. Ils nous font prendre conscience que cette génération est capable de marquer de son empreinte les importantes mutations qui s'opèrent sous nos yeux. La génération Y détient la clé de ce nouveau paradigme d'abord et avant tout parce qu'elle est de plus en plus responsabilisée aux questions de responsabilité. Elle perçoit cette pression publique très critique vis-à-vis de l'entreprise et elle comprend qu'il faut changer les choses. La CFE-CGC AED veut participer à cette évolution. Elle veut y apporter sa pierre et sa capacité d'action. Nous avons investi, depuis plusieurs années, sur le développement de nos jeunes adhérents et militants. Un de nos militants, dans le cadre de la VAE syndicale mise en place par la CFE-CGC, fait un Master 2 d'intelligence sociale à Science Po sur ce thème. Rendez-vous dans le dossier de ce numéro. < Bernard Valette - Président CFE-CGC AED
Actualités
EN BREF LES CRÉATIONS DE SECTIONS HERAKLES Toulouse Michel Capdecomme est désigné délégué syndical. CASSIDIAN Aviation Training Services SAS Cognac Daniel Bidenbach est désigné délégué syndical. AIRBUS PROSKY Blagnac Anthony Garnaud est désigné délégué syndical. ZODIAC SEAT France Issoudun Éric Durand et Martial Coutant sont désignés délégués syndicaux. NOUVELLES DÉSIGNATIONS Éric Horville remplace Bernard Joncour au poste de représentant syndical au CCE AEROLIA. Jacques Roussey remplace Jean-Luc Maisonhaute au poste de représentant syndical au CCE THALES AVIONICS.
AED
Élections de représentativité AED… Voici quelques résultats des élections dans nos entreprises. TECCON : ité et un poids de une représentativ cette nouvelle de 78,57 % au sein DUP !
HERAKLES LE HAILLAN une représentativité de 34,88 % et un poids de 25,98 %.
AIRBUS SAS : une représentativité et un poids de 49,26 %, soit une progression remarquable de 12,22 % ; à ¾ de point du nirvâna total !
HERAKLES CRB : une représentativité de 25,37 % et un poids de 20,86 %.
HERAKLES ST M ÉDARD : uune représentativité de 39, 30 % et un poids de 28,77 %, avec pour la 1ère fois des élus au ème 2 collège !
THALES AVIONICS CSC : une représentativité de 38,82 %, là aussi, une progression remarquable de 11,12 %. ZODIAC SEAT FRANCE : Une représentativité de 51,7 % et un poid s de 21,4 %. Pour une première élection, c'est un coup de maître ! Bravo à toute l'équipe.
Le développement en adhérents se traduit d it encore une fois f i en une amélioration éli ti de notre représentativité... À suivre… < Marc Legrand, Secrétaire général AED
Vie des entreprises DÉPÊCHE AEF du 3 avril 2014
Lu dans la presse
Par Sandrine Andrieu
HERAKLES (GROUPE SAFRAN) VA AIDER SES SALARIÉS DANS L'ACQUISITION DE LEUR LOGEMENT
DES SALARIÉS VIVANT LOIN DE LEUR TRAVAIL
H
P
erakles (groupe Safran) étudie la mise en place d'un dispositif lui permettant d'abonder la bonification de prêts immobiliers pour aider ses salariés à acheter leur résidence principale. Proposé à l'origine par la section CFE-CGC de l'entreprise, ce "coup de pouce" viendra compléter les aides du 1 % Logement et ciblera les primo-accédants à la propriété, soit, potentiellement, un quart des effectifs de l'entreprise. Le principe de ces prêts bonifiés a été acté par l'accord salarial 2014, signé le 18 mars dernier avec les syndicats CFE-CGC et CFDT, et leur déclinaison concrète devrait être connue en juin prochain. Cette mesure - "une garantie de pouvoir d'achat en plus" selon la CFE-CGC - s'ajoutera à des hausses de salaires, qui pourront atteindre cette année chez Herakles 2,60 % pour les non-cadres et 2,75 % pour les cadres. Si l'entreprise Herakles abonde de 0,2 % à 0,4 % - hypothèse la plus probable selon la CFE-CGC - les prêts que ses salariés peuvent solliciter, au titre du 1 % Logement (1), cela reviendrait à diminuer de 10 % les mensualités d'emprunt pour ces primo-accédants, assure le syndicat à l'AEF. Pour l'instant, les modalités financières et techniques de ces prêts bonifiés ne sont pas arrêtées (l'entreprise va-t-elle passer une convention avec un organisme bancaire ou mandater un ou des collecteurs du 1 % logement pour garantir le mécanisme ?) mais la filiale de Safran, implantée principalement en Gironde, s'est engagée à étudier leur mise en place en 2014 dans son accord salarial. Parmi les 2 300 salariés de l'entreprise, 25 % sont âgés de moins de 30 ans et pour la plupart ne sont pas propriétaires de leur habitation. <
