Mayotte Hebddo n°904

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LE MOT DE LA RÉDACTION

ALORS, HEUREUX ? Après des années d'attente, les Mahorais auront leur piste longue… ou en tout cas une nouvelle promesse de piste longue. Car le délai annoncé, 18 mois avant la construction de l'infrastructure, semble bien serré pour mener ce qui sera, nous dit-on, une dernière étude "de faisabilité." Que doit-on comprendre ? "Piste allongée ou piste convergente", nous répond-on. La seule chose qui resterait, donc, à déterminer. N'en doutons pas, l'année et demie à venir verra tous les yeux tournés vers la Petite-Terre, mais surtout vers Paris, afin de s'assurer que l'annonce n'en reste pas… au stade d'annonce. En attendant, Mayotte Hebdo revient cette semaine sur la visite présidentielle, mais aussi sur les études qui avaient été menées, et auxquelles Emmanuel Macron a fait référence dans son discours. Nous vous présentons aussi Dardai Gatienne M'hadji, un jeune entrepreneur Mahorais qui, depuis la métropole – pour le moment en tout cas – participe au développement de l'île. Et avec une idée particulièrement bonne : livrer des fruits et des légumes locaux, bio, de qualité, sans intermédiaire entre le producteur et le consommateur. Enfin, le géographe Saïd Saïd Hachim revient avec nous sur la naissance d'un volcan au large de Mayotte. Un phénomène extraordinaire, qui se joue chez nous, et dont il faut être fier, selon le chercheur. Bonne lecture à tous

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COUP D’ŒIL DANS CE QUE J'EN PENSE

Laurent Canavate

Mayotte Hebdo n°653, vendredi 4 avril 2014

LA TEMPÊTE TROPICALE HELLEN A FRÔLÉ MAYOTTE La tempête tropicale Hellen, qui a frôlé Mayotte dans la nuit de samedi à dimanche dernier, s’est ensuite renforcée pour devenir quelques heures après un cyclone tropical. Les rafales à plus de 100 km/ et, la forte pluie ininterrompue ont provoqué des dégâts dans le nord de l’île surtout. Des portions de routes se sont affaissées, des murs se sont effondrés, des arbres se sont abattus sur les lignes téléphoniques et surtout électriques. Il y a eu plusieurs coupures dans certaines zones du centre et du sud de l’île aussi. Les équipes d’EDM ont été mobilisées pour remettre aussi vite que possible le courant aux populations inquiètes. Mais des milliers de personnes ont souffert de ce passage d’Hellen. Des dizaines de milliers de clandestins vivent dans des conditions très précaires sur les hauteurs des communes de Mamoudzou et Koungou, à Vahibé, Combani et ailleurs. De nombreuses maisons, construites en dur, ont aussi pris l’eau de toutes parts. Les caniveaux, les rivières ont débordé. Des rues, des places ont été inondées. Des glissements de terrain très dangereux se sont produits, bloquant la circulation assez rare. Et quand le soleil est revenu, un constat de l’étendue des dégâts a pu être établi. Toutefois, Hellen n’était qu’une tempête quand elle est passée à près de 300 kilomètres au sud de l’île. Il est difficile d’imaginer les dégâts colossaux que provoquerait un cyclone traversant l’île. Des familles tassées dans des cases défoncées par des vents vraiment violents, des amas de tôles descendant des collines, emportés par des glissements de terrains, inaccessibles aux secours, un enchevêtrement de câbles électriques de fortune, de palettes, de paraboles et d’effets personnels... Le passage d’un cyclone sur l’île serait certainement désastreux, dramatique, terrible. On peut imaginer un réseau électrique coupé par des arbres tombés sur tout le territoire, des centres de secours, d’accueil… quasi inexistants. Les mairies, censées assurer les premiers secours, l’accueil dans des écoles ou autres salles communales, sont-elles prêtes ? Sont-elles rodées à ces exercices de secours ? Les clés des écoles et MJC seront-elles disponibles ?... Des stocks de secours sont-ils constitués à l’approche de la saison des cyclones ? Les inquiétudes sont nombreuses au vu de ce qu’une tempête peut provoquer comme dégâts. Et après la pluie, le ciel bleu revenu, ces considérations, ces soucis sont déjà loin pour beaucoup. On verra bien si cela arrive un jour… Mais le propre des dirigeants est justement d’arranger le quotidien, et de prévoir, de préparer l’avenir.

TOLERIE - PREPAR ATION - PEINTURE

Au lendemain des élections municipales, nous voilà pourvus de nouvelles équipes, qui se sont battues, qui ont été motivées pour conquérir ce pouvoir de gérer notre vie en commun. Ils ont à organiser la scolarisation, dans de bonnes conditions d’hygiène et de sécurité, de nos enfants. Ils ont à prévoir les besoins d’aujourd’hui, mais aussi de demain, en termes d’emplois, de sécurité, de loisirs. Les équipes municipales, qui ont réclamé nos suffrages, que les citoyens et les règles de la démocratie ont portés au pouvoir, doivent maintenant s’atteler à améliorer notre cadre de vie. Ils doivent créer les conditions d’un vivre ensemble le plus agréable possible. Ils peuvent pour cela s’appuyer sur la société civile, les acteurs locaux, mais surtout sur des équipes municipales qu’il convient de mettre immédiatement au travail, sur des projets qu’ils portent, des visions qu’ils ont de notre vie sur ce territoire, au quotidien. Nos nouveaux élus doivent mobiliser les équipes municipales, et utiliser au mieux l’argent que chacun va leur donner pour cette mission. Les habitants, les propriétaires ou les locataires, les entreprises et les administrations, les utilisateurs du service de ramassage des poubelles et les autres vont attendre, en échange de leurs taxes et autres impôts locaux, un service de la part de leur mairie : un service de qualité, des routes, des rues et des places publiques aménagées, entretenues, des secours en cas de cyclone. On attend des crèches accessibles, des MJC actives pour accueillir les enfants, des services publics dynamiques, mobilisés, actifs, sous la houlette de leurs équipes. Les artisans, les jeunes créateurs d’entreprises veulent un soutien, un appui au démarrage, avec des zones d’activités dans lesquelles ils pourront s’installer pour un prix modique… et créer de l’emploi, des richesses pour demain. Le passage de la tempête Hellen doit faire comprendre que Mayotte a changé d’époque. On ne peut plus lever les yeux au ciel et implorer seulement sa clémence. Il faut se préparer, réfléchir, agir, investir. Les besoins de la population ne sont plus les mêmes qu’il y a 10 ou 20 ans. Il faut de l’eau, de l’électricité tous les jours. Des routes en bon état pour circuler. Des écoles propres et entretenues pour la réussite de nos enfants. Il faut du travail pour les plus grands. Il faut des loisirs, des lieux publics pour tous, des places, des fronts de mer, des plages aménagées, sécurisées. Des rues éclairées le soir, fonctionnant à l’énergie renouvelable et non polluante. La tempête tropicale Hellen a frôlé Mayotte, mais si un jour un cyclone passe sur l’île, il vaut mieux être bien préparé.

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S LE RÉTRO

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Une seule adresse : rédaction@mayottehebdo.com

Finances du CG : attention danger ! Dossier sur les finances fragiles du Conseil général avec, notamment, une interview de Jacques Brana, alors président de la Chambre des comptes. Il explique, entre autres, que "Il y a trop de personnes qui ont été autorisées – ou qui se sont autorisées – à émettre des bons de commande parce qu'ils ont pu avoir accès au carnet. Il n'y a pas de contrôle de leur signature ou de leur qualité. Et après les factures arrivent et il faut bien les payer", et estime que "Il faut peut-être limiter les voitures de fonction, les téléphones portables et les voyages en première classe et modifier la politique d'embauche des personnels." Mayotte Hebdo n°448, vendredi 23 octobre 2009.

Islam : un regard venu d'ailleurs Dans quel sens l'islam de Mayotte évolue-t-il ? C'est la question que nous nous posions, à l'occasion de la venue sur l'île d'un imam de métropole : "Cette semaine est arrivé à Mtsamboro, Nader Abou Anas, l'imam de la mosquée du Bourget, un invité de marque, mais qui suscite quand même des débats. Le jeune homme de trente et un ans fait peur. Avec sa barbe longue et ses discours sur les femmes, il n'a pas l'unanimité. Mercredi soir, sur la petite place de la mosquée de Hamjago, les chaises sont alignées d'un côté et les tapis dressés d'un autre. Nader Abous Anas va apporter son prêche sur la délinquance des jeunes. Les hommes sont séparés des femmes par un long rideau. Les hommes et les adolescents sont sur des chaises et les femmes et les adolescentes par terre sur des nattes", écrivions-nous. Mayotte Hebdo n°677, vendredi 24 octobre 2014.

LA PHOTO D'ARCHIVE Une mission scientifique pour recenser les crustacés Novembre 2009 : une mission scientifique destinée à recenser les crustacés décapodes de Mayotte est organisée. Financée par la DAF et le ministère de l'Ecologie à 60%, et par la fondation d'entreprise Total à 40%, cette mission s'inscrit dans le cadre de l'Initiative française en faveur des récifs coralliens (Ifrecor) pour établir une connaissance précise de la biodiversité du lagon, mais aussi des principaux crustacés vivant dans les mangroves. Un inventaire essentiel pour évaluer la biodiversité mahoraise et la préserver.

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IL Y A 5 ANS

IL Y A 10 ANS

C'ÉTAIT DANS MH


TCHAKS LE CHIFFRE 9 C'est le nombre de kilomètres de pistes cyclables prévus par la Communauté d e c o m mu n e s d e D e m b é n i Mamoudzou (Cadema) dans le cadre du projet Caribus, principalement entre les deux pôles d’échanges des Hauts Vallons et de Passamaïnty. À ce titre, la Cadema est lauréate d'un récent appel à projets national.

