Mayotte Hebdo n°748 (Aperçu gratuit)

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CE QUE J’EN PENSE Non, les Mahorais ne sont pas racistes ! À l’image de nombreux peuples, issus de brassages ancestraux, la population mahoraise n’est pas raciste, bien au contraire !

Événement L’économie de Mayotte en 2015

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Les Mahorais, pour des raisons historiques, géographiques, politiques ou autres, sont constitués d’un mélange d’Arabes arrivés de la péninsule arabique, ayant apporté notamment la religion musulmane, d’Africains provenant de la côte orientale toute proche avec une forte place donnée à la femme et de Malgaches voisins apportant des croyances animistes.

À l’affiche Le breakdance à l’honneur

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À ce titre déjà, ils constituent un peuple à part, original, différent même des habitants des autres îles de l’archipel des Comores. La population, comme les cultures évoluent sans arrêt, du fait de rencontres, de voyages, de choix personnels… Seuls quelques tribus d’Indiens d’Amazonie, ou les Aborigènes, et encore, ont plutôt figé leurs cultures, leurs populations, en vivant repliés sur eux-mêmes. Ce n’est pas le cas des Mahorais. Au fil des ans, des siècles, ils se sont mélangés aux Indiens, aux Créoles, aux Métropolitains, aux Africains et tant d’autres, et ont fait de cette terre, leur terre, pour un temps ou pour toujours. Les enfants qui y sont nés et ne connaissent pas Anjouan, d’où viennent leurs parents, les voyageurs, dont les pas se sont arrêtés ici il y a des générations ou des années, sont Mahorais. Tous ceux qui ont leurs parents, leur famille enterrée ici, tous ceux qui ont grandi et étudié ici, qui vivent et travaillent ici sont de fait Mahorais. Et les Mahorais ont toujours fait preuve d’un grand sens de l’hospitalité, du fait de la tradition musulmane, du fait de l’insularité, de l’éloignement des continents. La musada, le partage, le respect sont des valeurs très fortes, partagées, transmises par tous ceux qui vivent ici. Toutefois, cette île si attachante comptait 23 000 habitants il y a 50 ans, et plus de 230 000 aujourd’hui, officiellement. Le calcul est simple et explique pour beaucoup la situation actuelle. Les Mahorais ont fait un choix, pour s’extraire du joug des sultans comoriens et de leurs descendants, les grandes familles des médinas, qui maintiennent leur pays en coupe réglée et la population dans l’ignorance et l’insécurité sanitaire et alimentaire. Mayotte a été cédée à la France “en échange de l’éducation de ses enfants”, précise bien l’acte signé entre Andriantsouli et Passot. De ce choix, assumé, maintes fois réitéré, “à contre-courant de l’Histoire” disaient certains à l’époque, les Mahorais ont pu rester au sein de la République française. Ils ont pu de ce fait bénéficier d’une amélioration constante, régulière des systèmes scolaires et de santé notamment. Les infrastructures de base se sont aussi étoffées avec le port, l’aéroport, les routes, l’eau et l’électricité, aujourd’hui l’assainissement. Et il reste beaucoup à faire… L’espérance de vie, les conditions de vie se sont améliorées, les décès d’enfants en jeune âge, les si nombreux décès de femmes en couche sont de tristes, mais lointains souvenirs. Les Mahorais ont fait les efforts demandés, ils ont mis les bœufs devant la charrue, abandonné la polygamie et la justice cadiale. Ils ont changé leurs noms de famille pour beaucoup, la gestion familiale du foncier est devenue une propriété individuelle, avec les nombreux soucis que cela a causé et continue de causer. Mayotte avance, mais ce choix de la France, ces efforts de la France pour essayer de rattraper tous les retards, se heurtent aujourd’hui à une immigration clandestine massive. Les efforts conséquents sont absorbés comme dans un gouffre sans fond. Il y a encore 10 ou 20 ans, les Mahorais trouvaient du travail dans les administrations pour beaucoup et les clandestins se chargeaient du travail plus “difficile” dans les champs, à la pêche, sur les chantiers, dans les taxis… pour le compte des Mahorais, qui par ailleurs les logeaient souvent. L’État fermait les yeux pour la paix sociale, en l’absence de prestations sociales et autres assurance chômage ou retraites et se cachait derrière “les liens familiaux” qui unissaient ces îles voisines. Des M’zungus disposaient de femmes de ménage, de jardiniers à bon prix et tout le monde y trouvait son compte, dans un contexte de délinquance très limitée. Mais les places dans les mairies, au conseil général et autres administrations se faisant rares, il a fallu se lancer dans le privé… et faire face à une concurrence déloyale. Attirés par l’Eldorado que Mayotte constituait à cette époque, les clandestins sont arrivés toujours plus nombreux, les écoles se sont progressivement saturées, puis aujourd’hui les collèges et les lycées. Les hôpitaux et dispensaires se sont spécialisés sur les naissances et les enfants. Des milliers de clandestins ont été reconduits à la frontière, après un passage par le sas de l’ancien centre de rétention administrative, digne du moyen-âge et maintenu comme tel aussi longtemps que possible… Aujourd’hui, Mayotte souffre dans sa chair. L’environnement subit des dommages irrémédiables, les tortues sont braconnées pour être mangées par centaines, le lagon est pillé, les champs aussi, les forêts sont détruites. Aujourd’hui, des milliers de naissances par an du fait de femmes en situation irrégulière, des kwassas médicaux ou pas, des enfants jamais scolarisés arrivent et submergent l’île. Des enfants sont restés seuls, ont grandi en tendant la main devant les supermarchés, fouillant les poubelles pour se nourrir. Ils ont grandi, abandonnés de tous, devenant plus méchants, plus organisés, armés. Ils sont et seront là. Ils doivent manger chaque jour et faute de travail, la délinquance devient un mode de survie.

