Mayotte Hebdo n°1025

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LE MOT DE LA RÉDACTION

Quelle année nous venons de vivre ! Si certains pessimistes considèrent que 2022 n’est synonyme que de statuquo, de nombreux événements se sont imposés à nous. Ces derniers mois, en effet, ont vu émerger de nouvelles vagues du Covid, Emmanuel Macron être réélu, l’Assemblée nationale être recomposée, la Russie envahir l’Ukraine, le décès d’Elisabeth II, le Pakistan subir des inondations meurtrières, des sécheresses et incendies sur tout le globe, ou encore l’Argentine de Lionel Messi remporter la controversée Coupe du Monde au Qatar. À l’échelle de notre belle île, on peut recenser la naissance de nouveaux projets et organismes, de nouvelles initiatives et associations. Une nouvelle députée porte la parole des Mahorais, la composition du Conseil départemental est en constant mouvement, la course de pneus est revenue sur le bitume de Mamoudzou, Gérald Darmanin et Marine Le Pen, entre autres, ont visité l’île, le festival Sanaa a embrasé – dans tous les sens du terme – Mayotte, la grogne sociale a secoué les bâtiments du CD, #Wamitoo n’a jamais enregistré autant de témoignages, les médias nationaux ont évoqué les problèmes sociétaux et environnementaux de l’île, le sport mahorais connaît de nombreux champions et de nouveaux succès, certains travaux vont bon train, les concerts et festivals ont été légion…

TOUTE L’ACTUALITÉ DE MAYOTTE AU QUOTIDIEN

Le premier quotidien de Mayotte

Diffusé du lundi au vendredi, Flash Infos a été créé en 1999 et s’est depuis hissé au rang de 1er quotidien de l’île.

Certes, tout n’est pas parfait, loin de là. Mais nous témoignons, chaque jour dans Flash Infos et toutes les semaines dans Mayotte Hebdo, des choses qui bougent, accompagnant et mettant en avant celles et ceux qui font avancer notre département. L’année qui vient de s’écouler a notamment permis à la Somapresse de proposer des initiatives uniques et positives, telles que les Trophées mahorais de l’entreprise, en mai, et la semaine des Trophées mahorais de l’environnement, en octobre. « Notre métier n'est pas de faire plaisir, non plus de faire du tort, il est de porter la plume dans la plaie », déclarait Albert Londres, l’un des pères du journalisme, il y a plus de 100 ans. Nous continuerons de suivre cette maxime en 2023, aux côtés de ceux qui poussent l’île, en laissant derrière ceux qui lui nuisent, toujours au service de Mayotte et des Mahorais.

Bonne lecture à toutes et à tous, et bonne année.

Lu par plus de 12.000 personnes chaque jour, Flash infos vous permet de suivre l’actualité mahoraise (politique, société, culture, sport, économie, etc.) et vous offre en plus un aperçu de l’actualité de l’Océan Indien et des Outremers.

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MMXXIII
quotidien deMayotte diffusé surabonne ent 0269 61 20 04 secretariat@ mayottehebdo.com Rien à déclaReR pouR cet habitant de chiRongui Amén les 82 chambRes de l’hôtel ibis style livRées sApeurs-pompiers le RetouR de nos héRos  quotidien deMayotte diffusé surabonne ent 0269 61 20 04 secretariat@ mayottehebdo.com Agression tRois jeunes condamnés, dont un cousin de la maRiée Quinze aRtistes attendus suR scène pendant tRois jouRs AménAgement le stade de tsoundzou 1, une pieRRe pouR l’aveniR les appels à pRojets couvRe-feu environnement le lagon au patRimoine mondial de l'unesco
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Les 30 personnalités de Mayotte les plus influentes

Ce sera le prochain numéro de Mayotte Hebdo, à paraître le 13 janvier 2023. Vous pourrez y retrouver notre classement exceptionnel des 30 personnes les plus influentes de l’île au lagon. Y seront présents des hommes et femmes politiques, des artistes, des acteurs du monde économique, des sportifs, ou des militants associatifs, dans une liste mêlant les genres, les âges et les domaines d’activité, et qui promet de faire réagir. Et pour vous, quelle est la personne la plus influente de Mayotte ?

Les chantiers de Dzoumogné avancent

Ça y est, les travaux liés au pont provisoire de Dzoumogné prendront fin dans les tous prochains jours. Quant au giratoire dit « sud », qui relie Dzoumogné à Bouyouni et au carrefour Milou au sud, la préfecture de Mayotte prévoit une fin de travaux pour le début d’année 2023. Pour rappel, ce rond-point permettra de rallier Bandraboua, au nord, sans avoir besoin de passer par le village de Dzoumogné. La totalité des travaux du secteur, carrefour nord compris, devraient se terminer d’ici la fin d’année 2024. Quant au pont définitif de Dzoumogné, il est censé être construit en 2025. Le pont provisoire d’urgence qui vient d’être installé sera alors récupéré et conservé en cas de besoin.

Plus de 1500 spectateurs ont assisté au nouvel épisode de #OuiMayotte, la websérie de la Délégation de Mayotte à Paris, diffusé ce 15 décembre. Intitulé « Trouver le bon métier dans le social », il était animé par Maryline Genevrier, Madi Moussa Velou, Ymane Alihamidi-Chanfi, Kartoibi Azida, Philippe Vallas ou encore Abdou-Lihariti Antoissi.

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22 décembre 1974

C’est la date à laquelle 63,82% de Mahorais votaient contre l’indépendance lors de la consultation d’autodétermination, il y a 48 ans, quasiment jour pour jour. Sous l’impulsion de grandes figures politiques de l’île et du MPM, ce « non » à l’indépendance des Comores allait se concrétiser quelques mois plus tard, à l’occasion de la seconde consultation du 11 avril 1976. Durant cette dernière, non seulement la population mahoraise rejetait avec force le statut de « territoire d’outre-mer » (97,47%), mais elle revendiquait aussi son souhait de devenir département avec 79,59% de bulletins sauvages déposés dans les urnes. Si Mayotte n’obtiendra ce statut que 35 ans plus tard, en 2011, ces luttes contre l’impérialisme comorien et l’attachement à la République française du territoire ne date pas d’hier.

Le proverbe « Dzitso la munyaho kalihuonyesa » L’œil de ton camarade ne te montre pas.

L’ambition du coach de l’US Kavani, Abdi, est sans limites. Alors que les joueurs de la commune de Mamoudozu étaient champions de Régional 3 l’année dernière, ils ont renouvelé l’exploit cette saison, en devenant champions de Régional 2. L’US Kavani accède donc au championnat Régional 1, l’élite du football mahorais. « C’est la première fois de notre histoire », confiait Abdi à Flash Infos, « et on l’a fait avec les jeunes de notre quartier ! » Désormais, les promus devront faire face aux poids lourds que sont le FC Mtsapéré et l’ASC Kawéni, dans des derbys qui s’annoncent bouillants. Pas de quoi stresser néanmoins pour le coach de Kavani : « On a assuré le maintien, puis on a visé le haut du tableau, puis le titre... Ça a plutôt bien marché ! On fera la même chose l’année prochaine ». Une confiance qui promet de belles affiches pour le championnat prochain.

Elisabeth Borne convoque un 10ème 49.3 contre les Outre-mer

Ce 15 décembre, la Première ministre Elisabeth Borne est intervenue une dixième fois à l’Assemblée nationale pour déclencher l’article 49.3 de la Constitution, engageant la responsabilité du gouvernement sur le projet de loi de finances 2023. Dans ce dernier, les outre-mer français sont lésés, malgré l’autocongratulation du gouvernement qui affirme que « les moyens de la mission outre-mer vont frôler les 3 milliards d’euros pour la première fois ». Dans les faits, de nombreux amendements, notamment déposés par les députés ultramarins, Mansour Kamardine compris, passent à la trappe, alors qu’ils avaient été votés par toutes les couleurs politiques de l’Assemblée, et même par des macronistes. Si la rage est de rigueur chez les députés de l’opposition, aucune motion de censure du RN ou de LFI n’a abouti, Les Républicains empêchant à chaque fois d’obtenir une majorité pour renverser le gouvernement.

« Ça tombe bien, on est là pour ça, jouer au football ! »
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LU DANS LA PRESSE

GRÈVE CHEZ EWA AIR, EN ATTENDANT AIR FRANCE ?

De sérieuses perturbations du trafic sont enregistrées depuis samedi à Mayotte en raison d’une grève chez la compagnie aérienne EWA Air, avec encore des annulations de vols et retards prévus ce lundi. En métropole, aucun accord n’a encore été annoncé avec les PNC d’Air France, dont le préavis débute jeudi.

Lancé le 16 septembre 2022, le conflit social chez la compagnie mahoraise basée à l’aéroport de Dzaoudzi-Pamandzi a déjà entrainé plusieurs annulations de vols, en particulier vers La Réunion. Après les retards, reports et la suppression de la rotation vers Moroni hier, les passagers doivent s’attendre de lundi à de nouvelles perturbations :

Le vol UU272 Réunion-Mayotte est annulé. Les passagers sont reportés sur le vol UU010 du mercredi 21 décembre 22, décollage prévu à 13h10

Le vol UU271 Mayotte-Réunion est annulé. Les passagers sont reportés sur le vol UU011, décollage prévu à 15h20.

Le vol ZD 244 Mayotte-Majunga est annulé

Le vol ZD 245 Majunga-Mayotte est annulé.

La direction d’EWA Air « espère que les négociations pourront reprendre rapidement et qu’une sortie de crise pourra être trouvée » . Selon zinfos974, elle « souhaite assurer l’ensemble de sa clientèle de ses meilleurs efforts pour réduire les désagréments causés et présente ses excuses aux passagers impactés pour la

gêne occasionnée. Les passagers concernés seront contactés individuellement par mail ou via leur agence »

Rien de neuf en revanche dans le conflit opposant Air France aux syndicats majoritaires UNAC et SNGAF représentant les hôtesses de l’air et stewards, qui ont depuis novembre déposé un préavis de grève pour la période du 20 décembre au 2 janvier 2023. Les syndicats de PNC demandent en particulier à la direction la négociation d’une « solution contractuelle temporaire de remplacement de l’accord collectif PNC dans son intégralité » , le temps de la négociation et de la signature d’un accord collectif « conformément à la législation » . Et que la direction ne prenne « aucune mesure unilatérale, sur aucun sujet touché par l’accord collectif, durant la période de négociation »

« Nous ne demandons ni augmentation de salaire ni effectifs supplémentaires, nos revendications sont à coût zéro et nous sommes prêts à lever immédiatement le préavis de grève en cas d’accord » , affirme dans Libération la secrétaire générale de l’Union des navigants de l’aviation civile, Anne Vildy-Sarocchi.

Air France a récemment rappelé que la négociation sur le renouvellement de l’accord PNC, arrivé à échéance en octobre, est engagée avec les syndicats représentatifs depuis fin septembre « et doit se poursuivre au-delà de janvier 2023 » , ; elle assure ne pas prévoir de perturbations, notamment via la mobilisation d’équipages de réserve ou l’affrètement d’avions avec leurs équipages de cabine.

Chaque semaine, découvrez le regard porté sur l’actualité locale à travers la presse nationale ou régionale
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Le 19 décembre 2022, par François Duclos pour Air journal.
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Les 10 portraits de 2022

Pour le dernier numéro de l’année, Mayotte Hebdo vous propose une sélection de dix personnalités de l’île ayant agi dans leur domaine. Qu’il s’agisse de sciences, d’art, d’entrepreneuriat ou de politique, ces cinq femmes et cinq hommes se bougent pour avancer, et faire avancer leur territoire dans leur sillage.

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PORTRAIT

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Axel

ROZETTE YSSOUF LE POIDS DES MÈRES AU BOUT DE LA PLUME

L'écrivaine et psychologue mahoraise vient de sortir Angie, Le combat d'une mère, aux éditions Coelacanthe. Ce roman aborde l'histoire que nombre de femmes de l'île au lagon connaissent, celle d'une mère célibataire, victime de ses souffrances, d'un père démissionnaire et d'une société passéiste. Ces maux, Rozette Yssouf en a elle aussi souffert, et s'est armée de son expérience professionnelle pour les combattre et les dépasser.

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« Ah non, ici c'est une bonne soirée qu'il faut me souhaiter ! » , s'amuse Rozette Yssouf depuis Wallis-et-Futuna, qui avance de neuf heures sur Mayotte. Elle est devenue la première psychologue clinicienne de cet archipel du Pacifique, une aubaine pour celle qui se considère comme une « citoyenne du monde » . Après avoir vécu sur l'île au lagon durant les six premières années de sa vie, la jeune fille grandit d'ailleurs deux ans aux côtés d'une tante en métropole, avant de rejoindre sa mère sur l'île de La Réunion, jusqu'à ses 19 ans. « Petite, j'étais une petite princesse, se souvient-elle. Ma mère m'appelait

même la mzunguette tellement j'étais sensible, je n'arrêtais pas de pleurer ! » Peut-être est-ce cette sensibilité qui développe chez Rozette une empathie la poussant à écouter les autres, presque machinalement.