L'ACTION Des formations sur les Valeurs de la République et Laïcité Le centre régional d’information jeunesse de Mayotte accompagne les volontaires Services Civiques dans la formation des Valeurs de la République et Laïcité, mais aussi sur la connaissance de sa structure et de ses outils numériques d’information. Ainsi, pas moins de cinq formations seront dispensées : le 14 novembre, le 12 décembre, le 9 janvier, le 13 février et le 12 mars de 8h à 16h, à destination de 12 à 15 stagiaires par session.

LA PHRASE "Beaucoup d’inconnues sont encore à éclairer" Contacté par nos confrères et collègues de Flash Infos, le directeur de l'aéroport de Mayotte estime que si l'annonce de la piste longue est "une bonne chose pour le développement de l'île", les délais peuvent être difficile à tenir. En cause, entre autres : la nécessité de changer de délégataire si l'infrastructure change : "Nous [la société Edéis] avons été désignés comme délégataires de la délégation de service public pour la construction et la gestion du terminal de l’aéroport. Cela signifie que si l’infrastructure change, le contrat de délégation change aussi et c’est compliqué, cela prend du temps." Des points qu'il faudra donc éclaircir rapidement.

LA PHOTO DE LA SEMAINE Un hôtel d'entreprise pour la CCI La chambre d’industrie et de commerce (CCI) de Mayotte a inauguré son hôtel d’entreprises, lundi après-midi à M’Gombani. Cette nouvelle structure offre des bureaux locatifs à des sociétés déjà existantes comme le cabinet Mahorais Conseil, ainsi qu’à des primo-créateurs accompagnés par la Chambre dans le lancement de leurs activités. Il ne reste déjà plus une seule des huit places proposées par la CCI au sein des locaux. "C’est la raison pour laquelle nous envisageons dès à présent l’extension de la maison de l’entreprise !", dévoile Zoubair Alonzo, directeur général de la CCI de Mayotte. Ce nouvel édifice abrite également un Point A, qui permettra de développer et promouvoir l’alternance et l’apprentissage chez les jeunes et en toile de fond, favoriser leur accès à l’emploi.

DRAME

PROVERBE

Drame durant la visite présidentielle : trois enfants – un frère, une sœur et leur cousine – sont décédés à Longoni après être tombés dans une fosse septique, seulement recouverte d'une plaque de contreplaqué. Il était trop tard lorsqu'un passant parvient à la remonter. L'homme, en situation irrégulière, a touché par son courage. Le président Macron, quant à lui, a souhaité se rendre sur place sans que cela ne soit finalement possible, mais a chargé le secrétaire générale de la préfecture d'intervenir en son nom auprès de la famille.

Fi moja yaola lakini piya zibaki ziolo.

Trois enfants décèdent à Longoni

Un poisson (qui est) pourri et tous les autres sont pourris.

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LE FLOP LE TOP Collège de Bouéni : c'est pour bientôt

Mayotte oubliée au Sénat

Questionné sur la crédibilité des 800 classes promises d’ici la fin du quinquennat par le président de la République alors que le collège de Bouéni n’a toujours pas ouvert ses portes, le vice-recteur de Mayotte, Gilles Halbout a sauté sur l’occasion : "puisque vous me le demandez, je peux vous annoncer que le collège de Bouéni ouvrira le 18 novembre, un communiqué en ce sens doit paraître lundi", a-t-il annoncé, tout en jugeant "tout à fait possible" que ces 800 classes ouvrent également.

Alors que la commission des Outre-mer du Sénat avait convié la ministre des Outre-mer pour faire le point sur les actions du gouvernement dans les territoires ultramarins, Mayotte a été la grande oubliée des débats qui ont eu lieu entre les parlementaires et la représentante du gouvernement jeudi 17 octobre. Alors même que Michel Magras, le président de la commission annonçait en introduction les principaux sujets sur lesquels il attendait des réponses, à savoir "l’état d’avancement de la reconstruction des îles du nord suite au passage de l’ouragan Irma. Mais aussi les grands engagements de l’État avec notamment les accords de Guyane et le plan pour l’avenir de Mayotte", la ministre n’a évoqué l’île aux parfums qu’à travers les 130 millions d’euros attribués à travers le contrat de convergence au 101ème département dans le cadre du plan global de transport et de déplacement de Mayotte. Parmi les auditeurs, aucun sénateur mahorais pour lui rappeler qu’elle était attendue sur le sujet.

ILS FONT L'ACTU Bacar Ali Boto Le premier adjoint au maire, Bacar Ali Boto, annonce officiellement sa candidature à la mairie pour les élections municipales de 2020. Cause de cette scission ? La politique LREMModem de la majorité ne conviendrait pas aux attentes de la population, estime le désormais candidat. Une candidature qui a fait parler du côté de la majorité, et qui rend encore plus compliqué le prochain suffrage à Mamoudzou.

Annick Girardin La ministre des Outremer, par ailleurs aux côtés du président Emmanuel Macron lors de sa visite à Mayotte, mise en cause par Le canard enchaîné. Le journal met en avant son compagnon, qui aurait remporté trois appels d'offres publics depuis 2013 à SaintPierre-et-Miquelon, fief politique de la ministre, qui aurait donc, selon le journal, pu jouer un rôle dans ces attributions. Annick Girardin a qualifié de "calomnie" les allégations du Canard enchaîné : "Les attaques politiques je peux les accepter, c’est le jeu, sur le reste il faut quand même sortir les preuves avant de dire ce genre de calomnies", a-t-elle déclaré à l'AFP.

ENTREPRISES Des Kbis en ligne

Le Conseil national des greffiers des tribunaux de commerce a annoncé l’ouverture des services d’Infogreffe sur l’île. Désormais, les entreprises mahoraises peuvent commander un Kbis (seul document officiel attestant de l’existence juridique d’une entreprise) directement en ligne sur infogreffe.fr, avant de bénéficier à terme de l’ensemble des services dématérialisés disponibles (immatriculations, dépôt de compte, modifications…) en métropole où 24 à 48 heures suffisent à créer une société, ainsi que de la commande d’actes et de statuts à un tarif fixe et réglementé par l’État. Ce progrès et cette évolution répondent à une attente forte des acteurs économiques ultramarins.

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À LA RENCONTRE DE...

Solène Peillard

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DARDAI GATIENNE M'HADJI

POUR UNE AGRICULTURE 2.0 CO-GÉRANT DE HODIDAGONI, LE JEUNE VINGTENAIRE PERMET AUX MAHORAIS DE PROFITER DE FRUITS ET LÉGUMES LOCAUX, PRODUITS SAINEMENT ET LIVRÉS À DOMICILE. UN SYSTÈME PRATIQUE POUR LE CONSOMMATEUR, ET ÉQUITABLE POUR LE PRODUCTEUR. Sa nouvelle entreprise fait déjà grand bruit sur le territoire. À seulement 24 ans, Dardai Gatienne M'hadji est le co-fondateur de Hodidagoni, une société de livraison à domicile de fruits et légumes frais et locaux, née il y a une poignée de mois. Ici, pas d'intermédiaire : les produits fraichement récoltés sont récupérés directement chez le producteur avant d'être distribués, sur réservation en ligne, aux quatre coins de l'île. Un service inédit, pratique, mais pas seulement. "Nous choisissons nos agriculteurs selon des critères bien précis, comme le fait qu'ils n'utilisent pas de pesticides néfastes pour l'environnement et la santé des consommateurs", développe l'entrepreneur. Son idée a germé alors que les tomates vendues sur le sol du 101ème département – et généralement produites à l'extérieur – étaient placées sous surveillance par la préfecture. En cause : leur concentration en produits phytosanitaires, dépassant très largement les seuils autorisés. "On a remarqué que les Mahorais n'avaient plus confiance vis-à-vis des agriculteurs, alors

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CE QU'ILS EN DISENT Toni M'hadji, grand frère de Dardai Gatienne M'hadji "Dardai est comme la nature, il a horreur du vide. Il n'aime pas s'ennuyer, il est très ambitieux. C'est quelqu'un qui aime se lancer des défis mais il reste très familial."

