JUIN 2021
Fonds d'investissement
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une démarche plus durable est aussi dans l’intérêt des entreprises » Didier Reynders Commissaire européen à la Justice
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C’est officiel : l’inflation est de retour. Tous les indicateurs avancés en témoignent : que ce soit le prix du transport par conteneur ou le prix des matières premières. La cause ? Une demande supérieure à ce qui était prévu et une offre qui tarde à redémarrer. Une offre qui, lorsqu’elle sera sortie de son hibernation covidienne, devra répercuter la hausse des transports et des matières premières alimentant mécaniquement la machine. Une offre qui doit également faire face à un manque de main-d’œuvre poussant les salaires à la hausse aux États-Unis. Pour ceux qui en doutaient, la vaccination a rempli son rôle et a dégrippé l’économie. Trop vite et trop fort ? Aux États-Unis, champions de la vaccination, l’inflation renoue avec son niveau de 2008. En Europe, à la traîne de ce point de vue, l’inflation reprend, mais plus modérément. Toute la question est de savoir si cette reprise va s’installer dans le temps et si c’est une mauvaise chose pour les marchés. Une grande partie des économistes et des analystes considèrent que cette surchauffe est conjoncturelle et due à des facteurs qui ne se renouvelleront pas. Et ils mettent en avant le fait que l’inflation sous-jacente ne progresse pas. Pour d’autres, au contraire, le mouvement est relancé et les banques centrales vont alors être contraintes de cesser leurs politiques monétaires ultra-accommodantes, avec comme conséquence une baisse des marchés actions et un retour en grâce des valeurs refuges. Qui aura raison ? En attendant de le savoir, les marchés risquent d’être extrêmement volatils dans les mois qui viennent. Les gestionnaires de fonds d’investissement vont devoir faire preuve de clairvoyance pour passer ce cap.
Auteur MARC FASSONE
JUIN 2021 FONDS D’INVESTISSEMENT
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Fonds d’investissement Juin 2021
06 LE RADAR
Une Place toujours aussi grandissante 08 LE JOUR OÙ...
… J’ai posé pour la première fois mes valises au Luxembourg
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Les nouveaux défis de la gouvernance
10 CONJONCTURE
Les fonds ne connaissent pas la crise 18 TENDANCE SUR LE MARCHÉ
Les fonds alternatifs, gourmands en main-d’œuvre 22 AVANTAGES ET INCONVÉNIENTS
36 INTERVIEW DIDIER REYNDERS « Obliger chaque acteur à mettre en place une gouvernance durable »
p. 36 Didier Reynders souhaite soutenir les ambitions de l’Union européenne en matière de transition verte.
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44 CONSEIL D’ADMINISTRATION La montée des administrateurs indépendants
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48 INVESTISSEMENT DURABLE La taxonomie verte décryptée
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24 ALTERNATIVE INVESTMENT FUNDS
52 RESPONSABILITÉS La gouvernance, plus importante que jamais !
32 CONCURRENCE
Salomé Jottreau / Anthony Dehez
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Se fier aux Fiar Pourquoi investir dans les AIF ?
Illustration / Photo
Dossier
Les classes d’actifs challengers
56 POST-BREXIT
Le Brexit a-t-il touché le fonds ? 60 TOKÉNISATION
L’avenir sera-t-il aux cryptoactifs ? 66 FORECAST
p. 2 4 Les AIF, une classe d’actifs alternatifs qui présente de nombreux avantages. Ces fonds connaissent une popularité croissante.
Comment le Luxembourg peut-il garder sa compétitivité ? JUIN 2021 FONDS D’INVESTISSEMENT
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Le radar
Une Place toujours aussi grandissante CONSEIL
Une domination américaine Les 10 plus importantes sociétés de gestion d’actifs au monde (en billions de dollars). 1
Blackrock (États-Unis) 7,32
DOMINATION AMÉRICAINE
Origine des actifs des OPC luxembourgeois Situation en mars 2021 pour un total d’actifs nets de 5.248,971 millards d’euros. Source
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Vanguard Group (États-Unis) 5,7
3
UBS Group (Suisse) 3,52
4
State Street Global Advisors (États-Unis) 3,05
5
Fidelity Investments (États-Unis) 2,92
6
Allianz Group (Allemagne) 2,53
7
J.P. Morgan (États-Unis) 2,51
8
Goldman Sachs (États-Unis) 2,06
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Bank of New York Mellon (États-Unis) 1,96
10 Pimco (États-Unis) 1,92 Source
FRANCE 10%
CSSF
ITALIE 6,6%
BELGIQUE 4,4%
LUXEMBOURG 3,4%
ADV Ratings
PAYS-BAS 2,3%
DANEMARK 2,1% 6
FONDS D’INVESTISSEMENT JUIN 2021
AUTRES 5,4%
Après une année 2020 chamboulée par la pandémie mondiale, la place financière luxembourgeoise a tiré son épingle du jeu et est revenue plus forte. Elle continue d’être un point d’accès sur le marché européen avec des qualités qui lui sont historiques.
ALLEMAGNE 13,8% 3 QUESTIONS À
JÉRÉMIE SCHAEFFER
Partner du cabinet Atoz
SUISSE 14,4%
Quel a été l’impact du Brexit sur l’origine des promoteurs de fonds luxembourgeois ? Le Grand-Duché a manifesté très tôt une volonté d’ouverture et de coopération à l’égard de Londres, qui s’est traduite encore récemment par la mise en place d’un régime d’équivalence nationale à destination des entreprises financières britanniques supervisées par la FCA (Financial Conduct Authority). Même si une place comme Dublin a attiré un grand nombre de gestionnaires pour des raisons culturelles évidentes, l’approche luxembourgeoise s’est avérée payante et devrait conforter la position de leader dans l’administration des fonds du pays. L’origine des promoteurs au Luxembourg a-t-elle évolué ? Les chiffres démontrent une assez faible évolution. À la fin de l’année 2020, 20 % des sponsors étaient originaires des ÉtatsUnis, de Grande-Bretagne (17 %), de Suisse (14 %), d’Allemagne (13 %) et de France (10 %). Hors UE, les dernières années ont connu la montée en puissance d’opérateurs chinois, tendance qui devrait se confirmer dans le futur.
GRANDE-BRETAGNE 17%
Qu’est-ce qui rend la Place intéressante pour les promoteurs hors EU ? Pour tout gestionnaire d’actifs, la Place est le point d’accès au marché européen. Elle doit ce succès à des qualités historiques : expertise en matière de distribution, stabilité politique, économique, juridique et fiscale, et palette unique d’outils à disposition des promoteurs – on pense au succès du Fiar (fonds d’investissement alternatif réservé, ndlr), dont le nombre a doublé entre fin 2019 et mars 2021 ; mais aussi à un positionnement fort sur des secteurs d’avenir : finance verte et fintech en tête. De fait, le label FIA luxembourgeois est désormais aussi incontournable et attractif que le label Ucits luxembourgeois l’a été pour les OPCVM (organismes de placement collectif en valeurs mobilières, ndlr). Auteur S. L.
ÉTATS-UNIS 20,6% JUIN 2021 FONDS D’INVESTISSEMENT
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Le jour où…
… J’ai posé pour la première fois mes valises au Luxembourg Fabien Vrignon a pris ses fonctions de CEO de Keytrade Bank Luxembourg en février 2019. Il se souvient de sa première entrée en ville, sous une neige drue, et de sa découverte progressive d’une place financière aussi dynamique qu’accueillante.
Bien sûr, après seulement un an, la crise du Covid-19 a quelque peu perturbé les plans, mais nous avons la chance d’être une banque digitale. L’ensemble de nos équipes s’est retrouvé en télétravail du jour au lendemain. Cela faisait un an et demi que nous étions en phase de digitalisation de tous les processus. Pour donner un exemple, l’acquisition de nouveaux clients, ce que nous appelons l’onboarding, est 100 % digitale depuis octobre 2019 chez Keytrade Bank. Et les résultats sont au rendez-vous. Nous avons, par exemple, attiré 2,5 fois plus de clients en 2020 par rapport à l’année précédente. Rien que sur la période de mars-avril, nous avons recruté 6 fois plus de clients que ne le prévoyaient nos plans… L’effet « waouh » a été au rendez-vous.
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Fabien Vrignon est le CEO de Keytrade Bank Luxembourg depuis février 2019.
Matic Zorman
Sur le plan professionnel, je quittais un poste À l’avenir, nous avons prévu d’accorder de CEO à Genève pour passer dans l’univers 20 % de télétravail à tous ceux qui le soude l’Union européenne, avec ses forces et ses haitent, parce qu’il est clair que cette formule faiblesses. Rapidement, on se rend compte apporte de la flexibilité et un meilleur équilibre que le Luxembourg est un pays très pragma- entre vie personnelle et vie professionnelle. tique, ce qui me rappelle la Suisse dans cer- Cela dit, le télétravail a aussi ses limites. Quand tains domaines. Par contre, dans l’univers de il s’agit de faire évoluer une banque, de créer la finance, l’aspect régulatoire y est plus pré- de nouveaux services, les relations à distance, gnant. C’est en tout cas ce que j’ai pu ressen- sans contact humain, nous font perdre en prétir à la tête d’une petite structure comme la cision. Notre cerveau est fait pour échanger, nôtre. J’ai surtout rencontré, dès mon arrivée, interagir, parler de tout et de rien. Et c’est soudes équipes motivées, désireuses de donner vent au détour d’un couloir, quand la réunion le meilleur d’elles-mêmes. Cela m’a fait plai- est finie, que l’on partage l’information la plus sir de voir cela, même si mon expérience me importante. Pour en revenir à un aspect plus fait dire que, à de rares exceptions près, cette personnel, je me suis vite rendu compte de la envie de bien faire est présente en de nom- qualité de vie que peut offrir ce pays. J’apprécie breux endroits. J’ai fortement apprécié cet véritablement Luxembourg-ville. Cette sensaentrain communicatif. On découvre de nou- tion d’être à la campagne dès que l’on parcourt veaux collaborateurs, leurs caractères respec- quelques kilomètres est très agréable pour tifs, leur sensibilité, leurs compétences, leur quelqu’un qui a vécu de nombreuses années à expérience. Le plus important, pour moi, était Paris. J’avais déjà pris une petite dose de nature d’organiser la banque en conséquence, afin lors de mon passage en Suisse, et cela se pourde répondre aux défis qui m’attendaient, avec suit aujourd’hui. le but ultime de veiller toujours davantage à Auteur M. P. la satisfaction de nos clients.
Photo
La première image qui me revient à l’esprit, c’est cette neige compacte qui tombait sur Luxembourg-ville. J’arrivais d’Évian-les-Bains, au bord du lac Léman, et j’ai été surpris par ces flocons à plusieurs centaines de kilomètres de la Haute- Savoie… Jusque-là, je ne connaissais pas vraiment le Luxembourg. J’avais vécu en France, à Paris, avant de rejoindre la Suisse. J’avais vaguement entendu parler de la place financière luxembourgeoise, mais pas davantage, et j’avais véritablement tout à découvrir. Cela dit, quand on quitte un poste pour un autre, on retrouve ce même engouement, avec l’envie de faire de nouvelles découvertes. Je dois dire que j’ai été agréablement surpris par le dynamisme qui règne ici ainsi que par l’accueil que m’ont réservé les Luxembourgeois.
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Conjoncture
Les fonds ne connaissent pas la crise
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précieux, au restaurant, au théâtre ou dans une salle de concert. Ils ont surtout causé des dommages importants à l’économie, de nombreux secteurs se retrouvant tout simplement privés de revenus durant de nombreux mois, jusqu’à aujourd’hui, pour certains. Si le Luxembourg, à l’instar de nombreux autres pays, a rapidement pris le taureau par les cornes, en lançant des programmes d’aide qui ont permis à toute une série d’entreprises de limiter la casse, les conséquences réelles de cette crise inédite ne pourront être embrassées que sur le long terme.
de panique a bien fait vaciller ces marchés durant quelques semaines mais, l’effet de surprise passé, ils n’ont pas tardé à retrouver l’équilibre. Mieux, certains ont même battu des records. Pour s’en rendre compte, quelques chiffres valent mieux qu’un long discours : malgré une perte de 20 % subie en l’espace record de 22 jours au mois de mars, les marchés actions internationaux ont fini l’année en hausse globale de 6,11 %, selon l’index MSCI World. Si l’Europe, spécifiquement, s’en sort moins bien que la Chine sur l’année 2020, certaines de ses places financières ont réussi à tirer leur épingle du jeu en récoltant les fruits de cette efferLa finance prend le large vescence sur les marchés. À commencer par Si le moment n’est donc pas encore venu de dres- le Luxembourg et son industrie des fonds. ser un bilan des pertes encourues sur le champ La Place grand-ducale a certes été, elle aussi, de bataille du Covid-19, on peut déjà exclure ébranlée par la crise au mois de mars 2020. de ce tableau comptable les acteurs des mar- Au cours de cette période, pour la première chés financiers. Certes, une bourr asq ue fois depuis très longtemps, le montant des actifs
FONDS D’INVESTISSEMENT JUIN 2021
Illustration
Les superlatifs manquent pour décrire les événements qui, grosso modo depuis le début de l’année 2020, frappent l’ensemble de la planète. Symptôme de l’omniprésence croissante de l’Homme, jusque dans les régions les plus sauvages du globe, mais aussi d’un monde dont les moindres fractions n’ont jamais été connectées, physiquement, de façon aussi efficace, la pandémie de Covid19 a réintroduit dans nos esprits ce sentiment que beaucoup avaient oublié : la conscience de notre fragilité. Face à un virus inconnu, particulièrement contagieux et emportant les plus vulnérables d’entre nous, des politiques publiques drastiques ont été mises en place. Les confinements successifs en sont sans doute le symbole le plus fort. Ils ont contribué à nous faire comprendre combien ces moments d’insouciance passés en famille ou entre amis étaient
Salomé Jottreau
Alors que l’économie réelle a été profondément impactée par la crise du Covid-19, la finance, elle, a battu de nouveaux records en 2020. Le secteur des fonds sera toutefois confronté à de nombreux défis au cours des prochains mois.
Photo
Jan Hanrion (archives)
sous gestion dans des fonds d’investissement luxembourgeois a chuté de plus de 11 %. Mais le marché n’a pas tardé à reprendre sa marche en avant et à faire tomber les records. Il aura fallu moins de six mois pour que le volume de ces actifs retrouve son niveau d’avant la crise (4.882,41 milliards d’euros en novembre 2020) et, à la fin du mois de janvier 2021, la barre symbolique des 5.000 milliards d’euros était franchie (5.050,132 milliards d’euros). « Cette courbe ascendante se poursuit depuis. À la fin mars 2021, le volume d’actifs sous gestion au Luxembourg s’élevait déjà à près de 5.250 milliards d’euros, commente Corinne Lamesch, présidente de l’Association luxembourgeoise des fonds d’investissement (Alfi). Sur les 12 derniers mois, la progression est de 26,5 %, ce qui démontre toute la capacité de résilience de notre industrie. »
CORINNE LAMESCH Présidente, Association luxembourgeoise des fonds d’investissement (Alfi)
« Alors qu’il s’agissait d’une niche il y a quelques années, 16 à 17 % des actifs totaux de notre industrie sont aujourd’hui placés dans des fonds alternatifs. »
Une politique monétaire qui fait mouche Cette asymétrie entre le krach vécu par l’économie réelle et le boom de la finance peut toutefois interpeller. « La raison en est pourtant simple : nous sommes confrontés à une crise économique, et non à une crise financière comme en 2008 », tranche Paul Van den Abeele, investment funds partner au sein de Clifford Chance Luxembourg. Face à cette situation de crise économique, les réactions des banques centrales à travers leurs politiques monétaires financial services market leader au sein de ont eu pour conséquence de faire jaillir un PwC Luxembourg. Je pense que cette crise écoflux de liquidités qui a alimenté les fonds nomique pourrait toutefois avoir des impacts d’investissement. « Ces programmes sont tou- à plus long terme sur certains domaines d’acjours en cours et continuent de bénéficier au tivité du secteur financier, par exemple la banque. secteur des fonds, notamment grâce aux inves- Mais aujourd’hui, on constate que les marchés tisseurs institutionnels comme les fonds de ont bien digéré la pandémie. » pension ou d’assurances, explique Olivier Carré, Si le rôle de la politique monétaire menée depuis le début de la crise de Covid-19 est pointé par l’ensemble des acteurs du secteur financier comme l’un des éléments qui s’est avéré le plus efficace pour éviter le naufrage de la finance, il n’est pas le seul. « Les qualités intrinsèques de la place financière luxembourgeoise ont aussi joué, explique Corinne Lamesch. LES FONDS ESG PEUVENT-ILS Aujourd’hui, nous pouvons notamment compVRAIMENT SAUVER LA PLANÈTE ? ter sur une clientèle internationale très diverLa montée en puissance des fonds ESG sifiée, avec des fonds distribués dans plus de a de quoi interroger les plus suspicieux 70 pays. » Pour la présidente de l’Alfi, la résid’entre nous. Des outils financiers, qui profitent aux plus puissants, peuvent-ils réellelience du secteur financier, au Luxembourg à ment changer la marche du monde et tout le moins, est aussi une bonne nouvelle produire des effets concrets et durables sur le climat et la planète ? « Les fonds ESG pour l’économie réelle. « Il faut tout de même répondent à un besoin politique et de rappeler que, dans ce pays, plus de 30 % du PIB société, estime Olivier Carré. Ils permettent est généré directement ou indirectement par le aussi, aujourd’hui, de réaliser des profits. Mais il s’agit là d’une condition de base pour secteur financier. Si celui-ci se sort bien d’une les rendre attractifs. Ce qui est clair, c’est crise comme celle du Covid-19, c’est toute l’écoque les capitaux investis vont se déplacer nomie qui s’en porte mieux. On l’a bien vu avec vers des entreprises plus respectueuses des critères ESG. Cela contraindra un bon les chiffres sur la croissance. Alors que l’on annonnombre de sociétés à revoir leurs pratiques. çait une contraction du PIB luxembourgeois de Celles-ci devront en outre effectuer un l’ordre de 6 % il y a quelques mois encore, nous reporting régulier attestant de leur respect de ces critères. En ce sens, il n’est pas loun’avons finalement perdu que 1,3 % sur l’année. foque de penser que ces fonds durables À l’avenir, les fonds d’investissement, en général, auront un impact positif sur la planète. » seront amenés à avoir une plus grande imporSeul l’avenir nous dira si nous avions raison d’y croire ou non. tance encore dans l’économie réelle. »
La silencieuse montée en puissance de l’alternatif La bonne santé du secteur des fonds, chiffres à l’appui, est donc indéniable et a de quoi réjouir dans le contexte que nous connaissons. Pourtant, en ce qui concerne le volume d’actifs sous gestion, ce tableau chiffré n’est pas tout à fait complet puisqu’il passe sous silence tout un ensemble d’actifs au succès grandissant. « Les chiffres annoncés font seulement état des actifs placés dans des fonds réglementés, relève en effet Paul Van den Abeele. Or, de notre point de vue, c’est bien dans les fonds non réglementés, alternatifs, que la croissance est la plus importante. » Cet attrait est surtout le fait d’investisseurs professionnels et non de personnes privées. « Les investisseurs privés investissent plus dans des fonds traditionnels, qui mélangent actions et obligations. C’est la faiblesse des rendements qui les pousse à adopter cette attitude, explique Olivier Carré. Par contre, les investisseurs professionnels comme les assureurs, les fonds de pension ou les banquiers cherchent de nouveaux canaux d’investissement, notamment les classes d’actifs plus alternatives comme le private equity ou les fonds de dette. Cela permet à la fois d’obtenir un meilleur rendement et de décorréler certains avoirs des marchés boursiers. » Au sein de l’Alfi, on est bien conscient de cette croissance et du rôle essentiel que devraient jouer les fonds alternatifs dans le futur, tant pour la finance que pour l’économie réelle. « Alors qu’il s’agissait d’une niche il y a quelques années, 16 à 17 % des actifs totaux de notre industrie sont aujourd’hui placés dans des fonds alternatifs, indique Corinne Lamesch. Ces fonds se ‘démocratisent’ et intéressent aussi de plus en plus les high net worth individuals. Or, les sommes investies dans ces fonds serviront à soutenir des PME, à construire des infrastructures, à financer les projets concrets de demain, ce qui est positif pour l’économie réelle. » Positive, la croissance des fonds alternatifs l’est aussi pour le Luxembourg et son industrie des fonds. « Le Luxembourg est une des Places les plus réputées au monde pour la structuration de fonds alternatifs. L’attrait grandissant pour cette classe d’actifs est donc une bonne nouvelle pour le pays », estime Olivier Carré. Financer la transition durable Bien entendu, tous les fonds alternatifs n’ont pas le même succès. Après cette année de crise, certains types d’investissements ont plus le vent en poupe que d’autres. « Les produits digitaux, les infrastructures, les fonds de dette ou l’immobilier sont les plus populaires aujourd’hui, résume Paul Van den Abeele. Mais la tendance est aussi aux investissements sur un plus long terme, qui offrent une plus grande protection. C’est le cas notamment dans l’immobilier, mais aussi dans le private equity. Cette durée plus longue convient particulièrement bien
JUIN 2021 FONDS D’INVESTISSEMENT
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Conjoncture
aux investisseurs institutionnels, qui ont des obligations sur 20, 30, 40 ou 50 ans. » Au rang des tendances, il est impossible de ne pas évoquer également les investissements durables, respectant des critères ESG (environnementaux, sociaux et de gouvernance). La nécessité de financer la transition écologique mais aussi le changement des mentalités des investisseurs sont sans doute deux des facteurs qui expliquent l’attrait croissant des gestionnaires de fonds pour ces produits. Selon Morningstar, 233 milliards d’euros ont été levés en Europe dans des fonds ESG en 2020, soit le double de l’année précédente. Et 120 milliards supplémentaires ont déjà été collectés au 1er trimestre 2021. « Les fonds qui intègrent la durabilité dans leur décision d’investissement ou qui ont un objectif d’investissement durable sont connus des investisseurs depuis un moment maintenant, mais l’entrée en vigueur, le 10 mars dernier, du règlement européen sur la publication d’informations en matière de durabilité dans le secteur des services financiers (Sustainable Finance Disclosure Regulation, ndlr) devrait rendre ces investissements plus attractifs encore, en offrant plus de transparence à tous les acteurs du marché, explique Maren Stadler-Tjan, investment funds partner au sein du cabinet d’avocats Clifford Chance. De plus, les rendements aujourd’hui offerts par ces produits sont intéressants. Les choses bougent très vite et, pour de nombreux spécialistes, il est bien possible qu’il n’existe tout simplement presque plus de produits non durables d’ici quelques années. » À la croisée des chemins Pour les acteurs du secteur financier, le phénomène des investissements ESG n’est pas une mode passagère. Au contraire, nous venons de franchir un point de basculement en la matière et le retour en arrière sera sans doute impossible. « La mise au point de réglementations plus claires sur ces sujets témoigne d’une réelle volonté politique d’avancer dans cette direction. Au niveau européen, une trajectoire ambitieuse a été définie pour arriver à la neutralité carbone et le secteur des fonds est intégré à cette stratégie, note Olivier Carré. Ce mouvement induit toutefois un changement structurel pour le secteur, qui se répercutera aussi sur les banques, les assurances, etc. Désormais, des solutions adaptées à ces critères ESG plus clairement définis vont devoir être proposées aux investisseurs, et il faudra se conformer à de nombreuses réglementations liées au sujet. Les entreprises dans lesquelles on investit devront, elles aussi, adopter des mesures claires pour améliorer leurs standards environnementaux. » À présent au cœur des préoccupations, l’investissement ESG pourrait, lui aussi, être un important levier de croissance pour une place financière luxembourgeoise qui a eu 12
FONDS D’INVESTISSEMENT JUIN 2021
UN AGENDA RÉGLEMENTAIRE CHARGÉ La Place luxembourgeoise a toujours su s’adapter rapidement aux nouvelles réglementations européennes. Elle devra conserver cette attitude par rapport aux nouvelles législations en préparation. DIRECTIVES AIFM ET UCITS Les règles européennes appliquées aux managers de fonds alternatifs (AIFM) sont en cours de révision afin de mieux protéger l’investisseur et l’ensemble de l’économie européenne. Cette révision pourrait également conduire à un réajustement de la directive Ucits. Selon l’Alfi, la révision de certaines clauses – sur la délégation, notamment – ne s’avérait pas nécessaire et pourrait impacter l’industrie luxembourgeoise des fonds, dont la distribution hors Europe. SUSTAINABLE FINANCE DISCLOSURE REGULATION (SFDR) Nous l’avons dit, la finance durable est là pour durer. Afin de mieux encadrer les pratiques en la matière, les AES (Autorités européennes de supervision) ont mis au point une réglementation sur la divulgation d’informations sur la finance durable (SFDR). Celle-ci impose aux entités de communiquer clairement sur la classification des fonds, les inciden ces négatives liées à la durabilité, les politiques en matière de risques, etc. « Avec la taxonomie verte, cette réglementation pourrait bousculer l’industrie financière, au Luxembourg comme ailleurs », assure Corinne Lamesch. CAPITAL MARKETS UNION 2.0 (CMU II) Destinée à faire bénéficier les entreprises, investisseurs et consommateurs européens, où qu’ils soient situés, de l’argent investi sur les marchés financiers, la deuxième version de la Capital Markets Union est présentée comme un levier de choix pour redresser l’économie suite à la crise du Covid, mais aussi pour répondre aux défis de la transition verte. « Son intérêt principal, pour nous, est de nous amener à réfléchir à la façon d’attirer plus d’investisseurs retail sur les marchés financiers », commente la présidente de l’Alfi. RÉVISION DE L’ELTIF L’European Long-Term Investment Fund (Eltif) est un véhicule permettant de faciliter l’investissement – à travers des fonds alternatifs – dans des actifs à plus long terme, comme les transports et les projets d’infrastructures sociales (hôpitaux, énergie, etc.). La révision de cet outil vise notamment à s’assurer qu’il réponde aux objectifs européens d’une croissance durable et inclusive. Touchant aux fonds alternatifs, la révision de l’Eltif pourrait aussi impacter Luxembourg.
l’intelligence de se positionner rapidement sur le sujet. « L’Europe offre l’univers le plus large et le plus diversifié en matière de fonds ESG, relève Corinne Lamesch. Et le Luxembourg est un vrai pionnier en la matière, qu’il s’agisse de la création de fonds ou de leur labellisation, via LuxFlag. En outre, avec le Lux Green Exchange (LGX), nous avons également mis sur pied la toute première bourse verte. Tout cela explique qu’aujourd’hui, un tiers des fonds ESG sont basés au Luxembourg. » Ces structures, en place depuis déjà quelques années, ont en réalité eu l’effet d’une bonne campagne marketing sur la réputation de Luxembourg. « Elles permettent de présenter la Place luxembourgeoise comme un lieu où le sujet de la durabilité a une importance réelle. Aujourd’hui, nous devons faire en sorte que les investissements durables soient une carte de visite similaire à celle que constituent déjà les fonds Fiar (fonds d’investissement alternatifs réservés, ndlr) ou Ucits, par exemple », ajoute Maren Stadler-Tjan. Quand les coûts poussent à la consolidation À l’heure actuelle, tout va donc pour le mieux pour l’industrie luxembourgeoise des fonds. Cela ne signifie toutefois pas qu’il faille s’endormir sur ses lauriers. Au cours des prochaines années, de nombreux défis se dresseront sur la route des acteurs du secteur. Et, paradoxalement, la montée en puissance des fonds ESG – et de la réglementation qui les accompagne – pourrait venir bousculer le marché. « Le durcissement de la réglementation, notamment en matière de durabilité, ne facilite clairement pas la vie des petits acteurs, à l’exception des structures de taille si modeste qu’elles échappent à ces obligations, estime Paul Van den Abeele. Il est évident que les grosses structures sont mieux armées pour assumer le coût induit par la réglementation. Les petits acteurs, eux, devront faire supporter ces coûts supplémentaires à leurs clients, ce qui pourrait finir par poser problème. Le sujet de la réglementation ne se limite toutefois pas au durable. On assiste aussi à une inflation des règles liées notamment au blanchiment. Pour certains clients étrangers – asiatiques par exemple –, la difficulté qu’ils éprouvent à créer un fonds au Luxembourg devient même difficile à comprendre. » S’il n’y a pas d’alternative à la réglementation, il s’agit sans doute de trouver le bon équilibre pour que celle-ci reste bien au service des investisseurs, sans constituer un frein trop important à la bonne marche des affaires. Au fil du temps, on pourrait donc assister à des mouvements de consolidation entre acteurs de la Place. En augmentant ainsi leu taille et le volume de leurs actifs sous gestion, ces structures pourront mieux faire face aux nouveaux impératifs. « Cette tendance
NVESTISSEMENT EAU FOND AC ACTEURS INVESTISSEMENT ÉTH BLIGATIONS VERTES SRI ENGA IF DURABLE RAPPORT INTÉGRÉ CTIONNARIAL VERTES RISQUE LIMATIQUE EXCLUSION ENVIRO NTÉGRATION ESG* AVEC OPTIM ALE SOCIALE ET DE GOUVERNA ION TRANSPARENCE CARBONE ACTEURS ENVIRONNEMENTAUX iShares. L’investissement durable, simplifié. Constituez-vous un portefeuille plus durable en toute transparence.