our la section CFE-CGC de l'entreprise, qui réclamait ce "coup de pouce" depuis deux ans, il s'agit ainsi de desserrer un peu l'étau dans l'accession aux aides du 1 % Logement. "L'État a prélevé de plus en plus sur ces fonds, avec pour conséquence que les conditions d'octroi de ces prêts sont devenues plus strictes. Le plafond de revenus pour y accéder diminue d'année en année", explique le DSC du syndicat, Philippe Géry, par ailleurs administrateur du Cilso, un organisme collecteur du 1 % Logement. Le représentant de la CFE-CGC avance aussi des raisons plus locales, justifiant une aide accrue de la part de l'employeur : "les différents établissements d'Herakles sont situés dans des zones (Bordeaux, région parisienne, Toulouse) où les prix du foncier sont élevés, ce qui oblige les salariés à habiter de plus en plus loin de leur lieu de travail". Une mesure de ce type peut aussi satisfaire les intérêts de l'entreprise, et pas seulement de ses salariés, analyse le syndicaliste : "Herakles, comme toutes les sociétés, est d'accord pour donner plus à ses salariés, à condition que cela ne représente pas un budget pérenne. La politique de primes, chez nous, est plutôt critiquée alors qu'une aide au logement, ciblant les primo-accédants, donc a priori les jeunes salariés, est vue comme positive". Cette idée n'est pas tout à fait nouvelle au sein du groupe Safran, assure la CFE-CGC. Un dispositif similaire de prêts immobiliers bonifiés existe déjà chez le motoriste Snecma. Il a été mis en place il y a une dizaine d'années par le DRH d'alors, Philippe Boulan, aujourd'hui en poste chez Herakles, mais qui n'a pas souhaité, à ce stade du projet, faire de commentaires. <
MBDA : LA DYNAMIQUE FRANCO-ANGLAISE EST EN MARCHE
P
lus de 12 ans après la création de MBDA, les gouvernements français et britanniques viennent de donner une nouvelle dynamique à la construction de l’industrie missilière européenne en lançant le missile Anti Navire léger destiné à équiper les hélicoptères de leurs marines. Ce programme, prévu dans le traité de Lancaster House signé par les deux États en novembre 2011, était l’élément attendu par l’industriel pour poursuivre l’intégration de ses activités. Si ce n’est bien évidemment pas le premier missile lancé en coopération, ce lancement marque une étape importante vers la création d’un Airbus des missiles où chaque partenaire aura, demain, en charge la réalisation d’un équipement pour l’ensemble des produits du groupe. Dans un premier temps, plusieurs pôles d’excellence ont été définis, la partie Française ayant en charge le développement et la production des calculateurs et bancs de tests, les britanniques assurant ceux des actionneurs et liaisons montantes. Pour la CFE-CGC, qui a toujours soutenu l’émergence d’un leader européen, seule alternative
aux baisses des budgets domestiques et une concurrence à l’export de plus en plus agressive, cette dynamique va dans le bon sens car elle doit permettre d’éviter la dispersion des budgets de développement et les pertes de compétence ou d’abandon de certains créneaux faute de moyens. La France étant aujourd’hui le centre de gravité de l’activité européenne tant en terme d’effectif, de chiffre d’affaires que de nombre de produits, la CFE-CGC veillera à ce qu’une intégration européenne plus forte n’ait pas pour conséquence de rééquilibrer les poids respectifs de nos sociétés nationales et donc de faire payer aux salariés français l’intégration européenne. Cette évolution nous amène également à nous interroger une nouvelle fois sur la lenteur de nos dirigeants politiques européens à construire une Europe de la Défense, car il faudra, demain, gérer dans une même entreprise une intégration renforcée entre deux partenaires, sans exclure ni inquiéter les salariés des entités italiennes et allemandes. On le voit, il reste encore beaucoup de chemin à parcourir avant de pouvoir parler d’un Airbus des missiles. < Christian Sibuet, Délégué syndical central MBDA
3
3
Vie des entreprises ARIANE 6
LA CONFIANCE, L’AUTRE CARBURANT D’ARIANE 6
L
e sujet Ariane 6 revient au devant de la scène. Les industriels français, sous l’égide de l’ESA et du CNES, ne lâchent pas l’affaire. Cependant rien n’est simple, c’est ce qui ressort de la réunion CFE-CGC sur le thème d’Ariane 6 qui s’est tenue au siège de l’AED.
