Mayotte hebdo n°1083

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LE MOT DE LA RÉDACTION

UNE VISITE MAIS RIEN DE PLUS

Marie Guévenoux, la ministre déléguée aux Outre-mer est en visite à Mayotte cette semaine, pour la troisième fois depuis sa prise de fonction il y a deux mois. Un record pour un membre du gouvernement. Mais ses visites se succèdent et se ressemblent. Les élus attendaient plus de précisions sur les promesses faites par le gouvernement, et notamment sur les projets de loi. Mais ils sont ressortis des réunions avec la ministre encore plus inquiets qu’avant car ils n’ont « pas de propositions concrètes », a affirmé Ben Issa Ousseni, le président du département. Alors pour quelle raison Marie Guévenoux est-elle venue à Mayotte ? Visiblement pas pour constater les conséquences négatives du démantèlement du camp de Cavani. Quelques heures avant son arrivée, tous les migrants qui vivent aux abords du stade ont été enlevés, les rues nettoyées comme par magie. « Ici à Mayotte on fait les choses à l’envers » se plaint une habitante du quartier. Et pour l’instant, on ne peut pas vraiment lui donner tort. Pourquoi cacher le problème lorsqu’un membre du gouvernement est sur le territoire pour justement constater le problème et apporter des solutions ? Finalement cette visite de la ministre déléguée aux Outre-mer n’apporte rien de plus aux Mahorais.

Bonne lecture à tous,

Le premier quotidien de Mayotte

Diffusé du lundi au vendredi 1999 et s’est depuis hissé au rang de 1er quotidien de l’île.

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Rien à déclaReR chiRongui les 82 chambRes de l’hôtel livRées de nos tRois jeunes condamnés, don cousin de la maRiée Quinze aRtistes scène pendant tRois jouR les appel à pRojets de l euRope couvRe-feu pouR les mineuRs les juRidictions cées pa nouvelles aRRivées stewaRds dans e yachting, une foRmation en deveniR
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d’échéance.
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tchaks

EXPOSITION ET FRESQUES MURALES AU COLLÈGE DE OUANGANI

L’art et la culture se sont donnés rendez-vous au collège Musakua de Ouangani. En effet, le vendredi 29 mars, au micro-musée du collège, s’est tenu le vernissage de l’exposition « Histoires Mahoraises », issue de tirages en cyanotype (méthode d’impression photographique caractérisée par un bleu particulier), réalisés avec douze classes de sixième et deux classes du lycée de Coconi. Ce travail a été encadré par deux artistes réunionnais en résidence, Laurent Callot et Charlotte Boiron. Un autre projet culturel est en cours, intitulé « Construisons l’avenir ». Cinq classes de quatrième encadrées par l’artiste réunionnais Zemar sont en train de réaliser plusieurs fresques murales dans l’enceinte du collège. La finalisation de ces fresques aura lieu le 4 avril, dans l’établissement de Ouangani.

JUSQU’AU 15 AVRIL POUR S’INSCRIRE

AU CONCOURS VOIX DES OUTREMER

Le concours Voix des Outremers par l’association les Contre-courants revient pour une septième édition. Il est ouvert à tous les amateurs de musique et de chant, de tout style, qui souhaitent apprendre gratuitement à travailler et perfectionner leur voix auprès d’une équipe ainsi composée : professeur de chant, pianiste et chanteurs de renom sous la direction artistique de Fabrice di Falco. Cette aventure qui réunit les trois océans se déroule en plusieurs étapes : des cours avec des coachs sur le territoire, une finale territoriale devant un jury d’experts, puis l’entrée à une académie de formation à Paris entièrement prise en charge. Elle aboutira sur une grande finale à l’Opéra de Paris en janvier 2025. Les inscriptions sont à réaliser en ligne via ce formulaire jusqu’au 15 avril et à agrémenter d’une vidéo. L’annonce des sélections se fera par mail le 15 mai. La préparation et les finales territoriales se dérouleront entre le 1er juin et le 15 décembre.

DES COLLÉGIENNES DE CHICONI CHAMPIONNES DE FUTSAL FÉMININ

Les footballeuses de la section sportive du collège Ali Hadi de Chiconi ont remporté le titre de championnes académiques de futsal féminin. Onze d’entre elles vont ainsi se rendre dans l’Hexagone pour les championnats de France de futsal UNSS (Union nationale du sport scolaire).

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«

DANS LES LIMBES DES NUITS GUIGOZIENNES » : UNE CRITIQUE POÉTIQUE DU POUVOIR AUX COMORES

Le roman « Dans les limbes des nuits guigoziennes », écrit par Saïd Ahmed « Sast », vient de paraître aux éditions Le Lys Bleu. L’auteur, qui fut un temps président de l’Alliance française à Moroni, dans l’Union des Comores, y raconte un mois de ramadan rythmé par le voyage interne de la narratrice, de retour à Moroni pour des vacances après sept ans d’absence. On y suit la révolte intime de l’héroïne contre le régime dictatorial, avec, comme point d'orgue, un hommage à tous les combattants de l'indépendance, de la liberté et de la défense des droits de l'Homme aux Comores. L’auteur multiplie tout au long du récit les références à l'histoire récente et à la littérature. Malgré le portrait dressé d’une société gangréné par la dictature, la corruption, la brutalité du pouvoir et l’injustice, ce roman, à travers le cheminement intérieur de l’héroïne, est une ode à l’espoir et à la liberté, qui prend tout son sens au moment où la fête de l’Aïd est célébrée. « Dans les limbes des nuits guigoziennes » est prochainement disponible en librairie, mais en attendant, il est possible de le commander sur le site de la maison d’édition : Bientôt en librairie, mais pour l'instant disponible sur le site de la maison d'édition : www.lysbleueditions.com/produit/ dans-les-limbes-des-nuits-guigoziennes

75 MILLIONS D’EUROS POUR RÉPARER LES FUITES D’EAU

Dans le contexte de la crise de l’eau qui n’est toujours pas finie, la ministre chargée des Outremer annonce une enveloppe de 75 millions d’euros pour réparer les fuites sur le réseau d’eau et accélérer les travaux de la future usine de dessalement d’Ironi Bé prévue en 2025. Celle-ci, avec ses 10.000 m3 par jour dans un premier temps, doit permettre de mettre un terme (au moins provisoirement et sans nouvelle sécheresse) aux tours d’eau. Du reste, quatorze emplois seront créés « afin de faire en sorte que l’île de Mayotte puisse retrouver à l’horizon 2025 une situation stable » a ajouté Marie Guévenoux.

LU DANS LA PRESSE

Chaque semaine, découvrez le regard porté sur l’actualité locale à travers la presse nationale ou régionale

A MAYOTTE, LES CADIS SONT DES MÉDIATEURS

ESSENTIELS À

LA VIE DU DÉPARTEMENT

Publié par Jérôme Talpin, sur Le Monde, le 31 mars 2024

A Mayotte, île de l’océan Indien à 95 % musulmane, ils conjuguent pratique religieuse et principe de laïcité à la française. Jusqu’à une ordonnance de 2010, à la veille de la départementalisation, les cadis exerçaient les fonctions officielles de juge, de notaire, d’officier d’état civil pouvant enregistrer des mariages ou des séparations. Ils étaient chargés de l’application d’un droit local autorisant la polygamie et témoignant de l’histoire de l’archipel des Comores et de l’implantation de sultanats d’origine arabo-chirazienne, avant la colonisation de Mayotte par la France en 1841 et la mise en place d’une administration pour les « indigènes »

L’application du droit commun à Mayotte a mis fin à la coexistence de ces deux systèmes de justice. De juges traditionnels, les cadis sont devenus des médiateurs. Entourés d’une autorité morale reconnue, ils restent employés par le conseil départemental. Au-delà de ces fonctions institutionnelles, le conseil cadial fixe les règles relatives à la pratique du culte dans les mosquées et valide les programmes d’enseignement dans les écoles coraniques et les mosquées.