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Conjoncture
OLIVIER CARRÉ Financial services market leader PwC Luxembourg
«Aujourd’hui, on constate que les marchés ont bien digéré la pandémie. » 14
des fonds transférés avant le départ officiel du Royaume-Uni de l’Union européenne. Mais de nombreux concurrents en ont fait de même, à commencer par l’Irlande. Suite au Brexit, Dublin a servi de solution de repli à de nombreux acteurs anciennement installés à Londres. « Il ne faut pas sous-estimer le risque de voir des pays comme l’Irlande prendre une avance considérable en mettant au point des régimes favorables pour les investisseurs. Le Luxembourg dispose heureusement d’une expertise et d’une histoire par rapport aux fonds d’investissement qui ne peuvent pas être rattrapées en deux coups de cuillère à pot », ajoute Paul Van den Abeele. Éduquer et anticiper Au-delà de la concurrence venue d’autres pays, il faut aussi garder un œil sur celle que représentent des structures privées, bien connues de chacun, comme les Gafa (Google, Amazon, Facebook, Apple). Ces géants du digital disposent en effet d’une expertise unique, mais aussi d’une connaissance fine des préférences d’un nombre considérable de citoyens à travers le monde. « Ces acteurs savent comment communiquer au mieux avec les clients, en utilisant des solutions digitales de pointe. Ils disposent également d’une force de frappe financière très importante. S’ils venaient à investir le secteur des fonds, ils pourraient rapidement devenir incontournables », prévient Corinne Lamesch. Pour éviter d’en arriver là, il est donc crucial d’attirer au Luxembourg des sociétés et des professionnels qui travaillent sur les technologies les plus récentes, telle la blockchain. « Je dois dire que le Luxembourg s’en sort pas mal à ce niveau, notamment grâce à la Lhoft, qui abrite un écosystème intéressant pour un petit pays comme le Luxembourg, poursuit la présidente de l’Alfi. Mais il est aussi
FONDS D’INVESTISSEMENT JUIN 2021
PwC Luxembourg
La concurrence fait rage On l’a dit, Luxembourg est sur les bons rails pour tirer profit des opportunités liées à la croissance des classes d’actifs alternatives. La Place dispose aussi toujours des mêmes atouts pour attirer les investisseurs qui souhaitent créer des fonds réglementés plus traditionnels. Mais, dans un environnement post-Brexit, il est crucial de ne pas laisser filer la concurrence, à l’affût de la moindre ouverture pour se détacher du peloton. « Le besoin d’innover est plus important que jamais, croit Olivier Carré. Nous devons parvenir à maintenir le niveau de sophistication que tout le monde reconnaît au Luxembourg, ce qui n’est pas évident, mais aussi être précurseurs dans certains domaines, à commencer par l’ESG. » Dans un contexte post-Brexit, il est d’autant plus important de rester sur ses gardes. Le Luxembourg a certes tiré son épingle du jeu en attirant, principalement en 2019, une trentaine de sociétés britanniques ainsi que
L’un des défis de l’industrie financière est d’attirer plus d’investisseurs privés sur les marchés. Si des efforts peuvent encore être faits, considérant les importantes liquidités qui dorment encore sur certains comptes bancaires, les particuliers nourrissent déjà le secteur des fonds de plusieurs façons. « D’abord, l’argent qui se trouve sur nos comptes bancaires est déjà investi par la banque, notamment à travers l’industrie des fonds d’investissement, rappelle Paul Van den Abeele. Ensuite, les inquiétudes par rapport aux pensions poussent un nombre grandissant de personnes à souscrire à une épargne-pension. Or, les sommes placées dans ces produits sont, elles aussi, investies sur les marchés. »
nécessaire d’étendre l’offre éducative. Nous avons par exemple participé à la refonte du programme du master en finances de l’Université du Luxembourg, pour permettre aux étudiants de développer des compétences plus proches de ce qu’attendent les acteurs du marché. Nous participons à des réflexions menées par des écoles de commerce pour enrichir et étendre la panoplie de l’offre curriculaire. » Forte de sa réputation, la Place devrait parvenir à continuer d’attirer les talents dont elle a cruellement besoin, voire à les former. Mais elle devra aussi arriver à s’adapter à d’importants changements au niveau réglementaire, notamment la révision des directives AIFM et Ucits, qui constituent le socle sur lequel s’est développée l’industrie luxembourgeoise des fonds au cours des dernières années (lire notre encadré). Une convergence en matière de surveillance prudentielle est également en cours de réflexion. « De notre point de vue, une surveillance de ce type étant exercée par l’Europe sur les banques, je ne crois pas qu’il soit nécessaire de l’appliquer également aux fonds d’investissement », commente Corinne Lamesch. Par ailleurs, la présidente de l’Alfi souligne la nécessité d’attirer plus d’investisseurs privés dans le secteur des fonds. « Certains ménages européens disposent de réserves de cash importantes, que nous devons pouvoir capter, notamment à travers des produits d’épargne-pension individuels. Selon nous, il faut que ces produits soient paneuropéens, car les citoyens bougent aujourd’hui beaucoup. C’est à nous de les lancer et de les développer pour continuer à faire grandir notre industrie. Mais il sera aussi nécessaire de former les citoyens à la finance, de leur offrir une réelle éducation financière qui leur permette de mieux en comprendre les mécanismes, la façon d’investir, les risques que cela représente, etc. Nous nous réjouissons, à ce titre, de la campagne lancée dernièrement par Luxembourg for Finance pour les citoyens grand-ducaux. » D’une manière générale, pour faire face aux défis de demain et maintenir Luxembourg sur le podium des places financières mondiales, il faudra conserver et cultiver les réflexes adoptés depuis de nombreuses années : anticiper les tendances, être proactif, faire entendre sa voix et parfaire une boîte à outils qui suscite l’envie ailleurs en Europe. C’est tout le mal que l’on souhaite à l’industrie luxembourgeoise des fonds.
Auteur Q. D.
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LE PRIVÉ NOURRIT DÉJÀ LES FONDS
à la consolidation devrait s’accélérer au cours des prochaines années, annonce Corinne Lamesch. Mais cela ne veut pas dire qu’il ne restera plus de place pour des acteurs et des produits de niche. Au final, ce sont surtout les structures moyennes, entre les deux extrêmes, qui devraient souffrir le plus. » Cette vision est partagée par Olivier Carré. « Si le risque de consolidation est évident, il n’est pas forcément négatif : un marché qui bouge est toujours plus intéressant qu’un marché statique. En outre, je suis convaincu qu’il reste beaucoup de place pour les acteurs spécialisés. La question qui se pose pour les acteurs de taille plus modeste qui sont déjà installés sur la Place est de savoir s’ils se spécialisent ou s’ils choisissent de s’industrialiser. Ils courent surtout un danger en n’évoluant pas. »
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Pour Vincent Lebrun, Tax Partner & Alternatives Leader chez PwC Luxembourg, afin de préserver son attractivité, Luxembourg doit se réinventer en permanence.
Fonds alternatifs
La compétitivité du Luxembourg est-elle en danger ? Dans le contexte du Brexit, la plupart des gestionnaires de fonds alternatifs établis à Londres ont été contraints de se repositionner sur d’autres Places afin de pouvoir continuer à accéder au marché unique. Luxembourg, Dublin ou encore Paris espéraient profiter du contexte pour se renforcer en accueillant ces acteurs. L’Irlande dans le rétroviseur Au terme du processus, le bilan que l’on peut tirer donne des indications intéressantes sur 16
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l’attractivité et la compétitivité de chaque Place vis-à-vis de ce segment de l’industrie des fonds en plein développement. « Alors que Luxembourg avait initialement de l’avance pour attirer ces acteurs, on constate par les chiffres que c’est Dublin qui a le mieux tiré son épingle du jeu, accueillant environ un tiers des acteurs londoniens du monde alternatif, commente Vincent Lebrun, Tax Partner, Alternatives Leader au sein de PwC Luxembourg. La Place luxembourgeoise, malgré la réputation
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Sur le segment des fonds alternatifs, c’est l’Irlande qui sort gagnante du Brexit. Aujourd’hui, Dublin se présente comme une alternative de plus en plus attractive face à Luxembourg… qui doit dès lors veiller à se renforcer.
Simon Verjus (Maison Moderne)
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ATTRACTIVITÉ DES PLACES VIS-À-VIS DE L’INDUSTRIE DES FONDS EN PLEIN DÉVELOPPEMENT
dont elle jouit, pointe en deuxième position et est suivie par Paris. » Le Luxembourg, avec 815,4 milliards d’euros d’actifs alternatifs gérés au quatrième trimestre 2020, reste devant l’Irlande (796,1 milliards). « Cependant, la croissance des actifs domiciliés en Irlande est désormais plus rapide. Entre le quatrième trimestre 2018 et 2020, la croissance annuelle des actifs a été de 7,6 % au Luxembourg, contre 14.2 % pour l’Irlande », tempère Vincent Lebrun. L’Irlande, bien inspirée par le Luxembourg entre autres L’Irlande apparaît actuellement comme la destination postBrexit la plus attrayante, surtout pour des asset managers anglo-saxons, en raison de l’usage généralisé de l’anglais, des liens culturels préexistants, de la proximité géographique avec le Royaume-Uni, du lancement des véhicules de type partnership qui, maintenant, sont en concurrence directe avec le flagship luxembourgeois (la SCSp) et d’une fiscalité attractive pour les asset managers. Aucun de ces éléments n’apparaît en soi menaçant, mais les petits ruisseaux font les grandes rivières, et le Luxembourg devrait dès maintenant prendre garde à l’inondation. « Le taux d’imposition des sociétés, de 12,5 %, y est nettement inférieur à celui appliqué à Luxembourg. En outre, Dublin a pris une position singulière dans
« Luxembourg reste leader, avec toujours de beaux atouts et une solide avance sur ses concurrents. » Vincent Lebrun Tax Partner & Alternatives Leader PwC Luxembourg
l’approche de certaines nouvelles mesures comme la mise en place d’ATAD 1, en matière de déductibilité des intérêts et bénéficie des atouts importants pour le rapatriement des fonds vers les fonds d’investissement », poursuit Vincent Lebrun. Ces dernières années, l’Irlande s’est aussi beaucoup inspirée des éléments qui ont fait le succès du Luxembourg dans le monde des alternatifs, en mettant par exemple en place un système de partnership qui vient compléter l’ensemble des autres atouts et combler l’espace qui la différenciait du Luxembourg. Les avantages compétitifs dont seul le Luxembourg pouvait se prévaloir sont aujourd’hui partagés. La compétition entre les Places, Luxembourg, Dublin et Paris, est plus rude que par le passé. « Luxembourg reste leader, avec toujours de beaux atouts et une solide avance sur ses concurrents, commente l’expert. Toutefois, ces éléments témoignant d’une certaine perte de compétitivité surtout dans certaines catégories d’actifs comme la dette et crédit qui sont très actifs en ce moment doivent nous interpeller et nous inciter à nous réinventer, pour préserver nos atouts et la position de leader. » À propos de compétitivité, il est à noter que suite au Brexit, la place financière de Londres a lancé une consultation officielle auprès des acteurs alternatifs de toute part, leur demandant les réformes à apporter afin de jouer un rôle plus prépondérant dans le secteur Alternatif. Préserver la compétitivité Luxembourg n’a pas le loisir de se reposer sur ses lauriers malgré ses avantages. « Nous disposons d’un large panel de véhicules, entre la SICAR, la SIF, le RAIF ou le limited partnership, pour répondre à chaque besoin. Il est toutefois important de s’assurer de la bonne compréhension de ces produits et de faciliter leur mise en œuvre », explique Vincent Lebrun. Aux yeux de l’expert, il est important que le régulateur
Milliard d’euros
1,000 900
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796,1
800 700 600 500 400
300 200
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0
Dublin
Luxembourg
Entre le 4e trimestre 2018 et 2020, la croissance annuelle des actifs alternatifs domiciliés à Dublin était de 14,2 %. Au 4e trimestre 2020, leur volume était de 796,1 milliards d’euros.
Sur la même période, la croissance annuelle des actifs alternatifs domiciliés au Luxembourg était de 7,6 %. Le volume total d’actifs gérés depuis Luxembourg reste le plus important, avec 815,4 milliards d’euros.
demeure flexible, à l’écoute des acteurs et permette un time to market adapté aux besoins du marché. « Enfin, il faut aussi travailler sur le volet fiscal, pour garantir une réelle sécurité aux acteurs tout au long de la durée de vie d’un fonds, en égale mesure par une clarté plus grande des mesures fiscales majeures, introduites pendant les 2 dernières années de manière à aboutir à un cadre juridique lisible et stable, ainsi que par l’évolution du cadre législatif fiscal d’une manière compétitive avec les évolutions et les mesures des autres pays cités », poursuit Vincent Lebrun. Dans le choix du domicile de ses véhicules, un gestionnaire place un ensemble de critères dans la balance. « Il ne faut pas sous-estimer les avantages, même parfois indirects, d’autres États
membres. Il est en outre très compliqué pour l’acteur d’opérer depuis plusieurs centres. Plus que jamais, nous sommes exposés à l’éventualité, si un gestionnaire commence à privilégier une autre Place, de le voir y déployer toute son activité », assure Vincent Lebrun. Un risque que le Luxembourg ne peut sans doute pas se permettre.
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JUIN 2021 FONDS D’INVESTISSEMENT
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Tendance sur le marché
Les fonds alternatifs, gourmands en main-d’œuvre Les fonds alternatifs ont le vent en poupe. Mais plus diversifiés que leurs homologues traditionnels, ils exigent davantage de travail et de temps. Ce qui n’est pas sans représenter un défi pour les acteurs de la place financière.
Si la Place luxembourgeoise a construit sa le fonds, le temps que la NAV soit finalisée et renommée et son succès grâce aux fonds dits approuvée. En permettant de souscrire à la der« traditionnels », ce sont désormais les fonds nière NAV connue, la loi FIS a bouleversé ce d’investissement alternatifs – private equity, marché et a agi comme un véritable déclenimmobilier, infrastructures, dette, micro cheur du succès des fonds alternatifs. » La retranscription dans la loi luxembourfinance, etc. – qui semblent davantage être sur le devant de la scène. geoise de la directive européenne sur les ges« Le Luxembourg a été le premier pays à tionnaires de fonds d’investissement alternatifs, transposer, dans les années 1980, la directive la directive AIFM (Alternative Investment des fonds non alternatifs, des OPCVM (orga- Fund Managers), en 2013, a encore accéléré nismes de placement collectif en valeurs leur développement. « Cette directive a commobilières, ndlr). C’est sur cette base que le plètement changé la donne, souligne Laurent Grand-Duché s’est imposé en tant que première Capolaghi, private equity leader au sein d’EY place financière en termes d’actifs sous gestion, souligne Marc Meyers, managing partner de Loyens & Loeff Luxembourg. Mais, depuis 2004, nous développons aussi une réputation croissante dans les fonds alternatifs. » Une boîte à outils de plus en plus fournie Des cadres réglementaires, dédiés à certains types de fonds alternatifs, ont en effet permis à de nouveaux produits de voir le jour. La loi sur les Sicar (sociétés d’investissement en capital à risque), qui a permis l’ouverture aux fonds de capital-investissement, en 2004, a été le premier d’entre eux. S’est ensuivi le FIS (fonds d’investissement spécialisé) en 2007. « Au début des années 2000, les fonds real estate et private equity étaient administrés sous la partie II de la loi des OPCVM : c’est sous cette forme que l’on pouvait administrer des fonds avec des actifs différents des actifs classiques, explique Cédric Jauquet, director, head of private asset services & member of the executive committee d’European Fund Administration (EFA). Sous cette réglementation partie II, l’investisseur qui avait placé son argent souscrivait à une NAV (valeur nette des actifs, ndlr) inconnue et devait parfois attendre plusieurs mois avant de pouvoir obtenir une confirmation du nombre de parts dont il disposait dans 18
FONDS D’INVESTISSEMENT JUIN 2021
LE BOOM DES FONDS ALTERNATIFS En mars dernier, l’Alfi (Association luxembourgeoise de l’industrie des fonds d’investissement) révélait que les actifs sous gestion des fonds domiciliés au Luxembourg dépassaient la barre des 5 trillions d’euros (5.050,132 milliards au 31 janvier 2021), atteignant un record absolu. Le volume des actifs nets enregistrait une croissance annuelle de 5,44 %, une progression notamment soutenue par l’intérêt marqué des investisseurs pour les produits offerts par les gestionnaires de fonds luxembourgeois dans les segments alternatifs. Selon la CSSF (Commission de surveillance du secteur financier), plus de 700 milliards d’euros d’actifs sous gestion – soit 14 % du total des actifs sous gestion dans le pays – proviendraient ainsi de fonds alternatifs réglementés au Luxembourg. Chaque année, ces fonds d’investissement connaissent une hausse d’environ 10 %. À ce rythme, ils pourraient entrer en concurrence avec les OPCVM d’ici une dizaine d’années.
Luxembourg. Elle confirme que tout véhicule ou toute stratégie d’investissement qui n’est pas OPCVM tombe sous le champ de la directive AIFM. Tout d’un coup, une avalanche de fonds ont donc pu être relocalisés au sein de l’Union européenne, dans un environnement réglementé, à Luxembourg. » Dernier véhicule créé, le Fiar (fonds d’investissement alternatif réservé), indirectement supervisé à travers son gestionnaire, est venu compléter la gamme de produits alternatifs proposés aux investisseurs en 2016. Progressivement, la Place luxembourgeoise a ainsi ajouté plusieurs cordes à son arc déjà bien fourni. Précurseur de la mise en œuvre de la réglementation européenne des fonds et à l’écoute du marché, le Grand-Duché s’est attelé à développer cette fameuse « boîte à outils » à destination des gestionnaires de fonds et des investisseurs, outils qui ont été le socle de la création et de la progression des fonds alternatifs dans le pays. Croissance structurelle et conjoncturelle Bien qu’elle ait joué un rôle essentiel, la réglementation n’est toutefois pas le seul facteur de croissance du volume et de l’intérêt des fonds d’investissement alternatifs au GrandDuché du Luxembourg. Depuis de longues années, le pays a développé une forte réputation en tant que place financière de confiance, grâce à sa (pré)visibilité politique, sa stabilité économique et sociale, sa grande réactivité, son positionnement international, son régulateur attentif ou encore son réseau d’experts. « La connaissance acquise au fil des ans par les experts de la Place dans la structuration fiscale, associée aux outils légaux disponibles, a fait que les produits luxembourgeois apparaissent comme étant vraiment attractifs, à la fois pour les gestionnaires de fonds et les investisseurs », souligne le head of private asset
variés, tels que des entreprises privées, des projets d’infrastructures ou encore des biens immobiliers. Contrairement au monde des MARC MEYERS Managing partner, Loyens & Loeff OPCVM qui se montre très standardisé, celui des fonds alternatifs est plus complexe. Chaque projet se veut différent, et ce tout simplement parce que les besoins des initiateurs de fonds sont rarement les mêmes. « Les compétences requises pour les fonds alternatifs sont donc bien différentes de celles pour les fonds traditionnels. Ce n’est pas le même travail, le même métier. Finalement, la seule chose que ces investissements ont en commun, c’est le nom ‘fonds’ », confie Cédric Jauquet. Avocats, tax advisors, agents de transfert, comptables, gestionnaires… À tous les niveaux, les fonds alternatifs nécessitent une large expertise et se révèlent chronophages. Parce qu’il n’existe pas une méthodologie unique sur le marché pour administrer et gérer ces fonds, chaque intervenant doit en effet prendre le temps d’analyser la documentation à sa dismultiplié de manière notable ces dernières position, comprendre l’environnement dans années. Et, une fois la machine lancée, la pro- lequel il opère, appréhender et implémenter gression a été exponentielle. » les nouvelles réglementations, poser les bonnes questions à son client, cibler ses besoins et Une industrie « labour-intensive » assimiler les tenants et aboutissants de la tranSi les fonds d’investissement alternatifs saction s’il veut pouvoir servir cette classe connaissent un succès important sur le mar- d’actifs correctement. ché, ils exigent aussi, de par leur nature, davantage de travail de la part de tous les acteurs Des fonds complexes, de la Place. Les OPCVM investissent dans des besoins complexes des actifs liquides, cotés en bourse. Les fonds Dès lors, les fonds alternatifs requièrent de alternatifs, eux, investissent généralement disposer de connaissances multiples pour dans des actifs moins liquides et bien plus comprendre les structures qui les régissent, leurs stratégies et leur clientèle, qui se veut elle aussi plus sophistiquée et diversifiée que celle des fonds traditionnels (investisseurs institutionnels, family offices, grandes fortunes, wealth management, etc.). « Les fonds alternatifs demandent par exemple beaucoup plus de réflexion, et donc de temps, VENTILATION DE LA POLITIQUE D'INVESTISSEMENT aux niveaux juridique, réglementaire et fiscal, DES FONDS D'INVESTISSEMENT ALTERNATIFS NON RÉGLEMENTÉS aussi bien en ce qui concerne la mise en place Source BCL pour fin 2020 de la structure du véhicule lui-même, que dans la façon dont le fonds procède ensuite aux investissements », précise le managing partner de Loyens & Loeff. « Lorsqu’une structure de priPRÊT AUX ENTREPRISES : 19,40% vate assets est établie, il faut tenir compte de l’origine des investisseurs, de leurs besoins, de INFRASTRUCTURE : 18,50% la destination des investissements effectués, poursuit Cédric Jauquet. C’est donc impossible de faire du copier-coller. Même si les structures sont parfois similaires, elles n’en sont pas moins toujours divergentes. On pense qu’administrer des fonds alternatifs est quelque chose IMMOBILIER : 16,10% PRIVATE EQUITY : 32,60% de simple. Ce n’est nullement le cas. » En ce qui concerne le reporting aux investisseurs aussi, chaque stratégie, ayant sa propre particularité, induit un traitement comptable ACTIONS ET OBLIGATIONS : 8,80% sur mesure. « Les investisseurs souhaitant toujours plus de transparence, l’étendue des AUTRES : 1,50% reportings a été bouleversée. Et la démarche, HEDGE FUND : 3,10% notamment en ce qui concerne les reportings
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Loyens & Loeff
services de l’European Fund Administration. « De la même manière, de nombreux initiateurs de fonds alternatifs qui cherchent une juridiction pour mettre en place leur structure ne peuvent aujourd’hui plus passer à côté du Luxembourg », ajoute Marc Meyers. D’après la LPEA (Luxembourg Private Equity & Venture Capital Association), neuf investissements mondiaux en capital-investissement sur 10 sont d’ailleurs structurés à l’aide des véhicules luxembourgeois. « À la toolbox luxembourgeoise et à la réputation de la Place s’ajoute un volet davantage conjoncturel pour expliquer l’essor des fonds alternatifs : les investisseurs montrent un appétit insatiable pour ce type d’actifs », indique Laurent Capolaghi. D’une part, « les investisseurs, au sortir de la crise financière, ont clairement manifesté leur volonté de se tourner vers des fonds plus rentables, tandis que les gestionnaires ont davantage diversifié leur portefeuille, ce qui a contribué à cette progression des fonds alternatifs ». D’autre part, les nouvelles générations ne semblent plus, ou semblent moins, alignées avec les actifs financiers classiques. « Alors qu’il y a quinze ans, les portefeuilles étaient principalement composés de valeurs mobilières et d’immobilier, les investisseurs s’intéressent aujourd’hui de plus en plus à des actifs alternatifs, qui ne sont pas liés aux obligations et actions traditionnelles, constate le private equity leader au sein d’EY Luxembourg. Cet intérêt grandissant a également contribué à ce que le nombre de produits offerts soit
« C’est un défi journalier que de maîtriser les compétences pluridisciplinaires liées aux fonds alternatifs. »
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Tendance sur le marché
CÉDRIC JAUQUET Director, head of private asset services & member of the executive committee, EFA
«La seule chose que les fonds traditionnels et les fonds alternatifs ont en commun, c’est le nom ‘fonds’. » 20
très manuel. Même si l’on voit de plus en plus de solutions technologiques d’exploitation et d’analyse de la donnée émerger, qui peuvent aider à prendre des décisions de façon plus rapide, nous sommes encore très loin d’une automatisation des processus. » L’automatisation se révèle particulièrement difficile dans le domaine juridique. « Ces dernières années, c’est même, d’une certaine façon, tout l’inverse qui s’est produit, constate Marc Meyers. Depuis l’entrée en vigueur de la directive AIFM, la documentation juridique des fonds alternatifs est devenue bien plus étoffée à mesure que les structures ne cessent de devenir plus complexes. Depuis 2013, notre travail est donc devenu plus sophistiqué. C’est aussi l’une des raisons pour lesquelles l’automatisation dans ce domaine reste, pour l’instant, limitée. Ceci étant dit, il est indéniable qu’à terme, l’intelligence artificielle va fondamentalement impacter notre façon de travailler. » Le défi des talents La charge de travail importante et variée que nécessitent la mise en place, la distribution et la gestion d’un fonds alternatif a fait naître au Luxembourg un véritable centre de compétences pluridisciplinaires. « Les conseillers juridiques, par exemple, doivent pouvoir offrir à leurs clients des compétences en droit réglementaire, en droit des sociétés, en fiscalité ou encore en droit financier s’ils veulent pouvoir conseiller au mieux les initiateurs et les gestionnaires de fonds, explique le managing partner de Loyens & Loeff. C’est un défi journalier que de maîtriser ces compétences pluridisciplinaires liées aux fonds alternatifs, mais c’est aussi un univers intellectuellement très stimulant. Cela contribue à faire évoluer et augmenter le niveau d’expertise de tous les acteurs. »
FONDS D’INVESTISSEMENT JUIN 2021
Dans ce contexte, le principal défi pour le Grand-Duché consiste à disposer de suffisamment de ressources humaines qualifiées pour absorber ce business de plus en plus important et offrir un service de qualité sur la Place. « Pour continuer à grandir, le Luxembourg a besoin de sa place financière. Or, ce sont principalement les fonds alternatifs qui seront les vecteurs de cette croissance durant la prochaine génération, estime Marc Meyers. L’enjeu, permanent, consiste donc à parvenir à attirer les talents vers le Luxembourg, une tâche difficile car toutes les places financières se battent pour les séduire. Et le Brexit – avec l’ouverture d’antennes de structures anglaises à Luxembourg – n’a fait que renforcer encore la concurrence sur le marché grand-ducal, déjà en pénurie, surtout en ce qui concerne les travailleurs expérimentés. » Laurent Capolaghi et Cédric Jauquet partagent ce sentiment. « Nous devons réussir à continuer à donner envie aux gens de venir travailler au Luxembourg, tout en évitant la surenchère salariale qui scie la branche sur laquelle nous sommes assis. L’augmentation incessante des rémunérations dans le secteur des fonds alternatifs entraîne en effet un turnover important. À peine ont-ils eu le temps d’appréhender les systèmes que certains quittent le navire. Il ne faudrait pas que cette tendance affecte la qualité et le prix des services fournis et, par conséquent, l’attractivité et la compétitivité de la Place luxembourgeoise », ajoute le head of private asset services de l’European Fund Administration, Cédric Jauquet. « Ces dernières années, le Luxembourg a fortement travaillé sur la mise en place de sa boîte à outils. Désormais, l’enjeu pour la place financière concerne la formation, la reconversion, l’attraction et la rétention des ressources. Nous devons être capables de créer nos propres talents et de continuer à attirer et préserver ceux qui viennent d’ailleurs. C’est primordial pour la Place et le secteur financier. Sans les Hommes, nous ne pourrons pas continuer à servir cette industrie grandissante comme il se doit », met en garde Laurent Capolaghi.
Maison Moderne (archives)
L’automatisation reste difficile De par leur grande diversité, les fonds alternatifs peuvent être beaucoup moins automatisés que les OPCVM. « Les fonds dits ‘traditionnels’ ont pu bénéficier d’une très forte automatisation de leurs flux ces dernières années. Certains tournent donc entièrement en automatique. Ainsi, un comptable de fonds classiques peut sortir 10 NAV à la journée. Ce ne sera jamais le cas avec les fonds alternatifs », confie Cédric Jauquet. « Dans le domaine des OPCVM, industrie aujourd’hui très mature, les robots ont désormais largement remplacé les humains, aussi bien dans la gestion des portefeuilles – qui est assurée essentiellement par de l’intelligence artificielle, avec juste une supervision globale humaine – que dans la gestion du risque et la production de reportings comptables, poursuit Laurent Capolaghi. Le monde des fonds alternatifs n’en est pas là. C’est un métier qui reste
Le private equity, qui s’est développé depuis de nombreuses années, est une catégorie d’actifs qui s’avère séduisante car simple à comprendre et qui contribue directement à l’économie réelle. Le private equity est passé par une démocratisation qui lui permet d’être à la portée de – presque – toutes les bourses. Terme un peu plus connu des investisseurs, qu’ils soient débutants ou vétérans, ces fonds, en référence à leur stratégie d’investissement, sont classés dans la catégorie des fonds alternatifs (qui correspondent, depuis la directive AIFM de 2011, à tous les fonds non régis par la directive Ucits), au même titre que les hedge funds, les fonds de dette privée, les fonds d’infrastructures ou bien les fonds immobiliers.