Le point de départ, l’ADN d’Ariane 6 est des plus simples : il faut faire moins cher. Ariane 5 est très performante techniquement. Son ADN à elle était de pouvoir amener dans l’espace feu la navette Hermès et son équipage. Mais il est difficile d’en organiser le programme de tir. Son système de lancements doubles requiert, en effet, d’apparier deux satellites, ce qui veut dire que celui qui est à l’heure attend celui qui est en retard. Ce qui complique la tâche des commerciaux. Mais comme on attend l’arrivée de la propulsion plasmique sur les satellites, avec son gain de performance, mais au détriment de la durée de mise à poste, l’analyse se complique. On pourrait réduire la taille des satellites et faciliter l’appairage. En outre, la concurrence est là ; traditionnelle, russe ou américaine, ou nouvelle comme la fusée chinoise Longue Marche ou le nouvel entrant américain Space X. Dans le premier cas, nous ne pouvons pas douter de la capacité de l’industrie chinoise à atteindre les bons niveaux de performance. Dans le second, Space X affiche des prix de lancement défiant toute concurrence… et des performances techniques qui collent bien au marché. Ou plutôt qui, alliées à la propulsion plasmique des satellites, bouleversent le marché. Il faut donc qu’Ariane 6 puisse être aussi compétitive que le lanceur Falcon de Space X. Le prix de lancement de ce dernier devient LA référence dans laquelle s’engouffrent les directions des industries et des agences spatiales européennes. Or, quelques – rares – voix avisées s’élèvent pour s’interroger sur la crédibilité du modèle … que d’autres exploitent à des fins
4
de restructuration interne, d’ailleurs. Comment faire une Ariane 6 peu chère ? C’est d’abord l’ESA qui a envoyé des appels d’offre à la terre entière sur tous les sujets, avec le risque de devoir qualifier de nouveaux entrants. On se souvient du déroulement de l’appel d’offre Galiléo, que l’ESA a finalement attribué à un outsider … aujourd’hui en retard d’un an. C’est ensuite le CNES qui établit ses prescriptions. Avec de bonnes idées apparentes, comme par exemple concevoir une Ariane 6 à base de quatre boosters à poudre identiques, trois groupés pour faire le 1er étage et un au-dessus. Ce sera plus lean, c’est sûr ! Efficace, c’est autre chose. Des voix – rares là encore – s’élèvent tout de même pour dire que des moteurs cryogéniques – limités au troisième étage sur Ariane 6 rappelons-le – seraient plus faciles à adapter aux charges utiles. Ah oui parce que le but est de faire moins cher, mais c’est aussi de mettre des satellites en orbite ! Plus grave, le choix d’une fusée qui fait la part belle à la propulsion solide pose de sérieux problèmes à l’industrie française. Comme quoi le consensus n’est décidément pas de mise. Notons enfin l’industrie, qui évoque clairement le fait que si on la laisse aussi libre que l’est Space X pour organiser la filière spatiale en Europe, elle saura tenir les objectifs de coûts. Évitera-t-on les querelles franco-françaises, comme entre Airbus Group et Safran ? Si les Directions Générales peuvent s’entendre dans le microcosme parisien, sur le terrain la confiance, ça ne se décrète pas. Surtout dans le contexte actuel : • si Ariane 6 est « tout poudre », les sites de SNECMA Vernon, d’AIRBUS Group et d’EUROCRYOSPACE Les Mureaux sont menacés sur leur filière cryogénie ; • si Ariane 6 est « tout poudre », quelle sera la part confiée à l’italien AVIO ? • qui rachètera AVIO ? • quel avenir pour la cryogénie en France ?
