Magazine 3Rve Hiver 2022

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HIVER 2022, vol. 18 no 1

Le magazine des matières résiduelles au Québec

TAGE REPORLU S I F E XC

DYNAMISME ET RENOUVEAU CHEZ RÉSEAU ENVIRONNEMENT

Convention de la poste-publications no 41122591

Entrevue avec son nouveau PDG, Mathieu Laneuville

Le rapport du BAPE comme fer de lance d’une nouvelle approche en GMR

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Recycler les masques : une bonne ou une mauvaise idée ?

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Non, le gouvernement fédéral n’interdira pas les plastiques à usage unique

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POUR VALORISER LES MÉTIERS EN ENVIRONNEMENT

ENVIROCOMPÉTENCES MISE SUR LA MAGIE DES BORNES INTERACTIVES Plus de détails en page 16

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reportage « Lors des trois dernières années, le taux d’emploi dans le secteur de l’environnement a augmenté de 10 %, contre 1,8 % pour les autres secteurs d’activité économique. Si la pénurie de main-d’œuvre est en partie due au taux de croissance de notre secteur, elle est aussi consécutive aux départs à la retraite. La moyenne d’âge en environnement est beaucoup plus élevée que dans tout autre secteur d’activité économique. »

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— Dominique Dodier

SOMMAIRE

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Reportage : Dynamisme et renouveau chez Réseau Environnement : entrevue avec son nouveau PDG, Mathieu Laneuville Ce magazine est imprimé sur papier à contenu recyclé.

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EN LIEN AVEC LE MINISTRE

MOBILISONS-NOUS POUR LES GÉNÉRATIONS FUTURES

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SUR LE RADAR

NOUVELLE USINE DE BIOCARBURANTS À VARENNES : LES DÉCHETS DES DÉCHETS FONT LE BONHEUR D’ENERKEM

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LE JURIDIQUE

MATIÈRES RÉSIDUELLES : PRÈS DE 30 ANS PLUS TARD, LE MÊME DISCOURS ?

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LES AMIS DE 3RVE

chroniques 22

CETEQ LE RAPPORT DU BAPE COMME FER DE LANCE D’UNE NOUVELLE APPROCHE EN GMR

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ÉCONOMIE CIRCULAIRE ACCÉLÉRER LA MISE EN PLACE D’UNE ÉCONOMIE DU 3RV (SANS LE « E »...)

28

CTTÉI RECYCLER LES MASQUES : UNE BONNE OU UNE MAUVAISE IDÉE ?

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CPEQ NON, LE GOUVERNEMENT FÉDÉRAL N’INTERDIRA PAS LES PLASTIQUES À USAGE UNIQUE

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MARKETING RESPONSABLE LE MESSAGE ET LES ACTIONS DOIVENT ALLER DE PAIR !

Éditeur et rédacteur en chef André Dumouchel adumouchel@maya.cc

Journaliste et rédacteur Guy Des Rochers

Coordonnatrice à la direction de l’édition Maude Champagne coordination@maya.cc

Chroniqueurs Julien Beaulieu Me Robert Daigneault Me Olivier Dulude Richard Mimeau Daniel Normandin Anne Patel

Direction artistique MAYA Designer graphique Sylvain Malbeuf (SymaPub)

Photos de la page couverture et des reportages Danylo Bobyk

Espace publicitaire André Dumouchel Téléphone : 450 508-1515 adumouchel@maya.cc Abonnement et administration MAYA communication et marketing 457, montée Lesage Rosemère (Québec) J7A 4S2 Téléphone : 450 508-1515 info@magazine3rve.cc www.magazine3rve.cc Impression Carpe diem

Réviseure linguistique Émilie Pelletier

ONSS LES B TACT CON

© Tous droits réservés.

4 LE MAGAZINE DES MATIÈRES RÉSIDUELLES AU QUÉBEC 3RVE VOL. 18 N O 1 HIVER 2022

Droits d’auteur et droits de reproduction : toute demande de reproduction doit être acheminée à MAYA communication et marketing aux coordonnées figurant ci-dessus. Les opinions et les idées contenues dans les articles n’engagent que leurs auteurs. La publication d’annonces et de publicités ne signifie pas que le magazine 3Rve recommande ces produits et services. Convention de la poste-publications no 41122591. Retournez toute correspondance ne pouvant être livrée au Canada aux coordonnées figurant ci-dessus. Dépôt légal : 1er trimestre 2005. ISSN 1712-9117. Le magazine 3Rve est publié trois fois l’an.

HIVER 2022, vol. 18 no 1

Le magazine des matières résiduelles au Québec



ÉDITORIAL

Y AURA-T-IL ASSEZ DE BRAS

POUR LA TRANSITION VERTE ? Alors que la vénérable institution québécoise qu’est Réseau Environnement fête ses 60 ans d’existence et qu’un autre organisme non moins respectable, EnviroCompétences, souffle ses 25 chandelles, d’immenses défis se dressent sur le chemin du secteur de l’environnement au Québec — des obstacles teintés par la transition verte...

C

ar il y a un éléphant dans la pièce, et il se nomme pénurie de main-d’œuvre.

À la mi-mars, le gouvernement du Québec déposait son Plan pour une économie verte 2030 en vue de jeter les bases d’une économie plus sobre en carbone. Toutefois, si l’on porte un regard lucide sur la situation de l’emploi au Québec, force est d’admettre que la main-d’œuvre demeurera un grand défi dans la réalisation de cette nécessaire transition verte. Alors que, pendant des décennies, l’obsession de nos gouvernements était de créer des emplois pour les jeunes sur le marché du travail et de diminuer le chômage, aujourd’hui, nous assistons à un changement de paradigme : il faut maintenant mettre de côté la création d’emplois et plutôt investir dans la formation et le développement des compétences chez de futurs travailleurs afin de satisfaire les besoins en main-d’œuvre, lesquels sont de plus en plus grands.

André Dumouchel adumouchel@maya.cc

Du reste, on observe aujourd’hui que les emplois vacants sont non seulement nombreux, mais en forte hausse. Les enjeux sont de taille et tout à fait inédits. Pour le nouveau PDG de Réseau Environnement, Mathieu Laneuville, la transition verte ne peut faire abstraction du bien-être humain, et ce difficile équilibre entre l’économie et l’environnement doit d’abord en tenir compte. Quant à la directrice générale d’EnviroCompétences, Dominique Dodier, elle juge que son mandat d’améliorer le marché du travail en environnement ne peut être réalisé que si l’humain demeure au cœur de toutes ses préoccupations.

Des tendances dont on doit tenir compte On a identifié des causes à la pénurie de maind’œuvre : le vieillissement de la population, le virage numérique, des facteurs liés à la pandémie (qui, en théorie, devraient se résorber). À ces éléments, il faut ajouter la transition verte, puisque de nouveaux emplois « verdissants » apparaîtront de plus en plus au détriment d’emplois « vieillissants », ce qui créera ainsi des postes nouveaux à combler. D’ailleurs, trois tendances mondiales, qui relèvent tout autant de la psychologie que de la sociologie, démontrent à quel point la jeune génération n’envisage peut-être pas sa vie comme celles qui l’ont précédée. Prenons par exemple le mouvement FIRE (acronyme anglais pour Financial Independence, Retire Early ou, en français, « indépendance financière, retraite précoce »), lequel a de plus en plus de jeunes adeptes dans le monde. Celui-ci préconise de travailler dur, de vivre modestement et d’économiser afin de prendre une retraite très tôt, à 40 ans, voire à 3 0 ans, pour être libre et jouir d’une indépendance financière. Ou encore ces deux autres tendances, plus étonnantes celles-là, qui démontrent que les jeunes d’aujourd’hui ne pensent pas avec les mêmes schémas sociaux que leurs parents.

Un article de France Soir (21 janvier 2022) évoque une tendance à la hausse chez les jeunes nommée « la grande démission », qui amène des salariés, pourtant bien rémunérés, à quitter leur emploi en raison de facteurs reliés au bien-être. Ainsi, en France, de juillet 2019 à juillet 2021, le marché de l’emploi a enregistré plus de 20 % de démissions (Novethic Media). Toutefois, la tendance la plus révélatrice de notre époque est le « détravail ». Ses adeptes souhaitent « ne travailler strictement que le temps nécessaire, dans une logique de décroissance économique et de préoccupations environnementales, pour pouvoir profiter de la vie et du temps libre le plus tôt possible » (extrait de l’article de France Soir du 21 janvier 2022). Avec la pandémie, les changements climatiques et la guerre en Ukraine, on cherche apparemment à trouver du sens à son travail. Cette quête s’exprime aussi pour certains par le refus de travailler dans des entreprises polluantes ou émettrices de GES, bref, des organisations qui ne prennent pas en compte les enjeux environnementaux. Ces tendances émergentes expriment un mouvement de fond, un nouveau rapport au travail qui a sans doute été exacerbé par la pandémie, et qui s’amplifie et débouche aujourd’hui sur une crise de la maind’œuvre. Comme quoi peu importe les belles théories et les solutions sophistiquées que l’on utilisera pour contrer la pénurie de main-d’œuvre, il ne faut jamais perdre de vue le facteur humain, car le marché de l’emploi est composé de travailleurs et de travailleuses. Ici, les raisonnements de nature comptable n’ont pas leur place, d’autant plus que l’humain, en 2022, prend ses distances avec les générations précédentes, peu importe les transitions souhaitées. En terminant, je veux remercier Sylvain, ainsi que Guy, Émilie, Danylo, Alex et Sylviane, laquelle s’est démenée pour dénicher du papier... Vous vous rendez compte ? Trouver un imprimeur qui a du papier, de la main-d’œuvre et du temps de presse, en pleine pandémie ! Les initiés et les perspicaces comprendront que le coût de cette publication aurait pu tripler... Merci, mes amis. Grâce à vous, la confection de ce magazine demeure une fête ! n

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REPORTAGE

DYNAMISME ET RENOUVEAU CHEZ RÉSEAU ENVIRONNEMENT Entrevue avec son nouveau PDG, Mathieu Laneuville Par Guy Des Rochers

Rencontrer pour la première fois le nouveau président-directeur général de Réseau Environnement, Mathieu Laneuville, suscite immanquablement de la curiosité et de l’étonnement. Il paraît si jeune ; comment peut-il être le PDG de la plus importante organisation en environnement au Québec ? « J’ai quand même 35 ans », affirmet-il, le regard narquois. Et toujours en souriant, il ajoute, dans une formule dont il a le secret : « Ma jeunesse, c’est un défi que j’essaie d’améliorer chaque jour, et ce qui est le fun avec ça, c’est que de jour en jour, je vieillis… » Sur un ton moins badin, il souligne à quel point Réseau Environnement, qui fête cette année ses 60 ans, ne craint pas de se renouveler en envoyant le signal à la relève qu’elle est la bienvenue dans

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ses rangs. « On le voit à l’international : des figures de plus en plus jeunes s’impliquent en environnement, et Réseau adhère fièrement à ce mouvement », indique celui qui occupe les fonctions de président-directeur général depuis le 1er janvier 2022. M. Laneuville aime rappeler que son style de gestion est axé sur une approche collaborative plutôt qu’autoritaire. « Je rassemble, je recherche les consensus, je fédère. Cela me permet aussi d’enlever des barrières compétitives : on va s’amuser et on va collaborer avec moi. »

Un expert en environnement Pour Richard Mimeau, directeur général du CETEQ (Conseil des entreprises en technologies environnementales du Québec), Mathieu Laneuville est avant tout un scientifique et un expert qu’il côtoie depuis déjà plusieurs années. « Un expert de l’eau et de tout ce qui touche l’environnement au Québec, dit-il. Naturellement, il connaît aussi la machine gouvernementale, et c’est un atout. Mais surtout, Mathieu est un gars qui va tendre la main, qui va collaborer, qui est ouvert à la discussion et qui est très rassembleur. »