Auteur J. R.
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LE CAS DU PRIVATE EQUITY
extra-financiers, est aujourd’hui encore plus complexe. Il faut donc du temps et des équipes qualifiées, capables de s’adapter à ces différentes situations », confie le private equity leader d’EY. Les fonds alternatifs exigent aussi un contact plus direct et plus récurrent avec les différents intervenants. « L’écoute et l’accompagnement sont primordiaux, confie Cédric Jauquet. Nos équipes opérationnelles, par exemple, sont loin de n’être que dans le transactionnel. Elles entretiennent une vraie relation au jour le jour avec les initiateurs de fonds, les avocats, les auditeurs, les tax advisors, la banque dépositaire, les gestionnaires de fonds, car il faut aligner toutes ces parties et les guider. »
WHERE BRIGHT MINDS MEET
Clifford Chance is one of the world’s pre-eminent law firms and a leader in the Luxembourg legal market. Our Investment Funds Team is composed of 4 Partners and over 40 team members from diverse backgrounds and nationalities, making it the largest investment funds practice among the international law firms in Luxembourg. The widely recognised fund formation practice covers the full range of funds, both private and public funds (AIFs and UCITS), across all investment strategies and for clients across the globe. The team also advises institutional investors including pension funds and sovereign wealth funds on their investments into funds. Through seamless teamwork, we span jurisdictions, cultures and languages providing access to our global network and an individualised professional relationship with the world’s leading asset management companies, alternative investment funds, private equity funds, insurance companies and private banking businesses. We see diversity and inclusion as a core value of the firm and also of the law by supporting, developing and retaining diverse talent.
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Avantages et inconvénients
Se fier aux Fiar Le fonds d’investissement alternatif réservé (Fiar, ou Raif en anglais) est l’une des solutions attrayantes lancées au Luxembourg pour répondre à une demande croissante. Un produit qui présente de nombreux atouts.
Flexibilité d’investissement
Un coût élevé
Comme son nom l’indique, le Fiar est réservé à des investissements alternatifs, ce qui offre à leurs promoteurs une grande flexibilité. « Immobilier, projets d’infrastructures ou encore de développement d’énergies renouvelables, les classes d’actifs peuvent être très variées, indique Gautier Despret, head of private debt de IQ-EQ. Il est très facile de loger au sein d’un Fiar des actifs plus exotiques, non traditionnels. » Par ailleurs, le Fiar peut fonctionner comme une société d’investissement (société d’investissement à capital variable – Sicav – ou société d’investissement à capital fixe – Sicaf) ou un fonds commun de placement. Par nature, le Fiar est un fonds d’investissement alternatif (AIF), ce qui n’est pas nécessairement le cas d’un FIS (fonds d’investissement spécialisé) ou d’une Sicar (société d’investissement en capital à risque). Devant être géré par un AIFM (alternative investment fund manager) autorisé, le Fiar bénéficie du passeport européen qui facilitera les procédures de commercialisation de ses actions/parts en dehors du Luxembourg.
Indirectement régulé mais sûr
Si le Fiar offre une grande flexibilité et une certaine rapidité de mise en œuvre, étant automatiquement considéré comme un AIF (alternative investment fund), il se retrouve dès lors soumis à toutes les o bligations liées à l’AIFMD (Alternative Investment Fund Managers Directive). Sa gestion par un AIFM (alternative investment fund manager) autorisé alourdit quelque peu la c omplexité procédurale. « Contrairement aux idées reçues, ce n’est pas parce que le Fiar est un véhicule flexible et rapide, sans supervision directe, qu’il n’est pas, pour son gestionnaire, coûteux à mettre en place ou à entretenir, met en garde Gautier Despret. Pour un promoteur de fonds, un Fiar n’est bien souvent considéré qu’à partir du moment où une certaine taille d’actifs sous gestion est atteinte, et ce afin d’absorber les frais additionnels e ngendrés par l’AIFM. »
NOMBRE DE RAIF DE SEPTEMBRE 2016 À DÉCEMBRE 2019 Source
Luxembourg Business Registers, Illustrative Annual Report for Reserved Alternative Investment Funds (RAIFs), KPMG
1.000
897 790
800
699 639
Ce qui distingue le Fiar des autres types de fonds, qu’ils soient classiques ou alternatifs, c’est la façon dont il est régulé. Contrairement aux autres véhicules d’investissement, le Fiar n’est pas directement soumis à l’agrément et à la supervision de l’autorité de régulation, à savoir, au Luxembourg, la Commission de surveillance du secteur financier (CSSF). Le Fiar n’est pas pour autant un véhicule non contrôlé. « Pour s’assurer de la compliance de ces fonds, le régulateur s’appuie sur des intermédiaires, les sociétés de gestion, les AIFM autorisés qui, eux, sont régulés et obligatoires dans le cadre d’un Fiar. Il s’agit ainsi d’une régulation indirecte », explique Benoît Wîllers, head of securities services and depositary bank chez ING Luxembourg. « C’est donc bien le fonds, le véhicule, qui n’est pas soumis à la surveillance de la CSSF. Mais les acteurs qui interviennent dans sa gestion, eux, le sont, ce qui permet de faire du Fiar un véhicule d’investissement sûr », ajoute Damien Degros, head of wholesale banking au sein d’ING Luxembourg. Pour le reste, le Fiar présente les mêmes obligations que les fonds directement supervisés tels que les FIS ou les OPCVM (organismes de placement collectif en valeurs mobilières). « Au sein de la banque dépositaire, par exemple, le Fiar est surveillé avec la même intention que les autres fonds, illustre Benoît Wîllers. Nous avons d’ailleurs les mêmes obligations concernant la garde des actifs, le contrôle des souscriptions et des rachats, le suivi des restrictions d’investissement, etc. »
578 600
442
495
20 %
367
400
303 203
200
12
51
83
137
0 Sep. 2016
22
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des fonds de prêts (à l’exclusion des OPCVM) sont des Fiar. (Private debt fund survey 2019, KPMG)
Un groupe de fonds non public Il est difficile de disposer d’informations détaillées sur les Fiar et la nature de leurs investissements, étant donné qu’ils ne doivent pas rapporter à la CSSF. On ne connaît par exemple pas avec précision le type d’actifs qui transite à travers eux. « Mis à part une liste des Fiar, on ne possède pas beaucoup d’autres renseignements à leur sujet. Comme tous les fonds indirectement supervisés, ils restent donc privés », confie Fèmy Mouftaou, managing director de IQ EQ Fund Management. Cette situation devrait toutefois être amenée à évoluer rapidement. La Banque centrale européenne vient en effet d’ajouter une obligation de reporting annuel pour les Fiar afin de r écolter davantage d’informations à leur sujet.
Rapidité de mise en place Parce qu’il ne nécessite pas l’agrément ni la supervision de la CSSF, le Fiar est un véhicule qui offre beaucoup plus de rapidité aux promoteurs de fonds dans sa structuration et sa mise en place. « L’approbation des Fiar s’appuie sur des prestataires privés – AIFM, banque dépositaire, etc. – et non sur une autorité publique. Les tâches à réaliser ne sont pas moins fastidieuses ou plus légères dans le cadre d’un Fiar, mais les acteurs étant mis en concurrence, la constitution de ces fonds est plus rapide et plus efficace », explique Fèmy Mouftaou. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle le Fiar a été créé à l’origine. Au fil des ans, le régulateur luxembourgeois a été victime de son succès. Mettre en place un fonds d’investissement et obtenir les autorisations nécessaires constituaient un processus de plus en plus long, lourd et fastidieux. « Il y avait une pression sur le régulateur, de la part des acteurs, notamment des gestionnaires, des auditeurs et des avocats, pour imaginer un véhicule qui soit plus rapide à monter, qui permette de lancer un fonds plus vite », souligne Benoît Wîllers. Désireux de combler cette attente du marché, mais également de préserver l’attractivité de la Place luxembourgeoise dans le domaine des fonds, le Luxembourg a donc fait preuve d’innovation, voire de révolution, en créant le Fiar. « Ce véhicule met en avant la capacité avec laquelle le Luxembourg est à l’écoute de ses acteurs et cherche à apporter une réponse à leurs besoins », poursuit Gautier Despret.
QUELS SONT LES AVANTAGES DU FIAR ? Source
SGSS
Coûts
Conformité AIFMD
Alternative aux sites offshore
Plus flexible que le SIF
Installation facile / liquidation facile
0 %
25 %
Pas pour tout le monde
50 %
75 %
Un produit apprécié
Comme tout type d’investissement alterna- Si les Fiar ont eu un peu de mal à décoller, ils tif, le Fiar ne s’adresse pas à tout le monde. Il connaissent désormais une croissance expoest réservé à des investisseurs avertis, quali- nentielle. « 25 à 30 Fiar sont créés chaque mois fiés, institutionnels ou professionnels, dont à Luxembourg. Chez IQ-EQ, plus de la moile profil est en corrélation avec le risque lié tié de nos fonds sont des Fiar. Aujourd’hui, seuà ce type de fonds. « Le Fiar permet d’atteindre lement cinq ans après la création de ce véhicule, des niveaux de rendement supérieur à un OPCVM il existe ainsi quelque 1.600 Fiar. À titre de traditionnel. Inversement, le risque de perte comparaison, les SIF ont mis neuf ans pour en capital est aussi plus important, explique atteindre ce nombre. Les Fiar ont donc connu Damien Degros. Si le Fiar offre une garantie une évolution presque deux fois plus rapide », en termes de structure, assez logiquement, il indique Fèmy Mouftaou. Bien que l’on ne n’en apporte pas nécessairement en matière de connaisse pas exactement leur masse d’actifs, les Fiar représenteraient déjà environ rendement, de retour sur investissement. » 20 % des actifs alternatifs sur la Place luxembourgeoise. Si le nombre de fonds créés témoigne du succès des Fiar, la façon dont ce véhicule a été dupliqué au sein d’autres Premier produit États membres de l’Union européenne ces dernières années illustre également l’intérêt d’une nouvelle ère grandissant pour ce type de fonds. « En Europe, Le Fiar est un fonds d’investissement alter- le Luxembourg a été le premier pays à proponatif réservé. Introduit sur le marché luxem- ser ce genre de véhicule indirectement superbourgeois par la loi du 23 juillet 2016, ce visé, produit hybride offrant une certaine garantie véhicule s’appuie sur la directive européenne et une protection aux investisseurs, tout en sur les gestionnaires de fonds d’investisse- apportant une flexibilité à ceux qui l’utilisent ment alternatifs (AIFMD), transposée en comme véhicule d’investissements. Tout comme droit luxembourgeois le 12 juillet 2013. l’OPCVM, le Fiar a ainsi acquis, et rapide« Promulgué trois ans après l’entrée en vigueur ment, une forte image de marque, associée au de la loi AIFM au Luxembourg, le Fiar est le Luxembourg. Les efforts déployés par les autres premier produit financier né dans l’esprit de pays pour créer des véhicules similaires sont à cette directive fondatrice dédiée à structurer eux seuls la preuve que le Luxembourg avait les investissements alternatifs, précise Fèmy vu juste », conclut Gautier Despret. Mouftaou. Si le fonds d’investissement spécialisé (FIS) était déjà réservé aux actifs alternatifs, il avait été créé dans un environnement encore entièrement OPCVM. Le Fiar, lui, est apparu dans une nouvelle ère. »
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Alternative investment funds
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FONDS D’INVESTISSEMENT JUIN 2021
Illustration
Les classes d’actifs alternatifs présentent de nombreux avantages : décorrélation des marchés traditionnels, elles offrent des rendements parfois très intéressants et elles sont un excellent moyen de diversification. Ce n’est donc pas un hasard si ces fonds connaissent une popularité croissante auprès des investisseurs. Présentation.
Salomé Jottreau
Pourquoi investir dans les AIF ?
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Maison Moderne (Archives)
Encore méconnue il y a quelques années, l’industrie des fonds de dette privée ne cesse de croître. Gautier Despret, head of private debt chez IQ-EQ Luxembourg, nous parle de cette classe d’actifs prometteuse. Moins connue que celle du private equity ou du real estate, pour lesquels la Place est devenue une référence européenne, voire mondiale en la matière, l’industrie des fonds de dette privée commence elle aussi à s’établir dans le paysage des classes d’actifs alternatifs au Luxembourg. Selon l’enquête annuelle menée conjointement par l’Alfi et KPMG, les actifs sous gestion de fonds de dette privée ont en effet augmenté de 36,2 % en 2020 pour atteindre un record total de 108,4 milliards d’euros. Cela fait maintenant près de 20 ans que Gautier Despret, head of private debt chez IQ-EQ Luxembourg, travaille sur cette classe d’actifs. « Au cours des 15 dernières années, nous avons été témoins de l’envolée significative des structures de dette privée au Luxembourg. Naissante au début des années 2000 avec un marché de niche, la dette privée a pris un essor additionnel, d’abord via le label Microfinance décerné par Luxflag en juillet 2006, ensuite par la FAQ publiée le 9 juin 2016 par la Commission de surveillance du secteur financier. Avant cette date, à Luxembourg, seules les banques étaient habilitées à ‘originer’ de la dette. Cette nouvelle orientation a été une confirmation officielle que les AIF à Luxembourg pouvaient octroyer, acquérir ou participer à des activités de crédit. Cette mesure a été une véritable révolution pour le marché de la dette, rappelle Gautier Despret. Parce qu’elles étaient soumises à de plus grandes pressions réglementaires et en raison d’une certaine frilosité liée aux risques, les banques ont petit à petit laissé les fonds prendre le relais dans l’octroi de dettes, d’où cette explosion ces dernières années. »
Les fonds de dette privée
« Cette classe d’actifs pourrait se montrer salvatrice pour de nombreuses PME qui auront besoin de financements dans les prochains mois .» GAUTIER DESPRET Head of private debt IQ-EQ Luxembourg
Le modèle américain transposé en Europe ? Ces actifs jouent aujourd’hui un rôle de plus en plus important pour remédier au déséquilibre entre l’offre et la demande de liquidités. « Cette tendance avait déjà été perçue aux États-Unis, où on a vu le système bancaire se retirer du financement de l’économie réelle et être remplacé par le marché des fonds. D’ailleurs, aux USA, aujourd’hui, seulement 20 % de la dette octroyée vient du monde bancaire. Les 80% restants proviennent de dettes privées. En Europe, on est évidemment encore loin de cette proportion », explique Gautier Despret. Mais pour le head of private debt de chez IQ-EQ et de nombreux observateurs, cette tendance devrait se dessiner en Europe dans les prochaines années. « Certains se demandent même si un fonds de dette privée ne peut pas remplacer une banque sur l’activité de crédit. Le peer-to-peer lending (le prêt entre particuliers) et les plateformes de crowdfunding qui fleurissent depuis quelques années, ne sont rien d’autre que de la dette, fait remarquer Gautier Despret. Petit à petit, ce modèle américain se transposera en Europe. Cela ne se fera pas du jour au lendemain puisqu’en Europe, contrairement aux États-Unis, 27 pays disposent chacun de leurs propres législations et que ce n’est pas simple d’harmoniser les choses. Mais on y arrivera un jour. » De nombreux freins Les fonds de dette privée constituent aujourd’hui la troisième classe d’investissements alternatifs derrière les fonds de private equity et les fonds immobiliers. Au regard de leur intérêt grandissant, ces actifs pourraient, dans les prochaines années, se tailler une place encore plus importante. « C’est un mode de financement extrêmement vaste qui englobe, entre autres, le private equity ou encore l’ensemble des real assets. Le marché a donc un potentiel inégalable », fait remarquer le head of private debt de chez IQ-EQ Luxembourg. Alors que cette classe d’actifs semble avoir plutôt bien résisté à la crise financière pour le moment, elle pourrait se montrer salvatrice pour de nombreuses PME qui auront besoin de financements dans les prochains mois. » Affaire à suivre. Auteur A.B.
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FONDS D’INVESTISSEMENT JUIN 2021
PATRICK GOODMAN Cofondateur, Innpact
Un changement de paradigme Il y a, depuis quelques années maintenant, une réelle volonté de la part des gestionnaires de fonds, mais aussi de certains investisseurs, d’avoir un impact sur l’environnement ou la société au travers de leurs investissements. « Certains grands acteurs, comme Danone, ont la volonté d’avoir une approche plus respectueuse de l’environnement et des gens. On sent clairement une mouvance de la part des investisseurs qui sont de plus en plus stricts dans leurs critères de développement », assure Patrick Goodman. Le Luxembourg s’est imposé comme un acteur international dans le secteur de l’investissement d’impact. Par exemple, aujourd’hui, plus de 50 % des MIV (microfinance investment vehicles) sont basés à Luxembourg. « De par l’importance de la Place dans l’industrie des fonds de manière générale, les fonds d’impact représentent également une part importante au Luxembourg. Et ce n’est pas fini puisque cette industrie est en pleine croissance », assure le cofondateur d’Innpact. Mais de nombreux challenges sont encore à relever pour cette classe d’actifs. « L’un des défis du fonds d’impact est la taille critique. Ce sont souvent de petits fonds, qui n’intéressent pas les prestataires. Trouver une banque dépositaire qui accepte des fonds de 50 à 100 millions, ce n’est pas facile, explique Patrick Goodman. L’activité d’un fonds d’impact est plus intense qu’un fonds traditionnel. Il ne suffit pas de s’asseoir dans une salle de trading et d’analyser une société de son bureau, il faut aller sur le terrain pour voir les sociétés dans lesquelles on investit. Cela coûte de l’argent naturellement. Le gros challenge, ce sont donc les économies d’échelle pour atteindre cette masse critique. » Auteur A.B.
Innpact
Les fonds d’impact sont des investissements qui ont un impact social ou environnemental positif et mesuré. Ces fonds ciblent généralement les 17 Objectifs de développement durable (ODD), fixés par les États membres des Nations unies. Il peut s’agir de la lutte contre la pauvreté ou les inégalités, les objectifs qui ont un impact sur l’environnement, sur la vie sous-marine, etc. « Il y a souvent un amalgame qui est fait entre les fonds ESG et les fonds d’impact. Ces derniers sont en fait une sous-catégorie de l’investissement ESG », précise Patrick Goodman, cofondateur d’Innpact, société précurseur en matière d’investissement d’impact sur la Place. « Les fonds ESG vont veiller à tenir compte de certains facteurs sociaux, environnementaux ou de gouvernance et à ne pas avoir d’impact négatif dans une de leurs catégories alors que les fonds d’impact visent un impact positif mesurable. Là est toute la différence entre ces deux investissements. » L’Union européenne a d’ailleurs récemment permis d’offrir davantage de transparence en matière de durabilité dans le secteur des services financiers à travers sa réglementation Sustainable Finance Disclosure Regulation (SFDR). Elle vise en effet à accroître la transparence sur la manière dont les acteurs des marchés financiers intègrent les risques et opportunités en termes de durabilité dans leurs décisions d’investissement. « Elle a classifié les investissements en trois catégories. L’article 9 vise les fonds ayant pour objectif
« On sent clairement une mouvance de la part des investisseurs qui sont de plus en plus stricts dans leurs critères de développement »
l’investissement durable et dont la plupart des investissements visent à avoir un impact social ou environnemental mesurable, l’article 8 vise les fonds promouvant des caractéristiques environnementales ou sociales et dont certains investissements visent à avoir un impact et l’article 6 concerne tous les autres. Cette réglementation vise clairement à combattre le greenwashing », explique Patrick Goodman.
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De plus en plus d’investisseurs n’hésitent plus à se tourner vers les fonds d’impact. Plus poussé encore que l’investissement ESG, l’impact investing consiste à investir dans une activité, une entreprise ou un projet, qui tente d’apporter une réponse à une probléma tique environnementale ou sociétale précise.
Les fonds d’impact
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Arendt
Vu comme une véritable valeur refuge dans un environnement de taux bas, l’immobilier séduit toujours plus d’investisseurs. Une bonne nouvelle pour l’industrie luxembourgeoise des fonds real estate, qui s’érige aujourd’hui en référence européenne en la matière. L’industrie des fonds immobiliers luxembourgeois se porte bien. Le dernier rapport de l’Alfi démontre en effet que cette classe d’actifs alternatifs rencontre un succès grandissant sur la Place. Si le nombre de fonds immobiliers luxembourgeois stagne depuis 2017 autour des 320 unités (au dernier recensement, au troisième trimestre de 2020, le nombre de fonds de ce type gérés au Luxembourg était de 319), le volume d’actifs sous gestion, lui, est en constante progression depuis plus de 10 ans. Entre 2017 et le troisième trimestre de 2020, ce volume est passé de 56,187 milliards à 88,151 milliards d’euros. « L’industrie des fonds real estate au Luxembourg s’est donc montrée résiliente face au Covid, même si on estime que les levées de fonds et les transactions ont été réduites d’environ un tiers au niveau mondial, confirme Pierre Beissel, partner Private Equity & Real Estate chez Arendt. On remarque également un engouement de plus en plus grand de la part d’investisseurs internationaux. 82 % des actifs sous gestion au Luxembourg proviennent d’Europe, mais on note une croissance au niveau des investisseurs non européens. Dès que des promoteurs cherchent à mettre en place une stratégie internationale, le Luxembourg est une excellente option. J’aurais même tendance à dire qu’il n’a pas d’équivalent en Europe. » Grâce notamment à sa stabilité politique et économique, ainsi qu’à sa boîte à outils étoffée, la Place luxembourgeoise est en effet devenue une référence en matière de fonds real estate sur le Vieux Continent.
Les fonds immobiliers
« Pour les investisseurs qui adoptent une stratégie interna tionale, l’industrie des fonds immobiliers luxembourgeois est la meilleure option en Europe. » PIERRE BEISSEL Partner Private Equity & Real Estate, Arendt
Une classe d’actifs de repli Si l’immobilier a toujours la cote auprès des investisseurs, c’est notamment parce qu’il fait office de valeur refuge, et plus particulièrement dans un environnement de taux bas comme on le connaît actuellement. « On craignait pourtant que certains investisseurs cherchent à tout prix à vendre leurs fonds ouverts pour récupérer des liquidités durant la période Covid. Finalement, selon les chiffres officiels, cela n’a pas du tout été le cas. Acheter de la pierre, psychologiquement, c’est intéressant, car l’immeuble ne disparaîtra pas du jour au lendemain. Et si le bâtiment est bien situé et plus ou moins occupé, les loyers rentreront et créeront des liquidités. Cet aspect tangible de cette classe d’actifs est extrêmement attractif pour le grand public. Qui plus est dans un environnement de taux bas comme on le connaît actuellement », souligne Pierre Beissel qui, à l’instar de nombreux observateurs, ne croit pas à une remontée des taux d’intérêt prochainement. Les fonds real estate offrent avant tout une certaine forme de sécurité aux investisseurs. « C’est une classe d’actifs de repli. On ne va pas nécessairement chercher du rendement comme sur d’autres marchés. Le rendement annuel dans un fonds real estate est de 5,7 %, alors que dans d’autres classes, comme le private equity, on peut atteindre le double, mais c’est un produit sûr et qui fonctionnera toujours », assure le partner Private Equity & Real Estate chez Arendt. Les bureaux dans l’expectative Sans surprise, ce sont les secteurs de l’industrie et de la logistique qui offrent actuellement les meilleurs résultats sur le plan mondial. « La technologie et les secteurs du bien-être au travail ont également connu un véritable coup d’accélérateur avec la crise. Et, au Luxembourg, le résidentiel fonctionne évidemment très bien. » Le secteur des bureaux reste, lui, dans l’expectative. « Les bureaux existeront toujours, mais ils seront peut-être moins spacieux en raison d’une généralisation du télétravail. Le secteur de l’immobilier possède une certaine inertie, les conséquences du télétravail sur celui-ci ne seront pas visibles dans l’immédiat », assure Pierre Beissel, qui promet aussi un gros rebond pour le secteur de l’horeca, durement frappé par la crise. Auteur A.B.
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Un intérêt grandissant Lorsque les investisseurs s’engagent sur des fonds d’infrastructure, ils savent qu’il leur faudra bloquer leur argent sur une longue période. Le côté illiquide de cette classe d’actifs ne semble pas effrayer les grands investisseurs institutionnels qui n’hésitent plus à consacrer une partie de leur 28
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« Le marché s’attend à ce que les fonds d’infrastructure privés augmentent leurs actifs sous gestion de 25 %, ce qui reflète l’intérêt pour cette classe d’actifs. » ALEXIS WOLF Head of corporate finance and head of infrastructure KPMG Luxembourg
L’énergie renouvelable en plein boom Les récentes mesures prises par les gouvernements pour lutter contre l’épidémie de Covid-19 – notamment les plans de vaccination – ont contribué positivement à la reprise globale de l’économie. La crise a toutefois laissé des traces dans le secteur infrastructurel. « La valorisation des actifs basés sur la demande (aéroports, télécommunications, routes à péage et ports) a été particulièrement affectée par la crise du Covid. Les aéroports ont par exemple vu leurs valorisations diminuer de près de 20 %. Le trafic aérien ne devant retrouver ses niveaux d’avant la maladie qu’en 2023 ou 2024 », explique Alexis Wolf, qui rappelle que si les compagnies des eaux ont bien résisté, les sociétés actives dans les énergies renouvelables, elles, ont vu leur demande bondir en raison de l’intérêt accru des investisseurs pour les placements durables. Auteur A.B.
KPMG
L’infrastructure est l’un des plus grands piliers du système économique mondial. Elle influence le développement économique des pays, des États et des villes et joue un rôle crucial dans la création de liens et d’échanges internationaux. Les infrastructures permettent aux individus d’avoir accès aux commodités et aux ressources, qu’il s’agisse de l’eau, de l’électricité, des télécommunications ou des soins de santé. Avec une telle importance, l’investissement dans les infrastructures est de plus en plus reconnu par les investisseurs privés comme une catégorie unique. L’investissement dans les infrastructures couvre un large éventail de types de projets différents avec des profils risque/rendement différents. « Dans la famille des classes d’actifs alternatifs, les fonds d’infrastructure sont une classe d’actifs relativement nouvelle, générant un impact et une création de valeur à long terme. Le cycle de vie des fonds d’infrastructure est généralement plus long que celui d’autres classes d’actifs de capitaux privés, tels que le capital-investissement, l’immobilier et la dette privée, avec une durée moyenne de 15 ans », explique Alexis Wolf, partner, head of corporate finance and head of infrastructure au sein de KPMG Luxembourg.
portefeuille à ce type d’investissement. « Le premier trimestre 2021 a vu une diminution par rapport au premier trimestre 2020 des levées de fonds pour les infrastructures, qui sont passées d’environ 45 milliards de dollars à près de 24 milliards de dollars. Toutefois, cette diminution s’explique principalement par le fait qu’au cours du même trimestre en 2020, un gestionnaire d’actifs a clôturé un fonds pour un montant de 20 milliards de dollars, explique Alexis Wolf. Cela dit, la taille moyenne des fonds en cours de clôture a presque doublé depuis 2018, atteignant une moyenne de 1,8 milliard de dollars. Le marché s’attend à ce que les fonds d’infrastructure privés augmentent leurs actifs sous gestion de 25 %, ce qui reflète clairement l’intérêt croissant pour cette classe d’actifs. » Cet intérêt grandissant s’explique notamment par les nombreux avantages que confère ce type d’investissement. « Cette classe d’actifs alternatifs, en tant que méthode d’investissement, est avantageuse par rapport à d’autres classes d’actifs dans le sens où elle découle des propriétés intrinsèques des actifs sous-jacents, qui peuvent inclure une position monopolistique sur un marché (comme un aéroport), des prix réglementés, des revenus stables et une longue durée », indique Alexis Wolf. La faible corrélation avec le marché permet à cette classe d’actifs d’obtenir une meilleure diversification.
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De par leur impact sur l’économie réelle et leur création de valeur sur le long terme, les investis sements en infrastructures sont reconnus par les investisseurs comme une classe d’actifs parti culièrement singulière et intéressante.
Les fonds en infrastructure
Alternative investment funds
Pourquoi investir dans…
Après un petit coup d’arrêt au deuxième trimestre 2020, l’industrie du private equity tourne à nouveau à plein régime. Une aubaine pour la Place qui entend continuer à développer son expertise déjà très poussée dans cette classe d’actifs.
