Jean Dubuffet en papier

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JEAN DUBUFFET EN PAPIER GALERIE ZLOTOWSKI

JEAN DUBUFFET EN PAPIER

G A L E R I E Z L OTOW S K I


JEAN DUBUFFET EN PAPIER GALERIE ZLOTOWSKI

JEAN DUBUFFET EN PAPIER

G A L E R I E Z L OTOW S K I


JEAN DUBUFFET EN PAPIER

GALERIE ZLOTOWSKI 20 rue de Seine 75006 Paris +33 (0)1 43 26 93 94

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Ce catalogue a été édité à l’occasion de la XXVIème Biennale des Antiquaires de Paris, Grand Palais, du 14 au 23 septembre 2012. Exposition à la galerie du 25 septembre au 24 novembre 2012.


Dubuffet, penseur sauvage

Qui entend, d’un même coup d’œil, embrasser les travaux sur papier de Jean Dubuffet et s’arme pour cela des notions en usage doit bientôt déchanter. Aux autres, il laisse l’esquisse préalable, l’œuvre préparatoire dont l’intérêt est de montrer le chemin de la peinture et, de temps à autre, de s’aboutir en un ouvrage achevé. C’est là, parfois savantes, recettes d’une cuisine picturale qu’il a dès ses débuts récusées. Ses travaux sur papier sont œuvres au même titre que ses autres œuvres et souvent postérieurs aux peintures dont ils sont les plus proches. Dubuffet, c’est chose connue, n’a pas en art l’humeur casanière. Tout le sollicite qui échappe à la règle, à la norme. L’accoutumance le fait fuir et l’allure de son œuvre est de rejets, de refus plus que d’exploitation laborieuse. Aussi ses rapports avec le dessin sont-ils intermittents ; casuels, et comme pour ses autres pratiques – qu’il s’agisse de peinture, de sculpture voire d’écriture ou de musique – prolifiques. Le grand nombre est toujours d’intérêt aux chercheurs : ce qui pouvait sembler n’être que fait de hasard, négligeable dans sa singularité, prend par la répétition force d’évidence. Ainsi quand Dubuffet s’arrête, pour un temps plus ou moins long, à tel nouveau mode d’expérimentation – le plus souvent l’utilisation singulière, détournée, d’une technique étrangère aux habitudes spécifiques des peintres – réalise-t-il à la suite quantité de travaux comme pour en épuiser au plus tôt la ressource et de là prendre d’autres visées. L’œuvre de Dubuffet, sans rien de concerté, possède sa logique propre. D’un ouvrage à l’autre, un lien se crée, un possible surgit, quelquefois réservé pour de longues années, souvent immédiatement développé. Il serait vain, dans cette étroite et complexe imbrication, de vouloir isoler les travaux sur papier comme un corps séparé. Plusieurs années entièrement consacrées au développement d’une série peuvent parfois ignorer le dessin – ainsi près de trois ans séparent-ils les Conjectures (avril-mai 1975) des premières Situations (avril 1978) – il arrive également que dessin et peinture interfèrent au contraire à l’intérieur d’un même cycle : les admirables dessins des Terres radieuses (juin-octobre 1952) sont, par exemple, partiellement concomitants des Paysages du mental dont ils achèvent le propos.