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on s'est dit qu'il fallait créer quelque chose qui associe facilité, modernité avec le e-commerce et surtout, qui rassure le client en lui assurant la traçabilité du produit", se souvient Dardai Gatienne M'hadji. Désormais, avec Hodidagoni, la transparence est de mise. Chaque personne qui en formule le souhait peut, à la demande, venir visiter les exploitations de la petite dizaine de paysans qui fournissent la société, qui leur assure parallèlement une rémunération plus juste. C'est dans ces mêmes champs, qu'à peine enfant, Dardai Gatienne M'hadji s'est découvert une passion pour ce domaine. "Mon père est agriculteur et déjà quand j'étais tout petit, il m'amenait au champ en Petite-Terre", retrace le Mahorais. "C'est là que je suis tombé amoureux de l'agriculture et que j'ai décidé de travailler là-dedans". Pari réussi, puisqu'une partie de la production familiale alimente aujourd'hui le réseau de Hodidagoni, à qui le Conseil départemental, les écoles de l'île et les grands restaurant locaux font régulièrement appel. De nombreuses casquettes Pour atteindre cet objectif, le sien, Dardai Gatienne M'hadji a dû porter nombre de casquettes. Après avoir obtenu son baccalauréat en sciences et technologies du management et de la gestion au lycée de Petite-Terre, il s'envole pour la métropole, la ville de Rennes plus précisément. Là, il passe un BTS immobilier, puis enchaîne sur deux ans de fac pour une licence en administration économique et sociale. Un parcours alambiqué, pourrait-on penser. "Je cherchais vraiment à toucher à tout : mon objectif derrière, c'était de créer une entreprise et de pouvoir répondre à pas mal de postes, pas mal de besoins", précise le Mahopolitain. Car de l'Hexagone, il n'est jamais revenu. Après ses années universitaires, Dardai Gatienne M'hadji commence à travailler pour la grande distribution, "chez les grands", comme il répète. Le but ? Comprendre comment, à une vaste échelle, est pris en charge l'approvisionnement des produits, dans le respect des normes sanitaires. À l'époque, il était encore sous contrat de professionnalisation, afin de valider, cette fois, un BTS en management commercial et opérationnel. Dans le même temps,

Dardai Gatienne M'hadji se forme, des mois durant, au domaine du digital. "Et j'ai fini par me lancer", sourit-il. Encore étudiant et salarié, il créé une entreprise spécialisée dans la création et la gestion de sites Internet. Une expérience qui profite aujourd'hui à Hodidagoni. "J'aime bien dire qu'on est jamais mieux servi que par soi-même !" Aujourd'hui encore, le jeune homme garde un pied dans la grande distribution, pour laquelle il travaille toujours en tant que manager, depuis la ville de Rennes. Comme une façon de poursuivre son apprentissage. De multiples voyages Pour étoffer son parcours professionnel naissant, Dardai Gatienne M'hadji et son associé, Djanfar Abdallah, n'ont pas hésité à multiplier les voyages. Aux Comores, d'abord, "pour voir comment l'agriculture fonctionne là-bas", mais aussi à La Réunion, au Portugal, en Espagne et même en Hollande. "L'agriculture écologique y est très développée, et c'est ce qui nous intéresse". Preuve en est : Hodidagoni, en constante recherche de nouveaux producteurs, refuse catégoriquement de collaborer avec ceux qui ne partagent pas leur vision de l'agriculture. "On est vraiment sensibles à l'emploi d'engrais naturel : peau de banane, bouse de vache, écorce…", égraine l'entrepreneur. Prochainement, sa société devrait acquérir ses premiers triporteurs, qui permettront de remplacer les voitures et motos qui procèdent actuellement à la livraison des produits au domicile des clients. "Le but à long terme c'est qu'il y ait des livreurs en triporteur dans chaque ville pour limiter notre pollution", commente Dardai Gatienne M'hadji. Et par la même, diminuer le prix du service. Actuellement, la livraison est facturée cinq euros en Petite-Terre, 10 aux alentours de Mamoudzou et entre 15 et 20 plus au Sud. "Mais c'est à court terme, on essaie de mettre en pace des points de vente", dévoile encore le jeune homme.

CE QU'ILS EN DISENT Djanfar Abdallah, associé de Dardai Gatienne M'hadji "Dardai est vif et réactif. Son côté ambitieux n'enlève rien à sa générosité : il est toujours prêt à aider les autres. On le surnomme "Monsieur solution" lorsque l'on fait appel à lui !"

Son retour à Mayotte ? Il y pense. "J'ai des projets : faire grandir et évoluer Hodidagoni, et on est en train d'y travailler pour l'année prochaine, et il y a une entreprise que je veux monter ici très bientôt !" Sans trop vouloir en dire, il évoque déjà un service de transport "qui va aider les Mahorais". Son parcours ne semble pas prêt de s'arrêter.

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LE DOSSIER

RETOUR SUR LA VISITE PRÉSIDENTI

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Et voilà, la très attendue visite d'Emmanuel Macron à Mayotte a eu lieu. Une journée menée au pas de course, qui a permis au chef de l'État de revenir sur les mesures mises en place depuis la crise de 2018 et de faire un point sur le plan de 1,6 milliard dont bénéficie Mayotte. Une journée qui a aussi permis l'annonce de la réalisation de la piste longue dans un délai serré. Promesse ou réalité à venir ? Les mois à venir nous le diront.

IELLE

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LE DOSSIER

Geoffroy Vauthier

VISITE PRÉSIDENTIELLE

MAYOTTE : 1, MACRON : 1 (MAIS POUR COMBIEN DE TEMPS ?) IL S'EN EST ALLÉ, LE PRÉSIDENT, À LA CONQUÊTE DES GLORIEUSES PUIS DE LA RÉUNION. MAIS NON SANS AVOIR AUPARAVANT MARQUÉ UN POINT SUR LE TERRAIN MAHORAIS. EN ANNONÇANT LA RÉALISATION DE LA PISTE LONGUE TANT DÉSIRÉE, LE CHEF DE L'ÉTAT REDORE SON BLASON. CELA SUFFIRA-T-IL ?

Disons-le clairement : le 8ème président de la Vème République a moins mobilisé les foules que ses prédécesseurs, Jacques Chirac

et Nicolas Sarkozy en tête. Il n'empêche, sa venue était fort attendue et l'accueil, colliers de fleurs et chants traditionnels de l'aéroport

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à Hamjago en passant par Mamoudzou, était respecté. Il faut dire toutefois que les contestataires à la politique du moment, incarnés par le Collectif des citoyens, avaient soigneusement étaient écartés au préalable (voir en pages suivantes). Chaleureux et polis les Mahorais ? Globalement toujours, oui, mais légitimement plus méfiants depuis quelques années. Passées la ferveur et la fierté d'accueillir les plus hauts représentants de l'État, ils attendent désormais des actes, du concret, des décisions dont les effets résonnent au quotidien, et non dans les haut-parleurs médiatiques ou dans les chiffres des institutions. Au-delà de la flatterie donc, la population était curieuse de savoir si, oui ou non, Emmanuel Macron allait faire une grande annonce. Dans la tête de tous : la piste longue, maintes fois promise, parfois même actée, mais jamais réalisée. Une piste longue devenu au fil du temps le symbole d'un engagement étatique fluctuant et hésitant. En somme : celui d'un État présent, mais avec modération. Et les symboles, ça compte. En annonçant le début de sa construction dans un délai relativement court compte tenu de l'ouvrage – le milieu de l'année 2021, le temps, nous dit-on, de réaliser une dernière étude pour savoir qu'elle scénario retenir (voir en pages suivantes) –, le chef de l'État en offre un, de symbole. Et il confirme par là même ce qu'avait dit la ministre des Outre-mers, Annick Girardin, lors de sa venue en juin 2018 : "Mayotte veut plus d'État." Or, un État, ça prend des décisions. Et un État, en particulier à Mayotte, ça doit améliorer concrètement la vie des habitants. La piste longue annoncée en est le fameux symbole : grâce à elle, les Mahorais devraient voyager moins cher, le développement économique devrait être soutenu et, qui sait, Mayotte pourrait grâce à la nouvelle infrastructure, devenir un hub régional. En tout cas, les Mahorais se prennent à en rêver. En cela, le président tape juste : il est celui qui, enfin, va leur offrir ce qu'ils attendent. Ne l'a-t-il d'ailleurs pas souligné en rappelant que "Ça fait 20 ans qu'on vous la promet" ? Mieux, il s'affirme avec cette décision comme celui qui, pour Mayotte, va à l'encontre de la raison financière : "La piste, quand je suis parti de Paris, on m’a dit il n’y en avait pas besoin, que ça coûtait cher." En trame de fond, comprendre "Moi, je la fais quand même." Montant : 200 000 millions d'euros – un investissement objectivement pas si cher que cela, d'autant qu'il sera inclus dans le contrat de convergence de 1,6 milliard d'euros dont bénéficie Mayotte. Mais ne crachons pas dans la soupe, Mayotte attendait cet équipement, et Mayotte devrait désormais l'avoir… une fois de plus. C'est ce qui fera la différence : les Mahorais ne sont plus naïfs, et plus que jamais, ils auront désormais l'œil rivé sur Dzaoudzi pour savoir si cette piste avance ou non. Le travail réside donc désormais dans une information permanente sur les avancées du projet. Chaque étape doit être rendue publique pour achever de convaincre de la volonté présidentielle sur le sujet. Car, à vrai dire, si l'annonce a provoqué le contentement, peu étaient ceux qui y croyaient à 100%. "On nous l'a déjà

promise il y a 20 ans", entendait-on ici. "Elle se fera jusqu'à ce qu'elle ne se fasse plus", commentait-on ici ; "c'est bien de le dire, c'est mieux de le faire", ironisait celui-ci ; "les études, elles sont déjà faites, mais il faut encore en faire une dernière", déplorait-on encore là-bas ; ou carrément "Laisses tomber, on nous embrouille", affirmait un autre. Bref : l'euphorie de la promesse s'efface face au constat qu'une promesse, justement, n'engage que ceux qui y croient. Était-ce cette méfiance et cette joie contenue que traduisaient des applaudissements tout en retenue au moment de cette annonce qui aurait pourtant dû soulever l'approbation générale ? À n'en pas douter. Polis, mais plus soumis.