Grandes disparités

A l’automne 2022, le photographe Ludovic Carème, de l’agence VU, a passé six semaines à Mayotte, dans le cadre de la grande commande photographique. Lancée en 2021 par le ministère de la culture, sur une demande du président de la république, et pilotée par la Bibliothèque nationale de France (BNF), cette vaste opération était destinée à faire une radioscopie de la France et a distribué des bourses à deux cents photographes pour sillonner le territoire. Leur travail est exposé jusqu’au 23 juin à la BNF, à

Paris. A Mayotte, Ludovic Carème a voulu décrire le rôle essentiel que remplit la vingtaine de cadis de l’île : contribuer à la paix sociale dans une société fracturée par de grandes disparités. Un territoire, le plus pauvre de France, frappé ces derniers mois par une sécheresse exceptionnelle et, fin janvier, par une crise sécuritaire, avec cinq semaines de barrages érigés sur les routes par des collectifs de citoyens réclamant davantage de moyens dans la lutte contre la délinquance et l’immigration irrégulière. Dans le 101e département français, la population saisit les cadis pour régler des différends de la vie quotidienne selon les lois religieuses musulmanes. Le photographe retrace leurs missions de conciliateur dans les bidonvilles de l’île et dans les madrasas (écoles coraniques).

Valeurs de paix, de justice et d’amour

Une rencontre a particulièrement marqué Ludovic Carème : celle avec le cadi Saïd Ali Mondroha, un homme dont les valeurs l’ont inspiré. « Je retiens son dévouement pour les humains, sa délicatesse, sa bienveillance, sa capacité d’écoute pour les femmes et les enfants, l’importance de l’éducation pour lui, son sens de la charité » , dit avec déférence le photographe. Ludovic Carème l’a suivi dans les méandres du bidonville de Kawéni, dans la commune de Mamoudzou, le chef-lieu de l’île, avec ses dizaines de bangas – des cases à l’armature en bois recouvertes de tôle.

L’une de ses photos montre des jeunes filles, la tête revêtue d’un kishali (châle), suivant les enseignements de Saïd Ali Mondroha. « Il va à la rencontre des enfants et des adolescents pour leur inculquer des valeurs de paix, de justice et d’amour, raconte

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le photographe. Il ne s’agit pas uniquement d’éducation religieuse. Il se met au niveau des jeunes et réussit à les faire rire et à les captiver. »

Les cadis interviennent également pour « récupérer certains enfants ou adolescents en perdition », précise Ludovic Carème. Ce rôle d’assistance à des mineurs isolés, le photographe l’a capturé dans le regard effarouché d’Amdjad, un adolescent comorien de 17 ans, en situation irrégulière, monté dans un kwassa-kwassa (une barque de pêche) pour venir se faire soigner à Mayotte, voisine à une soixantaine de kilomètres de l’île comorienne d’Anjouan. Le jeune homme vit avec la crainte d’être interpellé puis reconduit dans son île natale.

Lutte contre la délinquance

« Les cadis sont des figures respectées, témoigne le photographe. En tant que forces spirituelles, ils tentent de remettre les mauvais garçons dans le droit chemin à partir de préceptes simples mêlant culture et tradition, en évoquant la morale, le respect des aînés et des parents. » A Mayotte, « plus de quinze mille enfants » n’ont pas

accès à une scolarité classique, selon la défenseure des droits, Claire Hédon. Près de la moitié des trois cent vingt mille habitants de l’île ont moins de 18 ans.

En manque de reconnaissance après avoir été défaits de leurs fonctions, se sachant surveillés par les pouvoirs publics parce que la plupart sont partis étudier dans des universités islamiques à l’étranger, les cadis sont aujourd’hui sollicités par l’Etat dans la lutte contre la délinquance et la radicalisation religieuse. Dans une société matriarcale comme celle de Mayotte, où traditionnellement l’homme vient habiter chez la femme, le photographe s’est aussi intéressé au rôle de conciliateur des cadis dans les conflits conjugaux ou familiaux.

« Il me reste des souvenirs particuliers de nombreuses femmes divorcées ou seules qui portent leur famille avec une volonté incroyable, relève Ludovic Carème. Elles viennent souvent voir le cadi parce que le père de leur enfant n’assume pas ses obligations de soutien à la famille. Certaines femmes se confient à eux avec une grande liberté, y compris sur leur sexualité. C’est ce qui m’a le plus surpris. »

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Les trophées mahorais fêtent leurs

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mahorais de l’entreprise leurs 10 ans

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Chaque année, depuis dix ans, le groupe Somapresse organise les Trophées mahorais de l’entreprise. L’objectif est de mettre en valeur les acteurs économiques mahorais qui œuvrent, chacun à sa manière, au développement de Mayotte. Ces entreprises ou associations ayant un volet économique, développent leurs projets et résistent à toutes les crises qui traversent le 101ème département. Cette année quarante nommés, répartis dans huit catégories différentes, ont été choisis par un jury. Dans ce numéro de Mayotte Hebdo, nous vous faisons découvrir les quatre premières catégories.

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faites votre choix en votant ici https://entreprise.yt/vote/

catégorie Économie sociale et solidaire

LA STRUCTURES NOMMÉES DANS LA CATÉGORIE « ÉCONOMIE SOCIALE ET SOLIDAIRE » VALORISENT LE SAVOIRFAIRE MAHORAIS DE DIFFÉRENTES MANIÈRE. CE SONT DES ASSOCIATIONS ET DES ENTREPRISES QUI TRAVAILLENT POUR VALORISER MAYOTTE OU POUR AIDER UNE PARTIE DE LA POPULATION.

Dipak

Ses briques en terre crue s’exposent depuis le gymnase et le collège de Bouéni M’titi, à Dzaoudzi-Labattoir, en Petite-Terre. Mais aussi à M’tsangamouji, l’école maternelle de Chembenyoumba… Ou encore dans des bâtiments de la société immobilière de Mayotte (Sim). La société Dipak a produit quasiment 110.000 briques en 2023. Son gérant principal, Danjée Goulamhoussen, a fait partie des moteurs pour réhabiliter cette spécialité mahoraise, en déclin depuis la départementalisation, et à nouveau en essor depuis que les travaux de réglementation ont permis de rédiger les règles professionnelles des blocs de terre comprimée (BTC) de 2023.

« C’est le défi d’une nouvelle filière qui se relance » , poursuit ce diplômé en maçonnerie, qui depuis la crise liée aux barrages n’est plus entouré que d’un salarié au lieu de cinq et d’un associé pour faire tourner son usine implantée à Pamandzi. « Mais beaucoup de projets attendent d’être signés. » Le trentenaire a même fait une commande de machines automatiques pour remplacer les manuelles. « C’est un matériau écologique, local, qu’on a en abondance et qui tient moins chaud » , encense le représentant de ce système d’économie circulaire qui permet de valoriser n’importe quelle terre dépolluée. Celle-ci, combinée à du ciment, sèche pendant trois semaines et durcit tranquillement en tant que brique incorporée dans une construction.