10 Les débats de Mayotte Hebdo “Ce ne sont pas des expulsions, mais des régularisations foncières” 30 jours pour sauver Mayotte

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La réponse du préfet À la rencontre de... Maymounati Ahamadi, directrice de la BGE

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Magazine Mutsamudu, l’accueillante voisine

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Mayotte AUTO-MOTO Peugeot 308 Sedan

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Ils se bougent Le comité des jeunes de Bouéni “Un espace de liberté”

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L’économie pratique de Mayotte Éco Santé : le désert Mahorais Légumes malgaches Un projet d’importation est né Frais d’itinérance téléphonique Le Sénat ne revient pas sur la suppression des coûts Portrait d’entreprise PCS, le plombier du sud

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THÉÂTRE LE BLEU D’ARMAND ÉVOQUE LA COLONISATION DU CONGO FESTIVAL DE L’IMAGE SOUS-MARINE LA DATE BUTOIR APPROCHE CARTE BLANCHE MARKUS FLEUTE AGENDA JEUX

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Football Division Honneur Agressions, vandalisme : la ligue attendue au tournant L’actu en images Une première partie satisfaisante La 6ème édition en approche Basket-Ball Championnats de France Nationales 3 / Finale zone océan Indien Les N3 en ligne de mire Une semaine en bref Résultats, Classements & Programme

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Aujourd’hui, la population est terrorisée. Il ne s’agit pas de racisme, mais d’un constat simple, mathématique, avec 40 % de la population vivant en marge de la société, cachée, terrée, sans droit ni devoir. Ce n’est pas sain ni une situation d’avenir, pour personne. Aujourd’hui, il s’agit de sauver Mayotte. Et la plus grande violence subie par ces populations migrantes est celle infligée par les autorités comoriennes qui les maintiennent dans la misère, avec pour seul espoir Mayotte. L’État a une grande part de responsabilité, dans la lutte contre l’immigration clandestine, dans la sécurité à assurer aux habitants de Mayotte, mais les parents, les élus locaux ont aussi un rôle très important à jouer pour inverser cette situation dramatique. Les drames se multiplient, les dérapages vont s’accentuer, une étincelle menace de faire exploser la marmite. Il convient assurément que chacun agisse, vite, sur le terrain, concrètement, mais pas seulement sur les conséquences avec des forces de l’ordre supplémentaires, surtout sur les causes, à leur racine, donc aussi avec l’État comorien. Non, les Mahorais ne sont pas racistes ! Ils voudraient juste pouvoir vivre en toute sécurité, disposer, à l’égal de leurs concitoyens de Métropole, d’une éducation correcte pour leurs enfants, d’un système de santé performant. L’île doit retrouver son attractivité d’urgence. Et tous ceux qui, sous prétexte d’humanisme dont nous serions dépourvus, veulent condamner les Mahorais, devraient plutôt s’intéresser au sort des Comoriens à Anjouan et à l’histoire si particulière de Mayotte et des Mahorais. Laurent Canavate

