Mayotte Hebdo n°990

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LE CONSEIL DÉPARTEMENTAL,

UN ACTEUR DE TOUS LES SPORTS 4 grands objectifs de la politique sportive et jeunesse - Améliorer l’accès des activités pratiques et sportives au plus grand nombre ; - Accompagner le mouvement sportif dans sa structuration et son développement ; - Activer tous les leviers vers l’excellence sportive ; - Construire des équipements structurants.

398 500 € la somme consacrée chaque année à la prise en charge des échanges sportifs régionaux et nationaux, au titre de la programmation pluriannuelle (2020 à 2022)

3,4 millions Une politique de subventionnement dynamique pour le mouvement sportif (comités, ligues, clubs...)..

Cap sur les jeux des îles 2027 Une délibération du 5 octobre 2021 réaffirme solennellement, la volonté du Conseil départemental et celle du mouvement sportif mahorais pour l’organisation à Mayotte des jeux des Îles 2027 (et des Jeux des Jeunes 2025).

195 millions Le montant de l’enveloppe nécessaire selon les études réalisées pour les équipements sportifs des Jeux des Îles. S’y ajoutent la construction d’un village olympique et la nécessité d’investir sur différents modes de transports collectifs en fonction des lieux d’implantation des équipements destinés aux Jeux.

Excellence sportive Une délibération du 30 novembre 2021 met à disposition des locaux du Centre Abdallah Mamy et des installations sportives du Complexe de Cavani pour la Ligue Mahoraise de football afin d’y développer une Section d’Excellence Sportive Scolaire.

Conjuguer l’excellence et la pratique du sport au quotidien www.cd976.fr


LE MOT DE LA RÉDACTION

ÉDUQUER NOS FILS POUR NOS FILLES Puisque ce texte est écrit par un homme, autant le bâtir sur les paroles d'une femme, et notamment d'Angela Davis. Cette formidable figure du féminisme, du communisme et de l'American civil rights movement affirmait, au milieu du XXème siècle : "Je ne pense pas que nous puissions compter sur les gouvernements [...] pour faire le travail que seuls les mouvements de masse peuvent réaliser." Enlisés dans le conservatisme, les puissants n'ont effectivement pas la force de volonté du peuple. En toile de fond de ce constat éclairé, l'éducation, digue de toutes les injustices. Car force est de constater que les femmes ne sont pas encore égales aux hommes, quand leurs plaintes sont ignorées par la police, quand elles dépensent une véritable somme en protections menstruelles, quand elles sont moins payées, plus précaires, plus susceptibles de mourir sous les coups de leur conjoint ou ex-conjoint. Immédiatement inaudible devient celui qui nie la nécessité d'être féministe, devant les 16 féminicides déjà perpétrés cette année, après les 113 victimes de 2021. "Les hommes ont peur que les femmes se moquent d'eux. Les femmes ont peur que les hommes les tuent", résume froidement Margaret Atwood dans The Handmaid's tale. Traditionnellement matriarcale, la société mahoraise n'échappe pas aux maux de la misogynie, bien que l'émancipation des femmes de l'île suive son cours. Cependant, pour une égalité totale, il s'agit désormais d'éduquer les jeunes garçons, Mahorais mais avant tout Français, surtout en cette journée internationale des droits des femmes. Même si, comme le rappelait le rappeur Médine, "pour respecter nos femmes on n'attendra pas le 8 mars". Bonne lecture à toutes et à tous.

Axel Nodinot

TOUTE L’ACTUALITÉ DE MAYOTTE AU QUOTIDIEN

Lu par près de 20.000 personnes chaque semaine (enquête Ipsos juillet 2009), ce quotidien vous permet de suivre l’actualité mahoraise (politique, société, culture, sport, économie, etc.) et vous offre également un aperçu de l’actualité de l’Océan Indien et des Outremers.

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FI n°3997 mercredi 30 novembre 2016 St André

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FI n°3839 Lundi 7 mars 2016 St Félicie

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FI n°3818 Vendredi 5 février 2016 Ste Agathe

environnement

Port de Longoni

ConSeil départeMental

Quel accueil se prépare pour la présiDente Du Fn ?

Le Lagon au patrimoine mondiaL de L'unesCo ?

la dsP sur la sEllEttE

pas de changement sUr l’octroi de mer

© Jonny CHADULI

Grève à Panima

TéléThon 2016

Des propositions mais toujours pas D'issue

DemanDez le programme

première parution : juillet 1999 - siret 02406197000018 - édition somapresse - n° Cppap : 0921 y 93207 - dir. publication : Laurent Canavate - red. chef : Gauthier dupraz - http://flash-infos.somapresse.com

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Économie

SÉcuritÉ

Les appeLs à projets de L'europe

Couvre-feu pour Les mineurs

Première parution : juillet 1999 - Siret 02406197000018 - APE 5813Z - Édité par la Somapresse - Directeur de publication : Laurent Canavate - http://flash-infos.somapresse.com

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Faits divers

Edmond BéBé nous a quitté

ViolEncE En cascadE

Première parution : juillet 1999 - Siret 02406197000018 - APE 5813Z - Édité par la Somapresse - Directeur de publication : Laurent Canavate - http://flash-infos.somapresse.com

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MCG VS SMart

ViCe-reCtorat

UltimatUm oU véritable main tendUe ?

l’institUtion répond aUx critiqUes

Première parution : juillet 1999 - Siret 02406197000018 - APE 5813Z - Édité par la Somapresse - Directeur de publication : Laurent Canavate - http://flash-infos.somapresse.com

Mayotte Hebdo • Bandeau intérieur • 197 x 60 mm • Visuel:Grand public - Trot • Parution=11/mars/2022 • Remise le=07/mars/2022 4100% numérique

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Fax : 0269 61 63 00

FI n°3822 Jeudi 11 février 2016 Ste Héloïse

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Diffusé du lundi au vendredi, Flash Infos a été créé en 1999 et s’est depuis hissé au rang de 1er quotidien de l’île.

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TCHAKS LE CHIFFRE

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C'est l'âge auquel Luc Laventure, figure du journalisme ultramarin, nous a quittés, ce 6 mars 2022. Le Martiniquais avait fait sien l'outre-mer, en débutant d'abord en tant que reporter pour France 3, sur son île natale. C'est en 2005 que M. Laventure signe l'un de ses plus beaux faits d'armes, en fondant la chaîne publique France Ô, symbolisant l'ouverture médiatique des outre-mer à tous les téléspectateurs, sur la TNT. Dix ans plus tard, il devient le directeur d'Outremers 360, média étant depuis devenu une référence de l'actualité ultramarine. Nombreux ont été les hommages rendus au journaliste et éditorialiste, auxquels nous nous joignons aujourd'hui, en y ajoutant nos sincères condoléances à l'adresse de sa famille et de ses proches.

L'ACTION

Un marché paysan à Acoua Ce dimanche, de 7 à 14 heures, le village d'Acoua accueillera son marché paysan au marché couvert, à côté de la mairie. Comme lors de chaque deuxième dimanche du mois, les producteurs locaux déploieront leurs stands pour y proposer les meilleures saveurs de l'île aux parfums. Les fruits, les légumes, les produits artisanaux, les plantes et les produits d'élevage seront ainsi à l'honneur dans la commune du nordouest. De plus, un point de restauration sera mis en place par le groupement de vulgarisation agricole d' Acoua, qui est d'ailleurs en charge de l'organisation régulière de ce marché paysan. L'occasion pour les badauds de sortir, de faire des rencontres, mais aussi de se nourrir sainement en soutenant l'agriculture et la production locales.

LA PHRASE

"Plus on frappera sur la Cimade, plus nous continuerons !" Henry Masson n'est pas disposé à rendre les armes. Le président national de la Cimade était en visite à Mayotte ces derniers jours, afin de pouvoir peser sur le conflit opposant l'antenne mahoraise de l'association aux manifestants du collectif des citoyens. Ces derniers bloquent depuis plusieurs semaines les locaux de la Cimade, en y affichant également des banderoles aux accents populistes, sans que les pouvoirs locaux n'interviennent. "Voir des banderoles avec des mots injurieux comme "escrocs" ou "trafic humain" alors que nous sommes un mouvement qui défend la dignité humaine m'a tout simplement créé un haut-le-cœur", a déclaré Henry Masson à Flash Infos. Le militant associatif a d'ailleurs pu rencontrer le préfet de Mayotte, Thierry Suquet, afin d'évoquer cette situation, mais aussi les opérations de décasages.

ILS FONT L'ACTU

Dupond-Moretti et Ciotti à Mayotte

LA SEMAINE DE PHIL

Pour que les yeux des dirigeants politiques se tournent sur Mayotte, rien de mieux qu'une période électorale, même si les candidats ne prendront pas la peine de venir eux-mêmes. Ce week-end, Valérie Pécresse, candidate Les Républicains, envoie son meilleur ennemi Eric Ciotti sur l'île au lagon. Celui qui est arrivé deuxième lors de la primaire du parti de droite tiendra un meeting à Bandrélé, ce samedi. Le même jour, Éric Dupond-Moretti, ministre de la Justice, viendra défendre la candidature du président sortant, Emmanuel Macron (La République en Marche). À vrai dire, le garde des Sceaux est aussi attendu sur le terrain carcéral. Lors d'une visite de la maison d'arrêt de Majicavo, il devrait annoncer une deuxième prison pour Mayotte. Une rencontre avec des jeunes en difficulté et un dialogue avec les magistrats mahorais seraient également au programme.

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LU DANS LA PRESSE

Chaque semaine, découvrez le regard porté sur l’actualité locale à travers la presse nationale ou régionale

MAYOTTE : LES RELÉGUÉS DE LA RÉPUBLIQUE Le 4 mars 2022, par Guillaume Lefèvre pour Syndicalisme Hebdo. Département français depuis dix ans, Mayotte est en grande souffrance. Alors que le projet de loi relatif au développement accéléré de l’archipel devait être présenté à l’Assemblée nationale en février, celui-ci a été reporté sine die. Au grand dam de l’Union interprofessionnelle (UI) CFDT Mayotte, qui continue d’agir pour améliorer le quotidien des Mahorais et pour la convergence des droits sociaux. « La façon dont Mayotte est traitée par la République est injuste. Les habitants ne doivent plus être considérés comme des citoyens français de seconde zone, tonne Pascal Catto, délégué de l’outremer à la CFDT. Il est temps que l’État prenne ses responsabilités. » Situé dans l’océan Indien, à proximité des Comores, de Madagascar et à huit mille kilomètres de Paris, ce territoire ultramarin est devenu le 101e département français, le 31 mars 2011. Longtemps « collectivité à statut particulier » (lire ci-dessous), l’archipel attend toujours les progrès escomptés par son récent statut. « La situation économique et sociale à Mayotte présente, à tous points de vue, une situation très dégradée par rapport aux autres régions françaises, constate Antoine Math, chercheur à l’Institut de recherches économiques et sociales (Ires), auteur d’une note sur le niveau des dépenses publiques à Mayotte, parue en janvier 20221. Les besoins pour rattraper les retards et des décennies de délaissement, ou même seulement pour garantir des droits équivalents en comparaison des habitants des autres régions, sont très importants. » Si cette situation s’explique aussi par des raisons historiques, elle est surtout liée à un sous-investissement chronique et aux carences des pouvoirs publics métropolitains. D’après les données de l’Insee, le montant des prestations en espèces et les dépenses de services publics par habitant en 2018 s’élèvent à 14586 euros en France métropolitaine contre 5 570 euros à Mayotte. En comparaison, elles sont de 14 575 euros en Guadeloupe, 7859 euros en Guyane, 11983 euros à La Réunion. Un décalage qui se traduit dans la fonction publique hospitalière. En 2018, l’île compte 7,7 agents pour 1000 habitants contre 16,4 en métropole (et 25,8 à Paris). Le code de la Sécurité sociale ne s’applique pas Autre particularité, Mayotte possède un système de protection sociale spécifique. « Le code de la Sécurité sociale ne s’applique pas à Mayotte et, d’une manière générale, les conditions d’attribution et les montants des prestations sont bien plus défavorables », détaille Antoine Math. Avec des conséquences concrètes : si le congé paternité, récemment étendu à vingt-huit jours, s’applique, celui-ci n’est pas indemnisé. Évidemment injuste. Il existe aussi un « RSA Mayotte », qui s’élève à 282,67 euros contre 565,34 euros pour le reste du pays.