« Aujourd’hui, l’ironie est que des architectes nous poussent à en utiliser alors que les élus sont encore réticents » , pointe celui qui cite des structures en métropole qui s’inspirent du savoir-faire mahorais et qui a réussi à être exposé à la Grande exposition du Fabriqué français. « C’est notre identité locale, ça peut créer des emplois, protéger l’environnement… » , liste celui qui a obtenu le statut d’entreprise d’insertion fin 2023 et est en plein recrutement.

Le réseau Lahiki

« Avant, les étudiants en métropole étaient livrés à eux-mêmes, il n’y avait personne pour les accueillir » , se souvient d’expérience Ystoyan Assani, ex-étudiante partie de Mayotte vers la métropole. Cette chargée d’accompagnement d’élèves et d’étudiants est salariée du réseau Lahiki, une association dédiée à accompagner les jeunes dans leur mobilité et l’insertion professionnelle. « Quitter Mayotte et sa famille c’est déjà difficile, alors partir et ne connaître personne c’est encore plus difficile. » C’est de ce constat que des étudiants ont créé ce réseau en 2017. Il assure une présence à La Réunion, dans plusieurs grandes villes de l’Hexagone et à Mayotte, à Sada et en Petite-Terre.

Chaque année, le réseau accompagne environ 1.000 jeunes, sans limite de quota et issus de tout le département, vers la métropole et La Réunion. Avant le départ, les trois salariés à temps plein et les bénévoles aident à tout planifier : démarches administratives, réservation des billets d’avion, orientation dans les études… Cette aide, qui n’est pas financière, se poursuit pendant tout le temps des études sur le territoire. Sur le plan administratif : les aides au logement, la mutuelle… Mais aussi sur le plan social, par le biais d’activités, « pour lutter contre l’isolement » . Le réseau a notamment organisé tout récemment des foutaris en métropole. De quoi apporter aussi un soutien à une situation « qu’on sait précaire pour les étudiants » Grâce à ses partenaires (missions locales, France Travail, entreprises, associations) le réseau aide aussi les étudiants à leur retour pour les aider à s’insérer dans la vie active. « Mais on pense aussi à tous ceux qui ne peuvent pas partir » , ajoute Ystoyan Assani, qui évoque de nouveaux projets dans ce sens.

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INSTITUT DE BEAUTÉ

Émanciper Mayotte

« Personne ne voulait me donner les chiffres » , déroule Houssaini Tafara. Jusqu’à découvrir une étude du conseil départemental : 90 % des jeunes mahorais qui partent étudier en métropole échouent. Celui qui a fait sa scolarité à La Réunion et ses études en métropole commence dès 2007 à distribuer des Power Point aux bacheliers de Kani-Kéli : où se diriger à l’aéroport, la caution à prévoir pour le logement, les bonnes adresses etc. Avant d’être repéré pour intervenir dans un premier lycée, puis d’autres, pour former les lycéens. « Mais en 2015, j’apprends qu’un jeune Mahorais est mort de faim dans son campus de Villeneuve-d’Ascq » , au nord de la France. Sans réaction en local et poussé par le ministère des Outremer, dit-il, il créé, en 2017, Émancipation Mayotte. C’est d’abord son restaurant qui aide à financer ses formations mobilité avant de pouvoir compter sur plusieurs fonds et partenaires. Désormais, avec une présence à Nantes, à La Réunion et à Dembéni, mais aussi grâce aux forums de la mobilité et interventions dans les lycées, l’association parvient à accompagner 1.800 jeunes, inscrits dans leur base, rien qu’à Mayotte. « Mais il ne faut pas se mentir, un jeune qui part en métropole n’a pas le niveau. Il a des problèmes en français, en mathématiques, en culture générale et d’interculturalité » , appuie celui qui met en place le site MayJeuxPedago pour proposer des tests en ligne, auquel il souhaite ajouter des cours. Selon lui, chaque jeune rate en moyenne deux à trois mois de cours par an : deux ans une fois arrivé au bac. Sur le volet culturel, l’association, accréditée par la Commission européenne, permet aussi à une centaine de jeunes de partir chaque année à l’étranger.

Kaja Kaona

C’est une initiative venue directement des jeunes de Tsoundzou 1. Réunis en 2016 pour trouver une solution à l’inactivité, ils composent désormais l’association Kaja Kaona, une structure à gouvernance horizontale constituée de nouveaux postes clés : assistants administratifs, animateurs... « On est passé d’un premier salarié à vingt salariés en 2023 » , se réjouit Aurore Neel, présidente. Mieux, à l’issue de cette première année de chantiers d’insertion en maraîchage, pépinière et bâtiment (construction, menuiserie), « on a pu sortir notre première promotion » , », indique-t-elle. Sur les seize employés à durée déterminée d’insertion (CDDI), une partie a été prolongée et une autre a pu intégrer le monde professionnel. « C’est un grand pas. »

Mais il y a aussi les « ateliers mobilisateurs » pour donner des compétences et de la confiance en soi dans plusieurs domaines : artisanat, cuisine, savoirs de base et accès aux droits, sensibilisation et respect de l’environnement, loisirs, culture, sport… Le tout, à destination des jeunes âgés entre 15 et 25 ans. La structure en accompagne 350 selon les chiffres de 2023. Une centaine est suivie sur deux ans, depuis l’an passé, dans le cadre du contrat d’engagement jeunes. Un projet financé par la Direction de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités (Deets) qui répond à un dispositif national : un soutien financier en échange d’une démarche rigoureuse vers l’emploi.

« C’est très satisfaisant. On est identifié. On fait désormais partie du visage. Mais comment répondre à tous les besoins ? » , réagit Aurore Neel, qui cherche à trouver de nouveaux locaux : un tiers-lieu, des espaces d’accueil, « ne serait-ce que pour le numérique » … Mais heureuse de voir « s’essaimer » d’autres idées comme à Tsoundzou 2, où des jeunes souhaitent créer une association, rejoints par des encadrants de Kaja Kaona.

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Saveurs et senteurs de Mayotte

L’association Saveurs et senteurs de Mayotte, créée en 2011, s’est lancé le défi de structurer la filière vanille en 2018, après avoir été approchée par des producteurs de vanille du Nord. « On a commencé avec sept producteurs, aujourd’hui on est quarante-huit » , se félicite Julie Moutet, coordinatrice pour l’association, qui accompagne les producteurs dans leurs plantations. « Notre but est de produire une vanille de la meilleure qualité possible pour pouvoir rémunérer les agriculteurs de la façon la plus juste possible » , ajoute celle pour qui le fait que les agriculteurs puissent vivre de leur production est une priorité.

En effet, face à la concurrence des pays voisins, où la main d'œuvre est moins onéreuse, pour pouvoir vendre une vanille à un certain coût, Mayotte doit se démarquer en offrant une vanille de qualité supérieure. Des efforts récompensés par deux médailles d’argent au Concours général du Salon de l’agriculture à Paris, en 2022 et en 2024. « Nous aimerions pouvoir fédérer encore plus de producteurs, donner envie aux jeunes de cultiver la vanille pour faire vivre cette filière et préserver cette culture patrimoniale » , assure Julie Moutet. L’association est actuellement dans une phase consistant à développer la commercialisation de sa vanille sur Mayotte et en métropole. « Nous voulons arriver à approvisionner davantage Mayotte, notre but étant de vendre en local avant tout » L'association travaille également sur de nouveaux produits et avec d’autres territoires ultramarins sur la vanille, a comme projet de passer une partie de la production en agriculture biologique, et œuvre avec le Département pour mettre en place une maison de la Vanille à Mayotte.

catégorie Entreprises citoyennes

CES ASSOCIATIONS, ENTREPRISES ET ORGANISATIONS SE SONT DISTINGUÉES EN 2023 PAR LEURS ACTIONS DANS LA SOCIÉTÉ MAHORAISE. RETROUVEZ CI-DESSOUS LA SÉLECTION DU JURY DES TROPHÉES DES ENTREPRISES.