REPORTAGE Même son de cloche du côté de Simon Naylor, cofondateur et vice-président de Viridis environnement, qui assume également la vice-présidence du secteur Matières résiduelles chez Réseau Environnement. « Mathieu, c’est la nouvelle génération, affirme Simon Naylor. Je le trouve extrêmement dynamique et intelligent. C’est un gars qui travaille beaucoup en équipe et qui recherche les consensus. Il est ouvert d’esprit, accepte les remises en question et affiche de l’écoute face à des idées qu’il n’avait pas envisagées lui-même. Il est très axé sur les résultats. Il est fédérateur et pour le poste qu’il occupe, c’est une très grande qualité. »

De la continuité Fortement identifié au secteur de l’eau — et avec raison ! — Mathieu Laneuville possède toute la compétence requise pour évoluer avec aisance dans les autres secteurs que chapeaute Réseau Environnement : Matières résiduelles ; Air, Changements climatiques et Énergie ; Sols et Eaux souterraines ; et Biodiversité. « Je suis un scientifique », rappelle-t-il. Ingénieur civil spécialisé dans le secteur de l’eau, il a obtenu un baccalauréat de Polytechnique Montréal, le prix de la meilleure maîtrise en génie de l’École de technologie supérieure (ÉTS) et un certificat en économie circulaire de l’Université de Cambridge. Au cours des deux dernières années, il occupait les fonctions de directeur général adjoint de Réseau Environnement, et il cumule plus de 12 ans d’expérience dans le secteur de l’environnement et du développement durable. Son fait d’armes est assurément d’avoir orchestré la Stratégie d’économie de l’eau potable au ministère des Affaires municipales et de l’Habitation. Le jeune PDG aime aussi rappeler que sa prédécesseure Christiane Pelchat trouvait important que la personne qui lui succède assure la continuité. Il raconte qu’il y a deux ans, celle-ci l’avait recruté afin qu’il prenne sa relève en

demeurant fidèle aux valeurs de Réseau Environnement. Elle l’avait informé qu’après quelques mois, elle lui dirait franchement s’il faisait l’affaire. Finalement, il n’aura fallu que quelques semaines pour qu’elle lui lâche : « T’es un bon fit, Mathieu ! » Les deux dernières années ont aussi permis à M. Laneuville de connaître tous les enjeux techniques de l’organisation et il a contribué à des dossiers très importants, comme l’investissement dans les infrastructures vertes pour plonger dans la transition économique vers une société carboneutre. « D’entretenir cette continuité, autant auprès de notre équipe à l’interne qu’avec nos partenaires, c’est nécessaire et rassurant, affirme-t-il. Oui, je suis le nouveau PDG, mais je respecte énormément ce que l’on a construit au fil des années, et mon intention est de continuer à bâtir là-dessus. On ne fera pas de virage à 180 degrés. » En 2020 et pendant la pandémie, Réseau Environnement a résolument pris le tournant de l’économie verte, « un pas important pour élargir la portée positive de nos actions », dit M. Laneuville. Celui-ci insiste sur la mission de Réseau Environnement, catalyser l’économie verte, la seule façon selon lui d’améliorer le bien-être humain et de viser une équité sociale en agissant pour minimiser tous les risques environnementaux. « Grâce à Réseau, on peut oser rêver encore plus loin, ajoute-t-il. Ce qui est chouette, avec l’économie verte, c’est qu’on ne parle plus seulement d’environnement, mais aussi du bien-être des individus. Parce qu’en fin de compte, il y aura toujours des bactéries et de la vie quelque part, mais est-ce que l’humain aura éternellement sa place là-dedans ? Pourra-t-il continuer à se baigner dans des lacs, à avoir accès à de l’eau potable et à de l’air respirable ? Pourrat-il compter sur des sols non contaminés et jouir d’une belle biodiversité pour les prochaines générations ? C’est cela qui m’intéresse : lier l’économie verte au trio intrinsèque que forment l’environnement, l’économie et le bien-être humain, car on fait tout ça aussi pour nous, les êtres humains. »

Le mentorat et le bénévolat, les pierres d’assise de Réseau Environnement

« SEUL, ON VA VITE, MAIS ENSEMBLE, ON VA LOIN. » Chez Réseau Environnement, il y a longtemps que l’on a compris que le mentorat permet l’apprentissage dans la continuité. D’autant plus que cette mouvance s’exerce avec passion et bénévolement par des membres de longue date qui sont retraités. « Quand je suis sorti de l’université, c’est Réseau qui m’a ouvert au monde, affirme Mathieu Laneuville. C’est grâce à des mentors bénévoles comme André Carange, Jean-Louis Chamard, Hubert Demard et Alain Lalumière, et beaucoup d’autres, qu’a été forgé l’esprit de partage et de collaboration capable d’assurer cette continuité dans la mission de Réseau. Mon cheminement, jamais je n’aurais pu le faire seul. Et c’est cela que Réseau amène aussi : seul, on va vite, mais ensemble, on va loin. » Dans cette sphère d’influence, Hubert Demard aura procuré une aide solide à M. Laneuville lorsque ce dernier était chef d’orchestre de la Stratégie d’économie d’eau potable. Actuellement retraité, M. Hubert Demard est un ancien président de Réseau Environnement, et il est reconnu comme la référence incontestée du milieu de l’eau au Québec. « Au fil de ma carrière, j’ai travaillé sur plusieurs projets, mais celui qui me tenait à cœur depuis l’obtention de ma maîtrise en 1971, c’était la consommation et

l’économie d’eau résidentielle, raconte M. Demard. L’un des comités au sein desquels j’ai travaillé a généré la Stratégie d’économie d’eau potable au moment où j’ai pris ma retraite, il y a une douzaine d’années. Ironiquement, moi qui avais travaillé là-dessus durant toute ma carrière, j’ai pris ma retraite l’année où surgissait enfin quelque chose de très intéressant dans ce domaine! Je suis donc allé rencontrer Mathieu, qui avait été mis en charge de la Stratégie, et j’ai été charmé par sa personnalité avenante. J’ai surtout très apprécié le fait qu’un jeune ingénieur accepte de se faire aider par un vieux de la vieille », ajoute-t-il, pince-sans-rire. Plusieurs rencontres ont eu lieu entre le mentor et « l’élève », Hubert Demard offrant sans réserve toutes ses connaissances et toutes ses références, qu’elles soient du Québec, du Canada, des États-Unis ou de l’Europe. « J’ai fait ce que j’ai pu pour aider Mathieu et il était prêt à se faire aider », ajoute M. Demard, en ne manquant pas de souligner la grande intelligence, la chaleur humaine et les capacités de meneur de celui-ci.

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REPORTAGE

« Son passage à notre ministère a été marquant, parce qu’il a été en mesure de rallier tous ces gens-là autour de sa mission. Il est incontestablement le père de la Stratégie d’économie d’eau potable. » Frédéric Guay, sous-ministre des Affaires municipales et de l’Habitation du Québec L’actuel sous-ministre des Affaires municipales et de l’Habitation du Québec, Frédéric Guay, connaît M. Laneuville depuis plus de dix ans. « Il est un leader incontesté, raconte M. Guay. C’est un gars de solutions, capable d’aller chercher ses partenaires pour les amener à travailler ensemble dans

un objectif commun. Son passage à notre ministère a été marquant, parce qu’il a été en mesure de rallier tous ces gens-là autour de sa mission. Il est incontestablement le père de la Stratégie d’économie d’eau potable. »

Traçabilité des sols et GMR

« C’EST AVEC DES DÉBOUCHÉS QUE L’ON SERA EN MESURE DE VALORISER NOS MATIÈRES. » – Mathieu Laneuville Deux dossiers récents du domaine de l’environnement, soit celui de la traçabilité des sols d’excavation et celui des orientations prises par le Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE) sur la gestion des résidus ultimes, ont démontré à Mathieu Laneuville l’expertise incontestée et le leadership de Réseau Environnement. « La traçabilité des sols contaminés est l’un des beaux dossiers auxquels j’ai pu contribuer, s’enthousiasme-t-il. En créant Traces Québec, Réseau est fier d’avoir participé au développement d’une technologie adaptée aux besoins de l’industrie. C’est une victoire importante pour l’économie verte, et la traçabilité est une condition essentielle à l’économie circulaire. » Mathieu Laneuville souligne que dans ce dossier, le rôle de Réseau Environnement a été de créer une étincelle. « Nos mémoires vont souvent dans le sens de la responsabilité des producteurs, cet enjeu ayant beaucoup interpellé nos membres. Nous avons travaillé avec des partenaires impliqués et consciencieux et nous sommes très fiers d’avoir passé le flambeau à Attestra, qui gère maintenant avec compétence la traçabilité des sols au Québec. » Parmi les partenaires de premier rang figurent le CETEQ et son directeur général, Richard Mimeau. « Déjà, en 2013 ou en 2014, nous discutions de la nécessité d’implanter un système de traçabilité des sols contaminés afin de mettre fin aux pratiques illégales en la matière, raconte Richard Mimeau. À l’époque, Réseau participait à nos comités sectoriels, tout comme aujourd’hui nous participons aux siens. Quand Réseau a créé l’outil de surveillance Traces Québec, nous avons appuyé la démarche. Je ne vous cacherai pas que je doutais que le gouvernement laisse un OBNL comme Réseau gérer des sols contaminés, mais le ministère a embarqué dans le projet. Je lève mon chapeau à Réseau, qui a fait la gestion des opérations et de la logistique. Le tout a été mené de main de maître. » Richard Mimeau ajoute que le leadership affiché par Réseau Environnement aura permis de créer un système qui engendre de l’imputabilité. « C’est la beauté de la chose. Les pénalités sont plus sévères, et c’est plus facile de voir qui fait quoi et où vont les sols », ajoute-t-il.

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En accord avec le BAPE Autre dossier d’envergure : celui menant au rapport du BAPE concernant la gestion des matières résiduelles. Réseau Environnement a salué les 11 orientations stratégiques du BAPE, car celles-ci vont dans le même sens que les 20 recommandations de son propre mémoire. « Chez Réseau, nous croyons entièrement à la REP [responsabilité élargie des producteurs], ainsi qu’à l’économie circulaire, explique Mathieu Laneuville. Mais notre enjeu, ce sont surtout les débouchés, et nous voulons continuer de travailler sur cet axe-là. C’est avec des débouchés que l’on sera en mesure de valoriser nos matières. » Pour le vice-président du secteur Matières résiduelles chez Réseau Environnement, Simon Naylor, le BAPE n’a pas erré et a choisi une position intéressante. Néanmoins, il aurait souhaité un peu plus d’ambition de sa part. « Voici un exemple : le BAPE met en garde contre les technologies de biométhanisation parce que c’est plus cher et que c’est plus complexe que du compostage, explique-t-il. Ce n’est pas faux, sauf que c’est un peu réfléchir en silo que de dire cela. En réalité, notre nation, voire la planète a besoin de fabriquer des énergies renouvelables à partir des matières résiduelles. C’est une manière simple, à notre portée technologique et stratégique, de faire de l’énergie renouvelable. Avec ce qui se passe en Ukraine [et le risque de ne plus pouvoir s’appuyer sur les sources d’énergie russes], croyez-moi, les Européens savent ce que représente l’autosuffisance. C’est donc un enjeu majeur. » Par ailleurs, concernant la REP, Simon Naylor se dit reconnaissant à l’État québécois d’être proactif et ambitieux dans ses objectifs de gestion propre et intelligente des matières résiduelles. Mais il y va d’une suggestion : être un peu moins axé sur l’obligation des moyens, et davantage sur l’obligation des résultats. « Un des enjeux majeurs est de compter sur des marchés pour les matières que l’on recycle. Tout ce que l’on collecte doit atterrir dans un marché. Réseau est très sensible à ça : développer à l’avenir des marchés pour recevoir ce que l’on génère. »


REPORTAGE

Se revoir en personne au Salon des teq

LE CRÉMAGE SUR LE GÂTEAU POUR LES 60 ANS DE RÉSEAU ENVIRONNEMENT ! Telle une cathédrale, Réseau Environnement s’élève dans le paysage environnemental du Québec. Ayant 2000 membres, rattachés à tous les secteurs d’activité, l’association en impose. Et cela dure depuis 60 ans ! Cette année marque aussi le retour du Salon des technologies environnementales du Québec (teq), le rendez-vous par excellence des professionnels en environnement. Avec plus de mille participants, une centaine de conférences et plus de 150 exposants, cet événement s’annonce comme de joyeuses retrouvailles. « Le Salon des teq est un excellent levier pour se rapprocher des experts de tous les secteurs, dont ceux du réseau privé, confie Mathieu Laneuville. Croyez-le ou non, en 2020, le Salon a été le dernier événement tenu avec participation publique, juste avant que tout soit fermé en raison de la pandémie, et il sera le premier dans le secteur à se dérouler en présentiel au Québec. Je constate que les membres ont très hâte de se revoir enfin en personne. Je crois que cet élément humain nous aura beaucoup manqué. » Cet événement phare de Réseau Environnement se tiendra dans la Vieille Capitale les 17 et 18 mai 2022. Notons que quelques emplacements

sont encore libres pour des exposants. Et surtout, pas d’inquiétude quant à la pandémie : « Le Salon aura lieu, avec ou sans masques, selon les recommandations de la Santé publique », ajoute M. Laneuville. (Pour plus de renseignements, consultez la page Web de l’événement à l’adresse suivante : https://reseau-environnement.com/evenements/steq/).