DES ACTES, ENCORE DES ACTES Cette méfiance, elle se trouvait également dans le reste de son discours de Mamoudzou qui, au-delà de la piste longue – point d'orgue de l'allocution –, rappelait les actions de l'État depuis la crise de l'année 2018. Santé, éducation – 800 classes devraient sortir de terre "d'ici la fin du quinquennat", mais aussi sécurité et immigration étaient passées en revue. Au programme : les 1 500 effectifs mobilisés dans le cadre de l'opération Shikandra, les 24 000 reconduites à la frontière cumulées depuis le début de l'année, la hausse de 50% du nombre d'interceptions en mer ou encore les 180 habitations illégales détruites. Des chiffres et des efforts réels, mais que les Mahorais connaissent déjà et qu'ils souhaitent désormais, là aussi, constater sur le terrain. Or, ce n'est pas encore le cas : les écoles fonctionnent encore en rotations scolaires, et l'accès aux soins demeure compliqué. Alors quelle solution ? La coopération régionale avec l'Union des Comores, abordée par le président lors de sa conférence de presse à Mtsamboro, porte d'entrée de la majeure partie des flux migratoires, à travers l'accord signé en juillet dernier. Une coopération qualifiée "d'étape essentielle." "Il faut regarder quelle est la cause de ces grandes difficultés", a-t-il ainsi souligné, ajoutant : "C'est aussi l'immigration clandestine pour des raisons sanitaires. Si on veut être pleinement efficace, il faut accepter de faire l'investissement côté Comores pour pouvoir expliquer que quand quelqu'un est malade, son avenir ne réside pas à prendre des risques en embarquant sur un kwassa-kwassa pour venir à l'hôpital à Mayotte mais qu'il pourra être traité chez lui, ce à quoi il aspire." Un discours que Mayotte a eu l'habitude d'entendre, qu'elle accepte, mais encore une fois, sous réserve que cette démarche porte ses fruits. Et qu'elle puisse les cueillir, enfin. Finalement, c'est peut-être là la conclusion à tirer de la visite d'Emmanuel Macron à Mayotte. Le fossé pourrait donc se réduite entre l'État et son dernier département, mais à la seule condition toutefois que les engagements se voient. Et qu'ils se voient vite. Jusque-là, Mayotte a été trop pleine de discours, et trop vide d'actes. Plus que jamais face à un chef d'État, les Mahorais ont montré qu'ils l'avaient compris. n

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LE DOSSIER

Geoffroy Vauthier

PISTE LONGUE

QUEL PROJET RETENIR ? LA RUMEUR COURRAIT, ELLE EST DÉSORMAIS VÉRIFIÉE. EN VALIDANT LA CONSTRUCTION DE LA PISTE LONGUE LORS DE SON DISCOURS, LE PRÉSIDENT EMMANUEL MACRON RÉPOND À UN SOUHAIT FORT DES MAHORAIS. RESTE TOUT DE MÊME UNE DERNIÈRE ÉTUDE À MENER, DESTINÉE À SAVOIR QUELLE OPTION SERA CHOISIE, SUR LA BASE DES ÉTUDES DÉJÀ MENÉES PAR LE PASSÉ. LES VOICI. "La piste, quand je suis parti de Paris, on m’a dit il n’y en avait pas besoin. Ça fait 20 ans qu’on la promet et qu’on ne la fait pas. (…) Quand je suis arrivé à Mayotte, j’ai compris que la piste était courte parce qu’on freine beaucoup ! Donc oui, on la fera. Je vous le dis très clairement." Et de l’affirmer pour rassurer : "Il n’y aura pas d’études d’impact (…) car elles ont été faites plusieurs fois." L'allocution désormais bien connue confirme donc la réalisation de la piste longue sur la base des études déjà menées par le passé. Une nuance toutefois, il en faudra une dernière "dans l’année et demie à venir pour savoir comment nous lancerons les travaux." Une nouvelle qui a suscité l'inquiétude, mais sur laquelle est revenu le secrétaire d'État en charge des transports, JeanBaptiste Djebbari, également du voyage, lors d'une visite de l'infrastructure aéroportuaire mardi 22 en fin d'aprèsmidi. "Il y a déjà eu beaucoup d’études qui

n’ont pas abouti", a rappelé à son tour le secrétaire d’État en poursuivant : "Le président a donc dit aujourd’hui que, sur la base de ce qui avait été fait, le projet entrait désormais dans une phase concrète." Cette "phase concrète" doit permettre de décider lequel des deux scénarii envisagés auparavant sera choisi : "l’allongement de la piste ou celui d’une piste convergente." Le tout avec un délai annoncé : "18 mois pour rendre cette étude opérationnelle et lancer les travaux." Et de promettre, compte tenu du phénomène sismo-volcanique du moment, des "solutions innovantes" pour Mayotte. Pour mieux comprendre ce qui se joue, nous republions ici les deux scénarios envisagés dans une étude d'avant-projet datée de 2010, qui avait ensuite donné lieu à un débat public. Si la promesse présidentielle est tenue, c'est une de ces pistes qui sera construite à Mayotte.

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Scénario 1 - Étape 1 : l'allongement de la piste

Scénario 1

UNE PISTE LONGUE EN DEUX ÉTAPES

Le premier scénario prévoit deux étapes successives : un allongement de la piste actuelle, puis la réalisation ultérieure d'une piste convergente. Il permettait de "répondre au mieux aux besoins à moyen terme et d’adapter l’infrastructure aux besoins à long terme", mentionne le document. Ce scénario serait-il organisé, aujourd'hui encore, en deux étapes ?

ÉTAPE 1 : L'ALLONGEMENT DE LA PISTE La piste actuelle est prolongée de 475 m vers le Sud. Ce prolongement est étudié avec une amorce de piste en vue d’une réalisation ultérieure de la piste convergente. Les surfaces de dégagement aéronautique au Nord restant équivalentes à celles existant actuellement. Ce scénario a été imaginé en s’appuyant sur une analyse des besoins réels des compagnies aériennes en fonction des appareils en exploitation sur Dzaoudzi à court et moyen termes : l’objectif étant de déterminer une longueur de piste permettant de réaliser des vols directs entre Mayotte et la métropole avec les avions considérés précédemment en s’affranchissant au maximum des restrictions météorologiques, permettant ainsi une bonne régularité de l’exploitation. Les calculs opérationnels montrent qu’une distance disponible pour le roulage au décollage de 2 310 m permet d’atteindre en grande partie cet objectif. La largeur de la bande de la plateforme (150 m) serait également conservée : La piste, après prolongement, resterait donc une piste avec “approche classique dotée de minimums MVI / MVL” (approche aux instruments et atterrissage à vue)

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LE DOSSIER

Scénario 1 - Étape 2 : la création d'une piste convergente

ÉTAPE 2 : LA CRÉATION D'UNE PISTE CONVERGENTE L’étape 2 du scénario 1 consiste à réaliser, quelques années après la mise en service de l’étape 1, une piste convergente de 2600 m* posée sur une plate-forme de 210 m de large, compatible éventuellement avec des approches de précision (les approches de précisions permettent des atterrissages même lorsque les conditions de visibilité sont très dégradées), et exempte d’obstacle dans les surfaces de dégagement, permettant ainsi des liaisons directes, tout temps, avec une large gamme d’appareils long-courriers (B777-300ER par exemple). Pour cette étape 2 du scénario 1, la piste longue prendra appui sur l’amorce réalisée lors de l’étape 1 et la piste actuelle sera utilisée comme voie de circulation. Le dimensionnement sera à ajuster en fonction de la qualité des enrochements potentiellement disponibles pour le chantier dans cette étape 2 (le volume d’enrochements étant conséquent). Ce scénario va créer une lagune d’eau stagnante entre la côte actuelle et la nouvelle piste (en hachuré vert), qui pourrait constituer un habitat propice au développement des moustiques et représenter par conséquent un risque sanitaire. Des mesures d’accompagnement seront mises en place afin de traiter ce risque de stagnation des eaux : ces mesures pourront consister en un remblaiement de cette lagune, une amélioration de la circulation d'eau par des dispositifs adaptés (buses, système de pompage). Les principes de ces mesures seront étudiés ultérieurement lors des études techniques détaillées.

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Scénario 2 : une piste convergente sans allongement de l'actuelle

Scénario 2

UNE PISTE CONVERGENTE SANS ALLONGEMENT DE L'ACTUELLE Le scénario 2 proposait de construire une piste longue prenant directement appui sur l'extrémité sud existante, sans effectuer d'allongement sur la piste existante. Avantage : un impact limité sur les herbiers et la réduction des perturbations hydrodynamiques.

Cette variante offre les mêmes caractéristiques opérationnelles que celles du scénario 1- étape 2 décrite précédemment : 2600 m de longueur disponible au roulage pour le décollage, pas d’obstacle dans les surfaces de dégagements aéronautiques et plateforme de 210 m de large. Il est envisagé que la protection de la plateforme située sur la face Ouest (côté lagon) soit composée par des enrochements, dans la continuité de ce qui a été disposé pour la piste existante côté lagon. Ce scénario devrait permettre une meilleure préservation des herbiers situés au Sud de la plateforme et devrait moins perturber la courantologie de la zone d’étude. Par contre, elle nécessite la mise en oeuvre d’une quantité très importante de remblais immédiatement. La problématique de stagnation des eaux (en hachuré vert page suivante) entre la côte actuelle et la nouvelle piste est plus sensible que pour la solution précédente (Scénario 1 Etape 2), du fait du décalage de l’emprise de la nouvelle piste vers le Nord.

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GV, CC, GM

BRÈVES DE VISITE

SANS OUBLIER…

DIPLOMATIE

LE DOSSIER

UNE RÉPONSE

À MORONI

Il est connu, ce panneau implanté sur le front de mer de Moroni : "Mayotte est comorienne et le restera à jamais." Mais il a désormais une réponse, cette fois sur la place de la République, à Mamoudzou : "Mayotte est française et le restera à jamais." Mis en place par le Conseil départemental sur proposition du député Mansour Kamardine à l'occasion de la visite présidentielle, il n'a toutefois pas reçu la visite officielle de président de la République qui n'a pas répondu à la demande du parlementaire de le découvrir lors de son passage dans le chef-lieu.

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AÉRIEN

UN ENCADREMENT DES TARIFS, VRAIMENT ?