Moyennant quoi, si on y regarde de près, le projet Ariane 6 porte en lui le germe d’une restructuration profonde de l’industrie spatiale française. Et qui dit restructuration dit, « naturellement », destruction d’emplois. Délégués syndicaux CFE-CGC des sites concernés, nous avons confronté nos visions respectives de la situation. Il en ressort que nous ressentons l’absence d’un intérêt commun qui serait partagé au sein de la filière, de haut en bas. On nous parle concurrence et coût de manière défensive, en occultant les notions de souveraineté. On nous parle de limiter les pertes de part de marché, alors qu’il faudrait au moins les maintenir sinon les accroître grâce à Ariane 6. Et surtout, des voix s’élèvent pour dire qu’il ne sera pas possible de poursuivre en parallèle les travaux d’adaptation d’Ariane 5 à la concurrence, et ceux sur Ariane 6. L’ESA a senti le danger et a demandé à AIRBUS Group, OHB, AVIO et SAFRAN de se mettre d’accord pour un partage des activités. Au printemps seront figés les concepts qui seront présentés, en fin d’année, lors de la conférence ministérielle de Luxembourg. Il est encore temps d’agir. Le ministère de la Recherche, que l’AED a rencontré en janvier, est très volontariste, optimiste presque à l’excès, en estimant qu’une Ariane 6 compétitive saura accroître ses parts de marché. La CFE-CGC en appelle à la mobilisation de la filière spatiale française autour d’objectifs communs, partagés, volontaristes et qui offriront à chaque site des gisements d’emplois et progrès. La France est, depuis 50 ans, à la pointe de l’industrie européenne des lanceurs, la CFE-CGC ne peut pas la regarder sans rien faire perdre sa place… et nos emplois. < Christophe Dumas Délégué administratif
Dossier D os o ossier sier
Je suis jeune, ingénieur et… adhérent CFE-CGC L’exercice de responsabilités dans la vie publique suscite de moins en moins de vocation. Le même constat peut-il être établi concernant l’engagement syndical ? Qui sont ces jeunes ingénieurs, à peine entrés dans la vie active, qui font le choix d’adhérer à une organisation syndicale ? Comment les sections réussissent-elles à séduire les nouvelles recrues ?
E INDIVIDUALISATION INTERCONNEXION IMMÉDIATETÉ INVENTIVITÉ BIENVENUE DANS LA CULTURE Y
lle s’appelle la Génération Y et fait l’objet d’études, d’enquêtes. Elle est décortiquée, observée, analysée, mais est-elle vraiment différente de ses aînées ? À la CFE-CGC AED, intrigués par tout ce raffut autour de cette génération, nous avons étudié les chiffres, sondé le terrain, rencontré des jeunes ingénieurs adhérents.
La culture Y À l’occasion du 47ème congrès CFE-CGC AED, en 2012, Bernard Valette évoquait, dans son rapport d’orientation, la place importante qui devait être consacrée à la Génération Y dans la politique de développement syndical. Ainsi, il jugeait indispensable de mener une réflexion-action sur les jeunes tout en développant les réseaux jeunes existants. « Environ la moitié de nos nouveaux adhérents sont de la Génération Y »,
expliquait-il aux congressistes. Plus qu’une génération, au sens pyramide des âges, une nouvelle culture est née. Les principales caractéristiques de cette « Culture Y » sont les 4I : • « Individualisation » : ni « Zappeurs » ni désengagés, la passion et l’action priment ; • « Interconnexion » : réseaux sociaux bien sûr, mais cette connexion est ancrée dans le monde réel. La notion de relation évolue et le lieu de travail s’ouvre aux émotions ; • « Immédiateté » : avoir un travail ayant du sens, une rémunération équitable et un manager à l’écoute est un dû ; • « Inventivité » : la copie est la base de l’invention, l’amélioration n’est plus continue, elle est agile et l’innovation « fluide ». Alors que depuis plusieurs années, la CFE-CGC AED 5
5
Dossier affiche une croissance annuelle, en terme de nouvelles adhésions, à deux chiffres, les adhésions des jeunes actifs de -30 ans représentent 11 % des effectifs globaux. Fruit d’une volonté de développement affirmée et portée par le bureau national de l’AED et d’un travail de terrain acharné dans les sections, ce chiffre révèle l’intérêt de la Génération Y pour la vie de leur entreprise.