Annonces légales

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Ce que vous en dites CHRONIQUE Ce drame va se reproduire ! Nous sommes tous coupables, nous le savons depuis des années. - Immigration clandestine insuffisamment contrôlée avec reconduite à la frontière sans les enfants. - Pertes des repères d’une société entière. - Responsabilité civile peu développée en général (métropolitains inclus). - Natalité explosive des plus démunis. - Système médico-social inapproprié, conçu pour la métropole. - Des devoirs d’État confiés aux associations parfois peu efficaces et transitoires. - Défaut des structures d’accueils des enfants abandonnés. - “Décideurs de passage” (Fonctionnaires qui viennent pour seulement 4 ans et qui ne veulent pas faire des vagues politiques). - Système syndical mal compris. On barricade les routes et on paralyse et détruit l’économie (tout en sachant que les jeunes en grande partie illettrés vont profiter de cette situation pour s’amuser et pour exprimer leur colère et leur frustration concernant le manque de perspectives. Ils peuvent avoir l’impression que la police et la gendarmerie n’existent que pour se livrer des batailles). Bloquer une route sans qu’il y ait des routes ouvertes alternatives et ralentir ou rendre impossible des secours ou empêcher des citoyens de se rendre

à l’aéroport n’est pas un moyen légitime politique, mais du kidnapping collectif et ne devient pas plus juste seulement parce qu’en métropole on a l’air de faire pareil. L’État et la loi sont perçus comme des adversaires et pas comme des institutions qui donnent l’accès aux soins, à l’éducation et à la justice. Le monde est à l’envers, c’est l’anarchie qui gouverne avec pour conséquence que ce drame va se reproduire ! Le seul remède serait de mobiliser rapidement des moyens importants pour construire des structures d’accueil et d’éducation de ces jeunes abandonnés et de développer cette ile économiquement

Il faut changer la mentalité mahoraise

cette jeunesse. Cette jeunesse se retrouve livrer à elle même. Comment survivre?

Pour commencer, je voudrais vous remercier du temps de parole que vous donnez au peuple. Je suis en métropole en ce moment même, le seul et unique moyen de suivre les infos c'est via les réseaux sociaux. D'après ce que je sais notre ile est devenu un cocktail Molotov prêt a exploser, s'ajoute à cela le silence des élus et institutions. Notre île Française doit faire face a une montée de la délinquance mais aussi à une immigration clandestine INCONTROLEE. Pour un oui ou un non on nous agresse.

Daniel Zaidani est l'un des rares personnalités à faire face à cette hémorragie en mettant nos incompétents d'élus face à leurs responsabilités. Mais je voudrais demander à Monsieur Zaidani ce qu'il a fait pendant son mandat? Ce qu'il a apporté? Ce qu'il a changé? Les promesses qu'il a tenues? Quand Mayotte a été qualifiée de République en échec c'est lui qui était à la tête du Conseil General, c'est lui qui avait les moyens d'agir, c'est lui qui avait le pouvoir d'agir. Suite à la réunion entre nos incompétents élus et le Préfet, quelqu'un leur a reproché de fuir leurs responsabilités, ce n'est un secret pour personne nos élus sont des incompétents, des irresponsables. Connaissent-ils vraiment le mot

Mayotte a la plus jeune population d'Europe. Il n'y a aucune structure, aucun moyen de la part des mairies pour gérer

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MAYOTTE HEBDO N° 748 r 6 MAI 2016

et pas de la détruire. Ce développement demanderait, dans le contexte actuel de la France, du courage, de la sincérité politique, et un changement de la mentalité en général. Cela obligerait tout le monde à donner plus et demander moins, de renoncer à une partie de nos privilèges et je suis bien conscient que ça me concernera en premier lieu. C’est seulement ainsi que le développement économique de Mayotte pourrait doucement changer la situation des îles voisines et réduire la pression migratoire. Mais est-ce que ce n’est pas déjà trop tard ? Suis-je le seul à penser ainsi ? Peter Schweickhardt

responsabilité? Ils passent leurs temps à se rejeter la faute comme des gamins. Pour changer les choses il faut changer la mentalité mahoraise. A l'heure l'où on parle ici en France métropolitaine de crise avec la loi El Khomri, l'Etat n'a de temps ni pour Mayotte ni pour aucun Dom Tom. Agir en interne est devenu la seule solution mais avec nos élus c'est peine perdue. Il faut que nous Mahorais comprenions que faire campagne pour un membre de sa famille ou un ami ne nous mènera nulle part. Il faut soutenir une personne qui a un réel projet et qui a envie de changer les choses et non des guignols. Merci du temps que vous nous accordez et vive l'ile Française de Mayotte. Vive la France et vive la république Française. Maissara Attoumani