Des disparités auxquelles le monde du travail n’échappe pas. Le « Smic Mayotte » s’établit à 7,91 euros brut l’heure contre 10,57 euros en métropole. Et la retraite mensuelle moyenne est de 282,35 euros nets (contre 1331 euros nets en métropole). « S’il n’y a que deux heures de décalage horaire avec Paris, nous avons quarante ans de retard en matière de droits », insiste Mohamed Soihili, délégué syndical à la caisse de Sécurité sociale de Mayotte et trésorier de l’UI. « Le droit du travail est entré en vigueur en 2018, les conventions collectives ne sont souvent pas étendues, les 35 heures s’appliquent seulement depuis 2019 et le conseil de prud’hommes vient tout juste d’être installé », poursuit Pascal Catto. « Quand vous êtes habitant de Mayotte, vous n’avez tout simplement pas les mêmes droits qu’ailleurs dans la République », résume Antoine Math. La vie chère À ces problématiques s’ajoute celle de la vie chère. Alors que 77 % de la population vit en dessous du seuil de pauvreté (contre 14% en France métropolitaine), en 2018 – soit 1 010 euros par mois et par foyer –, l’Insee estimait le panier moyen d’un ménage mahorais 16,7 % plus élevé qu’en métropole. Sur certains produits alimentaires, le différentiel peut atteindre + 42 %. Il est de 35,3 % pour les dépenses en lien avec la communication (téléphonie, internet). Des écarts qui continuent de se creuser, en 2021, avec une augmentation de l’indice des prix à la consommation de 3,1 % à Mayotte contre 2,8 % en moyenne nationale. Des perspectives peu engageantes pour la jeunesse de l’île (les moins de 20 ans représentent 60 % de la population locale), où le taux de chômage s’établit à 28 % en 2020 (contre 8 % à l’échelle nationale). Seuls 32 % des plus de 15 ans sortis du système scolaire possèdent un diplôme qualifiant – contre 72 % en métropole. Parce qu’elle n’accepte pas cet état de fait, la CFDTMayotte a remis au préfet, en mai 2021, dans le cadre de la préparation d’un projet de loi, 25 propositions visant à réduire les inégalités sociales et à améliorer les conditions de vie des salariés et de la population mahoraise. Cellesci concernent le renforcement du dialogue social, le développement de la formation professionnelle, la lutte contre l’insécurité, la lutte contre le chômage des jeunes, l’échec scolaire ou encore le développement économique du territoire. Mais, aujourd’hui, ce projet de loi a du plomb dans l’aile. « L’État doit agir pour renforcer l’accès aux services publics, de l’éducation et de la santé notamment. Il doit agir plus vite pour réduire les inégalités et faire converger les droits sociaux, insiste Salimini Tsigoy de la CFDT-Mayotte. Les Mahorais doivent obtenir les mêmes droits que leurs homologues de métropole et des autres départements ultramarins. »

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PORTRAIT Nora Godeau

ANAËLLE MOUSSA

NOUVELLE MAIRE JEUNE DE MAMOUDZOU

L’installation du nouveau conseil municipal des jeunes (CMJ) de la ville de Mamoudzou s’est tenue samedi matin dernier à la MJC de M’Tsapéré. Au terme d’une élection qui s’est déroulée sur liste, dans des règles légèrement simplifiées par rapport à celle des adultes, c’est finalement la jeune Anaëlle Moussa qui a été élue, venant ainsi prendre la place d’Océane Plaideau, la maire jeune sortante.

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PORTRAIT Ambdilwahedou Soumaïla a assisté à l’élection en prononçant un discours d’introduction pour les encourager.

Les femmes ont décidément la cote chez les jeunes de Mamoudzou ! Après Océane Plaideau, qui a tenu la place de maire pendant son mandat de trois ans au sein de la ville de Mamoudzou, c’est désormais Anaëlle Moussa qui est venue la remplacer. Agée de 16 ans, cette adolescente aux airs studieux est élève de seconde au lycée Younoussa Bamana. Elle a battu son unique adversaire, Dao Onthoimine à 26 voix contre 22. Le seul et unique bulletin nul placé dans l’urne n’aurait de toute façon pas fait la différence, preuve que la jeune fille s’est montré particulièrement convaincante auprès du CMJ. Se présentant comme « dynamique, sociable, engagée et à l’écoute », Anaëlle Moussa saura de toute évidence faire des propositions convaincantes pour améliorer les conditions de vie de la jeunesse de Mamoudzou.

UN PROGRAMME VISANT À RESTAURER LE LIEN SOCIAL Les deux points forts du programme de la nouvelle jeune maire sont les suivants : organiser des sorties sportives et culturelles afin

« d’aider les jeunes en perte de repère » et surtout organiser des ateliers pour les personnes âgées pour « restaurer le lien intergénérationnel ». Un programme surtout axé donc sur le lien social entre les différents habitants de la ville cheflieu qui, il ne faut pas se le cacher, tend à se perdre avec le changement de société opéré par la départementalisation de l’île. Mais Anaëlle a également bien l’intention de poursuivre le programme de la maire sortante laquelle, dans son discours précédant le vote, a insisté sur la nécessité de travailler efficacement sur les problématiques environnementales dans le cadre du projet « Mamoudzou ville durable à l’horizon 2040 ». Anaëlle Moussa travaillera avec les 14 adjoints de sa liste, tous dédiés à des domaines différents de la vie de la commune. Évidemment, le rôle du CMJ est uniquement consultatif, mais il démontre la volonté de Mamoudzou d’intégrer les jeunes à la politique locale et illustre la victoire de la démocratie participative. Permettant aux jeunes habitants de la ville de découvrir le fonctionnement des instances politiques, il a un rôle foncièrement

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Océane Plaideau, la jeune maire sortante (debout à g.), a insisté sur l’importance de continuer à travailler sur l’environnement.

pédagogique. Il permet également d’apporter un souffle de fraîcheur et de nouveauté dans la politique locale en proposant parfois des idées novatrices, mais surtout en permettant aux jeunes d’exprimer leurs réels besoins.

UNE ÉLECTION SOUS L’ÉGIDE DU MAIRE AMBDILWAHEDOU SOUMAÏLA L’installation du nouveau CMJ s’est bien évidemment tenu en présence des principaux élus de la ville et sous l’égide du maire Ambdilwahedou Soumaïla. Ce dernier a

fait un discours en prélude à l’élection pour encourager les jeunes, mais également pour les prévenir que « gérer les affaires d’une collectivité n’est pas une tâche facile ». « Il faut parfois tenir son mandat dans des conditions complexes en étant humble et toujours dans le respect de l’autre. Pour cela, le dialogue est essentiel », a-t-il déclaré tout en précisant que le rôle pédagogique du CMJ était très important dans la mesure où « un jour, vous aurez à gérer les affaires de la commune à notre place ». Gageons que la nouvelle jeune maire et ses 14 adjoints ne manqueront pas de se tenir à la hauteur de la tâche qui leur est désormais impartie !. n

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DOSSIER

SOCIÉTÉ

MAHORAISES Plurielles, les femmes de Mayotte sont cependant toutes les descendantes d'une société matriarcale, marquée par les grandes figures de l'ancrage de Mayotte à l'État français que sont les Chatouilleuses. Seulement, la cheffe de foyer peine à l'être dans les entreprises et les institutions. À l'occasion de la journée internationale des droits des femmes, l'île au lagon célébrait donc ses mères, ses sœurs, cousines et filles, à la faveur de nombreux événements. Une marque de l'intérêt de la population pour l'égalité des genres, mais aussi de la persistance de ce lien de subordination.

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DOSSIER

Raïnat Aliloiffa

CULTURE

ÉCRITURE : LES FEMMES SOUS TOUTES LES FORMES

CHAQUE ANNÉE, À L’OCCASION DE LA JOURNÉE INTERNATIONALE DES DROITS DES FEMMES, LES ACTIONS SE MULTIPLIENT POUR RAPPELER LE CHEMIN PARCOURU AFIN QUE LES FEMMES PUISSENT BÉNÉFICIER DES MÊMES DROITS QUE LES HOMMES. C’EST AUSSI L’OCCASION DE MONTRER QUE LE COMBAT EST LOIN D’ÊTRE FINI, ET QUE LES FEMMES DOIVENT ENCORE SE BATTRE POUR ÊTRE ÉGALES AUX HOMMES. À MAYOTTE CELA EST ENCORE PLUS VRAI PUISQUE LES FEMMES MAHORAISES SONT PARTAGÉES ENTRE TRADITION ET MODERNITÉ. CETTE ANNÉE, LES JEUNES LES ONT MISES À L’HONNEUR À TRAVERS UN CONCOURS D’ÉCRITURE ORGANISÉ PAR L’ACFAV, L'ASSOCIATION DÉPARTEMENTALE POUR LA CONDITION FÉMININE ET AIDE AUX VICTIMES. Écrire pour mettre des mots sur les maux des femmes. Un acte ô combien nécessaire pour certains. Et pour cela l’âge n’a pas d’importance, la cause féminine est un sujet qui préoccupe différentes générations. Du haut de ses 12 ans, Maycha Anli se définit comme une « apprentie femme ». Malgré son jeune âge, elle est consciente que les femmes mahoraises doivent se battre pour être considérées au même titre que les hommes. C’est la raison pour laquelle la jeune fille a écrit un poème. « Soyons ensemble et égaux. Nous ne reflétons pas une, mais plusieurs images.

Il est moment de s’ouvrir et de tourner la page. Nous avons tous des qualités et des faiblesses. Mais nous refusons d’être à la délaisse. Regardez et considérez nous » écrit-elle. Ce texte a permis à Maycha de remporter le premier prix du concours d’écriture organisé par l’association pour la condition féminine et aide aux victimes, à l’occasion de la journée internationale des droits des femmes. « Je suis contente d’avoir été récompensée parce que cela veut dire qu’on n’a pas besoin d’être une adulte pour comprendre tous les problèmes que vivent les femmes », indique Maycha.