PISTE LONGUE

La piste longue annoncée, encore faut-il trouver des solutions pour faire baisser le prix des billets d'ici sa construction. Solution proposée par le président : encadrer le prix des billets d'avion. Une volonté sur laquelle est revenu le secrétaire d'État en charge des transports, également présent lors de la visite, Jean-Baptiste Djebbari : "Nous allons mettre en place une obligation de service public", a-t-il expliqué. Et d'illustrer avec un exemple : "Pour les enfants par classe d’âge, de manière à améliorer le pouvoir d’achat et la faculté à prendre l’avion pour les familles." C'est un premier pas, c'est vrai, mais ceux qui espéraient un plafonnement des tarifs, quel que soit le billet, risquent d'en être pour leur frais. Ces obligations de service public ont été confirmées lors de la conférence de presse d'Emmanuel Macron, "pour les compagnies qui seront présentes sur la ligne Paris-Mayotte." Par ailleurs, "encourager la concurrence" en attendant la piste longue était également un des points abordés par Emmanuel Macron : "Kenya Airways s’est vu allouer des droits de trafic supplémentaires afin de pouvoir assurer trois vols hebdomadaires au départ de Mayotte, ce qui doit amener naturellement les prix à baisser", a expliqué le secrétaire d’État, sans toutefois préciser si de nouvelles compagnies seront encouragées à effectuer la liaison d’ici la mise en fonction de l’équipement promis. C'est souhaitable car pour le moment, personne n'a constaté de forte baisse de tarifs grâce à la compagnie africaine.

AIR AUSTRAL S'EN RÉJOUIT

Quelques heures après l'annonce du président Macron, le PDG d'Air Austral, Marie-Joesph Malé, a réagit par voie de communiqué. "L'annonce faite aujourd'hui par le Président de La République au sujet de la piste longue est une excellente nouvelle", débute la réaction, en détaillant : "L’allongement de la piste de Pamandzi aujourd'hui confirmée viendra considérablement faciliter les opérations aériennes sur Mayotte et lever les lourdes contraintes opérationnelles auxquelles Air Austral mais aussi les autres compagnies ont à faire face. La concrétisation tant attendue de ce projet contribuera assurément à améliorer l'attractivité du territoire et à renforcer encore le développement du Hub de Mayotte. Elle ouvre de nouvelles perspectives qui, je l'espère, permettront l'arrivée de nouveaux opérateurs ainsi que le développement du marché Mahorais."

PORT

VERS UN GRAND PORT MARITIME ? Autre infrastructure majeure pour Mayotte : le port de Longoni, dont les nombreux rebondissements dans la gestion freinent le bon développement. Un port qu'Emmanuel Macron souhaite voir prendre toute sa place dans le canal du Mozambique. "La priorité est le bon fonctionnement de la délégation de service public", a-t-il expliqué, annoncé que "L'État entrera dans la gouvernance du port avec cette objectif." Une transformation vers un grand port maritime ? Pas forcément : si le sujet a été évidemment envisagé en coulisse, l'heure ne serait plus à la recentralisation des ports du côté de l'État. À suivre, donc.

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LE DOSSIER

DÉPARTEMENT

TROIS SUJETS SUR LA TABLE

Emmanuel Macron a passé ses dernières heures d'un programme chargé en compagnie du président du Conseil départemental, Soibahadine Ibrahim Ramadani, et de trois de ses vice-présidents. Trois dossiers ont été abordés : la convergence des droits sociaux, "en direction des personnes âgées et handicapées, et pas simplement des retraités comme cela a été annoncé [le] matin, ce qui marque déjà une première avancée", a précisé l'élu local ; le cadre stratégique de coopération que souhaite mettre en place le Département, notamment avec "l’intégration de Mayotte en tant que membre à part entière à la COI et la volonté du Conseil départemental et du mouvement sportif mahorais, d’organiser à Mayotte, les jeux des Iles de l’Océan indien en 2027" ; et la décentralisation des activités économiques ailleurs dans l'île : une "volonté d’aménagement équilibré du territoire avec l’émergence d’un 3ème Pôle de développement dans le Centre-ouest dans la carte des secteurs OIN, afin de désengorger Mamoudzou et l’assistance nécessaire au Conseil départemental et à l’Epfam. Ceci pour parvenir à cet objectif d’équilibrage du territoire."

CONTESTATION

LE COLLECTIF EFFACÉ Emmanuel Macron ne les aura pas rencontrés malgré leur demande en ce sens. D'ailleurs, il ne les aura même pas vu. Et pour cause : peu avant l'arrivée du chef de l'État à Mamoudzou, Estelle Youssoufa était interpellée alors qu'elle protestait sur la place de la République, avant d'être libérée en fin de matinée et de publier sur sa page Facebook : "Je conteste et porterai plainte pour violences policières". Quelques instants plus tard après cette interpellation, le collectif en était chassé également. Sur les pancartes : "Mayotte est un vestige colonial du 21ème siècle", "Halte à la tutelle et au mépris d’État" ou encore "Mayotte, française et européenne, subit mille et une discriminations."

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PROTECTION

LE GSPR EN REPÉRAGE PRÉALABLE

VOIRIE

Un président de la République, ça se reçoit mais ça se protège aussi. Et pour ça, il y a le Groupe de sécurité de présidence de la République (GSPR). Mission : assurer les meilleures conditions de sécurité possible, mais aussi préparer le terrain avant la venue du chef l'État. Mayotte n'y a évidemment pas échappé. Ainsi, Harouna Colo, maire de Mtsamboro expliquait il y a quelques jours "Les services de sécurité du président se sont rendus dans ma commune, à Hamjago et à M’tsamboro il y a un mois pour étudier la faisabilité d’une visite présidentielle et la mise en place du dispositif qu’elle implique. Depuis, nous travaillons ensemble car les exigences par rapport à la sécurité sont très importantes et l’équipe doit bien connaître le terrain sur lequel le président se déplace. C’est pour cela que cette dernière est désormais tous les jours dans la commune depuis plus d’une semaine. Il s’agit à la fois de mettre le dispositif en place et de prévenir la population." Idem à Mamoudzou, où l'équipe dédiée à la protection du président a effectué une visite "il y a quelques semaines", confirmait le conseiller municipal en charge de la sécurité, Nassuf Eddine Daroueche, en détaillant : "Ils donnent leurs recommandations, avec par exemple l'élagage de certains arbres pour assurer une bonne visibilité." C'est d'ailleurs ce qu'il s'est passé pour le badamier à côté de la Copemay.

SURPRISE : ON A DU MATÉRIEL ! Nombreux sont celles et ceux qui ont pu découvrir avec surprise que la municipalité de Mamoudzou disposait d'une balayeuse de voirie pour nettoyer les axes du chef-lieu. Sortie pour embellir les rues de la ville à l'occasion de la visite présidentielle, on espère qu'elle se montrera plus souvent. Par ailleurs, on aura remarqué le coup de jeune de la mairie, repeinte quelques jours avant. "Un chantier qui était prévu, mais qui a été avancé pour la venue d'Emmanuel Macron", nous a confié un membre du conseil municipal.

CASE ROCHER

LA VIE EN BLEU BLANC ROUGE Mardi 22 au soir, la Case Rocher s'était parée de ses plus beaux attributs, avec un éclairage bleu blanc rouge qui se reflétait dans le lagon, attisant la curiosité des passagers de la barge.

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LE DOSSIER

Cyril Castelliti

MÉDIAS NATIONAUX

LE GRAND DÉBARQUEMENT

COMME SOUVENT LORSQU'UN MINISTRE OU CHEF D'ÉTAT EST INVITÉ À MAYOTTE, LA PRESSE NATIONALE LUI EMBOÎTE LE PAS ET MULTIPLIE LES ARTICLES DEPUIS LA MÉTROPOLE. ENTRE ETHNOCENTRISME ET PRATIQUES DÉDAIGNEUSES ENVERS LES JOURNALISTES LOCAUX, CETTE FABRIQUE DE L'INFORMATION OBÉIT À CERTAINS RITUELS LOURDS DE CONSÉQUENCE POUR L'IMAGE DU DÉPARTEMENT.

Ils étaient une centaine sur le territoire. C'est un rituel. Lorsqu'une personnalité d'envergure nationale est en visite, le gotha journalistique redouble d'intérêt pour le département. Discrète des colonnes durant le reste de l'année, Mayotte devient soudainement au centre des projecteurs. Question couverture médiatique, trois possibilités sont alors envisagées par les rédactions parisiennes : déployer un envoyé spécial ; commander une "pige" à un professionnel déjà sur place ; ou écrire un article depuis Paris. L'évènement ne durant que quelques jours, il s'agit de faire vite, quitte à parfois tomber dans des réflexes malencontreux. Une fabrique de l'information révélatrice de l'image du département dans la presse nationale, comme de celle du travail des journalistes locaux.

ALLO MAYOTTE, ICI PARIS Le phénomène commence généralement dans la semaine précédant le jour J. À 8 000 km du département, Paris prépare ses sujets en s'appuyant notamment sur le travail des professionnels locaux. Certains reçoivent alors des notifications Twitter de comptes certifiés, des appels en +33, et des emails au titre prestigieux derrière l'arobase. Pour ceux passés par une école de journalisme, il n'est pas rare que des collègues de promotion se manifestent soudainement

pour "prendre des nouvelles". Au coeur de cette prise de contact : la nécessité de trouver des contacts. Soit pour préparer la venue d'un journaliste depuis la métropole, ou carrément pour l'écrire depuis cette dernière. Bien souvent, le message se traduit ainsi : "Bonjour, je suis journaliste pour tel média, dans le cadre de la visite de Monsieur X, je suis à la recherche du numéro de Monsieur Z" (élu local, responsable associatif, ou encore syndicaliste). Dès lors, un malaise s'installe : Quel angle va-t-être envisagé pour ce sujet ? Mais surtout : où étaient ces rédactions d'envergure le reste de l'année, lorsque les journalistes locaux écrivaient quotidiennement sur ces mêmes problématiques en l'absence de visite présidentielle ? Un dilemme se fait alors sentir : comment participer sainement à ce coup de projecteur sur l'île, sans que celle-ci ne soit dépeinte au travers des stéréotypes d'un individu qui n'y restera que quelques jours, voire 24h seulement. Une inquiétude légitime à la vue du traitement journalistique souvent dédié au plus jeune département de France.