contact@mayottehebdo.com LE COURRIER DE LA SEMAINE Sauver Mayotte Mes trois grands projets (utopiques) 1) Construction dans le Sud de Mayotte d’un vivarium géant sous-marin qui accueillerait toutes les espèces vivantes recensées dans le lagon. Véritable immeuble-aquarium, le complexe bâti sous le niveau de la mer accueillerait des restaurants sous l’eau avec baies vitrées, un hôtel avec chambres aquatiques, une salle de cinéma 3D, des espaces de plongées, des piscines sous-marines, boutiques de souvenirs... 2) Construction d’un complexe de loisir dans le centre de l’ile (Mroalé/ Combani) avec centre commercial moderne dédié aux productions locales, un multiplexe 10 salles, des emplacements pour restaurants,

discothèques, salles de conférence et de réunion, hôtels... 3) Troisième grand projet : un parc d’attractions sur le thème de la piraterie située sur un ilot (Caroni, Bandrélé, Mtzamboro...) avec musée de la piraterie à Mayotte, spectacle grandeur nature, visite d’une nef marchande reconstruite en taille réelle, d’un navire de pirates récré au détail près, un espace dédié à la plongée et à la recherche de trésor sous-marin, un complexe avec piscines toboggans, restaurants, hôtels, différents stands, boutiques de souvenir... Voilà, y a plus qu’à... Promis si je gagne l’Euromillions j’investirai sérieusement sur un des trois projets.... Boina Wassi

Le poster de la semaine

Le tweet de la semaine Un sénateur musulman de #Mayotte y qui défend l'alcool. #Intégration @AbdouElkhatani (en référence au fait que le sénateur Thani a cosigné une proposition de résolution relative au maintien de la réglementation viticole)

Les commentaires sur la page Facebook (En réaction au repêchage de cinq corps de migrants retrouvés en mer le lundi 2 mai.) “Mayotte est oubliée par nos politiques. En métropole on parle beaucoup des migrants, mais même pas un petit mot pour les Anjouanais qui perdent leur vie pour tenter d’obtenir un avenir plus serein. Il faut vraiment naitre au bon endroit dans ce monde. Et j’avoue n’en avoir aucun mérite, juste de la chance. Paix à ces pauvres gens.” Daniel Charon (En réaction à l’opération anticapitaliste “Jouela comme Mayotte” du site Paris-luttes.info, qui souhaite s’inspirer du mode d’action des syndicats mahorais.) “Il faut arrêter les conneries. Une manifestation en métropole n’est pas la même qu’à Mayotte. En métropole, c’est encadré plus ou moins bien par les forces de l’ordre, alors qu’à Mayotte ils ne viennent pas, car “les routes sont bloquées”. On nous laisse nous bloquer nous même.” Abdi Asakura (En réaction à l’agression de Frédéric d’Achery, à son domicile.) “Combien de voyous trainent dehors ? Tous les jours il y en a un nouveau : combien sont-ils ? Et ils sont où ces voyous ? Partout, partout, ici, là, ailleurs. Quel climat, quelle tristesse, mais ne laissez jamais la peur vous dominer. La haine n’arrangera rien n’ont plus, on ne peut pas exterminer n’importe quel homme, c’est pas possible, c’est interdit, et ce n’est pas la bonne solution. Il faudra encore creuser dans les bons cerveaux pour trouver la bonne solution qui nous ramènera à la paix et à l’équilibre. Nous ne sommes encore qu’au début en phase d’expérimentation, en pleines turbulences, pour que plus tard nous rendions notre pays aussi propre que nous l’avons trouvé, à nos enfants.” Kala Ekraz Digo

Nouvelle photo de David Lemor, qui immortalise cette fois Musical Plage. C'est une scène de vie courante de Mayotte à laquelle il nous fait assister, avec des enfants qui jouent sur la plage à côté d'une barque traditionnelle de pêcheurs . Le tout photographié de derrière un arbre, renforçant la sensation d'un inst ant capturé en toute discrétion.

(En réaction à la publication sur Flash Info du rapport d’activité de nos sénateurs.) “Un parlementaire absent ! Il est là juste pour remplir ses fins du mois ! Alors les grands électeurs de Mayotte, pensez sérieusement à voter pour une personne compétente, ouverte, responsable et soucieuse de l’avenir de Mayotte !” Akitsa Madi

6 MAI 2016 r MAYOTTE HEBDO N° 748

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