« Démerde-toi avec ton enfant »

« J'aimais écouter mes camarades de classe, je me prenais pour leur psy, avoue l'écrivaine. J'avais un classeur dans lequel je mettais des fiches sur ma mère, mes voisins, en listant leurs problèmes et les solutions adaptées. Au final,

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portrait

je leur donnais un poème. » Ces poèmes thérapeutiques, Rozette Yssouf les utilise toujours, pour les autres mais aussi pour elle. Notamment lors de ses premières années d'études, à Montpellier : « J'étais perdue. J'ai eu un questionnement existentiel car, quand j'étais avec des Mahorais de métropole, nous parlions de Mayotte comme d'une île extraterrestre. Je suis tombée en dépression, ma tante a vu que je maigrissais et a prévenu ma mère, qui m'a sommée de rentrer. » En 2004, c'est le retour aux sources pour la jeune femme, qui est alors « réanimée psychiquement » . Elle va de l'avant et poursuit ses études avec un master, lors duquel elle revient sur l'île pour un stage, en 2006.

On peut être ambitieuse en étant mère célibataire »

Son sujet de mémoire, la résilience des femmes victimes de violences, répond aussi à une situation sociétale que la psychologue ne connaît que trop bien. « J'ai été élevée seule par une mère célibataire qui a beaucoup souffert de mon père biologique, raison pour laquelle elle a quitté Mayotte pour La Réunion, affirme-t-elle. Et j'ai reprouit la même chose que ma mère, j'ai eu un enfant avec un homme qui ne voulait pas de responsabilités. C'était violent d'entendre le père de mon aîné dire « Démerde-toi avec ton enfant »... » Ce combat, personnel, trouve aussi sa source dans la société mahoraise, qui « banalise les femmes victimes de violences physiques, psychologiques et sexuelles » . C'est cette société qui empêche l'auteure de revenir sur l'île aux parfums.

Pères démissionnaires...

« Mayotte, j'ai du mal, avoue-t-elle. J'y ai passé cinq ans et je ne me sentais pas chez moi, je n'aime pas le fait de voir qu'une société a du mal à changer, à bouger les lignes. » Un enlisement que Rozette Yssouf a également constaté dans son secteur. « Les psychologues cliniciens ne sont pas valorisés » , déclare celle qui a participé à envoyer un courrier collectif de la profession au Département. « Les compétences sont là, pour aider les jeunes, continuet-elle. Mais on nous a répondu qu'il n'y avait pas assez de fonds, que d'autres priorités existaient. » Les jeunes, et leur capacité à se sublimer après des épreuves traumatisantes, voilà justement le sujet de la thèse de la docteure en psychologie, qui s'est d'ailleurs appuyé sur des témoignages de Mahorais. Ces derniers ont marqué la chercheuse.

« Les résultats m'ont déprimé, témoigne Rozette Yssouf. Le point commun de tous ces jeunes ayant réussi, auxquels je

m'identifiais, était le manque paternel ! » Chez ses sujets, la chercheuse observe le même besoin de compenser l'absence d'un père par la volonté absolue de faire quelque chose de sa vie, afin de « ne pas s'effondrer » « Même quand le père est présent, il ne remplit pas ses devoirs envers son enfant, regrette-t-elle. Les mères sont celles qui poussent leurs enfants à aller de l'avant, à se sublimer. » Une démission du père qui empêche un développement correct de l'enfant, à moins d'y trouver un substitut salvateur. L'écrivaine évoque l'exemple d'un Mahorais, élevé par sa mère jusqu'à ses sept ans, âge auquel son père le prend de force en métropole.

… Mères célibataires

« Il était aux côtés d'un père négligent, d'une belle-mère qui ne l'a jamais aimé, témoigne Rozette Yssouf. Le manque de contact maternel lui a même fait oublier le shimaoré. C'était aussi compliqué à l'école, il a donc dû s'autoéduquer, en quelque sorte, et c'est le karaté qui l'a fait tenir, et réussir. Aujourd'hui, il a créé une entreprise, s'est marié à une Bretonne, tout va bien pour lui. » Les pères démissionnaires, la poétesse les enjoue à « être plus forts que la peur » , à « être la meilleure version d'eux-mêmes » . « À ceux qui ont eu un moment d'irresponsabilité, revenez vers votre enfant et demandez leur pardon, enjoue-t-elle. Prendre soin des enfants à deux est important pour leur équilibre psychologique et fait d'eux de grandes femmes et de grands hommes. »

Mais, si les pères manquent parfois à Mayotte, la majorité des mères sont là, et c'est à elles que Rozette Yssouf a destiné Angie, Le combat d'une mère. Ce roman, l'ouvrage qui lui « tient le plus à coeur » , a pour objectif de montrer que les mères mahoraises souffrent. « Quand j'ai écrit ce livre, j'étais en plein combat juridique avec le père de mon enfant, qui réclamait des droits sur lui huit ans plus tard, alors qu'il ne m'avait jamais versé de pension » , raconte l'auteure. Si elle avoue que ses personnages sont en partie basés sur son expérience personnelle, leurs destins ne sont pas communs au sien, et à celui qu'elle souhaite pour toutes les mères célibataires. « Ça ne veut pas dire que la vie est terminée, affirme-t-elle. Il est possible de concilier une vie de mère et une carrière, de hautes responsabilités. »

La psychologue remercie même ses enfants, ses « impulseurs » « C'est grâce à mon fils que j'ai voulu aller de l'avant et reprendre les études, déclare-t-elle. Et c'est grâce à ma fille que j'ai soutenu ma thèse. » Les enfants seraient donc énergivores, mais aussi vecteurs d'une formidable énergie. « Il faut aller de l'avant rien que pour leur montrer que l'on ne s'effondre pas à la moindre difficulté, poursuit Rozette Yssouf. Il faut se relever, leur montrer qu'on peut être ambitieuse en étant mère célibataire. » Et ses ambitions, l'écrivaine les nourrit : « La thèse n'est que le début. Je veux continuer d'écrire, des articles scientifiques, des livres, des romans... » Et des poèmes, dont les vers, d'où qu'ils soient écrits, aideront celles et ceux qui souffrent intimement. n

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PORTRAIT

Axel Nodinot

Mayotte Hebdo n°981 – 7 janvier 2022

TERRELL ELYMOOR RAPPER LA BONNE PAROLE

Fraîchement nommé aux Mauritius Music Awards dans la catégorie « Best Island Artist Mayotte », Terrell Elymoor devient petit à petit l'une des têtes d'affiche de la nouvelle scène musicale mahoraise. Posant sa voix aigüe sur des morceaux tantôt rap, tantôt dancehall, l'artiste propose des messages d'espoir et de raison à la jeunesse de l'île, en tentant de gérer une notoriété nouvelle qu'il n'a jamais voulu sienne.

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Il est de coutume de dire que les meilleurs dirigeants sont ceux qui ne veulent pas du pouvoir. Cette maxime s'appliquerait-elle au domaine artistique ? C'est en tout cas ce que l'on pourrait penser en discutant avec Terrell Elymoor, qui n'a jamais voulu être connu. « J'aimais la musique, je voulais chanter, mais pas que les gens me connaissent, qu'ils sachent qui j'étais », affirme-t-il. C'est ainsi à l'ombre du succès que le jeune homme veut d'abord rester, tout comme il restait à l'ombre du Mont Choungui, dans son village de cœur. «

J'ai passé toute mon enfance à Choungui, au fin fond du Sud de Mayotte, s'amuse-t-il. Je suis un vrai campagnard. On était un groupe de potes, il y avait tout le temps des choses à faire : après l'école coranique, on allait jouer au foot ou on allait faire de la musique.

Premiers potes, premiers pas

La musique, Terrell l'aime et la pratique depuis tout petit. Son grand frère l'y initie, au sein

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du foyer familial, là même où il accueille ses amis pour écouter et tenter de créer. « Le premier artiste que j'ai écouté était Booba, on était à fond sur lui », témoigne-t-il. Comme souvent, l'amour du rap ne cessera de brûler en lui, au point de le pousser à pratiquer le même style que celui du « Duc de Boulogne ». À son retour de métropole, où il était parti après avoir empoché son baccalauréat, il ambitionne encore de faire de la musique. Mais sans que les gens, et ses parents particulièrement, ne le sachent. « J'avais de l'appréhension, puisque mes parents ne voulaient pas que je chante », explique-t-il. Paradoxalement son frère l'incite à sortir ses morceaux, Terrell a alors recours à un subterfuge.

«

Dans 5 ans, dans 10 ans, je voudrais être le Puff Daddy de Mayotte ! »

Du nom d'une marque de vêtements que la fratrie souhaitait créer, il prend le nom de « Barbe Noire », qui devient rapidement un groupe composé de ses proches, ainsi qu'un certain Reed Blowz, qui est aujourd'hui un artiste bien connu des amateurs de rap mahorais. « C'est moi qui l'ai fait entrer dans le groupe, affirme-t-il. Mais à un certain moment, nous n'avions plus la même vision des choses. On s'est juste dit que l'on allait arrêter de travailler ensemble. Mais, humainement, on est toujours présents l'un pour l'autre, on s'appelle. » Point de tension entre les deux hommes donc, qui deviennent progressivement des artistes reconnus à Mayotte.

« Même dans la merde, on peut voir du positif »

Cette célébrité, Terrell Elymoor y est désormais pleinement, qualifié de « titan » lors d'un showcase à Combani, ou encore nommé pour la deuxième édition des Mauritius Music Awards. De ces réalisations, le chanteur n'en tire que du plaisir, et de la fierté, même s'il ne court pas après la notoriété. « Mon but n'est pas d'être connu ou d'être une star, déclare-t-il. C'est d'inspirer les gens, et surtout les jeunes qui m'écoutent. J'essaie de les motiver, de toujours leur amener du positif. » Le morceau « Hima », sorti fin 2020, est exactement dans cette veine, enjoignant les nouvelles générations de Mayotte à refuser la délinquance et à se lever pour leur île et pour elles-mêmes. « On connaît tous la situation actuelle de notre territoire, et le but est aussi de changer ça, explique Terrell. Même dans la merde, on peut voir du positif. Donc le but est de pousser les jeunes à faire quelque chose de leurs vies. »

La paix est donc le mot d'ordre de l'artiste, qui compte sur sa musique pour élever les jeunes et les unir. Au point de briser les barrières entre Mayotte et les Comores ? « Je pense que la musique rassemble, réfléchit-il. Mais même ceux qui essaient d'arranger les choses sont pris pour cible par des gens. Personnellement, je n'ai jamais eu de souci là-dessus. Mon équipe, mes potes d'ici ou de métropole sont composés de Comoriens. On a grandi ensemble, on a la même vision des choses, c'est tout. »

Des projets courts pour s’adapter au streaming

Désormais, l'artiste se concentre sur sa réussite professionnelle. « Je suis un entrepreneur, j'ai une société de location de voitures, déclare Terrell Elymoor. Je fais de la musique quand j'ai le temps, ça a toujours été comme ça. Et je me produis moi-même, j'ai le matériel pour le faire. Dans cinq, dans dix ans, je voudrais être le Puff Daddy de Mayotte ! » Si l'ambition est immense, la musique n'est donc jamais très loin. Le rappeur a d'ailleurs annoncé la parution de l'EP « Mharamia part. 2 » pour le mois de février, suivant la partie 1, qui était composée de trois morceaux. « Ce sera un quatre titres cette fois, annonce-t-il. Il y aura en tout quatre parties pour Mharamia. » L'album studio attendra donc la sortie de ces petites séries de morceaux, qui devraient être distillées tout au long de l'année 2022.

Cette stratégie a été pensée pour mieux coller aux nouveaux modes de consommation de la musique, sur les plateformes de streaming et sur YouTube, cette dernière étant particulièrement prisée par les auditrices et auditeurs de l'île au lagon, même si cela ne profite pas à l'artiste. « On a remarqué que les gens ne consomment pas mes sons comme on le voudrait, affirme Terrell Elymoor. Il y a tellement de morceaux sur un projet que les auditeurs en choisissent quelques-uns et n'écoutent que ceux-là. » Avec trois ou quatre morceaux distribués tous les deux ou trois mois, le temps est ainsi laissé aux auditeurs pour qu'ils multiplient les écoutes des morceaux, et donc les streams, pour finalement augmenter les revenus. Un plan semblable à celui de... Booba, le rappeur n'ayant pas hésité à stopper le format album pour ne plus sortir qu'un morceau de temps en temps. n

Pourquoi Terrell Elymoor ?