Le syndicalisme aurait-il trouvé les clés pour séduire la Génération Y ?
SOPHIA SECOURGEON, 27 ANS, INGÉNIEURE QUALITÉ CHEZ DASSAULT AVIATION, ADHÉRENTE DEPUIS 6 MOIS.
Jean-Marc Granié est un responsable de section heureux ! Dans son entreprise, Airbus Operations à Toulouse, les jeunes ingénieurs représentent une part importante des nouvelles adhésions, et ce, depuis plusieurs années. « Au cours des quatre dernières années, 800 nouveaux adhérents ont rejoint la CFE-CGC, dont 500 ont moins de 40 ans. L’an passé, ce sont pas moins de 160 jeunes qui ont adhéré sur les 230 nouvelles adhésions enregistrées par la section », note Jean-Marc Granié. Chez Airbus Operations, le terrain est quadrillé et il permet de percevoir les jeunes recrues. La proximité des élus sur le terrain séduit beaucoup ces jeunes ingénieurs. « Nous leur proposons des services qu’aucune autre organisation ne leur apporte. Nous les orientons dans le déroulement de leur carrière, les soutenons dans leur implication syndicale. En règle générale, un jeune ingénieur adhère à la CFE-CGC un à deux ans après son embauche », poursuit Jean-Marc. Dans cette section CFE-CGC, 96 jeunes ingénieurs ont des mandats syndicaux. Un nombre qui fait rêver, mais qui s’explique par la qualité de l’accord de droit syndical négocié chez Airbus Operations. « Grâce à cet accord, les jeunes n’ont plus peur de prendre des mandats syndicaux car ils savent qu’ils ne seront
pas pénalisés dans leur carrière. Nous avons de la chance d’avoir de jeunes militants », conclut JeanMarc Granié. Du côté d'Airbus Helicopters, à Marignane, Sébastien Molina fait un constat assez semblable. « La Génération Y n’adhère pas par conviction, mais plus par séduction. De ce fait, nous nous devons de les attirer par la qualité de nos services », explique le responsable de la section marignanaise dont 19 % des adhérents ont entre 25 et 34 ans. Ici aussi, dans cette usine forte de 9 000 salariés, le maillage du terrain est indispensable. Les délégués font un travail de fourmis dans leur secteur, afin d’informer les jeunes embauchés qui n’ont pour la plupart jamais entendu parler des syndicats lors de leur formation. « Nous devons leur expliquer notre rôle, à quoi nous servons dans l’entreprise. Celà prend du temps pour les convaincre que nous sommes indispensables à la bonne marche de l’entreprise. Ce qui fait notre force auprès des jeunes ingénieurs, c’est le fait que nous soyons très présents dans la maîtrise et chez les ingénieurs et cadres. Car ne nous mentons pas, les jeunes ingénieurs adhèrent à la CFE-CGC parce que nous sommes catégoriels, et aussi pour la force de notre réseau dans l’entreprise. Ils pensent à leur carrière et à leur avenir et ils savent que la CFE-CGC peut les aider et les soutenir dans leurs recherches de mobilité et d’évolution dans Airbus Helicopters », poursuit Sébastien Molina. Chez Daher-Socata, à Tarbes, la Génération Y a vite compris de l’intérêt de se syndiquer (30 % des adhérents CFE-CGC de la section tarbaise ont moins de 35 ans). Dans une entreprise, Daher, qui n’avait pas d’organisation syndicale représentant les 2ème et 3ème collèges jusqu’à l’absorption de Socata, l’arrivée d’une section CFE-CGC forte a fait des émules. « Les salariés de Daher ont vite compris l’intérêt de la CFE-CGC et apprécié son aspect caté-
Ingénieure Qualité, Sophia travaille sur des projets transverses ce qui l’amène à communiquer et composer avec des interlocuteurs très différents pour mener à bien les projets. Suivant les conseils avisés de ses amis, employés eux-aussi chez Dassault Aviation, Sophia s’est intéressée aux organisations syndicales présentes dans son entreprise peu après son embauche. « Dans la conjoncture actuelle, un marché du travail qui peine à croître et une croissance stagnante voire en déclin, je trouve essentiel d’intégrer une organisation syndicale afin de promouvoir les intérêts des employés d’une société qui marche, tout en conservant les objectifs financiers de celle-ci », explique Sophia. La CFE-CGC Dassault Aviation ayant des objectifs qui vont dans le sens de ceux de son entreprise, la jeune ingénieure a donc décidé d’adhérer à la section de Saint-Cloud. « C’est pour promouvoir l’intérêt des salariés, et aussi pour améliorer le statut de la femme au sein de mon entreprise que j’envisage de m’impliquer à mon rythme dans le syndicalisme », poursuit-elle, considérant qu’un engagement syndical ne freinera d’aucune manière sa jeune carrière au sein de sa société. « L’engagement syndical ne doit pas affaiblir nos performances au travail, ni les objectifs économiques de la société. Je pense que si l’on applique ce principe, cet engagement ne peut pas nuire, bien au contraire. Si on se bat pour des raisons qui nous tiennent à cœur, on est respecté pour nos actions », conclut Sophia.