LA MAUVAISE RÉPUTATION Qu'on soit journaliste local ou métropolitain, impossible de ne pas rendre compte des difficultés sociales et économiques de Mayotte. Ce qui ne justifie néanmoins pas la discrétion de

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certains quant à ses atouts. Avec une écrasante majorité de sujets portant sur l'immigration clandestine, la délinquance, et le retard économique, la couverture médiatique de l'île n'offre cependant guère de place pour apprécier ses bons points. À titre d'exemple : les articles récemment écrits par nos confrères métropolitains lors de la venue du chef de l'État, qui dépeignent un territoire sur lequel rien, ou presque, ne fonctionne. Les sujets ne manquent pourtant pas : à l'heure où les thématiques écologiques ont le vent en poupe, comment faire l'impasse sur une île qui compte près de 650 espèces végétales indigènes dont quelque 50 endémiques ? Une interrogation légitime à l'heure où Mayotte déploie les grands moyens pour créer une nouvelle réserve nationale censée préserver ce trésor de biodiversité. Question économie, comment faire l'impasse des points positifs sur lesquels la métropole elle-même pourrait s'inspirer ? Dans une île où plus de la moitié des entreprises créées en 2019 le sont par des femmes, ces dernières donnent de l'inspiration jusqu'en dehors des frontières départementales. En témoignent les réactions des cheffes d'entreprise réunionnaises lors du dernier salon de l'entreprenariat au féminin, qui reconnaissent volontiers que "Mayotte est en avance". Enfin, quid de l'islam et de ses débats houleux en métropole ? Si le sujet a déjà été abordé par le passé ici et là, pourquoi ne pas avoir profité de cette visite présidentielle pour s'attarder en profondeur sur l'exemple mahorais en termes d'équilibre des pratiques religieuses, et de patriotisme républicain. Si Mayotte a bien besoin que ses difficultés résonnent jusqu'à Paris, cette couverture médiatique à deux vitesses n'offre que peu d'avantages. Pire encore, à force de tirer un portrait péjoratif, rares sont les visiteurs assez courageux pour mettre à l'épreuve cette "mauvaise réputation." Entre les soucis du département et leur surmédiatisation en comparaison des bonnes nouvelles, le serpent se mord la queue au grand dam des Mahorais amoureux de leur île et de ses atouts.

QUELLES SOLUTIONS ? Loin s'en faut, ces phénomènes médiatiques ne sont pas insurmontables. Parmi les solutions offertes par les rédactions nationales, le recours à des journalistes locaux à titre de pigiste ou de correspondant, peut permettre une vision nettement moins biaisée. Nombreux sont également les journalistes de métropole qui s'intéressent en profondeur au travail de leurs confrères, sans les joindre exclusivement pour se procurer un contact. Sans parler de ceux qui proposent d'eux-mêmes, un travail honnête vis-à-vis de l'actualité mahoraise. Plus qu'une démarche personnelle, le temps accordé au traitement de l'information, couplé à la précarisation de la profession de journaliste, sont aussi responsables du phénomène. Comme dans tout corps de métier, les rédacteurs

sont aussi soumis à des mécanismes sociologiques qui contraignent leurs pratiques professionnelles. Un phénomène longuement traité par les sciences sociales, auxquelles les journalistes sont soumis en dépit de leur volonté propre. En 1996, le sociologue Pierre Bourdieu évoquait à ce titre le phénomène de "circulation circulaire de l’information dans le champ journalistique", au travers de son ouvrage Sur la télévision. En d'autres termes, un mécanisme d'"homogénéisation" de l'information, induit par la reproduction des sujets, et de leurs angles, entre des rédactions inquiète de ne pas se voir "dépassées" par leurs confrères/concurrents. Ce qui explique notamment la généralisation de certains sujets à défaut d'autres concernant Mayotte. "Les journalistes sont, de loin, ceux qui lisent le plus la presse", constatait ainsi à juste titre le sociologue. Mais bien que cette boucle ait mis du temps pour se construire et se solidifier, il n'est jamais trop tard pour la briser au travers d'articles équilibrés, et permettre ainsi aux journalistes d'influencer leur travail collectif vers un traitement médiatique plus pertinent. n

LES POMPIERS, LE PRÉSIDENT ET MAYOTTE : UN EXEMPLE DE COURSE À L'INFORMATION BFM, L'obs, RTL, le Figaro… Tous sont tombés dans le panneau. Le 18 octobre, le Syndicat national des Sapeurs-Pompiers professionnels de Mayotte publie un communiqué sur les réseaux sociaux annonçant qu'il n'assurera pas la sécurité incendie lors de l'atterrissage de l'avion présidentiel. Trois jours plus tard, soit la veille de l'arrivée du président, la presse nationale se réveille et reprend à l'unisson le communiqué. Une dépêche AFP est également publiée et partagée par de nombreux médias. Pour autant, aucun ne prend la peine de contacter les sapeurs-pompiers mahorais, ou du moins de les citer dans leur article. Grave erreur. En fin d'après-midi, un accord est trouvé et les pompiers annulent leur action. Une information que nous avons naturellement relevée dans notre édition du Flash Infos, ainsi que sur nos réseaux sociaux. La presse nationale en revanche ne s'est pas donnée cette peine. À l'heure où l'avion présidentielle a quitté Mayotte, les articles n'ont toujours pas été actualisés. Conséquence : nombreux sont encore les lecteurs susceptibles de croire que le président a atterri dans des circonstances particulièrement risquées. Un exemple typique de "circulation circulaire de l'information", comme évoqué plus haut, où les médias s'influencent dans le désir de ne pas se voir doubler par un concurrent. Cela quitte à se précipiter, faire des erreurs, et ne pas les rectifier.

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MAGAZINE

Geoffroy Vauthier

VOLCAN

"IL FAUT ÊTRE FIER DE VENIR DE LÀ OÙ LE DERNIER VOLCAN SUR TERRE EST NÉ" UN ÉVÈNEMENT SANS PRÉCÉDENT DONT IL FAUT SAVOIR ÊTRE FIER MALGRÉ LES INQUIÉTUDES QU'IL SUSCITE : VOILÀ CE QUE PRÔNE LE GÉOGRAPHE ET CHERCHEUR SAÏD SAÏD HACHIM. PRÉSENT LA SEMAINE DERNIÈRE AU SÉMINAIRE SCIENTIFIQUE QUI S'EST TENU À PARIS SUR LE SUJET, IL REVIENT SUR L'IMPORTANCE DE CE QUI SE JOUE AU LARGE DE MAYOTTE : "PEUT-ÊTRE LE DERNIER VOLCAN QUE L'HUMANITÉ VERRA NAÎTRE."

Un évènement sans précédent qui a droit aux ors du monde scientifique : c'est en substance ce que met en avant le géographe Saïd Saïd Hachim – notamment auteur de l'Atlas des risques naturels et des vulnérabilités territoriales de Mayotte – à propos du phénomène volcanologique qui se joue au large de Mayotte. Intervenant lors d'un séminaire sur le sujet qui s'est tenu la semaine dernière à Paris, dans les locaux de l'Université Paris Descartes, dans "la prestigieuse salle du Conseil", le chercheur l'affirme : il faut que Mayotte accapare le phénomène malgré les inquiétudes – légitimes – qu'il suscite : "Ce n'est pas rien de venir de là où est né le dernier volcan sur terre. C'est peut-être le dernier que l'humanité verra naître. Les scientifiques du monde entier ont les yeux rivés sur notre île." Et d'appuyer : "C'est un évènement géologique majeur qui suscite l'intérêt de la communauté scientifique

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le sous-marin autonome embarqué pour la mission MAYOBS4 (AUV : autonomous underwater vehicle) chargé d’acquérir des données microbathymétriques de haute précision des fonds.

mondiale." Et pour cause : "depuis l'éruption du volcan Laki en 1783, en Islande, on n'a jamais eu un évènement de cette ampleur en si peu de temps. De mai 2018 jusqu'au dernières missions, c'est le deuxième à avoir "craché" autant de lave. Le Laki, c'est 15 km3 de lave. Celui de Mayotte, c'est 5km3." Un phénomène si rare, donc, que le séminaire aura ramené des références et des contributeurs de haute importance. "Il s'agissait de faire un état des lieux des connaissances, mais aussi de savoir ce qu'on pouvait désormais faire. S'y trouvaient des personnalités scientifiques qui ne sont jamais venues à Mayotte, mais qui ont proposé des projets d'études pour participer à la connaissance du phénomène", se réjouit le géographe.