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Deloitte Luxembourg
Le private equity, ou capital-investissement, est une classe d’actifs alternatifs qui permet d’investir dans des entreprises non cotées, principalement des PME, dans la perspective de les voir décoller et ainsi en dégager un retour sur investissement intéressant. Il suscite de l’intérêt partout dans le monde depuis quelques années, en raison notamment d’une rentabilité particulièrement intéressante à long terme. Après des mois de croissance ininterrompue, le marché du private equity a connu un sérieux coup d’arrêt à partir du deuxième trimestre de 2020 en raison de la crise sanitaire. Toutefois, l’industrie a terminé l’année de manière extrêmement positive, permettant à cette classe d’actifs de se montrer résiliente par rapport à la crise que nous traversons. « L’industrie connaît une croissance considérable au Luxembourg, confirme Nick Tabone, partner et private equity leader chez Deloitte Luxembourg. On le constate, d’une part, par le nombre croissant de nouveaux fonds qui sont créés, mais aussi par le volume d’actifs toujours plus important que l’on trouve dans chacun de ces fonds. » De la rentabilité certes, mais aussi des risques Il faut dire que cette classe d’actifs a des arguments à faire valoir, à commencer par les rendements très conséquents qu’elle peut offrir. Ainsi, ces dernières années, en Europe, le private equity a par exemple surperformé par rapport au marché des actions. En étant décorrélé des marchés traditionnels. « Les investissements en private equity portent par ailleurs sur le long terme. Dans ce cadre, on recherchera
Le private equity
« Investir dans cette classe d’actifs nécessite une connais sance approfondie du sujet. » NICK TABONE Partner et private equity leader Deloitte Luxembourg
des managers qui ont le savoir-faire nécessaire pour apporter une valeur ajoutée aux sociétés qui ne performent pas au maximum ainsi qu’à leurs actionnaires. Les stratégies de capital-investissement étalent le plus souvent sur 10 ans. C’est la raison pour laquelle les investisseurs qui choisissent des fonds de private equity sont souvent des organismes institutionnels qui ont des responsabilités sur le long terme et qui cherchent donc à obtenir un rendement sur le long terme également », explique Nick Tabone. Pour espérer atteindre un tel niveau de rentabilité, les investisseurs doivent tout de même accepter de prendre certains risques. Ils peuvent, par exemple, ne pas recevoir de retour sur leur investissement, voire ne pas récupérer leur capital en cas d’échec de l’entreprise. « C’est en effet un business risqué. C’est pourquoi, pour investir dans cette classe d’actifs, il est nécessaire d’être bien informé. Le private equity, ce n’est clairement pas pour tout le monde », explique l’expert, qui pointe également l’illiquidité de cette classe d’actifs. Une classe d’actifs qui se démocratise Si ce sont principalement des clients institutionnels qui s’intéressent au segment du private equity, on voit émerger depuis quelques années maintenant une nouvelle clientèle sur le marché, constituée de particuliers. « C’est une tendance positive pour l’industrie dans le sens où cela permet d’injecter davantage de capitaux sur le marché », assure Nick Tabone qui pointe également un certain nombre de défis auxquels devra faire face l’industrie du capital-investissement pour confirmer ce succès dans les prochaines années. « Il y a notamment l’enjeu de la digitalisation dans la manière dont les affaires sont menées. Il faut aussi pointer l’augmentation du capital disponible, ainsi que les opportunités de transactions, dues à l’accroissement de cash disponible poursuivant un nombre plus limité de transactions. » Grâce notamment à son environnement juridique attrayant, au dynamisme de la Luxembourg Private Equity and Venture Capital Association (LPEA), et à son expertise des fonds, Luxembourg est devenue, ces dernières années, l’une des places incontournables de cette industrie, promise à un bel avenir. Auteur A.B.
JUIN 2021 FONDS D’INVESTISSEMENT
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Gregory Fayolle, Private Equity Partner & Founder Olivier Desmarescaux, Private Equity Partner
Investissement
Au Luxembourg, le Private Equity représente un secteur florissant. Pour rendre l’économie plus durable, certains acteurs du secteur décident d’intégrer la thématique environnementale pour avoir un impact positif sur la planète. Aujourd’hui, si l’expertise environnementale tend à se développer dans le secteur du Private Equity, elle reste toutefois difficile à acquérir. Les experts financiers disposant de compétences techniques dans ce domaine représentent donc une minorité. « Nous voyons de plus en plus d’exigences réglementaires, mais aussi une demande toujours plus importante de clients particulièrement attentifs et une accélération de l’offre des fournisseurs proposant 30
des solutions », déclare Olivier Desmarescaux, Private Equity Partner chez Oraxys Sustainable Private Equity. Offrir une valeur ajoutée d’experts stratégiques aux entreprises De plus en plus d’investisseurs souhaitent se tourner vers des placements qui font sens et /ou qui sont davantage respectueux de l’humain et de la planète. Dans divers pays, des pionniers se positionnent dans le domaine des investissements Private
FONDS D’INVESTISSEMENT JUIN 2021
Equity ayant un impact positif sur l’environnement. Créée en 2008, Oraxys a décidé dès le départ d’œuvrer exclusivement sur ce sujet et de devenir un expert sustainable. « Nous avons une organisation qui nous est propre. Notre équipe multidisciplinaire a l’originalité de se composer, à côté des gestionnaires ‘classiques’ de Private Equity, d’une équipe de 14 dirigeants industriels ayant géré de grandes entreprises dans différents secteurs d’activité. Nos experts Associés Stratégiques
Privilégier des entreprises à impact positif Si en matière d’investissement, certains décident de se tourner vers des infrastructures, des multinationales, ou des start-up, Oraxys a fait le choix de privilégier des petites et moyennes entreprises (PME), dont le chiffre d’affaires se situe entre 10 et 100 millions d’euros, qui sont rentables et qui ont des projets de croissance. « Nous investissons des montants de 3 à 12 millions d’euros pour accompagner la croissance de ces PME. Leur particularité est de présenter une offre à impact environnemental positif pour la planète et des pratiques responsables », explique Olivier
Simon Verjus (Maison Moderne)
Contenu sponsorisé par ORAXYS
ont donc une connaissance tant de l’entreprise que des secteurs », précise Gregory Fayolle, Private Equity Partner & Founder. Outre la compétence financière, l’équipe apporte une expertise sectorielle, opérationnelle et entrepreneuriale. « Nous sommes l’une des rares sociétés dont l’ensemble de l’équipe d’investissement et de gestion se trouve au Luxembourg. L’ancrage luxembourgeois est fondamental pour notre rayonnement européen », ajoute Gregory Fayolle.
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Être responsable : investir pour une économie durable
BRAND VOICE
CHIFFRE ET DATES CLÉS
2008
Desmarescaux. Cet impact positif couvre aussi bien les solutions d’économie circulaire (le fait de recycler des matériaux et objets pour leur offrir une seconde vie) que les ingrédients et produits naturels, ou les technologies permettant de réduire la consommation énergétique. Dans le métier, 80 % des opérations sont réalisées par l’intermédiaire de banques d’affaires conseillant les dirigeants et entrepreneurs pour lever des fonds. « Nous recourons de façon très marginale à celles-ci. Grâce à notre réseau, nous approchons directement les entrepreneurs. 90 % de nos opérations sont organisées de cette manière. Le fait d’être sur ce même sillon depuis 12 ans et de développer des relations à long terme nous permet de donner une appréciation affinée et personnalisée du risque et du potentiel de croissance », commente Olivier Desmarescaux. Réunir un tour de table d’investisseurs partageant la même vision Oraxys s’adresse à des investisseurs privés et familiaux très fortunés, comme les family offices, regroupés au sein d’un IMPACTER POSITIVEMENT L’ENVIRONNEMENT
Promouvoir la production de produits naturels et / ou bio.
Développer l’économie circulaire (recyclage de matériaux).
Innover pour réduire la consommation énergétique.
Création d’Oraxys Sustainable Private Equity.
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Le premier fonds d’Oraxys a permis d’investir dans 9 PME européennes.
2021
Finalisation du 2e fonds.
club. Après un premier fonds démarré en 2008 et suite à la demande de certains investisseurs initiaux, l’équipe d’Oraxys finalise actuellement la levée d’un nouveau fonds – Oraxys Environment 2 – qui est déjà souscrit pour les deux tiers. Après avoir été parmi les premiers à gérer ce type d’investissements, Oraxys a pu développer une expertise spécifique et un réseau de plus de 1.000 entreprises à impact positif situées dans le Benelux, en France, en Allemagne et en Suisse. « C’est donc un investissement qui fait sens pour la planète et l’humain et qui offre de bonnes performances financières et durables. Notre multiple moyen de sortie par entreprise est à ce jour de 2,2 × », explique Gregory Fayolle. Favoriser le développement durable au Luxembourg Wako, fabricant luxembourgeois de fenêtres et portes de haute qualité, figure parmi les entreprises luxembourgeoises que le gestionnaire de fonds a accompagnées. « Très vite, nous avons identifié que l’offre produits de Wako répondait parfaitement à l’isolation thermique des bâtiments, qui était selon nous un sujet majeur dans ce secteur, grâce à la qualité et au caractère innovant des produits assemblés et distribués. Plus vous installez de fenêtres et portes aux standards de qualité élevés en matière d’isolation thermique et phonique, plus vous participez au bien-être des populations et réduisez la consommation d’énergie », conclut Gregory Fayolle. Une démarche qui a valu à Wako en 2020 le prix Alphonse Weicker, le prix du développement économique durable au Luxembourg.
3 QUESTIONS À GREGORY FAYOLLE Private Equity Partner & Founder
« Les PME doivent avoir une offre avec un impact positif, un projet de croissance et être déjà rentables pour pouvoir accélérer. » Pourquoi avoir créé Oraxys ? Je suis un entrepreneur dans l’âme. De plus, créer à 35 ans une société de gestion était un challenge. J’ai choisi de le faire car je suis convaincu par la tendance environnementale et par la nécessité de gérer les ressources de façon efficace pour permettre à l’économie d’être durable. Enfin, j’ai aussi eu la chance de pouvoir attirer un tour de table assez exceptionnel qui m’a fait confiance et qui, aujourd’hui encore, nous suit pour notre 2e fonds. Pour quelle raison avoir privilégié le caractère durable ? Nous ne pouvons plus produire et consommer comme le faisaient nos parents. J’ai depuis toujours la conviction que la thématique environnementale est nécessaire au caractère durable de l’économie. L’environnement est un avantage compétitif et non pas une contrainte. Sur quels critères basez-vous vos investissements ? Les PME doivent avoir une offre avec un impact positif, un projet de croissance et être déjà rentables pour pouvoir accélérer. Elles doivent également être portées par des entrepreneuses et entrepreneurs avec lesquel(le)s il y a une communauté de valeurs et d’objectifs.
Diminuer sa consommation de manière responsable.
plus uvez ur leurs o r t e R s ions t : rmat ctan d’info en conta s fond yolle ry.fa m o g e o gr xys.c @ora — aux aresc m s e r.d m olivie raxys.co @o
JUIN 2021 FONDS D’INVESTISSEMENT
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Concurrence
Les classes d’actifs challengées Les ETF, money markets et hedge funds de la Place subissent depuis longtemps la concurrence féroce de Dublin. Mais cette ère pourrait bientôt prendre fin. L’industrie luxembourgeoise des fonds a désormais tous les atouts nécessaires pour servir ces classes d’actifs… et elle compte bien le faire savoir.
Pour expliquer le succès des hedge funds irlandais, il faut remonter également quelques années en arrière. « Historiquement, la plupart des hedge funds se trouvaient dans des juridictions moins réglementées, telles que les îles Caïmans. Mais les Irlandais ont accepté d’administrer ces fonds et surtout de leur donner une cotation technique en Europe. C’est quelque chose qui n’était pas nécessairement accepté par les réglementations européennes en la matière, et c’est pour cela que le Luxembourg ne l’a jamais fait », explique Jérôme Wigny. Cet avant-gardisme a dès lors permis à Dublin de nouer des contacts avec les acteurs de l’industrie des hedge funds, mais surtout de développer une expertise en la matière. « Lorsque ces acteurs ont commencé à faire des hedge funds en Europe, c’est donc tout naturellement qu’ils se sont dirigés vers l’Irlande. » Le Luxembourg résorbe son retard Si Dublin fait encore aujourd’hui course en tête sur ces trois actifs, force est de constater que d’autres Places, notamment celle de
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FONDS D’INVESTISSEMENT JUIN 2021
Source
HFM Week, Special Report, Luxembourg 2017
0 %
Îles Caïmans
Delaware 2011
2013
20,6 %
21,3 %
6 %
12,4 %
14,4 %
10,9 %
15,8 %
22,8 % Îles Vierges
7,8 %
5 %
2,9 %
5,6 %
10 %
3,9 %
15 %
20,8 %
20 %
24,8 %
25 %
22,1 %
30 %
25,4 %
35 % 33 %
La concurrence de Dublin Ces trois classes d’actifs peu répandues à Luxembourg font actuellement le succès d’une Place concurrente, celle de Dublin. « Si notre concurrent irlandais est parvenu à attirer majoritairement ces trois classes d’actifs, c’est principalement pour des motifs historiques, explique Jérôme Wigny, partner au sein du cabinet Elvinger Hoss Prussen. Il y a deux types de raisons à cela. Premièrement, en ce qui concerne les ETF et les fonds money market, ce leadership de Dublin par rapport à Luxembourg remonte à l’époque où nous avions une taxe d’abonnement, contrairement à l’Irlande. » Si, entre-temps, Luxembourg a fait le nécessaire juridiquement pour supprimer cette taxe et concurrencer Dublin, le mal était fait, et l’essor de ces deux classes d’actifs s’est poursuivi de l’autre côté de la Manche.
Luxembourg, résorbent petit à petit leur retard. « Luxembourg a en effet aujourd’hui une véritable part de marché sur ces trois segments », assure le partner d’Elvinger Hoss Prussen. Car désormais, il n’y a plus réellement de désavantage compétitif par rapport au voisin irlandais. « Premièrement, il n’y a plus de taxe d’abonnement pour les ETF et les money markets. Deuxièmement, en ce qui concerne les hedge funds, Luxembourg a désormais développé une véritable expertise en la matière. Sans oublier que beaucoup de groupes ont tendance désormais à sous-déléguer le travail vers des zones de compétences. On a par exemple de nombreux acteurs au Luxembourg qui prestent des services à des hedge funds mais délèguent une partie du travail en Irlande, ou dans un autre endroit où il y a les compétences. Tout cela pour dire qu’aujourd’hui, il n’y a plus de raisons objectives pour que ces fonds ne puissent pas venir à Luxembourg », assure Jérôme Wigny, par ailleurs coprésident de la commission Alfi Hedge Funds and Liquidity Alternatives.
ÉVOLUTION DE LA PART MONDIALE DES HEDGE FUNDS PAR DOMICILIATION
29,5 %
Grâce à de nombreux atouts juridiques, économiques ou encore culturels, la Place s’est érigée en véritable plaque tournante des fonds en Europe. Avec près de 5.000 milliards d’actifs sous gestion en 2020, Luxembourg est le premier centre de fonds européen et le deuxième au monde derrière les États-Unis. Grâce à son expertise poussée, la Place est également devenue une référence dans la gestion de certains fonds alternatifs, notamment en matière de private equity et de real estate. À côté de ces actifs qui ont particulièrement la cote, d’autres classes, plus discrètes, se verraient bien se tailler une part plus grande du gâteau dans les années à venir. C’est le cas notamment des money markets, dont les capitaux sont principalement investis dans des instruments du marché monétaire, ou des ETF (exchange traded funds), qui permettent d’investir à moindre coût en répliquant un indice boursier et en suivant son évolution. Mais c’est vrai aussi pour les hedge funds, ces fonds spéculatifs qui visent à offrir des rendements indépendants de l’évolution des marchés financiers.
Irlande 2016 Q2
Luxembourg
Autres
JÉRÔME WIGNY Partner, Elvinger Hoss Prussen
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Elvinger Hoss Prussen et Lyxor Asset Management
« L’industrie des fonds doit faire de la publicité pour montrer au grand public que Luxembourg est une juridiction de choix pour ces classes d’actifs. »
si de nombreux fonds ont fermé, on s’aperçoit que d’autres hedge funds et fonds de hedge funds sont en passe d’être créés. Et si ceux-ci avaient l’habitude d’être montés aux îles Caïmans ou en Irlande, cette vieille habitude tend à s’estomper. Le Luxembourg a alors une chance d’attirer ce marché sur son sol », assure Jérôme Wigny.
Un début d’année record pour les ETF Le marché des ETF, lui, a démontré un réel attrait de la part des investisseurs depuis le début de l’année. « Le fort rebond des marchés actions, depuis le début de l’année, a été porteur pour les flux vers les ETF. En Europe, nous avons observé des flux records, majoritairement sur les expositions actions », explique Vincent Denoiseux, responsable de la recherche et des solutions ETF chez Lyxor Asset Management. Un succès qui s’explique notamment par les résultats positifs obtenus par le marché des ETF en 2020 malgré le contexte instable engenL’ère des hedge funds ? dré par la crise du Covid. « Cela a été un test La Place a d’ailleurs tout intérêt à se positionner historique pour le marché ETF. Notamment davantage sur ces marchés pour devenir une sur les capacités de liquidités de cette classe d’acalternative sérieuse à l’Irlande. Selon le partner tifs, et notamment en période de fort stress sur d’Elvinger Hoss Prussen, ces actifs pourraient les marchés financiers. Clairement, ils ont fait en effet, au regard de la conjoncture socio leurs preuves en 2020, assure Vincent Denoiseux. économique, offrir de belles perspectives aux Si bien qu’on observe une rotation accrue en investisseurs. « Ces fonds n’ont pas été à la provenance de la gestion active vers la gestion mode ces dernières années. Depuis la crise de passive. Au Royaume-Uni, cette tendance se 2008, on leur reproche de manquer de trans- confirme avec un nombre croissant d’investisparence et de ne pas toujours offrir la liquidité seurs, notamment des banques privées et des qu’ils promettent. Mais surtout, il faut bien gestionnaires de fortune, généralement très l’avouer, la performance n’était pas au ren- friands de gestion active, qui se tournent vers dez-vous ces 10 dernières années », explique les ETF. » Face à ce changement de paradigme, Jérôme Wigny. les acteurs de la Place auraient donc tout intéLorsqu’on évoque les avantages des classes rêt à se positionner sur ce marché porteur. d’actifs alternatifs, souvent, on fait référence au fait qu’elles sont décorrélées des marchés Des atouts à faire valoir financiers. Une indépendance qui leur per- Si Luxembourg a de nombreux atouts à faire met d’être robustes lorsque les marchés tra- valoir pour devenir, aux yeux des investisditionnels sont instables. « ‘Hedge’ signifie ‘se seurs, une destination idéale en matière protéger’. Les hedge funds ont donc histori- d’ETF, de money market et surtout de hedge quement les capacités de protéger leurs inves- funds, elle a encore de nombreux obstacles tisseurs, indépendamment des indices boursiers. à surmonter pour s’afficher en véritable hub Autrement dit, si l’indice est à -2 %, le hedge sur ces trois classes d’actifs. « Nous devons fund pourrait avoir une performance supé- notamment soigner notre image et faire de la rieure. Mais à l’inverse, si l’indice est à 4 %, le publicité pour montrer au grand public que hedge fund sera peut-être seulement de 2 %, Luxembourg est une juridiction de choix souligne le partner du cabinet Elvinger Hoss pour gérer ces fonds. L’industrie est en Prussen. Ces dernières années, justement, ils train de s’y attacher, mais nous sommes n’ont pas été capables de protéger leurs inves- conscients que cela ne se fera pas du tisseurs, même lorsque les marchés chutaient. jour au lendemain , assure le copréLe contexte actuel explique ce phénomène. Nous sident de la commission Hedge Funds avons connu des hausses quasi systématiques and Liquidity Alternatives. En tout cas, alors que le hedge fund se montre particuliè- ce dont nous ne manquons pas, ce sont rement intéressant lorsque, au contraire, les les compétences en la matière. Aujourd’hui, marchés sont volatils. » auprès de chaque prestataire de services Pour de nombreux observateurs, toutefois, sur la Place, vous trouverez l’expertise nécescette hausse continue des marchés pourrait saire. Clairement, nous n’avons pas à rougir prendre fin. « Dans ce contexte, il serait par- par rapport à nos concurrents. » ticulièrement intéressant de s’appuyer sur cette classe d’actifs. D’autant plus qu’avec la crise, Auteur A. B.
LES 3 CARACTÉRISTIQUES PRINCIPALES DE CES FONDS 1 Hedge funds Il existe de nombreuses stratégies d’investissement en hedge funds. « De manière générale, elles visent à maximiser les hausses du marché tout en essayant de réduire au maximum les baisses. Les hedge funds ont une vision asymétrique, contrairement à d’autres actifs qui vont bénéficier des hausses, mais subir les baisses », explique Vincent Denoiseux, responsable de la recherche et des solutions ETF chez Lyxor Asset Management. 2 ETF Les ETF (extrade traded funds), ou fonds cotés en bourse, sont des fonds d’investissement cherchant à suivre le plus fidèlement possible l’évolution d’un indice boursier. Puisqu’ils ne font que suivre les variations d’un indice de référence, leur gestion est dite passive. Simples et transparents, ces fonds « trackers » ont également l’avantage d’avoir des frais consi dérablement réduits en raison de l’absence de gestion active. 3 Money markets Un fonds monétaire est un fonds investi en papier monétaire gou vernemental ou d’entreprise. « C’est un fonds qui est dit sans risque – même si certains d’entre eux récemment n’ont pas délivré la rentabilité promise, explique Vincent Denoiseux. Ce sont des actifs très peu volatiles et donc avec un taux de rentabilité relativement modéré, voire négatif actuellement. »
« Il est capital d’être regardant quant à la qualité des titres achetés par le gérant. » VINCENT DENOISEUX Responsable de la recherche et des solutions ETF Lyxor Asset Management
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Dossier
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FONDS D’INVESTISSEMENT JUIN 2021
Gouvernance
Illustration
Salomé Jottreau
Les nouveaux défis de la gouvernance Le temps presse. Green Deal oblige… La lutte contre le réchauffement climatique, pour atteindre la neutralité carbone à l’horizon 2050 et la réduction des émissions de 55 % d’ici 2030, n’est pas gagnée. Pour y arriver, l’Union européenne entend repenser la gouvernance des entreprises en matière de gestion des risques environnementaux, sociaux ou liés aux droits humains, comme le précise Didier Reynders. Dans son interview, le commissaire européen à la Justice évoque les nouvelles obligations actuellement en discussion pour renforcer la responsabilité des entreprises en matière de développement durable. Toujours en matière de gouvernance, mais du côté des fonds d’investissement, les choses sont en train de bouger. La fonction d’administrateur indépendant devient de plus en plus courante en Europe. Ces avocats des intérêts des investisseurs ont tendance, dans les conseils d’administration, à poser les bonnes questions : celles qui déran gent et qui sont les plus enclines à répondre aux grandes priorités du moment, à savoir les critères ESG, les cyber-risques et la diversité au sein des instances dirigeantes. Enfin, la taxonomie verte, clarifiant les définitions de ce qu’est une activité durable, sert dans ce contexte de « boussole environnementale » permettant aux investisseurs de savoir si leurs placements sont en conformité ou non avec les objectifs du pacte vert. Espérons que la gouvernance, à tous les niveaux, sera à la hauteur des nouveaux défis. JUIN 2021 FONDS D’INVESTISSEMENT
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Interview Didier Reynders
« Obliger chaque acteur à mettre en place une gouvernance durable » Pour soutenir ses ambitions en matière de transition verte, l’Union européenne entend établir de nouvelles obligations envers les entreprises afin de les inscrire dans une démarche durable et responsable. Le point avec le commissaire européen à la Justice, Didier Reynders.
Monsieur Reynders, pouvez-vous nous faire part du contexte dans lequel cette nouvelle législation, appelée à renforcer la responsabilité des entreprises en matière de développement durable, est née ? Avant le début de la pandémie, la Commission européenne s’est fixé, comme principales priorités, de mener une transition vers une économie plus durable, avec l’établissement du Green Deal, et de soutenir le développement du numérique. Ce qui relevait des priorités avant la crise sanitaire l’est toujours, et plus encore après. En matière de gouvernance durable, la pandémie a en effet soulevé d’importantes questions autour de la chaîne d’approvisionnement, avec des débats sur les équipements, la disponibilité des masques, des tests, des vaccins. Cette réglementation sur la responsabilité des entreprises cadre parfaitement avec ces enjeux. Des dispositifs légaux relatifs à ce sujet existent déjà en France, aux Pays-Bas. Un projet est sur la table en Allemagne. Au niveau international, l’Organisation des Nations unies a établi des lignes directrices autour des sujets ayant trait aux entreprises et aux droits humains. Cette initiative s’inscrit donc dans un contexte vaste d’une prise de conscience de la nécessité de renforcer la gouvernance en matière de gestion de risques environnementaux, sociaux ou liés aux droits humains.
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FONDS D’INVESTISSEMENT JUIN 2021
De quelle manière ces obligations vont-elles s’appliquer ? Cela devrait passer par une directive et se traduire de deux manières. D’une part, il s’agit d’instaurer un devoir de vigilance sur la chaîne d’approvisionnement de l’entreprise, quand cela s’applique. D’autre part, il y aura une obligation imposée aux dirigeants de concevoir une stratégie, s’appuyant sur des données scientifiques, lui permettant d’évaluer les impacts de l’activité de son entreprise en matière de développement durable, d’identifier les risques et de prendre les mesures pour éviter, ou du moins limiter, les incidences négatives liées à ses opérations.
Anthony Dehez
BIO EXPRESS L’actuel commissaire européen à la Justice, Didier Reynders, a derrière lui une longue carrière politique en Belgique. Ce leader libéral, âgé de 62 ans, est licencié en droit. Au-delà de son engagement au service de son parti, le Mouvement réformateur (droit, centre droit), il a exercé plusieurs fonctions ministérielles au niveau de l’État fédéral, en étant successivement en charge des finances, des affaires étrangères ou encore de la défense.
Comment invite-t-on les entreprises à renforcer leur gouvernance pour soutenir une approche durable ? Il s’agit d’imposer un certain nombre d’obligations aux dirigeants d’entreprise afin que soit menée une réflexion à moyen et long terme sur le développement durable. Il importe que chacun s’assure que les actions prises ne soient pas en contradiction avec les objectifs de durabilité, qu’il s’agisse de la lutte contre le réchauffement climatique, de la préservation de la biodiversité ou encore du respect des droits humains et sociaux. En la matière, on parle beaucoup du travail forcé ou du travail des enfants. Mais cela a aussi trait aux travaux menés autour du travail décent par Nicolas Schmit, commissaire européen luxembourgeois en charge de l’emploi et des droits sociaux, avec qui j’ai eu l’occasion d’échanger.
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Quelles sont la nature et l’ambition de cette directive « vigilance » des entreprises ? À travers ce courant se pose la question de la manière de faire participer les entreprises aux Objectifs de l’Onu de développement durable qui ont été fixés, aux ambitions que nous poursuivons au niveau de l’Union européenne. En matière de lutte contre le réchauffement climatique, pour rappel, il s’agit d’atteindre la neutralité carbone à l’horizon 2050 et de réduire les émissions de 55 % d’ici 2030. Si l’on veut y parvenir, il faut évidemment des efforts importants des pouvoirs publics. Ceux-ci se concrétisent aujourd’hui à travers les fonds de relance, avec 30 % des moyens accordés dédiés au Green Deal et 20 % au numérique. Au-delà, il faut aussi que ces ambitions soient soutenues par les acteurs économiques et par les consommateurs.
Cette nouvelle réglementation veut obliger les entreprises à se doter d’une gouvernance en matière de développement durable, à faire preuve de vigilance vis-à-vis de risques environnementaux, sociaux ou de droits humains. Elle est complémentaire à d’autres initiatives comme, dans le domaine financier, la taxonomie qui vise à se donner des indications claires sur ce qui peut être considéré comme un investissement durable. On peut également citer les exigences en matière de reporting non financier ou durable. Je travaille aussi sur des chantiers qui concernent l’information apportée aux consommateurs, afin que chacun puisse faire des choix durables quand il opte pour un produit ou un service.
Didier Reynders, commissaire européen à la Justice.