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Évaluation environnementale de sites

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REPORTAGE Soixante ans d’accomplissements Depuis longtemps, Mathieu Laneuville est bien au fait de la force et du pouvoir que détient Réseau Environnement sur l’échiquier environnemental. Il a pu l’observer d’abord comme membre, alors qu’il travaillait pour le gouvernement du Québec, et le constate maintenant aux commandes de la direction de ce puissant OBNL. « Réseau, c’est ce joueur qui pousse toujours à aller plus loin, exprime-t-il. Il y a quelque chose de pur dans sa mission, parce que même si tous les organismes défendent leurs intérêts, Réseau les rassemble en étant le catalyseur de l’économie verte. Dans les comités, ça bourdonne, car il y a plein de monde provenant de divers horizons. Quand Réseau accouche de solutions, on sait alors qu’il aura une excellente écoute de la part des instances du gouvernement. » Réseau Environnement a été formé à une époque où les préoccupations environnementales n’étaient pas vraiment à l’ordre du jour. Au fil du temps, après avoir été surtout centré sur les secteurs de l’eau et des matières résiduelles, Réseau Environnement s’est attaché à plusieurs autres enjeux environnementaux en ajoutant trois secteurs : Air, Changements climatiques et Énergie ; Sols et Eaux souterraines ; et Biodiversité. Ayant pris le tournant de l’économie verte en 2020, Réseau Environnement mise aussi sur une plus grande ouverture. « L’une des forces de Réseau, c’est la diversité de ses membres, dit son PDG. Actuellement, on veut recruter davantage de jeunes entreprises, miser sur la relève, les régions et intéresser les Premières Nations. Le fait de faire preuve d’inclusion et de diversité est une priorité pour nous. » n

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EN LIEN AVEC LE MINISTRE

MOBILISONS-NOUS POUR LES GÉNÉRATIONS FUTURES

Benoit Charette Ministre de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques, ministre responsable de la Lutte contre le racisme et ministre responsable de la région de Laval.

ette édition spéciale est une belle occasion pour moi de revenir sur les dernières années, qui ont été bien chargées, comme vous le savez. C’est en collaboration avec bon nombre d’entre vous que nous avons pu élaborer des réglementations qui représentent davantage les marchés de l’environnement actuel. Je vous en remercie. Votre contribution est aussi pertinente qu’indispensable et je compte sur vous pour continuer à collaborer avec nous dans les projets à venir.

C

Je voulais donc souligner les avancées qui ont été réalisées au cours de mon mandat comme ministre de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques. Je mentionnerai d’abord que nous avons procédé à l’annonce de la Stratégie de valorisation de la matière organique. Celle-ci s’étendra jusqu’en 2030 et nous permettra de dévier de grandes quantités de matières de l’enfouissement, réduisant de 270 000 t éq. CO2 les émissions de GES en 2030. Notre gouvernement est aussi allé de l’avant avec une ambitieuse réforme de nos systèmes de collecte sélective et de consigne. Cette réforme est bien enclenchée et nous souhaitons qu’elle se concrétise dans les prochains mois. La transition vers ces nouveaux systèmes se fera graduellement, de façon à ce que tous les acteurs du milieu puissent en intégrer les mesures. J’ai aussi mandaté le BAPE pour faire un rapport sur l’état des lieux et la gestion des résidus ultimes au Québec. Beaucoup d’entre vous ont été sollicités afin de participer à l’exercice, et je vous remercie de votre collaboration. Sachez que les recommandations du rapport guideront les prochaines décisions du gouvernement dans ce domaine. Le BAPE nous dit notamment que nous devrons réduire en amont la quantité de matières destinées à l’élimination et intensifier la recherche de débouchés. À cet effet, le secteur de la construction, de la rénovation et de la démolition fera partie de la solution. Plusieurs travaux ont d’ailleurs commencé, en partenariat avec les principaux joueurs du secteur. L’encadrement de l’élimination ne sera pas en reste. À cet effet, nous nous devons de déterminer les améliorations possibles à la réglementation afin de demeurer

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en tête de peloton. En augmentant les coûts de l’élimination, on stimulera toute l’industrie de la récupération et du recyclage. Enfin, nous avons assujetti plusieurs produits, tels que les gros électroménagers, certains produits pharmaceutiques, les plastiques agricoles et plusieurs autres, à la responsabilité élargie des producteurs. Bien sûr, la protection de l’environnement est en tête de nos priorités. Pensons à la conservation de la biodiversité et des aires protégées, au développement de l’économie circulaire et, bien évidemment, à la lutte contre les changements climatiques. Développer l’économie circulaire, c’est produire des biens et des services de manière durable en réduisant nos impacts environnementaux et en diminuant l’exploitation des ressources naturelles. Pour lutter contre les changements climatiques, j’ai déposé le Plan pour une économie verte 2030, qui a jeté les bases d’une économie sobre en carbone, résiliente face aux changements climatiques et plus prospère à l’horizon 2030. Un budget sans précédent a d’ailleurs été octroyé à ce plan, et il nous permettra d’atteindre des cibles ambitieuses. Toutes ces priorités, qui doivent guider nos actions quotidiennes, notre gouvernement les a faites siennes. En terminant, je souhaite souligner l’apport incontournable de Réseau Environnement, qui est au cœur des enjeux environnementaux depuis maintenant 60 ans ! Nous avons encore plusieurs défis à relever, mais je suis convaincu que nous y arriverons si tout le monde y met du sien. Mobilisons-nous ! Nous devons cette ambition aux générations futures. Je compte sur vous toutes et tous.


Leader de la valorisation des matières résiduelles au Québec


REPORTAGE

POUR VALORISER LES MÉTIERS EN ENVIRONNEMENT

ENVIROCOMPÉTENCES MISE SUR LA MAGIE DES BORNES INTERACTIVES

Par Guy Des Rochers

Face à l’actuelle pénurie de main-d’œuvre, il n’existe pas de solutions magiques, quoique… chez EnviroCompétences, les coups de baguette magique créent de petits prodiges d’innovation ! Le comité sectoriel de la main-d’œuvre en environnement s’est en effet mis en mode séduction et a innové pour capter l’intérêt des jeunes de 14 à 24 ans et des personnes issues de l’immigration, en leur faisant découvrir de manière ludique et dynamique les formations et les métiers rattachés à l’environnement. Comment ? Grâce à des bornes tactiles, interactives et animées, qui « mesurent six pieds de haut par trois pieds de large », comme l’indique, de manière amusée, Dominique Dodier, initiatrice du projet et directrice générale d’EnviroCompétences. Bien sûr, la taille de ces bornes n’est qu’anecdotique, puisque leur force réside surtout dans leur technologie et leurs actions interactives : à travers des animations, elles présentent cinq métiers du milieu de l’environnement. Toutefois, comme ces trois bornes se promèneront en 2022 dans des écoles, des organismes en employabilité, des salons de l’éducation et des foires de l’emploi de tout le Québec, gageons que leurs proportions et leur aspect technologique sauront attirer l’attention. Rassurons tout de suite les participants à l’expérience : ils ne seront pas responsables du déménagement des bornes ! Tout simplement, ils n’auront qu’à se placer devant l’une d’elles afin de découvrir les présentations animées des cinq métiers en environnement choisis : opérateur/technicien en traitement de l’eau potable, chauffeur de camion de collecte, technicien en restauration après sinistre, technicien en environnement (technicien en réhabilitation et caractérisation des sols), et opérateur de centre de tri.

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Des métiers accessibles grâce aux PAMT « Les cinq métiers choisis ne sont pas nécessairement méconnus, mais ils ont été sélectionnés parce qu’ils ne sont pas tous couverts par une formation diplômante », explique Dominique Dodier, précisant que ce n’est que le début de ce projet intitulé VERT ton avenir, et que d’autres métiers seront éventuellement présentés. « C’est la première phase du projet et celui-ci évoluera en fonction des besoins à venir, affirme Stéphanie Trudelle, directrice de la formation/projets chez EnviroCompétences. Nous déposerons une demande de financement et ensuite, nous élargirons le projet. » Parmi les métiers présentés, deux s’apprennent dans le cadre de programmes d’apprentissage en milieu de travail (PAMT), alors que les trois autres bénéficient de programmes scolaires. « Il existe quatre PAMT dans notre secteur, et ce sont des programmes d’apprenti-compagnon, dit Stéphanie Trudelle. Ces gens-là suivent un parcours avec un encadrement pédagogique et un encadrement d’expérience. Puis, au bout de six à huit mois, ils peuvent exercer le métier sans avoir de diplôme. C’est également une belle avenue pour les gens qui sont issus de l’immigration et qui veulent intégrer le marché du travail. »


REPORTAGE Une initiative applaudie Dans un contexte de pénurie de maind’œuvre qui touche grandement le secteur de l’environnement, le projet VERT ton avenir est une initiative applaudie non seulement par le secteur de l’environnement, mais aussi par la Commission des partenaires du marché du travail (CPMT). Cette dernière est une instance provinciale de concertation regroupant des représentants de tous les domaines qui se préoccupent de résoudre les enjeux des milieux de travail, tout en étant l’interface entre l’État québécois et les organisations partenariales directement touchées par l’emploi et le développement de la main-d’œuvre. « Ce que Dominique Dodier et son équipe ont fait, c’est formidable, s’enthousiasme Audrey Murray, présidente de la CPMT. Notre priorité, et ce dans quoi nous investissons, c’est notamment la promotion des professions et des métiers d’avenir pour lesquels il existe des besoins. Nous trouvons aussi très important de mettre de l’avant auprès

Voyez la vidéo en cliquant sur le lien ou en vous rendant à l’adresse suivante :

de notre jeunesse les professions et les métiers verts. Les bornes tactiles remplissent pleinement ce mandat. » L’idée de bornes tactiles interactives a germé dans l’esprit de Dominique Dodier en début de pandémie. « À cette époque, j’avais lu une publicité provenant du Japon dans laquelle on voyait des bornes interactives sur les autoroutes et dans les rues, relate-t-elle. Le concept de promotion des métiers en environnement m’est venu comme ça, tout simplement. »

Stéphanie Trudelle, directrice de la formation/projets chez EnviroCompétences

Le reste de l’histoire, c’est un projet bien ficelé, qui a profité d’un programme du ministère du Travail, de l’Emploi et de la Solidarité sociale. Par ailleurs, cette activité et sa logistique sont entièrement gratuites pour les écoles et les organismes désirant en bénéficier. Il suffit de s’informer sur le site d’EnviroCompétences à l’adresse suivante : https://www.envirocompetences.org/page/desbornes-interactives-pour-decouvrir-5-metiers-en-en vironnement/

Dominique Dodier, initiatrice du projet et directrice générale d’EnviroCompétences

DES ENJEUX DE TAILLE DANS UN SECTEUR EN ÉBULLITION En consultant la planification stratégique d’EnviroCompétences pour la période de 2022 à 2025, on constate que cet OBNL ne manquera pas de défis ! Chargée par la Commission des partenaires du marché du travail (CPMT) de nombreux mandats interreliés dans le secteur économique de l’environnement, l’équipe d’EnviroCompétences naviguera à travers plusieurs enjeux de la transition verte. Et les défis d’envergure sont loin d’être rares ! À elle seule, la pandémie a déjà fortement transformé le marché du travail, sans compter les modifications en profondeur de la main-d’œuvre que crée la nouvelle économie verte, dont

le « verdissement » de métiers d’autres secteurs de l’économie. À cela s’ajoute une forte croissance dans le secteur de l’environnement, marquée par une hausse du nombre d’entreprises, par une augmentation du nombre de postes vacants et par l’ajout de plusieurs filières liées à l’économie verte en pleine expansion ; joignons-y les difficultés de recrutement et la pénurie de main-d’œuvre.