Que le dessin intervienne souvent en conclusion d’une suite de peintures, c’est là le propre du dégraissage auquel comme systématiquement se livre Jean Dubuffet. Semblable à ces chefs chinois qui servent en clôture du repas le bouillon tout chargé de sucs dans lequel ont cuit les nourritures épaisses dont on s’est préalablement rassasié, Dubuffet par l’usage du dessin quitte ce que la peinture implique de matériel, de technique pour se livrer librement à la transcription de ses errements dans les structures du mental. Les matériaux que Dubuffet privilégie naturellement sont ceux qui facilitent le libre cours de la main : le crayon à cause du caractère continu du trait, l’encre pour son aptitude à couvrir, et principalement le marker qui combine les deux. Même si ce sont outils traditionnels du dessinateur, leur emploi l’est moins. Le crayon, Dubuffet en fait usage primitif, écrasant la mine, frottant à travers la surface, comme un enfant qui couvre sa page, soucieux de tout sauf d’élégance ; pour l’encre, c’est la tache et le tracé rageur du trait de plume qui la requièrent tour à tour. La maladresse apparente, l’embrouillamini de ses œuvres font la nique à la convention d’élégance qui s’attache au dessin. Découpé, recollé dans les assemblages d’empreintes, les figures de l’Hourloupe ou la large série des Situations, qui forment le prolongement dessiné des Théâtres de Mémoire, c’est son monde que Dubuffet lui-même met en pièces pour en offrir dans le perpétuel devenir de son invention une image nouvelle. « Le dessin, c’est la probité de l’art », déclarait doctement Ingres. De ces deux mots, Dubuffet n’a cure. A l’asphyxiante culture que dispense l’histoire de l’art, il préfère les embruns du large, leur odeur mêlée de sel et de goudron ; aux codifications, aux lois, à tout ce qui restreint, il a décidé d’opposer l’ignorance et choisi de cultiver pour soi-seul une pensée sauvage poussée à même les déchets, là où nul ne récolte ni même ne va voir. Sa leçon n’est pas plastique – les suiveurs pourtant furent nombreux – mais morale. Elle affirme qu’il n’y a de solution qu’individuelle, que toute notion n’existe que dans la mouvance, que le fonctionnement de l’esprit l’emporte sur ses produits. Qui ne remarquerait que dans les plates-bandes bien ordonnées de l’art contemporain, cette curieuse culture, en marge des massifs, soit l’une des seules à se faire remarquer par son parfum puissant ?

Daniel Abadie


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11. Paysage aux nuages tachetés Mars 1955 Assemblage d’empreintes (encre de Chine) 50 x 62,5 cm Signé et daté en bas vers la droite : J. Dubuffet / 55 Titré, situé et daté au stylo bille au verso : Paysage aux nuages tachetés / Vence, Mars ‘55 Provenance : Rudi Augustinci, Paris Galerie Rive Gauche, Paris Waddington Galleries, Londres Exposition : R. A. Augustinci présente vingt-six assemblages d’empreintes (1954-1955) de Jean Dubuffet, Galerie Rive Gauche, Paris, 15 mai - 6 juin 1956 ; n°9 Référence : LOREAU Max, Catalogue des travaux de Jean Dubuffet. Fascicule XI : Charrettes, jardins, personnages monolithes, Weber, 1969, n°17, p. 28



L’Hourloupe représente, dans l’œuvre de Dubuffet, une aventure particulière : alors que toutes les séries de l’œuvre ne durent que de quelques mois à deux années au maximum, L’Hourloupe, qui surgit à l’été de 1962 avec une série de dessins bientôt accompagnés de textes en jargon où pour la première fois figure ce mot, ne prendra fin qu’à l’été de 1974 avec les Paysages castillans et Sites tricolores. La multiplicité des approches, des techniques mises en œuvre (de la peinture à la sculpture, de l’architecture aux représentations théâtrales), font de L’Hourloupe non une série au sens classique du terme, mais un véritable cycle de travaux qui semble diviser en trois temps successifs le travail de Jean Dubuffet. Après les expérimentations sur la matière, entreprises dès Mirobolus, Macadam et Cie, L’Hourloupe apparaît comme une réflexion sur le langage et la manière d’y structurer le réel, les derniers temps de l’œuvre – une décennie – étant pour leur part consacrés, comme en un travail de déconstruction systématique, à la progressive dématérialisation de tout langage et de toute pensée. Véritable fléau de la balance entre le temps initial et le temps final de l’œuvre, L’Hourloupe, à son apparition, divisa profondément le public de l’artiste. Il n’était pas jusqu’au nom même – incongru mais inoubliable - qui ne faisait problème. Dubuffet, dans sa Biographie au pas de course, assurera qu’il « l’associait par assonance, à « hurler », « hululer », « Riquet à la houppe » et le titre « Le Horla » du livre de Maupassant inspiré d’égarement mental » mais oubliera de mentionner La Rue de l’Entourloupe (1963), titre d’un de ses propres tableaux dont l’écriture relie singulièrement le style de ce nouveau cycle à l’esprit des peintures de Paris-Circus qui l’avait juste précédé.