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NON À LA PRESSION DE LA SOCIÉTÉ Un autre texte s’est démarqué des autres, celui de Louwaïza Ahmadi qui a écrit sur le célibat. La jeune femme de 22 ans pointe du doigt la pression que subissent les femmes mahoraises dès qu’elles sont en âge de se marier. « Une jeune femme qui est dans la vingtaine et qui n’a pas de vie conjugale est très bizarre selon les normes de X et Y… Il ne devrait pas y avoir de pression sociale et familiale sur quoi que ce soit et encore moins sur ce sujet-là », écrit-elle. Le texte qui reflète à juste titre la réalité des femmes mahoraises a été encensé par le jury et a été primé, une fierté pour son auteure. « Ce

texte est important parce que les femmes sont très souvent confrontées à ce sujet. On leur pose des tas de questions quand elles ne sont pas mariées, autour de moi beaucoup vivent cette pression », explique-t-elle. Le mariage étant considéré comme l’institution la plus importante dans la société mahoraise, les femmes célibataires de l’île n’ont pas fini d’en entendre parler.

UN HOMME À LA PLACE D’UNE FEMME Pour parler de la condition féminine, nul besoin d’être une femme. Les hommes aussi peuvent le faire, à

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DOSSIER

l’exemple de Fahed. Cet étudiant a écrit un poème en se mettant dans la peau d’une femme. « Cette démarche est importante car je veux rendre hommage à toutes les femmes mahoraises. Et pour y arriver, je me suis mis à leur place et j’ai essayé de visualiser ce qu’elles vivent », explique le jeune homme. C’est avec beaucoup de justesse que Fahed décrit la femme mahoraise d’aujourd’hui et de demain, une femme remplie d’ambitions, qui se bat contre les dictats de la société pour réaliser ses rêves. « De jour comme de nuit, je me bats corps et âme pour avoir une place à cette

table ronde. Je sème la paix, je crie au nom des femmes mahoraises l’égalité et la considération chaque seconde », narre l’écrivain en herbe qui a été acclamé par le publique présent à la place de la République ce 8 mars et le jury qui lui a accordé le troisième prix du concours. À seulement 18 ans, Fahed est la preuve vivante que le meilleur allié de la femme est l’homme à condition que celui-ci la traite à sa juste valeur et n’essaye pas de lui retirer ses droits. n

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PHOTOGRAPHIER LES VIOLENCES On ne peut parler des droits des femmes sans parler des violences qu’elles subissent. En 2021, en France, 113 femmes ont succombé sous les coups de leur conjoint ou ex-conjoint. Un chiffre encore trop élevé. C’est la raison pour laquelle la fédération France Victimes et l’association « Les maltraitances moi j’en parle ! » ont organisé une exposition itinérante de 24 photographies à travers tout le pays. Les photos également exposées sur la place de la République par l’ACFAV ce 8 mars montrent des femmes violentées, attachées, apeurées. Le public mahorais a pu les découvrir mais leur a réservé un accueil peu chaleureux. En effet, peu de personnes se sont attardées devant les photos. Une situation qui laisse penser que les violences conjugales sont encore taboues à Mayotte.

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DOSSIER

Axel Nodinot

SOCIÉTÉ

DE FORCE OU DE GRÉ, LA MAHORAISE PREND SA PLACE CE MARDI 8 MARS VOYAIT LES LOCAUX DU CNFPT (CENTRE NATIONAL DE LA FONCTION PUBLIQUE TERRITORIALE) ACCUEILLIR UNE DEMI-JOURNÉE D'ÉCHANGES ET D'ATELIERS SUR L'ÉVOLUTION DE LA FEMME MAHORAISE. CETTE DERNIÈRE, BIEN QUE "NGUIDZO" – "PILIER" – DE LA SOCIÉTÉ, DOIT ENCORE COMPOSER AVEC UN PLAFOND DE VERRE PROFESSIONNEL, AINSI QU'AVEC LES TRADITIONS PARFOIS MISOGYNES DE L'ÎLE AU LAGON. Quand Mylène Joseph Filin, directrice de la délégation mahoraise du CNFPT, arrive à Mayotte en 2018, elle est "sidérée du rôle de la femme, sans laquelle les hommes ne sont rien". Le ton est donné. Sous les regards immortalisés des Chatouilleuses telles que Zaïna Méresse et de femmes mahoraises ayant réussi dans des secteurs majoritairement masculins, le débat sur l'évolution de la femme dans la société mahoraise pouvait débuter. Maenze Mendhy Soalihi, psychologue clinicien, est d'abord revenu sur le long chemin de l'égalité homme-femme, qui n'est d'ailleurs toujours pas arrivé à sa fin. "Avant 1789, la monarchie obéissait à la loi divine, qui ne s'appliquait qu'aux hommes, et légitimait donc de rétrograder la femme, explique-t-il. Les lois révisibles créent des espaces de liberté."

"À LA MAISON QUI EST LE BOSS ? LA FEMME !" Mais ces espaces tardent à éclore : les femmes françaises ont pu aller au lycée en 1880, divorcer en 1884, travailler en 1892, disposer de leur salaire – si elles étaient mariées – en 1916. À Mayotte, M. Mendhy Soalihi tente de prouver que la religion n'est pas le seul frein à l'émancipation des femmes, citant l'une des phrases que Mohammed aurait prononcé avant sa mort : "Je vous demande de vous occuper des femmes et de les traiter avec attention et bienveillance". Une manière de remettre au centre du propos les traditions sociétales mahoraises, cantonnant la femme "au rôle d'épouse, de femme au foyer, au fait d'enfanter".

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Mylène Joseph Filin, directrice du CNFPT à Mayotte.

Là est tout le paradoxe de l'inégalité des genres : Mayotte est une société matriarcale, où les femmes n'ont pourtant pas voix au chapitre. C'est, en substance, ce qui enflamme le cœur de Me Fatima Ousseni, présente lors de cette matinée et profitant de celle-ci pour haranguer le public féminin. "Où est-ce que les hommes habitent ? Chez leurs femmes ! À la maison qui est le boss ? La femme ! Et pourtant, aucune valorisation n'a été faite malgré les Chatouilleuses, elles n'ont eu droit à aucun mandat électif", pointe-t-elle du doigt. L'avocate, éprouvant une "tristesse absolue d'avoir encore à faire des journées des droits des femmes" puisqu'elles signifient que nous sommes encore "dans un rapport de subordination", est ensuite revenue sur son parcours. "J'ai dû mettre les bouchées doubles pour compenser mon absence de testicules, lance-t-elle. Je dois toujours faire plus. Si Mansour [Kamardine, NDLR] rend des conclusions magnégné, on ne va rien lui dire. Moi, je dois constamment flirter avec l'excellence, faire attention aux détails."

LA DOUBLE JOURNÉE ÉPUISE LES MAHORAISES Or, même si les femmes de l'île au lagon s'émancipent par le travail, elles doivent toujours faire face aux traditions, les considérant responsables du foyer. De nombreuses voix, dissonantes mais similaires sur le fond, s'élèvent en ce sens. "On a deux emplois, on ne vit pas, on ne dort pas", déplore une spectatrice. "C'est une double journée, les hommes mahorais sont une charge", tance encore une jeune femme. Une sorte de thérapie collective sans exclusivité aucune, laissant la parole aux hommes. Ceux de l'assistance se défendent d'aider leurs femmes – "Mais c'est normal !", leur répond-on – ou regrettent l'absence de femmes maires à Mayotte en 2022. L'un d'entre eux, après avoir demandé : "Mais est-ce qu'elles le veulent vraiment ?", subit la bronca de l'assistance. "Donnez-nous des portefeuilles, au lieu de nous utiliser pour la représentation politique", assène très justement une jeune fille, dans une ambiance chaleureuse et constructive.

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Fatima Ousseni, avocate au barreau de Mayotte.

Pour donner de l'espoir à ces Mahoraises, les témoignages se succèdent au pupitre, de la part de femmes ayant réussi tant bien que mal à mener leur vie comme elles l'entendaient. Ainsi est résumée la carrière de la directrice générale des services du Conseil départemental, ou celle, vibrante, d'Anduma Attoumani, Miss Coco Mayotte, présente pour l'événement. "Les femmes n'ont pas la même vie qu'hier", déclare-t-elle. Mme Attoumani devait aller aux champs quand son mari travaillait, pour nourrir la famille. Mais, ayant soif de plus, elle s'investit dans une association et apprend un métier, la broderie artisanale. Rapidement, elle ouvre sa boutique, se déplace à Dubaï, à Maurice ou en Thaïlande pour négocier les marchandises. Tout cela en s'occupant de son mari, devenu gravement malade et handicapé.

Un exemple de détermination et de résilience qui inspire un avenir meilleur à Me Ousseni, par l'éducation. "Les représentations commencent dès le plus jeune âge, avec les jouets que l'on donne aux filles et aux garçons, affirme l'avocate. On n'arrive pas à faire société, à comprendre que la femme ne doit pas être seule face aux tâches ménagères et aux enfants, qu'elle peut faire une brillante carrière. Il suffit simplement de déraciner les pensées limitant la place de la femme dans la société. Prendre soin, protéger la femme, c'est l'inférioriser. Je défends des hommes qui frappent leurs femmes, et ils le verbalisent très bien : ils doivent les défendre, elles ne vont pas dans le sens qu'ils souhaiteraient, et c'est pour cela qu'ils s'énervent et en viennent aux coups. Nous ne sommes pas les mêmes, mais nous sommes des humains. Et faire l'humanité, ensemble, doit être la visée." Mesdames, messieurs, à vous de jouer. n

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LE MOT D'AMBDILWAHEDOU SOUMAILA Ambdilwahedou Soumaila, délégué du CNFPT et accessoirement maire de Mamoudzou, a adressé un petit mot, en vidéo, lors de l'événement. Après avoir rappelé les racines des luttes féministes, il a axé son propos sur Mayotte, en se remémorant que ce sont les femmes qui ont acquis des droits sociaux pour tous. Avant de conclure par une citation de René Barjavel : "Les hommes rêvent, se fabriquent des mondes idéaux et des dieux. Les femmes assurent la solidité et la continuité du réel".

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L.G

SPORT

DES OLYMPIADES CONTRE LES VIOLENCES SEXISTES CE JEUDI 10 MARS, L'ASSOCIATION PROFESSION SPORT ET LOISIRS MAYOTTE ORGANISAIT SUR LA PLAGE DE SOHOA LA DEUXIÈME ÉDITION DES MAYOLYMPIADES. UN ÉVÈNEMENT DESTINÉ À SENSIBILISER LES SPORTIFS AUX VIOLENCES SEXISTES, SEXUELLES ET AUX DISCRIMINATIONS ANTI-LGBT. La “course aux définitions”, le “relais du consentement”, le “volley judiciaire”... Autant d’activités ludiques, sportives et éducatives proposées aux jeunes licenciés de Chiconi. Entre 12 et 18 ans, une trentaine d’enfants s'est prêtée au jeu sur le sable de la plage de Sohoa. Consentement, violence, culture du viol… Des thématiques sérieuses que les habitants de la commune du Centre-Ouest ont abordé en se dépensant. “Notre objectif est de sensibiliser les jeunes et de libérer la parole tout en pratiquant une activité sportive”, explique Yasmina Ali, chargée de mission et formatrice sur la lutte contre les violences sexuelles dans le milieu sportif au sein de Profession sport et loisirs Mayotte.