Mayan’Art

Lancé en 2019 par Toibrane Mogne Daho et Zarouki Bounou, le studio Mayan’Art met en avant les associations Mahoraises sous leur plus beau jour. Spécialisés dans la réalisation de portraits et de vidéos, les deux associés soutiennent de nombreuses initiatives, et ce en débit d’une demande en hausse en provenance des institutions et de la couverture d’événements (mariages, séminaires…). Un juste retour des choses, selon Toibrane. Avant d’avoir atteint la majorité, ce dernier se souvient avoir été accompagné par des associations pour l’apprentissage du dessin. Résultat : « depuis que je suis à Mayotte, je soutiens beaucoup de causes » , assure-t-il. En 2020, après environ deux années de « test » avec l’appui de la couveuse d’entreprises, les équipes de Mayan’Art ont pris leur quartier aux vitrines de M’gombani, à Mamoudzou. Très vite, les vidéastes et photographes du studio ont été amenés à réaliser de nombreuses campagnes de prévention contre le Sida, le cancer, ou encore les discriminations. « J’aime bien travailler avec les associations, en général on a carte blanche pour faire ce que l’on veut » , relève Toibrane. L’an dernier, Mayan’Art studio a par exemple planché pendant un mois sur la campagne d’Octobre rose pour sensibiliser au cancer du sein. Un travail main dans la main avec l’Association mahoraise pour la lutte contre le cancer (Amalca), qui occupe d’ailleurs le bureau voisin à celui de Mayan’Art, aux vitrines de M’gombani.

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L’association Petite-T’espoir

L’association Petite-T’espoir a été créée à la fin de l’année 2018. Dès l’année suivante, elle s’est lancée dans l’aide alimentaire. Via une convention de lutte contre le gaspillage alimentaire, elle récupérait des denrées alimentaires des grandes surfaces pour les redistribuer aux plus démunis en Petite-Terre. « Notre objectif est d’accompagner et d’aider les familles vulnérables dans les quartiers prioritaires » , résume Houmadi Farid, chargé de mission développement des structures. C’est ce qui a conduit l’association à lancer une épicerie solidaire, ouverte en décembre 2022, route de Moya, à Dzaoudzi. « Ce n’est pas une épicerie à laquelle tout le monde peut accéder. Seuls les publics identifiés par des travailleurs sociaux y sont orientés » , ajoute encore Houmadi Farid. Depuis décembre 2022, 450 familles, soit environ 4500 personnes, ont bénéficié de denrées distribuées par l’épicerie. Et il ne s’agit pas uniquement de subvenir aux besoins matériels des familles les plus pauvres. L’accès à l’épicerie solidaire est couplé à un accompagnement social personnalisé et à une participation à divers ateliers orientés autour de l’accès au droit, la nutrition, l’hygiène ou encore la santé. Chaque bénéficiaire est invité à l’épicerie une fois par mois. Panier moyen : trente euros, ce qui représenterait 70 euros d’économie par rapport au tarif pratiqué dans les enseignes de grande distribution. L’accès à l’épicerie solidaire est fixé pour une durée de six mois, renouvelable après trois mois de carence et une ré-étude de la situation par l’organisme social compétent

L’Adie

L’association pour le droit à l’initiative (Adie) a une antenne mahoraise depuis 1997. Parce que trop de jeunes en France, faute de capital et de conseils, ne peuvent pas créer leur entreprise, l’Adie permet à cette génération motivée par l’entrepreneuriat de donner vie à ses projets, en proposant des financements et un accompagnement adaptés. Afin que plus de jeunes désireux de se lancer soient informés des solutions qui s’offrent à eux et de lever les freins qui les retiennent, l’association loi 1901 reconnue d’utilité publique, a pour vocation d’identifier les leviers économiques disponibles pour tous les auto-entrepreneurs, commerçants et chefs d’entreprises sur l’île aux parfums. « On propose d’aider les mahorais avec des microcrédits accompagnés. On accompagne aussi à la création, au développement ou au maintien d’activités » , explique Didier Grondin, directeur territorial de l’Adie Mayotte depuis sept mois. Ce coup de pouce financier est souvent bienvenu pour les publics qui n’ont pas accès au crédit bancaire, l’Adie restant à l’heure actuelle une des seules institutions de microfinance d’envergure présente sur la majeure partie des territoires ultramarins. Au-delà de l’aspect financier, les dix-sept salariés de l’association programment fréquemment des ateliers afin de « faire progresser » et de « mettre en avant les réussites mahoraises » , fait valoir Didier Grondin. Des initiatives qui permettent aussi de souligner que des alternatives au salariat existent à Mayotte.

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Regard Du Coeur

Au départ, Hamada Moustoihi et Zouhoura Assani, respectivement le président et la directrice de l’association, voulaient, depuis Longoni, faire découvrir la biodiversité et les jolis paysages de Mayotte aux jeunes générations. Ancienne bénévole des Naturalistes de Mayotte, Zouhoura rêvait d’impulser une prise de conscience chez les jeunes, pour que ces derniers puissent par la suite transmettre leurs savoirs. « Même si tout n’est pas rose, il y a de jolies choses à voir à Mayotte. Il faut que les jeunes puissent s’approprier ce patrimoine » , souligne-t-elle encore aujourd’hui. A partir de la fin de l’année 2016, “Regard du coeur” a ainsi instauré une série d’ateliers, de marches solidaires ou encore de spectacles pour éveiller les consciences de la jeunesse mahoraise. Aujourd’hui, l’association se consacre à la gestion d’une épicerie solidaire, nommée « Oasis » et basée à Koungou. A ce jour, le commerce fait bénéficier une quarantaine de familles de tarifs très avantageux. Regard du Cœur s’occupe aussi des jeunes pendant les vacances scolaires et hors vacances scolaires en favorisant leur épanouissement tout en les incitant à la protection de leur environnement. La structure a mis en place le projet « Lire et s’exprimer » . Le théâtre, le chant, la danse, la photographie sont les disciplines qu’on peut y retrouver. Dans le même esprit, l’association organise des spectacles de danses traditionnelles ainsi que des échanges avec des personnes âgées détentrices d’un savoir presque oublié.

Le Medef

1,5 million de litres d’eau. C’est le volume d’eau arrivé au port de Longoni et distribué en bouteilles à la fin de l’année 2023 par le Mouvement des entreprises de France à Mayotte (Medef). Un don, destiné aux entreprises du secteur privé de l’île, bienvenu à cette période où les tours d’eau étaient encore très contraignants avec 54 heures de coupure d’eau. Ainsi, alors que les administrations publiques commençaient à s’organiser, les sociétés privées faisaient face à un véritable casse-tête, à savoir permettre aux salariés de travailler dans des locaux privés et des stocks qui se rarifiaient dans les magasins. Grâce à l’action du Medef national et son entité mahoraise, les bouteilles ont été envoyées par des entrepreneurs de l’Hexagone, tandis que les bénéficiaires étaient tous des salariés du secteur privé, pas seulement des entreprises adhérentes de l’organisation patronale. « La présidente du Medef Mayotte, Carla Baltus, et ses adhérents, tiennent particulièrement à remercier le président Patrick Martin du Mouvement des Entreprises de France et son vice-président Bruno Arcadipane, ainsi que tous les partenaires : producteurs d’eau, distributeurs, transitaires, transporteurs… (Ania, Artemis, Centre d’affaires de Mayotte, CMA-CGM et sa filiale Ceva Logistics, Danone avec ses marques Evian et Volvic, Maison des eaux minérales naturelles, Ogeu, le Port de Longoni-MCG, Placidom, RDT Groupe et Tilt » , indiquait le Medef Mayotte lors du lancement de l’opération.