Interview Didier Reynders
« Chacun doit s’assurer que les actions prises ne soient pas en contradiction avec les objectifs de durabilité. » Quels seront les acteurs concernés ? L’approche envisagée est horizontale. Elle concernera donc l’ensemble des secteurs et donnera un cap à toutes les entreprises. Cela n’empêchera pas, parfois, d’aller plus loin que ce qui est requis par la directive dans certains secteurs particuliers. Des débats ont lieu au Parlement européen autour d’enjeux liés à la déforestation, d’autres autour de l’exploitation des minerais en zones de conflit. Des discussions concernent d’autres sujets, comme les pratiques de l’industrie du textile, pour prévenir des incidents dramatiques similaires à ceux qui se sont produits au Bangladesh il y a bientôt une dizaine d’années. Cependant, sur le sujet qui nous occupe, l’approche se veut commune à tous les acteurs. Nous proposons un cadre commun pour toutes les entreprises. Toutefois, à l’image de ce qui a été mis en place autour des obligations de reporting des informations non financières, les obligations dépendront des acteurs, en ciblant prioritairement les grandes entreprises et les PME qui peuvent être considérées comme à risque. Elles concerneront donc, par exemple, les acteurs développant ou sous-traitant des opérations dans des zones ou des secteurs exposés à un risque d’incidences en matière de gouvernance durable. Un principe de proportionnalité devrait donc s’appliquer… Les plus petites entreprises – je pense notamment à celles qui comptent moins de dix collaborateurs – ne devraient pas être concernées. Comme je le disais, pour les autres PME, nous voulons fixer une obligation uniquement s’il y a des risques. Mais tout cela doit encore être défini. En ce qui concerne le devoir de vigilance sur la chaîne d’approvisionnement, il sera variable selon qu’il concerne les fournisseurs en première ligne, ceux avec lesquels on a vraiment la possibilité d’imposer des contraintes, et les autres, pour lesquels s’appliquera une obligation de moyens. Une entreprise qui dispose d’informations sur des risques qui existent, et ce même au bout de la chaîne, pourra être tenue pour responsable au regard de ce devoir de vigilance. On sait par exemple que, pour éviter le travail forcé dans le secteur du textile, il faut appliquer des exigences au-delà du premier niveau dans la chaîne de sous-traitance et prendre des dispositions en tenant compte des risques sur l’ensemble des sous-traitants. Autour de ces nouvelles obligations, dans quelle mesure la responsabilité des acteurs sera-t-elle engagée ? Nous avons déjà beaucoup débattu avec le Parlement européen à ce sujet. Dans ce contexte, la responsabilité civile des dirigeants pourrait être engagée lorsqu’un 38
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problème est constaté au niveau des opérations en matière de protection de l’environnement, des droits sociaux ou humains. Il est en outre question d’instaurer une supervision administrative au niveau de chaque État membre, dont le rôle sera d’assurer le suivi de la directive et sa transposition, de veiller à l’interprétation qui en est faite ainsi qu’à son application. On peut, à ce niveau, établir une comparaison avec le Règlement général sur la protection des données. On pourrait assister à la mise en œuvre d’un réseau d’autorités, un dans chaque État membre, pour veiller à une application homogène des nouvelles règles en matière de responsabilité et de gouvernance durable. Les institutions financières sont aussi concernées par ces nouvelles obligations. À quoi devront-elles répondre ? On s’inscrit dans la même logique que ce qu’impose la taxonomie aux acteurs du monde financier. Ces institutions sont appelées à procéder à un certain nombre de vérifications pour être certaines qu’elles investissent dans des produits durables. À notre niveau, nous allons leur demander de faire le même genre d’exercice, c’est-à-dire d’élaborer une stratégie de gouvernance à moyen terme vis-à-vis des risques environnementaux, des droits sociaux et humains liés à leurs opérations. Comme nous pouvons leur demander de se pencher sur leur chaîne d’approvisionnement pour évaluer ces risques au niveau de leurs fournisseurs. Fallait-il forcément passer par la voie réglementaire pour amener les entreprises à renforcer leur gouvernance en matière de responsabilité durable ? Certaines entreprises étaient déjà engagées dans cette voie de manière volontaire, sur base notamment de recommandations établies par certaines instances internationales à ce sujet. On voit de plus en plus d’entreprises communiquer sur ces aspects et leurs engagements en matière de développement durable. Dans ce contexte, le fait de réglementer poursuit plusieurs objectifs. Le premier est de se doter d’une capacité de vérifier que ce qui est annoncé par les entreprises dans ce domaine ne relève pas du greenwashing, que cela répond bien aux enjeux de développement durable. D’autre part, il est question de la volonté de mettre les entreprises sur un pied d’égalité, de faire en sorte que l’application de ces principes ne se fasse pas uniquement sur base volontaire, mais que les acteurs aillent tous dans la même direction. On crée alors un même level playing field pour l’ensemble des structures. La mise en œuvre d’une directive européenne veut aussi éviter une fragmentation à l’échelle du marché unique, avec potentiellement 27 réglementations différentes autour de ces questions. Il s’agissait là d’une inquiétude dont m’ont fait part les dirigeants économiques. Il est, en outre, important de légiférer si l’on veut s’assurer que tout le monde applique les règles et si l’on veut éliminer les risques liés à l’environnement comme aux droits humains et sociaux. Sans quoi, on court toujours le risque qu’un projet aille à l’encontre des objectifs que nous partageons tous. Comment cette initiative autour de la gouvernance durable des entreprises vient-elle compléter les autres mesures prises au niveau de la Commission ? Nous nous sommes alignés, en bonne relation avec ma collègue Mairead McGuinness, commissaire en charge des services financiers, de la stabilité financière et de
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l’union des marchés des capitaux, sur ce qui a été décidé au niveau du reporting non financier. Ce qui devra être communiqué dans le cadre de la responsabilité des entreprises en matière de gouvernance durable et de devoir de vigilance pourra se raccrocher à ce qui est exigé à ce niveau. Nous n’avons pas non plus voulu multiplier les instruments et les rapports. L’idée n’est pas d’exiger énormément de nouvelles choses de la part des entreprises, mais de faire en sorte, considérant nos ambitions, que tout le monde suive l’exemple des bons élèves, de celles et ceux qui ont déjà pris la voie d’un engagement plus durable. S’inscrire dans une démarche plus durable, en outre, est aussi dans l’intérêt des entreprises. Beaucoup d’analyses menées pendant la crise que nous venons de traverser ont montré que les entreprises qui s’étaient déjà engagées en faveur d’un développement plus durable et responsable sont plus résilientes. Cela n’empêche pas d’être préoccupé par le développement à court terme de l’entreprise, mais l’idée est d’engager cette réflexion à moyen et long terme pour s’inscrire dans une économie plus durable. Comment ces règles s’appliqueront-elles vis-à-vis d’acteurs étrangers à l’Union européenne ? L’application des règles devrait concerner tous les acteurs européens mais aussi toutes les entreprises qui désirent opérer au niveau du marché intérieur. Cet aspect a d’ailleurs été un sujet important de la consultation menée au mois de février, et pour laquelle nous avons reçu près de 500.000 contributions. En imposant de telles obligations à l’ensemble des acteurs, en ce compris des entreprises non européennes qui veulent développer des activités au niveau du marché intérieur, l’idée est aussi de permettre à l’Union européenne de prendre un leadership dans les discussions multilatérales qui peuvent avoir lieu sur ces sujets. On parle ici de diligence raisonnable vis-à-vis de ces enjeux. Comment place-t-on le curseur pour déterminer ce qui relève du « raisonnable » ? L’idée est de partir d’une analyse scientifique des risques et des impacts négatifs potentiels associés aux opérations développées. Prenons un exemple concret : celui d’un importateur de café ou d’une entreprise travaillant dans le secteur du chocolat. Ces acteurs, forcément, sont appelés à acheter des matières premières dans des plantations. Il leur faudra dès lors se poser certaines questions, relatives à l’éventualité du travail des enfants au niveau de la culture du cacao ou aux conditions de travail dans les plantations, pour prendre des mesures adaptées. Dans d’autres secteurs, comme le textile ou l’industrie chimique, d’autres risques devront être considérés. Dans beaucoup de domaines d’activité, il existe déjà un cadre visant à limiter les impacts négatifs. On peut, par exemple, penser à la directive Seveso qui concerne les sites industriels à risque. Souvent, l’enjeu sera de partir des éléments déjà en place pour les rapporter. De manière générale, chaque entreprise devra se demander comment faire pour éviter ou limiter les risques, et partager ces informations au cœur de son rapport non financier. Avec les autorités administratives associées à la directive et l’engagement de la responsabilité civile des dirigeants en cas de manquement, on peut soutenir le développement d’une gouvernance plus durable et plus responsable à l’échelle des entreprises. 40
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UNE GOUVERNANCE TOUJOURS PLUS VERTE La dernière enquête menée par PwC et l’ILA consacrée à la gouvernance des fonds d’investissement luxembourgeois a révélé que les critères environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG), la cybersécurité et la diversité des conseils d’administration apparaissent comme des thèmes d’une importance accrue pour les conseils d’administration.
En quoi ces nouvelles obligations répondent-elles aussi aux préoccupations des consommateurs ? Les risques environnementaux ou sociaux pèsent de plus en plus sur le choix des consommateurs. Ils souhaitent pouvoir acheter des produits ou services, ou investir de manière responsable. Pour cela, ils ont besoin d’informations fiables. La transparence qui va découler de cette initiative et la mise en œuvre d’un système de gouvernance tel que nous l’envisageons doivent jouer en faveur de tous ceux qui s’inscrivent dans une démarche responsable, qui cherchent à éviter les impacts négatifs de leurs opérations ou, du moins, à en prendre conscience pour les limiter. En agissant de manière globale, en intégrant ces aspects à tout développement futur, on doit pouvoir tirer le monde vers le haut. De nouvelles obligations, au niveau de la chaîne d’approvisionnement, ne risquent-elles pas de mettre à mal certaines filières aujourd’hui importantes ? Pour cette raison, les actions envisagées ne doivent pas relever des entreprises seules, mais impliquer d’autres politiques menées à l’échelle de l’Union, comme l’aide au développement ou la stratégie commerciale. Si nous participons à la mise en œuvre de l’obligation scolaire dans certains pays en voie de développement, en aidant à la construction d’écoles par exemple, nous pouvons contribuer à ce que les enfants soient en classe plutôt que dans les plantations. Dans les traités commerciaux négociés, on peut aussi veiller à l’introduction de clauses relatives à la préservation de l’environnement ou au respect de droits sociaux et humains. Dans certains cas, la démarche révélera qu’il est peutêtre opportun de relocaliser certaines productions. Par le passé, nous avons souvent délocalisé des activités en raison de coûts salariaux. Désormais, ce critère ne doit plus être le seul à entrer en ligne de compte. En agissant de manière globale, concertée et coordonnée, nous devons, à tous les niveaux, nous demander comment faire pour contribuer aux objectifs fixés. Quel sera l’agenda de mise en œuvre de cette nouvelle réglementation ? À l’heure actuelle, nous sommes occupés à évaluer l’impact de ces nouvelles obligations sur les acteurs, afin d’ajuster les modalités d’application. Nous espérons adopter le projet de directive au niveau du Collège d’ici l’automne afin de pouvoir, durant la présidence française du Conseil de l’Union européenne, entre janvier et juin 2022, mener les débats avec le Parlement et le Conseil membres. Une fois adoptée par ces deux organes, la directive devra encore être transposée au niveau de chaque État membre. Pour un projet de cette ampleur, on estime qu’il faut trois à cinq ans, à partir de ce moment, pour qu’il soit appliqué de manière homogène à l’échelle de l’Union européenne. Cela nous emmène potentiellement en 2026, soit quatre ans avant l’échéance fixée pour atteindre l’objectif de réduction de 55 % des émissions de CO2. Pour les entreprises, les obligations inhérentes à ces enjeux de gouvernance ne seront pas d’application tout de suite. Toutefois, nous devons prendre conscience, si nous voulons réussir cette transition, qu’il y a urgence à s’inscrire dans cette dynamique et à adopter des pratiques plus responsables et plus durables. Auteur S. L.
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The investment funds world has been buffeted by a series of changes in recent years. From Brexit to Covid-19, it’s been an unusual time. Now, new regulations will change things further, from how fees are paid to the complexity of investments and the place of socially responsible investing. 42
FONDS D’INVESTISSEMENT JUIN 2021
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Investment funds seek opportunities in a changing world
Clifford Chance has a strongly growing investment funds practice in Luxembourg, run by the four Investment Funds partners in this article and employing over 40. How has Brexit impacted your practice? PAUL VAN DEN ABEELE (P. V.-A.) — INVESTMENT FUNDS PARTNER
June 2016 meant an immediate increase in work. First in setting up funds, so the managers could ensure the future passport ability of those funds, while during the transitory period, we looked at the management arrangements. This resulted in a suite of licensing applications for AIFMs (Alternative Investment Fund Managers), management companies and top-up licences. Brexit means a loss of the passporting ability for marketing. That remains probably the thorniest issue coming out of Brexit. It’s not yet fully resolved for many of our clients. Amongst others, we’re seeing Luxembourg teams being more ‘front’ in fund marketing.
“Europe sometimes has more complex, even considerably more complex retail fund products than the US.” Emmanuel-Frédéric Henrion Clifford Chance Investment Funds partner
How are regulatory changes influencing the fund advisor?
“Fund managers have to There is a very important transparency topic that’s off understand that most asset managers’ radar: undue costs. EU regulators ESG is so broad will make you justify your fees that even if you and the costs charged to the funds. In the US, this is believe that already the top regulatory enforcement priority. your strategy Europe sometimes has more complex, even considerably has nothing to more complex retail fund prodo with ESG, ducts than the US. That’s why the European Securities and in the end, you Markets Authority (ESMA) is constraining such products. may realise These two developments (combined with other factors) that it does.” EMMANUEL-FRÉDÉRIC HENRION (E.-F. H.) — INVESTMENT FUNDS PARTNER
could trigger an industry consolidation sooner or later.
How have pension fund rule changes worked on the industry? E.-F. H. Pension funds are multi-layered products involving national pension, labour, social security and tax laws. People need pensions, but states can no longer fully finance them. Now, there is the EU PEPP initiative, the pan-European personal pension product. Individuals get an account which follows them throughout their career when they move across the EU and change of employer. It’s great, but it is a complex initiative to implement. What are the challenges in real estate? KRISTOF MEYNAERTS (K. M.) — INVESTMENT FUNDS PARTNER
Traditional real estate assets like offices and retail centres have suffered because of Covid-19. Our clients are challenged in managing that and keeping returns up. In a post-Covid-19 world, questions arise on what office space will look like, with agile working, homeworking, etc.? More and more clients are moving to a broader range of assets including logistics,
Maren Stadler-Tjan Clifford Chance Investment Funds partner
mixed-use properties, health care and office labs, to name a few. These often require a special expertise. What is the current state of private equity? K. M. There are a lot of opportunities out there. Last year, close to 250 special purpose acquisition companies (SPACs) raised over 80 billion USD in the US. In February 2021, 300 SPACs were looking for targets. In Europe, Luxembourg is seen as a good jurisdiction for such vehicles.
also have to understand that ESG is so broad that even if you believe that your strategy has nothing to do with ESG, in the end, you may realise that it does. Switzerland, for example, sees this as a differentiator for Luxembourg as we are so far advanced. What issues are involved in serving the German market? M. S.-T. The German market is important as it’s home to big fund managers. But Germany is also interesting for investing there, especially for the private equity or real estate market. Luxembourg funds must meet specific legal requirements, so that certain German investors may invest in them, and that is one of our sweet spots. Together with our funds specialists in Germany, we jointly combine our in-depth knowledge in the structuring of funds reflecting requirements for German fund managers and/or German investors. What do these areas have in common for your practice? E.-F. H. Our clients need to move very quickly to take advantage of the best investment opportunities. And to do so, they need quality services from a global services provider. P. V.-A. I think it’s about bringing it into something that’s workable for our clients. And I think that’s where having the right experts in the right places is very, very helpful.
How do the recent developments in ESG and the SFDR affect fund managers? MAREN STADLER-TJAN (M. S.-T.) — INVESTMENT FUNDS PARTNER
With the Sustainable Finance Disclosure Regulation (SFDR) applying since March, we see a change in fund structuring where Environmental, Social and Governance (ESG) is now high profile, and investors ask what their fund manager is doing about it. Funds managers
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JUIN 2021 FONDS D’INVESTISSEMENT
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Dossier
La montée des administrateurs indépendants
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Luxembourg et membre du réseau The Directors Office. Aucune contrainte n’existe à ce sujet en Europe, sauf pour les plus grandes banques. Toutefois, dans les faits, la pratique tend à se répandre, et il apparaît clairement que la Commission de surveillance du secteur financier (CSSF) voit d’un bon œil le fait qu’il y ait de plus en plus d’administrateurs indépendants au sein des conseils d’administration des fonds. » Au Luxembourg, le recours à des independent directors est donc en constante augmentation. « O n assiste clairement à un changement d’attitude par rapport à cette
FONDS D’INVESTISSEMENT JUIN 2021
fonction, constate Michael Delano, président du comité des fonds de l’Institut luxembourgeois des administrateurs (ILA), et associé au sein de PwC Luxembourg. Voici quelques années encore, les sociétés nommaient un administrateur indépendant dans le seul but de rassurer les investisseurs, sans autre réflexion. Aujourd’hui, on en nomme souvent plus d’un. Surtout, on le fait pour bénéficier de leur expertise. Cela étant dit, nous n’en sommes pas encore au niveau des États-Unis, où le nombre d’administrateurs indépendants est beaucoup plus élevé. Et je ne crois pas qu’il soit nécessaire d’en arriver là au Luxembourg. »
Illustration
Depuis plusieurs années déjà, la fonction d’administrateur de fonds indépendant prend de l’ampleur au point de devenir un métier à part entière. Le développement des règles de corporate governance ainsi que les recommandations des régulateurs tendent à promouvoir l’installation de tels administrateurs. Même si, aujourd’hui, rien n’oblige à y avoir recours au moment de composer le board d’un fonds d’investissement. « Cette tendance nous vient des États-Unis où la pratique est bien ancrée dans les mœurs et, pour partie, obligatoire, relate Charles Muller, administrateur indépendant, avocat honoraire au Barreau de
Salomé Jottreau
Au Luxembourg, les administrateurs indépendants sont de plus en plus souvent invités à s’asseoir à la table du conseil d’administration des fonds. Garants du respect d’une bonne gouvernance, ils veillent notamment aux intérêts des investisseurs.
Conseil d’administration
Une relation win-win L’intérêt d’avoir recours à un ou plusieurs administrateurs indépendants dans le secteur des fonds n’est plus à prouver. « La composition du conseil d’administration est un élément clé pour le bon pilotage de toute entreprise. Plus la diversité est importante, plus les échanges et les débats sont riches. Il est assez simple de comprendre qu’un juriste aura une autre vision qu’un commercial, un administrateur expérimenté n’aura pas les mêmes points d’attention qu’un jeune professionnel qui sort de l’université, et une personne externe indépendante aura un autre focus qu’un collaborateur qui a fait sa carrière dans l’entreprise…, confie Michèle Biel, head of Conventum Third Party Solutions, au sein de Banque de Luxembourg Investments (BLI). Vous voyez des administrateurs indépendants oser donner leur opinion et poser des questions parfois dérangeantes ; la plus-value est très vite tangible. La société en sort gagnante. » L’autre tendance va à la diversification des boards, en termes de genre, d’âge, d’origine, etc. « Faire confiance à un administrateur indépendant, c’est aussi avoir accès à des compétences dont on ne dispose pas en interne. La plupart des initiateurs de fonds luxembourgeois sont actifs à un niveau international. Ils ne possèdent pas une connaissance des pratiques et des réglementations locales spécifiques », constate Michèle Biel. « Très souvent, les gens qui représentent l’initiateur du projet ne sont pas basés à Luxembourg. Le gestionnaire de fonds peut être à Londres ou à Singapour, en Allemagne ou en France. Or, lorsque la CSSF a des questions à poser, elle apprécie d’avoir quelqu’un sous la main, capable de se rendre rapidement à la route d’Arlon (où se trouve le siège du régulateur luxembourgeois, ndlr), témoigne Charles Muller. Disposer d’un relais sur place est un atout indéniable. Ce ne doit pas nécessairement être un résident luxembourgeois, mais il doit être disponible à très courte échéance. »
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BLI
UN NOMBRE DE MANDATS LIMITÉS ? Il n’y a pas de limite légale au nombre de mandats que peuvent accepter les administrateurs indépendants. Toutefois, une limite officieuse de 12 mandats est généralement acceptée. Au-delà de ce nombre, la CSSF commence à se poser des questions. « Le nombre de mandats ne reflète toutefois pas toujours très bien les choses. Un administrateur peut très bien disposer de nombreux mandats, qui sont tous liés à un seul ‘fonds parapluie’ qui regroupe plusieurs sousfonds », souligne Michael Delano, président du comité des fonds de l’Institut luxembourgeois des administrateurs (ILA), et associé au sein de PwC Luxembourg.
MICHÈLE BIEL Head of Conventum Third Party Solutions Banque de Luxembourg Investments
« Dès qu’un indépendant monte au board d’un fonds, on note généralement une amélioration significative de la gouvernance. » Le premier rôle d’un administrateur indépendant dans un fonds d’investissement est certainement de se prémunir contre le risque de conflits d’intérêts. Comme pour toute société, les membres du conseil d’administration sont nommés par les actionnaires. Cependant, la très grande majorité de ces actionnaires ne participent généralement pas aux assemblées générales et n’ont aucune vue sur l’activité du fonds. « Vous-même, si vous prenez des parts dans un fonds quelconque auprès de votre banque, vous n’allez pas trouver d’intérêt à suivre une assemblée générale (AG) et vous ne ferez pas valoir votre droit de vote, relate Charles Muller. Les seuls qui participent à l’AG, et qui votent, sont ceux qui ont initié le projet, ceux qui gèrent le fonds. Or, ces derniers ont en soi déjà un conflit d’intérêts parce qu’ils sont rémunérés par le fonds. Ils sont à la fois du côté de celui qui reçoit l’argent et du côté de celui qui décide de ce qu’ils vont recevoir… Cela pose un problème. Dès lors, pour représenter tous ces actionnaires qui ne participent pas aux AG, l’idée est de mettre en place des administrateurs indépendants. Ceux-ci n’ont pas de lien avec les prestataires de services du fonds. Ils ne gèrent pas le fonds, n’en font pas l’audit, ne sont pas issus de la banque dépositaire ni engagés sous quelque forme que ce soit. Ils ont en tête l’unique idée de veiller à l’intérêt de l’investisseur. »
une vue extérieure, indépendante et parfois naïve. Cela permet de véritablement remettre en question certaines pratiques. Étant actif au sein de plusieurs boards, il peut aussi se nourrir de ce qu’il voit ailleurs, apporter des idées et des solutions qui ont fait leurs preuves. » Grâce à sa vue extérieure, il peut également se permettre de poser des questions dérangeantes que, par loyauté, d’autres n’oseront pas poser. « Aussi, la tendance générale est à l’intégration d’un ou deux administrateurs au board des fonds. Dès l’instant où c’est le cas, on note généralement une amélioration significative de la gouvernance, un suivi plus rapproché des affaires courantes. Les réunions du conseil sont plus régulières, le suivi des points d’action est assuré, les délais sont mieux respectés, la documentation est plus complète… » Pour être un bon directeur indépendant et apporter une réelle plus-value, il faut s’intéresser à une multitude de sujets et disposer de larges connaissances générales. « La théorie dit qu’un bon board dispose collectivement de toutes les compétences requises, reprend Charles Muller. Lorsqu’on compose un conseil d’administration, l’idée est de lister les com pétences dont on a besoin et de choisir des personnes en fonction de leurs spécialités. Classiquement, on va prendre quelqu’un qui a des compétences d’audit ou financières, qui sait lire en détail les comptes et poser les bonnes questions, une personne plus opérationnelle qui pourra poser des questions pertinentes dans ce domaine. On retrouve aussi le juriste qui va notamment s’assurer que telle nouvelle réglementation a bien été prise en compte… » Dans la pratique, un administrateur indépendant dispose très souvent d’une spécialisation. « Au-delà du rôle de généraliste indispensable pour comprendre les rouages du système, ces personnes apportent une expertise très pointue dans un domaine bien précis. Pour les fonds d’investissement luxembourgeois, l’expertise représentée par les administrateurs indépendants est souvent la connaissance de la réglementation luxembourgeoise. Cette évolution est plutôt positive », souligne Michèle Biel. D’autant que les sujets sur la table sont de plus en plus complexes.
Attention à l’excès de contrôle En présence d’administrateurs indépendants, la tendance est à l’augmentation des réunions. « Ces personnes s’engagent avec beaucoup de Oser poser des questions dérangeantes conviction. D’une réunion trimestrielle, on L’administrateur indépendant exerce un rôle passe à six ou sept réunions par an afin de s’asactif. Il a pour mission de veiller à la bonne surer de la bonne gestion du fonds. Le focus est conduite des affaires, dans le respect des clairement placé sur le contrôle. Beaucoup de règles en vigueur. « Son premier rôle est d’être questions tournent autour de la compliance, administrateur, explique Michèle Biel. Avec des règles de reporting, des exigences légales. ses collègues, il doit définir les choix straté- Cela conduit à des comptes-rendus de plus en giques du fonds, suivre et contrôler les travaux plus longs…, ajoute la directrice de Conventum de la direction journalière. La spécificité de Third Party Solutions. Le grand défi est de l’administrateur indépendant est qu’il apporte veiller à l’efficience des boards. Parfois, l’aspect JUIN 2021 FONDS D’INVESTISSEMENT
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CHARLES MULLER Administrateur indépendant
«Pour le moment, il n’y a pas de cadre. Vous pouvez vous lever un matin et vous autoproclamer directeur indépendant. » 46
QUELLE RÉMUNÉRATION ? La rémunération perçue annuellement par un administrateur indépendant, avant déduction de tout impôt et de toute taxe, peut aller de 10.000 à plus de 100.000 euros. 50 % des administrateurs perçoivent une rémunération comprise entre 10.000 et 30.000 euros. Ils sont 18 % à toucher de 30 à 40.000 euros. Source : Luxembourg Fund Governance Survey 2020 publié par PwC en collaboration avec l’Institut luxem bourgeois des administrateurs (ILA).
leurs compétences, les connaissances requises, leur parcours, etc. » Entre-temps, des formations spécifiques pour administrateurs indépendants ont été mises en place par l’Institut luxembourgeois des administrateurs . Il existe notamment un cursus complet permettant de devenir directeur agréé certifié. Il s’agit d’un label de qualité. La formation a lieu en partie au Luxembourg et à l’étranger. De plus, afin de maintenir le niveau certifié, l’ILA demande à ses membres d’actualiser leur niveau de connaissance de manière continue. « Les administrateurs certifiés s’engagent à suivre un minimum d’heures de formation par an, en participant à des programmes adéquats de formation, partage Charles Muller. Le but est de maintenir leurs compétences professionnelles au plus haut niveau. Personnellement, je dispose de mon bureau, d’une secrétaire, de salles de réunion, d’un support IT. Tous les éléments nécessaires pour travailler efficacement. C’est devenu une spécialité comme une autre. Il existe une véritable communauté aujourd’hui au Luxembourg. » Des profils souvent expérimentés Vu l’importance du secteur des fonds d’investissement au Luxembourg, on peut très vite imaginer que de très nombreux administrateurs indépendants seront nécessaires dans les années à venir. « Jusqu’à présent, nous voyons essentiellement des personnes expérimentées, avocats, auditeurs, experts-comptables, qui ont travaillé dans le secteur financier à Luxembourg et qui se reconvertissent, constate Michèle Biel. De nouveaux candidats font aussi leur apparition et s’engagent dans cette voie avec beaucoup d’à-propos. On voit par ailleurs des indépendants qui viennent d’autres juridictions, avec d’autres domaines d’expertise que la réglementation et la pratique luxembourgeoises. » Endosser le rôle de l’administrateur indépendant implique inévitablement des responsabilités, que ce soit sur le plan civil ou pénal. « C’est aussi pour cette raison que la CSSF insiste pour avoir des gens qui savent ce qu’ils font. Le sujet du blanchiment d’argent ou du financement du terrorisme implique de lourdes
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sanctions, qui peuvent aller jusqu’à une peine de prison ferme, pour les administrateurs indélicats, souligne Charles Muller. Côté civil, il peut aussi être amené à payer des dommages et intérêts. Sur ce point, nous sommes toutefois couverts par des assurances. » Au final, l’administrateur indépendant vient garantir la bonne gestion du fonds d’investissement et, par corollaire, la prise en compte des intérêts de l’investisseur lambda. « Personnellement, je fais ce que je pense être le mieux pour les investisseurs. Il existe évidemment une part de subjectivité. Cela reste mon appréciation, témoigne encore Charles Muller. Sur l’aspect du coût par exemple, mon rôle est de vérifier qu’on ne dépense pas trop d’argent pour le service qu’on reçoit en retour. La CSSF y veille aussi. Tout fonds délègue une série de tâches à des prestataires de services professionnels et c’est au board de surveiller qu’ils font bien leur travail. Pour mener sa mission, le directeur indépendant n’est pas seul. Il existe des auditeurs externes. Certains mécanismes font que les prestataires de services se surveillent mutuellement. Si un fonds dit dans ses statuts qu’il n’achète que des actions américaines, c’est notamment à la banque dépositaire de refuser toute transaction qui ne respecte pas ce point. Mais, en fin de compte, celui qui est responsable, c’est le conseil d’administration. » Confronté à une avalanche de nouveaux textes réglementaires, à intervalles réguliers, l’administrateur indépendant doit être capable d’absorber une multitude d’informations afin de se tenir au courant sur une grande variété de sujets. « Le métier présuppose une mise à jour constante, confie Michèle Biel. Il faut aimer lire et se former de manière continue, parcourir des politiques et comptes-rendus de centaines de pages, acquérir de nouvelles compétences. » Aujourd’hui, c’est la taxonomie verte et les critères ESG qui sont au cœur de toutes les attentions. « C’est un sujet assez nouveau pour nous, mais, à l’avenir, on ne pourra plus dire qu’on ne s’y intéresse pas. Il faudra une connaissance générale sur cette question comme sur beaucoup d’autres, mais il y aura aussi des administrateurs indépendants qui vont se spécialiser dans ce domaine, ajoute Charles Muller. Les temps où l’investisseur était totalement passif, où tout ce qui l’intéressait était de voir tomber les dividendes en fin d’année est révolu. Désormais, les investisseurs ont leurs exigences. Ils imposent un minimum de règles éthiques à respecter pour que leur argent ne contribue pas à la destruction de l’environnement, ou profite à des entreprises qui ne respectent pas les droits de l’homme et font travailler des personnes dans des conditions effroyables. Ça aussi, c’est une tendance forte pour demain. »
Auteur M. P.