UN ORGANISME UNIQUE À MAYOTTE Depuis le mois de novembre 2020, l'association s’est dotée d’un service de lutte

contre les violences sexistes et sexuelles dans le milieu sportif. Un dispositif financé par la délégation régionale académique à la jeunesse, à l’engagement et aux sports (DRAJES), l’agence régionale de la santé (ARS), la direction régionale aux droits des femmes et à l’égalité entre les femmes et les hommes (DRDFE), la politique de la ville et le Ministère des Outre-Mer. Seul organisme de ce genre à Mayotte, le service peut compter sur l'engagement de Yasmina Ali et de ses collègues, qui agissent quotidiennement pour briser le plafond de verre qui pèse sur le milieu du sport. “Mon rôle est de former les personnels de clubs sportifs. Je réalise de la sensibilisation et j’organise des évènements pour faire tomber les tabous et libérer la parole des victimes”, détaille la chargée de mission. En lien avec l’association pour la condition féminine

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et aide aux victimes (ACFAV) et Mlezi Maoré, l’équipe oriente les personnes nécessitant un suivi vers des professionnels compétents. Un travail de coopération

et une sensibilisation nécessaire pour lutter contre la banalisation d’actes odieux sur les terrains de sport, et partout ailleurs. n

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DOSSIER

Raïnat Aliloiffa

CRÉATION

LA MODE AU FÉMININ IL EST COUTUME DE DIRE QUE LA MODE EST UN UNIVERS DE FEMMES, MAIS FORCE EST DE CONSTATER QUE LA MAJORITÉ DES GRANDS CRÉATEURS DE CE MONDE SONT DES HOMMES. MAYOTTE FAIT EXCEPTION PUISQUE CE SONT LES FEMMES QUI TIENNENT LES RÊNES DANS CE DOMAINE. QU’IL S’AGISSE DE PRÊT-À-PORTER OU DE BIJOUX, ELLES SONT DERRIÈRE LES MARQUES LOCALES ET CERTAINES ONT L’AMBITION DE DEVENIR DES GRANDS NOMS DE LA MODE. Depuis la nuit des temps, les bijoux fabriqués à Mayotte ont toujours été confectionnés par des hommes. Ce métier se transmet en général de père en fils, et c’est encore le cas de nos jours. Depuis deux ans, une jeune femme originaire de Guadeloupe est venue déroger à la règle. Arrivée sur l’île aux parfums en 2020, Marion Molza Abinne a immédiatement crée sa ligne de bijoux en acier inoxydable appelée « Maison Gabrielle », en hommage à sa grand-mère, qui porte le même prénom et qui avait une boîte remplie de bijoux. La jeune femme de 26 ans, formée dans l’hôtellerie de luxe, a su faire de sa passion un métier. « J’ai toujours aimé fabriquer des bijoux. J’ai commencé à en faire pour moimême et puis quand je suis arrivée à Mayotte je me suis ouverte au public et j’ai commencé à vendre », explique-t-elle. Marion achète une partie de sa marchandise puis les revend à Mayotte, mais elle crée aussi elle-même certains de ces articles. Elle met un point d’honneur à travailler uniquement avec de l’acier inoxydable. « Les bijoux faits avec

ce matériau demandent peu d’entretien. On peut aller à la plage avec, on peut se baigner avec, faire du sport, c’est hypoallergenique », souligne la créatrice. Ils sont également plus accessibles, tous les articles sont à moins de 100€. On est bien loin des parures de bijoux que l’on voit lors des grands mariages mahorais, qui coûtent une fortune et qu’on ne peut pas porter au quotidien. « Contrairement à ce que l’on pourrait croire, les Mahoraises aiment les choses plus discrètes qu’elles peuvent porter tous les jours. Beaucoup me disent qu’elles ne peuvent pas mettre les bijoux qu’elles ont reçu lors de leur mariage car ils sont trop imposants », indique la cheffe d’entreprise. Marion a réussi à se frayer un chemin dans la création de bijoux et elle a l’intention de monter d’un cran en travaillant avec de l’or et de l’argent. Qui sait ? Il n’est pas impossible que dans le futur on puisse voir ses créations exposées lors des manzarakas. n

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« LES MAHORAISES AIMENT LES CHOSES PLUS DISCRÈTES QU’ELLES PEUVENT PORTER TOUS LES JOURS » 23

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Photo Franco di Sangro

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CHOUMI CRÉATIONS POUR HABILLER LES FEMMES Dans l’univers de la mode à Mayotte, les stylistes et couturiers ont une place importante et ça, Choumi l’a bien compris. Elle est à la tête de la marque de vêtements Choumi Créations, connue pour son style africain. La modiste a fait ses débuts lorsqu’elle était aux Comores il y a une dizaine d’années. « J’achetais dans les friperies des draps, des rideaux et je les transformais en autre chose. Ça me faisait un bien fou ! », raconte-t-elle. Mais cela reste un simple passe-temps jusqu’à ce qu’elle déménage en Tanzanie. Elle tombe amoureuse des tissus batiks (des tissus teints de manière artisanale à la main) et décide de dessiner ses créations en s’y inspirant. Choumi continue son activité lorsqu’elle arrive à Mayotte, et met un point d’honneur à avoir

des tissus de qualité, la clé de son succès. « Parfois je dessine les motifs de mes tissus et je les fais faire par des artisans en Tanzanie, et parfois je commande les tissus déjà prêts et crée mes modèles… Mes clientes préfèrent payer un peu plus cher et avoir des vêtements de qualité qui durent dans le temps », affirme-t-elle. Le fait-main est donc important pour elle, c’est l’essence même de son métier. « Je fais tout à la main, je ne sais même pas utiliser de machine à coudre ! » lance-t-elle en riant. Aujourd’hui, Choumi Créations propose un style qui lui est propre, et les vêtements, tous faits sur mesure, se vendent comme des petits pains. Le pari est gagné pour la créatrice de mode qui veut faire passer un message à toutes celles qui souhaitent se lancer dans ce domaine. « Ce n’est pas facile, il faut commencer petit à petit et ne pas se décourager. Les choses finissent par se développer. » Elle en est la preuve vivante. n

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Photo Franco di Sangro

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Axel Nodinot

SANTÉ

L'ENDOMÉTRIOSE TOUCHE UNE FEMME SUR DIX LA VEILLE DE LA JOURNÉE DES DROITS DES FEMMES, CE LUNDI 7 MARS, SE TENAIT ÉGALEMENT LA JOURNÉE MONDIALE CONTRE L'ENDOMÉTRIOSE, MALADIE ENCORE TROP PEU CONNUE À MAYOTTE, ALORS QUE NOMBRE DE MAHORAISES EN SOUFFRENT. CAUSANT DES DOULEURS QUI PEUVENT ÊTRE INSOUTENABLES ET PARFOIS L'INFERTILITÉ, ELLE NE BÉNÉFICIE D'AUCUN TRAITEMENT PARTICULIER. MAIS LES DOMMAGES PSYCHOLOGIQUES QU'ELLE OCCASIONNE, EUX, PEUVENT ÊTRE ATTÉNUÉS PAR LA PAROLE.

QU'EST-CE QUE C'EST ? L'endométriose est une maladie inflammatoire. Des tissus, semblables à la muqueuse utérine, sont en fait hors de l'utérus, déplacés par le sang lors des contractions menstruelles. Ces morceaux de muqueuse, au lieu d'être détruits, s'implantent, y compris sur d'autres organes (ovaires, trompes, intestins, vessie…), provoquant des douleurs difficilement soutenables et, dans certains cas, l'infertilité.

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Des douleurs persistantes et incapacitantes pendant les règles, la période d'ovulation ou les rapports sexuels, des probabilités d'infertilité, et de graves dégâts sur la confiance en soi… L'endométriose est un véritable calvaire pour les femmes, qui doivent en plus faire face à un isolement lié à la méconnaissance de la maladie. "Comme c'est une maladie gynécologique, elle est taboue, regrette Élodie Boyer, présidente de l'association réunionnaise Endo Espoir Océan Indien. Les femmes en parlent peu, ou pas, car elles se sentent jugées. C'est dommage qu'on n'en parle pas, beaucoup sont atteintes mais restent dans leur coin." Les chiffres sont en effet alarmants : il passe en moyenne 7 ans entre les premières douleurs et le diagnostic de la maladie, à cause d'un manque de formation des professionnels de santé. "Quand on voit toutes les conséquences de cette maladie, c'est juste scandaleux", réagit Yasmine Candau, présidente d'EndoFrance, première association de lutte contre l'endométriose. "Un jour, une interne en médecine m'a dit qu'elle avait plus appris en m'écoutant une heure que dans ses manuels. Trop de professionnels en exercice passent à côté de la maladie", continue-t-elle. C'est ce qui est arrivée à Karima, enseignante mahoraise. "J'ai des douleurs depuis mes 11 ans, affirme la jeune femme. À 15 ans, je ne trouvais pas ça normal et j'ai donc fait des tests. On m'a dit que c'était un petit kyste qui ne nécessitait pas de soins. Ce n'est que très récemment, à mes 22 ans, que j'ai su que c'était l'endométriose, après une IRM."