15 • Mayotte Hebdo • N°1083 • 05/04/20 24
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Taambati Moussa

Elle est considérée comme la gardienne des traditions mahoraises. Au fil des années, Taambati Moussa a su se faire une place et s’imposer dans le paysage mahorais. Elle met un point d’honneur à enseigner les us et coutumes de Mayotte à la jeune génération du département, mais également à ceux qui viennent d’ailleurs. Pour cela, elle possède son propre musée à Boueni, dans le sud de l’île, pour sauvegarder et transmettre la culture mahoraise. Loin d’être une lubie, c’est bel et bien une mission que cette militante de longue date s’est donnée. Elle y préserve précieusement des objets anciens et emblématiques de l’île aux parfums. Les objets exposés sur les étagères sont le vestige d’une époque qu’elle a connue mais qui tend à disparaître. « Je ne veux pas que ça se perde. C’est notre patrimoine, notre culture, notre identité. Sinon, comment peut-on répondre aux jeunes qui se demandent comment on faisait avant ? » , déclare la Mahoraise qui s’arme encore de poteries pour cuisiner de façon traditionnelle lors des Journées européennes du patrimoine.

Elle est aussi l’initiatrice de l’association Ouzouri Wa Mitroumché qui valorise les traditions à travers le mindzano. Un masque de beauté mahorais à base de bois de santal qu’elle continue de frotter contre la pierre et fait sécher dans sa boutique pour le vendre ensuite.

Taambati Moussa ne se limite pas aux frontières mahoraises puisqu’elle milite également au niveau national et international. Paris, Tanzanie, Antilles, elle est partout pour faire connaître la culture mahoraise.

Propriétaire d’une maison d’hôtes située aussi à Boueni, « Santal Logis » , elle permet à des touristes de déguster un repas traditionnel mahorais, apprendre à cuisiner comme avant ou fabriquer les fameux colliers de fleurs au jasmin tant appréciés.

La gardienne aux multiples fonctions a été décorée de la médaille d’honneur de l’engagement ultramarin ainsi que de la médaille de l’ordre national du mérite.

Nasra Mohamed

Nasra Mohamed est la propriétaire et gérante de deux boutiques de vêtements situées à la rue du commerce de Mamoudzou et un éphémère installé dans les Hauts Vallons. « Ma Nana » est le nom qu’elle a choisi car elles sont entièrement dédiées à la gent féminine. C’est en 2011 qu’elle crée sa première boutique basée à l’époque à Cavani, toujours dans la commune de Mamoudzou. Elle se souvient que « c’était un peu galère pour faire les choses dans les règles car je n’arrivais pas à avoir de Kbis. » Mais elle ne désespère pas et à force de persévérance elle finit par l’obtenir.

La jeune feme réussit à se frayer un chemin dans le monde de l’entreprenariat mahorais, malgré toutes les difficultés que cela engendre. « C’était une aventure pas facile parce que je n’ai jamais demandé d’aides de l'État ni du conseil départemental. » Elle finance tous ses projets par ses propres moyens et elle est fière de son parcours car elle a réalisé son rêve de petite fille. « J’ai toujours rêvé de travailler pour moi-même. Et depuis que j’ai 6 ans, je savais que je voulais être dans la mode. J’ai toujours aimé embellir les autres » , raconte celle qui se souvient passer des heures à feuilleter les magazines de mode de ses tantes à l’époque. Aujourd’hui elle a trois salariés et encourage les femmes à s’engager dans le monde de l’entreprenariat car contrairement à ce que l’on pourrait croire « la plupart des femmes entrepreneures s’entend très bien. On s’aide entre nous » , affirme-t-elle. Nasra Mohamed n’a pas eu des débuts faciles, alors elle aide particulièrement les jeunes filles qui cherchent des stages. C’est sa manière de soutenir la jeune génération.

16 • Mayotte Hebdo • N°1083 • 05/04/20 24 catégorie femme
entrepreneure
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Razia Simba Ali

Razia Simba Ali a un parcours semé d'embûches mais grâce à sa force et à sa détermination, elle a toujours su se relever. À 47 ans, elle est une femme accomplie, à la tête de son entreprise de transformation d’épices et de légumes. « Je les écrase et les découpe pour qu’ils soient prêts à utiliser » , explique-t-elle. L’entrepreneure s’est lancée dans cette activité en 2015 et elle vend ses produits au marché couvert de Mamoudzou. Elle prépare également des plats traditionnels mahorais qu’elle vend sur commande.

Elle est fière de dire qu’elle fait tout sans l’aide de personne car ses clients sentent la différence lorsque ce n’est pas elle qui est aux fourneaux. Razia Simba Ali a un savoir-faire qu’elle seule maîtrise. « J’adore faire la cuisine depuis que je suis toute petite » , affirme-t-elle. Elle a donc décidé de faire de sa passion son métier après des années sans réussir à trouver un travail stable. « J’avais des petits contrats mais mes employeurs ne renouvelant jamais... C’est comme ça que j’ai décidé de créer mon entreprise » , raconte-t-elle. Et elle ne regrette pas sa décision. « Travailler pour soi-même n’a pas de prix ! Je suis épanouie, moins stressée car je n’ai de compte à rendre à personne. Et le plus important c’est que je peux passer plus de temps avec ma fille. »

Razia Simba Ali, reconnaît cependant que la vie d’entrepreneure n’est pas de tout repos. Parfois elle ne peut même pas s’attribuer de salaire. « Au début, mon affaire marchait très bien, mais depuis la crise du Covid j’ai eu du mal à remonter la pente. Je peux passer des jours sans rien vendre, alors je suis obligée de faire du porte-à-porte dans les bureaux pour vendre un peu » , raconte-t-elle. Malgré cela, elle ne regrette pas son choix et veut continuer à travailler pour son propre compte. « Pour rester motivé il faut aimer ce que l’on fait. Tout ce que je fais, je le fais par amour. »

Dahyati Mistoihi

Dahyati Mistoihi est devenue l’une des animatrices mahoraises les plus emblématiques de sa génération. Tout a commencé en 2017 lorsqu’elle rentre à Mayotte et qu’elle est soutenue par des associations qui l’aident à s'intégrer dans la vie mahoraise. » En retour, pour montrer sa reconnaissance, elle accepte d’animer pour elles des événements de manière bénévole. Elle est repérée et commence à animer plus fréquemment. C’est ainsi que naît Tayra Events, le nom de sa société. « Je ne pensais pas que ça allait durer. Je pensais que j’allais m’épuiser mais ce n’est pas le cas », avoue-t-elle. Non seulement elle ne s’est pas épuisée, mais elle a développé d’autres compétences. Son charisme et son professionnalisme l’ont propulsée à la télévision. Il y a trois ans, elle devient la première présentatrice de la météo incarnée à Mayotte. Elle se découvre d’autres compétences et continue dans cette lancée. Elle anime les concours de beauté en direct à la télévision. Il s’agit là encore d’une première. En parallèle, Dahyati Mistoihi est enseignante et malgré le succès qu’elle rencontre dans l’animation, elle enseigne toujours. « On me demande souvent comment je fais pour concilier les deux, mais je suis quelqu’un de très organisé. Et puis j’aime beaucoup l’animation, je suis une vraie passionnée et tant que j’aurai la santé je continuerai à le faire » déclare-t-elle. L’animatrice est consciente qu’elle est suivie par beaucoup de jeunes, notamment des filles, et certains veulent suivre ses pas. « C’est un métier qui prend beaucoup d’ampleur à Mayotte. Les jeunes femmes commencent à vraiment l’apprécier. Il faut maintenant les encadrer et les former car animer un évènement c’est du travail. » Dahyati Mistoihi espère que son parcours en inspirera plus d’un.

