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Flexibiliser le temps de travail
PRIORITÉ Flexibiliser le temps de travail
Flexibilisation rime avec conciliation, pour les salariés, du travail avec la vie privée. Mais pour les chefs d’entreprise, c’est aussi synonyme de souplesse d’organisation.
Auteur MATHILDE OBERT
« Une flexibilisation du temps de travail permettant de mieux répondre aux besoins des entreprises et de faciliter la conciliation de la vie professionnelle avec la vie privée des salariés. » Telle était la volonté du gouvernement dans son accord de coalition en 2018. Quatre ans après, le Covid a accéléré le recours au télétravail. Sa pratique est mieux encadrée : le quota fiscal exonéré pour les frontaliers belges et français a augmenté à 34 jours. Un projet de loi pour le droit à la déconnexion a également été déposé. Le congé légal minimum est, pour sa part, passé à 26 jours, et le 9 mai est devenu férié. Et si aucun accord pour un droit au temps partiel n’a été trouvé, le projet de loi sur le compte épargne-temps a, lui, été adopté. « Ce qui a été fait concerne le salarié, relève Michèle Detaille, présidente de la Fedil. Il est temps qu’on parle de flexibilisation du point de vue de l’entreprise. »
Pour une annualisation 38 % des 611 sociétés interrogées par la Chambre de commerce sur les priorités du prochain gouvernement ont d’ailleurs cité la flexibilité du marché du travail. « Elles souhaitent pouvoir mettre en place des solutions personnalisées », résume Bénédicte Schmeer, juriste en droit du travail à la chambre professionnelle. Michèle Detaille prend l’exemple d’un technicien qui a travaillé 48 heures dans la semaine, ce qui constitue le maximum légal. « On l’appelle pour une panne. Il ne peut y aller parce qu’il dépasse son quota. » Ou celui de son entreprise. « Il nous arrive d’avoir un carnet de commandes pour trois jours, puis rien. On doit pouvoir mobiliser les équipes à certains moments et moins à d’autres », sans payer d’heures supplémentaires. L’annualisation du temps de travail fait aussi partie des revendications de la Chambre des métiers. Aujourd’hui, la durée hebdomadaire peut être modulée via un plan d’organisation du travail (POT), communiqué cinq jours avant le début de la période de référence, qui est de
Flexibilisation : l’exemple de RH Expert
RH Expert est passée, fin 2021, à la semaine de quatre jours. Le point un an après avec son CEO, Laurent Chapelle.
Comment avez-vous flexibilisé le travail ? Nous n’avons pas mis en place de POT, mais des horaires mobiles. Les salariés travaillent quatre jours avec un maximum de 9 heures, mais ils sont payés à 40 heures/semaine. Le travail se fait selon les objectifs.
Quel est le bilan ? On ressent moins de fatigue et plus de polyvalence. Cela joue sur la fidélisation et aide à recruter.
Qu’est-ce qui pourrait être fait pour favoriser encore la flexibilité ? Il faudrait que le compteur épargnetemps soit plus simple à mettre en place. quatre mois au maximum, 12 avec convention collective. « C’est complexe, il y a des préavis », critique Tom Wirion, directeur de la Chambre. Certains changements d’horaires entraînent des heures supplémentaires majorées. Et, pour compenser la flexibilité demandée, des jours de congé sont octroyés. « C’est pour cela que très peu d’entreprises l’utilisent. » Selon le ministère du Travail, 7 % ont mis en place un tel dispositif depuis 2016. Tom Wirion prône donc plus de souplesse. « On pourrait avoir des semaines à 48 heures, d’autres à 32. À la fin de l’année, s’il y a des heures supplémentaires, elles sont honorées. »
L’accord de coalition prévoyait aussi de revoir les horaires d’ouverture des commerces. La demande de travailler plus de quatre heures le dimanche reste d’actualité. « Les salariés sont moins enclins à se déplacer pour quatre heure », explique Bénédicte Schmeer. Autre proposition de la Chambre des métiers : la possibilité de plusieurs pauses non rémunérées par jour. « Cela donnerait au salarié se déplaçant d’un lieu de travail à l’autre la possibilité de s’arrêter faire une course. » Et arrangerait les patrons qui ont besoin de salariés sur des périodes précises. « Flexibilité ne veut pas dire réduction du temps de travail », alerte cependant Tom Wirion, dont Michèle Detaille partage l’opinion. « Il y a une opposition ferme des entreprises, surtout dans un contexte de pénurie de main-d’œuvre », complète Bénédicte Schmeer.