DOULEURS PHYSIQUES, SÉQUELLES PSYCHOLOGIQUES Et les conséquences de la maladie peuvent s'avérer invivables. Les femmes en étant atteintes sont 70% à ressentir des douleurs chroniques invalidantes, symbolisées par des nausées, des vertiges, des vomissements, voire des pertes de connaissance. "Pourquoi il a fallu que je sois dans les 10% qui aient cette poisse ?", se demande Karima. "C'est handicapant, surtout qu'on est toute seule à ressentir la douleur, ça ne se voit pas forcément. Le plus dur, c'est pendant les règles. Comme l'endométriose n'est pas reconnue, on est obligée

de venir au travail en étant au plus mal, c'est horrible." La présidente d'EndoFrance, elle, insiste sur les dégâts psychologiques profonds provoqués par la maladie. "L'endométriose fragilise l'intimité et la confiance en soi, on se sent différente des autres, 9 femmes sur 10 autour de nous ne comprennent pas. Elle isole", explique Yasmine Candau. À Mayotte, le poids de la culture traditionnelle, imposant à la femme d'enfanter, est un autre fardeau que subissent celles atteintes d'endométriose, la maladie provoquant chez 30 à 40% des patientes l'infertilité. "J'ai reçu des lettres dans lesquelles on me dit "si je n'arrive pas à enfanter, je serai chassée"", s'émeut Mme Candau. C'est un fait : 80% des femmes atteintes d'endométriose avouent que la maladie a des conséquences sur l'appréciation de leur corps et de leur physique. "C'est une maladie de couple, parce qu'elle prend beaucoup de place, par les douleurs, y compris pendant les rapports sexuels, continue la présidente d'EndoFrance. La maladie peut soit souder un couple, soit le faire exploser complètement. Le conjoint peut croire que c'est une façon détournée de s'éloigner de lui, peut prendre peur de l'ampleur de ce que ça implique au quotidien, et puis il y a tout ce qui est lié à l'infertilité." Élodie Boyer confirme : "Il y a des couples réunionnais pour qui on est arrivé à la rupture, et même au divorce. Certains ont considéré que c'était trop pour eux". Comme si cette double peine, physique et psychologique, ne suffisait pas, aucun traitement particulier n'existe pour l'endométriose. La douleur est endiguable tout au plus, par des traitements hormonaux tels que des pilules contraceptives spéciales, ou des interventions chirurgicales dans de très rares cas. "Je prends sur moi, désespère Karima. Quand j'explique à quelqu'un que j'ai mal, il ne réalise pas forcément. Certains pensent que j'en fais trop, que ce sont des règles normales. Et à Mayotte, il n'y a aucune structure pour en parler. Mais il faut quand même le faire, ça fait du bien d'en parler à son conjoint, à son entourage." Même son de cloche chez les responsables associatives. "La solution c'est d'en parler. Il faut lever tous les tabous de cette maladie invisible, que les gens soient sensibilisés", confirme Yasmine Candau. "Il faut parler, ne pas rester seule", abonde Élodie Boyer. n

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DOSSIER

Abdou Moustoifa

RÉGION

"AUX COMORES, LA FEMME BÉNÉFICIE D’UNE LIBERTÉ CONDITIONNELLE" LA CONSTITUTION QUI CONSACRE LE CARACTÈRE D’ÉQUITÉ ET D’ÉGALITÉ DANS LA NOMINATION AUX POSTES N’A JAMAIS ÉTÉ RESPECTÉE. TOUT COMME DANS LA PLUPART DES INSTANCES DE PRISES DE DÉCISIONS, OÙ LA GENT FÉMININE EST TROP PEU REPRÉSENTÉE, NON PAR MANQUE DE COMPÉTENCES, MAIS JUSTE PARCE QUE LA SOCIÉTÉ EN A DÉCIDÉ AUTREMENT. Mercredi 9 mars, au lendemain de la célébration de la journée internationale des droits des femmes, un médecin a partagé sur son mur Facebook une histoire déchirante qui très vite est devenue virale. C’est celle d’une femme enceinte qui a refusé de se faire transfuser alors qu’elle était atteinte d’une anémie chronique, car son mari s’y était opposé. L’hôpital a essayé de raisonner la patiente et son époux mais rien n’y fera. Le lendemain, elle a rendu l’âme avec le bébé. Il n’en fallait pas plus pour que l’affaire suscite l’émoi. Mais, pour bon nombre d’internautes, le drame résumait tout simplement la place que la société comorienne accordait à la femme, qui doit être aux ordres des hommes. En effet, si on assiste globalement à une amélioration des conditions de la gent

féminine, aux Comores, le statut de la femme n’a véritablement pas évolué au niveau de la société. La femme comorienne est toujours considérée comme inferieure à l’homme. Une perception qui prend racine dans les us et coutumes de l’archipel. La culture comorienne donne plus d’importance à la femme seulement en tant que mère, épouse et responsable du foyer. "Il s’agit d’une domination masculine qui existe déjà ailleurs mais qui a ses spécificités comoriennes. Une emprise qui se transmet de génération en génération. Cela commence par la socialisation familiale, au sein de laquelle on distingue encore l’éducation donnée aux garçons et aux filles", croit savoir Abdoul-Malik Ahmad, sociologue installé en France. Ce constat alarmant est

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Nadia Tourqui. Crédit La gazette des Comores

Hissane Guy. Crédit Al-watwan

perceptible partout, de la cour de récréation à l’école coranique, où l'on apprend aux filles à se faire discrètes, tout en laissant la place aux garçons. Pire encore, en dépit de quelques prérogatives traditionnelles dont elles jouissent, comme la matrilinéarité ou encore l’uxorilocalité [installation du couple chez la femme, NDLR], les hommes sont toujours considérés comme supérieurs socialement. Une discrimination qui prend de l’ampleur au sein de la famille selon Mistoihi Abdillah, docteur en sociologie, puisque même les parents refusent d’accorder le statut de personne entière à la femme comorienne. "Le destin de la fille est toujours entre les mains des parents. Interdiction de faire de longues études, il faut qu’elle s’occupe de son frère. Même dans le choix de son futur époux, parfois elle n’a pas son mot à dire", déplore-t-il.

CHOIX DU MARI Hilma*, la trentaine aujourd’hui, se rappelle encore la bataille qu’elle a dû livrer pour se marier avec le garçon qu’elle aimait. "Feue ma mère était un peu contre car le mari lui paraissait plus jeune que moi. (Rires) Mais j’ai tenu tête. Mon père s’entendait déjà avec ma belle-famille. J’avais aussi le soutien de mes frères. C’est peut-être pour ces raisons que j’ai épousé celui que j’aimais", conclut cette cadre d’une société

de télécommunications, mère de trois enfants. Elle a certes pu s’en sortir mais sa cousine germaine ne peut pas en dire autant. "On lui a imposé d’abord un fiancé mais la relation n'a pas fait long feu. Ce n’est pas tout. On est venu lui donner un mari. Elle s’est finalement résignée", raconte Hilma. Ces exemples ne sont pas des cas isolés, loin s’en faut, bien que d’autres femmes préfèrent se soumettre aux ordres de la famille avec passivité. "Mes parents ont tout fait pour moi. J’accepterai donc le mari qu’ils chercheront pour moi pour les rendre heureux. C’est le minimum. Je sais aussi qu’ils ne me jetteraient jamais dans la gueule du loup", confesse Naima, étudiante de 23 ans. Seul bémol, même après le mariage, les richesses sont souvent réservées aux frères et aux oncles. "Son or et les terrains obtenus pendant son mariage ne lui appartiennent pas. Elle n’a pas le droit de les exploiter, encore moins de les vendre", peste Mistoihi Abdillahi. Alors que d’un point de vue juridique, homme et femme jouissent des mêmes droits, rappelle Nadia Tourqui. Seulement, la femme subit finalement davantage qu’elle ne bénéficie : "Le combat de la femme ne se situe donc pas au niveau des droits mais plutôt dans la perception du rôle de la femme dans la société. Au sein de la famille, par exemple, la femme dispose des biens, et a la charge d’entretenir le foyer même si on ne l’aide pas, d’éduquer les enfants. Mais dès qu’elle veut affirmer son autorité, on lui reproche d’avoir outrepassé ses limites. En

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gros, c’est une liberté conditionnelle, tant qu’elle ne heurte pas l’égo des hommes", résume cette ancienne fonctionnaire des Nations Unies.

RELIGION ET TENUE Pour maintenir ce statut quo, certains s’appuient sur une interprétation contestée d’un verset du coran, le texte sacré des musulmans, selon lequel les hommes seraient supérieurs à la femme. Peu importe son statut, la femme comorienne est appelée à s’occuper des tâches ménagères. "Certaines femmes sont empêchées de travailler pour la simple raison que leurs époux pourraient bien s’occuper d’elles", regrette Mistoihi Abdillahi. Les cas de harcèlements sexuels, des pratiques qui sont répandues dans le monde du travail ou pendant les recrutements, sont rarement signalés devant la justice ou par voie administrative, déplore pour sa part Naila Abbas, présidente régionale d’Efoi (entreprendre au féminin océan indien). Cette emprise se généralise peu à peu et se tend jusqu’aux modes vestimentaires. Il y a deux semaines, une journaliste du quotidien La Gazette des Comores s’est vue refuser l’accès du palais de justice à cause de son pantalon. Le vigile dira qu’il ne faisait que suivre les ordres de ses supérieurs. Dans la sphère politique, là encore, le constat est loin d’être reluisant, malgré la présence de quatre députées au Parlement. "Oui, il y a quelques femmes à des postes importants : la Gouverneure

de l’île, la directrice de la Meck Moroni, l’une des plus importantes institutions financières du pays, ou encore la directrice de l’agence nationale pour la promotion des investissements. Mais les exemples sont peu nombreux. A la tête des sociétés d’État, on ne tient pas compte du sexe", nuance Naila Abbas. Pourtant, les textes législatifs censés favoriser l’inclusion de la femme sont nombreux, en plus des conventions internationales ratifiées par les Comores. Il suffit de jeter un œil sur la loi fondamentale. L’article 61 de la constitution de l’Union des Comores révisée en 2018 précise que "le gouvernement est composé de manière à assurer une représentation juste et équitable des îles, et juste et équitable répartition entre les et hommes et les femmes".

CONSTITUTION RÉVISÉE EN 2018 Oui, la disposition fait bien mention du mot équitable. Mais, dans les faits, cet article n’a jamais été respecté à la lettre. Dans le seul gouvernement nommé par le président Azali Assoumani en août 2021, composé de 13 ministres et deux secrétaires d’État, seule une femme y figure : la ministre de la Santé et de la promotion du genre, Loub Yacout Zaidou. Non seulement, elle est sous représentée dans la scène politique, mais l’intégration de la femme comorienne au processus de développement laisse à désirer. "Les femmes sont très actives dans les mouvements politiques, dans l’élaboration des stratégies, mais demeurent moins visibles sur

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la scène politique dominée par les hommes. Les rares femmes qui dépassent les préjugés sont exposées aux critiques les plus acerbes non pas sur leurs idées mais pour avoir voulu occuper une place qui n’est pas la leur", dénonce Nadia Tourqui. La preuve, rares sont les femmes à qui on confie des postes clés. Même au sein des partis politiques, elles sont reléguées aux fonctions opérationnelles. "Les femmes ne font que de la configuration", tranche sans hésiter le sociologue Mistoihi Abdillahi, qui attend ce jour où une femme deviendra ministre de la Défense ou des affaires Étrangères. Chose qui ne serait pas impossible si la loi Hadjira avait été promulguée. Votée en 2017, cette loi qui institue des mesures de promotion du genre, prévoit un quota de 30% de genre dans les fonctions nominatives dans l’exécutif de l’Union tout comme au niveau des îles. Cette même loi instaure un pourcentage dans la présentation des candidatures aux élections communales et législatives. Malheureusement, elle est actuellement dans les tiroirs. S'il y a un secteur dans lequel la femme comorienne peut se targuer d’avoir su se tailler une place, c’est bien dans le monde de l'entreprise. " La femme occupe une place importante sur le plan économique. Du commerce en passant par les NTIC, l’immobilier jusqu’aux petites industries naissantes. A la tête des PME, on retrouve des femmes entrepreneures et compétentes", fait remarquer Naila Abbas, co-fondatrice de la plateforme de vente en ligne Kuuza Comores, et vice-présidente régionale du Comesa federation of women in busness (COMFWB).