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REPORTAGE Notons que le secteur de l’environnement a connu une augmentation de 10 % de ses établissements de 2017 à 2020. « En tout, cela représente actuellement presque 70 000 emplois très influencés et régis par les lois et les règlements environnementaux. C’est donc un secteur en effervescence », affirme Dominique Dodier. « Et comme la réglementation est en constante évolution, cela crée de grands besoins de formation », ajoute Stéphanie Trudelle.

Nouveaux règlements = impact sur la main-d’œuvre À ce chapitre, l’exemple du récent Règlement concernant la traçabilité des sols contaminés excavés, avec son chapelet de nouvelles normes, oblige les entreprises offrant ce service à se mettre au diapason des nouvelles mesures. « Ces entreprises doivent développer des compétences pour répondre aux nouvelles normes, et elles se voient dans l’obligation d’embaucher des travailleurs qui seront formés et qui deviendront aptes à appliquer la réglementation. Il en ira de même avec la responsabilité élargie des producteurs (REP), dont l’approche vise à transférer la responsabilité de la gestion des matières résiduelles engendrées par la consommation de divers produits aux entreprises qui sont à l’origine de leur mise en marché. Au bout du compte, l’ensemble des lois et des règlements influence positivement l’offre de produits et de services environnementaux », précise Dominique Dodier.

Dans son plan d’action sommaire pour la prochaine année, EnviroCompétences constate que les solutions visant à soutenir les entreprises offrant des services environnementaux devront tenir compte de ce bouquet complexe formé par une forte croissance, une pandémie qui s’étire dans le temps et une pénurie de main-d’œuvre. Parmi les solutions retenues, on insiste sur la réorganisation du travail, sur le développement des compétences et de l’expertise des entreprises, ainsi que sur l’intégration des travailleurs provenant de l’étranger. « Lors des trois dernières années, le taux d’emploi dans le secteur de l’environnement a augmenté de 10 %, contre 1,8 % pour les autres secteurs d’activité économique, indique Dominique Dodier. Si la pénurie de main-d’œuvre est en partie due au taux de croissance de notre secteur, elle est aussi consécutive aux départs à la retraite. La moyenne d’âge en environnement est beaucoup plus élevée que dans tout autre secteur d’activité économique. » Dominique Dodier signale aussi un troisième facteur influençant la maind’œuvre, soit l’augmentation du nombre d’entreprises. En effet, plus il y a d’entreprises, plus le secteur a besoin de main-d’œuvre. Autre facteur d’importance : 80 % des entreprises en environnement affirment vouloir embaucher de la main-d’œuvre sur un horizon de 0 à 24 mois.

UNE NICHE PARTICULIÈRE ET UNE MISSION UNIQUE À les voir se démener afin de soutenir les entreprises du secteur de l’environnement pour qu’elles puissent compter sur une main-d’œuvre de qualité et en quantité suffisante, on pourrait penser que l’équipe d’EnviroCompétences est constituée d’un grand nombre de personnes. Mais elles ne sont que dix ! Et toutes des femmes, d’ailleurs ! Pourtant, curieusement, seulement 29 % des postes du secteur de l’environnement sont occupés par des femmes. « Jusqu’à maintenant, notre équipe a été accaparée par d’autres enjeux prioritaires, mais nous allons bientôt produire une étude afin de tracer un portrait des femmes qui travaillent en environnement, révèle Dominique Dodier. Par la suite, nous serons en mesure de dresser un plan d’action pour trouver des solutions afin d’augmenter le taux d’emploi des femmes dans le secteur de l’environnement. » Avoir recours à ce bassin de travailleuses potentielles en environnement est l’une des solutions à envisager pour faire face aux enjeux énormes du marché du travail. « Les défis de main-d’œuvre sont nombreux et risquent d’augmenter au fil du temps, précise pour sa part Roger Tremblay, sous-ministre associé responsable d’Emploi-Québec et secrétaire général de la CPMT au ministère du Travail, de l’Emploi et de la Solidarité Sociale (MTESS). Mais là où EnviroCompétences tire son épingle du jeu, c’est que cet organisme interagit transversalement avec les autres secteurs d’activité économique. »

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En considérant l’implication d’EnviroCompétences dans son domaine, M. Tremblay affirme que cet OB N L constitue l’un de ses gros comités sectoriels. « Bien sûr, la protection de l’environnement, la transition énergétique et la transition verte sont des enjeux majeurs, mais tous les secteurs d’activité économique y font

face, pas seulement celui de l’environnement. EnviroCompétences aura donc sans doute à conseiller et à soutenir d’autres secteurs, surtout dans le cadre du défi mondial de réduction des émissions de gaz à effet de serre, qui sera très porteur d’emplois nouveaux et de transformation des emplois. »

« Personne au Québec ne fait ce que nous faisons. EnviroCompétences occupe vraiment une niche particulière, avec une mission unique. »


REPORTAGE Un leadership appelé à s’élargir Même son de cloche du côté d’Audrey Murray, présidente de la CPMT. « EnviroCompétences sera amené à exercer un leadership important dans le monde de l’emploi dans les prochaines années, affirme-t-elle. Il le fait déjà, mais son leadership sera appelé à s’élargir. En ce moment, bien sûr, l’équipe de Dominique Dodier fait des miracles dans l’acte d’accompagner le secteur de l’environnement, mais comme les

enjeux de la transition verte touchent l’ensemble des secteurs de l’économie ou presque, EnviroCompétences aura une expertise et un leadership à exercer pour accompagner ces autres secteurs. » Pour sa part, Dominique Dodier, qui n’est jamais à court de créativité, souhaite cependant que tous comprennent bien la mission d’Enviro-Compétences. « Personne au Québec ne fait ce que nous faisons. EnviroCompétences occupe vraiment une niche particulière, avec une mission unique. Nous ne

sommes pas dans l’innovation, c’est-à-dire que nous n’aidons pas les entreprises à innover ou encore à exporter. Nous ne faisons pas de plan de développement commercial. Nous ne faisons pas de lobby. Nous sommes neutres et objectifs. De plus, nous n’avons pas de membres, mais nous avons des partenaires avec qui nous travaillons en collégialité et en fonction de leurs besoins. » Développer et former la main-d’œuvre au service de l’environnement et du développement durable, telle est, en résumé, la mission — accomplie ! — d’EnviroCompétences.

LA TRANSITION VERTE EST EN MARCHE, PÉNURIE DE MAIN-D’ŒUVRE OU PAS… Le gouvernement du Québec a déjà lancé son Plan pour une économie verte, un projet ambitieux jetant les bases d’une économie sobre en carbone, résiliente face aux changements climatiques et plus prospère à l’horizon 2030. Voilà pour les objectifs. Toutefois, l’enjeu d’un accès à une main-d’œuvre disponible et qualifiée pour réaliser ce programme demeure de taille. « Jusqu’à tout récemment, on parlait de rareté de main-d’œuvre, laquelle est définie par un faible taux de chômage et un nombre élevé de postes

vacants, en particulier les postes vacants depuis plus de 90 jours, ce qui dénote une difficulté de recrutement, explique Roger Tremblay. Toutefois, on a basculé en pénurie de main-d’œuvre en vertu d’un troisième élément qui s’est ajouté et qui risque d’être durable : la hausse des salaires comme attrait à l’emploi. »

Le secteur de l’environnement, en croissance accélérée, vit les mêmes enjeux de main-d’œuvre que tous les autres secteurs d’activité économique. La différence, c’est qu’il est appelé à croître en lien avec le virage vert.

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REPORTAGE « Dans le groupe des 15-59 ans, le Québec est dans le top 3 des États de l’OCDE ayant le plus fort taux d’activité. » Roger Tremblay, sous-ministre associé responsable d’EmploiQuébec et secrétaire général de la CPMT au ministère du Travail, de l’Emploi et de la Solidarité Sociale (MTESS)

« Comment les emplois de ce secteur vont-ils évoluer ? Une étude récente du Fonds monétaire international avance que dans les dix prochaines années, ou d’ici 2030, seulement 1 % des emplois des pays membres de l’OCDE évolueront en raison de l’implantation de l’économie verte, 1 % seulement des emplois seront transformés par les impacts de nouvelles normes environnementales. C’est peu et c’est lent », ajoute M. Tremblay. À ses yeux, la lenteur des gouvernements à réagir à des rapports sur l’état des lieux des GES, par exemple, est en cause. Même si des orientations sont prises, la réglementation et la législation portent souvent au-delà de 2030, voire de 2035 (par exemple, la fin des véhicules à essence est prévue pour 2035). Alors, « il va sans dire que l’aiguille ne bouge pas si rapidement que cela », explique-t-il.

Convaincre les 60-69 ans de rester en emploi Par ailleurs, selon M. Tremblay, le taux d’activité des 15-64 ans continuera de décroître jusqu’en 2030, et il devrait reprendre un peu à compter de 2031, de sorte que les dix prochaines années risquent d’être difficiles.

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« Dans le groupe des 15-59 ans, le Québec est dans le top 3 des États de l’OCDE ayant le plus fort taux d’activité. Donc notre monde travaille, affirme-t-il. Cependant, en ce qui concerne la catégorie des 60-69 ans, nous nous retrouvons parmi les derniers de classe, sans doute à cause du taux de syndicalisation relativement élevé au Québec (plus de 40 %), surtout dans le secteur public. Ces travailleurs profitent souvent d’un régime de retraite à prestations déterminées, ce qui fait en sorte qu’ils quittent leur emploi plus tôt. Donc, si on a des gains à faire sur le plan du taux d’activité, c’est dans cette catégorie. » Selon lui, les solutions ne sont peut-être pas à la portée de toutes les entreprises, mais celles qui le peuvent doivent faire en sorte que les employeurs deviennent attractifs en offrant, par exemple, des conditions de travail intéressantes, comme l’accommodement des travailleurs expérimentés qui veulent demeurer en emploi, mais souhaitent réduire leur semaine de travail. À l’heure où la pénurie de main-d’œuvre représente un réel défi, voilà une belle occasion pour les entreprises de penser différemment et de faire preuve de créativité. Tous en sortiront gagnants. n

» Expertise Expertise en économie circulaire circulaire »T Technologies environnementales environnementales inno innovantes vantes echnologies e » Caractérisation de matières matières » Développement Développement de produits produits » Recherche Recherche de marchés marchés » Formations Formations et conférences conférences

25 ans de réalisations À l’aide de ses formations et de ses multiples outils, EnviroCompétences accompagne depuis maintenant 25 ans les entreprises du secteur de l’environnement en les soutenant et en les encourageant à adopter les bonnes pratiques en matière de ressources humaines. Forte de son expertise unique, elle contribue également à la connaissance du marché du travail dans le domaine. Une aide inestimable pour un secteur d’activité qui a le vent dans les voiles !