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contrôle réglementaire prend tellement de place qu’on en oublie les objectifs commerciaux. » Si sa plus-value n’est plus à prouver et que son rôle est aujourd’hui bien compris, il existe encore un débat autour de la définition de ce qu’est un véritable directeur indépendant. « Tout le monde comprend que si, vous êtes employé par un gestionnaire, vous n’êtes pas indépendant. Les grands gestionnaires ont du personnel au Luxembourg et ils peuvent mettre leurs salariés dans le conseil d’administration des différents fonds, mais ils ne sont, de facto, pas indépendants, détaille Charles Muller. La question est de savoir si d’autres prestataires de services le sont, à commencer par les avocats. La question se pose si je suis avocat et que je conseille le fonds, est-ce que je suis indépendant ? Les auditeurs ont leurs propres règles et n’ont pas le droit de monter au board d’un fonds. Chez les avocats, les grands cabinets de droit international ont aussi des règles internes qui disent que vous n’avez pas le droit d’être au board si vous faites du conseil juridique. » Aujourd’hui, les véritables administrateurs indépendants en ont fait un métier à part entière. Ils ne font rien d’autre que de siéger dans différents conseils d’administration. La question du statut reste toutefois pendante. « Faut-il imposer un socle de formations obligatoires ? Pour le moment, il n’y a pas de cadre. Vous pouvez vous lever demain matin et vous autoproclamer directeur indépendant. Trouver des clients, c’est autre chose, constate Charles Muller. Certains se positionnent dès lors davantage sur le prix que sur l’expertise. Des discussions sont en cours au sujet du statut professionnel de l’administrateur indépendant, sur les compétences requises. Le régulateur jette régulièrement un œil au curriculum vitae des membres proposés pour siéger au conseil d’administration des fonds. Même s’il n’y a rien d’obligatoire, la CSSF va jusqu’à les convoquer pour évaluer
Patricia Pitsch (archives)
Dossier Conseil d’administration
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Dossier Investissement durable
La taxonomie verte décryptée La finance durable est l’un des principaux leviers que veut utiliser l’Union européenne pour parvenir à la neutralité carbone à l’horizon 2050. Dès à présent, l’industrie des fonds d’investissement est dans l’obligation de s’adapter.
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FONDS D’INVESTISSEMENT JUIN 2021
Obligations de transparence Ce règlement s’adresse aux fournisseurs de produits d’investissement et aux conseillers. Il se concentre sur les informations qui doivent être publiées à destination des clients investisseurs. « Il ne vient pas définir ce qu’est une activité durable, chose dont s’occupe la taxonomie par ailleurs, précise David Czupryna. Il définit par contre des obligations de transparence et d’information. Dès lors qu’un
Salomé Jottreau
foncé ». « Le grand défi pour les secteurs a d’abord été d’interpréter au mieux les textes déjà parus pour ensuite adapter toute la documentation, les prospectus, sites web et autres rapports, pour refléter au mieux cette nouvelle classification. À terme, elle donnera aux investisseurs un meilleur aperçu de la durabilité de leurs investissements, mais pour l’heure il reste des zones d’ombre », constate Silke Bernard, partner chez Linklaters.
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Les premiers effets du Pacte vert pour l’Eu- de capitaux, a un grand rôle à jouer dans rope (Green Deal) et, plus précisément, du l’atteinte de ces objectifs climatiques. » Sur plan d’action sur la finance durable qui l’ac- le terrain, deux grands sujets occupent dès compagne, se font aujourd’hui sentir dans à présent les acteurs des marchés finanle secteur des fonds d’investissement. Même ciers : d’une part, la taxonomie, et d’autre si l’objectif de faire du continent européen part, le règlement SFDR, pour Sustainable le premier à atteindre la neutralité carbone Finance Disclosure Regulation. en 2050 est encore loin, les premières actions Le 10 mars 2021, une première étape a été concrètes sont désormais amorcées. « L’Union franchie. À cette date, les acteurs et conseileuropéenne a défini dès 2018 un plan d’ac- lers des marchés financiers ont dû se mettre tion finance durable qui vise à réorienter les en conformité avec le règlement SFDR. Celui-ci flux de capitaux vers des activités alignées vise à accroître la transparence sur la manière avec les objectifs environnementaux qu’elle dont les acteurs des marchés financiers, comme s’est fixés. Le premier de ces objectifs est la les gestionnaires d’actifs et les conseillers lutte contre le changement climatique, intro- financiers, intègrent les risques et les opporduit David Czupryna, head of ESG develop- tunités en matière de durabilité dans leurs ment chez Candriam. Ainsi, deux ans après décisions et leurs recommandations d’invesles accords de Paris sur le climat, la Commission tissement. Il leur impose de classer tous leurs a voulu établir un plan d’action ambitieux. fonds d’investissement en trois catégories, En filigrane, elle reconnaît le fait que la selon leur niveau de durabilité, que l’on pourfinance, en tant que principal pourvoyeur rait résumer en « gris », « vert clair » et « vert
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fournisseur communique sur le fait que son produit d’investissement est classifié comme durable, il doit étayer cette durabilité. » Cela signifie qu’un promoteur ne pourra plus se contenter de déclarer qu’il propose des fonds durables : il devra le prouver et pouvoir démontrer que son processus de prise de décision en matière d’investissement, la gestion des risques et la publication d’informations relatives aux produits sont parfaitement alignés. Le règlement définit ainsi trois grandes catégories d’investissements. L’article 9 s’applique aux produits qui ont des objectifs d’investissement durables, l’article 8 couvre les produits financiers qui promeuvent des caractéristiques environnementales ou sociales dans le cadre de la stratégie d’investissement au sens large. L’article 6 s’applique, quant à lui, aux produits qui prennent en considération les risques ESG dans le processus d’investissement ou qui sont explicitement déclarés non durables. « Tout produit financier doit respecter l’article 6 du règlement SFDR. Il doit décrire, dans les informations précontractuelles à destination des investisseurs, la manière dont les risques en matière de durabilité sont intégrés dans les décisions d’investissement, ainsi que les incidences de ces risques sur le rendement du produit financier, ou expliquer pourquoi leur prise en compte n’est pas pertinente, poursuit Silke Bernard. Un produit qui promeut par des techniques et méthodologies engageantes des caractéristiques environnementales et/ou sociales, mais qui ne s’est pas fixé pour objectifs de générer un impact positif en termes de durabilité, appliquera les dispositions de l’article 8 du règlement SFDR. Les informations sur la manière dont ces caractéristiques environnementales et sociales sont prises en compte et sur les méthodologies utilisées pour les évaluer (indicateurs retenus, sources des données, etc.) devront être rendues publiques. » Un produit qui a pour objectif l’investissement durable (avoir une incidence positive sur les facteurs externes sociaux et environnementaux) appliquera les dispositions de l’article 9 du règlement SFDR. Les informations sur les méthodologies employées pour mesurer l’atteinte de l’objectif et les indicateurs de suivi utilisés, ainsi que des indications sur les moyens mis en œuvre pour l’atteindre, devront être rendus publics. Les objectifs fixés en matière de performance extrafinancière doivent caractériser la démarche première du fonds, devant les objectifs de rentabilité financière. Des règles techniques strictes « Cette obligation de classification nécessite une analyse complète de tous les fonds. Nous avons passé de nombreux mois à accompagner nos clients en vue de la deadline du 10 mars 2021, constate Silke Bernard. Nous avons ainsi pu observer deux grandes stratégies distinctes.
COMMENT DÉFINIR SA STRATÉGIE ESG EN 5 ÉTAPES ? 1 Qui sont nos investisseurs ? Quel produit pourra-t-on leur vendre ? S’adresse-t-on à des clients retail ? Qui sont nos investisseurs ? Dans ce cas, il faut comprendre leurs intérêts, le sujet qui leur tient à cœur, qu’il s’agisse des grands défis du changement climatique, de la pollution, de la préservation de la biodiversité, du financement des micro-entrepreneurs en Afrique, etc. Si l’on construit un produit à destination des clients institutionnels, l’approche et l’argumentaire doivent être différents. Ces grands acteurs cherchent tous à augmenter la part de leurs investissements durables dans leurs portefeuilles. Ils ont toutefois une approche plus globale, une volonté de mesurer leur impact, et, dans certains cas, de jouer un rôle plus important dans la gestion des fonds. 2 Quel degré de durabilité ? Veut-on créer un produit « light green » ou « dark green » ? La question de l’environnement n’est pas la seule à intéresser le public. Mais il faut reconnaître qu’aujourd’hui, la réglementation est beaucoup plus avancée pour les aspects verts. A-t-on identifié un thème d’investissement spécifique à suivre, ou est-ce que le produit doit simplement se focaliser sur un objectif environnemental et/ou social global ? De la même manière, y a-t-il des thématiques que l’on ne veut pas intégrer dans notre politique d’investissement ?
4 Q uel alignement avec la taxonomie ? Dans quelle mesure se rapproche-t-on des critères ESG, autrement dit de la taxonomie verte produite par la Com mission européenne ? Faut-il construire un produit parfaitement aligné, ou se laisse-t-on la possibilité de garder un peu de flexibilité ? Durant ces derniers mois, certains gestionnaires ont voulu qualifier tous leurs produits de sustainable, d’autres ont sélection né une petite partie de leurs produits. Les gestionnaires les plus prudents n’ont pas voulu aller trop vite. Pour eux, il est important de s’assurer qu’ils seront en mesure de collecter les données afin de faire un bon reporting. L’Europe exige d’un fonds qu’il définisse clairement ses objectifs et qu’il en fasse rapport. Il est donc important de se fixer des objectifs qui pourront être mesurables. Au-delà de cela, il est aussi intéressant de s’assurer que les promesses faites à l’investisseur pourront être tenues. 5 Comment se différencier ? Beaucoup de gestionnaires trans forment leurs produits classiques en produits ESG. La question est de savoir comment se différencier de son voisin. Le monde n’a pas changé d’un coup de baguette magique. La compétition va augmenter, et chaque gestionnaire va devoir trouver sa niche. À côté des produits qui investissent dans les champions de l’environnement, il est tout aussi important de soutenir des entreprises en cours de transition, avec un impact non financier beaucoup plus fort.
3 Investissement actif ou passif ? Veut-on être un investisseur actif ? En tant qu’actionnaire et gestionnaire, on peut choisir son degré d’engagement. Utiliser son droit de vote, « L’Europe exige soutenir l’entreprise à long terme, d’un fonds influencer les décisions stratégiques… D’autres vont préférer qu’il définisse clairement suivre des indices, investir dans ses objectifs et qu’il des entreprises qui répondent en fasse rapport. » à des critères définis au préalable. JANE WILKINSON Cela facilite le rôle du gestionnaire, Fondatrice, Ripple Effect qui suit le contenu de l’indice sans nécessairement aller dans une analyse approfondie de l’univers d’investis sement. En revanche, il doit tout de même avoir une très bonne compréhension de la méthodologie de construction de l’index en question.
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Dossier
Certains gestionnaires ont misé sur une approche prudente tandis que d’autres ont voulu clairement aller plus loin que ne l’exigeait cette première échéance. Ces derniers ont été jusqu’à revoir l’ensemble de leurs procédures pour être les premiers sur le marché à développer une approche ESG en ligne avec le règlement SFDR, allant jusqu’à anticiper les règles plus techniques qui sont encore en cours de finalisation et qui ne seront en application qu’au 1er janvier 2022. » Maintenant que la première étape est p assée, les acteurs doivent désormais regarder cette nouvelle échéance. La standardisation et l’harmonisation de l’information fournie seront alors revues au regard des regulatory technical standards (RTS), qui ne sont pas encore en application, même si un premier projet révisé a été publié le 4 février 2021. À l’avenir, les produits financiers classés article 8 et article 9 devront déclarer de quelle manière ils prendront en compte les principales incidences négatives pour un premier reporting sur les indicateurs ESG. Janvier 2022 marquera également l’ouverture de la première phase de reporting, qui nécessitera la publication des indicateurs dans les rapports annuels des acteurs des marchés financiers. Ces indicateurs sont eux aussi précisés dans les RTS, qui, tout comme le règlement Taxonomie, établissent des guidelines par classe d’actifs pour clarifier, harmoniser et standardiser les attendus réglementaires en matière de durabilité. « On peut regretter qu’un règlement d’une telle envergure et avec autant d’implications soit livré pièce par pièce, comme un puzzle dont on n’aurait que le milieu et pas le contour, souligne Silke Bernard. Courant avril, nous avons reçu de nouvelles informations dans les technical screening criteria relatifs au règlement Taxonomie. Pour donner un exemple, dans le real estate, le législateur va jusqu’à définir combien de litres d’eau maximum une toilette peut consommer dans un bâtiment pour pouvoir être considérée comme un investissement durable au regard du droit européen. J’apprécie la volonté politique d’envoyer un message fort et d’atteindre une réelle transparence et comparabilité. La finance est sans doute un moyen très efficace pour contribuer à l’objectif d’atteindre le zéro carbone. Toutefois, on peut se demander si certains des critères fixés ne vont pas devenir obsolètes avec l’évolution des techniques et des matériaux dans les années à venir, ce qui pourrait potentiellement affecter les ambitions de l’objectif poursuivi. » En lien étroit avec cette réglementation SFDR et ces nouvelles exigences de transparence, la publication des données ESG non financières est en pleine expansion. « Les fonds sont obligés de définir clairement leur politique d’investissement durable. Pour cela, ils doivent avoir accès à des données ESG, témoigne Mario Mantrisi, chief client service officer chez Kneip. Nous ne sommes qu’au 50
TIMELINE
temps, d’abord partiellement, à la fin de l’année 2021, puis totalement, fin 2022. Ce texte est en quelque sorte la « boussole environnementale » de l’Europe, permettant aux investisseurs de savoir si leurs placements entrent en conformité avec les objectifs définis dans le Pacte vert pour l’Europe, à savoir 1ER JANVIER 2022 la neutralité climatique à horizon 2050, et Date prévue d’entrée en application dans l’accord de Paris, à savoir la limitation du règlement de l’UE sur la taxonomie pour l’atténuation du changement du réchauffement de la planète à moins de climatique et l’adaptation au changement 1,5 degré Celsius en 2100 par rapport aux climatique, et date prévue d’entrée niveaux préindustriels. Pour que les orgaen application du règlement sur la divulgation liée à la durabilité pour nismes financiers aient accès à ces informales informations contenues dans tions, les entreprises seront forcées de publier le rapport périodique des produits financiers. les informations concernant leur bilan carbone sur leurs sites dès la fin de l’année 2022. 30 DÉCEMBRE 2022 Un premier essai auprès de 26 banques a touDate prévue d’entrée en application du règlement sur la divulgation tefois permis de constater la grande disparité des informations relatives à la durabilité des informations fournies d’une entreprise à pour la divulgation de la prise en compte l’autre. Pour y remédier, la Commission a mis des impacts négatifs sur les facteurs de durabilité par tous les produits à disposition des investisseurs une structure financiers d’un fabricant soumis plus standardisée pour les aider à trouver les à la directive NFRD. projets qui leur conviennent. « Concrètement, la Taxonomie européenne 1ER JANVIER 2023 Date prévue d’entrée en application a la lourde tâche de définir ce qu’est une actidu règlement européen sur la taxonomie vité durable en termes d’environnement. Elle pour la prévention de la pollution, dresse une liste d’activités économiques ainsi l’économie circulaire, la protection des ressources en eau et des que de certains seuils de performance qui écosystèmes sains. mesurent la contribution de ces activités aux six objectifs environnementaux retenus par la Commission. La règle veut que chaque activité économique doit apporter une contribution début d’une nouvelle tendance. D’un côté, on substantielle à l’un des six objectifs environneva assister à une multiplication de produits mentaux sans nuire significativement à l’un durables, de l’autre, on voit qu’une couche mini- des autres objectifs », explique David Czupryna. male ESG va s’étendre à d’autres produits. Les En outre, une activité peut être éligible à la revues réglementaires SFDR, mais aussi Mifid, Taxonomie pour trois raisons : elle est déjà à vont entraîner des clarifications, au niveau des faible intensité carbone ; elle contribue à la Kiid notamment. Le vrai changement se pro- transition vers une économie zéro émission duira quand on intégrera les critères ESG dans nette d’ici 2050 ; elle permet à d’autres activités de réduire leurs émissions de CO2. le profil des investisseurs. » 10 MARS 2021 Entrée en application du règlement sur la divulgation d’informations liées au développement durable pour la prise en compte des risques liés au développement durable (SFDR).
Un langage ESG commun Le SFDR est directement lié au règlement Taxonomie, qui vise à encourager la finance durable avec la mise en place d’un cadre juridique et technique. L’objectif de la taxonomie est de construire un langage commun, afin de définir clairement ce qu’est une activité durable. Lancée par la Commission européenne en 2018, l’idée de créer une taxonomie verte pour les activités économiques repose donc sur un principe simple : définir un seuil d’émissions de CO2 en deçà duquel telle ou telle entreprise sera considérée comme « verte », c’est-à-dire contribuant à l’évolution positive du climat ou atténuant le réchauffement climatique, comme l’a rappelé le vice-président de la Commission européenne en charge d’une économie adaptée aux personnes, Valdis Dombrovskis, dans une tribune publiée dans Les Échos. En juin 2020, le Parlement européen a adopté un règlement définissant cette taxonomie, lequel entrera en vigueur en deux
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Des centaines de pages à éplucher Les deux premiers objectifs environnementaux, que sont l’atténuation du changement climatique et l’adaptation au changement climatique, devraient entrer en application le 1er janvier 2022. « Si le texte est publié après le 1er juillet 2021, soit moins de six mois avant la date butoir du 1er janvier 2022, l’entrée en vigueur de l’obligation de communication sur la ‘part verte’ pourrait être reportée, précise toutefois David Czupryna. La communication des mesures d’impact négatif demande par ailleurs d’avoir accès à des données fournies par les entreprises dans lesquelles on investit. Or, ces données ne sont pas universellement disponibles. Il n’existe pas de standard international contraignant pour les données ESG, et les entreprises, cotées en bourse ou pas, n’ont jusqu’ici pas l’obligation systématique de publier de telles informations. » Les quatre autres objectifs pourraient entrer en application le 1er janvier 2023. Ils concernent l’utilisation durable et la protection des
Investissement durable
ressources aquatiques, la transition vers une économie circulaire, la prévention et la réduction de la pollution, la protection et la restauration de la biodiversité et des écosystèmes. « En amont, il a fallu plancher sur une liste d’activités qui apportent une solution contre le changement climatique. Certaines activités ne sont tout simplement pas concernées. Pour donner un exemple, même si elle se veut vertueuse, l’industrie pharmaceutique ne contribue ni de près ni de loin aux objectifs définis. Une liste de plusieurs dizaines d’activités a ainsi été préparée. Cela touche au transport, à l’industrie, grosse productrice de gaz à effet de serre, au secteur de la construction… », détaille David Czupryna. Pour chaque activité identifiée, l’Europe doit préciser quels seront les critères techniques à respecter. « Nous avons reçu au mois d’avril deux gros paquets de documents de respectivement 200 et 250 pages environ concernant les deux premiers objectifs, relate Silke Bernard. Je pense que cela va créer certaines difficultés en pratique. On peut se demander s’il faut définir avec précision des normes et des chiffres statiques, comme l’épaisseur minimale d’une fenêtre. La vie et l’économie sont en perpétuelle évolution. Ce qui est vrai aujourd’hui ne le sera peut-être plus demain. Dès lors, nous aurions préféré une approche basée sur des normes de haute qualité (industry standard ZYX). Pour certains actifs qui sont durables ‘par nature’, comme les énergies
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Bob Voirgard
DE CO2
Dans le cadre du règlement Taxonomie, le rapport d’expertise commandé par la Commission a proposé un indicateur et un chiffre clé : seules les activités émettant moins de 100 g de CO2 par kWh entrent dans le cadre de la taxonomie verte. Un seuil qui exclut de fait les secteurs liés aux combustibles fossiles solides, mais aussi le gaz et le nucléaire. Fin avril 2021, la Commission a toutefois annoncé que « le gaz naturel n’est ni inclus ni exclu dans la taxonomie » à ce stade, après que la consultation publique a « laissé apparaître des visions très contradictoires » sur cette inclusion d’une énergie fossile… Concernant le nucléaire, autre pomme de discorde, la Commission avait déjà prévu de différer sa possible qualification comme énergie « durable », en dépit de l’appui très actif de plusieurs pays en faveur de l’atome civil.
renouvelables, les technical screening criteria ne posent souvent pas de souci particulier. Pour d’autres actifs, comme le real estate ou l’IT, les normes prescrites ne sont pas toujours aussi évidentes. Certains acteurs ont, par leur politique interne, déjà mis la barre très haut en matière de critères durables, mais, parfois, de gros ajustements seront nécessaires pour que chacun se conforme exactement aux normes techniques et aux exigences européennes prescrites par les technical screening criteria. » Pour l’heure, les gestionnaires de fonds et autres professionnels financiers analysent dans le détail des centaines de pages pour comprendre ce qu’on attend d’eux dans les mois et les années à venir. « À l’avenir, les sociétés de gestion veilleront à aligner leurs produits avec la taxonomie européenne afin de l’utiliser comme un label à part entière, prédit Mario Mantrisi. Le vrai challenge est à la fois réglementaire et réputationnel. Dès le moment où vous déclarez investir de manière durable, en prenant en compte des critères ESG très précis, il faut éviter à tout prix d’être accusé de greenwashing. » Ce label, de fait, est une bonne chose, à la fois pour l’environnement et pour les investisseurs. « Encore une fois, le nouveau système va apporter de la visibilité et de la transparence, ajoute Silke Bernard. Un gros challenge est aujourd’hui d’avoir accès aux données ESG. Certains grands acteurs développent des systèmes internes, certaines agences commencent à fournir des données, notamment pour les entités listées, mais c’est quand même plus compliqué dans les domaines du private equity ou du real estate. Je pense qu’on peut s’attendre à l’émergence d’un nouveau marché autour de la donnée ESG. Au-delà de l’environnement, les aspects sociaux et de gouvernance seront eux aussi à prendre en compte à un moment donné. »
opportunité de se diversifier. « Nous disposons déjà de la technique et des outils nécessaires, à nous d’aller chercher des données, des benchmarks, à d’autres sources. La plupart des données viennent des sociétés de gestion ellesmêmes. À nous de les enrichir avec d’autres informations externes, non financières, précise Mario Mantrisi. Tous ces écosystèmes vont fortement évoluer dans les années à venir. L’initiative de l’Europe est louable, mais elle ne pourra pas tout résoudre à elle seule. On va dans la bonne direction, mais encore faut-il trouver la bonne balance entre la réglementation et la réalité économique. À l’avenir, nous devrons nous intéresser davantage au reporting d’impact. L’investisseur va vouloir comprendre ce qu’il a réellement fait pour la planète. La réduction des émissions de CO2, c’est une première chose, mais comment rapporter un impact social ? Comment exprimer des informations techniques de façon simple ? » Une autre mesure législative, la directive sur la communication d’informations non financières (NFRD), impose des exigences plus strictes et harmonisées quant à la manière dont les entreprises communiquent des informations non financières et publient des données environnementales, sociales et de gouvernance (ESG). Depuis 2018, les entreprises doivent inclure des informations non financières dans leurs rapports annuels. L’Union européenne s’apprête à réviser la NFRD pour contribuer à la mise en œuvre du règlement Taxonomie de l’UE et du SFDR. Dès à présent, de nombreux investisseurs professionnels cherchent des produits plus verts, et tous les acteurs, sous la pression européenne, vont revoir leur politique d’investissement pour répondre aux attentes du marché. « In fine, c’est la performance qui va distinguer les compétiteurs, confie Mario Mantrisi. Par définition, un fonds ESG entraîne plus de frais de gestion. Par nature, il réduit aussi le champ d’investissement. De son côté, l’investisseur voudra toujours un retour sur investissement. Le grand défi est donc de faire rimer durabilité, ESG et performance. » Même si la taxonomie crée un système de classification pour que les investisseurs puissent mieux reconnaître les produits « durables », il manque encore une définition universelle des investissements verts. Le respect du règlement SFDR nécessite lui aussi que les gérants d’actifs et les producteurs/vendeurs de produits financiers puissent répondre aux besoins des investisseurs de façon claire, d’où ce besoin de sens.
L’objectif final de performance Chez Kneip, prestataire de services qui accompagne des gestionnaires de fonds dans la production de leurs documents et de leurs reportings réglementaires, ce mouvement vers les fonds ESG constitue une belle
Auteur M. P.
SILKE BERNARD Partner, Linklaters
« Un gros challenge est aujourd’hui d’avoir accès aux données ESG. »
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Dossier
La gouvernance, plus importante que jamais !
« En matière de réputation, il est de plus en plus risqué de prendre les sujets ESG à la légère. » 52
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Le suivi des critères ESG Parmi les principales tendances du secteur des fonds ces dernières années, on trouve bien évidemment la finance durable. Cet attrait pour les investissements positifs pour l’environnement ou la société est une conséquence directe d’un mouvement social de fond, qui matérialise l’inquiétude grandissante des populations par rapport au réchauffement climatique et aux atteintes à notre milieu. Dans le secteur financier, l’investissement durable passe souvent par des « fonds ESG », qui respectent des critères environnementaux, sociaux et de gouvernance. « Toute une série d’actifs intègrent aujourd’hui ces aspects ESG, et cela force les administrateurs à se former à ces matières, relève Michael Delano. En matière de réputation, il est de plus en plus risqué de prendre ces sujets à la légère. Si les vérifications ne sont pas effectuées correctement par rapport au respect des critères ESG et qu’un problème est constaté, on peut vite se faire accuser de greenwashing. » Le sérieux qui est aujourd’hui placé dans le suivi des critères ESG au sein des conseils d’administration peut être constaté au niveau de la formation des administrateurs. Plus de la moitié des administrateurs qui ont participé à l’étude PwC/ILA 2020 suivent actuellement une formation en ce qui concerne les investissements ESG ou SRI (socially responsible investment). Plus d’un tiers des conseils d’administration prennent déjà en considération les critères ESG dans leurs processus d’investissement. Ceci étant dit, toujours selon la même enquête, la plupart de ces mêmes CA n’ont pas de définition précise de ce qu’est l’investissement ESG ou ignorent quels sont les risques et opportunités les plus importants en la matière. Un effort considérable peut donc encore être réalisé à ce niveau, surtout dans la perspective de l’arrivée de la nouvelle réglementation SFDR (Sustainable Finance Disclosure Regulation), destinée à offrir plus de transparence sur l’aspect durable des investissements.
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Comme dans une entreprise traditionnelle, le qui animent la société dans son ensemble. conseil d’administration (CA) d’un fonds d’in- Pour pouvoir objectiver l’évolution des pravestissement ou d’une société de gestion est tiques de gouvernance dans ce secteur au l’organe de décision de la structure. La compo- Luxembourg, PwC et l’ILA (Institut luxemsition de ce CA, le déroulement de ses sessions, bourgeois des administrateurs) réalisent tous les rôles et responsabilités en son sein ou la les deux ans, depuis 2003, une large étude à gestion des conflits d’intérêts qui peuvent y ce sujet. « Elle couvre une série d’acteurs diffésurvenir sont autant d’éléments qui doivent rents, des fonds Ucits aux AIF, en passant par donc être gérés avec soin. Ces aspects de gou- les ManCo et les Super ManCo. Notre but, dès vernance auront en effet une influence directe le départ, était d’obtenir une vue de la situasur les décisions qui sont prises, mais aussi sur tion et de pouvoir identifier les tendances qui l’image publique dont la structure bénéficie. Ils se dégagent au fil du temps, explique Michael permettront en outre de se conformer aux régle- Delano, président du comité Fonds d’investissement au sein de l’ILA et associé chez mentations qui encadrent l’activité du fonds. PwC Luxembourg. Cela nous permet, par Une étude qui se répète depuis 2003 exemple, de voir que les administrateurs dans Il est évident que les pratiques de gouver- le secteur des fonds disent avoir aujourd’hui nance au sein des conseils d’administration une bien meilleure connaissance de leur resde fonds d’investissement au Luxembourg ponsabilité légale, ce qui était beaucoup moins sont amenées à évoluer avec le temps. En le cas il y a quelques années, quand seulement effet, la réglementation est adaptée en per- 30 % des administrateurs interrogés disaient manence et les attentes des investisseurs évo- en avoir totalement connaissance. » luent elles aussi, suivant en cela les mouvements En 2020, l’ILA et PwC menaient déjà leur 10e étude consacrée à la gouvernance dans le secteur des fonds d’investissement. Celle-ci a été dévoilée au début de l’année 2021 et offre une photographie d’autant plus riche qu’elle a, cette année, été réalisée avec la contribution de pas moins de 122 participants. « On voit que nous sommes devenus plus célèbres avec le temps, sourit Michael Delano. Nous fonctionnons avec des questionnaires en ligne, mais plusieurs heures sont nécessaires pour les compléter, et le fait de récolter autant de retours de la part des différents acteurs montre que cette étude est jugée utile dans le milieu. » Cette MICHAEL DELANO Président du comité Fonds d’investissement, ILA – envie de mettre sa pierre à l’édifice d’une meilAssocié, PwC Luxembourg leure gouvernance dans le secteur des fonds est sans aucun doute une conséquence logique de l’année 2020 chaotique que nous avons connue. Marquée par la crise du Covid, par la séparation officielle du Royaume-Uni et de l’Europe, mais aussi par la poursuite d’une série de mouvements sociaux ou de vives inquiétudes pour l’avenir de la planète, cette année particulière a soulevé un certain nombre de défis en matière de gouvernance.