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Haloua Haribou

Haloua Haribou est la propriétaire du restaurant la Croisette situé à Mamoudzou, et elle est également traiteuse. Tout a commencé en 2007, alors qu’elle avait plus de 50 ans. « J’ai débuté en tant que traiteuse, et tout le monde s’est moqué de moi. Des membres de ma famille m’ont dit que c’était déshonorant de cuisiner pour les autres, que c’était un sous-métier » , se souvient-elle. Mais la quinquagénaire de l’époque ne se décourage pas et continue à travailler. En 2015, elle ouvre son restaurant la Croisette. « J’ai toujours voulu avoir mon propre restaurant alors quand l'opportunité s’est présentée j’ai sauté dessus. » La restauratrice est aujourd’hui à la tête d’une équipe de neuf personnes et même si elle aime son métier, elle reconnaît que « c’est parfois difficile car on est toujours sous pression » , selon elle. « Mais quand on est motivé on arrive à gérer » , ajoute-t-elle.

Haloua Haribou est l’exemple même de la motivation car malgré les critiques, elle n’a jamais baissé les bras. Et elle prouve qu’il n’y a pas d’âge pour apprendre. « J’avais plus de 50 ans quand j’ai commencé et je ne savais pas utiliser d’ordinateur, ni gérer une entreprise et ça ne m’a pas arrêtée. J’ai tout appris sur le tas. » Aujourd’hui sa famille et notamment ses enfants la soutiennent.

Elle est heureuse de constater que le secteur s’est développé, mais elle met en garde les nouveaux arrivants. « Aujourd’hui tout le monde veut être traiteur. C’est bien, mais c’est un métier difficile. Il ne s’agit pas que de faire à manger. Il faut être très rigoureux » , prévient la sexagénaire qui n’a pas eu peur de réaliser ses rêves malgré les codes de la société mahoraise.

catégorie entreprises innovantes

Habit’âme

Habit’âme, c’est le pari innovant d’apporter une solution à trois problèmes en même temps : la prolifération d’habitats insalubres sur l’île et le manque de matériaux de construction locaux pour le premier, la multiplication des déchets plastiques et l’absence de structure de transformation de ces déchets en ce qui concerne, et enfin, le manque de structure d’insertion pour la jeunesse. Pour s’attaquer au trois réunis, Habit’âme propose de recycler le plastique en matériau de construction et d’employer des jeunes en réinsertion sur ces ateliers. « On n’entend pas bien évidemment éradiquer les trois problématiques, mais on pense que notre projet peut apporter sa pierre à l’édifice pour améliorer la situation » , avance Hannah Dominique, une des cinq co-fondateurs de l’entreprise. Ce travail a déjà été salué par le prix national Banque des territoires du concours Talents des cités l’année dernière. Quatre salariés en insertion vont prochainement être recrutés. L’entreprise a reçu ses machines en octobre 2023 et a pu commencer ses premiers essais pour faire du matériau d’aménagement sur de la paillasse, du faux plafond et des meubles. La commercialisation n’a pas encore commencé, car l’entreprise doit d’abord répondre à certaines normes européennes. En attendant, Habit’âme fait de la sensibilisation, notamment en allant dans les écoles pour animer des ateliers autour de la transformation des déchets en objets du quotidien comme des porte-clés, des médailles ou des dessous de verre par exemple. Pour les ateliers organisés directement dans ses locaux, à Kawéni, les participants peuvent fabriquer du mobilier urbain, comme des bancs. Des travaux pour améliorer les locaux de l’entreprise ont été entamés fin mars et l’équipe espère une commercialisation avant l’été.

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Criobe

Le Criobe est un laboratoire avec plus de cinquante ans d’expérience à son actif et ayant pour tutelle l’École pratique des hautes études (EPHE), le Centre national de la recherche scientifique et l’Université de Perpignan. Il a commencé à travailler à Mayotte, dans les locaux du Pôle d’excellence rurale (PER) de Coconi en 2021. Deux ans plus tard, un laboratoire tout équipé lui permet de mener sa mission à bien. Car, le Criobe fait partie du Pôle d’innovation intégré de Mayotte (PI2M) et travaille pour l’instant essentiellement sur les plantes aromatiques et médicinales, avec l’idée d’accompagner les entreprises locales dans la conception de produits cosmétiques et pharmaceutiques issus de la biodiversité mahoraise. « Le but à terme est de pouvoir développer des filières à Mayotte » , explique Thomas Vignaud, directeur du PI2M. L’idée est de pouvoir reprendre les savoirs des fundi et les recherches scientifiques pour pouvoir développer des produits au lieu qu’ils soient distribués au sein d’une économie parallèle. « On veut dynamiser l’économie de l’agriculture avec des produits à haute valeur ajoutée » , affirme le docteur universitaire.

Le Criobe a aussi un volet bleu en phase d’être davantage développé. Le but à terme serait de pouvoir faire de l’aquaculture, et, pourquoi pas, avoir une station sous-marine pour effectuer des études sur des algues par exemple. L’Agence de développement et d’innovation de Mayotte (Adim) accompagne justement le Criobe dans le cadre du projet Plan innovation Outre-mer (Piom). « L’idée est de partir de sujets d’innovation pour aller sur de la recherche appliquée et trouver des opportunités d’application sur le territoire ou de manière internationale » , avance Mamadou Konaté, directeur général de l’Adim.

Geobuilder

Créé en août 2022 à Mayotte, Geobuilder commercialise une manière particulièrement innovante de produire de l’eau potable. Les générateurs d’eau atmosphérique de la marque Osoley permettent de récupérer les molécules d’H2O présentes dans l’air et, à travers un système de condensation et de filtration, de proposer de l’eau potable. « Avec ce générateur, on est autonome pour avoir de l’eau pure. Il permet également d’avoir de l’eau potable tout le temps » , explique le dirigeant de la société, Sébastien Fumaz. Cette année, et avec la forte demande générée par la crise de l’eau, l’entreprise a pu refaire son stock, avec des générateurs de 10, 30, 60 ou encore 100 litres par jour, et équipé de nombreux particuliers, mais aussi plusieurs administrations, ou encore la gendarmerie.

Mais les aventures de Geobuilder ne s’arrêtent plus aux portes de Mayotte. Sollicité par La Réunion, l’entreprise est en train d’y ouvrir une agence, qui devrait avoir ses locaux dans les prochaines semaines. Elle est également désormais présente aux Comores depuis 2024. Au regard de la situation économique de ce territoire, l’entreprise travaille davantage à de l’équipement collectif. « L’idée est d’installer des générateurs de 500 à 1.000 litres par jour pour un village par exemple » , explique Sébastien Fumaz. Si ces différents projets exportés fonctionnent, l’entreprise pourrait bien être présente à l’avenir à Madagascar, à l’Ile Maurice ou encore aux Seychelles. Ce développement pourrait bientôt conduire à l’installation d’une usine d’assemblage des générateurs dans l’océan Indien.