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SUR LE RADAR

NOUVELLE USINE DE BIOCARBURANTS À VARENNES

LES DÉCHETS DES DÉCHETS Guy Des Rochers Rédacteur

a technologie brevetée est tellement innovante que de gros joueurs internationaux se sont joints à elle pour la construction d’une usine de 875 M$ à Varennes, dans une contribution sans précédent à l’économie circulaire et à l’accélération de la transition verte.

S

« Ce projet, qui était dans nos cartons depuis longtemps, a réussi à attirer des partenaires de calibre mondial comme Shell (l’investisseur principal), Suncor et Proman », raconte Charles Tremblay, vice-président responsable de l’exécution de projets chez Enerkem. Avouons que ce partenariat avec des pétrolières multinationales est plutôt impressionnant. « En effet, ajoute M. Tremblay, des pétrolières de cette envergure qui cherchent à décarboner leurs activités, il n’y en a pas beaucoup ! De surcroît, ce partenariat attire sur Enerkem le regard d’autres entreprises, et disons que ça fait sonner le téléphone ! » EN PLEIN DANS LA CIBLE DE L’ÉCONOMIE CIRCULAIRE Comme modèle d’économie circulaire, il est difficile de trouver mieux actuellement que l’idée révolutionnaire exploitée par Enerkem. « Il s’agit d’utiliser une ressource abondante : matières résiduelles destinées à l’enfouissement, rejets des centres de tri, biomasse forestière résiduelle, résidus de textiles et plastiques non recyclables, déchets ligneux ou contenants alimentaires souillés, dit M. Tremblay. Grâce à notre technologie, ces résidus sont ensuite gazéifiés et purifiés afin de produire un alcool, du biométhanol, ou un autre type de carburant circulaire. Notre technologie permet également de fabriquer des produits chimiques circulaires qui se retrouvent dans des produits de tous les jours comme la peinture, les solvants, les colles, les plastiques et même les textiles. »

FONT LE BONHEUR

D’ENERKEM

Enerkem, une entreprise née au Québec il y a une vingtaine d’années, possède une technologie inédite capable de transformer les déchets non recyclables et non compostables en biocarburants propres et en produits chimiques circulaires. Alors que partout, dans l’industrie mondiale de l’environnement, on cherche des moyens d’abandonner une économie linéaire dans laquelle on prend, fabrique, utilise et élimine, voici que l’approche d’Enerkem favorise enfin un modèle d’économie circulaire digne de ce nom, où on réduit, réutilise et recycle. De plus, cette technologie devient une solution de gestion durable des déchets, complémentaire au compostage et au recyclage. UNE USINE PHARE POUR BIOCARBURANTS L’usine RCV (pour Recyclage Carbone Varennes) aura aussi le mérite de produire des biocarburants de deuxième génération. « La première génération de biocarburants utilisait comme matière de base des produits agricoles, comme le maïs, ce qui enlevait beaucoup de terres agricoles destinées à l’alimentation, explique M. Tremblay. En revanche, la deuxième génération a recours à des matières qui sont rejetées, ce qui a aussi le mérite de réduire les volumes de déchets enfouis et d’éviter de créer ou d’agrandir des sites d’enfouissement. »

Québec sera aussi un partenaire de premier plan puisque la société d’État pourra offrir sa capacité hydroélectrique excédentaire afin que l’usine mette à profit l’hydrogène et l’oxygène renouvelables produits par électrolyse. D’ailleurs, cette conversion proviendra d’un électrolyseur de grande puissance construit en partenariat avec Hydro-Québec. Le procédé thermochimique exclusif d’Enerkem s’avère une solution d’importance en vue de la transition énergétique planétaire, « car il permet le recyclage du carbone et de l’hydrogène contenus dans des matières non recyclables en prenant presque n’importe quelle sorte de déchets », explique M. Tremblay.

L’usine RCV, dont les activités devraient débuter en 2024, fabriquera en premier lieu du biométhanol. « Le projet de Varennes est davantage orienté sur les biocarburants, mais au cours de la première phase des activités, c’est du biométhanol qui sera généré, explique M. Tremblay. C’est un carburant que l’on peut utiliser dans les bateaux en plus d’être à la base de la pétrochimie. Donc, dès le départ des activités, nous entrerons dans une économie circulaire. »

À terme, l’usine de Varennes utilisera à peu près 200 000 tonnes de matières résiduelles et de biomasse afin de produire chaque année 125 millions de litres de biométhanol. Actuellement, c’est l’Europe qui accapare le gros du marché du biométhanol. « Notre produit vise la navigation comme débouché, afin de décarboner le transport maritime. Dans une seconde phase, nous fabriquerons des biocarburants pour les moteurs à combustion des automobiles au cours de la transition nécessaire menant aux véhicules tout électriques et peut-être, même, des biocarburants pour l’aviation », précise Charles Tremblay.

UN IMMENSE MARCHÉ Comme le précise M. Tremblay, Enerkem profite de l’ouverture de nouveaux marchés grâce à la validation technologique conférée par ce partenariat. « Pour ces multinationales, l’usine de Varennes deviendra en quelque sorte le projet phare du déploiement de notre technologie partout dans le monde. C’est donc un projet très catalyseur pour nous. » En outre, Hydro-

Il va sans dire que le marché est immense. Par exemple, un bateau transcontinental utilisera quelque 50 000 tonnes de biométhanol par année. L’usine de Varennes en produira pour plus de 100 000 tonnes. « Le biocarburant de l’usine de Varennes pourra donc décarboner environ deux bateaux par année. Nous ne sommes alors pas inquiets de trouver preneur pour nos produits », conclut M. Tremblay.

« L’usine de Varennes deviendra en quelque sorte le projet phare du déploiement de notre technologie partout dans le monde. » – Charles Tremblay, vice-président responsable de l’exécution de projets chez Enerkem

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LE RAPPORT DU BAPE COMME FER DE LANCE D’UNE NOUVELLE APPROCHE EN GMR

CETEQ

Richard Mimeau Directeur général Conseil des entreprises en technologies environnementales du Québec (CETEQ) rmimeau@ceteq.quebec

U

n peu plus de trois mois se sont écoulés depuis la publication du rapport du Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE) intitulé L’état des lieux et la gestion des résidus ultimes. Malgré l’importance du dossier et la qualité du travail des commissaires, ce rapport n’aura malheureusement pas eu de visibilité médiatique au-delà de sa journée de parution. Le Conseil des entreprises en technologies environnementales du Québec (CETEQ) souhaite donc à sa façon le faire rayonner en vous faisant part d’une partie de sa réflexion.

Pour plusieurs, la publication de ce rapport marquait la fin de la démarche. Pour le CETEQ, ce document est plutôt le fer de lance d’une nouvelle approche dans la GMR qui mettra à l’avant-plan les termes innovation, économie circulaire, réduction à la source, responsabilisation et obsolescence programmée. Bien que ce rapport n’ait pas force de loi, il demeure néanmoins un document de travail important sur lequel le gouvernement devra appuyer ses prochaines décisions relatives à la GMR. UN TRAVAIL RIGOUREUX DE LA PART DU BAPE L’importance que l’on accorde à un document repose non seulement sur sa nature, mais aussi sur la rigueur qui a conduit à son élaboration. Permettez-moi de donner quelques chiffres qui illustrent ce

sérieux : 623 pages, 301 constats, 112 avis, 11 orientations stratégiques, 583 documents déposés, 189 mémoires présentés et un an de travail. Un dernier chiffre, mais non le moindre : 360. À quoi fait-il référence ? À l’approche globale de 360 degrés dont ont fait preuve les commissaires dans leur rapport. En effet, ils ont réalisé un travail complet en regardant l’ensemble des éléments de la GMR : le cadre législatif et réglementaire, les politiques, les stratégies, les redevances, le financement, les objectifs, les rôles et responsabilités des acteurs publics et privés, les enjeux sociaux, économiques, environnementaux et même planétaires, l’acceptabilité sociale et les procédés d’élimination et de valorisation… Ils sont même remontés à la gestion des déchets à l’époque de la Nouvelle-France, c’est tout dire ! Rien ne fait l’unanimité dans la vie, mais disons que la démarche suivie par les commissaires dans leur rapport s’en approche drôlement. QU’EN RETIENT-ON ? Il serait hasardeux de résumer les 623 pages en quelques mots, mais plusieurs éléments émergent de ce rapport : = Les entreprises privées du domaine de la GMR font un excellent travail. = L’innovation est la clé du succès pour surmonter les défis de la GMR. Le BAPE est d’avis que celle-ci devrait faire partie intégrante de la mission de RECYC-QUÉBEC et que cette dernière devrait bénéficier de plus grandes responsabilités sur le terrain. = Plusieurs technologies de traitement des matières résiduelles sont disponibles, mais leur plein potentiel est multifactoriel (l’opérateur, le tonnage, le type et la provenance des matières traitées, etc.).

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LE RAPPORT DU BAPE COMME FER DE LANCE D’UNE NOUVELLE APPROCHE EN GMR

= En réponse à plusieurs inquiétudes émises par la société civile à propos des techniques d’élimination et de valorisation, les commissaires ont apporté un éclairage permettant de comprendre la situation. = Là où des interrogations citoyennes subsistent, le BAPE demande aux autorités gouvernementales de réaliser des études pour déterminer leur bien-fondé. PEUT-ON FAIRE MIEUX ? Évidemment, le BAPE n’a pas produit un rapport pour dire que tout allait bien. Les chiffres confirment que la tendance à la hausse de l’élimination est un signe que la société se dirige dans la mauvaise direction. La société peut faire mieux, mais surtout, elle doit faire mieux. Le BAPE a émis plusieurs avis adressés à l’ensemble de la chaîne de valeur qui pourraient favoriser la diminution de l’enfouissement : = Les producteurs doivent favoriser l’écoconception et l’utilisation de matériaux recyclés pour les produits. = Les consommateurs doivent faire une meilleure application du principe des 3RV-E : réduire à la source, réemployer et recycler. = Les entreprises en GMR doivent réduire leurs émissions de GES et trouver des débouchés locaux pour les matières. = Le gouvernement doit mettre davantage de mesures en place pour encourager la réduction à la source et le réemploi ainsi que pour lutter contre l’obsolescence programmée. Il doit aussi se concentrer sur les grands générateurs de matières résiduelles, soit les institutions, commerces et industries (ICI), ainsi que sur les résidus provenant du secteur de la construction, de la rénovation et de la démolition (CRD).