PwC Luxembourg
La crise du Covid-19 et le développement de la finance verte confrontent les fonds d’investissement à de nouveaux défis en matière de gouvernance. L’intégration des critères ESG, les cyber-risques et la diversité au sein du CA sont des priorités.
Responsabilités
« Notre but est d’identifier les tendances qui se dégagent au fil du temps en matière de gouvernance. »
Les conséquences du Covid-19 Mais, nous le disions, 2020 n’a pas seulement permis de confirmer le virage durable d’une partie du secteur financier. Elle a aussi été marquée par une crise sanitaire que personne n’avait vue venir. « La façon de travailler a été profondément affectée par cette crise, et nous ne reviendrons probablement pas totalement en arrière sur le sujet, estime Michael Delano. La généralisation du travail à domicile a été rapide et, alors qu’on craignait que cela cause beaucoup de problèmes, on a constaté que les acteurs avaient fait preuve d’une grande capacité d’adaptation. Finalement, les choses se sont déroulées sans trop d’accrocs. » Si le secteur a pu s’adapter rapidement, c’est en bonne partie grâce aux nouvelles solutions numériques. Pourtant, l’enquête PwC/ ILA montre que seulement 8 % des entités participantes ont mis en place des solutions cloud et ne comptent pas revenir en arrière. Par ailleurs, 8 % des CA interrogés ont eu recours à d’autres outils, comme des VPN leur permettant d’accéder au réseau de la société depuis leur domicile. La crise du Covid a tout de même eu un impact, selon les personnes ayant participé à l’enquête, sur une série d’aspects du métier, notamment la signature de documents, les possibilités de levée de fonds ou les opportunités commerciales. Un accroissement des cyber-risques Au-delà de ces conséquences sur le métier, la crise sanitaire et la mise en place d’une série d’outils digitaux accroissent également le risque auquel les fonds d’investissement et les sociétés de gestion sont confrontés en matière de sécurité informatique. En effet, si les incidents de cybersécurité dans le secteur des fonds sont rares, il convient de rester très prudent avec la généralisation du télétravail. « Ces sociétés possèdent une série d’informations sensibles et brassent des sommes d’argent importantes. Il est donc normal que des cybercriminels cherchent à trouver une faille pour accéder à cette manne, indique l’associé de PwC. Dans ce secteur comme dans d’autres, la
cybersécurité est autant une affaire de technique qu’une question d’éducation : il faut éviter de laisser sans surveillance des supports contenant des données sensibles, vérifier l’identité de la personne qui vous demande, par téléphone ou par e-mail, de virer une certaine somme, etc. Je crois que le message doit en tout cas être répété aux administrateurs de fonds d’investissement. » L’étude PwC/ILA 2020 donne d’ailleurs un aperçu du manque de connaissances par rapport aux cyber-risques dans le chef d’un bon nombre d’administrateurs de fonds d’investissement. Parmi les exemples cités, on peut retenir que seulement un tiers des documents échangés par les conseils d’administration sous forme de PDF sont sécurisés par un mot de passe. Pour les auteurs de l’étude PwC/ILA 2020, il est donc urgent de développer de solides pratiques en matière de cybersécurité dans le secteur, ce qui passe notamment par la mise au point d’une stratégie à long terme, alignée avec les besoins business. La diversité, un sujet chaud Enjeux climatiques, Covid, cybersécurité… Ce tableau ne serait pas complet sans évoquer un autre mouvement social particulièrement vivace depuis quelques années : celui en faveur d’une plus grande diversité au sein des instances de décision, qu’il s’agisse d’une diversité ethnique ou de genre. Dans leur enquête, PwC et l’ILA pointent tout d’abord une note positive en ce qui concerne la diversité hommes-femmes : le pourcentage de femmes au sein des conseils d’administration des fonds d’investissement augmente graduellement, passant de 14 % en 2016 à 16 % en 2018, et 22 % en 2020. Cette plus grande mixité est vue comme un atout par les auteurs de l’étude, notamment parce qu’elle permet au conseil d’administration de bénéficier de points de vue plus diversifiés et de stimuler ainsi la créativité des décideurs. Cela dit, avec seulement un cinquième de membres féminins au sein de ces CA, on peut dire que le combat pour une meilleure représentation des femmes dans ces instances est loin d’être terminé. La question de la diversité ethnique au sein des conseils d’administration dans le secteur des fonds est encore plus délicate. Ces données n’ont tout simplement pas été collectées par PwC et l’ILA. Le sujet devra, selon les auteurs de l’étude, être abordé dans de prochaines éditions de cette enquête sur la gouvernance des fonds d’investissement et des sociétés de gestion. Ce sujet est en tout cas au cœur des préoccupations des différents CA : 42 % des répondants plaident en effet pour la mise en place, dans le code de conduite de l’Alfi, de lignes directrices plus fortes en la matière. On le voit, le sujet de la gouvernance dans le secteur des fonds est en perpétuel mouvement et demande une formation continue
COMPOSITION DE L’ÉCHANTILLON INTERROGÉ POUR L’ENQUÊTE PWC / ILA Source Étude PwC / ILA 2020 – Luxembourg Fund Governance Survey
AIF : 20 %
SUPER MANCO : 28 % UCITS : 32 %
UCITS MANCO : 10 % AIFM : 10 %
LES SUJETS DES RAPPORTS ENVOYÉS AUX CONSEILS D’ADMINISTRATION Source Étude PwC / ILA 2020 – Luxembourg Fund Governance Survey
Infractions – erreurs Outsourcing
52 %
Plainte
Incident IT / cyber
Plan de continuité du business – testing
Fraude
88 %
Autre
70 % 59 % 54 % 45 % 8 %
des administrateurs. Pour cela, ils peuvent compter sur l’Institut luxembourgeois des administrateurs. « Avec 24 comités de travail, l’ILA offre un large panel de formations dans des matières très variées, comme l’AML ou la cybersécurité. Nous proposons également une director master class, avec le concours de managers expérimentés, qui permet aux administrateurs de monter en compétences et de gagner en efficacité. De manière générale, l’objectif des programmes de l’ILA à destination des administrateurs est d’assurer la poursuite des bonnes pratiques en matière de gouvernance au Luxembourg », conclut Michael Delano. Être irréprochable sur ces différentes questions constitue en effet un atout précieux pour préserver, aux yeux du monde de la finance, la respectabilité de la place financière luxembourgeoise. Auteur Q. D.
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Echiquier Climate Impact Europe, une réponse au défi climatique Contenu sponsorisé par LA FINANCIÈRE DE L’ÉCHIQUIER
Pionnière de l’investissement à impact en France, La Financière de l’Echiquier a lancé une 2e solution à impact, Echiquier Climate Impact Europe, exclusivement destinée à financer la transition énergétique. Si le changement climatique est un défi, il est aussi vecteur d’opportunités. Convaincus que la sphère financière a un rôle décisif à jouer en finançant les entreprises qui s’engagent et participent à la lutte contre le réchauffement climatique, nous avons conçu un fonds destiné à accompagner la transition climatique des entreprises européennes vers une économie décarbonée à horizon 2050. Les opportunités sont considérables avec les Green Deals annoncés en Europe et aux États-Unis, qui ne sont qu’une première vague de financements publics. Avec Echiquier Climate Impact Europe, nous avons souhaité prendre en compte aussi bien les entreprises pour
« Investir dans tous les secteurs afin d’être repré sentatifs de l’éco nomie réelle. »
lesquelles la lutte contre le réchauffement climatique est une opportunité que celles qui prennent en compte ce risque. Notre approche se veut très différenciante par rapport aux fonds climat traditionnels, qui n’intègrent le plus souvent que des valeurs proposant une solution directe au changement climatique. Nous cherchons à être capables d’investir dans tous les secteurs afin d’être représentatifs de l’économie réelle. Notre approche inclut trois profils d’entreprises : celles qui proposent des solutions contribuant, par le biais de leurs produits et services, à la réduction des émissions de CO2 de leurs clients ; des entreprises pionnières dont les politiques climatiques ambitieuses ont un impact systémique sur leur écosystème ; et des sociétés qui ont amorcé leur transition et opèrent souvent dans des secteurs exclus des fonds climat.
« L’accompagnement des entreprises est l’ADN du fonds. » Exigeante, notre stratégie d’investissement se fonde sur une méthodologie propriétaire innovante, conçue en partenariat avec un expert en ingénierie climatique. Cette méthodologie, qui permet de déterminer un score de maturité climat des entreprises, est axée sur trois critères. La gouvernance climatique, qui détermine 30 % du score climatique de l’entreprise, prend notamment en compte le niveau de la hiérarchie qui impulse la stratégie climatique. L’engagement climat (60 % du score) évalue la qualité de la stratégie climatique, l’intégration de la biodiversité et de la chaîne d’approvisionnement, ainsi que la trajectoire carbone passée et future de l’entreprise. Enfin, la transition juste (10 %) analyse les conséquences de la trajectoire climatique sur l’emploi et l’accessibilité des produits. Seules les valeurs jugées suffisamment matures ou engagées sont susceptibles d’intégrer le portefeuille d’Echiquier Climate Impact Europe, qui comprend à ce jour une quarantaine de valeurs, dont environ 80 % de large cap et 20 % de small et mid cap. Ce fonds se distingue également par son approche de l’engagement. Investisseur en entreprises depuis 30 ans,
ancrée sur le temps long, La Financière de l’Echiquier intensifie en effet, avec cette stratégie à impact, son engagement auprès des entreprises, tout particulièrement auprès de celles qui amorcent leur transition. C’est le cas par exemple des énergies fossiles, secteur qui représente 30 % des émissions mondiales de CO2 et au sein duquel il nous semble nécessaire d’accompagner les acteurs engagés en faveur du climat.
30 %
des émissions mondiales de CO2 émanent des énergies fossiles, secteur au sein duquel il nous semble nécessaire d’accompagner les acteurs engagés.
Cet engagement renforcé se concrétisera également par l’organisation d’un Séminaire Climat annuel, qui rassemblera l’équipe de gestion, toutes les parties prenantes du fonds, ainsi que des experts des enjeux climatiques et de la finance à impact, afin de stimuler l’échange de bonnes pratiques.
Paul Merle Gérant d’Echiquier Climate Impact Europe La Financière de l’Echiquier
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Post-Brexit
Le Brexit a-t-il touché le fonds ? Place forte de la distribution de fonds en Europe, le Royaume-Uni s’est vu privé de son « passeport européen » avec le Brexit. S’il a exigé une adaptation des pratiques, cet événement ne devrait pas bouleverser la distribution des fonds en Europe.
Le 23 juin 2016, l’Europe, le monde, mais aussi une partie du Royaume-Uni tombaient dans une forme de sidération : les Britanniques, à travers un référendum remporté à 51,89 % par les pro-Brexit, venaient de sceller leur départ de l’Union européenne. Cet événement, qui semblait encore hautement improbable quelques semaines plus tôt, marquait le coup d’envoi d’une longue série de négociations visant à démêler l’écheveau de réglementations liant l’île et le continent. Signe de la complexité de l’opération, le départ du Royaume-Uni de l’Union ne fut officiel que le 31 janvier 2020, assorti d’une période transitoire supplémentaire de 11 mois. Mais alors que le Brexit est aujourd’hui totalement effectif, certains secteurs n’ont toujours pas fait l’objet d’un accord. C’est notamment le cas de l’industrie financière, un « gros morceau », considérant l’importance de la City au sein de l’écosystème financier global ainsi que le poids de cette industrie dans l’économie britannique (7 % du PIB). En l’absence de deal, le Royaume-Uni perd ainsi purement et simplement son « passeport européen » lui permettant de commercialiser des fonds en Europe. Certes, un protocole d’accord en matière de réglementation a été signé entre les deux parties à la fin du mois de mars dernier, mais il n’engage à rien sur le sujet des fameuses équivalences permettant aux entreprises financières britanniques d’opérer sur le territoire européen.
que le Brexit a pu causer sur l’activité économique outre-Manche, on peut sans doute déjà relativiser certains chiffres. Ainsi, la Bourse de Londres a certes cédé sa première place européenne à Amsterdam, mais seuls 7.000 postes ont été perdus et l’industrie financière a engrangé un excédent global de 47 milliards d’euros en 2020. Cela ressemble tout de même peu à la marécageuse Bérézina qui avait coupé la retraite de la Grande Armée dans la Russie de 1812… Si la casse a pu être limitée à ce point, c’est avant tout grâce à l’anticipation des forces vives de l’industrie financière britannique. Au sein de la filiale luxembourgeoise de Hogan Lovells, cabinet anglo-américain qui s’est installé à Luxembourg (en 2013), on est bien placé pour en juger. « Les Anglais sont pragmatiques et particulièrement doués lorsqu’il s’agit de réaliser, en urgence, une réorganisation opérationnelle, estime Pierre Reuter, office managing partner chez Hogan Lovells Luxembourg. Ce travail a été effectué, à grands frais, à la fin de l’année 2020. Au final, je ne crois pas que les acteurs britanniques aient perdu en compétitivité, car ils proposent toujours des produits intéressants et peuvent utiliser des structures dans d’autres pays de l’Union pour continuer à commercialiser leurs fonds en Europe. »
Un changement bien anticipé Cette perspective d’un no deal en ce qui concerne l’industrie financière n’est pas une surprise. Dès les premiers mois qui ont suivi le Brexit, de nombreuses études et analyses l’avaient présupposé et établi des projections catastrophistes concernant l’avenir de la City : des milliards de capitaux déplacés de Londres vers d’autres Places européennes, 50.000 emplois perdus et, in fine, un coup dur porté à l’économie britannique. S’il est sans doute encore trop tôt pour faire un bilan des dégâts 56
FONDS D’INVESTISSEMENT JUIN 2021
SEPT CABINETS ANGLAIS DEPUIS 2016 Si l’on évoque beaucoup l’exode des cabinets britanniques vers le Luxembourg depuis le Brexit, peut-on quantifier ce mouvement ? L’une des manières de procéder est de vérifier quelles sont les « sociétés d’avocats » britanniques enregistrées au Barreau luxembourgeois. En consultant ce registre, on s’aperçoit que, depuis le référendum en faveur du Brexit, voté en 2016, sept cabinets dont le siège social est situé à Londres ont créé une filiale au Luxembourg. Parmi les derniers arrivés, on peut citer Debevoise & Plimpton (2020), Fieldfisher (2018), Ashurst (2018) ou encore Linklaters (2018). Suffisant pour parler de déferlante britannique au Luxembourg ?
Au-delà de la grande diversité de clients et de marchés que sert la City, dans bien d’autres régions que l’Europe, les acteurs financiers britanniques peuvent surtout profiter d’une certaine flexibilité offerte par le système pour continuer à opérer sur le continent. Il est en effet possible pour une société britannique de poursuivre la distribution de fonds en Europe moyennant le transfert sur le continent de sa filiale consacrée à la gestion. « Créer un AIFM (alternative investment fund manager, ndlr) en Europe permet de bénéficier du passeport européen. Il est aussi possible de faire appel à un partenaire déjà installé sur le continent. En ce sens, les freins ne sont pas suffisants pour impacter réellement l’équilibre des forces en matière de distribution de fonds en Europe », ajoute Pierre Reuter. Un Brexit sans gagnant ? Par des voies détournées, les Britanniques peuvent donc toujours distribuer leurs fonds en Europe. Mais alors, le Brexit n’a-t-il finalement causé de tort ni profité à personne ? « Clairement, le Brexit et la perte du passeport européen ont eu des implications sur cette industrie, explique Bertrand Moupfouma, partner au sein du cabinet d’avocats luxembourgeois Themis Lex. Pour beaucoup d’acteurs britanniques, il est désormais bien plus confortable de travailler depuis un pays de l’Union, comme le Luxembourg ou l’Irlande. Ces deux pays ont d’ailleurs accueilli un nombre important de sociétés de gestion ou de cabinets d’avocats venus de Londres. Là où Dublin offre une proximité culturelle et géographique aux acteurs britanniques, le Luxembourg bénéficie de sa position centrale en Europe et d’une expertise inégalée en matière de fonds d’investissement. Psycho logiquement, le pays a aussi le don de rassurer les investisseurs. » D’autres avantages traditionnellement mentionnés quand on évoque la place financière luxembourgeoise ont également joué dans l’installation au Grand-Duché de plus de 70 sociétés de gestion et d’une poignée de
Xxxxxxxx Xxxxxxxx LE FACE-À-FACE En 3 questions 1
Photos
Maison Moderne (archives) et Marion Dessard (archives)
cabinets d’avocats britanniques. « Il est vrai que l’Irlande est le choix le plus naturel pour les Britanniques. Mais Luxembourg, au-delà de ses atouts techniques, est également une Place très multiculturelle, où l’on peut servir les clients dans toutes les langues, et pas seulement en anglais. C’est un point qui est très important pour une certaine clientèle », relève Pierre Reuter. « Il est important pour les Britanniques d’avoir un pied-à-terre à Luxembourg, ajoute quant à elle Isabelle Lentz, managing partner de Ashurst Luxembourg, autre cabinet d’avocats anglais, installé plus récemment à Luxembourg. Le pays est à la pointe dans certains domaines comme l’asset management ou les fonds d’investissement. D’un point de vue purement business, il est donc logique pour eux d’être ici, afin de pouvoir offrir à leur clientèle un conseil ‘full service’. Le Brexit a renforcé cette évidence. Les Anglais ont rejoint en masse la Place luxembourgeoise et beaucoup de structures réfléchissent encore à les imiter pour rester compétitives dans leur offre de services. Cela dit, il faut aussi savoir que de nombreux cabinets anglais ou américains n’ont jamais eu pour stratégie d’offrir leurs services en Europe et préfèrent travailler avec des cabinets indépendants. Les problèmes liés au Brexit les concernent donc moins. » Une réflexion pré-Brexit On ne peut donc pas nier que le Brexit a conduit à l’installation de nombreuses sociétés au Luxembourg, comme dans d’autres pays de l’Union, et donc à nourrir une forme de croissance économique au détriment du RoyaumeUni. Chaque Place y va d’ailleurs de ses chiffres pour montrer combien elle a réussi à tirer parti de cet événement : 3.500 emplois créés à Paris dans la finance, 3.000 à Luxembourg et 4.000 à Francfort… Toutefois, pour chaque nouvelle entreprise qui déménage de Londres vers Luxembourg, le parcours n’est pas toujours le même et l’installation en dehors du Royaume-Uni est souvent l’aboutissement d’une longue réflexion. Souvent, elle demande aussi certains efforts pour permettre à des professionnels aux cultures de travail parfois très différentes de s’entendre. Isabelle Lentz connaît bien cette réalité. Arrivée en 2011 au sein du siège anglais de Ashurst à Londres, elle y a d’abord ouvert un « Luxem bourg desk » consacré à certaines activités comme le droit des sociétés, le droit bancaire ou les fonds. « Nous voulions continuer à élargir notre offre de services et, dans cette optique, l’installation d’une filiale au Grand-Duché était nécessaire, explique-t-elle. Évidemment, l’annonce du Brexit n’a fait que conforter Ashurst dans sa volonté de s’installer au Luxembourg. Mais cette solution nous permettait aussi de faciliter les contacts avec les autorités locales et de rendre notre travail sur place plus efficace. Il est en effet beaucoup plus simple d’être sur place pour voir les gens en direct. Depuis
Quel a été pour vous le plus gros changement suite au Brexit ? EVELYN MAHER (Partner et head of the investment management department chez Bonn Steichen & Partners) Dans notre pratique, nous avons surtout dû assister des clients confrontés à la nécessité de déplacer du Royaume-Uni vers l’Europe conti nentale leur centre pour la distribution de fonds en Europe. Quelques-uns de nos clients avaient en effet leur AIFM (alternative investment fund manager) à Londres, et ils ont donc dû trouver une solution avec la perte du passeport européen permettant la distribution des fonds en Europe.
ANTONIOS NEZERITIS (Partner au sein de Ashurst Luxembourg ) La perte du passeport européen a conduit beaucoup de gestionnaires de fonds installés seulement au RoyaumeUni à créer une entité réglementée au sein d’un pays de l’Union européenne. Des règles doivent toutefois être respectées. L’ESMA (European Securities and Markets Authority) a déjà dit qu’elle serait très vigilante suite à la fin de la période de transition et avait noté qu’il existait certaines pratiques douteuses, notamment en matière de sollicitation inversée.
2 Cela profite-t-il au Luxembourg ? Pourquoi ? E. M. Beaucoup de gestionnaires de fonds qui devaient trouver une solution de repli n’ont pas forcé ment créé leur propre AIFM. Ils sont en réalité souvent passés par des sociétés déjà implantées dans un pays de l’Union. Le Luxembourg a souvent eu les faveurs de ces acteurs. Cela dit, si les Britanniques restreignent l’accès à leur marché aux Européens, le Luxembourg pourrait aussi y perdre, à terme. De nombreux portefeuilles sont en effet encore gérés de l’autre côté de la Manche…
A. N. À côté de la création d’entités dans le pays – qui représente déjà un gain pour le Luxembourg –, il est aussi possible pour les acteurs britanniques de travailler avec un partenaire déjà installé au Grand-Duché. En ce sens aussi, le Brexit peut faire les affaires de sociétés luxem bourgeoises spécialisées dans la distribution de fonds en Europe. Pour le Luxembourg, d’importantes opportunités business peuvent découler de cette situation.
3 Gestionnaires de fonds et cabinets d’avocats britanniques ont rejoint Luxembourg en nombre. Mais y a-t-il assez de place pour tout le monde ? E. M. Je pense que ces mouvements sont une réponse à des besoins concrets exprimés par les clients. S’ils s’installent ici, c’est parce que c’est nécessaire pour servir au mieux leur clientèle. À mon sens, il y a toujours assez d’espace à Luxembourg pour tous ces professionnels et, si ce n’est pas le cas, le marché nous le dira…
« Il y a toujours assez d’espace à Luxembourg pour ces professionnels. » EVELYN MAHER Partner, Bonn Steichen & Partners
A. N. Nous assisterons peut-être un jour à une forme de saturation du marché luxembourgeois. Cela dit, malgré les mouvements déjà enre gistrés, on constate que plusieurs cabinets d’avocats britanniques considèrent encore la possibilité de s’installer au Luxembourg. Une telle implantation leur permettrait de servir plus efficacement leurs clients.
« Nous assisterons peut-être un jour à une forme de saturation. » ANTONIOS NEZERITIS Partner, Ashurst Luxembourg
JUIN 2021 FONDS D’INVESTISSEMENT
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95 SOCIÉTÉS
Le choc des cultures L’installation au Luxembourg n’est toutefois pas toujours un long fleuve tranquille pour Luxembourg reste un des grands gagnants du Brexit. On estime à 95 le nombre les sociétés britanniques, surtout dans la de sociétés qui ont annoncé ou prévu période de crise sanitaire que nous traverleur relocalisation de certaines ou toutes sons. « Pour les cabinets britanniques, il n’est leurs activités vers le Luxembourg suite au Brexit, selon les données de New pas si simple de venir s’installer dans un pays Financial (avril 2021). Dublin continue que l’on ne connaît pas. Et le Covid-19 a rendu de dominer le classement avec 135 sociétés, les choses plus compliquées encore, poursuit soit 25 % des mouvements. Isabelle Lentz. Contrairement à d’autres cabinets, nous avons pris la décision stratégique de ne pas offrir uniquement des services liés aux fonds d’investissement. Une autre difficulté est liée à la culture de travail. Les Anglais est de plus en plus importante, et nos collaboont des attentes spécifiques par rapport au ser- rateurs avaient déjà la possibilité de travailler vice client et il faut donc parvenir à trouver le depuis la maison avant la crise. La flexibilité juste milieu entre la mentalité continentale et fait partie intégrante de la mentalité de Ashurst », celle des Britanniques, qui n’est pas nécessai- indique Isabelle Lentz. rement identique. » Le défi, pour les managers de ces filiales La taille compte luxembourgeoises de cabinets d’avocats ou Si le Luxembourg veut continuer à récolter sociétés de gestion britanniques, est donc de les bénéfices du Brexit, à attirer de nouveaux respecter les standards du siège londonien, acteurs et à nourrir ainsi la croissance de l’intout en évitant d’imposer aux collaborateurs dustrie financière locale, le facteur humain un rythme de travail totalement inhabituel aura toute son importance. En effet, la créaau Luxembourg. « Je ne crois pas que l’enchaî- tion d’un AIFM au Luxembourg permet certes nement de longues journées de travail soit la de distribuer des fonds en Europe, mais la meilleure manière de fonctionner, même si on réglementation européenne impose que cette doit pouvoir l’accepter dans les périodes intenses, structure soit suffisamment fournie en perpar exemple quand on doit clôturer une tran- sonnel. L’Union souhaite ainsi éviter de voir saction. Au Luxembourg, la work-life balance des filiales occupées par une seule personne se tournant les pouces dans un bureau situé sur une Place européenne, alors que l’essentiel du travail est réalisé à Londres. Au moment de choisir une nouvelle ville hôte, les sociétés britanniques s’intéresseront donc à la taille du réservoir de talents local. « Tout le monde sait que les bons profils changent régulièrement de boîte, explique Pierre Reuter. Le défi est d’avoir suffisamment de possibilités de trouver l’expertise souhaitée dans les environs de la filiale que l’on désire créer. Le Luxembourg, pays de petite taille qui attire des BERTRAND MOUPFOUMA milliers de travailleurs issus de pays voisins, Partner, Themis Lex dispose, à ce niveau, d’un certain avantage. Cela concerne aussi les profils actifs dans le secteur financier : le Luxembourg les intéresse car les opportunités professionnelles, dans ce domaine, ne manquent pas. » Même si elles peuvent paraître triviales, les considérations liées au cadre de vie ont également leur importance dans ce débat. « Luxembourg a beaucoup changé et est devenue une ville cosmopolite où on entend des langues variées. Le cadre de vie convient aussi très bien aux familles. Par contre, pour les jeunes qui sortent des études, le Luxembourg a du mal à rivaliser avec ce que propose Londres ou New York », ajoute Pierre Reuter.
« Pour beaucoup d’acteurs britanniques, il est désormais bien plus confortable de travailler depuis un pays de l’Union, comme le Luxembourg ou l’Irlande. » 58
FONDS D’INVESTISSEMENT JUIN 2021
Continuer à se réinventer La nécessité de trouver et de conserver de bons professionnels n’est pas le seul impératif dans la perspective de continuer à profiter des conséquences du Brexit. Il convient aussi d’oser se réinventer, en exploitant de nouvelles sources potentielles de croissance. « Le moment est bien choisi pour se diversifier et aller chercher les opportunités là où elles se trouvent, explique Bertrand Moupfouma, qui est également vice-président de LuxAfrica, une association qui cherche à développer les affaires entre le Luxembourg et les pays africains. Or, c’est en Afrique que la plus grande partie de la croissance mondiale aura lieu au cours des 30 prochaines années. De plus en plus d’investisseurs se lancent sur ce marché notamment dans le cadre de projets private equity et le Luxembourg aurait tort de penser que l’Afrique va l’attendre. » L’opportunité africaine serait d’autant plus attirante qu’un autre événement, plus discret que le Brexit, a récemment touché le secteur financier mondial : l’île Maurice, qui servait de domicile privilégié pour les fonds d’investissement consacrés à l’Afrique, a été placée sur liste grise du Gafi (Groupe d’action financière de l’UE). « Le Raif (reserved alternative investment fund, ou Fiar, ndlr) luxembourgeois serait un outil idéal pour les investissements en Afrique – dans les infrastructures, l’agriculture, les nouvelles technologies – mais il reste très difficile de créer ces fonds au Luxembourg. La raison en est simple : pour créer un Raif, il faut d’abord ouvrir un compte, mais les banques ferment la porte lorsqu’elles sont informées que l’objectif est d’investir en Afrique, et cela quelle que soit la qualité de l’initiateur du projet… », regrette Bertrand Moupfouma. Cet immobilisme prive la Place luxembourgeoise des milliards d’euros qui sont à présent levés pour des projets sur le continent africain. Les voisins du Luxembourg, eux, en profitent. À commencer par la France qui, par son passé colonial, dispose de contacts privilégiés avec l’Afrique. Mais le Royaume-Uni, échaudé par le Brexit, s’est déjà rabattu sur ces nouvelles opportunités africaines. « Un travail énorme a déjà été réalisé par les Britanniques au Ghana, tout comme les Français ont pu le faire ailleurs. L’avantage du Luxembourg est que nous pouvons travailler avec les pays tant anglophones que francophones. Il nous revient de créer des standards respectueux des règles anti-blanchiment luxembourgeoises qui permettent d’investir facilement là-bas », plaide le Partner de Themis Lex. Si la Place luxembourgeoise doit sans doute persévérer dans sa lutte pour attirer les acteurs britanniques cherchant des solutions pour continuer à distribuer leurs fonds en Europe suite au Brexit, elle serait peut-être inspirée de jeter un œil par-delà les frontières du continent, où de belles nouvelles opportunités se profilent. Auteur Q. D.
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notre ouverture officielle en 2018, nous avons pu fluidifier notre façon de travailler et nous avons pu constater que nos clients appréciaient cette décision. »
Themis Lex
Post-Brexit
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Tokénisation
L’avenir sera-t-il aux cryptoactifs ?
