Mayotte Hebdo n°930

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TOUTE L’ACTUALITÉ DE MAYOTTE AU QUOTIDIEN

Lu par près de 20.000 personnes chaque semaine (enquête Ipsos juillet 2009), ce quotidien vous permet de suivre l’actualité mahoraise (politique, société, culture, sport, économie, etc.) et vous offre également un aperçu de l’actualité de l’Océan Indien et des Outremers.

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FI n°3839 Lundi 7 mars 2016 St Félicie

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VERRES À VIN, COCKTAIL, COUPE À GLACE...

BP 263 - ZI Kawéni - 97600 Mamoudzou - email : hd.mayotte@wanadoo.fr

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FI n°3822 Jeudi 11 février 2016 Ste Héloïse

à partir de

9€

RENSEIGNEMENTS Tél : 0639 67 04 07 | Mail : contact@mayotte-e-velos.yt

FI n°3818 Vendredi 5 février 2016 Ste Agathe

marine le Pen

environnement

Port de Longoni

ConSeil départeMental

Quel accueil se prépare pour la présiDente Du Fn ?

Le Lagon au patrimoine mondiaL de L'unesCo ?

la dsP sur la sEllEttE

pas de changement sUr l’octroi de mer

© Jonny CHADULI

Grève à Panima

TéléThon 2016

Des propositions mais toujours pas D'issue

DemanDez le programme

première parution : juillet 1999 - siret 02406197000018 - édition somapresse - n° Cppap : 0921 y 93207 - dir. publication : Laurent Canavate - red. chef : Gauthier dupraz - http://flash-infos.somapresse.com

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FI n°3997 mercredi 30 novembre 2016 St André

© CR: Gauthier Bouchet

Diffusé du lundi au vendredi, Flash Infos a été créé en 1999 et s’est depuis hissé au rang de 1er quotidien de l’île.

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Économie

SÉcuritÉ

Les appeLs à projets de L'europe

Couvre-feu pour Les mineurs

Première parution : juillet 1999 - Siret 02406197000018 - APE 5813Z - Édité par la Somapresse - Directeur de publication : Laurent Canavate - http://flash-infos.somapresse.com

OUI, je m’abonne

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Musique

Faits divers

Edmond BéBé nous a quitté

ViolEncE En cascadE

Première parution : juillet 1999 - Siret 02406197000018 - APE 5813Z - Édité par la Somapresse - Directeur de publication : Laurent Canavate - http://flash-infos.somapresse.com

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MCG VS SMart

ViCe-reCtorat

UltimatUm oU véritable main tendUe ?

l’institUtion répond aUx critiqUes

Première parution : juillet 1999 - Siret 02406197000018 - APE 5813Z - Édité par la Somapresse - Directeur de publication : Laurent Canavate - http://flash-infos.somapresse.com

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LE MOT DE LA RÉDACTION

TENIR LE CAP Ils sont la plus grande richesse de notre territoire comme le répètent à l’envi les différents représentants locaux. Ils forment, aussi, plus de la moitié de la population. Ils ont moins de 18 ans. Se lèvent avant le soleil, attendent le bus sous la pluie. Ils vont à l’école, se construire tant bien que mal dans des préfabriqués. Ils ont de l’espoir. Ils rêvent d’un avenir meilleur que le quotidien de leurs parents. De découvrir le monde, de prendre l’avion plutôt que la barge. Alors ils passent le bac. Et après ? De ces rêves, de ces espoirs, que reste-t-il ? Trop peu. Car de ceux qui ont envisagé l’envol, ils sont nombreux à rester sur le carreau. C’est notamment le cas pour ces élèves de l’école de la République que l’on appelle « étrangers » après le lycée. Qui après Parcoursup enchainent avec un autre parcours, du combattant cette-fois, pour espérer obtenir le titre de séjour auquel ils ont droit. Qui enchainent les années blanches, voudraient bien s’en sortir mais loupent la rentrée. Il y a aussi tout ceux qui choisissent une filière par défaut, faute de place et souvent, faute d’avoir les moyens de vivre le rêve métropolitain. Mais les lignes bougent, promet-on, pour que tous ces jeunes trouvent enfin leur voie. Le centre universitaire se développe et devra doubler sa capacité d’accueil dans les prochaines années. Des classes préparatoires ouvrent leurs portes. Un lycée de la mer doit voir le jour, enfin ! Que ces promesses ne prennent pas le large et l’on pourra se reposer sur une jeunesse qui tient le cap. Qui se prend en main pour peu qu’on lui en ait tendue une. Il le faut. Car elle est l’île. Grégoire Mérot

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VENDREDI 25 SEPTEMBRE

FLASHBACK

Retour sur les sujets de Une des Flashs Infos de la semaine

TAXIS LE MASQUE OU LA PRUNE

Fini la période de sensibilisation. Lors d’une opération menée sous l’impulsion de la préfecture par la police municipale de Mamoudzou et les services de la Deal à la pointe Mahabou, jeudi dernier, les justifications hasardeuses pour expliquer l’absence de masques dans les taxis collectifs n’étaient plus acceptées. Résultat, sur 17 véhicules contrôlés, 10 amendes de 135 euros ont été distribuées. Les inspecteurs en ont d’ailleurs profité pour mettre leurs nez dans les papiers des véhicules et saler l’addition. De quoi convaincre de porter le masque.

LUNDI 28 SEPTEMBRE

DÉPARTEMENT MALAISE CHEZ LES AGENTS

Manque de sécurité, de moyens, mais aussi de considération de la part de leur direction, les agents de terrain du Département en ont gros sur le cœur et ont décidé, sous le drapeau FO, d’entamer une grève depuis ce lundi. « Résultat : le Département devra compter sans certains bras précieux pour surveiller les plages, entretenir les espaces et sécuriser sites et rivières… Une situation qui n’est dans l’intérêt de personne », rapportait Flash Infos.

