Mayotte Hebdo n°747 (Aperçu gratuit)

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CE QUE J'EN PENSE 50 M€ et 10 mesures pour sauver Mayotte… «Le Gouvernement s’engage à étudier…» «Plusieurs hypothèses sont à l’étude…» «Le principe, le calendrier et les modalités (…) feront l’objet d’une discussion globale…» «Dans le cadre des discussions actuellement en cours…» «Sur ces bases, une réflexion sera engagée…»

Courrier des lecteurs

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Événement Politique : «Un grand pas vers l’avant»

Les «10 engagements du Gouvernement en faveur du redressement des finances des communes et du département» apparaissent surtout comme un nouveau catalogue de promesses incertaines. Les engagements chiffrés sont rares.

À l’affiche La Fête de la Nature approche

Concrètement, il faudra attendre la loi de finances rectificative pour savoir si Mayotte a été vraiment entendue, et un mois pour la présentation de mesures en faveur de la sécurité et de la lutte contre l’immigration clandestine. En attendant, il va falloir continuer à vivre barricadés, à lire ou à entendre atterrés les faits-divers qui prennent de plus en plus de place dans notre vie quotidienne.

10 Enquête MJC r Comment les rendre (enfin) utiles ? r Interview

Après une mobilisation massive de la population criant son ras-le-bol de l’insécurité et de la situation fortement dégradée à Mayotte, il faut juste espérer que nous ne soyons pas une fois encore les dindons de la farce, victimes du jeu de dupes entre l’Etat et nos élus.

14 Débat «Mayotte en sous-France» Mahamoud Azihary persiste et signe

Il faut espérer que cette rencontre, quasiment au plus haut sommet de l’Etat, avec nos plus grands élus, solidaires, ensemble (pour une fois !), ne serve pas juste certaines ambitions personnelles à l’approche des élections législatives et sénatoriales… Ce déplacement «massif» a permis d’occuper les antennes, les ondes nationales, de rencontrer des ministres et c’est une très bonne chose à mon avis que Mayotte soit ainsi entendue. Il convient ensuite de voir les résultats.

16 Magazine r La communauté Ahmadiyya revit r L’école mahoraise de la rue

Il faut espérer que les cris de victoire, assez discrets malgré tout, de nos élus - «50 millions !» - ne soient pas seulement une façade pour cacher leur grande déception qu’ils ne peuvent pas avouer, ni devant leurs «amis» du Gouvernement, ni devant leurs électeurs, grands ou petits, suspendus à cette rencontre. 150.000 € pour «une aide financière de premier numérotage des immeubles». On pouvait imaginer que cette «dotation» aurait pu être sollicitée (ou attribuée) il y a des mois, des années déjà, car cela doit être bien pratique pour diriger les secours dans les quartiers aux ruelles si étroites, sans lumière, mais aussi pour collecter les impôts locaux… «Un coefficient correcteur basé sur la progression de la population à Mayotte sera appliqué pour le calcul de la Dotation globale de fonctionnement (DGF)…» Ce qui veut dire que ce n’était pas le cas jusque là ! C’est assez gênant… D’autant que le montant de cette DGF est encore bien plus faible que partout ailleurs en Métropole et Outremer, alors que l’on est «normalement» en phase de rattrapage. Il sera effectivement bien difficile de rattraper ceux qui sont loin devant nous, en allant moins vite ! Ces mesures résonnent donc comme un catalogue d’évidences, mais absolument pas comme une promesse de relance de Mayotte. D’autant plus que dans les «50 millions !» annoncés, il y a 32 M€ d’argent des impôts collectés par le département la dernière année de la fiscalité locale, validés dans son budget… et réclamés ensuite mesquinement par l’Etat. Il ne s’agit donc pas d’une aide nouvelle, pour faire face aux besoins si criants de Mayotte, mais d’argent déjà collecté, et dépensé… Comptablement, cela se déduira juste du déficit du département. Alors y a-t-il tout de même moyen de se réjouir de cette rencontre ? Dans un avenir assez lointain peut-être, en partie, avec le 10ème point : «en lien avec le CNFPT, l’Etat soutiendra la mise en place d’un plan ambitieux de formation au bénéfice des agents des communes et du département». Quand la Cour des comptes parlait d’une «départementalisation mal préparée» dans son excellent rapport, que tous nos dirigeants devraient lire, on parle bien de cela… Il aurait fallu lancer ce plan il y a 5 ou 10 ans en arrière, voire même plus. Cela avait été évoqué. Il y avait eu quelques tentatives, quelques ébauches, mais sans plus. Et si ce plan se met enfin en place, tant mieux, mais il faudra que les salles de formation soient pleines tout au long de la formation… pas seulement le premier jour comme cela a été tant de fois le cas, avec des formations pourtant si intéressantes de la part du CNFPT. Il y a matière à un léger espoir aussi avec la régularisation foncière (15.000 titres de propriété en souffrance) où l’Etat «pourra apporter son aide», et avec la DGF qui progressera («3,5 M€ de gain attendu»). En attendant de valider toutes ces promesses dans la loi de finances rectificative et le «plan global» contre l’insécurité et l’immigration clandestine qui sera présenté «d’ici un mois», espérons que Mayotte n’aura pas ramassé que des miettes et qu’il faille attendre de nouveaux drames, de nouvelles vagues de violence, pour être entendus à nouveau. Espérons que «l’évolution du mode de scrutin actuellement en vigueur pour les élections départementales», avec «une augmentation mesurée du nombre d’élus», promise par le Premier ministre, ne soit pas la pommade pour faire passer ces miettes… Il n’a pas été question du système éducatif saturé, de l’hôpital au bord de l’asphyxie, de l’attractivité en berne, de l’économie à l’agonie sur fond de violences exacerbées. Il n’a pas été question de négociations à envisager avec les Comores ou de la Zone franche globale pourtant indispensable pour relancer l’île. Il n’a surtout pas été question de tous les atouts que Mayotte pourrait valoriser pour trouver toute sa place dans la région et proposer un jour un espoir à tous ses enfants. Laurent Canavate