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des investisseurs, autant que de craintes dans le chef des régulateurs et de certains acteurs du secteur financier. Ruée vers le bitcoin Au cours de la dernière décennie, de nombreuses autres cryptomonnaies ont vu le jour à côté du bitcoin. Parmi les milliers de cryptomonnaies aujourd’hui recensées, on peut citer l’Ether, le Ripple, le Litecoin, le Dogecoin (pour la version parodique). Ces actifs d’un genre nouveau stimulent l’appétit de nombreux spéculateurs, désireux de pouvoir miser sur
FONDS D’INVESTISSEMENT JUIN 2021
un nouveau bitcoin et de profiter d’énormes plus-values. En un an, la valeur du bitcoin a été multipliée par un facteur de l’ordre de 8 à 9. Quel altcoin (comme on appelle ces cryptomonnaies alternatives) affichera la meilleure performance ? « On assiste à un vaste mouvement de popularisation de la crypto. De plus en plus de gens investissent aujourd’hui dans les cryptomonnaies. Pas mal d’investisseurs ont profité de réelles plus-values qui leur sont associées », constate en effet Fabrice Croiseaux, CEO d’InTech, très impliqué sur les questions liées à l’utilisation de la blockchain au Luxembourg. Le dirigeant occupe notamment la fonction du président du conseil d’administration
Illustration
C’est en 2009 qu’est apparu le bitcoin. Le premier cryptoasset et la technologie sur laquelle il se fonde, la blockchain, ouvraient une nouvelle ère. Celle-ci s’accompagnait de nombreuses promesses de transformation pour l’industrie financière. La principale résidait dans l’idée de voir émerger un système financier décentralisé, qui puisse notamment se passer des nombreux intermédiaires de confiance nécessaires au bon fonctionnement de l’écosystème global. Une dizaine d’années plus tard, malgré de nombreux détracteurs, le bitcoin est toujours bien présent. Ces derniers mois, son cours s’est même envolé pour atteindre un sommet à 53.000 euros en avril dernier, suscitant un réel emballement auprès
Salomé Jottreau
La révolution crypto est en marche, même si elle s’exprime encore timidement en Europe et au Luxembourg. Derrière l’attrait grandissant des cryptomonnaies et les nouvelles possibilités qu’offre la tokénisation des actifs, c’est toute une industrie qui est appelée à se redessiner.
LAURENT KRATZ Cofondateur, Scorechain
«Rien n’empêche les acteurs de la Place de créer leur propre stablecoin, adossé à l’euro. »
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Jan Hanrion (archives)
’Infrachain, initiative visant à encourager d l’adoption de la blockchain, la technologie qui sous-tend les cryptomonnaies, et ce en partageant l’expertise, en participant à des projets, en diffusant des informations sur les cas d’utilisation opérationnels de la blockchain et en créant un écosystème international. « On ne peut plus parler d’un épiphénomène. Un changement profond s’opère. Et les investisseurs, y compris institutionnels, de plus en plus, souhaitent pouvoir y prendre part en accédant à ces nouvelles classes d’actifs. Un exemple significatif est l’obligation de 100 millions d’euros émise par la Banque européenne d’investissement sur Ethereum le 28 avril dernier », poursuit-il. L’idée de profiter d’une plus-value importante, rapidement, participe certainement à cette actuelle ruée vers le bitcoin. Toutefois, le mouvement n’est pas uniquement motivé par l’appât d’un gain facile, d’autant que les risques sont conséquents. La tokénisation des actifs, par ailleurs, ouvre d’autres perspectives nouvelles et très larges pour le secteur financier. Le sujet, en tout cas, ne laisse personne indifférent, avec des prises de position parfois diamétralement opposées, entre attitude réfractaire et optimisme débridé. Couvrir le risque inflationniste « Les raisons qui poussent les personnes à investir dans ces actifs sont diverses. On a par exemple vu des entreprises utiliser une partie de leur trésorerie disponible pour constituer une réserve de bitcoins », poursuit Fabrice Croiseaux. En février, Tesla a en effet annoncé avoir acheté 1,5 milliard de dollars de b itcoins. « La démarche ne vise toutefois pas uniquement le buzz qui l’accompagne. Dans l’environnement économique actuel, propice à l’inflation, beaucoup d’acteurs cherchent à sécuriser leur trésorerie. L’investissement dans une crypto comme le bitcoin est un moyen de le faire », continue Fabrice Croiseaux. « Pour faire face à la crise, la planche à billets fonctionne comme jamais, complète Laurent Kratz, cofondateur de Scorechain, société qui accompagne les
institutions financières dans une utilisation des cryptoactifs conforme à la réglementation. « Avec le bitcoin ou d’autres cryptomonnaies, on est assuré que l’émission de la monnaie, par la nature de celle-ci, est limitée. Il est impossible de produire des bitcoins à l’envie. En s’exposant aux cryptomonnaies, il ne s’agit donc pas uniquement de spéculer, mais de couvrir un risque de dévaluation des devises traditionnelles. » Le bitcoin, en particulier, est donc désormais considéré, par les entreprises comme par les particuliers, comme une valeur refuge au même titre que l’or.
Tout cryptoactif est représenté par un jeton (token en anglais). Il existe des jetons de diverses natures. À côté des cryptomonnaies, on peut distinguer d’autres tokens, par exemple les utility tokens ou encore les security tokens. « Les utility tokens, ou ‘jetons utilitaires’, ont pour fonction de permettre l’accès à un service ou à un produit proposé par une entreprise ou une organisation décentralisée, explique Luc Falempin, CEO de Tokeny Solutions. Ils sont par exemple émis par un acteur qui souhaite préfinancer son projet, dans une opération appelée ICO (initial coin offering, ndlr). Grâce au token, l’investisseur aura la possibilité de s’offrir ou d’utiliser le service qui sera proposé. Le security token, d’autre part, définit un titre ou actif numérique. Il peut être considéré comme un véritable investissement ou un pur actif financier avec, pour son détenteur, des objectifs de profits à plus ou moins long terme. Il représente l’équivalent numérique d’une part dans le capital d’une entreprise, dans un immeuble ou de tout autre objet. » Tout peut être tokénisé : un fonds, un immeu ble, un grand cru, une œuvre d’art… Avec la tokénisation, de nombreux actifs qu’il était jusqu’alors difficile de fractionner peuvent être facilement partagés entre de nombreux investisseurs. Les règles qui régissent l’émission des jetons et leur transmission, qui définissent leur fonction, sont établies par un smart contract. Ce dernier est déployé au niveau de la blockchain. Pour tenter une comparaison avec l’industrie financière établie, la blockchain constitue l’infrastructure sur laquelle on s’appuie et qui permet d’automatiser un grand nombre de fonctions. Le smart contract serait le fonds. Il détermine le type d’actif, les règles qui le régissent en matière d’émission, d’échange, de rémunération. Enfin, le token est la part de l’actif à laquelle on peut souscrire.
Nouvelle concurrence Pour les acteurs traditionnels de la finance, cette tendance n’a rien d’anodin et doit être prise en considération. « Si une banque ou un gestionnaire d’actifs n’est pas en capacité d’offrir la possibilité d’investir dans ces nouveaux actifs, le risque est de voir les clients se tourner vers des plateformes qui leur permettront de le faire, poursuit le CEO d’InTech. Des acteurs émergent dans le monde de la crypto et n’hésitent pas à développer aujourd’hui de nombreux services entrant en concurrence directe avec ceux proposés par les acteurs traditionnels, comme des cartes de paiement, des solutions de trading. » Face à cette nouvelle concurrence, la finance traditionnelle est de plus en plus invitée à se positionner. La question principale que ses représentants doivent se poser aujourd’hui réside dans leur volonté ou non d’intégrer les cryptoactifs dans les portefeuilles d’investissement proposés ou gérés. Les grands gestionnaires d’actifs américains n’hésitent pas à s’exposer aux crypto actifs. En Europe, le mouvement est nettement plus timoré. Et le régulateur, s’il a pu se montrer ouvert à ces évolutions, reste souvent prudent. « On ne voit cependant pas vraiment ce qui empêche les banques de la Place d’avan- Un marché à redéfinir cer dans cette voie, du moins en proposant des Quelles sont les opportunités liées à l’utiliservices à leurs clients liés aux cryptoactifs, sation de la blockchain et au recours à des poursuit Fabrice Croiseaux. Si l’on ne parle cryptoactifs plutôt qu’à des actifs traditionpas encore de développer des produits d’inves- nels ? « La tokénisation des actifs au départ de tissement en crypto, une banque peut pourtant la blockchain doit amener plus de flexibilité faire tout ce qu’une plateforme d’échange pro- et d’efficacité au cœur de l’industrie des fonds », pose, à l’instar de Bitstamp, acteur crypto jouis- répond Luc Falempin. La société qu’il dirige, sant d’une licence luxembourgeoise. » De cette Tokeny Solutions, permet justement aux acteurs manière, l’acteur bancaire peut éviter que des financiers opérant sur des marchés privés clients se détournent de lui pour privilégier d’émettre, de transférer et de gérer des titres des plateformes tierces. de manière conforme en utilisant la technologie du registre distribué. À travers elle, les Tokéniser les actifs acteurs peuvent entrevoir comment amélioCette démarche serait en outre une première rer la liquidité des actifs. Prenons par exemple un fonds d’investisétape, amenant les acteurs à envisager de nouvelles formes d’actifs en s’appuyant sur sement immobilier, dont les sous-jacents, à la crypto. On parle en effet de plus en plus savoir les immeubles investis, sont peu liquides. de « tokénisation des actifs ». Plus que les L’investisseur ne peut pas y entrer ni en sortir cryptomonnaies, le concept pourrait consi- quand il le souhaite, sous peine de lourdes dérablement redessiner l’industrie financière pénalités. L’accès à ces actifs, en outre, est dans son ensemble. Mais que recouvre-t-il ? limité aux seuls investisseurs institutionnels JUIN 2021 FONDS D’INVESTISSEMENT
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Tokénisation
EMILIE ALLAERT Project lead, Luxembourg Blockchain Lab
«Il est important, pour la place financière, de se positionner clairement vis-à-vis de ces évolutions pour préserver sa compéti tivité face à d’autres centres financiers. » 62
Pour le régulateur, il est important de s’assurer des responsabilités de chacun. Le modèle que nous proposons permet à un émetteur d’établir des règles et autorisations dès l’émission et de s’assurer qu’elles seront respectées tout au long du cycle de vie du fonds. »
Confiance et transparence On comprend qu’il puisse être difficile, pour de nombreux acteurs de la finance, de se projeter, tant le changement est conséquent. De nombreuses fonctions et activités actuelles pourraient être rendues obsolètes. « Si les rôles des acteurs sont appelés à évoluer, je pense que l’ensemble des acteurs dont la fonction sera d’amener de la confiance aura toujours une place au cœur de l’écosystème financier. Toutefois, la manière avec laquelle ils mènent leurs opérations va changer pour contribuer autrement au bon fonctionnement d’un système financier plus efficient », poursuit Luc Falempin. Par exemple, l’obligation de mener un KYC (know your customer, ndlr) ne disparaîtra pas avec le recours à la blockchain et aux cryptoactifs. Il sera toujours nécessaire d’identifier les investisseurs, autoriser des transferts, créer de nouveaux titres de chercher à repérer des transactions douou en détruire. Pour l’émetteur, gérer 10, 100, teuses, dans une perspective de lutte contre le 10.000 ou 10 millions d’investisseurs devient blanchiment, le financement d’activités illébeaucoup plus aisé. » gales ou encore le terrorisme. « Les acteurs, que On peut comprendre tout le potentiel dis- l’on parle de ceux chargés de réaliser le KYC ou ruptif de la technologie. Elle automatise de contrôler les transferts, sont donc appelés à aujourd’hui de nombreuses fonctions de s’inscrire dans ce nouvel écosystème, en profiback-office, menées dans la finance tradi- tant des possibilités que leur offre la technologie tionnelle par des tiers de confiance chargés pour renforcer plus encore la confiance tout en de vérifier les transferts, de réconcilier les permettant des gains d’efficience importants », opérations menées à divers endroits. « On poursuit le CEO de Tokeny Solutions. peut construire, au départ de la blockchain, tout un système financier décentralisé. Il est Stablecoin, le chaînon manquant aujourd’hui tout à fait possible d’y reproduire Aborder une telle transition, en outre, n’a rien l’ensemble des mécanismes existants, de déve- d’aisé. À l’avenir, et encore pendant un temps, lopper des produits purement crypto qu’il sera un monde financier crypto coexistera avec possible d’échanger sans ces intermédiaires de l’écosystème traditionnel. L’avenir de l’indusconfiance que sont les banques et les fonds, trie des fonds s’inscrit-il forcément dans la assure Fabrice Croiseaux. La blockchain s’ap- blockchain ? Pour Laurent Kratz, la réponse n’est parente alors à une infrastructure commune, en rien évidente. « Aujourd’hui, réaliser des invesqui permet de diminuer les coûts, d’accélérer tissements dans la sphère des crypto implique les opérations, d’accroître la transparence. » forcément des transferts de devises traditionnelles Effectuer un transfert d’argent associé à contre des cryptomonnaies ou des cryptoactifs », un ordre, dans le monde traditionnel de la explique-t-il. Dès lors, le back-office associé à finance, peut aujourd’hui encore prendre plu- la finance traditionnelle, celui dont on cherche sieurs jours. Ces délais impliquent de réaliser à se passer à l’aide de la blockchain, s’impose des opérations de settlement (impliquant par- encore et toujours. « Il n’y a donc pas de business fois un grand nombre d’intermédiaires), qui case valable, poursuit le dirigeant de Scorechain. sont lourdes et coûteuses. Dans le monde de Tant que des devises traditionnelles entreront la crypto, en revanche, le transfert de cash dans la boucle, on constatera des décalages entre est directement associé à l’ordre et exécuté le passage d’ordre et le transfert de cash. On passe instantanément. « Considérant les évolutions à côté du principal intérêt de recourir à la technologiques en présence, on comprend que blockchain. On essaie de faire entrer des carrés les modèles actuels sont appelés à évoluer. dans des ronds. Les vrais bénéfices ne pourront Aujourd’hui, nous disposons de l’ensemble des se révéler que lorsque l’ensemble des opérations outils, de l’accès à la blockchain publique, des pourra s’envisager au départ de la blockchain. logiciels, d’une série de smart contracts stan- En Europe, cela passera donc par la mise en œuvre dards permettant à nos utilisateurs de s’enga- d’un stablecoin lié à l’euro. Sans quoi cela n’a ger dans la transition, assure Luc Falempin. pas de sens. »
FONDS D’INVESTISSEMENT JUIN 2021
Marion Dessard (archives)
Conformité embarquée « L’autre grand avantage de la technologie, c’est que la compliance est embarquée au niveau du smart contract », explique Luc Falempin. Tout émetteur d’actif financier est en effet tenu d’appliquer la réglementation, et notamment de déterminer à quels investisseurs est destiné son produit, de vérifier l’identité de tout acquéreur d’un ou de plusieurs jetons directement entre investisseurs, sans devoir passer par l’émetteur ou d’autres intermédiaires, et ce même si l’échange se fait au niveau du marché secondaire. « Les règles sont donc définies au départ. Un investisseur qui souhaite acquérir un jeton devra par exemple prouver qu’il est qualifié pour, en s’identifiant auprès de l’émetteur, qui pourra procéder aux vérifications nécessaires, avant d’autoriser une transaction, poursuit le fondateur de la fintech. Toutes les démarches peuvent être largement numérisées et automatisées. L’émetteur dispose d’une vue sur l’ensemble des détenteurs de parts à tout moment, il peut bloquer des positions,
TOKÉNISER DES ACTIFS ? La vraie révolution liée à la blockchain dans le domaine de l’industrie financière tient à la possibilité qu’elle offre de tokéniser des actifs. La tokénisation d’un actif consiste à convertir les droits qui sont attachés à chacun d’eux en un jeton numérique. Le processus est similaire à celui de la titrisation d’actifs, à la différence que les jetons numériques, et les informations qui lui sont associées, sont enregistrés au niveau d’un registre distribué : la blockchain. La technologie permet une plus grande transparence et favorise la traçabilité des transactions, puisque chacune est enregistrée et stockée simultanément sur un grand nombre de nœuds. À ce titre, la DLT (distributed ledger technology) est plus sûre que les moyens traditionnels de tenue de registre. En effet, les transactions doivent être validées avant d’être enregistrées et ne peuvent ensuite plus être modifiées.
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ou disposant d’un patrimoine extrêmement confortable. « La déclinaison de l’actif sous forme de jetons permet de fractionner un actif beaucoup plus facilement, pour le rendre accessible à des cibles d’investisseurs beaucoup plus larges. Elle offre la possibilité d’effectuer des échanges de jetons directement entre investisseurs à tout moment, sans contraintes liées à la vente effective de l’immeuble par exemple, précise le CEO de Tokeny Solutions. La technologie ouvre la voie à la création d’un marché secondaire entre investisseurs. Toute l’information sur les échanges et les détenteurs est consignée automatiquement dans le registre. »
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* Données au 31 décembre 2020 ** Environnemental, Social et de Gouvernance Ce document est publié pour information uniquement, il ne constitue pas une offre d’achat ou de vente d’instruments financiers, ni un conseil en investissement et ne confirme aucune transaction, sauf convention contraire expresse. Candriam recommande aux investisseurs de consulter sur son site www.candriam.com les informations clés pour l’investisseur, le prospectus et tout autre information pertinente avant d’investir dans un de ses fonds y inclue la valeur liquidative des fonds. Ces informations sont disponibles en anglais ou dans une langue nationale pour chaque pays où le fonds est autorisé à la commercialisation.
Tokénisation
PEUT-ON PIRATER LA BLOCKCHAIN ? La technologie blockchain, sur laquelle s’appuient les cryptomonnaies et les cryptoactifs, réside dans un registre distribué, permettant de procéder à la vérification de l’information de manière décentralisée. À ce titre, elle permet de se passer des tiers de confiance comme il en existe pour garantir le bon fonctionnement du secteur financier. La question de la possibilité de pirater la blockchain se pose alors inévitablement… si l’on veut avoir la confiance des investisseurs. Pirater la blockchain est théoriquement possible, mais cela implique qu’une seule personne ou un consortium d’organisations parvienne à contrôler plus de la moitié (51 %) de la puissance de calcul nécessaire aux vérifications. L’effort de coordination nécessaire est conséquent, et les coûts peuvent rapidement être exorbitants. S’il est difficile de pirater la blockchain, ce n’est pas forcément le cas des plateformes d’échange de cryptomonnaies. Mieux vaut, dès lors, s’assurer de bien sécuriser son portefeuille.
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« La tokénisation des actifs au départ de la blockchain doit amener plus de flexibilité et d’efficacité au cœur de l’industrie des fonds. »
Andrés Lejona (archives)
Anticiper le changement Les acteurs luxembourgeois de l’industrie des fonds, s’ils veulent s’engager dans la voie de la crypto, pourraient faire preuve de proactivité et ne pas forcément attendre la naissance d’un cryptoeuro. « Rien n’empêche les acteurs de la Place de créer leur propre stablecoin, adossé à l’euro, commente Laurent Kratz. Pour cela, il faut qu’un consortium s’accorde pour émettre des jetons dont la valeur est indexée sur notre devise, en séquestrant un euro dans une réserve pour chaque unité de stablecoin émis. En créant ensemble un liquidity pool, une réserve partagée d’euros digitaux, les acteurs peuvent apprendre, envisager le développement d’un écosystème financier entièrement basé sur
prises autour de la technologie blockchain. Le Luxembourg Blockchain Lab, créé en LUC FALEMPIN décembre 2019, et qui regroupe Infrachain, la CEO, Tokeny Solutions Lhoft, LetzBlock, le List et l’Uni avec le SnT, entend accompagner cette transformation. « Jusqu’à aujourd’hui, on constate un grand intérêt pour la technologie. Toutefois, l’écosystème financier a encore des difficultés à s’engager dans cette transformation. Une de nos missions est de fédérer les acteurs autour d’idées ou de projets pour appréhender proactivement ces défis, commente Emilie Allaert, project lead au sein du Luxembourg Blockchain Lab. Nous pensons qu’il est important, pour la place financière, de se positionner clairement vis-àvis de ces évolutions pour préserver sa compétitivité face à d’autres centres financiers. » La France, avec sa loi Pacte, qui instaure un cadre pour les levées de fonds par émission de jetons (ICO) et les prestataires de services sur actifs numériques (PSAN), ne dissimule pas ses ambitions dans le domaine. « Dans ce contexte, pour préserver notre posila blockchain et se préparer pour demain. C’est tion à l’échelle européenne, il nous faut donc à partir de ce moment que la technologie devient nous préparer, en faisant évoluer l’écosystème vraiment intéressante. » réglementaire, en procédant à l’analyse du Pour la place financière luxembourgeoise, cadre européen actuel et futur afin de pouvoir il s’agit de continuer à bien appréhender tout en tirer parti, poursuit Emilie Allaert. La techéventuel changement majeur à l’échelle de nologie blockchain permet d’envisager d’iml’industrie, de faire évoluer son écosystème portantes transformations de la sphère financière, en fonction, de rester innovant. Pour beau- réduisant les barrières à l’entrée pour certains coup, la révolution crypto est aujourd’hui actifs, permettant d’aller à la rencontre de inéluctable. Elle s’opère déjà en dollars amé- nouveaux investisseurs, plus jeunes. C’est toute ricains. En euros, elle s’envisage encore à des la logique de l’offre et de la demande liées à l’industrie qui pourrait évoluer. » échéances plus ou moins éloignées. Pour les acteurs traditionnels, la course s’annonce rude et les menaces nombreuses. S’ouvrir de nouvelles perspectives De nombreuses autres initiatives crypto doivent La place financière luxembourgeoise a construit les inviter à agir. Nous avons évoqué Bitstamp, son succès sur une bonne anticipation des mais nous aurions aussi pu parler de Coinbase, changements majeurs qui ont marqué l’industrie dont on retiendra la flamboyante entrée en des fonds. Après Ucits, Luxembourg a admibourse. Comment ignorer, aussi, la volonté rablement négocié le tournant des fonds alterdu consortium emmené par Facebook de créer natifs avant de s’engager dans la promotion la cryptomonnaie Diem (ex-Libra). de la finance durable bien avant que le concept Si les acteurs de la finance traditionnelle soit largement popularisé. veulent continuer à peser dans l’écosystème « La prochaine grande rupture sera peutfinancier international du futur, il n’est sans être celle de la crypto. Si l’on veut garder une doute pas trop tôt pour investir dans des pro- longueur d’avance, il nous faut considérer les jets crypto. L’enjeu pour l’industrie des fonds opportunités sérieusement. Au-delà de la prise luxembourgeois est de ne pas se faire doubler de conscience, il faut agir, dans l’intérêt du par une autre Place, qui aurait eu l’audace Luxembourg, dans le respect des réglementad’avancer plus proactivement sur ces ques- tions et en veillant à préserver la réputation tions. Or, le débat sur les cryptoactifs, parfois de la place financière, poursuit Emilie Allaert. encore mal compris, demeure sulfureux. Et Si une technologie s’impose, faisant craindre Luxembourg, connue pour être le centre de des changements majeurs, il est préférable de gestion administrative des Ucits et, depuis chercher à bien l’appréhender plutôt que de la peu, des fonds alternatifs, a tendance à se repousser. Il faut pouvoir s’en servir, pour s’oumontrer timorée, craignant de mettre à mal vrir de nouvelles perspectives. Dans cette optique, sa réputation. il faut se mobiliser, en premier lieu pour apprécier et comprendre les enjeux, travailler à la Bien se positionner définition des actifs numériques de demain, Le Luxembourg n’ignore toutefois pas les adapter la réglementation en fonction. » enjeux liés au développement des cryptoactifs. Plusieurs initiatives ont d’ailleurs été Auteur S. L.
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Une devise numérique surveillée Un stablecoin est une monnaie digitale conçue pour que sa valeur soit indexée sur une crypto monnaie, de la monnaie fiduciaire ou des matières premières négociées en bourse. Il existe déjà de nombreux stablecoins. L’USD Coin, lancé en 2018, est par exemple adossé au dollar et facilite des opérations crypto au départ de la devise américaine. Aujourd’hui, de nombreuses banques centrales étudient la possibilité de lancer leur devise numérique, notamment pour contrer la popularité des cryptomonnaies et garantir leur souveraineté durablement. L’Union européenne s’est engagée dans le projet de mettre en œuvre un cryptoeuro. Toutefois, selon les récents propos de Christiane Lagarde, la présidente de la Banque centrale européenne, il faudra encore quatre ans pour que ce projet se réalise. À l’ère du numérique, c’est une éternité, et cela révèle avant tout un faible engouement des autorités pour ces changements.
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Forecast
Comment le Luxembourg peut-il garder sa compétitivité ? Premier centre de distribution de fonds en Europe et deuxième au monde, derrière les États-Unis, le Luxembourg se doit d’innover pour conserver cette position stratégique. Trois acteurs de la finance luxembourgeoise nous livrent leurs conseils pour que la Place reste compétitive.
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JEAN-MARC GOY Conducting officer & senior counsel Capital Group
Le Luxembourg va de succès en succès grâce à son écosystème et à son approche unique, qui lui ont permis de devenir un centre financier de premier plan. Pour conserver ce statut et sa compétitivité, l’accent devrait, selon moi, être mis sur plusieurs éléments. Premièrement, un cadre stable dans une Europe ouverte. La mise en œuvre et l’application de nouvelles règles ont un coût, qui est également supporté par les investisseurs. Les modifications du cadre juridique et réglementaire doivent être limitées à celles qui sont réellement nécessaires et qui apportent une valeur ajoutée. Deuxièmement, un dialogue régulier et ouvert. La poursuite d’un dialogue cons tructif et sérieux entre les différentes parties est capitale pour assurer le développement positif continu de notre centre financier. Enfin, un environnement compétitif est crucial pour attirer et retenir les talents, et pour favoriser l’innovation. Le Luxembourg renforce sa position au sommet de l’industrie européenne grâce à des initiatives pionnières dans les domaines de la fintech, de la regtech, de la digitalisation et de la finance durable. L’introduction d’une taxe d’abonnement réduite pour les fonds de finance durable souligne l’ambition du pays à être un pionnier dans ce domaine.
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FONDS D’INVESTISSEMENT JUIN 2021
« Si nous avons aujourd’hui le vent en poupe, nous devons éviter la complaisance et réformer pour devenir toujours plus pertinents. »
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« Trouver l’équilibre entre transparence, surveillance et innovation financière est nécessaire pour maintenir un écosystème compétitif. » STEFANO TORTI Group head of asset management Banque Havilland
Le changement étant la seule constante au sein de l’industrie financière, les fonds d’inves tissement luxembourgeois continueront à faire face à des défis importants dans les années à venir. D’un point de vue opérationnel, il est désormais clair que le modèle actuel d’agent de transfert / administration de fonds devra évoluer. Les premières expérimentations de la technologie axée sur la blockchain ont déjà eu lieu dans plusieurs institutions, et c’est d’ailleurs au Luxembourg que la première transaction de fonds au monde utilisant la blockchain a été réalisée il y a quelques années. Cependant, la tendance actuelle à la « tokenisation » de tout, des actifs réels aux actifs financiers, pourrait accélérer cette tendance, et les nouveaux entrants pourraient potentiellement remettre en cause le statu quo, au-delà des attentes. Par ailleurs, en termes de structuration du contenu, les fai bles rendements qui semblent se maintenir entraînent une croissance exponentielle, non seulement des fonds d’actifs réels, mais aussi de stratégies et de produits généralement plus complexes. C’est donc un exercice très délicat que de trouver en permanence un équilibre entre la transparence, la surveillance et l’innovation financière, nécessaire pour maintenir un écosystème compétitif.
Nader Ghavami (archives), Kneip et Banque Havilland
« Un environnement compétitif est crucial pour attirer et retenir les talents, et pour favoriser l’innovation. »
J’ai eu la chance de déménager au Luxembourg en juillet 2020, dans un pays charmant et accueillant, mais aussi idéal d’un point de vue commercial : bien connecté, multilingue, avec un bon accès aux talents, et une bonne stabilité. Il y a, je crois, trois domaines sur lesquels il faudra se pencher pour maintenir cette position. La tendance qui consiste à éliminer les pôles de domici liation des fonds d’investissement est irré versible. Les politiciens du monde entier répondent à une demande croissante dans ce sens, et nos services financiers vont devoir se définir au-delà de la domiciliation. Le Luxembourg devrait également se rapprocher de Londres. Certains considèrent le Brexit comme une opportunité, mais il faut être prudent : l’écosystème de la City est difficile à reproduire. Enfin, si les frontaliers refusent de retourner au bureau tous les jours, l’idée du « Greater Luxembourg » sera con frontée à des défis fiscaux. Les talents pourraient devenir plus difficiles d’accès, et les restaurants et les magasins pourraient être amenés à s’adapter à une demande plus faible. Si nous avons aujourd’hui le vent en poupe, nous devons éviter la complaisance et réformer pour devenir toujours plus pertinents.
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ENRIQUE SACAU CEO Kneip
LUCIENNE ANDRING
Banque de Luxembourg, société anonyme – 14, boulevard Royal – L-2449 Luxembourg – R.C.S. B5310
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