= La société doit changer son mode de consommation linéaire (extraire les ressources, fabriquer le produit, le consommer et le jeter) pour privilégier l’économie circulaire, qui consiste en une meilleure application du principe des 3RV-E, et en optimisant l’utilisation des ressources existantes. QUE NOUS RÉSERVE L’AVENIR ? Plusieurs avis du BAPE rejoignent les engagements du gouvernement du Québec annoncés dans la Stratégie de valorisation des matières organiques, publiée en 2020, dont l’objectif est de réduire leur enfouissement. Parmi ces mesures figurent la collecte des matières organiques pour les villes et les ICI, le détournement des résidus de CRD des lieux d’enfouissement et la hausse de la redevance à l’enfouissement. L’un des engagements forts de cette stratégie est la modernisation du système de collecte sélective, qui favorisera le déploiement d’une économie circulaire et par conséquent diminuera l’enfouissement. Cette modernisation passe par l’implantation d’une responsabilité élargie des producteurs. Un projet de règlement à ce sujet a été publié à la fin janvier et son entrée en vigueur progressive est prévue au début de 2023. Comme toujours, le CETEQ accompagnera ses membres dans cette transition. Grâce à leur expertise, à leurs ressources et à leurs équipements, nos membres pourront à leur tour aider les organismes publics et privés à relever les défis environnementaux auxquels nous sommes confrontés. n

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Nous accompagnons les ICI dans la gestion de leurs matières résiduelles COLLE COLLECTE CTE ÉQUIPEMENT ÉQUIPEMENT CONSEIL CONSEILS S

www.ttienvironnement.com www .ttienvironnement.com 24 LE MAGAZINE DES MATIÈRES RÉSIDUELLES AU QUÉBEC 3RVE VOL. 18 N O 1 HIVER 2022

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ÉCONOMIE CIRCULAIRE

Daniel Normandin Biol., M. Sc., MBA Directeur Centre d’études et de recherches intersectorielles en économie circulaire (CERIEC) daniel.normandin@etsmtl.ca Avec la collaboration de Marc Journeault

L

es tribulations récentes liées à l’affaire Ricova et la sortie, également récente, de la mairesse de Montréal, Valérie Plante, sur la nécessité de s’attaquer dès maintenant à l’enfouissement de nos matières résiduelles par une écofiscalité appropriée ne sont que deux manifestations d’un ensemble de faits qui pointent dans une direction évidente, mais complexe à mettre en œuvre : la réduction à la source et la circularisation de l’économie. C’est également ce qui ressort du rapport du Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE) publié le 25 janvier dernier. Plusieurs citoyens, dirigeants d’entreprises et gouvernements perçoivent encore le recyclage comme le Saint-Graal pouvant résoudre nos problèmes environnementaux ainsi que comme la manifestation concrète d’une économie circulaire, ce qui n’est malheureusement pas le cas. Premièrement, le bac bleu (ou vert) ne vise qu’à collecter les imprimés et les emballages. Comparativement à l’empreinte environnementale des produits eux-mêmes, celle des emballages ne représente tout au plus que 10 %. Aussi, il est étonnant de constater, après plus de trente ans de collecte sélective et de multiples campagnes de sensibilisation, qu’une frange importante de la population québécoise dépose encore dans son bac toutes sortes d’articles autres que les emballages et les imprimés, lesquels viennent perturber les activités de recyclage et contaminer les flux de matières. Un autre enjeu important réside dans le fait qu’une part importante de la population n’est pas encline à faire l’effort d’aller porter ses produits en fin de cycle ou de vie dans les écocentres. À sa décharge, leur emplacement et leurs heures d’ouverture limitées constituent sans doute des freins importants. Le résultat de tout ça ? Des sites d’enfouissement qui débordent et la nécessité sans cesse renouvelée de développer de nouvelles cellules pour accueillir de plus en plus de matières résiduelles. Ajoutez à cela les faibles coûts d’enfouissement qui prévalent au Québec et vous avez une combinaison parfaite pour le maintien d’une économie linéaire axée sur la dilapidation des ressources et responsable d’une part importante des émissions de GES que l’on cherche à réduire (les sites d’enfouissement représenteraient en effet environ 23 % des émissions de méthane au Canada). Mais comment réduire à la source la production de déchets ? La réponse simple serait d’internaliser la totalité des répercussions environnementales et sociales (que l’on nomme « externalités ») dans le prix des matières premières qui composent les produits. Cette opération décuplerait évidemment le coût de revient des manufacturiers, lesquels refileraient bien entendu la facture aux détaillants, qui augmenteraient ensuite les prix pour les consommateurs. Cela peut paraître draconien, mais en réalité, ces coûts existent bel et bien et finiront par être assumés par les générations suivantes. Autrement dit, nous vivons à crédit sur le plan environnemental. Cela dit, les politiciens sont en général allergiques à ces mesures impopulaires, et les accords commerciaux qui lient le Canada à ses partenaires économiques ne permettent pas aisément d’inclure une « taxe » environnementale sur les matières premières ou sur les produits finis. Il n’est pas impossible d’y arriver, mais cela va prendre du temps, beaucoup de temps ; un luxe que nous n’avons collectivement pas. Mais alors, comment stimuler le premier « R » du 3RV-E, soit la réduction à la source, dans un tel contexte ?

L’économie circulaire, dont l’objectif est de conserver sur le marché la valeur des produits et de leurs composants qui y circulent, en vue de réduire le recours aux ressources vierges et de cesser l’élimination, repose sur une série de stratégies divisées en quatre groupes : (1) celles qui s’attardent à la reconception et à la fabrication des produits ; (2) celles qui cherchent à intensifier l’usage des produits, par exemple grâce à l’économie de partage et à la mutualisation ; (3) celles qui favorisent l’allongement de la durée d’usage des produits, comme la réparation et le reconditionnement ; et (4) celles qui permettent la réintroduction des matières dans l’économie, comme par le recyclage, ou leur valorisation (par exemple, énergétique). Toutes ces stratégies permettent de maintenir les produits et leurs composants le plus longtemps possible sur le marché et, de fait, de réduire le recours aux matières vierges pour répondre à la demande. Comme cette dernière est corrélée à l’accroissement de la population et de ses besoins, et que la matière finit par se dégrader, le besoin en ressources vierges sera toujours présent, mais l’idée est d’en réduire le taux de prélèvement. Parmi les solutions les plus prometteuses associées à l’économie circulaire et permettant de stimuler le premier « R » du 3RV-E (et donc de réduire la consommation de ressources vierges), on trouve l’économie de fonctionnalité. Selon cette pratique d’affaires, une entreprise manufacturière demeure propriétaire de ses produits (son capital matière), dont elle vend l’usage ou une performance, et non le produit lui-même. Ce modèle présente plusieurs avantages tant sur le plan environnemental que sur le plan économique. Pour qu’il soit rentable, toutefois, la performance offerte doit reposer sur des produits durables, réparables, évolutifs et dont les composants doivent être réutilisables et en bout de piste recyclables. Ainsi, d’un client à l’autre, moins le manufacturier doit intervenir sur son produit, plus il accroît sa marge bénéficiaire. Ce modèle d’affaires implique toutefois la définition d’un nouveau type de « partenariat » avec les distributeurs et les consommateurs, la création d’outils de traçage des produits dans la « boucle » de valeur, l’établissement d’une nouvelle approche logistique (inverse) qui permet de ramener le produit du consommateur vers le manufacturier, et la mise en place de nouveaux types de soutiens de la part des institutions financières, des investisseurs et des assureurs. Encore peu répandue, l’économie de fonctionnalité fait présentement l’objet d’un projet pilote dans six territoires québécois auprès d’une vingtaine de PME, l’idée étant de dégager des lignes directrices et d’encourager davantage d’entreprises à adopter ce modèle. Quoi qu’il en soit, même si l’économie circulaire, y compris l’économie de fonctionnalité, a le potentiel de rendre caduc l’enfouissement, il n’en demeure pas moins que les citoyens des États développés (dont le Québec), grands consommateurs de ressources, devront, plus tôt que tard, se poser la question : « En ai-je vraiment besoin ? » n POUR ALLER PLUS LOIN : • Centre de transfert technologique en écologie industrielle (CTTÉI). (2021, 17 mai). 6 territoires propulsent EFC Québec – Programme d’accompagnement en économie de la fonctionnalité. http://www.cttei.com/6-territoires-propulsent-efc-quebec/ • Environnement et Changement climatique Canada. (2022, 28 janvier). Déchets et gaz à effet de serre : mesures prises par le Canada. https://www.canada.ca/fr/environnementchangement-climatique/services/gestion-reduction-dechets/solides-municipaux/dechets-g az-effet-serre-mesures-prises-canada.html • Ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques. (s. d.) L’état des lieux et la gestion des résidus ultimes. https://www.bape.gouv.qc.ca/fr/dossiers/etat-lieux-et-gestion-residus-ultimes/ • Pineau, Pierre-Olivier. (2021, 8 juin). Déchets : le Québec, cancre du Canada. L’actualité. https://lactualite.com/environnement/dechets-le-quebec-cancre-du-canada/ • Québec Circulaire. (s. d.) Stratégies de circularité. https://www.quebeccirculaire.org/static/strategies-de-circularite.html • Teisceira-Lessard, Philippe. (2022, 7 février). Montréal a déclenché un audit sur Ricova. La Presse. https://www.lapresse.ca/actualites/grand-montreal/2022-0207/recyclage/montreal-a-declenche-un-audit-sur-ricova.php • Teisceira-Lessard, Philippe. (2022, 24 février). Le rythme d’enfouissement « n’est plus soutenable », dit Plante. La Presse. https://plus.lapresse.ca/screens/4e582096-35704531-b81c-f9751c7800ea__7C___0.html

26 LE MAGAZINE DES MATIÈRES RÉSIDUELLES AU QUÉBEC 3RVE VOL. 18 N O 1 HIVER 2022

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RECYCLER LES MASQUES : UNE BONNE OU UNE MAUVAISE IDÉE ?

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Julien Beaulieu Chercheur titulaire de la Chaire de recherche sur l’écologie industrielle et territoriale (CRÉIT) Centre de transfert technologique en écologie industrielle (CTTÉI) julien.beaulieu@cttei.com Avec la collaboration de Melissa Zbacnik-D’Antonio, stagiaire en économie circulaire, et de Jean-François Vermette, directeur scientifique

our lutter contre la pandémie de COVID-19, nous avons malheureusement introduit un nouveau produit à usage unique dans notre vie quotidienne : le masque d’intervention. Si les masques en tissu tendent à avoir une empreinte environnementale plus faible, leur utilisation est toutefois découragée, voire interdite, en raison de la protection plus faible qu’ils confèrent.

P

La nécessité de protéger notre santé a pris le dessus sur notre volonté d’éliminer les produits à usage unique de nos habitudes. Que pouvons-nous faire des millions de masques produits puis jetés ? Peut-on les récupérer et les recycler, et ainsi limiter leur impact environnemental ? Pas facile, se dit-on intuitivement. Les masques sont petits, ils sont composés de plusieurs matières, et ils sont légers : il faut en collecter de gros volumes pour récupérer un faible poids de matière.

Théoriquement, la méthode de recyclage de Go Zero semble « meilleure » puisqu’elle respecte les principes du 3RVE : recycler avant de valoriser (et bien sûr, avant d’enfouir). Mais que de travail pour arriver à ce résultat, puisqu’il faut passer par une phase de mise en quarantaine ; désinfecter les masques pour détruire les agents pathogènes ; et transporter les matières dans différents points de recyclage, dans un rayon le moins éloigné possible (qui varie selon la région). Le procédé sera-t-il aussi polluant que les autres ? Nous étions curieux de le savoir ! Les trois scénarios ont été analysés selon la méthode d’évaluation de la circularité mise au point au CTTÉI. Cette méthode évalue l’adéquation de chaque scénario avec les principes de l’économie circulaire. C’est-à-dire qu’au lieu de simplement mesurer les émissions de gaz à effet de serre, on combine et on pondère des critères quantitatifs et qualitatifs : réduction des flux de matières (diminuer la consommation de ressources), ralentissement des flux (prolonger la durée de vie utile des ressources), création de boucles (recycler, composter ou valoriser) et réduction des impacts (minimiser les répercussions environnementales, économiques et sociales). Les ressources évaluées sont principalement la matière, l’énergie et l’eau. Il s’avère que le recyclage des masques d’intervention selon le modèle Go Zero a le meilleur indice de circularité.

Le fournisseur d’équipement médical Medsup, dont le siège social canadien est situé à Magog, y croit et a lancé Go Zero, un service de collecte et de recyclage des masques. Par souci d’indépendance, Medsup a mandaté le CTTÉI pour étudier la circularité du processus et comparer l’impact environnemental de Go Zero aux autres solutions de mise au rebut des masques. Suspense ! LE MODÈLE « PAYER POUR RECYCLER » Si quelqu’un est prêt à payer pour la collecte et le recyclage d’un matériau, il est toujours possible de valoriser ce matériau. La volonté étant là, le système Go Zero consiste, comme d’autres, à offrir un service de collecte et de récupération aux entreprises et aux collectivités québécoises. Pour un coût fixe, le fournisseur place une boîte de collecte dans votre communauté, votre entreprise ou votre organisme. Une fois la boîte remplie, il existe deux possibilités pour valoriser les matériaux composant les masques, et c’est là que les modèles diffèrent.

Photo : Go Zero Recycle Triage des masques en atelier d’insertion. Les masques sont soit inutilisés et en fin de vie (tri sans gants), soit usés (tri avec gants).