Pour tous vos communiqués et informations

Une seule adresse : rédaction@mayottehebdo.com

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FLASHBACK

MARDI 29 SEPTEMBRE

GRÈVE BDM 71 JOURS POUR 6,60 EUROS

Dans son édition de mardi, Flash Infos revient sur la signature de protocole de fin de conflit qui s’est tenue la veille entre les représentants des grévistes de Bourbon distribution Mayotte (désormais GBH) et leur direction, sous l’égide du préfet. Et c’est une victoire à la Pyrrhus qui y est décrite, car après 71 jours de grève intense, synonyme de pertes de salaires et de sanctions à venir - pour lesquelles la direction a tout de même promis la “modération” - les grévistes n’auront obtenu qu’une augmentation de 30 euros sur les 150 demandés. Soit 6, 60 euros de plus que l’offre initialement faite par la direction en début de conflit et jugée méprisante par les salariés.

MERCREDI 30 SEPTEMBRE

ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR FORMER LES ÉLITES DE DEMAIN

Le tout Mayotte de l’enseignement supérieur était réuni, ce mardi au lycée Bamana pour faire un point sur les parcours existants et les différents projets. Les chambres consulaires étaient également de la réunion avec un objectif : adapter les formations aux besoins du territoire. Dans ce cadre, on espère d’ici cinq ans voir fleurir une filière portant sur l’agriculture, l’agronomie et l’agroécologie, une autre dédiée aux métiers de l’aérien comme un pôle régional de la mer et du littoral.

JEUDI 1ER OCTOBRE

TRAFIC AÉRIEN CORSAIR POUR VOUS SERVIR

Dans une interview accordée à Flash Infos, le directeur océan Indien de Corsair revient sur le grand retour de la compagnie dans le ciel mahorais. Et tempère l’emballement qu’ont suscité les premiers tarifs – très compétitifs - affichés. « Pour nous, c'est un tarif d'appel, mais il ne s'agit pas de créer un tarif défiant toute concurrence pour avoir un effet d'arrivée. Il s'agit tout simplement de la réalité actuelle du marché », explique ainsi Jules Perreau qui se veut toutefois rassurant : « l'idée est d'apporter de la transparence et de la clarté au marché pour que le client puisse bénéficier de très bons tarifs […] Nous ne sommes pas là pour faire un one-shot, mais bel et bien pour nous nous inscrire durablement. »

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TCHAKS

L'ACTION

LE CHIFFRE 41%

Fin de conflit chez BDM

C’est le taux de remplissage des retenues collinaires au 28 septembre. Soit 20% de moins que l’année dernière à la même période. C’est dire si la situation est préoccupante. D’autant plus que ces réservoirs se vident à vue d’oeil : ils étaient remplis à 45% une semaine plus tôt. Dans le même temps, les économies peinent à éloigner le spectre d’une pénurie : en une semaine, la consommation d’eau est même repartie à la hausse avec 57m3 supplémentaires par jour. Au 28 septembre, la consommation sur toute l’île représentait 34 154 m3/j, contre 36 000 m3/j en temps normal. En baisse donc, mais toujours bien loin de l’objectif des 28 500 m3/j fixé par les autorités.

Après 70 jours de grève, ce que l’on pensait être la lutte finale entre représentants des salariés et direction s’est tenue ce lundi. Pendant près de cinq heures. Et sous l’arbitrage du Préfet - encore une fois. Force est d’ailleurs de constater que l’hôte de la case Rocher a su faire preuve de conviction tant l’accord semble loin des revendications initiales des salariés. Des 150 euros d’augmentation réclamés, les salariés en auront obtenu 30. Mais la satisfaction des uns et des autres, à commencer par celle du préfet, n’aura pas fait long feu. Jeudi, les salariés du groupe étaient à nouveau dans la rue après un retour au travail rimant avec “humiliations” et annonces de licenciement. Après celle du rocher, retour à la case départ.

LA PHRASE « Nous ne voulons plus subir mais structurer le marché de la consommation notamment au moyen de startup innovantes. On peut former nos premiers de cordées » La start-up nation, même à Mayotte, qui l’eut cru ? Mohamed Ali Hamid, le président de la CCI, semble, lui, bel et bien y croire. C’est entouré des différents partenaires liés de près ou de loin à l’enseignement supérieur que l’élu de la chambre consulaire a plaidé, mardi, pour un développement de filières en lien avec les besoins internes du territoire comme de rayonnement. Son voeu : former à Mayotte une élite, tout comme une main d’oeuvre qualifiée. Dans cette optique, les outils vont se multiplier dans les prochaines années promettent les partenaires. À commencer par la technopole de Dembéni, portée par la CCI elle-même ? Pour rappel, cet ambitieux centre dédié à la R&D et à l’incubation aurait déjà dû ouvrir ses portes. Mais n’est toujours pas sorti de terre.

BRÈVES Aéroport : sabotage et avion dérouté Alors que les pompiers de l’aéroport de Mayotte sont à nouveau en grève pour réclamer plus de moyens et la reconduction de la convention qui les lie au gestionnaire de l’infrastructure, le mouvement a pris une nouvelle tournure, ce jeudi. Dans la nuit de mercredi, “des individus ont pénétré par effraction dans l’enceinte de l’aéroport et ont saboté les véhicules de secours. Cet acte criminel a empêché les sapeurs pompiers en service de faire sortir les engins indispensables à la sécurité des atterrissages”, rapporte la préfecture. Résultat, l’avion en provenance de Roissy a du changer de cap pour atterrir à La Réunion. Un avion d’évacuation sanitaires a toutefois pu décoller, non sans retard, après la réparation en urgence du matériel. « Des plaintes seront déposées dès ce matin pour identifier et poursuivre les auteurs de cette action insensée et criminelle qui aurait pu entraîner des conséquences dramatiques », indique le préfet qui “condamne avec la plus grande fermeté ces actes d’une très grande gravité et forme le souhait que leurs auteurs soient très durement sanctionnés”.

PROVERBE “ Hazi asubuhi..” L'avenir appartient à celui qui se lève tôt.

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LE TOP

LE FLOP

Le sport entre à nouveau en piste

La note trafiquée du président CDG Réunion

Après six long mois d’une interruption presque totale d’activité pour les différents clubs de l’île, une réunion avec tous les acteurs du sport et de la santé a signé, ce mercredi, le top départ de la reprise. Laquelle ne se fera toutefois pas sans cadre strict, la levée de l’état d’urgence sanitaire n’empêchant pas que Mayotte reste un “territoire de circulation active du virus”. Pour la directrice adjointe de la Jeunesse et sport État, la marche vers la reprise des activités sportives devra être "responsable et sécurisé". "Toute activité est soumise au respect des protocoles sanitaires : l’adoption des gestes barrières, le port du masque… Ces instructions ont pour objectif d’éviter une reprise de l’épidémie". Toujours est-il que "ça fait du bien de retrouver le club, les partenaires, de renouer avec notre sport", confie Moussa Daniel, capitaine de l’Association des Jeunes Handballeurs de Tsimkoura. Aux différentes ligues et comités, désormais, d’organiser la reprise des différentes compétitions.