UN OCÉAN DE QUESTIONS Rare, mais aussi impressionnant : "Un intervenant le disait d'ailleurs lors du séminaire : on cherche quelque chose de très gros." De très gros ? "Oui, la chambre magmatique par exemple, que nous n'avons pas encore réussi à localiser." Une chambre magmatique qui serait la clé du

phénomène, et qui suscite nombre d'hypothèses. Parmi celles-ci, une en particulier retient l'attention, avec toutes les précautions à prendre : au lieu d'une seule, il y en aurait plusieurs, communicants entre elles. Une possibilité qui – si toutefois elle se vérifiait – "remettrait complètement en question les connaissances que l'on a dans la zone. Le système volcanique y est encore discuté. S'il y avait plusieurs chambres, le fonctionnement serait encore plus complexe à appréhender." Plus de complexité dans un océan de questions, car "pour le moment, malgré les données déjà nombreuses que nous avons recueillies, il reste beaucoup d'interrogations. Nous n'avons que très peu de réponses. Sur cette question de poche, on sait juste que 5km3 se sont vidés, et qu'il y a donc un vide quelque part. Mais où et comment, ça on ne le sait pas encore." Autre doute : la reprise, ou non, du phénomène, qui semble pour le moment s'être assagi. Une question qui agite les esprits d'une population quelque peu inquiète, mais qui ne trouve pour le moment aucune réponse. "Très sincèrement, personne ne se risquerait à y répondre en l'état des connaissances", demeure prudent

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MAGAZINE

on part de pas grand-chose car les caractéristiques géodynamiques de la zone sont très mal connues."

Saïd Saïd Hachim. En imageant : "C'est comme une cocotte-minute qui monterait en pression : à un moment ça peut sortir. Mais encore faut-il connaître la pression à l'intérieur, savoir ce qu'il y a dedans ou pas, etc. On n'a pas une seule idée de ça. On sait que la cocotte s'est vidée de façon impressionnante, mais il est difficile d'en dire plus sur la suite."

SUBSIDENCE :UN BOND DE 700 ANS

Tout cela soulève la question des risques. Tout le monde s'accorde à le dire : dans ces conditions, ils existent, mais dans quelle proportion, cela reste un mystère. Et, comme nous l'avons vu, les connaissances actuelles du phénomène n'aident pas à les prévoir. Le géographe développe, en prenant l'exemple du risque tsunami, souvent invoqué au sein de la population : "Pour les prévenir, il faut commencer par bien définir les zones susceptibles d'être touchées. Sans cela, on ne peut pas impulser une politique de prévention et de gestion des risques. Il faut donc obligatoirement passer par cette étape importante d'observation et de connaissance pour établir des politiques en bout de chaîne. Et là,

Une chose est sûre en tout cas, le risque de submersion est bel et bien plus présent désormais, sans même parler de tsunami. "Tout est à revoir", confirme Saïd Saïd Hachim, se reportant aux dernières grandes marées. Il reprend : "la subsidence a fait un bond de 700 ans dans le temps. Normalement elle est de 19 mm par an et on a perdu en moyenne 15 cm en un an. Et c'est sans compter les conséquences de l'élévation du niveau de la mer. L'eau qui rentre sur les terres le montre bien : la piste de l'aéroport, le boulevard des Crabes coupés en deux. Nos infrastructures sont impactées. C'est à mon sens le risque majeur, car au-delà du phénomène météo, une barge qui ne fonctionne pas, des avions qui ne peuvent pas se poser, etc., cela un impact réel sur Mayotte. Deux fois par an, nous allons vivre ce risque. Et c'est sans compter sur une possible amplification due à la météo. Cela a été la dernière fois, mais cela sera-t-il toujours le cas ? Il faut prier pour que nous n'ayons pas de vent ou de petite dépression pour amplifier le phénomène en attendant de revoir nos plans d'aménagement." Des plans d'aménagement qui devront tenir compte de l'évolution du trait de côte de Mayotte. Un travail que mène d'ailleurs Saïd Saïd Hachim. Il le constate, le changement est flagrant : "Le trait de côte est aujourd'hui très mouvant. On a la possibilité d'utiliser des images satellites pour observer son évolution. On a la chance de disposer de cette possibilité. Nous étudions aussi la piste, avec la Maison de la télédétection de Montpellier, de la mise en place d'un système informatique, une sorte de logiciel, permettant de comparer deux images satellites rapidement pour déterminer l'évolution de ce trait."

DES GAZ D'ORIGINE VOLCANIQUE ? Et puis, un autre phénomène est lui aussi encore méconnu : la présence de sites de dégazage en Petite-Terre. "Certains avaient déjà été observés par les BRGM et l'Observatoire du piton de la Fournaise. J'en ai identifié d'autres, notamment du côté de l'aéroport. Ils sont globalement permanents : j'ai pu vérifier la présence de mini-geysers de 50 cm à différents moments. Le type de gaz est encore inconnu, mais la plupart de ceux qui ont été identifiés sont du CO2. Les analyses sont en cours pour savoir s'il y a un lien, et quel est-il avec cette poche magmatique. Mais on sait qu'il s'agit de gaz d'origine volcanique en effet."

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Roches draguées sur le nouveau volcan © Équipe MAYOBS4

lave en cordée prise par la caméra de fond Scampi sur la nouvelle coulée © Équipe MAYOBS4

lave en coussins prise par la caméra de fond Scampi sur la nouvelle coulée © Équipe MAYOBS4

Des questions donc, beaucoup de questions, mais à la hauteur du phénomène : extraordinaire. Ce qu'il ne faut pas, pour le géographe, oublier de mettre en avant, car cette notoriété bien imprévue a le mérite de mettre le projecteur sur notre petite île perdue dans le canal du Mozambique, et souvent bien plus réputée pour ses problèmes que pour son apport au monde scientifique. "L'évènement est d'une importance capitale", rappelle Saïd Saïd Hachim : "Avant, on peinait à expliquer où se trouve Mayotte. Aujourd'hui, il suffit de dire qu'on vient de là où est né le dernier volcan sur terre. Un médecin m'a confié qu'il avait parlé de Mayotte aux États-Unis il y a peu. Et grâce au volcan, ils connaissaient Mayotte là-bas." Un volcan qui, pour la première fois, a par ailleurs permis de fédérer la communauté scientifique française, autour du Revosima, mais aussi plus largement : "L'Institut de physique du globe de Paris (IPGP), le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM, l'Ifremer, le Service hydrographique et océanographique de la Marine (Shom), l'Institut géographique national (IGN), l'École nationale supérieure (ENS), le Centre national de la recherche scientifique (CNRS), le Centre national d'études spatiales

(CNES) pour les images satellites, le Réseau National de surveillance sismique (RéNass), les Universités de Clermont Ferrand, Strasbourg, Paris, etc. Tout le monde est mobilisé sur ce volcan. C'est l'Airbus géologique. C'est la première fois qu'on a un projets d'étude associant tous ces organismes. Il faut le mettre en avant : le "désormais célèbre volcan de Mayotte", comme on l'appelle à Paris, va mobiliser de nouvelles techniques de recherche. Il faut en être fier." Un seul regret : qu'il n'est pas provoqué, plus tôt, l'enthousiasme : "On a perdu du temps car on n'y croyait pas trop. Il y a un câble qui a été posé récemment : Lion 3. Pour y parvenir, on a fait une bathymétrie, une cartographie très fine des fonds sous-marin pour pouvoir le poser. Pourquoi n'a-t-on pas pu bénéficier de ces relevés alors que le phénomène sismique était naissant ?", s'interroge le chercheur. Il est vrai qu'après consultation de l'arrêté préfectoral daté du 18 août 2018, la "définition de la bathymétrie à l'aide d'un sondeur multifaisceaux sur l'ensemble de la route" et "l'étude géophysique visant à déterminer la nature du sol" par le navire OGS Explora, poseur du cable LION 3, étaient aurorisées. L'occasion de faire d'une pierre deux coups. n

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LITTÉRATURE

Christophe Cosker, "L’Invention de Mayotte", Pamandzi éd. La Route des Indes, 2019.

LISEZ MAYOTTE Chaque semaine, Christophe Cosker, auteur de L'invention de Mayotte, vous propose la quintessence de chacune des trente-six inventions de Mayotte relevées dans l’ouvrage éponyme.

Aimable-Constant Jéhenne peut être considéré comme l’inventeur discret de Mayotte. Il accompagne Passot lors de son exploration de l’archipel des Comores en général et de Mayotte en particulier. Dans le duo qu’ils forment, il apparaît comme le marin et son compère comme le politique. C’est la raison pour laquelle il est l’auteur d’un document qu’on trouve, au dépôt général de la marine, l’équivalent européen des routiers arabes – manuels de navigation dans une zone – intitulé ici : Renseignements nautiques sur Nossi-Bé, Nossi Mitsiou, Bavatoublé, etc. (côte Nord-Ouest de Madagascar), et sur l’île de Mayotte (1850). Ce sont ici les renseignements pris sur Mayotte, gardés pour la fin et mis en valeur, qui retiennent notre attention. Si on laisse de côté les informations techniques qui intéressent principalement, voire exclusivement, le navigateur, on peut alors se focaliser sur les quelques moments où le marin laisse les chiffres pour les lettres et devient davantage volubile. Ces moments son rares, car le style de Jéhenne est volontariste et marqué par l’idéologie coloniale. Ainsi les premier et dernier paragraphes commencent-ils par le pronom « je » suivi d’un verbe d’évaluation extrêmement affirmatif. La première partie du texte applique la foi coloniale à Mayotte, capable de fournir les denrées qu’on attend d’elle. Dans la partie centrale, le marin est impressionné par le relief sous-marin de la barrière de corail, ce qu’il n’appelle pas encore un tombant. Il est également sensible à la décoloration des coraux lorsqu’ils émergent. Le dernier paragraphe contribue à fonder l’intérêt stratégique de l’île comme forteresse naturelle protégée par son lagon dont le marin a éprouvé les difficultés et cartographié les passes qui permettent d’y accéder.