« C'est ma petite sœur qui m'a donné le surnom Terrell. À ce jour, elle ne m'en a jamais donné la raison. Elle me disait juste que j'avais une tête à m'appeler Terrell. Elymoor est une combinaison de mes deux prénoms, Elyjah et Mourid. »

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PORTRAIT N.G

ANAËLLE MOUSSA NOUVELLE MAIRE JEUNE DE MAMOUDZOU

L’installation du nouveau conseil municipal des jeunes (CMJ) de la ville de Mamoudzou s’est tenue samedi matin dernier à la MJC de M’Tsapéré. Au terme d’une élection qui s’est déroulée sur liste, dans des règles légèrement simplifiées par rapport à celle des adultes, c’est finalement la jeune Anaëlle Moussa qui a été élue, venant ainsi prendre la place d’Océane Plaideau, la maire jeune sortante.

19 • Mayotte Hebdo • N°1025 • 23/12/20 22

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Les femmes ont décidément la cote chez les jeunes de Mamoudzou ! Après Océane Plaideau, qui a tenu la place de maire pendant son mandat de trois ans au sein de la ville de Mamoudzou, c’est désormais Anaëlle Moussa qui est venue la remplacer. Agée de 16 ans, cette adolescente aux airs studieux est élève de seconde au lycée Younoussa Bamana. Elle a battu son unique adversaire, Dao Onthoimine à 26 voix contre 22. Le seul et unique bulletin nul placé dans l’urne n’aurait de toute façon pas fait la différence, preuve que la jeune fille s’est montré particulièrement convaincante auprès du CMJ. Se présentant comme « dynamique, sociable, engagée et à l’écoute » , Anaëlle Moussa saura de toute évidence faire des propositions convaincantes pour

améliorer les conditions de vie de la jeunesse de Mamoudzou.

Un programme visant à restaurer le lien social

Les deux points forts du programme de la nouvelle jeune maire sont les suivants : organiser des sorties sportives et culturelles afin « d’aider les jeunes en perte de repère » et surtout organiser des ateliers pour les personnes âgées pour « restaurer le lien intergénérationnel ». Un programme surtout axé donc sur le lien social entre les différents habitants de la ville cheflieu qui, il ne faut pas se le cacher, tend à se perdre avec le changement de société opéré par la départementalisation de l’île. Mais Anaëlle

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Dao Onthoimine, l’adversaire d’Anaëlle, a obtenu 22 voix à l’élection.

a également bien l’intention de poursuivre le programme de la maire sortante laquelle, dans son discours précédant le vote, a insisté sur la nécessité de travailler efficacement sur les problématiques environnementales dans le cadre du projet « Mamoudzou ville durable à l’horizon 2040 »

Anaëlle Moussa travaillera avec les 14 adjoints de sa liste, tous dédiés à des domaines différents de la vie de la commune. Évidemment, le rôle du CMJ est uniquement consultatif, mais il démontre la volonté de Mamoudzou d’intégrer les jeunes à la politique locale et illustre la victoire de la démocratie participative. Permettant aux jeunes habitants de la ville de découvrir le fonctionnement des instances politiques, il a un rôle foncièrement pédagogique. Il permet également d’apporter un souffle de fraîcheur et de nouveauté dans la politique locale en proposant parfois des idées novatrices, mais surtout en permettant aux jeunes d’exprimer leurs réels besoins.

Une élection sous l’égide du maire Ambdilwahedou Soumaïla

L’installation du nouveau CMJ s’est bien évidemment tenu en présence des principaux élus de la ville et sous l’égide du maire Ambdilwahedou Soumaïla. Ce dernier a fait un discours en prélude à l’élection pour encourager les jeunes, mais également pour les prévenir que « gérer les affaires d’une collectivité n’est pas une tâche facile » « Il faut parfois tenir son mandat dans des conditions complexes en étant humble et toujours dans le respect de l’autre. Pour cela, le dialogue est essentiel », a-t-il déclaré tout en précisant que le rôle pédagogique du CMJ était très important dans la mesure où « un jour, vous aurez à gérer les affaires de la commune à notre place » Gageons que la nouvelle jeune maire et ses 14 adjoints ne manqueront pas de se tenir à la hauteur de la tâche qui leur est désormais impartie ! n

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Océane Plaideau, la jeune maire sortante (debout à g.), a insisté sur l’importance de continuer à travailler sur l’environnement.

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Romain Guille

ANLYGNE PLAN

LARGE

Avec une dizaine de films à son actif depuis 2016, le réalisateur, producteur et scénariste mahorais Anlygne se lance dans un nouveau projet avec l’écriture d’un long-métrage, dont plusieurs scènes seront tournées à Mayotte. Portrait d’un autodidacte de 27 ans, destiné à se faire un nom dans le milieu cinématographique.

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portrait« Ce qui était un passe-temps est devenu une passion, puis mon métier. » Au bout du fil, Anlygne se la joue discret lorsqu’il s’agit de déballer son parcours professionnel. En licence AES (administration économique et sociale), le jeune homme de 27 ans ne s’épanouit pas « spécialement » Puis vient 2016, l’année du « déclic pour le cinéma » quand il commence à filmer ses camarades de promo et sort « Tous responsables », qui comptabilise 800.000 visionnages. La suite n’est qu’une série de succès, mais aussi et surtout de rencontres. La plus importante ? Celle avec Wil Aime deux ans plus tard « Il m’a inspiré ! Depuis ce jour-là, on ne s’est plus lâchés, on partage la même vision et les mêmes objectifs. » De cette connivence née la structure Chaque Détail Productions. D’abord acteur, comme dans Le Procès (23.7 millions de vues sur Facebook), Anlygne passe petit à petit derrière la caméra et à l’écriture. Ensemble, les deux amis produisent Le Gendre Idéal, qui fait un carton lors d’une séance exceptionnelle organisée en avant-première au Grand Rex en 2019 devant plus de 2.500 personnes.

Émotion et originalité

L’autodidacte se forme sur le tas, avec l’envie « de transmettre de l’émotion » et « d’apporter de l’originalité » Tout cela avec un seul mot d’ordre à l’esprit : « rester soimême » « C’est un milieu très compliqué, car que l’on soit connu ou non, cela demande énormément de budget et de confiance de la part des distributeurs », admet l’originaire de Pamandzi, parti en métropole à l’âge de 17 ans.

Avec cinq nouveaux films à son compteur, Anlygne enchaîne les expériences aux côtés de Wil Aime. Toutefois, il travaille aussi en parallèle sur un long-métrage. Son premier grand projet comme il aime le définir. « C’est un sujet qui parlera à tout le monde. » Envisagé avant la fin de l’année, le tournage doit se dérouler en Hexagone, au Canada et à Mayotte. « Il y aura quelques scènes pour illustrer l’image et l’histoire de mon île, mais je veux garder tout cela secret pour le moment. »

Si le réalisateur et producteur mahorais se montre confiant pour dénicher des figurants et des acteurs sur place, il a également conscience du chemin à parcourir pour espérer une diffusion en 2023, avant l’ouverture des festivals en avril-mai. En ligne de mire : le volet financier. « Ce serait au minimum trois millions d’euros, mais c’est faisable avec les aides publiques, les partenariats et les coproductions », dévoile l’habitant de Tours. Confiant du destin qui est le sien, Anlygne vit aujourd’hui un rêve éveillé, comme dans un film. « Il faut être patient et ne jamais abandonner ! » n

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Axel Nodinot

IKIBAL BOINALI, UN MAHORAIS À WALL STREET

Pour peu qu'ils s'envolent de l'île, les Mahoraises et Mahorais semblent n'avoir aucune limite. L'un des plus beaux exemples de cette réussite est Ikibal Boinali, auditeur senior chez KPMG, l'un des quatre grands groupes mondiaux d'audit et de conseil. Depuis quelques mois, le jeune homme fréquente même la branche newyorkaise de la multinationale. Rencontre avec un talent de la finance qui exporte Mayotte à Manhattan. Un portrait à retrouver dans le numéro 1000 de Mayotte Hebdo.

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Mayotte Hebdo n°1000 – 20 mai 2022
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"On est jeunes et ambitieux, parfois vicieux", rappait le groupe 113 sur Les Princes de la ville. Point de vice néanmoins chez Ikibal Boinali, qui a choisi de conquérir rien de moins que le plus fameux quartier d'affaires du monde, Wall Street, à New York. Les pieds sur terre, le jeune homme débute le récit de sa vie, qui s'écrit pourtant bien vite hors de Mayotte. Alors qu'il n'a que trois ans, en effet, sa famille s'envole pour l'hexagone, et plus précisément pour Lyon, la ville des Canuts. Ikibal a cependant d'autres ambitions que de devenir ouvrier. Après avoir obtenu un bac scientifique, il a "tout de suite envie de faire ses études dans le domaine de la finance" , et doit donc viser une école de commerce. "J'ai toujours été fasciné par ce domaine, puisque je considère que la finance de haute voltige est un secteur clé de l'économie, continue-t-il. L'aspect gestion des chiffres m'a toujours attiré, ayant un profil scientifique. J'ai aussi une appétence pour le prévisionnel."

Déterminé, Ikibal Boinali n'a justement que faire du déterminisme social, et ses parents, employé dans une entreprise de transports en commun et mère au foyer, le voient décrocher une bourse d'études qui lui permet d'intégrer l'IDRAC Lyon, une grande école de commerce habituellement coûteuse. "Ce ne sont pas des études accessibles à tout le monde, je peux dire que j'ai bénéficié des opportunités qu'offre l'égalité des chances", reconnaîtt-il, lucide. Sans jamais se reposer sur ses lauriers, le jeune homme obtient son master au sein du prestigieux programme grandes écoles, et se spécialise en finance et en audit. "J'ai toujours fait ma carrière en essayant de viser l'excellence, de poursuivre mes rêves et d'aller le plus loin possible", affirme Ikibal, avec, toujours en tête, l'idée de montrer aux Mahorais qu'avec la valeur travail, "il n'y a aucune auto-discrimination à subir, il ne faut pas s'imposer de barrières"

a tous inspirés, à travers les films que nous regardions. J'ai sauté le pas pour me lancer dans l'aventure new-yorkaise." Et cette dernière l'impressionne, entre la hauteur des nombreux gratte-ciels et la vie culturelle de Big Apple, "enrichissement au quotidien". Son quotidien à Manhattan ne lui laisse cependant que peu de temps pour les visites.

Mayotte – N.Y, promesse d'un aller-retour

Auditeur senior, Ikibal est "in charge" de mener à bien les travaux, de leur suivi et des relations clientèle. Ses tâches réunissent revues comptables, inspections, et vérifications de la conformité et de la justesse des résultats financiers des entreprises clientes du groupe. Toujours spécialisé dans les fonds d'investissement, il enchaîne les réunions avec les clients et des équipes d'une dizaine de collaborateurs. Grossièrement, "c'est énormément d'Excel" . À New York, le jeune homme s'y plaît bien : "J'ai eu la chance d'être très bien intégré ici, les Américains ont une culture bien plus chaleureuse que les Français. L'intégration d'un expatrié se fait bien plus rapidement puisque les rapports hiérarchiques sont plus directs, on n'a pas cette notion de vouvoiement, et il y a une très grande proximité avec la hiérarchie la plus haute, ce qui est excellent pour travailler dans des conditions saines." Il essaie même de parler fièrement de Mayotte à ses collègues, qui ne connaissent pas le territoire.

Cet état d'esprit l'amène à intégrer dès l'obtention de son master, en 2018, KPMG, l'un des "Big Four" de l'audit et du conseil avec Deloitte, Ernst & Young et PwC. "Cette réussite fait ma fierté personnelle mais aussi celle de ma famille, leur fait voir d'autres perspectives, déclare-t-il. Tout est possible. Les Mahorais sont aussi amenés à aller à l'étranger et réussir." Au sein d'une multinationale de la finance telle que celle-ci, les opportunités sont légion, et Ikibal Boinali s'exporte rapidement à l'étranger, chez KPMG Luxembourg. "C'est une très grande place financière européenne, qui réunit des banques et des fonds d'investissement" , explique-t-il. Le jeune homme, dans le petit pays, en profite pour se spécialiser dans l'audit, le commissariat aux comptes et le conseil auprès de fonds de private equity.