L’affaire fait grand bruit chez nos amis réunionnais. Le journal de l’île de La Réunion (JIR) a en effet révélé que “le président du centre de gestion de la fonction publique territoriale (CDG) de La Réunion, Léonus Thémot a obtenu à Mayotte son concours de rédacteur principal de 2e classe dans des conditions très suspectes”. Et pour cause, comme l’écrit le journal : “sa note de 3/20 à l'écrit a été modifiée en 15/20”. En se replongeant dans le rapport accablant de la chambre régionale des comptes sur le centre de gestion de la fonction publique territoriale de Mayotte, on retrouve trace de l’affaire en ces termes : “Les listes des candidats admissibles et admis présentent des anomalies. À titre d’exemple, les notes d’un candidat, élu d’une commune réunionnaise, ont été corrigées à la main, remplaçant ainsi une note éliminatoire par un 15/20. Cette pratique lui a permis d’accéder à l’épreuve orale à laquelle il a obtenu la note de 5/20, et d’être lauréat du concours, en dixième position ex-aequo. Ceci n’a d’ailleurs été possible que grâce à la modification de la répartition des postes entre les différentes voies. Le nombre de postes ouverts au concours interne a, en effet, été revu à la hausse sans justification, ce qui apparaît contestable”. Jeudi, le nos confrères du JIR en ont remis une couche avec une enquête tendant à montrer l’existence d’une véritable filière entre les deux îles. Des témoignages affirment qu’il en coûtait entre 3000 et 5000 euros pour obtenir avec certitude son concours à Mayotte. La justice s’est saisie de l’affaire.

ILS ONT FAIT L’ACTU 10 Comoriens trouvent la mort dans le naufrage d’un kwassa Ils étaient 24, vendredi dernier, à bord de la frêle barque qui a fait naufrage près de la plage des Badamiers en PetiteTerre. Si 14 passagers de ce kwassa en provenance d’Anjouan ont pu être secourus à temps, les dix autres, dont un enfant de sept ans, ont perdu la vie, noyés. “Un nouveau drame de l’immigration clandestine à Mayotte”, titre la presse nationale, tant le fait divers semble être coutumier. Et comme il est d’usage après chacune de ces tragédies, pas une institution locale, pas même la préfecture, n’a tenu à réagir. Pas un mot, pas une minute de silence pour les morts de l’immigration clandestine, dont à Mayotte, l’Etat ne cesse de se féliciter du nombre record de reconduites qu’il ordonne chaque année. Pourtant, chaque année, on estime qu’au moins 1 000 personnes perdent la vie en tentant la traversée du bras de mer qui sépare les Comores et Mayotte, en quête d’une vie meilleure. Deux jours après “ce nouveau drame de l’immigration clandestine”, cinq personnes - quatre Comoriens, dont un mineur et une femme malgache - étaient mis en examen et placés en détention provisoire pour aide à l’entrée, au séjour et à la circulation d’étrangers commise en bande organisée, ainsi que pour homocide involontaire.

BRÈVES Contrat de convergence : 50 nouveaux projets programmés

Avec la programmation de ces 50 nouveaux projets, voilà 162 millions d’euros supplémentaires débloqués dans l’enveloppe du contrat de convergence dont un quatrième comité de pilotage s’est tenu ce lundi. L’éducation prend une part prépondérante dans cette nouvelle programmation puisqu’avec quatre projets pour le secondaire, quelques 127 millions d’investissements lui reviennent. “Parmi les projets, on trouve le lycée des métiers du bâtiment de Longoni, des travaux de réalisation de forage d’eau, la construction du plateau sportif de Miréréni, les travaux prioritaires de gestion des eaux pluviales de Bandrélé, l’aménagement touristique de la route de Sakouli. Les grandes thématiques du contrat de convergence. Peu de projets réellement structurants pour l’île dans ces exemples (routes, contournements, etc.), permettant de désengorger l’île, mais on les retrouve dans les grandes thématiques retenues. On peut donc espérer qu’elles fassent malgré tout partie de réalisations futures. Il faut aussi éviter la tentation de faire des économies en transférant dans ce contrat de convergence des investissements qui seraient déjà inscrits ailleurs, dans de nombreux autres plans, le plan urgence eau notamment”, écrivent nos confrères du Journal de Mayotte.

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DOSSIER

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UNIVERSITÉ

LES POSSIBILITÉS D'UNE ÎLE Université de plein exercice, extensions des locaux, doublement du nombre d’étudiants… C’est un vaste chantier que prépare le Centre universitaire de Dembéni. Si les difficultés seront nombreuses, sa mue est une nécessité impérieuse pour espérer offrir aux jeunes du territoire un avenir moins incertain. Et par ricochet, d’offrir à l’île une nouvelle génération à même de tenir le cap face à ses défis. À ses démons, aussi. Car si cette jeunesse est métissée, ne fait pas de distinction dans ses rangs, il en est tout autrement de l’administration. Qui refuse de fait le droit à la poursuite d’études pour les bacheliers non nationaux.