ENTREPRENARIAT

première présidente du conseil d’administration de l’office du tourisme. "On a pu obtenir depuis 2008 la création d’un portefeuille ministériel de l’entreprenariat féminin, qui avait conduit à l’éclosion de femmes entrepreneures. Certaines étaient devenues des sages-femmes", se remémoret-elle encore. Cette femme, qui incarne le visage de l’entreprenariat aux Comores, regrette néanmoins la suppression du ministère de l’entreprenariat. La majorité des entreprises captant les financements des partenaires et des institutions bancaires est détenue par des femmes entrepreneures. "Mais à côté de ces prouesses, les femmes sont rarement appréciées pour leurs compétences. Elles sont soit dans l’ombre d’un mari ou d’un père. Et quand une femme se distingue sans la visibilité d’un homme, très vite on lui prête des amants qui auraient facilité leur ascension", souligne avec amertume Nadia Tourqui, qui ne renie pas que des acquis ont été enregistrés notamment en termes de formations. Ce qu’elle attend désormais, c’est le changement des mentalités. Car ces avancées semblent insuffisantes pour propulser les femmes sur le devant de la scène, en raison du plafond de verre établi et contrôlé par les hommes, pour reprendre les mots d’Abdoul-Malik Ahmad. Ce dernier pense que l’État doit user de ses moyens pour corriger ces inégalités du genre tant dans le secteur public que le privé. "Par exemple, à compétence égale, pour un poste de direction, il faut favoriser temporairement les femmes pour une période de cinq ans", propose-t-il. Quant à Naila Abbas, elle estime qu’on doit sensibiliser les garçons dès le plus jeune âge sur le respect du genre et l’égalité entre hommes et femmes. n

Cette percée a été possible grâce à un plaidoyer fait en faveur du secteur entrepreneurial, selon Hissane Guy,

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DOSSIER

Raïnat Aliloiffa et Axel Nodinot

POLITIQUE

DES FEMMES AU CHARISME DÉPARTEMENTAL AU FIL DU TEMPS, DE PLUS EN PLUS DE FEMMES ACCÈDENT AUX HAUTES RESPONSABILITÉS POLITIQUES, À MAYOTTE COMME DANS LES AUTRES DÉPARTEMENTS DE FRANCE. C'EST LE CAS DES CONSEILLÈRES DÉPARTEMENTALES, BIEN AIDÉES PAR LA PARITÉ OBLIGATOIRE AU SEIN DE L'HÉMICYCLE YOUNOUSSA BAMANA. NOUS NOUS CONCENTRONS CETTE SEMAINE SUR DEUX D'ENTRE ELLES, TAHAMIDA IBRAHIM ET MAYMOUNATI MOUSSA AHAMADI, QUI NE SONT PAS LÀ POUR FAIRE DE LA FIGURATION. TAHAMIDA IBRAHIM, LA POLITIQUE POUR DÉFENDRE SES IDÉES La porte du bureau de Tahamida Ibrahim ne reste pas fermée très longtemps. La vice-présidente du département enchaine les rendez-vous, certains programmés, d’autres de dernière minute, sans jamais rechigner, toujours le sourire aux lèvres. Elle met un point d’honneur à être accessible même si cela lui prend beaucoup d’énergie et de temps. « Je m’efforce de ne pas prendre la grosse tête. Je veux être toujours présente pour la population, être au plus près d’elle et vivre ce que tout le monde vit à Mayotte », déclare-t-elle. Si les questions sociétales sont les sujets de prédilection de la quadragénaire, une fois arrivée au Conseil départemental en 2021, elle change son fusil d’épaule et est désignée vice-présidente chargée des

finances, des affaires européennes et du numérique. Des secteurs bien différents de ceux qu’elle affectionne. Mais la conseillère départementale accepte de relever le défi. « J’ai eu une autre ambition, j’ai voulu aller plus haut et voir autre chose » explique-t-elle. Et pour être au service de la population, Tahamida Ibrahim a parfois besoin de la solidarité des autres politiciens, qu’importe la couleur politique de chacun. Chose pas toujours évidente à Mayotte. « Parfois on a du mal à être ensemble et faire entendre l’intérêt commun, c’est une réelle difficulté. » Une difficulté qui handicape ceux qui veulent continuer à construire le département, mais la vice-présidente ne baisse pas les bras, son amour pour son île étant définitivement plus fort que tout.

LE SOUTIEN INFAILLIBLE DE SA FAMILLE 32•

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Tahamida Ibrahim est issue d’une famille profondément socialiste. Mais, alors qu’elle est en métropole pour ses études, l’étudiante qu’elle était se rapproche des idées dites de droite. Lorsqu’elle décide de s’engager en politique, c’est donc tout naturellement qu’elle s’allie avec les mouvements de droite. « Ce n’était pas facile pour mes parents, il fallait leur expliquer, et ils ont compris. Je suis leur enfant donc ils me soutiennent, peu importe mes idées politiques. Le lien familial est sacré. » Son mari est aussi d’un grand soutien. « Il me conseille, me dit de me protéger et de faire attention, parce qu’en politique on peut tomber de haut », indique-t-elle. Et lorsqu’elle est sujette à des critiques, son entourage fait front pour la défendre, même si Tahamida Ibrahim y fait face en relativisant. « En politique, la critique est toujours là, mais il faut la vivre de manière positive et savoir l’accepter. Quand on me tape dessus, j’encaisse et je vais de l’avant. » La vice-présidente du département essaye de toujours voir le verre à moitié plein, un trait de caractère qui la définit depuis sa jeunesse, alors qu’elle n’était que déléguée de classe. S’engager pour les autres, défendre l’intérêt commun, des convictions qui sont innées chez elle et qui la motivent tous les jours.

MAYMOUNATI MOUSSA AHAMADI, FEMME D’AVENIR Ancienne directrice de la BGE et de la CRESS de Mayotte, celle qui a failli devenir la première présidente du Conseil départemental représente l’avenir politique de l’île au lagon. Dotée d’une volonté hors du commun et de valeurs sociales inaliénables, l’élue de Dzaoudzi-Labattoir compte bien aider les jeunes femmes mahoraises à modeler l’avenir de Mayotte. "Mes deux mamans, celle qui m'a mise au monde et celle qui m'a élevée, nous ont appris à toujours positiver et à se sentir utiles pour les autres, à avancer, se remémore-t-elle. J'ai eu la chance d'avoir des parents qui me disaient que le monde n'allait pas changer tout seul, qu'il fallait agir pour changer les choses. C'est la mentalité de ma famille, qui a milité pour une Mayotte française. J'ai fait mes études en métropole, j'y ai vécu pendant 20 ans, mais ma mère m'a toujours dit : « Vous étudiez ici mais ce n'est pas chez vous ». Pour elle, on prend de la connaissance et des compétences pour en faire profiter son île." La conseillère départementale de Dzaoudzi-Labattoir, loin de se poser en victime de son genre, y voit des forces que les hommes n'ont pas : "Je n'ai rien contre les mecs, mais la femme couteau-suisse, polyvalente, est déjà habituée à toujours pousser plus loin, plus fort. C'est un besoin de reconnaissance, parce qu'il n'y a toujours pas d'équité, en métropole ou à Mayotte, et que nous sommes donc

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obligées de travailler deux fois plus pour peser". En tant que directrice, la jeune femme a dû se forger un caractère pour se faire entendre, pour que l'auditoire d'hommes âgés la considère comme leur égale. "Il a suffi d'ouvrir la bouche, de leur dire ce que j'avais à dire et qu'il fallait m'écouter, affirmet-elle. Si ce territoire donnait une chance à la

matriarchie, nous aurions peut-être d'autres changements." En attendant, la superwoman poursuit son chemin, en se reposant sur son noyau familial, afin d'éviter les critiques visant à la délégitimer. Son modèle reste d'ailleurs sa mère, avant les Zéna Mdéré, Coco

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Djoumoi et autres Mouchoula. Des "femmes de l'ombre, qu'on ne voit pas, qui font partie de ce modèle politique et économique des Chatouilleuses qu'il faudrait faire revenir en le structurant", selon celle qui les succède. À l'image d'une Hélène Pollozec, avec qui elle entretient de bons rapports, Maymounati Moussa Ahamadi représente la nouvelle classe de politiciennes de l'île, fières, libres et engagées. "J'encourage en tout cas toutes les jeunes filles,

au collège, au lycée ou dans les réseaux étudiants, à avoir confiance en elles, à aller au bout de leurs rêves et de leurs projets, et à se dire que tout est possible", conclut-elle avec espoir, l'espoir qu'elle s'efforcera de faire germer chez les jeunes Mahoraises.n

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Rozette Yssouf.

POÉSIE

ROZETTE YSSOUF CÉLÈBRE LA FEMME MAHORAISE

À L'OCCASION DE LA JOURNÉE INTERNATIONALE DES DROITS DES FEMMES, L'ÉCRIVAINE ET PSYCHOLOGUE MAHORAISE ROZETTE YSSOUF A TENU À ADRESSER UN MESSAGE À SES SEMBLABLES. d'imagination pour nous fasciner tous les jours. Et pourtant la femme mahoraise n'est pas si heureuse que cela, elle se cache pour pleurer, elle ne dévoile pas tous ces traumatismes, elle cache ses pires secrets pour paraître forte en société.

Chaque année on fête la femme, un 8 mars en particulier, mais chaque jour, on devrait la fêter pour faire évoluer nos sociétés, pour qu'il y ait une meilleure égalité dans tous les domaines. Les femmes font des études et brillent, elles sont femmes, mères et travaillent en même temps tout en s'investissant maintenant même dans l'univers politique, comment font-elles pour être autant polyvalentes et porter plusieurs casquettes et cela même au détriment de leur santé ? La femme mahoraise je la vois comme ça, une femme multitâche qui ne finit jamais de nous impressionner. Elle est courageuse, force de proposition, elle ne manque pas

À toutes ces femmes qui n'osent dévoiler leur fragilité, ne vous oubliez pas, et sachez demander de l'aide. Ne vous laissez pas embarquer dans une souffrance inimaginable et incontrôlable au point de vous perdre, au point de vouloir choisir la pulsion de la mort à la pulsion de la vie comme dans ce livre Angie, le combat d'une mère, qui retrace les souffrances maternelles d'une jeune femme. Protégez-vous et prenez bien soin de vous avant de vouloir vous occuper des autres. Une femme est un être humain qui a besoin de soutien au lieu de la maltraitance. Elle a besoin d'écoute au lieu du dénigrement. Enfin soyez la femme que vous avez toujours rêvé d'être ! Votre meilleure version. Avec toutes mes pensées lointaines, Rozette Yssouf.