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Akuo Energy

Développer la place de l’énergie solaire dans le mix énergétique de Mayotte, c’est le but que s’est donné Akuo Energy. Cette volonté s’est incarnée dans l’inauguration, en novembre 2023, de la centrale photovoltaïque d’Hamaha, à Mamoudzou. Il s’agit du premier projet de l’entreprise sur l’île. Cette centrale solaire a la particularité d’avoir un système de stockage d’énergie. « Cela permet d’envoyer une partie de l’électricité dans le réseau pendant les moments où il y en a le plus besoin, comme le soir, et ainsi éviter de perdre de l’énergie » , explique Xavier Ducret, directeur d’Akuo océan Indien. Un moyen innovant d’occuper le terrain anciennement dédié à une décharge et qui est immobilisé pendant vingt ans pour réhabilitation. La centrale à une capacité de 1,2 Mégawatt, soit de quoi alimenter l’équivalent de 1.200 foyers. L’entreprise utilise également un logiciel qu’elle a développé et qui permet de réaliser des prévisions de consommation d’électricité pour le lendemain. « Cela permet à EDM (Electricité de Mayotte), d’adapter son réseau et d’avoir plus de souplesse » , indique Xavier Ducret. Akuo Energy devrait également inaugurer une nouvelle centrale à Ironi Bé, en mars 2024, avec l’agrivoltaïsme au cœur du projet : les panneaux recouvriront une partie de serres qui abriteront des cultures. L’entreprise souhaite développer ses activités dans ce domaine mêlant photovoltaïque et agriculture, avec un autre projet en développement dans le Sud de l’île, à M’ronabeja, dans la commune de Kani-Kéli.

Midzo Fly

Midzo Fly est un concept novateur inventé par Soiyiff Mzé. Son principe est simple : s'adapter au contexte local pour répondre à un besoin de transport par la livraison directement aux domiciles des clients, de bagages, colis, paquets sanitaires, ou tout autre chose tout en se reposant entièrement sur les services d’une entreprise locale. A celle-ci de décider des moyens de transport appropriés entre drones, vedettes, vélos électriques, véhicules hybrides ou électriques, selon la commande passée par ses clients. Ce projet de livraison multimodal devrait prendre corps à la fin 2024. Il pourrait être l’une des réponses au problème des embouteillages engendrés par celles et ceux qui souhaitent prendre la barge pour récupérer les voyageurs et leurs bagages. Midzo fly peut donc faire gagner du temps aux usagers en réduisant au maximum leur dépendance à la route. Il existe en effet de nombreuses possibilités pour cela sur l'île, notamment le lagon très peu exploité en termes adapté (pas forcément le plus rapide), drones (colis de plus de 100 kilos), barques dédiées, des vélos cargo facilement utilisables sur les pistes cyclables en zone urbaine et qui ont le grand avantage d'être électriques et donc non polluant. La préservation de l'environnement est un élément phare dans ce projet, qui fut l’un des 19 dossiers sélectionnés sur 100 présentés (de différentes catégories) à l'occasion d’un appel à projets national lancé par l'Agence Innovation Transport (AIT), qui a primé Midzo Fly à Paris en février 2024.

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remerciements à nos partenaires

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CRISE DE L’EAU

« ON A CRÉÉ UN SITE SPÉCIFIQUE QUI REÇOIT DES CENTAINES DE CONTENEURS DE BOUTEILLES VIDES »

Lundi 25 mars, une réunion de retour d’expérience sur la crise de l’eau a été organisée par la préfecture de Mayotte, réunissant différents acteurs du territoire. La presse n’ayant pas été conviée, malgré nos demandes en amont, nous nous sommes appuyés sur le retour de nos sources pour rendre compte aux lecteurs, dans le Flash Infos du mardi 26 mars, de ce qu’il s’était dit durant cet événement sur un sujet qui concerne l’ensemble de la population mahoraise. Suite à notre article, Philippe Moccand, directeur schéma industriel et Outre-Mer de Citeo, a souhaité revenir sur certains points.

Mayotte Hebdo : La semaine dernière, nous avions eu une information comme quoi, lors d’un retour d’expérience sur la crise de l’eau organisé par la préfecture de Mayotte, Citeo avait indiqué rencontrer des difficultés à faire face aux déchets plastiques engendrés par l’importation massive de bouteilles d’eau potable. Vous avez voulu revenir sur ce point.

Philippe Moccand : Ce qui est vrai, c’est que le dispositif normal, c’est-à-dire les fameuses bornes que vous connaissez et qui sont réparties sur l’ensemble du territoire de Mayotte, ne pouvaient pas suffire pour traiter

l’arrivée massive de bouteilles plastiques due à la crise de l’eau. Donc on a travaillé avec les services de l’État pour créer un nouveau site, qui est également au port, à Longoni, pour pouvoir stocker ces bouteilles avant de pouvoir les réexpédier pour recyclage. Celuici a reçu et continue de recevoir plusieurs centaines de conteneurs, donc un nombre assez conséquent de mètres-cube. Chaque camion qui vient ramener des conteneurs de bouteilles vides est vidé sur ce site-là. Et là, on remet des bouteilles vides dans de nouveaux conteneurs, qui partent vers La Réunion pour être compactées puis envoyées et recyclées en métropole. Donc, tous ces

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Propos recueillis par Marine Gachet

déchets sont amenés sur ce circuit logistique mis en place spécifiquement pour gérer la crise de l’eau.

M.H. : Avez-vous rencontré des difficultés à gérer ce surplus de bouteilles en plastique sur ce site dédié ?

P. M. : La distribution de bouteilles d’eau potable s’est arrêtée fin février. Bon, il y a eu ce mois de mouvements sociaux qui a pénalisé l’ensemble de la population mahoraise et nous compris sur le site, puisque ce dernier était complètement fermé. Donc on a aussi pâti de cela : pendant un mois, il n’y a pas eu de collecte. Oui, il y a un travail conséquent, ce qui est normal en raison de la distribution d’eau, mais l’engagement qu’on a, chez Citeo, c’est de traiter tous ces déchets. Que ce soit 11.000, 15.000, 20.000 m3 de bouteilles, cela mettra le temps qu’il faudra, mais on le fera.

M.H. : Lors de cette réunion organisée par la préfecture, on nous a rapporté qu’il avait été question d’aider les associations afin qu’elles puissent épauler Citeo. Pouvez-vous éclaircir ce point ?

P.M. : C’est inexact. Depuis le début, on travaille avec l’association Nayma, qui assure à la fois la communication de proximité, et des opérations de nettoyage, car malheureusement, tout le monde ne ramène pas forcément ses déchets plastiques aux bornes. Donc, on a organisé plusieurs opérations de nettoyage depuis septembre l’année dernière, et on les poursuit. Ce qu’il en est, c’est que là, on a une opération avec Nayma, depuis le 18 mars, où on incite l’ensemble de la population mahoraise à ramener, via un jeu concours, des bouteilles plastiques. Cela marche bien, car depuis le début, on n’a pas loin de 500.000 bouteilles qui ont été ramenées par la population, donc 500.000 bouteilles en moins dans les ravines et le lagon. Il y a un vrai engouement. Pour donner un ordre d’idée, sur une année à Mayotte, on est à peu près à 50 tonnes de bouteilles plastique qui sont triées, recyclées. Ça, ce sont les chiffres pour 2023. Là, en même pas dix jours, on a plus de 13 tonnes de bouteilles, c’est colossal. A côté de ça, on travaille aussi avec LVD environnement sur MajicavoKoropa pour aller chercher les bouteilles dans le village. Donc ça, ce sont deux associations partenaires avec Citeo et je sais qu’il y a d’autres associations qui mettent en place des évènements de ramassage. On leur fournit notamment des sacs en coordination avec les services de l’État.