6
À l’issue de son stage de fin d’études réalisé au sein d’Aerospatiale, Loïck s’est vu proposer une embauche. Jeune ingénieur, il adhère, par le biais d’un collègue de travail, à la CFE-CGC. « C’est la proximité de la CFE-CGC qui a joué lors de mon adhésion. Je connaissais le syndicalisme car mon grand-père et mon père étaient des élus, donc je n’ai pas adhéré par hasard. » En 2011, Loïck brigue un premier mandat syndical, il est élu délégué du personnel. En janvier dernier, il a été désigné représentant syndical au CE. « Aujourd’hui, je me sens plus utile dans mon entreprise grâce à mon engagement syndical alors que je ne ressens plus cette utilité dans ma vie professionnelle. Dans notre entreprise aujourd’hui, nous n’avons plus l’accompagnement que nous avions au début de ma carrière. Nous ne sommes plus valorisés. Dans le cadre de ma vie professionnelle, je travaille avec de jeunes embauchés, je remarque qu’ils font le strict minimum, ils s’engagent moins. Astrium connait à l’heure actuelle un PSE, les jeunes viennent chercher de l’information auprès des organisations syndicales, beaucoup d’entre eux sont peu ancrés dans l’entreprise. Avant de prendre mes responsabilités de représentant syndical au comité d’entreprise, j’ai beaucoup réfléchi et le mandat qu’on m’a confié me motive énormément, bien plus que ma carrière professionnelle pour le moment ! »
LOICK COURPRON, 34 ANS, SALARIÉ CHEZ ASTRIUM BORDEAUX, ADHÉRENT CFE-CGC DEPUIS 6 ANS.
goriel », remarque Franck Meier, responsable de la section CFE-CGC Daher-Socata de Tarbes. Ici aussi, les jeunes ingénieurs adhèrent deux ans après leur embauche. « Ils viennent vers nous pour se préserver et pour instituer un contre-pouvoir. Ils ont bien compris de l’intérêt d’adhérer, mais en ce qui concerne l’engagement en prenant un mandat syndical, ils n’osent pas. Ils appréhendent de s’exposer. En général, ce n’est qu’après plusieurs années que l’intérêt de s’engager syndicalement et prendre des mandats pointe chez certains ».
La CFE-CGC AED version 2.0 Les sections et le syndicat ont été obligés de s’adapter à la culture de la Génération Y. De très nombreuses structures se sont mises à l’ère du syndicalisme 2.0 et communiquent avec les mêmes outils
Page Facebook CFE-CGC AED : www.facebook.com/CfeCgcAED
que leurs jeunes adhérents. Comptes Twitter, pages Facebook, sites web syndicaux, blogs, vidéos, applis mobiles, tous les outils sont déployés et utilisés pour toucher cette génération qui va vite et communique beaucoup. La CFE-CGC AED s’est adaptée, elle aussi, aux modes de communication de ses jeunes adhérents. Elle anime une page Facebook sur laquelle elle diffuse ses clips vidéo, commente l’actualité sociale et celle des entreprises de la branche. Si tous les outils digitaux sont développés et utilisés, il n’en reste pas moins que le maillage de terrain et le contact humain restent les meilleurs outils de connexion dans le monde réel de l’entreprise. <
Film de présentation : http://youtu.be/-diFvCBTB_o
La CFE-CGC AED version 2.0
Clip « Parler vrai » : http://youtu.be/MPXGCA-xLCU
7
7
C’est dans l’air
En raison de
l’arrivée tardive de l’appareil…
Est-ce un effet pervers de la mondialisation ? De l’individualisation du management ? Des deux à la fois ? La mode, nous sommes nombreux à le vivre, est au management par objectif.