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DOSSIER

Solène Peillard

TÉMOIGNAGE

LE CUFR EN ROUTE VERS SES PLEINES FACULTÉS

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IL EST SUR LE TERRITOIRE CE QUI S’APPARENTE LE PLUS À UNE UNIVERSITÉ. POURTANT, LE CENTRE DE FORMATION ET DE RECHERCHE DE DEMBÉNI N’EN EST PAS ENCORE TOUT À FAIT UNE. D’ICI UN AN, LE CUFR DEVRAIT POUVOIR JOUIR D’UN PLEIN EXERCICE, DÉLIVRER DES DIPLÔMES DE L’ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR EN SON NOM ET DÉVELOPPER LUI-MÊME SA POLITIQUE DE FORMATION, QUI DEMEURE AUJOURD’HUI LIMITÉE. MAIS D’ICI LÀ, LES DÉFIS SONT ENCORE NOMBREUX POUR L’ÉTABLISSEMENT CRÉÉ MOINS DE DIX ANS PLUS TÔT. Dans le bout de cour qui mène à l'amphithéâtre, Zakia, 23 ans, avale une bouchée de son sandwich, les yeux rivés sur ses petites fiches cartonnées, barrées ça-et-là à grands coups de Stabilo jaune fluo. Quelques années plus tôt, l'étudiante mahoraise, comme beaucoup d'autres, avait rejoint la métropole après l'obtention de son bac, faute de trouver sur son île, le cursus qu'elle avait choisi : une licence d'Histoire. Mais au gré de son parcours, la jeune femme envisage de s'orienter vers le droit. Lorsqu'elle apprend que le centre de formation et de recherche de l'île vient d'ouvrir le diplôme qu'elle briguait alors, elle n'hésite pas une seconde à revenir à Mayotte. "C'était très important pour moi de revenir faire mes études ici, chez moi", sourit l'étudiante en deuxième année, pendant qu'elle cherche un stylo au fond de sa trousse. "Oui, le CUFR manque encore de formations, et parfois d'enseignants, mais je ne vois pas vraiment de grandes différences avec les universités métropolitaines."

À une exception près : son diplôme ne lui sera pas délivré par l'académie de Mayotte, mais par celle d'Aix-Marseille, partenaire du centre de formation, le seul en France à ne pas encore avoir le statut d'université. "En fait, c'est presque un avantage, parce qu'Aix-Marseille est associé à un certain prestige, mais en tant que Mahoraise, étudiante à Mayotte, ce serait une fierté d'avoir un diplôme qui vient véritablement de chez nous." Ce qui, d'ici à peine plus d'un an, devrait être le cas.

"UNE VOLONTÉ POLITIQUE DE FORMER LES JEUNES MAHORAIS À UN NIVEAU BAC +3" Au 1er janvier 2022, le CUFR de Dembéni devrait devenir une université de plein exercice. Autrement dit, il jouira enfin d'une autonomie pédagogique et scientifique, administrative et financière. Il pourra donc délivrer des diplômes nationaux de l'enseignement supérieur en son nom propre, mais aussi définir lui-même sa politique de formation, de recherche et de documentation selon les besoins socioéconomiques du territoire. Ce qui devrait en premier lieu permettre d'élargir le panel de cursus proposés, bien que déjà étoffé cette année par la création d'un parcours d'excellence "accès santé" et d'un diplôme "étudiant-entrepreneur". Mais actuellement, l'offre se limite à une dizaine de formations, dont deux licences professionnelles, une poignée de licences générales pour un seul master, délivrés par des universités extérieures au territoire. Au total, quatre partenaires prêtent actuellement leur nom, leurs compétences et leurs cours au CUFR : l'université de Nîmes, de Montpellier, Paul-Valéry Montpellier 3 et l'université Aix-Marseille. Et les résultats de ces collaborations sont plutôt satisfaisants : au CUFR, le taux de passage en deuxième année de licence s'établit à 29%. Un

BIENTÔT UN NOUVEAU DIRECTEUR AU CUFR ? Il est l'un des rares mahorais à avoir brigué ce poste. Thomas M'Saïdié, maître de conférences en droit public au CUFR est candidat au poste de directeur de l'établissement, le mandat d'Aurélien Siri se terminant le 20 décembre prochain. Son projet ? Améliorer l'accès aux ressources documentaires numérique avec les universités partenaires, développer davantage le pôle culture, renforcer l'offre de licences professionnelles pour pallier le manque de cadres sur le territoire et créer des diplômes mieux adaptés aux besoins locaux. En somme, mieux ancrer le centre de formation et de recherche dans son environnement, en recrutant plus de natifs de l'île et en travaillant plus étroitement avec les collectivités, les acteurs socio-économiques locaux et les institutions mahoraises, régionales, nationales voire internationales. S'il est choisi, Thomas M'Saïdié serait le premier mahorais à diriger le CUFR. Mais rien n'est encore gagné. Alors qu'Aurélien Siri, l'actuel directeur, est lui aussi candidat à sa propre succession, les membres du conseil d'administration – le président du conseil départemental, le maire de Dembéni, les présidents des établissements partenaires, des personnalités extérieures dix représentants du personnel – devront trancher d'ici début novembre.

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2013-2014

2014-2015

chiffre qui pourrait paraître faible, mais qui l'est pourtant bien moins qu'ailleurs. En métropole, moins de 10% des étudiants de licence s'inscrivent en deuxième année, et 22% à La Réunion. Pourtant, ces deux territoires attirent chaque année 70% des candidats issus des classes de terminale mahoraises. "Avant la création du CUFR, à l'époque de l'institut de formation des maîtres, on comptait moins de 600 étudiants. Puis, il y a eu une volonté politique de former les jeunes mahorais au moins à un niveau bac +3. Et la meilleure solution pour mettre cela en œuvre était de s'appuyer sur d'autres universités qui étaient, elles, déjà de plein exercice et avaient de fait une certaine maturité", commente Daouya Berka, directrice générale des services du centre de formation et de recherche de Dembéni. "Mais nos diplômes ne sont pas au rabais, puisque ce sont les mêmes que ceux de nos partenaires, avec les mêmes exigences", précise à son tour Ludovic Chevalier, responsables des affaires juridiques du centre. "Puisque nos étudiants seront amenés à poursuivre leur master en métropole, nous devons les y préparer !" Et pour cela, 15 nouveaux emplois sont créés chaque année depuis quatre ans au sein du CUFR,

2017-2018

2018-2019

2019-2020

qui compte aujourd'hui 124 personnels, dont 33 maîtres de conférences et un professeur d'université, le premier de l'histoire du centre, qui a rejoint ses rangs lors de la dernière rentrée scolaire.