Encore une fois, le Luxembourg n'est qu'une étape. Il y a quelques mois, le Mahorais est envoyé de manière permanente dans la filiale new-yorkaise de son entreprise, à Wall Street. "C'était clairement l'un de mes rêves, se félicitet-il. En tant qu'étudiant en finances, New York est la plus grande place du monde, je ne m'y imaginais pas, et Wall Street nous

C'est un fait, l'île au lagon n'est jamais loin dans l'esprit d'Ikibal Boinali, qui pourrait pourtant viser les plus hautes places de la finance mondiale. "J'ai accompli mon rêve d'enfant, j'ai la sensation d'avoir atteint mes objectifs, explique-t-il. Dans une ville comme New York, tout va très vite. Je peux faire une carrière dans l'audit et devenir associé du cabinet, j'ai accès aux plus grandes banques mondiales telles que JP Morgan ou Goldman Sachs, ou encore aux organisations internationales telles que le FMI. Il n'y a jamais de limite." Néanmoins, "l'avenir s'inscrit définitivement à Mayotte" pour le néo-new-yorkais. Il veut en effet revenir à tout prix, même si ce ne sera pas dans le secteur de la finance. "J'aurai d'autres opportunités sur le territoire", annonce-t-il, pensant à des postes de direction, à l'entrepreneuriat… Ou à la politique.

"C'est vrai qu'en tant que Mahorais, je me sens investi d'une responsabilité vis-à-vis du futur de notre île, sur tous les aspects économiques, commerciaux et politiques, déclare Ikibal. Je suis sensible à la cause politique, et conscient que mon profil peut m'amener à contribuer du mieux que je peux à l'industrie, au commerce, à l'agriculture… Je n'exclus pas de m'impliquer dans ce domaine également." L'essentiel n'est pas là, mais dans le fait que les jeunes talents mahorais reviennent développer leur territoire, qui en a bien besoin. Ce dernier, dans quelques années, pourra déjà compter sur Ikibal Boinali, prêt à quitter les plus grandes places financières du monde pour lui. "J'ai toujours eu cette idée, faire les études les plus prestigieuses possibles pour revenir développer Mayotte" , conclut-il, avant de retrouver ses bureaux, perchés au milieu du ciel de Manhattan, d'où un certain lagon semble bien visible... n

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"Les Mahorais sont aussi amenés à aller à l'étranger et réussir"

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Lhaimy Zoubert Ravoay

YASMINA AOUNY

REINE ET OUVRIÈRE

Candidate aux prochaines élections législatives dans la première circonscription de Mayotte, dirigeante d'un club de l'élite du football mahorais et spécialiste du droit européen et international, Yasmina Aouny porte plusieurs casquettes qui font d’elle une femme engagée dans tous les sens du terme. Féministe à part entière, elle est l’auteure du roman « Les Chatouilleuses », qui retranscrit l’ambiance à l'époque du combat pour la départementalisation de Mayotte, menée par de véritables héroïnes politiques, dont Mme Aouny se veut l'héritière.

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Mayotte hebdo n°1001 – 27 mai 2022

En cette matinée ensoleillée, c'est en bord de mer de Mamoudzou que la nordiste Yasmina Aouny nous reçoit, coupe afro soignée et verre de jus de gingembre – mangue à la main, afin de nous conter son histoire. « J'ai vécu la plupart du temps dans la nature, plus particulièrement aux champs. J'ai grandi avec une mère célibataire originaire de M'tsamboro et au chômage. La vie n'a pas été de tout repos et je n'ai pas honte de dire que j'ai grandi dans une situation très précaire. Ce que j'assume pleinement. Cela montre que le parcours que j'ai eu a été très difficile et compliqué », assume-t-elle fièrement. Comme beaucoup de Mahorais, quitter l'île est une alternative pour avoir une meilleure vie. « C'est une mère qui, malgré la précarité, nous a très bien encadrés. Cependant, difficile de joindre les deux bouts, nous avons dû quitter l'île à deux reprises. Une première fois pour La Réunion où j'y ai effectué le CM1 et le CM2. Ensuite, nous sommes retournés sur Mayotte où j'ai fait ma sixième et ma cinquième. Enfin, nous sommes partis pour la métropole où j'ai poursuivi le reste de ma scolarité », nous confie la Phocéenne d'adoption. Malgré les préjugés que les gens peuvent avoir sur Marseille, où elle tenait un meeting le week-end dernier (voir encadré), Yasmina Aouny a décidé de se battre et de ne pas abandonner. « Marseille regroupe une forte communauté mahoraise. Beaucoup de familles

emmènent leurs enfants là-bas dans l'espoir qu'ils réussissent leurs études et souvent cela se passe mal. J'ai eu la chance de faire partie de l'exception parce que j'ai fait la fin de mon collège à Marseille, la fin de mon lycée ainsi que mes deux premières années de droit en Aix-en-Provence et il n'y a pas eu de souci », dévoile Yasmina Aouny.

Enfance modeste et mère modèle

Déterminée, elle obtient son baccalauréat haut la main. « Ce qui a fait la différence dans mon parcours, c'est que j'ai eu l'opportunité d'avoir une bourse d'étude qui m'a permis de partir une année au Brésil, à Sao Paulo. Cela a été très enrichissant de se rendre sur un territoire où des personnes ne parlent pas la même langue que nous. J'ai eu face à moi une culture différente qui m'a permis d'avoir une meilleure ouverture d'esprit, d’être tolérante et d’avoir un rapport à l’autre plus humain et rationnel », confesse l'auteure et dirigeante sportive. Cette expérience nourrit ses ambitions, et, à son retour, elle poursuit ses études dans le sud de la France, sans que sa volonté ne s'épuise. « La plupart des jeunes disent que la première année est une grande épreuve et que très souvent on est obligé de la repasser plusieurs fois. Moi, j'ai adoré mes années de droit et j'ai tout validé d'un trait avec des mentions en plus. J'ai un Bac +5 en droit européen et international », souligne Yasmina Aouny. Dans la vie, nous sommes responsables de ce que l'on devient, et la mentalité de la jeune femme le prouve. « Avec tout ce que j'ai pu apprendre, j'ai compris qu'en réalité, on ne peut pas être esclave de ses origines sociales et le départ d'une vie ne présage rien de la fin. Ce n’est pas parce qu’on a eu un début difficile qu’on est condamné à avoir une fin difficile et compliquée. Vu mon départ, je pense que personne ne m’attendait là », déclaret-elle avec émotion.

Engagée pour les droits des femmes, Yasmina l'est aussi et surtout grâce à sa mère, « très certainement, l'une des raisons de mon engagement féministe très prononcé sur ce territoire. C'est une dame qui a tout fait et qui aurait pu réussir, largement mieux que moi si elle en avait eu l'occasion. Elle a malheureusement vécu à une époque où l'examen d'entrée en sixième était très sélectif et il n'y avait pas assez de places. Les places étaient chères. Mais, je sais que toute sa vie elle a nourri un profond regret face à cette soif de savoir restée inassouvie. Elle serait née à la même époque que moi, je pense qu'elle aurait cassé la baraque !"

Tombée amoureuse de l'enseignement

Néanmoins, comme chez la majorité des mères de Mayotte, le mariage coutumier est important et une fierté pour les familles. « Les relations mère-fille sont toujours compliquées

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à la base, indique la candidate aux législatives. Arrivée à ma deuxième année de licence, les demandes en mariage ont commencé à tomber, et l'une d'entre elles l'avait particulièrement emballée, ce qui a créé une dispute. Elle m'a dit que je ne devais pas rester trop longtemps sur les bancs de la fac et qu'il fallait que je pense à me marier et à fonder un foyer. Cela m'a beaucoup vexé. Mon père a rajouté par la suite que je devais faire attention car les études, ça rend fou ! À la fin de ma licence, ils ont commencé à ne plus me comprendre puisqu'à l'époque, après le bac, on pouvait devenir instituteur à Mayotte. Ils s'imaginaient donc qu'avec le bac en poche, j'envisagerais éventuellement de rentrer pour venir enseigner."

Déterminée, c'est seulement à la fin de ses études, après un master en droit européen et international, qu'elle rentre enfin à Mayotte. "Arrivée au Bac +5, je me suis dit que je vais arrêter de stresser cette pauvre dame, plaisante Yasmina Aouny. Je suis donc rentrée à Mayotte, je me suis mariée, j'ai eu une petite fille et j'ai commencé à enseigner les Sciences Économiques et Sociales au lycée de Kahani. Étant juriste de formation, j'ai commencé à enseigner comme ça et sans forcément me dire que j'allais y rester longtemps, puisque j'avais envisagé de passer des concours, notamment le barreau pour devenir avocate." Toutefois, elle prend goût à l’enseignement et abandonne ce projet, se concentrant sur le CAPES, qu’elle a obtenue. « Aujourd’hui, cela fait 10 ans que j'enseigne. Une expérience passionnante contrairement à tous les préjugés. J’ai découvert quelque chose d’incroyable dans l’enseignement. Nous avons des élèves hyper motivés qui ne se démobilisent pas, qui ont soif de connaissance et qui veulent avoir leur bac. En tant qu’enseignante, cela oblige d'être à la hauteur de cette détermination », nous confie l’écrivaine.

Première femme à présider un club de l'élite à Mayotte

Motivée par ses convictions, Yasmina Aouny est une femme engagée dans la société mahoraise. « Depuis 2015, je suis la porte-parole des femmes leaders et je suis devenue leur secrétaire en 2018. Jusqu'à ce jour, j'occupe ces deux fonctions. Par ailleurs, depuis 2019, je suis la première femme à présider un club de foot de l'élite ici à Mayotte [l'ASC Abeilles de Mtsamboro, NDLR]. Ce qui est une expérience passionnante mais insolite, dans la mesure où je ne suis pas une grande footeuse. Je pense qu'on m'a demandé d'occuper ce poste par rapport à mon caractère et à mon leadership. J'étais tranquillement dans mon coin, avec mon féminisme et mes femmes leaders, et puis un jour des dirigeants sont venus me voir pour me proposer la présidence. Pour moi c'était une blague, puisque je n'y connaissais rien. Ils sont revenus à la charge à plusieurs reprises et c'est à ce moment-là que j'ai compris que c'était sérieux. C'est surprenant qu'ils soient venus chercher une femme, mais ça m'honore au plus haut point », affirme la présidente des Abeilles. Mais ce nouveau poste n'est pas tout rose : la première saison, le club bat de l'aile. « On a enchaîné les défaites, je ne dormais pas, je pleurais tout le temps, explique-t-elle. Et beaucoup ont remis en question le choix de ceux qui sont venus me chercher et certains ont commencé à dire, depuis quand une femme peut diriger une prière ? Depuis quand une femme peutelle être Imam ? Une femme ne peut pas mener des hommes. Ce qui est bien, c'est qu'ils se sont lâchés, et l'année qui a suivi on

a redécollé. Nous sommes allés jusqu'à la finale de la coupe de Mayotte, et nous avons terminés premiers de notre championnat." Résultat, les Abeilles de Mtsamboro réintègrent cette saison le Régional 1, l'élite du football mahorais, ce qui évoque une grande fierté chez la dirigeante.

"Les Chatouilleuses", un travail d'écriture nécessaire

Mais, parce que l'hyperactive nordiste ne s'arrête jamais, elle sort il y a quelques semaines son roman, intitulé "Les Chatouilleuses" « J'ai une arrière-grand-mère qui était Chatouilleuse, qui nous a quittés en 2002, un an avant mon départ de Mayotte pour la métropole. J'ai toujours été frustrée parce que c'était une personne inspirante et passionnante. J'ai vraiment regretté la façon dont elle est partie et, jusqu'à aujourd'hui, je ne suis jamais allée dans cette maison où elle vivait puisque je refuse d'accepter son départ. Au fil des années, je me suis dis que son histoire individuelle ainsi que celle de ses camarades était tellement passionnante qu'il ne fallait pas la laisser tomber, qu'il fallait l'écrire », explique Yasmina Aouny. Convaincue de l’importance des "Sorodas wa Maore et des Chatouilleuses", elle veut laisser une trace de cette époque pour qu'elle puisse être transmise aux générations futures.

« Les Chatouilleuses représentent une génération tellement exceptionnelle que le monde entier, la planète tout entière doit avoir la possibilité d’accéder à l’état d’esprit qui animait ce groupe de femmes, révèle la porte-parole des femmes leaders.

« La jeune génération ne connait rien du parcours des Chatouilleuses. Elle est capable de dire que Zéna M'déré était une Chatouilleuse et peut aller jusqu'à affirmer que Younoussa Bamana était un "Soroda" mais ça s'arrête là. Cela reste très superficiel. Je pense donc que le travail d'écriture était nécessaire. » À travers son roman, Mme Aouny atteint son objectif, celui de restaurer « l’ambiance des Chatouilleuses et leur univers ».

Très au fait de l'histoire de sa région, la jeune femme rappelle que la coutume mahoraise est semblable à la coutume Makoua. Cette dernière veut que le dirigeant soit un homme mais épaulé, guidé et conseillé par des femmes. La femme est la gardienne du grenier, celle qui « joue un rôle socialement important, mais en politique le leader doit être un homme qui sera choisi parmi les jeunes hommes les plus brillants. Quand on analyse la constitution du groupe des Chatouilleuses et des Sorodas, on voit clairement que ce schéma était en place. On est partis chercher de jeunes hommes brillants, comme Younoussa Bamana et Marcel Henry, qui ont été épaulés et conseillés par ce groupe de femmes », affirme Yasmina Aouny.