M.H. : Par rapport à ce site créé spécifiquement pour gérer le surplus de bouteilles plastiques, combien de temps encore va-t-il être nécessaire ?

P.M. : On restera présent le temps qu’il faudra. Pour vous donner un ordre d’idée, si vous aller sur la route de Longoni, il y a pas mal de conteneurs maritimes stationnés un peu partout. Dans ces conteneurs, il y a des bouteilles plastiques. On va mener une opération pour collecter l’ensemble de ces conteneurs et pouvoir les traiter sur le site de Longoni. Donc, je dirai que ça va mettre encore quelques mois. Là, on a une presse permettant de compacter les bouteilles qui va être mise en fonction dans les prochains jours. On cherche tous les moyens pour traiter le maximum de bouteilles. L’engagement de Citeo, c’est que toutes ces bouteilles amenées sur le site de Longoni soient traitées pour être recyclées. Dès que la presse sera fonctionnelle, les bouteilles plastique compactées à Mayotte seront envoyées directement dans l’Hexagone, chez un recycleur pour refaire des bouteilles. Cela permettra de sauter l’étape de l’envoi à La Réunion, où ces bouteilles sont actuellement compactées avant d’être envoyées dans l’Hexagone. Nous, l’engagement qu’on prend chez Citeo, c’est que chaque bouteille collectée puisse redevenir une bouteille. n

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Philippe Moccand est le directeur schéma industriel et Outre-Mer de Citeo.

LISEZ MAYOTTE

ENCYCLOPÉDIES DE MAYOTTE (3/3)

AGRÉGÉ DE LETTRES MODERNES ET DOCTEUR EN LITTÉRATURES FRANCOPHONES, CHRISTOPHE COSKER EST L’AUTEUR DE NOMBREUX OUVRAGES DE RÉFÉRENCE SUR LA LITTÉRATURE DE L’ÎLE AUX PARFUMS, NOTAMMENT UNE PETITE HISTOIRE DES LETTRES FRANCOPHONES À MAYOTTE (2015) DONT IL REPREND, APPROFONDIT ET ACTUALISE, DANS CETTE CHRONIQUE LITTÉRAIRE, LA MATIÈRE.

Trois ans après Mayotte en partage, Thierry Mesas dirige, en collaboration avec les Archives départementales, une nouvelle encyclopédie sous le titre Patrimoines de Mayotte. L’ouvrage devient lauréat du prix du livre insulaire. Le concept de patrimoine attire immédiatement l’attention en ce qu’il est présenté comme l’outil conceptuel permettant d’organiser les connaissances relatives à Mayotte. Il s’agit ici d’un patrimoine immatériel, celui constitué par la tradition, la culture et l’histoire. La collaboration avec les Archives départementales indique l’importance de l’histoire dans cette entreprise dont l’épigraphe est « connaître le passé est nécessaire pour la construction de son avenir » :

« Pour mieux comprendre et connaître un territoire, sa population, il nous faut connaître son histoire passée et présente. Pour présenter Mayotte sous le prisme de son histoire on aurait pu aborder Mayotte dans l’ensemble des Comores ou de Madagascar et Dépendances car nous sommes en présence de territoires si proches géographiquement et qui ont eu un passé commun. D’ailleurs, dès les premières pages de l’ouvrage sur l’histoire de la cartographie dans l’océan Indien, on s’aperçoit de cette réalité. Pourtant on peut imaginer que la connaissance du particularisme peut favoriser la compréhension de l’histoire de l’ensemble régional et aussi confronter les différences. » (p. 5)

L’approche historique invite à inscrire Mayotte dans différents ensembles intégrés volontairement ou involontairement, acceptés ou refusés. Tout en la diluant, la citation pose la problématique de l’ensemble archipélique par opposition au particularisme insulaire. Épigraphe et citation reprennent un lieu

commun du discours historique. Le but est de recourir au passé pour comprendre le présent et éclairer l’avenir. Dans cet ouvrage comme dans le précédent, les documents iconiques occupent une place particulière :

« Les images dans la compréhension de l’histoire ont un rôle essentiel, il apparaissait intéressant d’éditer un ouvrage avec une iconographie de qualité aux travers de documents originaux conservés par les Archives départementales de Mayotte (et ceux qui pouvaient être collectés auprès d’autres organismes publics ou privés, associations, particuliers…). Il nous a semblé évident qu’un partenariat avec le service des Archives départementales soit le point de départ de cette aventure. Ce fut fait avec la signature d’une convention de partenariat avec le Conseil général de Mayotte. » (p. 5)

L’encyclopédie se fait livre d’images, pour donner à voir Mayotte. Néanmoins, l’icone ne se substitue pas au verbe qui ordonne, de façon décidée, un ouvrage en huit parties :

- « Atlas de Mayotte depuis les portulans à nos jours »

- « Archéologie »

- « La période coloniale (1843-1975) »

- « Histoire contemporaine »

- « Les langues mahoraises »

- « La musique et la danse »

- « Géologie et climat de Mayotte »

- « Flore, faune & lagon »

Le livre mêle donc l’histoire à la géographie et s’ouvre au patrimoine naturel. Indiquons enfin que Thierry Mesas se présente, dans son avantlire, comme le Président d’une association appelée « Les Lumières de la francophonie », et présentée en deuxième de couverture, dans un rabat, de la façon suivante :

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LITTÉRATURE

« Cette association a pour but l’accès à la connaissance, au savoir et au respect de la différence par la réalisation de programmes ou d’actions visant à la promotion de la francophonie et sa mosaïque culturelle. Elle a aussi pour objectif la promotion des cultures européennes et celles des terres lointaines. Elle mène des actions associatives culturelles et solidaires autour du livre, de la littérature, de l’écriture et de la lecture notamment grâce à l’utilisation de l’édition (éditions Couleurs métisses). En 2014, elle a participé à la création de quatre bibliothèques. »

Dans l’ouvrage, le concept de patrimoine se comprend dans l’esprit de l’UNESCO : patrimoine historique (archéologie, périodes coloniale et contemporaine), linguistique (langues vernaculaires), culturel (musique et danse) et enfin naturel (géologique, climat, faune, flore et lagon). Les ordres de connaissance se succèdent donc dans cette histoire illustrée qui se termine sur les sciences naturelles, notamment l’ornithologie, Mayotte étant un drôle d’oiseau.

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MAGAZINE D’INFORMATION NUMÉRIQUE HEBDOMADAIRE

Edité par la SARL Somapresse au capital de 20 000 euros

7, rue Salamani

Cavani M’tsapéré

BP 60 - 97600 Mamoudzou

Tél. : 0269 61 20 04 redaction@somapresse.com

Directeur de la publication

Laurent Canavate canavate.laurent@somapresse.com

Directeur de la rédaction

Mohamed El Mounir dit “Soldat” 0639 69 13 38 soldat@mayottehebdo.com

Rédactrice en cheffe Raïnat Aliloiffa

# 1083

Couverture : LES DIX ANS DES TROPHÉES MAHORAIS DE L'ENTREPRISE

Journalistes

Raïnat Aliloiffa

Alexis Duclos

Saïd Issouf

Marine Gachet

Audrey Margerie

Direction artistique

Franco di Sangro

Graphistes/Maquettistes

Olivier Baron, Franco di Sangro

Commerciaux

Cédric Denaud, Murielle Turlan

Comptabilité

Catherine Chiggiato comptabilite@somapresse.com

Première parution

Vendredi 31 mars 2000

ISSN : 1288 - 1716

RCS : n° 9757/2000

N° de Siret : 024 061 970 000 18

N°CPPAP : 0125 Y 95067

Site internet www.mayottehebdo.com

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