L
a pression est très forte dans le quotidien d’une foule de métiers. Le rapport client / fournisseur est roi, même là où on essaye de sauver ce qui reste d’un esprit d’entreprise. Non, ce qui compte, ce n’est pas le bien être au travail, c’est d’être ISO 9001. Il faut faire ce qu’on a dit. Or, nous formons tous l’un des maillons d’une chaîne de longueur extrême, où les responsabilités sont difficiles à distinguer. Prenons le cas de cette personne qui vous annonce le retard de votre avion, dans un hall d’embarquement. C’est elle qu’on va enguirlander parce qu’on va arriver en retard, rater une réunion ou le bisou au petit dernier. Mais dans le fond, y est-elle pour quelque chose ? Non, elle est juste là pour se faire engueuler si ça ne va pas. Prenons maintenant notre collègue de travail. On lui donne des objectifs. Il est obligé de les accepter. Ca s’appelle la pression. S’il les refuse, il va être moins bien classé. L’atteinte de ses objectifs sera jugée plus facile que pour d’autres. Sa prime sera moins importante. Alors il accepte, en sachant que certains ne seront pas atteignables. Multipli ons ce phénomène sur tout l’organigramme. On arrive à une entreprise qui prend des engagements, et qui ne les tiendra pas. Pour tout un tas de raisons, internes ou externes. Mais elle ne les tiendra pas. On pourrait s’en offusquer ou s’en inquiéter. Même pas, parce que dans le fond, c’est le monde entier qui marche comme ça. Nous vivons dans une hypocrisie mondialisée qui incite tout le monde à prendre des engagements, à justifier par la complexité des processus
qu’il n’a pas été possible de les tenir, et à proposer au client la personne qui va bien, qu’on va pouvoir engueuler à cause « de l’arrivée tardive de l’appareil ». On en fait même des « hotlines ». Et puis de toutes façons, comment est récompensé le salarié qui se défonce pour tenir quand même ses objectifs ? Sur fond de disette budgétaire et salariale, dans une société française qui nivelle l’échelle sociale par le bas, il y a des années que la CFE-CGC dénonce le faible écart entre ceux qui cravachent et ceux qui laissent filer. Tout en observant que laisser filer, avec le temps, ça devient malheureusement une attitude normale, compréhensible et justifiée. On s’épuise à être peu nombreux à tenir des engagements, peu récompensés. Moralité : que faire pour que notre avion parte à l’heure ? En première approche, donner aux managers les moyens de reconnaître le vrai mérite. Pour ça rien de mieux, tout de même, que de récompenser via le pouvoir d’achat. Les trucs genre coffret cadeau, c’est gentil, mais ça inscrit l’exploit dans le provisoire et puis c’est tout. C’est une récompense a minima, qui n’engage pas la masse salariale : le risque serait trop grand de déplaire à l’actionnaire ! Ce qui nous ramène une nouvelle fois au pilotage de la masse salariale. On peut tourner la chose dans tous les sens : les politiques suivies depuis 20 ans brident l’enthousiasme et l’envie. Et puis c’est tout. De là à dire qu’elles ont un effet sur la compétitivité il n’y a qu’un pas. Et certains se plaignent d’une France mollassonne…<
Di Directeur dde lla publication bli i : BBernardd VValette l Coordinateur de la rédaction : Daniel Verdy Ont participé à la rédaction : C. Dumas, M. Legrand, C.Sibuet Crédits photos : Thinkstock Bref Aéro est une publication bimestrielle de la CFE-CGC AED - 66 rue des Binelles- 92310 Sèvres - contact@snctaa.fr Rédaction, conception, réalisation : Agence L’œil et la plume - www.loeiletlaplume.com Impression: Imprimerie La Centrale de Lens Dépôt légal : avril 2014 ISNN : 0293-8251 - CPPAP : n°0119S08080
8
Christophe Dumas, Délégué administratif