3 700 ÉTUDIANTS À L'HORIZON 2030, CONTRE 1 500 AUJOURD'HUI Mais plus l'offre du CUFR, ou de l'université à venir, s'étoffera, plus nombreux seront les étudiants. Contre 578 inscrits l'année de son ouverture, en 2012, le CUFR en recense désormais près de 1 500, soit presque 100% de sa capacité maximale. Or, selon le contrat de convergence, le centre de formation devrait accueillir 2 700 étudiants à l'horizon 2025, et jusqu'à 3 700 pour 2030, du fait de la croissance démographique du département. En clair, les locaux actuels, déjà insuffisants, devront impérativement être étendus. Mais sur un territoire où le foncier est à peine en cours de régularisation, le chantier s'annonce vaste. Pour pallier le déficit d'infrastructures, trois opérations immobilières sont en cours : la création de locaux pédagogiques supplémentaires – l'équivalent de cinq à six salles de classes)

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la crise sanitaire. "C'est un aspect très important pour nous", promet Ludovic Chevalier. "D'autant plus que faute de bus, certains de nos étudiants doivent parfois se lever à 4 heures du matin alors qu'ils ne quittent le centre qu'en fin de journée. Nous savons bien que ce ne sont pas des conditions optimales pour l'apprentissage." Et les jeunes étudiants, eux aussi, le savent bien : "Entre les transports scolaires et les grèves comme on en voit souvent à Mayotte, on ne peut pas toujours assister à tous nos cours selon les périodes. Et quand on revient en classe, on sait que les professeurs ne vont pas refaire les cours qu'on a ratés…", souffle Rahamatou, 19 ans, qui vient de faire sa première rentrée scolaire post bac. Lorsqu'elle terminera ses trois ans de licence en lettres modernes, la jeune étudiante devrait être diplômée de l'académie de Mayotte. "C'est une bonne chose, ça veut dire que l'île se développe. Mais j'ai peur que sur le marché du travail, on soit discriminés…" Un enjeu qui se joue bien loin des cours de récré. n

LA RECHERCHE EN PLEIN ESSOR et de bureaux livrés dans le courant de l'année universitaire en cours ; une extension de 1 000 mètres carrés, comprenant un nouvel amphithéâtre de 240 places modulable en salle de spectacles et le réaménagement des locaux déjà existants, dont les bâtiment et le foncier devraient être cédés au CUFR, respectivement par le conseil départemental et la commune de Dembéni. "Pour l'instant, nous avons des contraintes immobilières très fortes, donc la vie étudiante est réduite au minimum", concède Daouya Berka. À titre d'exemple, l'unique centre de documentation universitaire ne compte qu'une trentaine de places assises, contre une cinquantaine pour la cafétéria. "L'objectif va être aussi de développer tous ces services à travers l'extension des locaux", espère la directrice générale des services du CUFR. En attendant, la seule vie associative des étudiants s'organise autour de l'AECUM, qui gère un budget de 150 000 euros et intervient, entre autres, dans le champ de la prévention santé. Autre problématique forte, l'absence d'hébergement. Lors de la précédente année scolaire, 12 studios de l'internat d'excellence du LPO de Dembéni ont été mis à disposition d'étudiants du CUFR qui avaient validé leur première année de licence. Si l'offre demeure insuffisante, le rectorat assure étudier plusieurs projets permettant de développer plus d'internat à travers l'île, projets toutefois mis à l'arrêt à cause de

Comme son nom l’indique, le CUFR est également un centre de recherche. L’établissement mène actuellement 32 projets scientifiques, dont certains en étroite collaboration avec Madagascar, Maurice ou le Mozambique notamment. « L’environnement unique de Mayotte en fait un sujet d’étude extraordinaire ! », souligne, non sans fierté, Ludovic Chevalier, responsables des affaires juridiques du centre. Dernière preuve en date, la publication dans la revue scientifique Nature, référence en la matière, d’un article cosigné Thomas Claverie, maître de conférences en biologie marine au CUFR, et dédié à la conservation des requins de récif. Un mois plus tôt, le centre national de la recherche scientifique (CNRS) et le CUFR officialisaient la création d’un site d’étude en écologie globale qui permettra aux chercheurs de l’île et d’ailleurs d’évaluer la richesse des écosystèmes de Mayotte, leur fonctionnement et leur résilience face aux menaces environnementales, comme le phénomène de subsidence. Et si la recherche parvient à faire son trou à Mayotte, la création de l’université de plein exercice de Dembéni pourrait permettre la préfiguration d’une unité mixte et avec elle, la création du premier laboratoire de recherche fondamentale dédié sur le territoire, dont la biodiversité et les curiosités géologiques attirent régulièrement des scientifiques de métropole ou même de pays étrangers.

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DOSSIER

Grégoire Mérot

TÉMOIGNAGE

ÉTUDIANTS ÉTRANGERS, L’AVENIR EN SUSPENS ILS SONT DES CENTAINES, CHAQUE ANNÉE, À NE PAS POURSUIVRE LEURS ÉTUDES APRÈS LE BAC, FAUTE DE TITRE DE SÉJOUR. FAUTE DE RÉPONSE DE LA PRÉFECTURE À DES DEMANDES JURIDIQUEMENT NON REFUSABLES, SURTOUT. LOIN DES ESPOIRS D’ÉMANCIPATION QUE DEVAIT LEUR PROMETTRE UNE ADMISSION DANS L’ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR, LES VOILÀ LIVRÉS À EUX-MÊMES, DANS L’ATTENTE ET L’ANGOISSE. “J’ai arrêté de sortir pour voir mes amis, je n’en peux plus de les voir progresser dans la vie alors que moi je suis bloqué.” À 21 ans, Salilou a la voix triste et le regard vague. À 18 ans, Salilou se rêvait ingénieur en robotique. Depuis, il a “perdu espoir”. Car cela fait désormais trois ans que le jeune homme a obtenu son bac et son admission au CUFR de Mayotte pour une licence de mathématiques. Et trois ans que sa vie est au point mort. Comme des centaines de jeunes cette année, des milliers avant lui, Salilou ne peut poursuivre ses études, faute de titre de séjour. Pourtant, rien ne le prédestinait à cette désillusion. “C’est vrai que je n’étais peut-être pas le meilleur des élèves, j’ai longtemps manqué de bonnes conditions pour pouvoir étudier correctement. Au lycée, je travaillais à côté pour m’acheter mes fournitures mais ça ne m’a pas empêché de participer à des concours de maths !”, retrace le jeune homme depuis son petit village du sud de l’île. Et même si le bac est décroché de justesse, Salilou pensait avoir tout de son côté pour “devenir quelqu’un”. Arrivé nourrisson sur l’île, il est élevé par sa belle-mère française

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“J’AI ARRÊTÉ DE SORTIR POUR VOIR MES AMIS, JE N’EN PEUX PLUS DE LES VOIR PROGRESSER DANS LA VIE ALORS QUE MOI JE SUIS BLOQUÉ.”

et son père détenteur d’une carte de résident. Et son parcours scolaire se déroule sans accroc. Afin de s’assurer de son avenir, Salilou, accompagné de son père, débute dès son entrée au lycée les démarches nécessaires à une régularisation administrative quand sonneront ses 18 ans.