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Chère femme L'univers m'envoie un message pour toi. Il me dit de te dire, Que tu n'es pas seule. Toutes ces épreuves qui sont là, Font de toi, La femme admirable que tu es. Tu es une femme spéciale, Belle, douce et intelligente. Tu n'as rien à envier à personne, Tu es juste magnifique, Et chaque jour, Tu rayonnes le monde, De par ta seule présence. Alors ne t'imagine pas seule, Tu es si aimable, Tu es le symbole de l'amour, Tu nous éblouies de ton courage, De tout ce que tu accomplis au quotidien, Sans l'aide de personne. Tu nous fascines, Car tu n'oses pas demander de l'aide, Et pourtant tu es la première, À vouloir aider les autres. Tu es d'une gentillesse, Et d'une générosité sans faille. Tu es une femme formidable, Une femme de lumière, Une femme de valeur, Une femme sensible, Qui pense plus aux autres Qu'à elle-même. L'univers veut te remercier, Il veut t'envoyer tout le soutien, Tout le réconfort possible, Pour te montrer, Que tu n'es pas seule. Reste brave, Reste exceptionnelle, Reste magique, Reste éblouissante, Reste toi-même. Notre chère princesse, Nous sommes de tout cœur avec toi, Même de loin, Toutes nos pensées t'accompagnent, Et nous prions grandement pour toi. Tu es notre trésor humain, Ne l'oublie pas, Imprime-le et ne doute plus. C'est sincèrement vrai.

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Alexis Duclos

LA REPRÉSENTATION À L'AUBE DE L'ÉLECTION PRÉSIDENTIELLE DES 10 ET 24 AVRIL PROCHAINS, FLASH INFOS ET MAYOTTE HEBDO VOUS DE CERTAINS DE LEURS SOUTIENS MAHORAIS. DURANT CE MOIS SERONT AINSI ABORDÉS Marine Le Pen (Rassemblement national) Ces dernières années, nous avons constaté que beaucoup de promesses électorales ont été faites, mais peu ont été tenues. Élue présidente de la République, Marine Le Pen introduira pour l’avenir une présidence moins sensible aux campagnes. Elle propose un mandat unique d’une durée de sept ans. Pour une représentation juste et pluraliste des forces politiques du pays au sein de l’Assemblée nationale, Marine Le Pen agira pour l'introduction d'une dose de proportionnelle en réformant le mode de scrutin des élections législatives, mais avec une prime majoritaire de 30% pour la liste arrivée en tête. Comme vous le savez, Marine Le Pen a un attachement particulier à la France de l’Outre-mer et à ces Français si éloignés géographiquement de la métropole. Aussi, le projet présidentiel de Marine Le Pen permettra, d’une part, de créer un grand ministère d’État de la France d’Outre-mer et de la politique de la mer. Le rehaussement hiérarchique de ce ministère donnera l’attention et la place méritée dans l’action gouvernementale. Ce ministère animera un comité de pilotage pour poursuivre la départementalisation de Mayotte. D’autre part, le chef de l’État présidera le Conseil de l’Outre-mer, qui se réunira au moins deux fois par an, pour garantir la parfaite mise en ?uvre de la politique menée en faveur de nos compatriotes ultramarins et de leurs territoires. Enfin, les chiffres nous montrent que la criminalité et la délinquance sont d’abord liées à la submersion de l’immigration clandestine. C’est la raison pour laquelle Marine Le Pen se propose de mettre un terme à l’immigration illégale en soumettant aux Français un référendum sur un projet de loi sur l’immigration qui s’appliquera sur toute la France, y compris en Outre-mer. Daniel Zaïdani, président du comité de soutien à Mayotte de la candidate Marine Le Pen.

Un président sortant encore sans programme À un mois de la fin de son mandat, Emmanuel Macron a choisi avec son équipe de ne pas dévoiler l’intégralité de son programme tout de suite. Si des propositions ont été médiatisées ces derniers jours, comme l’annonce du recul de l’âge de la retraite à 65 ans, elles n’arriveront qu’au comptegouttes. Il n’y a donc pas de mesures annoncées concernant la réforme des institutions. Cependant, sur les cinq années de son mandat, le président de la République a partiellement respecté son programme de 2017 par rapport à cela. Ce qui pourrait l’inciter à remettre des propositions sur la table. Il avait ainsi émis l’idée de supprimer un quart des départements, en fusionnant parfois les grandes métropoles avec leurs conseils départementaux. La métropole d'Aix-Marseille-Provence en est un exemple. La vive opposition à ce projet a fait qu’il est resté sans suite. Une baisse d’un tiers du nombre de députés et de sénateurs était aussi évoquée à l’époque, avant de passer à moins 25% dans le cadre de la loi de renouveau de la vie démocratique. Retardée par la crise sanitaire, celle-ci n’a jamais vu le jour. Pendant le mandat d’Emmanuel Macron, les lois pour la confiance dans la vie politique ont été promulguées en septembre 2017. Celles-ci interdisent aux parlementaires ou ministres d’embaucher des membres de leur famille (c’était quelques mois après l’affaire Fillon). De plus, pour éviter les conflits d'intérêts, la possibilité pour un parlementaire d'exercer une activité de conseil à titre individuel est restreinte. Le texte prévoit ainsi que celui qui a commencé une activité de conseil moins de douze mois avant son entrée en fonction ne peut la poursuivre pendant son mandat.


N NATIONALE (1/5) PROPOSENT CHAQUE SEMAINE UN TOUR D'HORIZON DES PROGRAMMES DES CANDIDATS À L'ÉLYSÉE, EN COMPAGNIE LA REPRÉSENTATION NATIONALE, L'ÉDUCATION, L'ÉCONOMIE, LA SÉCURITÉ ET LA SANTÉ. Jean-Luc Mélenchon (La France Insoumise/Union populaire) Le constat initial est que la République laïque, démocratique et sociale est devenue une monarchie dans laquelle une personne impose sa vision et son pouvoir au peuple. L’assemblée des députés est devenue une chambre d’enregistrement et l’expression du peuple est réduite uniquement à un droit de vote pendant qu’une caste d’élites s’arroge le droit de décider de tout, imposant sa volonté au peuple. L’une des mesures phares du programme “Avenir en commun” de l’Union Populaire est l’instauration de la VIème République car nous considérons que la constitution actuelle ne répond plus aux besoins du peuple français. Il découlera de cette nouvelle constitution actée par un référendum une révision totale des institutions. Il s’agira, entre autres, de passer à un régime parlementaire opposé à la concentration du pouvoir dans les mains du président. Elle permettra de donner au peuple un moyen d’action contre les dérives du gouvernement, réaffirmer les trois échelons d’organisation décentralisée (commune, département, région) et mettre fin aux regroupements technocratiques (métropoles, intercommunalités géantes) qui éloignent les citoyens de la prise de décision. Elle rendra effectif le principe de non-cumul de mandats et d’indemnités. Pour le 101ème département français, Mayotte, nous préconisons la suppression de la collectivité unique et son remplacement par deux institutions séparées, l’une départementale et l’autre régionale. Il est nécessaire de redonner à la République ses lettres de noblesse en réaffirmant la philosophie originelle de la loi de 1905, à savoir que l’État ne reconnaît, ne salarie, ni ne subventionne aucun culte. Ainsi, nous exigeons l’abrogation du concordat d’Alsace-Moselle et des statuts spécifiques d’Outre-mer, l’interdiction de la participation des élus aux cérémonies religieuses au titre de leur fonction, le non financement d’édifices religieux et d’établissements confessionnels, garantir la présence d’une école publique dans chaque commune et l’adoption d’une loi garantissant la liberté d’expression et la probité des médias publics vis-à-vis de l’information. Comité de soutien mahorais de Jean-Luc Mélenchon

Valérie Pécresse (Les Républicains) Plusieurs mesures liées aux institutions figurent déjà sur le site de la candidate des Républicains, Valérie Pécresse. Elle souhaite ainsi mettre en place une conférence sociale annuelle. L’idée est de réunir les syndicats et les entreprises à chaque printemps. Dans le même état d’esprit, elle veut rencontrer, avec le premier ministre, au moins trois fois par an les présidents de région, et au moins une fois par an les présidents de département. Toujours dans ce même schéma, elle compte se rendre annuellement au congrès des maires. Concernant les pouvoirs exécutifs et législatifs, la candidate de la droite tient un discours à l’opposé de pas mal de ses concurrents. Elle est pour limiter le pouvoir législatif du gouvernement et le pouvoir d’amendement du Parlement aux grands principes. La présidente de la région Ile-de-France est favorable également à une plus grande autonomie de ce type de collectivité. Si elle est élue, les conseils régionaux pourraient se voir confier une marge de man?uvre concernant Pôle emploi, les missions locales, la rénovation urbaine ou la présidence des agences régionales de santé (ARS). En même temps que ces “super-régions”, Valérie Pécresse souhaite renforcer l’autonomie des collectivités locales en matière de fiscalité et confier aux départements la gestion du secteur médico-social. À plus petite échelle, les mairies pourront conserver la gestion de l'eau et de l'assainissement, des compétences confiées d’habitude aux intercommunalités.


DES CANDIDATS TOUS FAVORABLES À PLUS DE DÉMOCRATIE DIRECTE

Il reste un mois avant d’aller de se rendre aux urnes pour le premier tour des élections présidentielles. Et si certains candidats bénéficient de comités de soutien sur Mayotte pour faire campagne, d’autres n’ont pas cette chance. Tour d’horizon de ce qu’ils proposent eux aussi pour réformer nos institutions. À l’aube d’une élection présidentielle, il est toujours insolite d’avoir des partis qui prônent la suppression de la fonction de président de la République. Pourtant, c’est le cas encore cette année avec Philippe Poutou (Nouveau parti anticapitaliste), qui a obtenu in extremis ses 500 parrainages. Favorable à l’abolition de la constitution de la Ve République, il promet aussi la suppression pure et simple du Sénat. Le candidat du parti communiste,

Fabien Roussel, veut aussi changer radicalement le rôle du président, qui serait limité “à la représentation” et ne serait plus élu au suffrage universel direct. La mission de nommer le gouvernement reviendrait alors à l’Assemblée nationale. Le mode de scrutin pour les législatives est également de plus en plus contesté. Celui à la proportionnelle, où chaque camp aurait des représentants en fonction de son pourcentage de voix, est défendu par Philippe Poutou, Yannick Jadot (Les Verts) et Jean Lassalle (Résistons !). Dans un registre similaire, Anne Hidalgo (Parti socialiste) et Nicolas Dupont-Aignan (Debout la France) proposent une proportionnelle “à l’allemande”. Une partie des députés serait alors élue selon ce type de scrutin.

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UNE CAMPAGNE POUR LE RIC Avec la crise des gilets jaunes, il y a un point sur lequel il est difficile de faire l’impasse dorénavant, le référendum d’initiative citoyenne (RIC). Ce processus repose sur une idée simple. À tout moment, sous l’impulsion d’un nombre suffisant de signatures de Français, un référendum serait immédiatement déclenché pour répondre à une question majeure. Beaucoup de candidats cette année y sont favorables. C'est le cas de Nicolas Dupont-Aignan, Jean Lassalle, Fabien Roussel, Yannick Jadot, Anne Hidalgo ou encore Philippe Poutou. Eric Zemmour (Reconquête !) défend aussi l’idée d’un référendum, mais préfère qu’il soit de l’initiative du président de la République. Enfin, afin de renforcer la confiance envers les élus, plusieurs partis défendent un casier vierge (Debout la

France), une interdiction de se présenter si condamnation à la haine raciale ou malversation financière (Parti communiste) ou la révocabilité des élus (Nouveau parti anticapitaliste). Appliquée depuis 2014, l’interdiction du cumul des mandats n’est pas remise en cause par les candidats, excepté Eric Zemmour. Le candidat d’extrême-droite milite pour le retour des députés-maires, garantie selon lui “d’un ancrage local”. Nathalie Arthaud (Lutte ouvrière), dont le programme est surtout axé sur l’économie, a peu de mesures réformant les institutions, hormis la création des États-Unis socialistes d’Europe, première étape pour arriver “à la disparition des frontières”, l’un de ses objectifs.