Dans la première option, celle de la valorisation, on achemine les masques par camion auprès d’un incinérateur et on récupère la chaleur produite. Celle-ci alimente le réseau d’énergie local. C’est le modèle de la valorisation énergétique des déchets (waste-to-energy). Au Québec, choisir ce modèle signifie transporter les matières vers les incinérateurs du nord des États-Unis.

RECYCLER, ÇA VAUT LA PEINE ! Le scénario de recyclage est plus efficace en matière de réduction des flux et des impacts que l’incinération. Le procédé génère moins d’émissions carbone. Les matières contenues dans les masques ont des débouchés directement au Québec. Enfin, le modèle participe à l’économie sociale locale grâce à la création d’emplois circulaires ouverts à des personnes handicapées ou en situation d’insertion.

Dans le cas de Go Zero, les masques sont collectés, puis démantelés dans des ateliers adaptés, à vocation d’insertion sociale : les élastiques d’un côté, la languette de métal de l’autre et enfin, le « gros » morceau en polypropylène (environ 3 g pour un masque !). Les trois matières sont ensuite réutilisées ou recyclées séparément. En particulier, le polypropylène est acheminé aux recycleurs spécialisés qui le transforment en granules de plastiques. Ces granules rejoignent le flux des plastiques recyclés qui servent à produire, par exemple, des bacs poubelles au Québec.

Il y a quelques mois, la question des masques et de leur impact environnemental générait bien des discussions. Aujourd’hui, la conclusion : quand on veut recycler, on peut. Le jeu en vaut la chandelle grâce à la volonté et à l’existence de filières de recyclage des plastiques, du métal et de l’élastique de plus en plus structurées. En plus des masques, Go Zero recycle et valorise désormais d’autres produits et instruments médicaux. Dans un esprit de responsabilisation sociale élargie de l’industrie privée, MedSup prend en charge les frais de recyclage pour ses clients.

MESURER LA CIRCULARITÉ DU PROCÉDÉ DE RECYCLAGE L’étude de circularité que nous avons réalisée a comparé trois scénarios de mise au rebut pour les masques : l’enfouissement, la valorisation par l’incinération, et le recyclage.

Le CTTÉI entend bien généraliser l’usage de son nouveau cadre d’évaluation de la circularité afin de tester des méthodes de mise en valeur des matières résiduelles et l’efficacité des technologies propres. n

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GALA Le gala EnviroLys vise à souligner l’expertise des entreprises en environnement et à promouvoir les meilleures pratiques ainsi que l'innovation dans une perspective de développement durable et d’économie circulaire. La plus récente soirée s’est tenue le 15 novembre 2021 en présence de M. Benoit Charette, ministre de l’Environnement et de la Lutte contre me me les changements climatiques, de M Lucie Lecours, ministre déléguée à l’Économie et de M Sonia Gagné, présidente-directrice générale de RECYC-QUÉBEC. De plus, l’honorable Steven Guilbeault, ministre de l’Environnement et du Changement climatique, et M. François Legault, premier ministre du Québec, se sont adressés aux participants !

Découvrez comment se sont démarquées les entreprises lauréates : PRIX INNOVATION ET PROTECTION DE L’ENVIRONNEMENT Présenté par Fondaction SANEXEN La société a ouvert un centre de valorisation des particules fines de construction et de démolition qui permet de transformer 100 % de ces débris en sous-produits de valeur, comme du compost et des agrégats de bois.

PRIX ENGAGEMENT COMMUNAUTAIRE Présenté par Durabac EBI EBI participe au développement de sa région en appuyant de nombreuses causes, y compris l’Omnium de golf EBI, dont l’ensemble des revenus sont redistribués à des organismes, des associations et des individus qui contribuent à l’amélioration des conditions de vie des jeunes.

PRIX RAYONNEMENT À L’EXTÉRIEUR DU QUÉBEC Présenté par ARPE Industries Machinex Sa présence sur tous les continents est notamment renforcée par son contrat au Royaume-Uni, dont l’objectif est de livrer l’un des centres de tri les plus automatisés au monde.

PRIX CŒUR VERT Présenté par EnviroCompétences PureSphera L’entreprise promeut l’inclusion et la formation d’employés de tous les horizons afin de contribuer à l’environnement en recyclant et en réemployant un réfrigérateur à la fois.

PRIX SANTÉ ET SÉCURITÉ AU TRAVAIL Présenté par Via Prévention Services Matrec L’entreprise intègre une formation complète, une évaluation régulière ainsi qu’un soutien à tous les niveaux afin de respecter ses engagements et ses priorités en matière de SST. Partenaire majeur de la soirée

PRIX SUPPORT AU DÉVELOPPEMENT DE L’ÉCONOMIE VERTE Présenté par Kruger ABB La société intègre la durabilité dans un objectif de création de valeur à long terme par la réduction de ses émissions de GES et son influence dans les communautés auprès de ses clients et fournisseurs. Gala Envirolys, une initiative du

PRIX PROJET VERT ICI + Présenté par Éco Entreprises Québec Avril Supermarché Avril a conçu un système combinant un tri à la source performant en succursale et une centralisation des matières résiduelles à son centre de distribution afin de maximiser la récupération. PRIX ENTREPRISE EN DÉMARRAGE DE L’ÉCONOMIE VERTE Présenté par Écotech Electro Carbon L’entreprise contribue à une économie circulaire carboneutre grâce à son procédé électrochimique qui permet de convertir le CO2, résidu provenant d’activités industrielles, en produits chimiques verts à valeur ajoutée. PRIX MENTION DU JURY Présenté par Voghel Mention décernée à Recyclage Lithion Son procédé innovateur à faible empreinte carbone offre une solution durable, rentable et locale pour le recyclage des batteries lithium-ion.

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29 LE MAGAZINE DES MATIÈRES RÉSIDUELLES AU QUÉBEC 3RVE VOL. 18 N O 1 HIVER 2022


NON, LE GOUVERNEMENT FÉDÉRAL N’INTERDIRA PAS LES PLASTIQUES À USAGE UNIQUE

CPEQ

Me Olivier Dulude Directeur adjoint des affaires publiques et législatives au CPEQ odulude@cpeq.org

L

e 25 décembre 2021, le gouvernement fédéral a déposé le projet de Règlement interdisant les plastiques à usage uniqu e. Or, contrairement à ce que laisse entendre son titre, le projet de règlement n’a pas pour objet d’interdire « les plastiques à usage unique ». Tout au plus, il propose d’interdire trois articles manufacturés en plastique conçus pour un usage unique : = Les anneaux pour emballage de boissons ; = Les bâtonnets à mélanger ; = Les récipients alimentaires destinés à servir ou à transporter des aliments prêts à consommer qui sont fabriqués à partir de certains plastiques jugés problématiques. Le projet de règlement propose également de soumettre trois autres articles à des normes de durabilité, et donc d’interdire : = Les pailles1 et les ustensiles en plastique qui se déforment si on les plonge dans de l’eau maintenue entre 82 °C et 86 °C durant 15 minutes ; = Les sacs d’emplettes en plastique, fabriqués à partir de film de plastique, qui se brisent ou se déchirent s’ils sont utilisés pour transporter un poids de dix kilogrammes sur une distance de cinquante-trois mètres à cent reprises, ou qui se brisent ou se déchirent s’ils sont lavés dans une machine à laver programmée, selon les recommandations du fabricant de la machine, pour effectuer un cycle de lavage du coton ou du lin. DES NORMES DE DURABILITÉ Ainsi, le projet de règlement propose d’obliger le recours à des pailles, ustensiles et sacs d’emplettes plus durables qui peuvent être réutilisés, par opposition à des articles qui sont conçus pour un usage unique. C’est là où le bât blesse. Certes, on fournira des ustensiles en plastique plus résistants. Mais qu’est-ce qui force ou incite le pique-niqueur qui s’offre une poutine dans un parc le vendredi à conserver, laver et réutiliser sa fourchette en plastique pour le tofu général tao qu’il prendra sur le pouce le mercredi suivant à la foire alimentaire du centre commercial ? Tout porte à croire que le comportement du consommateur changera peu du seul fait du projet de règlement et que les articles visés par une norme de durabilité ne seront pas davantage réutilisés ou recyclés qu’actuellement. Plusieurs des articles en plastique interdits seront donc remplacés par d’autres articles en plastique qui, même s’ils peuvent être réutilisés, risquent tout de même d’être jetés après une seule utilisation. UNE APPROCHE « DÉSINTÉGRÉE » Notons également que les normes de durabilité ne prévoient rien pour assurer expressément une meilleure recyclabilité ou le recyclage des solutions de remplacement. Un sac d’emplettes peut fort bien transporter un poids de dix kilogrammes sur une distance de cinquante-trois mètres

à cent reprises sans se déchirer, sans pour autant être facilement recyclable ou inclure quelque contenu recyclé que ce soit. Or, l’un des axes fondamentaux de l’approche proposée de gestion intégrée des produits de plastique du gouvernement fédéral consistait justement à favoriser le contenu recyclé dans les produits de plastique. C’est d’ailleurs une approche de ce type qui a été retenue dans la nouvelle réglementation montréalaise, qui prévoit que certains articles recyclables et fabriqués à partir de contenu recyclé seront permis lorsqu’il n’est pas possible de recourir à des articles réutilisables. Force est de constater que le projet de règlement fédéral ne s’inscrit pas dans cette orientation. Notons également qu’un nouveau document de consultation portant sur un éventuel projet de règlement sur le contenu recyclé de certains articles manufacturés en plastique a été publié le 11 février 2022, alors que la période de consultation concernant le projet de règlement tirait déjà à sa fin. En procédant par étapes, le gouvernement fédéral adopte donc une approche « désintégrée » qui ne permet pas d’assurer la cohérence du projet de Règlement interdisant les plastiques à usage unique avec la réglementation à venir concernant, notamment, la question du recyclage du plastique. Une publication simultanée de l’ensemble de la réglementation portant sur les interdictions de certains articles de plastique à usage unique, sur les exigences en matière de contenu recyclé dans les produits de plastique, et sur la responsabilité élargie des producteurs aurait permis une meilleure cohérence des instruments réglementaires à venir concernant les plastiques. À ce sujet, notons qu’un rapport récent du Comité permanent de l’environnement et du développement durable de la Chambre des communes suggère au gouvernement d’en faire plus concernant, notamment, le recyclage et la responsabilité élargie des producteurs. Bref, le projet de règlement est loin d’interdire tous « les plastiques à usage unique ». D’abord, il s’intéresse aux « articles manufacturés » et non aux « plastiques » en général. Par ailleurs, il n’interdit en réalité que trois articles en plastique. Il propose en outre des normes de durabilité pour trois autres articles, qui pourront être remplacés par des articles théoriquement réutilisables, mais sans incitatif ni obligation de les réutiliser, de les recycler ou d’assurer que leur impact environnemental sur le cycle de vie sera inférieur à celui des plastiques interdits. Le règlement aurait donc avantage à être intitulé « Règlement interdisant certains articles manufacturés en plastiques à usage unique et instaurant des normes de durabilité pour certains autres articles manufacturés en plastique » afin de refléter correctement son contenu. J’en conviens, les interdictions limitées proposées dans le projet de règlement peuvent avoir une certaine utilité. Cependant, tel que libellé et en l’absence d’une réglementation plus intégrée et englobante s’intéressant au recyclage et à l’écoconception, le projet de règlement constitue, au mieux, une avancée modeste pour la réduction de la pollution par le plastique et, au pire, un possible recul à ce sujet. n

1

Le projet de règlement prévoit des exemptions à l’interdiction des pailles, notamment pour les utilisations dans les établissements de soins.

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MARKETING RESPONSABLE

LE MESSAGE ET LES ACTIONS DOIVENT ALLER DE PAIR !