“EN TROIS ANS, ILS NE M’ONT JAMAIS RÉPONDU” “En 2015, j’ai écrit une sorte de lettre de motivation avec tous les documents nécessaires. Mon père est allé déposer ça en personne à la préfecture. Je n’ai jamais eu de réponse”, explique Salilou. Les relations entre le jeune homme et l’administration ne changeront pas. “Je les ai relancés sans arrêt, par tous les moyens, pour demander un rendez-vous mais ils ne m’ont jamais rappelé”. 2017, le bac en poche et son admission au CUFR acquise, Salilou reprend espoir, se dit que ces

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DOSSIER

“QUAND JE VOIS DES JEUNES QUI PEUVENT FAIRE DES ÉTUDES ET QUI GÂCHENT LEUR VIE À SE DROGUER ET À FAIRE DES BÊTISES ÇA ME RÉVOLTE, ILS GÂCHENT LEUR VIE ALORS QU’ILS ONT LA POSSIBILITÉ DE FAIRE QUELQUE CHOSE, EUX !” précieux sésames feront bouger les lignes. “Rien”. Deux ans - ponctués de plusieurs messages par semaine - plus tard, le féru de maths reprend contact avec le centre universitaire. On lui explique que son admission reste valable. Mais sans titre de séjour, impossible de l’inscrire. “Je leur ai demandé de m’aider mais ils n’ont rien voulu savoir, ils m’ont expliqué que seule la préfecture pouvait faire quelque chose”, poursuit Salilou dans son récit du vide. “Cette question-là est régalienne. Aujourd'hui, nous, CUFR, nous avons des missions précises et nous ne pouvons pas nous substituer à l'État. À partir du moment où l'État renouvelle ou pas un titre de séjour, nous ne pouvons pas

intervenir là-dessus”, explique de son côté l’administration du centre universitaire. Le droit européen, à travers une directive et une jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne prône pourtant la possibilité pour les chefs d’établissements d’enseignement supérieur d’inscrire les étudiants étrangers en attente de régularisation. Précisément pour les aider à obtenir leurs titres de séjour.

LA SOLITUDE ET L’ATTENTE À défaut d’avoir pu cirer les bancs de l’université, Salilou aura appris qu’il était étranger. Qu’après 21 ans passés à Mayotte, il pourrait en être expulsé alors même qu’il remplit toutes les conditions pour un droit au séjour. “C’est aussi pour ça que je ne sors pas de chez moi, j’ai l’impression que ça peut arriver à tout moment… Mais Anjouan je n’y suis jamais allé, je ne connais personne là-bas... Parfois, je me perds un peu, je me dis que ce serait peutêtre finalement plus simple là-bas, qu’au moins je pourrais vivre”, marmonne le jeune homme qui ne voit plus la vie que de sa fenêtre. Dans l’espoir d’une réponse de la préfecture qui lui permettrait de renouer avec le monde. “Quand je vois des jeunes qui peuvent faire des études et qui gâchent leur vie à se droguer et à faire des bêtises ça me révolte, ils gâchent leur vie alors qu’ils ont la possibilité de faire quelque chose, eux !”, lâche-t-il amèrement. Définitivement bien seul.

DES CENTAINES DE DOSSIERS EN ATTENTE Quoique. “Je sais qu’on est beaucoup dans cette situation, c’est pour ça que je ne

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“CETTE ANNÉE ÇA RECOMMENCE, C’EST MÊME PIRE AU VU DES RETARDS COLOSSAUX QUI ONT ÉTÉ PRIS DU FAIT DE LA CRISE SANITAIRE. RIEN NE S’EST MIS EN PLACE POUR LA POURSUITE D’ÉTUDES DE JEUNES QUI Y ONT POURTANT DROIT” comprends pas pourquoi rien n’est fait pour faire avancer les choses alors que l’on a le droit pour nous”, poursuit Salilou qui, en trois ans, n’a pas manqué de se pencher sur le sujet de fond en comble. Notamment aux côtés de la Cimade, dont il est désormais bénévole. Du côté de l’association, justement, l’incompréhension est toute aussi prégnante. “Cela fait plusieurs années qu’on se mobilise sur le sujet mais rien ne bouge !”, s’y indigne-t-on. Pourtant, un protocole avait bien été mis à l’écrit entre les différentes parties prenantes à la suite de la mobilisation des étudiants étrangers en 2018. Avec pour objectif de “fluidifier les démarches”.

Quelques dossiers auront bien été traités, bien loin des centaines en attente. Et en 2019 “il y a eu beaucoup de changement de personnes à la préfecture et rien ne s’est pérennisé”, confie-t-on. Alors, “cette année ça recommence, c’est même pire au vu des retards colossaux qui ont été pris du fait de la crise sanitaire. Rien ne s’est mis en place pour la poursuite d’études de jeunes qui y ont pourtant droit”, explique l’association qui fait face “chaque jour à une pluie de messages d’étudiants demandant de l’aide”. Résultat, alors que la clôture des inscriptions au CUFR est prévue pour le début de ce mois, “plusieurs centaines” de jeunes embarquent pour une année blanche. Tapis dans l’ombre. n *Contactée à de nombreuses reprises, la préfecture n’a pas donné suite à nos sollicitations mais assure travailler à une issue positive sur ce dossier.