Seulement, malgré ces épisodes glorieux où les femmes ont été au centre d'une lutte politique, aujourd'hui, il y a très peu de femmes au pouvoir à Mayotte, bien qu'elles soient plus instruites qu'auparavant. « Ce qu'il s'est passé, c'est qu'on a considéré pendant très longtemps que l'école était le lieu de la perversion, et que la femme n'avait pas à y mettre les pieds. Il fallait plutôt la préparer à s'occuper de son foyer et de son mari. Dans les premières années de l'école à Mayotte, les enfants n'y allaient pas, et quand ils ont commencé à y aller, seuls les garçons s'y rendaient », déplore-t-elle, tout en s’attachant à changer les choses. n

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Raïnat Aliloiffa

GILLES HALBOUT UN RECTEUR ENGAGÉ POUR MAYOTTE

Recteur de Mayotte depuis trois ans, Gilles Halbout s’est réellement attaché à l’île aux parfums. Depuis 2019, il mène le combat de l’éducation pour tous à Mayotte. Un engagement qui n’est pas de tout repos, mais qui le motive à déplacer des montagnes pour mener à bien sa mission. Quel bilan fait-il de ces trois dernières années à Mayotte ? Qui est l’homme qui se cache derrière le recteur ? Réponses dans ce portrait en toute intimité.

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Mayotte Hebdo n°1006 – 1er juillet 2022

Arrivé sur l’île le 1er juillet 2019, Gilles Halbout est indéniablement un recteur qui marquera l’histoire de l’académie de Mayotte. Le vice-rectorat est devenu un rectorat de plein exercice peu de temps après sa prise de fonction, mais ce qui le caractérise est son amour et son engagement pour le 101ème département de France. « L’avantage ici c’est que l’on voit les choses avancer. Si jamais je devais partir de Mayotte, je ferai tout pour y revenir un jour. Ici on a l’impression de tout le temps faire avancer les choses. Il y a tant à faire ! On a l’impression que l’on déplace des cailloux mais petit à petit on déplace des montagnes et c’est exaltant », souligne Gilles

“ SI JAMAIS JE DEVAIS PARTIR DE MAYOTTE, JE FERAI TOUT POUR Y REVENIR UN JOUR ”

Halbout le sourire aux lèvres. Sa plus grande fierté ? Avoir fait en sorte qu’il y ait moins de jeunes qui décrochent après la troisième ou la seconde. « On leur a permis de continuer leurs études notamment sur la voie professionnelle. J’ai contribué au développement de celle-ci et j’en suis fier. »

Le représentant de l’éducation nationale à Mayotte se félicite également d’avoir relancé le programme des constructions scolaires, même s’il reste encore beaucoup à faire.

Ces trois dernières années ont été semées d’embûches pour le recteur : crise sanitaire, périodes cycloniques, violences dans certains établissements scolaires… Malgré tout cela, le climat avec les syndicats et les familles est plus apaisé selon lui. « Je trouve qu’il y a beaucoup moins de blocages qu’avant. C’est dû au respect mutuel et au dialogue riche et établi avec les familles, les organisations syndicales et les élus. Tout le monde a compris que ce n’est pas la peine de bloquer pour nous alerter », explique-t-il.

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Un parcours exemplaire

Avant d’être recteur de Mayotte, Gilles Halbout est avant tout professeur des universités spécialisé en mathématiques. Son parcours n’a rien d’ordinaire. Né à Douai, ayant grandi dans la banlieue de Toulouse, sa mère enseignante l’élève seule. Inspiré par la profession de celle-ci, mais également motivé par l’envie d’enseigner, il s’engage dans l’éducation nationale pour « contribuer à résoudre les inégalités », indique-t-il. Après avoir fait une classe préparatoire aux grandes écoles à Toulouse, il intègre l’École normale supérieure à Paris. À l’issue de ses études supérieures, il devient maître de conférences à Strasbourg, puis professeur des universités à Montpellier. Il prend progressivement des responsabilités, gravit les échelons, pour finir président de l’université de Montpellier. Quant à l’île de Mayotte, elle entre dans sa vie bien avant 2019. « Lorsque j’étais doyen de la faculté des sciences à Montpellier, on est venu me chercher parce que l’on créait le centre universitaire de Dembéni, c’était au début de la départementalisation. J’ai accepté immédiatement et j’ai mobilisé des équipes pour accompagner le CUFR », raconte Gilles Halbout.

Mayotte, comme une évidence

Lorsqu’il arrive au bout du cycle de la présidence de la communauté d’université en 2019, il envisage spontanément d’apporter sa pierre à l’édifice pour ce territoire qu’il a connu quelques années plus tôt. « J’ai dit à un ami que, s’il y a bien quelque chose que j’aimerais, c’est être recteur de Mayotte. Le lendemain on m’a appelé pour me proposer le poste », affirme-t-il. Tout s’enchaîne, il découvre

Un proverbe qui m’inspire

ce nouveau métier dans un territoire où il y a tout à faire. Sa persévérance est sans failles, et il multiplie les grands et petits travaux pour l’éducation nationale à Mayotte. « Je suis content pour ces trois premières années d’avoir vu un certain nombre de transformations : le passage de vice-rectorat à rectorat, on a travaillé sur la scolarisation, sur les filières d’excellence, sur la mobilité des personnels statutaires, on a fait avancer les situations de beaucoup de contractuels », détaille le recteur. Sa prochaine grande mission ? Le dispositif « Dire, lire, écrire » « On va déployer ce plan car nous devons travailler sur les problèmes de français à travers l’expression orale, écrite, et la compréhension. Nous avons trop d’élèves qui sont en grande difficulté », reconnait Gilles Halbout. Un combat qu’il mène depuis son arrivée à Mayotte et qu’il continuera à mener jusqu’à la fin.

« Parfois c’est dur »

Le métier de recteur n’est pas de tout repos, particulièrement lorsqu’il s’agit de Mayotte. « On est toujours sur le fil et en tension, c’est à dire qu’on ne peut pas se relâcher. Ce que je trouve difficile c’est de toujours devoir s’attendre à un imprévu. Et en même temps il faut garder une hauteur suffisante et voir un peu plus loin », argumente-t-il. Aujourd’hui, il semble avoir trouvé le parfait équilibre, mais il ne cache pas que « parfois c’est dur de supporter cette pression sans la famille. » Sa femme et ses trois filles sont restées dans l’hexagone, mais il se dit chanceux d’être entouré de « collaborateurs formidables et de quelques amis. » Cela étant dit, il reconnait que lorsqu’on est recteur, on a très peu d’amis… Malgré tout cela, son amour et son envie de bien faire pour Mayotte n’en sont pas ébranlés, preuve de son engagement pour cette île qu’il a définitivement adopté. . n

C’est le proverbe mahorais « Wamo tabou outso vona ». Cela veut dire qu’on sème ce qu’on récolte, que ce soit du bon ou du mauvais. Et puis si on ne sème rien on n’aura rien. J’aime bien aussi les fables de Jean de La Fontaine et celle qui m’inspire le plus est « le laboureur et ses enfants » parce que les enfants découvrent à la mort du laboureur que le plus grand des trésors, c’est le travail.

Un objet qui me définit

Un ballon de rugby, parce qu’il y a toujours une part d’incertitude quand il rebondit et ça va vite. Et puis il ne faut pas le tenir trop longtemps.

Une personne que j’admire

Jean Zay, parce qu’il a été ministre de l’Éducation nationale et est allé jusqu’au bout de ses convictions. Pendant la guerre, il a lutté contre le régime de Vichy, il a été assassiné. C’est quelqu’un qui a toujours vu l’éducation de manière large et c’est un vrai républicain qui portait des idées de laïcité et de fraternité, de belles valeurs.

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Axel Nodinot

GOULAM CHANTE SA VIE ET VIT SES RÊVES

Tournée internationale, dates à Mayotte, collaborations de prestige… Goulam ne cesse de voir plus haut à mesure que s’envole sa carrière, et savoure chaque moment de cette dernière. Alors que l’artiste franco-comorien va sortir le premier extrait de son prochain EP, il revient avec nous sur son parcours déjà bien fourni, tout en gardant l’humilité appréciée par ses fans… Et sa petite fille, ayant récemment vu le jour.

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Mayotte Hebdo n°1007 – 8 juillet 2022

Entre ses concerts à Mayotte et ailleurs, la promo sur les réseaux sociaux et la paternité, il n’a pas une seconde à lui. Pourtant, c’est un Goulam accessible qui nous répond, sa fatigue n’ayant d’incidence sur sa voix cristalline. C’est d’ailleurs cette dernière qui le fait connaître, il y a quelques années en arrière, lorsqu’il la pousse sur des rythmes entraînants, souvent pour chanter l’amour ou la désillusion, mais toujours de manière sincère. « Ça a commencé durant le Covid, se souvient-il. Lorsque j’ai sorti le morceau « On s’en ira », elle a fait le buzz sur TikTok, qui a connu un véritable essor lors de la crise sanitaire. Cela m’a permis d’être connu aux

“ EN ÉTANT UN PETIT PAYS, ON PEUT QUAND MÊME EXPORTER NOTRE CULTURE AUSSI LOIN ”

quatre coins du monde, et notamment dans l’océan Indien, en Afrique et dans le Pacifique. Mais je ne pouvais pas rencontrer le public. »

Depuis, de l’eau a coulé sous les ponts, et sous les chemtrails des vols, qui ont repris.

Le chanteur raconte par exemple ce « concert magique » à Tahiti, en décembre dernier : « Ça a été un très bel échange culturel avec les musiciens sur place ». Il y a quelques jours, Goulam pose même ses valises à Mayotte, pour une série de quatre concerts, au Trévani, à Bambo, au Moya et place Congrès, à Pamandzi, entouré de musiciens et artistes locaux. « Pamandzi est une ville où j’ai beaucoup d’attaches, de la famille,

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des amis, mon manager, affirme-t-il. C’était aussi l’occasion de faire un concert en Petite Terre, chose assez rare. Le public a répondu présent. » Lorsque vient le morceau « Mama », les mères de ses amis montent même sur scène à ses côtés. « C’était un moment pur émotionnellement parlant, ça m’a beaucoup touché. »

10 ou 10 000 personnes, il y a toujours cette boule au ventre

S’il naît à Anjouan, Goulam a de nombreuses attaches à Mayotte, et notamment en Petite Terre. Cependant, une fois son baccalauréat en poche, il quitte l’Union des Comores pour la métropole, où il suit des études en informatique. « J’ai été ingénieur en informatique, je n’ai jamais eu de proposition de maison de disques, avoue-t-il. J’ai tout simplement exercé ma passion, la musique, de la manière la plus simple et vraie possible, et posté mes chansons sur Internet. » S’ensuit le succès que, humble, l’artiste dédie à sa fan base. En témoigne ce long message posté sur Instagram le 26 juin, jour de son anniversaire, qui peut pourtant se résumer par son ultime mot : merci. « Je n’étais pas destiné à vivre de la musique, c’est ma communauté qui m’a permis d’avoir cette vie, reconnaît Goulam. Merci à eux, à mon entourage, aux personnes qui ont cru en moi, car je suis un artiste indépendant, et le public est donc mon pilier. » Humilité, gueule d’ange et voix pure, le jeune homme a le profil du gendre idéal, mais passe sa vie en tournée. Comme lors de ce soir de mai, à Bamako, au Mali, où il chante devant 11 000 personnes. « C’était incroyable, frissonne-t-il. Je ne m’attendais absolument pas à un tel engouement. On ne m’avait même pas prévenu du nombre de personnes, je l’ai découvert en montant sur scène. C’était impressionnant de les voir chanter tout le répertoire, même en notre langue, ça m’a fait chaud au cœur. En étant un petit pays, on peut quand même

exporter notre culture aussi loin. » Comme pour nombre d’autres artistes, la scène est une corne d’abondance d’adrénaline : « 10 ou 10 000 personnes, il y a toujours cette boule au ventre. Mais c’est un petit trac qui se transforme vite en une grande énergie »

Des expériences prévues avec les fans

Après une date à Bruxelles, capitale du Plat Pays, et plusieurs shows à La Réunion, la tournée reprendra à la rentrée, et verra Goulam revenir dans le berceau de l’humanité, en Afrique. En attendant, le chanteur peut compter sur le succès des titres sortis cette année, et notamment celui de « Cadeau du ciel », abordant de façon poignante la parentalité. Il faut dire que le trentenaire a eu le choix du roi : un petit garçon de trois mois, et une fille de quatre ans, pour laquelle est écrite ce titre. « Je l’ai écrite à la naissance de ma fille, précise-t-il. J’ai mis un peu de temps à l’écrire et à la sortir, car je ne voulais pas être à chaud. Je voulais avoir le recul pour trouver les bons mots. Je l’ai d’ailleurs écrite dans ma langue natale, parce que les termes que j’y utilise sont forts. »