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Pratique Occuper ses vacances

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Mayotte AUTO-MOTO Nouveau Renault Koleos

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Ils se bougent Oulanga Na Nyamba

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Tourisme Le nombre de voyageurs stagne Téléphonie La fin des frais d’itinérance Une île en travaux Le parking provisoire du commissariat Portrait d’entreprise Faradji Madji, coiffeur à domicile

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SAISON JAZZ FESTIVAL MAYOTTE VA SWINGUER PHOTOGRAPHIE LES ARTS CONTEMPORAINS S’INVITENT À DEMBÉNI OÙ MANGER ? CRÊPERIE LE TOUR DU MONDE AGENDA JEUX

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Rugby Senior à XV Le RCPT “avec le cœur” L’actu en images Les M’tsapéroises à un match du titre Une discipline plus que jamais en vie Judo Le jour d’après Une semaine en bref Résultats, Classements & Programme

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Ce que vous en dites CHRONIQUE

Baba, comment ça marche une société ? Baba, c’est quoi une société ? Votre question est très pertinente, je vais essayer de vous répondre en plusieurs étapes. La société est une grosse machine appelée “superstructure”. Elle a pour fonction de fabriquer des produits appelés “citoyens”. Ensuite cette superstructure devra les permettre de vivre ensemble à travers un projet commun. À l’intérieur de la superstructure, il existe des “infrastructures” qui ont pour objet de former les “citoyens en devenir”. C’est le cas de l’infrastructure “Parents” qui a pour vocation à éduquer l’enfant, ou encore le cas de l’infrastructure “école” qui a pour mission d’instruire le “citoyen en devenir”, le rendre utile et à l’insérer dans la superstructure. Vous vous en doutez bien que toute la production engendre des déchets et des produits défectueux. Tout comme le corps humain, la société, aussi, produit des déchets.

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MAYOTTE HEBDO N° 747 r 29 AVRIL 2016

Dans ce cas, des “machines de recyclage” interviennent pour réinjecter les produits selon une autre forme avec des méthodes adaptées. Professeur… et si les produits défectueux ne sont pas recyclables, qu’est-ce qu’on fait ? Dans ce cas, ils sont envoyés dans la déchèterie (prison) pour purger une peine. Même là-bas, la société va essayer de les recycler pour les réintégrer en son sein. S’ils récidivent, alors ils retournent de nouveau dans la case prison. Lors de la socialisation, les “infrastructures” tels que les parents ou l’école apprennent aux “citoyens en devenir” à avoir peur de la prison. Ils participent à créer une barrière psychologique pour que le “citoyen en devenir” ne transgresse pas les normes sociétales. Pour revenir à votre 2ème question, à Mayotte, nous sommes en train de vivre une transition de l’infrastructure. Nous avons enlevé la superstructure existante et remplacé par une

superstructure plus performante pour atteindre les objectifs fixés par nos aînés. Malheureusement les infrastructures n’ont pas les plug-ins nécessaires pour fonctionner avec la nouvelle superstructure. En gros on se retrouve dans une situation similaire à la sortie du logiciel Windows Vista : un beau design, mais avec un processeur qui rame à mort. Et que faut-il faire pour diminuer la délinquance ? Il faudra accepter que le produit ait été mal préparé, demander la mise en place d’un programme d’installation, former les utilisateurs de ce nouveau logiciel, produire les plug-ins, mettre les mises à jour des logiciels et renforcer l’antivirus. La nouvelle société ne sera pas sûre à 100 %, mais elle aura au moins le mérite d’être la conjugaison de nos efforts collectifs pour construire une société meilleure. Elle ne sera sans doute pas parfaite, mais elle sera à notre image et chacun essayera de la préserver. Soufiane Hatake