LA “REALPOLITIK” DU RECTORAT “Tout élève sélectionné à l’issue de Parcoursup a vocation à poursuivre ses études, on pousse pour cela”. Voilà pour le principe, énoncé par le recteur de Mayotte. Mais comme tout principe, celui-ci souffre d’exceptions. Dont l’une, de taille, est le corollaire direct de la politique de droit au séjour telle qu’appliquée par la préfecture. L’autre limite tiendrait quant à elle au nombre de places limitées dans l’enseignement supérieur sur le territoire. Résultat, il faut bien choisir, avoue à demi-mot Gilles Halbout. “Notre politique est très claire, on est intraitables jusqu’à 18 ans pour la scolarisation de tous les enfants. Après, on rentre dans une problématique de relations internationales. On pousse nos élèves les plus méritants mais on ne peut pas le faire pour tout le monde”, fait valoir le recteur. En clair, les services académiques aident les élèves étrangers ayant obtenu une mention au baccalauréat. Dans ce cas-là, “c’est presque systématique”, même si ‘“il n’y a pas de protocole établi, on fait remonter les dossiers à la préfecture au cas par cas”. Et les autres ? “Ils entrent malheureusement dans une situation de droit commun qui n’est pas de ressort”, botte en touche le chef académique. “Il nous faut faire en fonction des possibilités et des réalités.et nous sommes très clairs sur un point ; nous ne ferons pas de passe-droits pour le CUFR. Nous ne faisons aucune distinction entre ceux qui souhaiteraient aller en métropole ou au centre universitaire, car ce dernier ne doit pas être le plan de secours”, considère le recteur.

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ROZETTE YSSOUF

SOUTIENT LA PREMIÈRE THÈSE DE DOCTORAT SUR LES SOUFFRANCES PSYCHIQUES DES JEUNES MAHORAIS L’INFORMATION EST PASSÉE PRESQUE INAPERÇUE. AU MOMENT MÊME OÙ SE TENAIT À L’HÉMICYCLE DU CONSEIL DÉPARTEMENTAL LA REMISE DE PRIX DU CONCOURS « ÉCRIRE AU FÉMININ », ROZETTE YSSOUF, L’UNE DES LAURÉATES DU CONCOURS LITTÉRAIRE, SOUTENAIT UNE THÈSE INÉDITE À L’UNIVERSITÉ DE STRASBOURG SUR « LES JEUNES MAHORAIS, ENTRE DOUTE ET PEUR : LE CHOIX DE LA SUBLIMATION CONTRE L'EFFONDREMENT PSYCHIQUE », SOUS LA DIRECTION DE MONSIEUR HOSSAÏN BENDAHMAN. Cette thèse met l’accent sur les souffrances psychiques des jeunes mahorais qui poursuivent ou non leur cursus universitaire en métropole. Le sujet reste encore tabou dans la société mahoraise, tant pour les familles que pour les institutions publiques. Mais les suicides et les découvertes macabres qui ébranlent la diaspora mahoraise en métropole, nous rappellent souvent la dure réalité des étudiants mahorais : nos jeunes souffrent ! Leurs souffrances ne sont pas que sociales, financières ou matérielles, elles sont aussi psychiques. C’est ce que tente de montrer Rozette Yssouf dans son travail de recherche. On y apprend que les jeunes mahorais souffrent d’une crise identitaire et existentielle. Certains vivent mal l’entre deux ou trois cultures (comorienne, mahoraise et française), d’autres sont tiraillés entre la tradition et la modernité dans leurs choix de vie, d’autres encore sont en perte de repères identitaires, familiales mais aussi sociétales. Tous s’interrogent sur le monde qui les entoure et cherchent à se connaître, à donner sens à leur existence, à trouver leur place dans la société mahoraise et française.

Si certains jeunes sombrent en empruntant les voies de la délinquance ou du passage à l’acte (le suicide dans toutes ses formes), Rozette Yssouf explique que d’autres jeunes arrivent quand même à canaliser leurs souffrances psychiques pour se surpasser et réussir leur parcours scolaire et professionnel. D’où la problématique de la sublimation comme choix contre l’effondrement psychique. Alors comment ces jeunes s’organisent pour surmonter leur mal être, leur crise identité, leurs questionnements existentiels ? Quels sont les mécanismes de défense qu’ils emploient pour appréhender leur réalité insoutenable ? Quelles sont les stratégies qu’ils utilisent pour s’adapter à leur réalité ? Quels sont les moyens qu’ils déploient pour éviter un effondrement psychique ? telles sont les principales questions que soulève cette thèse et auxquelles Rozette Yssouf se propose d’y répondre à partir des résultats des enquêtes de terrain menées à Mayotte et en métropole, les questionnaires en ligne et diffusés dans les réseaux sociaux, et des entretiens individuels et en groupe conduits tout au long de la réalisation de sa thèse de doctorat.

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séminaire Mutations dans les migrations, conflictualités dans les pratiques, Université de Poitiers, 07 juin, [programme en ligne] : https://reseaumig.hypotheses.org/818 2015 : « L’identité culturelle », Journée d’informations et d’échanges, Mieux accompagner les jeunes ultra-marins sur les territoires Loire Nord et Nord-Ouest Rhône, La Mission Locale de Roanne, 9 octobre, [programme en ligne] : http://www.anlci.gouv.fr/Actualites/ Agir-ensemble-contre-l-illettrisme/Journee-d-informations-et-dechanges-a-destination-des-professionnels-de-l-accompagnement9-octobre-2015-Rhone-Alpes 2011 : Quel cadre thérapeutique pour favoriser le processus de résilience chez les femmes victimes de violences conjugales, mémoire de Master 2, sous la direction Madame Marie-Annick Grima, Université de Paris 8 Saint-Denis & Université de La Réunion, soutenu le 30 septembre.