Cette patience, au vu des commentaires et des réactions des internautes et des spectateurs, a payé. Il faut dire que le public est friand d’émotions, qui plus est intimes, à l’image de ce qu’a fait Booba avec le titre « Petite fille ». Que ses fans se rassurent, le prochain projet de Goulam promet d’être déchirant, « et le soignant des cœurs sera là pour vous mettre en musique son vécu », promet 2K, son manager. L’EP, qui comportera entre 8 et 10 titres, arrivera à la rentrée, et bénéficiera d’une première écoute publique, en compagnie des fans. Avant cela, un premier extrait arrivera fin juillet. « J’ai hâte de le sortir, s’impatiente le chanteur. Je suis fier de ce que j’ai fait avec l’équipe sur ce projet ». En plus de cela, d’autres mignardises à destination des auditeurs sont à venir. Stay tuned !n

Un feat avec un taulier du rap

Lors de la dernière Coupe d’Afrique des Nations, pour laquelle les Comores s’étaient qualifiées, Goulam participe à une compilation qui le fait participer à un titre avec Rohff, légende du rap français et d’origine comorienne. « Après le tournage, il m’a contacté pour me dire qu’il avait aimé ma voix et ce que j’avais fait sur le titre, se remémore l’artiste. Il m’a donc demandé de figurer sur son album, qui allait sortir deux mois plus tard. J’étais très surpris, et j’ai accepté bien sûr. J’étais en tournée sur Madagascar, et quand je suis revenu à Paris, on a fait le son dans son studio, sans savoir qu’il allait le retenir sur son album. »

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Raïnat Aliloiffa

LA MENDOSA EN TOUTE INTIMITÉ

Du haut de ses 24 ans, La Mendosa s’est déjà fait un nom dans le monde du rap mahorais. Elle crée de la musique depuis son adolescence, mais la rappeuse s’est dévoilée au public il y a deux ans. Désormais, elle s’est imposée comme étant la révélation féminine de ces dernières années dans cet univers très masculin, particulièrement à Mayotte. De nature discrète, La Mendosa a accepté de se confier exclusivement à Mayotte Hebdo.

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Mayotte Hebdo n°1010 – 9 septembre 2022

" JE ME RESPECTE EN TANT QUE FEMME ET ARTISTE "

À Cavani, La Mendosa est chez elle. Elle y a grandi, elle connait tout le monde et se sent à l’aise. Même si aujourd’hui beaucoup la reconnaissent dans la rue, elle affirme être la même fille de quartier. « J’ai les mêmes amis, les mêmes fréquentations. Et d’ailleurs je m’inspire de mon entourage, de ce que je vis, pour créer. » L’artiste n’est pas novice dans l’univers du rap. « J’ai commencé plus jeune avec mes frères qui en faisaient », se souvient-elle. C’est à l’âge de 14-15 ans qu’elle commence à s’y intéresser sérieusement.

Au début, il ne s’agit que d’un passe-temps après ses heures de cours, mais très vite, l’adolescente qu’elle était se passionne pour cet art qui « n’a rien de féminin », selon certains. « On me dit parfois que je suis une fille et que je devrais chanter au lieu de rapper, mais je n’en ai pas envie et je ne vois pas où est le problème. » Pendant des années, elle fait du rap uniquement avec ses amis de quartier et préfère se concentrer sur ses études. Elle est d’ailleurs diplômée d’une licence de droit. Mais à son retour à Mayotte en 2019, l’un de ses soutiens la pousse à enregistrer. Elle refuse d’abord avant de revenir sur sa décision. C’est à ce moment que la machine est lancée.

La considération des rappeurs mahorais

La Mendosa commence à se faire connaître en faisant des featurings avec des artistes mahorais tels que Walter, Patsaou ou encore

Nixo. Mais pour l’instant, son plus gros succès solo est le titre « N.V.M », sorti en février de cette année. Son public ne manque pas d’éloges à son égard. La rappeuse écrit et compose ses chansons, toutes en langue locale. Elle a créé un petit studio chez elle qui lui permet d'enregistrer tranquillement. « C’est Reed Blowz qui m’a offert mon premier matériel pour faire ce studio », souligne-t-elle. Elle y passe des heures à gribouiller, faire des essais, enregistrer. « C’est en studio que je me sens à mon aise. Dans tout ce processus de création de musique, c’est ma phase préférée. » En effet, elle reconnait ne pas être dans son élément sur scène ou devant les caméras, à cause du regard des gens. C’est d’ailleurs l’une des raisons pour laquelle elle accorde rarement d’interviews. Mais l’interprète de « Gangsta Love » peut toujours compter sur ses compères rappeurs mahorais, qui l’ont immédiatement très bien accueillie et l’encouragent à se surpasser. « Je remercie surtout Walter et El Saphir, parce que sans eux ça ne serait pas pareil. »

Sa famille, un soutien sans failles

Ses frères, ceux qui lui ont fait découvrir l’univers du rap, ne sont également jamais bien loin quand elle a besoin de conseils. Au même titre que ses parents, qui l’ont soutenue dès le début. « Mon père nous encourage dans tout ce que l‘on entreprend, mais dès le départ il m’a dit que si je voulais me lancer là-dedans, il fallait que je le fasse à fond et que j’assume. » Sa famille lui sert de barrière contre les mauvaises critiques et ceux qui lui disent qu’elle est une « Diam’s de Wish ». La jeune femme ne répond pas et ne lit pas les avis car « je sais que certains commentaires peuvent être haineux et je préfère m’en préserver », affirme-t-elle.

Loin d’être timide, elle est même considérée comme étant « la patronne » dans son quartier, mais aujourd’hui l’artiste a fait le choix de passer outre ce genre de remarques car elle est fière de son travail. « Je me respecte en tant que femme et en tant qu’artiste. Je fais très attention à ne pas être vulgaire car je sais que mes parents regardent tout ce que je fais et je ne veux pas qu’ils me voient comme ça », ajoute-t-elle. Le seul reproche qu’ils lui font, c’est de ne pas comprendre tout ce qu’elle raconte dans ses chansons. « C’est normal, c’est un langage de rue, ils ne peuvent pas tout saisir », sourit-elle. Elle est aujourd’hui déterminée à prouver qu’une femme mahoraise peut faire du rap, qui plus est en shimaoré. Retenez bien son nom, La Mendosa, puisqu’elle marquera certainement la scène musicale mahoraise dans les années à venir. n

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TRÈS ATTENTION À NE PAS ÊTRE VULGAIRE "
" JE FAIS

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Raïnat Aliloiffa

YOLANDE RACHEKA UNE FEMME AUX MULTIPLES TALENTS

Du haut de ses 26 ans, Yolande Racheka Randriantsalama a déjà une sacrée expérience derrière elle. Cette cheffe d’entreprise est à la tête de deux restaurants et d’une marque de vêtements. Lorsqu’elle a choisi la voie de l’entrepreneuriat alors qu’elle n’avait que 20 ans, elle n’avait qu’un seul objectif, celui de relever tous les défis qui seront sur son chemin.

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Mayotte Hebdo n°1017 – 28 octobre 2022

« J’ai vécu d’humiliationsbeaucoup »

Dans son restaurant l’Italiano, situé à Kawéni, Yolande Racheka n’a pas une minute à perdre. Dès l’instant où elle y met les pieds, jusqu’à la fin du service, elle est partout. Une manière pour elle de s’assurer que tout se passe bien. Cet établissement est le projet d’une vie, qu’elle partage avec sa sœur. Elles l’ont ouvert il y a deux ans, en pleine pandémie de Covid-19 et ont réussi à le maintenir à flot malgré la crise. Il faut dire que la jeune femme n’en n’est pas à son coup d’essai. Malgré son jeune âge, 26 ans, elle est une cheffe d’entreprise aguerrie.

Il y a six ans, elle ouvrait un restaurant de burgers faits maison, en collaboration avec sa famille, appelé le Bon coin, localisé à Mamoudzou. « Nous étions les premiers à l’époque », rappelle-t-elle. « Puis on a ouvert l’Italiano, un restaurant à thème. Tout le monde nous a dit que ça ne fonctionnerait pas et on a prouvé le contraire », ajoute-t-elle fièrement. Yolande Racheka Randriantsalama s’est investie corps et âme dans son entreprise. Elle a appris à faire des pizzas à l’italienne avec une Mama italienne en Italie. Et elle n’hésite pas à donner un coup de main en cuisine. « Aujourd'hui personne à Mayotte ne fait les pizzas comme nous. On essaye de ne mettre que des produits italiens », selon elle. Ces deux restaurants gérés en partie par la jeune femme, sont la preuve qu’une personne est capable d’exceller dans plusieurs domaines.

Le stylisme, son objectif ultime

Rien ne prédestinait cette entrepreneure à être propriétaire dans la restauration. En effet, Yolande Racheka a fait des études de stylisme. Durant son adolescence, elle est très renfermée sur elle-même car elle est victime de harcèlement scolaire. Elle trouve son refuge uniquement dans l’art. Un jour, elle a le courage d’avouer à son principal adjoint qu’elle veut être styliste et ce dernier fait tout pour réaliser le rêve de la jeune fille. « Je suis la première lycéenne à avoir obtenu une bourse étudiante de la DASU », affirme-t-elle. La DASU est l’organisme du conseil départemental chargé d’attribuer des bourses aux étudiants qui partent se former en dehors de Mayotte. À 15 ans, la jeune fille

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se retrouve dans un lycée à Marseille où elle fait un bac « métiers de la mode et du vêtement » puis poursuit avec une licence en design à Nîmes. Cependant, la Mahoraise qu’elle est supporte mal le froid et la solitude et décide de rentrer chez elle en 2016. « La métropole, ce n’était pas fait pour moi », reconnait-elle. Une fois à Mayotte, elle sait qu’il sera difficile pour elle de vivre de son rêve, elle décide alors de se lancer dans la restauration pour « gagner de l’argent rapidement. », tout en continuant la couture, de temps en temps, pour elle. « Mon copain a fait des vidéos, on les a postées sur les réseaux sociaux et ça a eu un tel engouement que j'ai continué. » Et c'est ainsi que nait la marque de vêtements Racheka Handmade. La créatrice a sorti plusieurs collections mais a arrêté la couture depuis quelques mois. « Je n'ai pas le temps de tout faire. Je gère d'abord les restaurants, il faut que j’embauche plus de monde, ensuite j'aurai plus de temps à consacrer au stylisme », explique-t-elle. Ce n’est donc que temporaire, car elle le martèle, pour rien au monde elle n’abandonnera la confection de vêtements. « C’est mon rêve absolu ! Je veux créer une marque de prêt-à-porter et je vais tout faire pour y arriver. »

La vie de cheffe d’entreprise à Mayotte

Depuis qu’elle est dans le monde de l’entrepreneuriat, Yolande Racheka en a vu de toutes les couleurs. « Être une

femme cheffe d’entreprise à Mayotte c'est difficile. J’ai vécu beaucoup d’humiliations. Parce que je suis jeune, je suis typée Malgache et Mahoraise donc les gens pensent que je ne peux pas être la propriétaire des restaurants. On m’a souvent appelée commis ou serveuse », raconte-t-elle. La restauratrice se dit déçue de cette vision des choses, à tel point qu’elle estime que sa jeunesse et le fait d’être une femme est un handicap pour elle. Ses origines malgaches lui ferment également des portes selon elle. « Lorsqu’il y a des forums, des rencontres sur les femmes entrepreneures on ne m’appelle jamais pourtant je suis la plus ancienne, celle qui a plus d’expérience parmi les jeunes femmes entrepreneures à Mayotte. » Elle justifie cela par son côté malgache qu’elle tient de son père, pourtant elle est également Mahoraise par sa mère et parle couramment le shimaoré.