Anne Patel Présidente fondatrice Espace Kübbii inc. apatel@kubbii.com

Cela vous permet donc de vous différencier sur le marché et d’être plus crédible, dès lors que vos engagements sont suivis d’actions et de résultats. Par conséquent, vous gagnez en notoriété et augmentez votre capital de sympathie, et votre engagement devient fédérateur.

e marketing responsable (ou marketing vert) n’est pas seulement un moyen de vous démarquer. Il est surtout un premier pas vers l’amélioration de la responsabilité sociale de votre organisation, ce que la Banque de développement du Canada définit comme étant « l’idée qu’une entreprise [ou une organisation] devrait jouer un rôle positif dans la collectivité et tenir compte de l’impact environnemental et social de ses décisions1 ». Gérer votre marketing responsable, c’est être constamment à la recherche de solutions pour réduire au maximum les conséquences néfastes de vos produits et services sur l’environnement.

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Offrir à vos clients une expérience fiable et digne de confiance, avec une voix et un ton cohérents, vous aidera à attirer plus fréquemment de nouveaux clients et des clients fidèles dans votre entreprise, ce qui entraînera plus de ventes. Faut-il en dire plus ?

La volonté de faire du marketing responsable est une bonne chose, mais ce projet ne donnera des fruits que s’il est porté par de réelles convictions, appliquées à tous les niveaux de l’organisation.

Si le marketing de votre marque n’est pas cohérent, vous laissez votre public se demander ce qui est réellement au cœur de votre entreprise. Vos actions sont-elles en adéquation avec votre vision et vos valeurs ?

Plus que jamais, l’opinion des citoyens, des consommateurs, des employés et des médias influence la valeur perçue de l’organisation, sa notoriété et ses résultats financiers. Un marketing responsable saura s’appuyer sur les valeurs profondes de l’organisation pour rejoindre ces différents publics.

L’ÉCOCONCEPTION AU SERVICE DU MARKETING : LE BON MOYEN DE COMMUNIQUER SES VALEURS ÉCOLOGIQUES DE MANIÈRE CRÉATIVE Les enjeux environnementaux actuels incitent les concepteurs de produits à revoir leur manière de travailler et à créer des articles différents. La préservation des ressources, la prévention de la pollution et la lutte contre le gaspillage sont devenues essentielles dans la phase de conception et de production.

LES MULTIPLES AVANTAGES DU MARKETING RESPONSABLE Avec le marketing responsable, les organisations vont au-delà de leurs objectifs commerciaux. Parce qu’elles jouissent d’une certaine visibilité, cellesci ont un pouvoir d’influence sur le public. En revisitant les questions de production, de prix, de distribution ou encore de communication sous le prisme de l’écologie, vous vous démarquez du marketing classique. Il vous devient possible d’agir sur tous les pôles et les canaux afin de lutter pour un environnement plus sain.

1

QU’EST-CE QUE LA COHÉRENCE DE LA MARQUE ? La cohérence de la marque est à la base de l’identité de votre entreprise. Elle englobe tous les aspects du marketing, que ce soit sur le plan numérique ou dans le monde réel, pour offrir une expérience cohérente. Elle rend votre organisation reconnaissable et mémorable, quel que soit l’endroit où vous communiquez.

Banque de développement du Canada (BDC). (s. d.) Qu’est-ce que la responsabilité sociale d’entreprise (RSE) ? https://www.bdc.ca/fr/articles-outils/boite-outils-entrepreneur/gabaritsdocuments-guides-affaires/glossaire/responsabilite-sociale-d-entreprise

Les meubles, présentoirs, affichages et produits modulaires de la société Kübbii, de Vaudreuil, illustrent cette stratégie. Faits de carton recyclé et entièrement recyclables en fin de vie, après de nombreuses utilisations, ils ont été pensés afin de réduire au maximum leur empreinte carbone. Tout est

Une idée est ainsi l’écoconception, ou écodesign : « une démarche préventive qui se caractérise par la prise en compte de critères environnementaux, sociaux et économiques lors de la phase de conception d’un emballage [ou d’un produit], tout en conservant sa valeur d’usage2 ». Par exemple, on peut penser à créer du neuf à partir de matériaux recyclés au lieu de s’approvisionner en nouvelles matières premières : utiliser des rebuts de la société de consommation et en faire un nouveau produit intelligent ! 2

Éco Entreprises Québec. (s. d.) Fondements de l’écoconception d'emballages. Écoconception et économie circulaire. https://ecoconception.eeq.ca/fr-ca/ecoconception/fondements

entièrement conçu et fabriqué au Québec, dans une logique de circuit court (tous les fournisseurs de l’entreprise sont situés dans un rayon de 30 km). Ils souscrivent également à l’économie de fonctionnalité, car il est possible de les louer pour répondre à des besoins ponctuels et éviter l’usage

unique. Au-delà des mots imprimés sur ces articles multifonctionnels, leur utilisation même démontre l’engagement environnemental des organisations qui les emploient. Voilà un bel exemple de marketing responsable et de cohérence de marque !

31 LE MAGAZINE DES MATIÈRES RÉSIDUELLES AU QUÉBEC Ce texte vous fait réagir ? Faites-nous part de vos commentaires en écrivant à info@magazine3rve.cc

3RVE VOL. 18 N O 1 HIVER 2022


MATIÈRES RÉSIDUELLES : PRÈS DE 30 ANS PLUS TARD, LE MÊME DISCOURS ?

LE JURIDIQUE

Me Robert Daigneault Ad. E., avocat, biologiste et Fellow administrateur agréé Avocat principal chez Daigneault, avocats inc. robert.daigneault@daigneaultinc.com

e Bureau d’audiences publiques sur l’environnement a publié en janvier 2022 son rapport d’enquête intitulé L’état des lieux et la gestion des résidus ultimes 1. Sans surprise, non seulement le BAPE constate que le Québec n’a pas atteint ses cibles courantes de réduction de la production de matières résiduelles, mais il note que la situation a même régressé.

L

Ses conclusions sont claires. Il considère improbable l’atteinte, pour 2023, des cibles fixées dans le Plan d’action 2019-2024 2 de la Politique québécoise de gestion des matières résiduelles. Ce qui ressort également du rapport du BAPE et qui étonne, c’est l’absence de données permettant d’évaluer la portée des diverses mesures mises en place : « l’information relative aux matières résiduelles est aujourd’hui parcellaire et complexe à obtenir 3 ». Bien entendu, cela complique le choix des moyens à privilégier. Pour renverser la vapeur, la commission d’enquête formule une série de recommandations exprimées sous forme d’orientations. On peut relever notamment celles de prioriser l’économie circulaire, de revoir nos modes de consommation, de recourir à l’écofiscalité, de préconiser l’accessibilité aux données et de favoriser l’innovation. Des thèmes déjà connus, en fait. Quant au renforcement de l’encadrement législatif et réglementaire, s’il est au Québec un domaine qui a connu une importante évolution sur ce plan, c’est bien celui de la gestion des matières résiduelles. À cet égard, la décennie 1990 a d’ailleurs marqué un tournant. L’ennui, c’est qu’on a visé au départ la mauvaise cible, quoique dans de bonnes intentions. Le syndrome « pas dans ma cour » a stigmatisé les lieux d’élimination. Les entreprises environnementales (pourtant vectrices de solutions, si imparfaites fussent-elles) n’avaient pas la cote, au point où elles ont dû se regrouper pour avoir une voix. C’est ainsi qu’est née au cours de cette décennie l’Association des entrepreneurs en services environnementaux du Québec, à laquelle s’est ensuite substitué le Conseil des entreprises en technologies environnementales du Québec. Il importait de redorer auprès du public l’image de ces entreprises pourtant essentielles. LE MAUVAIS BOUT DE LA LORGNETTE Aujourd’hui, avec le recul, force est de constater que d’autres mesures auraient été nécessaires en parallèle. Les mesures législatives les plus importantes de la décennie 1990 se sont en effet essentiellement orientées vers les lieux d’élimination de matières résiduelles, avec l’adoption de deux lois venant sévèrement les encadrer : la Loi sur l’établissement et l’agrandissement de certains lieux d’élimination de déchets 4 et la Loi portant interdiction d’établir ou d’agrandir certains lieux d’élimination de déchets 5. Cette dernière décrétait un moratoire sur l’établissement ou l’agrandissement des lieux d’enfouissement jusqu’à ce que la réglementation les régissant soit modifiée. Il aura fallu plus de dix ans. On cherchait à rendre plus coûteuse l’élimination, espérant qu’ainsi les matières résiduelles soient redirigées vers le recyclage. Mais c’était comme tenter de fermer une arrivée d’eau en fermant le robinet de sortie !

vigueur la Loi modifiant la Loi sur la qualité de l’environnement et d’autres mesures concernant la gestion des matières résiduelles, le projet de loi 90 6. C’est par cette loi que le concept de « déchets » a été remplacé par celui de « matières résiduelles » et qu’a été instauré le mécanisme de planification régionale de la gestion des matières résiduelles. On y a également introduit les notions d’« élimination » et de « valorisation ». Le Règlement sur l’enfouissement et l’incinération des matières résiduelles 7, qui devait mettre fin au moratoire, a été adopté en 2006. La même année, le régime de redevances à l’enfouissement était mis en œuvre, alors que peu avant, en 2004, entrait en vigueur la réglementation relative à la compensation pour les services municipaux de récupération et de valorisation. LA TIMIDE INTERVENTION EN AMONT Il faudra attendre 2011 pour que l’on voie poindre le début d’une réglementation sur la responsabilité élargie des producteurs, si ce n’est qu’auparavant, deux règlements, l’un sur les peintures et l’autre sur les huiles usées, avaient été adoptés. Comme le note le BAPE dans son rapport 8, le ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques (MELCC) s’est d’abord concentré sur les matières résiduelles dont des composants pouvaient être dangereux. Avec l’entrée en vigueur du Règlement sur l’encadrement des activités en fonction de leur impact sur l’environnement 9 et du Règlement sur la valorisation des matières résiduelles10, c’est un autre pan de la hiérarchie des 3RVE qui se voit désormais encadré : la valorisation. Cette réglementation, toutefois, met en évidence la difficulté de composer avec la notion même de « matière résiduelle ». Ainsi, dans le Guide sur le recyclage des matières résiduelles fertilisantes de 2015 du MELCC, bien qu’on précise que les composts sont des produits fabriqués, on prend soin de rappeler qu’ils demeurent légalement des matières résiduelles. C’est un non-sens qui, à notre avis, fait obstacle au recours à ces matières. Avec la nouvelle enquête du BAPE, il semble bien que l’on ait pris davantage conscience des interventions en amont, plutôt qu’en aval comme cela s’était fait jusqu’ici. Une évidence, dirait-on ? Sans doute, mais qui se bute à un obstacle important, le comportement du consommateur, certes plus difficile à encadrer que l’exploitation d’un lieu d’élimination ou d’un centre de tri. Mais à cet égard, le BAPE est clair : Afin de se donner les moyens de ses ambitions, le Québec ne peut plus dépendre principalement de mesures volontaires pour atteindre ses objectifs11. Sans viser directement le consommateur, ce qui est envisagé, ce sont des mesures coercitives telles que l’interdiction de mise en marché et le bannissement de l’élimination. Le BAPE insiste sur l’importance d’agir rapidement en ce sens. Conclusion Le BAPE pose un diagnostic franc et direct qui, espérons-le, alignera le gouvernement sur des axes davantage porteurs. Après trente ans d’un discours réformateur qui n’a pas permis, malgré de bonnes intentions et bien des efforts, d’infléchir la courbe de production de déchets ultimes au Québec, l’intervention en amont s’impose. n 1

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Puis, en 1998, le gouvernement du Québec adoptait une première politique québécoise de gestion des matières résiduelles et, en 2000, entrait en

3 4 5

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Bureau d’audiences publiques sur l’environnement, rapport no 364. RECYC-QUÉBEC. (2019). Récupérer plus, recycler mieux – Plan d’action 2019-2024. En page 612. RLRQ, c. E-13.1, aujourd’hui abrogée. RLRQ, c. I-14.1, également abrogée.

L.Q. 1999, c. 75. RLRQ, c. Q-2, r. 19. 8 En page 343. 9 RLRQ, c. Q-2, r. 17.1. 10 RLRQ, c. Q-2, r. 49. 11 À la page 615. 6 7

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