contact@mayottehebdo.com LE COURRIER DE LA SEMAINE Immigration clandestine Je l’ai touché du doigt Alors que j’effectuais une sortie kayak dans la baie d’Acoua avec des amis dimanche dernier, j’ai aperçu un zodiac rempli de petites têtes noires qui dépassaient. Je me suis tout de suite interrogé sur la provenance de cette embarcation qui ne ressemblait pas à une sortie en mer touristique. Après avoir accosté notre kayak sur une petite plage isolée au sud du même village, nous avons vu défiler devant nos yeux une dizaine de personnes d’origine comorienne. L’un d’entre eux nous a demandé où se trouvait le village le plus proche, question qui nous a laissés sans voix. Nous lui avons alors indiqué du doigt la commune d’Acoua. Parmi ces clandestins se trouvait un jeune homme portant des béquilles et une femme enceinte. Visiblement exténuée, cette dernière s’est assise près de nous afin de nous demander un peu d’eau et quelque chose de sucré, ce que nous nous sommes empressés de lui offrir. Le jeune Comorien blessé au pied commence à nous expliquer brièvement

son périple. Ils venaient d’achever un voyage de 12 heures. Pourtant, seulement 70 km séparent Anjouan du 101ème département. “On a voyagé de nuit et les passeurs étaient informés des déplacements de la Paf pour éviter que l’on soit repéré”, nous disait-il. Venu pour se faire soigner à Mayotte, l’étudiant en sciences à Moroni s’est blessé au pied après un accident de moto. “J’ai besoin de voir un spécialiste et comme il n’y en a pas aux Comores, j’étais obligé de venir à Mayotte”, explique-t-il. Le pauvre essayait tant bien que mal d’avancer sur le sable dans lequel s’enfonçaient ses béquilles. “C’est du suicide de voyager comme ça, mais je n’avais pas le choix, car mon visa a été refusé”, avoue-t-il. Obligés de longer la côte sur les rochers humidifiés par la houle, les immigrés sanitaires ont poursuivi leur périple. Nous observions leur silhouette se réduire au fur et à mesure qu’ils avançaient en direction d’Acoua où des proches devaient les attendre pour les récupérer. Mathieu

Le poster de la semaine

Erratum Dans le Mayotte Hebdo de la semaine dernière, il y a une erreur pour le numéro de téléphone pour le portrait d’entreprise. Le bon numéro est le 06 39 69 83 02 pour joindre Ahmed Salitouna, vendeuse à domicile de produits cosmétiques.

Sondage (184 votants) Avez-vous confiance en les élus de Mayotte (Parlementaires, Maires, Conseillers départementaux) ?

oui

7,07 % non

92,93 %

Le tweet de la semaine ” Je suis assez impressionnée du nombre incroyable de sujets qu’il faut faire à #Mayotte “#SaveMayotte @Bee_Mondroha

Les commentaires sur la page Facebook (En réaction à notre du sondage de la semaine : “Avez-vous confiance en nos élus ?”) “Ce sont tous des charlatans qui ne pensent qu’à leur porte-monnaie (indemnités en tous genres, voyages gratuits, m’kara kara, etc.). Et la cerise sur le gâteau c’est qu’ils sont incompétents, ne savent même pas comment diriger une administration, prendre des décisions sages et utiles, bref... Personne ne pense à bâtir Mayotte, à faire avancer les choses. Isabalk Tito (En réaction à notre du sondage de la semaine : “Avez-vous confiance en nos élus ?”) “Dans la mesure où j’entends un nombre considérable de personnes dire “Le maire m’a dit que si je voulais le poste, je devais d’abord prendre ma carte dans son parti”, ma réponse est non.” Virgile Allemand

Mayotte compte peu de cascades, mai s certaines valent le détour. Le photographe David Lemor a ainsi immorta lisé la cascade de Soulou, située tout au bout de la plage du même nom, sur la commune de Tsingoni. Une vue orig inale prise de derrière le rideau d’eau. Mal heureusement, difficilement accessib le, car isolée, la plage a mauvaise réputatio n en raison des agressions et vols qui peuvent y avoir lieu.

(En réaction à notre du sondage de la semaine : “Avez-vous confiance en nos élus ?”) “Aucune conviction. On dirait qu’ils sont en campagne tout au long de leur mandat. Et pourtant à chaque élection nous prenons les mêmes (ou de la même espèce avec des têtes différentes) et ça recommence. C’est à croire qu’on aime la médiocrité. Mori ritsayiwa (“C’est comme si on nous avait jeté un mauvais sort).” Abdallah Bacar

29 AVRIL 2016 r MAYOTTE HEBDO N° 747

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