Cela dit, ce n’est pas pour autant qu’elle se laisse faire. Au fil des années, elle a su s’imposer et faire valoir ses droits. Déterminée à accomplir tout ce dont elle a toujours rêvé, rien ni personne ne pourra l’empêcher de le faire. Et elle n’a pas envie de choisir entre ses passions, car elle sait qu’elle peut tout faire. « J’adore la cuisine, la mode et le design. Ce qui m'épanouirait vraiment c’est de pouvoir faire les trois et je sais que j’y arriverai ! » n

« J’adore la cuisine, la mode et le design »

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UNE ÎLE EN TRAVAUX

L’EUROPE PREND SES ASSISES À TSINGONI

UN BÂTIMENT FLAMBANT NEUF POUR ACCUEILLIR LES SERVICES EUROPÉENS À MAYOTTE. LE GROUPEMENT D’INTÉRÊT PUBLIC (GIP) L’EUROPE À MAYOTTE A DÉSORMAIS PRIS POSSESSION DE SES NOUVEAUX BUREAUX DANS LE VILLAGE DE TSINGONI, AU CENTRE DE L'ÎLE. UNE SOMPTUEUSE BÂTISSE À L’ENTRÉE DU VILLAGE QUI PERMETTRA DE CENTRALISER LES EFFECTIFS DU GIP EUROPE, AUPARAVANT SITUÉS À MAMOUDZOU ET LONGONI. LES TRAVAUX ONT DURÉ QUELQUES MOIS, S’ÉTALANT D'AVRIL À OCTOBRE 2022. ILS ONT COÛTÉ 700 000 € ET PORTENT SUR 545 MÈTRES CARRÉS DE SURFACE UTILE POUR 47 POSTES DE TRAVAIL. PLUSIEURS ENTREPRISES ONT ŒUVRÉ À SA RÉALISATION, ET NOTAMMENT SOCOTEC RÉUNION POUR LE CSPS, SAS BET976 POUR LA MAÎTRISE D'ŒUVRE, SAS MGS POUR LE LOT 1 VRD (MAÇONNERIE, MÉTALLERIE, REVÊTEMENT SCA, PLOMBERIE ET PEINTURE). LA SME EST POUR SA PART INTERVENUE SUR LE LOT 2 (ÉLECTRICITÉ, INCENDIE, CLIMATISATION) ET LE LOT 3 A ÉTÉ ATTRIBUÉ À LA SARL IMPACT 2000 (MENUISERIE ALUMINIUM ET BOIS).

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À KOUNGOU, UN PROJET POUR LIMITER L’ÉROSION

La Ville est partie du constat que les pratiques agricoles favorisent l’envasement du lagon. Dans le même temps, elle souhaite limiter la progression des constructions anarchiques, insérer les habitants éloignés de l’emploi tout en permettant aux agriculteurs de structurer et de développer leur activité. Pour répondre à tous ces enjeux, elle vient de lancer un projet nommé Quartier fertile.

« Les pratiques culturales autour du village de Majicavo Koropa appauvrissent les sols et entraînent un envasement du lagon dus à une érosion renforcée par la mise à nu des sols. » C’est de ce constat qu’est partie la Ville de Koungou avant de lancer son projet nommé « Quartier fertile ». Et ce n’est pas le seul qu’elle a dressé. Avec 36 % de la population de Koungou – qui compte 32 000 habitants – Majicavo Koropa est le village le plus peuplé. Mais l’offre de logement n’est pas capable d’absorber toute la population. Les espaces naturels et agricoles sont ainsi progressivement occupés par des constructions anarchiques. « Sur les 17 ha de surface agricole de la commune, 2,5 sont occupés par des bangas », souligne William Mamokoro chargé de projets agricoles au sein de la Ville de Koungou, qui note également un niveau de chômage élevé.

Dans le même temps, un tiers des ménages dépendent de l’agriculture. Mais moins de 35 % des exploitations sont déclarées. C’est donc aussi pour limiter l’urbanisation, favoriser l’insertion socio-économique des populations éloignées de l’emploi et sortir les producteurs de l’économie informelle, en les aidant à structurer leur activité, que la Ville de Koungou a lancé son projet tourné vers l’agriculture.

Clôturer les parcelles et placer des surveillants

Hourmatie Assane, agricultrice depuis 2008 fait partie des exploitants accompagnés dans ce cadre. Sur une parcelle d’un demihectare, elle cultive du manioc, du maïs et des ananas. « Auparavant, je vendais les fruits et légumes chez moi. Mais aujourd’hui, la production sert uniquement à nourrir ma famille. On n’a plus assez de quantité, on se fait voler près de 70 % de ce qu’on cultive », désespère-t-elle. Pour sécuriser sa parcelle et lui permettre de se professionnaliser en augmentant la productivité de son exploitation, la Ville de Koungou souhaite d’abord sanctuariser les espaces agricoles aménagés. « L’idée est d’uniformiser les parcelles, d’aménager des pistes d’accès, et d’y installer durablement des producteurs. Au total, 12 petits agriculteurs, qui ne bénéficient aujourd’hui d’aucune aide, seront accompagnés. L’objectif est de rendre ces exploitations viables économiquement », souligne William Mamokoro. La commune envisage de clôturer leurs exploitations et d’insérer professionnellement les habitants des bangas, qui se situent aux alentours, en leur proposant de surveiller les terres agricoles pour lutter contre les vols. En parallèle, Koungou a signé une convention

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avec le service pénitentiaire d'insertion et de probation de Mayotte pour faire travailler au moins cinq tigistes par an. Ces personnes condamnées par la justice à effectuer des travaux d’intérêt général pourront, dans ce cadre, remettre en état les parcelles en friche.

Déclarer les agriculteurs

Pour permettre aux agriculteurs d’aller vers une professionnalisation de leur activité, La Ville souhaite également les enregistrer auprès de l’Urssaf pour qu’ils aient un numéro Siret mais aussi les faire connaître auprès de la chambre d’agriculture et les aider dans les

démarches pour qu’ils obtiennent des aides de la Politique agricole commune (PAC). « L’idée est, en parallèle, de les former, notamment au sein du lycée agricole de Coconi afin qu’ils adoptent de nouvelles pratiques, plus respectueuses de l’environnement », poursuit le chargé des projets agricoles de la Ville.

Le programme, sélectionné dans le cadre de l’appel à projet « les quartiers fertiles » dont l’un des objectifs est de déployer l’agriculture urbaine et périurbaine dans les quartiers prioritaires, est financé pour moitié par l’agence nationale de renouvellement urbain. Le reste est pris en charge par la Ville de Koungou. n

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Hourmatie Assane, agricultrice depuis 2008, est accompagné pour se professionnaliser dans le cadre du projet « quartier fertile. »

LISEZ MAYOTTE LA BD (3/6) : LIÉTAR, PÈRE DE BAO

AGRÉGÉ DE LETTRES MODERNES ET DOCTEUR EN LITTÉRATURES FRANCOPHONES, CHRISTOPHE COSKER EST L’AUTEUR DE NOMBREUX OUVRAGES DE RÉFÉRENCE SUR LA LITTÉRATURE DE L’ÎLE AUX PARFUMS, NOTAMMENT UNE PETITE HISTOIRE DES LETTRES FRANCOPHONES À MAYOTTE (2015) DONT IL REPREND, APPROFONDIT ET ACTUALISE, DANS CETTE CHRONIQUE LITTÉRAIRE, LA MATIÈRE.

À tout seigneur tout honneur, au centre de cette série sur la bande dessinée à Mayotte, l’acteur principal se nomme Vincent Liétar. Comme de tradition à Mayotte selon ce qu’observe le spécialiste de la bande dessinée dans l’océan Indien Christophe Cassiau-Haurie, la littérature en estampes naît d’abord du dessin de presse et rejoint ensuite la forme de l’album. Avant Cyrille Le Corre et sa bweni, personnage générique, Vincent Liétar invente un personnage singulier, Bao, l’enfant de Mayotte. Il s’agit à la fois d’un individu et d’un type, celui du gamin de Mayotte, mais aussi d’un symbole, celui de la bande dessinée elle-même étant donné que, par jeu de mots, bao signifie, en langue vernaculaire, planche. Notons enfin que l’auteur en fait un double de lui-même.

Vincent Liétar est d’abord, quant à lui, architecte à Mayotte. Il est l’inventeur de la case SIM, partie importante du paysage architectural à Mayotte. C’est en 1986 qu’il invente un personnage promis à une grande fortune, Bao : « Bao a vu le jour le vendredi 8 août à six heures du matin. Bao est né sous le signe du lion, il faut y voir les causes inexorables de son tempérament tour à tour joueur, rieur, débonnaire, léger, paresseux et désespérément heureux. Ces traits somme toute superficiellement positifs seraient supportables s’ils ne s’accompagnaient de rancœurs et d’humeurs ataviques que Bao tient de son père Vincent Liétar, né le 11 mai 1956 (signe taureau, plaignez les hommes et les femmes qui épousent des taureaux)

venu à Mayotte en des temps reculés (13 juin 1981) à une époque où l’eau ne courait que dans les rivières boueuses, sous le brouillard d’anophèles vibrionnants, entre les cadavres boursouflés de malaria et de choléra de tous ces idéalistes ‘métro’ qui n’avaient pas compris que la prime servait essentiellement à se préserver dans l’alcool… »

En effet, le personnage excède bientôt les planches pour orner des méthodes d’apprentissage de la lecture - CP J’apprends à lire avec Bao (1999) de G. Dupuy & J Baudonnet -, un agenda – celui de 2004 pour les éditions du Baobab, la revue des programmes Télébanga, les affiches des courses de pneus et, ultime distinction, en 2011, un album intitulé En attendant le département. En d’autres termes, Bao est partout. Grâce à ce personnage, le dessinateur met en scène Mayotte tout en mettant à distance les problèmes que connaît l’île, sans oublier d’ouvrir un dialogue interculturel dans lequel on peut discuter des formes.

Nous terminerons cette chronique par l’ekphrasis (description) de la première planche de l’album En attendant le département. Intitulée « TT… transit tropical » , elle se compose de quatre vignettes rectangulaires empilées dont la dernière prend la moitié de la page. Elle est en outre en couleurs tandis que les trois précédentes sont en noir et blanc, ou plutôt en nuances de gris. Sur la première vignette, on voit un embouteillage que l’on placerait volontiers sur

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LITTÉRATURE

le périphérique parisien. En plus du premier inconvénient qui consiste à être bloqué dans une circulation qui porte alors mal son nom, il pleut à verse. Or, dans l’unique bulle de la vignette, un personnage remarque que c’est demain l’été et que le temps est annoncé beau. Dans la vignette en-dessous, on voit une nouvelle file, non plus de voitures, mais d’êtres humains. Ils font la queue pour prendre l’avion et au comptoir d’enregistrement, une personne est refoulée pour excédent de bagages. La vignette suivante montre un avion rempli. Les paroles de l’hôtesse de l’air indiquent que l’atterrissage est proche. Enfin, la dernière image crée une rupture à la fois par sa taille et ses couleurs. Finie la grisaille, on y voit un enfant confortablement installé dans une pirogue à balancier,

un fil relié à un bouchon autour de son orteil. C’est Bao qui accueille le nouvel arrivant et lui indique la fin de ses problèmes. À l’arrière-plan, on découvre une île tropicale verte posée sur un lagon, et un îlot de sable blanc qui fait rêver.

Les dessins de Vincent Liétar, publiés dans le Journal de Mayotte puis dans Mayotte Hebdo, constituent une part intéressante de la mémoire de Mayotte, à la façon d’un journal intime publié sous forme de dessins.