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R.G

LES PROJETS POUR UNE VANILLE FRANÇAISE FLEURISSENT À PARIS En marge du salon international de l’agriculture, les acteurs de la vanille française se sont réunis pour penser ensemble l’avenir de leur filière. Une idée ? Se fédérer et porter leur voix au niveau national, en créant une fédération des vanilles françaises. Mayotte, Tahiti, La Réunion, la Guadeloupe, la Guyane… Autant de territoires français producteurs de vanille. En 2020, l’association Saveurs et Senteurs de Mayotte avait été conviée à la première conférence des vanilles françaises organisée au ministère des Outre-mer. Réunis par Fausto Bouchereau, grand passionné de l’or noir et créateur du site de vente en ligne de vanille, Mohea, les vaniliculteurs ont pu se retrouver pour une nouvelle édition en 2022. “Nous étions tous ravis de nous rencontrer en 2020, mais nous étions frustrés de ne pas pouvoir collaborer davantage”, affirme Julie Moutet, coordinatrice de l'association Saveurs et Senteurs de Mayotte. Pour continuer à faire germer ensemble des projets d'envergure, les professionnels du secteur ont alors décidé de s’associer et de créer la fédération des vanilles françaises.

Un secteur concurrentiel Si Madagascar assure environ 80% de

la production mondiale de vanille, les millésimes français n’ont rien à envier à leur concurrente. Arômes complexes, terroir et savoir-faire, les vanilles ultramarines constituent un patrimoine riche qui mérite d’être valorisé. “Nous avons décidé de laisser de côté la compétition entre nos vanilles et de promouvoir la vanille française en acceptant leurs différences mais aussi leur complémentarité”, se réjouit Julie Moutet. Sous le signe de l'entraide, la fédération des vanilles françaises devrait permettre aux petits et grands producteurs de partager leurs problématiques et de porter leur voix au niveau national.

Des projets communs Disséminées aux quatre coins du globe, les structures souhaitent organiser chaque année des rencontres au sein des départements et territoires ultramarins qui produisent la précieuse épice. “Nous avons émis une volonté de travailler ensemble

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dans un secteur où la coopération est trop souvent délaissée au profit d’enjeux financiers”, explique l’ingénieure agronome. Soutenus par Marjorie Duroi, chargée de mission au bureau des politiques agricoles, rurales et maritimes au ministère des Outre-mer, les vaniliculteurs espèrent pouvoir valoriser leur travail et pourquoi pas labelliser les vanilles françaises. “Nous souhaitons intégrer tous les DOMs et les TOMs. L’objectif est d’avoir une voix par territoire et une présidence

tournante chaque année”, détaille la coordinatrice. Soucieux de créer un espace de discussion accessible et ouvert à tous les Ultramarins, les acteurs de la vanille veulent voir naître leur prochaine association au cours de l’année 2022. Un premier trimestre riche en saveurs et en projets pour la vanille donc et une fierté pour l’équipe mahoraise toujours sur son petit nuage à la suite de sa récompense au concours général agricole.n

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LITTÉRATURE

LISEZ MAYOTTE

LES FEMMES COMPTENT ET SONT CONTÉES AGRÉGÉ DE LETTRES MODERNES ET DOCTEUR EN LITTÉRATURES FRANCOPHONES, CHRISTOPHE COSKER EST L’AUTEUR DE NOMBREUX OUVRAGES DE RÉFÉRENCE SUR LA LITTÉRATURE DE L’ÎLE AUX PARFUMS, NOTAMMENT UNE PETITE HISTOIRE DES LETTRES FRANCOPHONES À MAYOTTE (2015) DONT IL REPREND, APPROFONDIT ET ACTUALISE, DANS CETTE CHRONIQUE LITTÉRAIRE, LA MATIÈRE.

Sophie Blanchy, NoëlJacques Gueunier, Zaharia Soilihi, La maison de la mère, Contes de l'île de Mayotte, éditions L'Harmattan, 1993.

Dans les contes retenus, parmi une ample moisson, pour ce petit recueil, tout, ou presque, tourne autour du mariage – une entreprise si nécessaire et pourtant si inquiétante aussi par certains côtés – et des femmes, des mères sur qui repose au fond la réussite ou l'échec d'une vie…

La littérature de Mayotte présente un carrefour de genres et celui sur lequel nous souhaitons attirer l’attention du lecteur aujourd’hui est le conte. Ce dernier apparaît comme une forme littéraire orale endogène particulièrement importante dans la culture de Mayotte. Après Contes mahorais (1978) et Contes comoriens en dialecte malgache de l’île de Mayotte (1990), le troisième recueil de contes édité relativement à Mayotte s’intitule La Maison de la mère (1993) et résulte de la collaboration de Sophie Blanchy, l’auteur de La Vie quotidienne à Mayotte (1990) et du Dictionnaire mahorais/français-français mahorais (1996), Zaharia Soilihi, l’épouse de Youssouf Saïd, auteur de Mayotte : légendes et histoires drôles (1986) et Noël Jacques Gueunier, éditeur scientifique du recueil précédent. Ainsi commence à apparaître un réseau littéraire propre à Mayotte. Le facteur d’unité du recueil de contes est présenté comme suit : « Le premier conte, la Maison de la Mère, donne son titre au recueil (mais à vrai dire les contes mahorais n’ont pas de titre ; on se les remémore le plus souvent grâce à leur chant, s’ils en comportent un ; les titres donnés ici ont donc été attribués artificiellement, pour les besoins du passage à l’écrit). Il a pour personnage principal justement cette maison, lieu de toute sécurité matérielle et psychologique : bien qu’à Mayotte chaque personne appartienne aussi bien à la famille de son père qu’à celle de sa mère, c’est le côté de la mère qui seul représente l’enracinement, la sécurité. L’orpheline, spoliée de sa maison maternelle par la malignité d’une voisine, est restaurée finalement dans son héritage intact grâce à l’appui providentiel d’une mère-poisson.

Elle a alors, comme toute femme qui se respecte, sa maison à elle, où viendra la rejoindre un mari – le fils d’un roi, évidemment. » (p. 6) L’ouvrage, illustré par Gilles Joisseaux, présente une scénographie complexe étant donné que chacun des contes est présenté sous trois formes différentes. La première est celle en shimaore ou shibushi – le malgache de Mayotte – d’abord en alphabet arabe puis en alphabet latin. On trouve enfin le texte en traduction française. Le recueil se compose de six contes. Les trois premiers sont en mahorais : Inyumba ya mama – La Maison de la mère –, Papa Dadi – L’Aïeule requin – Vovoo mutseha na Rambuu mulaga – La noix d’arec qui rit et la feuille de bétel qui pleure. Les trois suivants sont en malgache : tabu kurunga angaya, mukia kurudi kula wali wangu – Tourment va cueillir des fleurs, et ma queue revient par derrière me manger mon riz -, Fondy nikozany – Le Maître pris en faute – et Anao atoy ariny, kapila anivo – Mets-toi ici, moi là, et l’assiette entre nous deux. Les contes font, selon nous, partie des moyens les plus savoureux de connaître Mayotte. Ils présentent d’abord au lecteur venu d’ailleurs un air d’exotisme et de mystère. Mais il convient de les prendre au sérieux, parce qu’ils sont un genre pédagogique qui contribue à la formation de l’enfant à Mayotte, pour mieux comprendre cette société. Dans le présent recueil, on comprend l’importance de la femme, en raison d’: « une organisation de parenté qui donne aux femmes un rôle central comme garantes de la stabilité et de la continuité de la famille. Aussi beaucoup

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de contes, comme ceux qui ont été retenus, parmi une ample moisson, pour ce petit recueil, tournent-ils autour du mariage et du rôle des femmes. » (p. 6) On découvre ou redécouvre ici à l’écrit des textes qui ont déjà été entendus et qui reviendront sous une forme ou une autre, dans les recueils suivants. Le conte met souvent en contact le monde naturel et le monde surnaturel, les djins étant associés à l’eau à Mayotte. Dans les contes, les enfants sont souvent abandonnés puis retrouvés ; ils affrontent des épreuves et découvrent qui ils sont. Dans le premier conte du recueil, celui qui donne son titre au livre, une enfant orpheline ayant dilapidé son bien fait un détour par le monde des djinns avant de revenir occuper sa place dans le monde humain. C’est celui-là en particulier que nous incitons le lecteur à lire, mais aussi tous ceux qui suivent : « Au coucher du soleil, nous irons voir, je te montrerai l’endroit où vivait cette fille, l’endroit où se trouvait la maison de sa

mère. Au coucher du soleil, ils partirent tous les deux, ils traversèrent le village, car c’était à la limite extérieure, et en arrivant sur les lieux ils trouvèrent un jaquier brisé, des cocotiers dépouillés de leurs palmes et qui n’avaient plus rien, des manguiers tout coupés et cassés car les gens y attachaient leurs cabris… Et la maison était complètement détruite, il n’y en avait plus aucune trace… » (p. 30) Mais la maison sera reconstruite, plus belle encore, et l’histoire se terminera bien. Ainsi La Maison de la mère satisfera-t-elle les féministes par l’importance donnée aux filles et aux femmes, mais peut-être moins les spécialistes des études de genre réfléchissant sur le caractère stéréotypé des activités dévolues à l’homme ou à la femme.

Christophe Cosker

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MAGAZINE D’INFORMATION NUMÉRIQUE HEBDOMADAIRE Edité par la SARL Somapresse au capital de 20 000 euros 7, rue Salamani Cavani M’tsapéré BP 60 - 97600 Mamoudzou Tél. : 0269 61 20 04 contact@mayottehebdo.com Directeur de la publication Laurent Canavate canavate.laurent@somapresse.com Directeur de la rédaction Mohamed El Mounir dit “Soldat” 0639 69 13 38 soldat@mayottehebdo.com Rédacteur en chef Axel Nodinot

# 990

Couverture :

Société, mahoraises

Journalistes Axel Nodinot Romain Guille Raïnat Aliloiffa Lise Gaeta Alexis Duclos Direction artistique Franco di Sangro Graphistes/Maquettistes Olivier Baron, Franco di Sangro Commerciaux Cédric Denaud, Murielle Turlan Comptabilité Catherine Chiggiato comptabilite@somapresse.com Première parution Vendredi 31 mars 2000 ISSN : 1288 - 1716 RCS : n° 9757/2000 N° de Siret : 024 061 970 000 18 N°CPPAP : 0121 I 92960 Site internet www.mayottehebdo.com



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