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Christophe Cosker

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RENSEIGNEMENTS NAUTIQUES SUR NOSSI-BÉ, NOSSI MITSIOU, BAVATOUBLÉ, ETC. (CÔTE NORD-OUEST DE MADAGASCAR), ET SUR L’ÎLE DE MAYOTTE, Je crois Mayotte susceptible de produire, en petite quantité, il est vrai, toutes les denrées coloniales qui viennent à Bourbon1 et à Madagascar : il ne faudrait que se donner la peine de les cultiver ; ainsi, la canne à sucre, le café, le riz et presque tous les fruits des tropiques y viendraient très bien, puisqu’ils y existent déjà à l’état sauvage. Il n’y aurait plus qu’à donner des soins aux plantes, les greffer et les transporter dans les lieux les plus convenables ; mais, comme je l’ai déjà dit, les montagnes occupent une grande partie de l’île, et le terrain dont elles sont formées est rougeâtre et généralement de mauvaise qualité. […] Mayotte est entourée d’une ceinture circulaire de récifs qui la défend contre les envahissements de la mer. Ces récifs, à leur abord extérieur, ont, comparativement à la profondeur de l’eau, mesurée à une très petite distance, une élévation qui paraîtrait incroyable si je n’en étais assuré quantité de fois par mes sondes. L’élévation de ces coraux est généralement de vingt-cinq à trente mètres, en laissant tomber le plomb à cinq ou six mètres du chapiteau qui les couronne ; mais si on s'éloigne encore de dix à vingt mètres, on trouve souvent que leur base est placée à cinquante mètres au-dessous de la surface de la mer ; à deux encablures de distance, on ne trouve plus le fond avec quatrevingt ou cent mètres de ligne.

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Au sujet des coraux, j’ai fait une remarque qui n’est pas nouvelle, mais que mes observations pourront confirmer : c’est que, lorsqu’ils sont arrivés au terme de leur croissance, ils ont tous le même niveau, qui est celui des basses mers dans les grandes marées. Dès que les coraux sont exposés aux rayons du soleil, ils se flétrissent et leur croissance est arrêtée. […] Je considère cette difficulté des passes comme très avantageuse pour la défense de la partie de l’île où se trouvent les meilleurs mouillages et où il conviendrait de s’établir, si le projet s’en réalisait. Toute la difficulté de l’entrée par les passes du Nord ne serait pas seulement pour un ennemi, dans les dangers semés sur sa route ; il faudrait encore, pour arriver aux bâtiments mouillés sur la rade entre Zaoudzi [Dzaoudzi] et Bouzi, [Mbouzi] franchir le chenal étroit et sinueux qui existe entre les petites îles Vatou, Mognaméri et le banc de sable de la pointe Nord-Ouest de Zaoudzi. Dans ce trajet possible seulement avec les vents de la partie du Nord et du Nord Nord-Est, on serait écrasé à bout portant par les batteries qu’il serait facile d’établir sur ces îles. Aimable-Constant Jéhenne, Dépôt général de la Marine, Renseignements nautiques sur Nossi-Bé, Nossi Mitsiou, Bavatoublé, etc. (côte Nord-Ouest de Madagascar), et sur l’île de Mayotte, Paris, Paul Dupont, 1850, p. 43-50.

Ancien nom de l’île de la Réunion.

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P U B L I R E P O R TA G E

AIR AUSTRAL DESSERT MAYOTTE DEPUIS PLUS DE 40 ANS

UNE FIDÉLITÉ À L'ÉPREUVE DU TEMPS

LES COMPAGNIES AÉRIENNES QUI DESSERVENT MAYOTTE NE RÉSISTENT PAS LONGTEMPS AUX CAPRICES DU CIEL OU DE LA PISTE DE L’AÉROPORT DE PAMANDZI. IL FAUT DIRE QUE L’EXERCICE N’EST PAS SIMPLE. LA DESSERTE DE L’ÎLE AUX PARFUMS EST COMPLEXE ET BEAUCOUP ONT PRÉFÉRÉ BAISSER LES BRAS. SEULE AIR AUSTRAL, DEPUIS PLUS DE 40 ANS, SE DONNE LES MOYENS DE RESTER FIDÈLE AUX MAHORAIS.

À

l'exception d’Air Austral, fidèle aux commandes depuis 1977, les différentes compagnies qui font le choix de desservir Mayotte finissent par plier bagages. Dernier exemple en date : Corsair qui proposait, depuis 2017, deux vols saisonniers par semaine avec escale à la Réunion, a cessé ses rotations, deux ans après. En septembre 2019, lechotouristique a annoncé que « l’objectif assumé [de la compagnie] est de cibler les destinations à fort volume ». Selon des propos du PDG de Corsair, rapportés par le magazine, sont visées celles qui « permettent un programme plus productif. En priorité celles qui supporteront un vol quotidien ». C’est dans cette optique, toujours d'après lechotouristique, que toutes les destinations qui ne répondent pas à ces critères ont été sor-

ties du réseau de Corsair. Exit donc Tananarive, Bamako, La Havane et... Dzaoudzi !

LA DESSERTE DE MAYOTTE : UNE LIAISON QUI SE MÉRITE Une situation qui illustre la différence entre une simple liaison à court terme et... une relation durable. La première se rompt à la moindre perturbation, quand la seconde ne craint pas les orages. Air Austral qui dessert Mayotte depuis plus de 40 ans y a fait vœu de longévité. « Nous sommes l’opérateur historique des Mahorais parmi lesquels nous comptons des salariés dans notre compagnie, rappelle le PDG d’Air Austral, •••

HS 748, premier appareil qui a opéré la liaison entre Mayotte et La Réunion.

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P U B L I R E P O R TA G E

Boeing 787-8 opérant actuellement les lignes entre Mayotte et La Réunion et Mayotte et Paris.

••• Marie-Joseph Malé. Lorsqu’en 2012, nous étions au bord du dépôt de bilan, nous n’avons jamais abandonné l’archipel et ses habitants. Mayotte fait partie de notre cœur de métier, et desservir ce territoire est une priorité. »

PASSADE ESTIVALE VERSUS ENGAGEMENT DURABLE Pour de nombreuses compagnies, l’archipel représente un enjeu commercial qui ne tient pas ses promesses sur le long terme. Celles-ci misent sur un marché saisonnier, ponctuel, avec des offres opportunistes, ce qui ne permet pas la mise en place d’une saine concurrence au service des Mahorais. « Nous regardons positivement l’arrivée de chaque concurrent, explique Marie-Joseph Malé. Je l’appelle même de mes vœux ! D’abord parce que cela

AIR AUSTRAL ET MAYOTTE : une entente de longue date 1977

premier vol entre La Réunion et Mayotte (opéré par Réunion Air Service)

1990

Réunion Air Service devient Air Austral

2012 à 2014

changement de direction et retour à l'équilibre financier

2016

achat de deux Boeing 787-8 ouverture de la ligne directe Mayotte-Paris

2018

augmentation de la fréquence des vols directs Mayotte-Paris

nous évite d’être considérés comme responsables de tous les nuages à l’horizon ! Plus sérieusement, ensuite, parce que cela permet de redynamiser un marché, plutôt étroit, mais à condition que de nouveaux clients se manifestent. Sans une hausse du trafic, le risque est que l’une des deux compagnies se retire ou que chacune réduise sa capacité. » Jusqu’à présent, c’est la première solution qui s’est imposée, contraignant Air Austral à subir régulièrement une situation de monopole. « Nous avons récemment appris l’annonce de l’arrivée d’Air Mayotte. Nous restons en attente d’en savoir plus sur les conditions qui seront proposées par cette compagnie. A ce stade les informations restent limitées. Il s’agira de suivre avec intérêt l’évolution de la situation », poursuit Marie-Joseph Malé.

LE MONOPOLE DU CŒUR Les autorités ont un niveau d’exigence très élevé s’agissant de la desserte de Mayotte, qui nécessite pour les pilotes une formation spécifique. En cause notamment, la longueur de la piste qui pose plusieurs problèmes techniques : elle interdit à la plupart des gros-porteurs des décollages à pleine charge pour des vols long-courriers. Air Austral a donc investi dans les seuls appareils capables d’effectuer cette mission depuis la piste courte de Pamandzi : les Boeing 787-8. Ces aéronefs ont permis de proposer aux Mahorais un vol direct entre Mayotte et Paris réduisant considérablement la durée du voyage pour tous ceux qui devaient auparavant passer systématiquement par La Réunion. « Air Austral dessert Dzaoudzi douze mois sur douze, depuis plus de 40 ans, avec le souci constant d’améliorer la qualité du service proposé aux Mahorais, martèle Marie-Joseph Malé. Si la compagnie doit avoir un monopole, alors c’est celui du cœur. » • Olivia Marquis

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Ce métier est accessible avec un diplôme de niveau Bac+2 (BTS/DUT) dans le secteur de l'immobilier ou du commerce. Il est également accessible avec un diplôme de niveau Bac (général, professionnel, technologique, etc.) dans le secteur de l'immobilier ou du commerce complété par une expérience dans le secteur.- Des vaccinations prévues par le Code de Santé Publique sont exigées.


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Couverture :

Quand la République voyage à Mayotte

Journalistes Romain Guille Solène Peillard Grégoire Mérot Cyril Castelliti Correspondants HZK - (Moroni) Direction artistique Franco di Sangro Graphistes/Maquettistes Olivier Baron, Franco di Sangro Commerciaux Cédric Denaud, Murielle Turlan Thomas Lévy Comptabilité Catherine Chiggiato compta@mayottehebdo.com Secretariat Annabelle Mouhamadi Première parution Vendredi 31 mars 2000 ISSN : 1288 - 1716 RCS : n° 9757/2000 N° de Siret : 024 061 970 000 18 N°CPPAP : 0121 I 92960 Site internet www.mayottehebdo.com



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