Biographie :

Originaire de M’tsapéré, Rozette Yssouf passe une grande partie de son enfance à La Réunion avant de poursuivre ses études universitaires à Montpellier, à Paris, à Nanterre, puis à Strasbourg où elle soutient aujourd’hui sa thèse doctorale. Rattachée au laboratoire SuLiSoM (Subjectivité, lien social et modernité) de l’Université de Strasbourg, elle mène ses activités de recherche et pratique la psychologie clinicienne au Centre médico-psychologique du Morbihan. Parallèlement à cela, dans ses heures perdues, elle se consacre à sa passion pour l’écriture romanesque et poétique. Mais c’est sur le site d’Acoua Infos qu’elle publie fréquemment sous un nom d’emprunt ses billets d’humeur pour sensibiliser les lecteurs sur les souffrances psychiques dans la société mahoraise. Sollicitée par le Conseil départemental du Morbihan, elle a animé une formation pour les professionnels médico-sociaux pour expliquer la culture des personnes qui proviennent de l'archipel des Comores. Elle est aussi sollicitée par diverses associations à Mayotte et en métropole, la délégation de Mayotte à Paris ainsi que par certains médiateurs académiques pour échanger sur les problématiques rencontrées par les jeunes mahorais. Elle collabore régulièrement avec la presse et les médias locaux pour sensibiliser la société mahoraise sur les souffrances psychiques tant chez les enfants que chez les adultes, la violence juvénile, les violences au sein de la famille, l’éducation, etc. En 2013, elle gère la troupe de théâtre M’lézi avec son fondateur Said Soilihi, docteur en linguistique et professeur de français (décédé le 26 avril 2017), dans le but de sensibiliser les parents sur l’échec scolaire et prévenir la délinquance juvénile. Et en octobre 2017, elle a répondu à l’invitation du ministère de l'Outre-mer pour intégrer l’équipe Nationale des Projets Ultramarins des Assises de l'Outre-mer pour représenter Mayotte et tous les territoires ultramarins.

Recherche académique

2020 : Les jeunes Mahorais : entre doute et peur, le choix de la sublimation contre l’effondrement psychique, thèse de doctorat, sous la direction de Monsieur Hossaïn Bendahman, Université de Strasbourg, soutenance prévue le 25 septembre. 2017 : « Crise identitaire des jeunes, pourquoi et quelles solutions ? », communication, Café de l’éducation, Mairie de Chiconi, Mayotte. ------ : « Existe-t-il un lien entre la délinquance juvénile et les pratiques institutionnelles face aux mineurs isolés de Mayotte ? », intervention au

2009 : « Dis-moi si tu discernes et je te dirai si tu es fragile ! », article co-écrit avec Nadia Aarab, Jean-Christophe Lavanne et Jean Fidèle Simba, publié dans Spécificités, 2009/1, n°2, p.57-64, [consultable en ligne], Cairn.info : https://www.cairn.info/revue-specificites-20091-page-57.htm

Publications et actualités littéraires

2020 : Princesse Daya, éd. Edilivre, Paris. ------ : Ray. Le petit prince mahorais, éd. Edilivre, Paris. 2015 : La solitude du cœur. Franchir les obstacles de la vie et devenir soi, éd. Menaibuc, Paris. ------ : « Rozette Yssouf, auteure mahoraise d’un premier livre », L’info Kwézi, article paru le 11 avril, [consultable en ligne] : https://www. linfokwezi.fr/rozette-issouf-auteure-mahoraise-dun-premier-livre/ ------ : « Rencontre avec une fille exceptionnelle : Rozette Yssouf, auteure », Café littéraire à Paris, article paru sur Facebook le 12 avril, [consultable consultable en ligne] : https://www.facebook.com/media/ set/?set=a.948666295152679.1073741833.693917260627585&type=3 2014 : « Spectacle de théâtre avec la troupe M’lezi », Magazine Glitter, n°22, septembre, [consultable en ligne] : https://fr.calameo.com/ read/001447103fd7aed6fb896 ------ : « Ulévi », la troupe M’lézi, représentation théâtrale faite à la MJC de M’tsapéré le 7 décembre. La pièce de théâtre à visée sociétale avait pour objectif de sensibiliser les parents sur les effets destructeurs de l’alcoolisme chez les jeunes mahorais.

Participation aux Assises et des journées de l’Outre-mer

2020 : « Regards de femmes ultramarines », Journée de l’Outremer, Centre culturel Charlie-Chaplin, Vaulx-en-Velin, 22 février, [programme en ligne] : https://vaulx-en-velin.net/ actualites/2020-02-22-journee-de-loutre-mer-samedi-22-fevrier/ 2018 : « Rozette Yssouf, au cœur des assises », dossier société, Magazine Glitter, n°55, mai, [consultable en ligne] : https://issuu.com/ glittermayotte/docs/glitter55online 2017 : « Outre-mer : des assises pour se relever », Infos Mayotte, Blogs, 31 octobre, [consultable en ligne] : https://infos-mayotte.blogspot. com/2017/10/?m=1 ------ : « Mayotte doit pouvoir rêver, avoir de l’espoir », Journal de Mayotte, 08 novembre, [consultable en ligne] : https://lejournaldemayotte. yt/2017/11/08/mayotte-doit-pouvoir-rever-avoir-de-lespoir/ ------ : « Rozette Yssouf, une psychologue mahoraise membre de l’équipe nationale », Les Nouvelles de Mayotte, n°2911, 08 novembre. ------ : « Les ateliers sont lancés », Flash-Infos, n°4206, 08 novembre.

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MAGAZINE D’INFORMATION NUMÉRIQUE HEBDOMADAIRE Edité par la SARL Somapresse au capital de 20 000 euros 7, rue Salamani Cavani M’tsapéré BP 60 - 97600 Mamoudzou Tél. : 0269 61 20 04 contact@mayottehebdo.com Directeur de la publication Laurent Canavate canavate.laurent@mayottehebdo.com Directeur de la rédaction Mohamed El Mounir dit “Soldat” 0639 69 13 38 soldat@mayottehebdo.com Rédacteur en chef Grégoire Mérot

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Couverture :

Université Les possibilités d'une île

Journalistes Romain Guille Solène Peillard Raïnat Aliloiffa Constance Daire Direction artistique Franco di Sangro Graphistes/Maquettistes Olivier Baron, Franco di Sangro Commerciaux Cédric Denaud, Murielle Turlan Thomas Lévy Comptabilité Catherine Chiggiato compta@mayottehebdo.com Secretariat Annabelle Mohamadi Première parution Vendredi 31 mars 2000 ISSN : 1288 - 1716 RCS : n° 9757/2000 N° de Siret : 024 061 970 000 18 N°CPPAP : 0121 I 92960 Site internet www.mayottehebdo.com


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Avec la consultation citoyenne, c’est maintenant que se décide la stratégie de lutte contre les cancers des 10 prochaines années. Dès aujourd’hui, tout le monde est invité à y participer sur consultation-cancer.fr


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