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SPORT Calendriers - classements - résultats FOOTBALL Régional 1 FOOTBALL Régional 2 Dernière journée Jumeaux de Mzouazia 2–2 Bandrélé FC Diables noirs de Combani 1–3 ASC Abeilles de Mtsamboro ASC Kawéni 0–1 Tchanga SC USCP Anteou 2–1 AS Rosador de Passamaïnty AS Sada – AS Bandraboua FC Mtsapéré 2–2 AJ Kani Kéli Dernière journée UCS de Sada 2–1 FC Majicavo FC Kani Bé 1–4 AS Neige de Malamani AJ Mtsahara 2–1 US Kavani Olympique Miréréni – Foudre 2000 FC Chiconi – USCJ Koungou FC Dembéni 3–0 ASJ Moinatrindri (forfait) Equipe Pts J G N P Dif 1 FC Mtsapéré 49 22 14 7 1 +29 2 Jumeaux de Mzouazia 43 22 12 7 3 +19 3 ASC Kawéni 42 22 13 3 6 +16 4 AJ Kani Kéli 37 22 11 4 7 +12 5 Diables noirs de Combani 31 21 8 8 5 +3 6 Bandrélé FC 29 21 9 3 9 -7 7 ASC Abeilles de Mtsamboro 27 22 8 3 11 -13 8 AS Rosador de Passamaïnty 26 22 7 5 10 -2 9 Tchanga SC 23 21 6 6 9 -7 10 AS Bandraboua 21 22 6 3 13 -20 11 USCP Anteou 19 22 5 4 13 -16 12 AS Sada 19 22 6 1 15 -15 Equipe Pts J G N P Dif 1 US Kavani 41 22 11 8 3 +13 2 AS Neige de Malamani 40 22 10 10 2 +16 3 FC Majicavo 36 22 10 6 6 +11 4 AJ Mtsahara 36 22 11 5 6 +12 5 Foudre 2000 35 21 11 2 8 +10 6 FC Dembéni 32 21 8 9 4 +3 7 FC Chiconi 28 21 8 4 9 -1 8 UCS de Sada 28 22 7 7 8 -8 9 Olympique Miréréni 25 21 6 7 8 -2 10 FC Kani Bé 21 22 6 3 13 -16 11 USCJ Koungou 18 21 4 6 11 -14 12 ASJ Moinatrindri 9 21 4 1 15 -24 56 • Mayotte Hebdo • N°1025 • 23/12/20 22

FOOTBALL

féminines Journée

Wahadi ASC (forfait général) 0–3 USC Labattoir Club Unicornis 4–0 ASJ Handréma ASO Espoir Chiconi 3–2 Entente Miréréni/Tsingoni AS Jumelles de Mzouazia 2–0 Olympique de Sada FC Mtsapéré 10–0 Devils Pamandzi Exemptées : US Kavani Dernière journée : Samedi 24 décembre à 15h30 Olympique de Sada 3–0 Wahadi ASC (forfait général) USC Labattoir – FC Mtsapéré US Kavani – AS Jumelles de Mzouazia Devils Pamandzi – Club Unicornis

Handréma – ASO Espoir Chiconi Exemptées : Entente Miréréni / Tsingoni

Régional
Equipe Pts J G N P Dif 1 AS Jumelles de Mzouazia 46 17 15 1 1 +67 2 Club Unicornis 37 16 11 4 1 +45 3 FC Mtsapéré 35 16 11 3 2 +42 4 USC Labattoir 32 17 10 2 5 -3 5 ASJ Handréma 24 17 7 3 7 -17 6 Devils Pamandzi 21 17 6 3 8 -32 7 Entente Miréréni / Tsingoni 20 18 6 2 10 -10 8 Olympique de Sada 13 17 4 2 10 -19 9 ASO Espoir de Chiconi 13 17 4 1 12 -21 10 US Kavani 1 17 0 1 16 -56 11 Wahadi ASC 0 0 0 0 0 0 FOOTBALL Régional 1 Entreprises Dernière journée AS Colas 2–1 ASC Sodifram CHM Foot – Entente CPSM Mlezi Maoré – OGC Tilt SOS AS Cuisibains 1–1 Mayotte air service ASP Maison d’arrêt (forfait général) – Mairie de Mamoudzou ASC Préféduc 3–1 AS Emca Equipe Pts J G N P Dif 1 AS Colas 49 20 16 2 2 +34 2 AS Cuisibains 45 20 15 1 4 +35 3 Mairie de Mamoudzou 43 21 14 2 5 +23 4 AS Emca 31 21 9 4 8 +2 5 Mayotte air service 30 20 9 5 6 +14 6 Mlezi Maoré 27 19 7 7 5 -1 7 Entente CPSM 24 19 8 0 11 -6 8 ASC Sodifram 19 19 5 4 10 -5 9 OGC Tilt SOS 18 20 5 4 11 -19 10 ASC Préféduc 16 21 5 2 14 -17 11 CHM Foot 12 20 2 6 12 -44 12 ASP Maison d’arrêt -1 10 0 1 7 -24 57 • Mayotte Hebdo • N°1025 • 23/12/20 22
1
21
ASJ
SPORT Calendriers - classements - résultats BASKET Prénationale féminine Journée 13 – 14 janvier 2023 Golden Force – Colorado Beetle Mtsahara Partizan BCA – Basket club Iloni Fuz’Ellips de Cavani – Basket club de Mtsapéré Chicago club de Mamoudzou – Magic basket de Passamaïnty Equipe Pts J G P Dif 1 Basket club de Mtsapéré 17 9 8 1 +274 2 Fuz'Ellips de Cavani 16 8 8 0 +347 3 Magic Basket Passamaïnty 14 9 5 4 +63 4 Golden Force 13 8 5 3 +75 5 Chicago club de Mamoudzou 12 9 3 6 -30 6 Partizan BCA 11 9 2 7 -253 7 Basket club Iloni 10 9 1 8 -285 8 Colorado Beetle Mtsahara 9 7 2 5 -191 BASKET Prénationale masculine Journée 14 – 7 et 8 janvier 2023 Rapides Éclairs – Basket club de Mtsapéré TCO Mamoudzou – Colorado Beetle Mtsahara Jeunesse Canon 2000 – Vautour club Labattoir Basket club de Tsararano – Étoile bleue de Kawéni Fuz’Ellips de Cavani – Gladiator de Doujani Equipe Pts J G P Dif 1 Basket club de Mtsapéré 24 12 12 0 +207 2 Vautour club de Labattoir 24 13 11 2 +215 3 Étoile bleue de Kawéni 23 13 10 3 +220 4 Fuz'Ellips de Cavani 19 13 6 7 +9 5 TCO Mamoudzou 18 13 5 8 -9 6 Gladiator de Doujani 18 12 6 6 +10 7 Colorado Beetle Mtsahara 15 12 3 9 -213 8 Jeunesse Canon 2000 14 12 2 10 -200 9 Rapides Éclairs 13 9 4 5 -22 10 Basket club de Tsararano 12 11 1 10 -217 58 • Mayotte Hebdo • N°1025 • 23/12/20 22
Prénationale Poule A
12 AC Chiconi – HC Kani Kéli TCO Mamoudzou – CH Combani Sohoa Handball 23–31 AJH Tsimkoura AJH Koungou 27–34 Bandraboua HC Journée 13 – 6 et 7 janvier 2023 TCO Mamoudzou – AJH Tsimkoura CH Combani – AC Chiconi AJH Koungou – Sohoa Handball Bandraboua HC – HC Kani Kéli Equipe Pts J G N P Dif 1 AJH Tsimkoura 31 11 10 0 1 +67 2 TCO Mamoudzou 29 11 9 0 2 +68 3 CH Combani 28 10 9 0 1 +137 4 HC Kani Kéli 24 11 6 1 4 +26 5 Sohoa Handball 18 12 3 0 9 -91 6 Bandraboua HC 18 11 3 1 7 -36 7 AC Chiconi 15 11 2 0 9 -53 8 AJH Koungou 11 11 1 0 10 -118 HANDBALL Prénationale Poule B Journée 12 HC Bandrélé 36–35 HC Labattoir HC Acoua 33–33 Haima Sada Tchanga Handball – ASC Tsingoni Alakarabu Hand 31–42 PC Bouéni Journée 13 – 7 et 8 janvier 2023 ASC Tsingoni – HC Bandrélé PC Bouéni – Tchanga Handball Haima Sada – HC Labattoir HC Acoua – Alakarabu Hand Equipe Pts J G N P Dif 1 ASC Tsingoni 32 11 10 1 0 +119 2 HC Bandrélé 30 12 9 0 3 +44 3 Tchanga Handball 28 11 8 1 2 +52 4 HC Acoua 27 12 6 1 5 +20 5 PC Bouéni 22 12 5 1 6 -21 6 HC Labattoir 17 12 4 0 8 -1 7 Haima Sada 16 12 1 2 9 -55 8 Alakarabu Hand 14 12 1 0 11 -158 HANDBALL Prénationale féminine Journée 13 – 6, 7 et 8 janvier 2023 ASC Tsingoni – CH Combani HC Kani Kéli – Moinatrindri HC HC Passamaïnty – AJH Tsimkoura TCO Mamoudzou – Haima Sada PC Bouéni – Doujani HC HC Bandrélé – HC Select 976 Equipe Pts J G N P Dif 1 ASC Tsingoni 33 11 11 0 0 +156 2 HC Select 976 30 11 9 1 1 +131 3 CH Combani 26 11 8 0 3 +75 4 PC Bouéni 25 10 7 1 3 +7 5 Haima Sada 24 11 6 1 4 +22 6 HC Bandrélé 24 11 6 1 4 +16 7 HC Kani Kéli 20 11 4 1 6 -16 8 AJH Tsimkoura 14 9 2 1 6 -67 9 TCO Mamoudzou 13 11 2 0 9 -92 10 Doujani HC 13 10 2 0 8 -27 11 Moinatrindri HC 13 11 2 0 9 -131 12 HC Passamaïnty 12 10 2 0 8 -74 59 • Mayotte Hebdo • N°1025 • 23/12/20 22
HANDBALL
Journée

/ TOUNDA / AGENDA

VENDREDI 23/12/2022 AU 06/01/2023

Ouverture Manège au Jumbo score de Majicavo Dans Jumbo, à côté du magasin « TAPE A L’ŒIL », Du lundi au samedi, de 9h00 à 19h00

TEMPS KOUSSINGA

Chez COPRA MASS, Séance gommage entre filles, de 15h30 à 18h30, Place limité. Sur réservation. 1114 route de Rassi Andigoli, 97670 CHICONI.

BACO ALI

Au BANGA BE (Chirongui), à partir de 21h, entrée 10€

Programmes des séances des films au cinéma

Pôle culturel de Chirongui, à 14h00, « LE CHAT POTTE 2 », 16h30 « AVATAR », 20h00, « TROPIQUE DE LA VIOLENCE »

EN FETE

DEMBENI
Marché couvert BOURA MOUTA, Tsararano, fête foraine, jeux manège Street Food, etc…)
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SAMEDI 24/12/2022 AU 07/01/2023

LA NUIT DU REVEILLON

31/12

Tatie Chris, Plage de Hamjago, à partir de 20h30, prévente 5€, sur place 10€, Bar restauration sur place.

SAINT SYLVESTRE

N PRO GAME 31/12

avec

Au BANGA BE, à Chirongui, avant 00h00 10€, après 00h00 15€

SOIREE LATINO 1ER SAMEDI DU MOIS 07/01/23

Au le Voulé Resto Bar Musical, 24 Rue du stade de Cavani, Salsa Bachata Kizomba, session initiation à partir de 19h, Bar et restauration sur place, Entrée 10€ + conso soft

ATELIERS INITIATION ET DECOUVRIR DES ASTUCES A LA PATiSSERIE

Le Pôle d’Excellence Rurale de Coconi ouvre ses portes à une pépite de notre territoire (La Vanille), de 8h30 à 12h00. Information et inscription +33 7 83 96 37 17, lavanille.myt@ gmail.com

SAFARI DES L’AUBE

23/12

NAUT’ILE, Embarquez à 5h du matin, naviguez une heure avant d’assister au lever du soleil depuis une plage où un brunch vous est servi. Partez vers 7 h au-devant de rencontres, dauphins, baleines... avant de clore la matinée par un apéritif vers 12h pour un retour vers 13h au ponton, 90 € / Passager.

CONCERT FESTI KANI 2022

24/12

A la MJC de KANI-KELI, avec N PRO GAME, KAMAL et d’autres artistes à 20h00, entrée 5€

CARRIBBEAN NIGHT TRIP

24/12

Au Mahaba club (Mamoudzou), entrée gratuite, shooter offert, aux platines : DJ SHATTA et DJ FRAGILE. COIN PARADIS vous propose des ateliers 07/01/23

Cuisine, décoration, produits de soins, activités & jeux pour enfants, dégustation glace…, à Coconi, de 8h à 17h.

AQUADANCE 31/12

Tahiti Plage, à SADA, à 15h00

DIMANCHE 18/12

NOEL POUR TOUS 2022 24/12

Comité de Tourisme (Mamoudzou), à 15h00, entrée libre, divers lots à gagner

Natation et découverte du tombant en famille pour Noël

25/12

Tahiti Plage, à SADA, à 15h00 avec Le cercle des nageurs de Mayotte. 2€ enfants, 6€ adultes

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MAGAZINE D’INFORMATION

NUMÉRIQUE HEBDOMADAIRE

Edité par la SARL Somapresse au capital de 20 000 euros

7, rue Salamani Cavani M’tsapéré BP 60 - 97600 Mamoudzou Tél. : 0269 61 20 04 redaction@somapresse.com

Directeur de la publication

Laurent Canavate canavate.laurent@somapresse.com

Directeur de la rédaction Mohamed El Mounir dit “Soldat” 0639 69 13 38 soldat@mayottehebdo.com

Rédacteur en chef Axel Nodinot

Couverture : Les 10 portraits de 2022

Comptabilité Catherine Chiggiato comptabilite@somapresse.com

Première parution

Vendredi 31 mars 2000 ISSN : 1288 - 1716 RCS : n° 9757/2000 N° de Siret : 024 061 970 000 18 N°CPPAP : 0121 I 92960

Site internet www.mayottehebdo.com

Journalistes Axel Nodinot Jéromine Doux Raïnat Aliloiffa Alexis Duclos Said Issouf Lucas Philippe Agnès Jouanique Hilda Ali
Direction artistique Franco di Sangro Graphistes/Maquettistes Olivier Baron, Franco di Sangro
Commerciaux Cédric Denaud, Murielle Turlan
# 1025

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