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18. Personnage 8 février 1963 Gouache et collage sur papier – EG. 55 67 x 30 cm Monogrammé et daté en bas à droite : J.D. 63 Provenance : Collection privée, Venise (don de l’artiste) Galleria d'Arte Maggiore, Bologne Collection du Dr. Russo, Venise E & R Cyzer Gallery, Londres Grosvenor Fine Arts Ltd., Londres Exposition : L'Hourloupe di Jean Dubuffet, Palazzo Grassi, Centro Internazionale delle Arti e del Costume, Venise, 1964 ; n°23 Bibliographie : Sixty Works by Modern Masters, E & R Cyzer 20th Century Art (ed.), Londres, 2011, illustré en couleur p. 102 Référence : LOREAU Max, Catalogue des travaux de Jean Dubuffet. Fascicule XX : L’Hourloupe I, nouvelle édition, Fondation Jean Dubuffet, Paris, 1995, n°116, p. 59


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20. Paysage contrapontique 19 février 1969 Époxy peint au polyuréthane H. 95 cm, L. 125 cm, P. 97 cm Signé et daté : J.D. 69 Sujet composé de 9 éléments, dont 4 nouveaux, les 5 autres ayant été utilisés dans d’autres sujets Provenance : Collection Charles Diker, New York Collection particulière, New York Expositions : Dubuffet : simulacres, The Pace Gallery, New York, 8 novembre 1969 – 7 janvier 1970 ; n°3 Jean Dubuffet : a retrospective, The Solomon R. Guggenheim Museum, New York, 26 avril – 29 juillet 1973 ; n°284 Jean Dubuffet : des années 50 aux années 80, Gallery Urban, Paris, 3 octobre – 27 octobre 1990 ; n°13 Jean Dubuffet : From the 50s to the 80s, Gallery Urban, New York, novembre 1990

Bibliographie : Catalogue de l’exposition Dubuffet : simulacres, The Pace Gallery, New York, 1969, illustré en noir et blanc pp. 20-21 GENAUER Emily, sans titre, in Newsday, New York, 22 novembre 1969, illustré en noir et blanc Catalogue de l’exposition Jean Dubuffet : a retrospective, The Solomon R. Guggenheim Museum, New York, 1973 ; illustré en noir et blanc p. 278 BARILLI Renato, Dubuffet : le cycle de l’Hourloupe, Chêne, Paris, 1976, illustré en noir et blanc sous le n°100, p. 69 BARILLI Renato, Dubuffet : oggetto e progetto, il ciclo dell’Hourloupe, Fratelli Fabbri, Milan, 1976, illustré en noir et blanc sous le n°100, p. 69 FRANZKE, Andreas, Dubuffet, Harry N. Abrams, New York, 1981, illustré en noir et blanc p. 195 BONNEFOI Geneviève - HUNTER Sam, catalogue de l’exposition Jean Dubuffet : des années 50 aux années 80, Gallery Urban, Paris, 1990 ; illustré en couleurs (non paginé) ; Référence : LOREAU Max, Catalogue des travaux de Jean Dubuffet. Fascicule XXIV : Tour aux figures, amoncellements, cabinet logologique, Weber, 1973, n°119, p. 128



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25. Séquence XXX 3 juin 1979 Acryle sur papier (avec 15 pièces rapportées collées) 35 x 25,5 cm Signé et daté en bas à droite : J.D. / 79 Exposition : Jean Dubuffet ; Brefs exercices d’école journalière, Galerie Rudolf Zwirner, Cologne, mars - avril 1980 Bibliographie : Catalogue de l’exposition Jean Dubuffet ; Brefs exercices d’école journalière, Galerie Rudolf Zwirner, Cologne, 1980, illustré en noir et blanc p. 13 Référence : LOREAU Max, Catalogue des travaux de Jean Dubuffet. Fascicule XXXII : Théâtres de mémoire, Les Éditions de Minuit, Paris, 1982, n°360, p. 163



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28. Site avec 6 personnages 14 septembre 1981 Acryle sur papier marouflé sur toile – E 304 67 x 50 cm Monogrammé et daté en bas à gauche : J.D. 81 Référence : LOREAU Max, Catalogue des travaux de Jean Dubuffet. Fascicule XXXIV : Psycho-sites, Les Éditions de Minuit, Paris, 1984, n°304, p. 84




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