Paroles d'un compte en suspens 3

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Paroles d’un compte erratique 3


Clair Charpentier michel lombardo









Paroles d’un compte erratique

il dort sur mon ventre il me tient chaud la douleur s’apaise un instant

moineaux intrépides ils survolent le jardin mais la peur aux trousses

diamant dans le ciel le soleil est trop brillant pour un mois d’octobre

14 octobre 2021 presqu’un ciel d’automne le vent joue avec les nues qui fuient vers le sud

je cherche des mots mais au fond de la besace il n'y a qu'un point

posé sur la table il s’endort tout doucement comme une potiche

dans mes veines coule un sang qui n'a pas vieilli -hélas pour le reste...

je ne saurais dire si c'est le froid qui m'assaille ou s'il dort en moi

assis sur le banc j'ai laissé passer les rêves comme un train qu'on manque

12 octobre 2021

cette branche morte qui pend comme un bras cassé -signe de déroute

il fait froid ce soir mon cœur puise des frissons plus vieux que le monde

il dort à midi et la nuit devient de glace -noctambule octobre

le chat est rentré il a laissé sous l'auvent la nuit et octobre

15 octobre 2021 fruits de pyracanthes y en aura-t-il assez pour passer l’hiver

printemps en octobre au soleil les pâquerettes se sourient dans l'herbe

13 octobre 2021

à l’abri des fleurs qui ont poussé cet octobre il va s’endormir

le soleil qui brille dans les feuilles de laurier ne craint pas le vent

au porte-manteau j'ai accroché la fatigue et un soir d'automne

il dort puissamment allongé sur mes deux cuisses on dirait qu’il ronfle

seuil du crépuscule un nuage un peu honteux a le rouge aux joues

cœur qui batifole il sait bien que le printemps s'est perdu en route

au bord de la haie le chant secret d'un oiseau se pend à mon cœur

le vieux cerisier qui dominait le verger a perdu ses feuilles

16 octobre 2021 64


Paroles d’un compte erratique

le ciel qui moutonne au dessus de la garrigue laisse les nues paitre

les pieds sur la table dans la pénombre insoluble je refais le monde

aiguilles de pin qui recouvrent le gravier pas d’inconvénients

journée lumineuse l'ombre m'a accompagné en haut du jardin

énigme béante là où mes pensées se heurtent au mur du néant

riant au soleil aujourd'hui les pâquerettes tenaient un colloque

haie de lauriers-roses -toutes les fleurs sont tombées aux soupirs d'octobre

19 octobre 2021 des lambeaux de brume dérivent sur les collines bercés par le vent

d'un rêve fugace intriqués de souvenirs il ne reste rien

17 octobre 2021

posé sur l’antenne un petit oiseau hardi nargue le matou

matinée d’octobre quelques fleurs encore en pot les fourmis s’activent

j'ai glissé dans l'herbe humide de rosée claire -mon chat a souri

il passe le mur pour aller chez la voisine d’un air innocent

fleurs de marjolaine chaque pas que j'accomplis froisse leur parfum

entre deux nuages le soleil conte aux collines ses rayons d'automne

tiédeur de la nuit mais sous l'auvent je frissonne sans savoir pourquoi

au fond du couloir entre poussière et pénombre des rêves d'enfant

20 octobre 2021 tu pensais rester un seul instant enfermé mais un mur t'encercle

la nuit me traverse une écharde dans le corps noire et vénéneuse

18 octobre 2021

lever tous les deux nous ne savions pas encore ce qui arrivait

le soleil se lève rouge au-dessus des collines et chasse les nues

la nuit par pudeur s'est cachée sous les nuages -elle va pleurer

mon chat comme moi attend que se manifeste la dame qui pique

vitre translucide on distingue sans les voir des fantômes grêles 65


Paroles d’un compte erratique

des tubes encore relient tes entrailles sales à du sel amer

nuage croché à la cime des grands arbres dans un ciel d’azur

21 octobre 2021

au bord du donjon il attends que je lui donne une friandise

ancienne photo de mon chat qui se demande où est sa gamelle

maîtresse du jeu j'ai laissé aller sa barque jusqu'à son naufrage

le jour s'est levé soulevant les lourds nuages des collines sombres

ainsi va la vie chaque jour tombe une brique ou un bout de plâtre

le froid m'accompagne jusqu'au fond de mes pensées que je croyais vives

dans le miroir sale je regarde mon visage et j'ai soudain froid

dans l'épaisse brume où la lune se dilue les étoiles sourdes

24 octobre 2021

mètre après mètre j'ai pu traîner hagard laissant dans la poussière des traces de sang

dans le ciel limpide un oiseau ou une tache poursuit un tiret posé sur le plan il détourne le regard gorgé d’impatience

22 octobre 2021 le ciel qui m’accueille ce matin à mon retour du bleu au paupières

tiédeur de la nuit et cette écharpe de laine qui gratte mon cou

hier au soir le chat est resté tout près de moi et s’est endormi

les perruches vertes dans les chênes verts encore se voient à leurs cris

de la marjolaine et de grands brins de fenouil noyés de parfum

un feuillet froissé des mots aigres raturés une main qui tremble

un spasme brutal le verre m'a échappé -mille éclats d'étoiles

25 octobre 2021 ciel un peu bizarre capturé par l’objectif qui perd ses lentilles

des tessons de vases au milieu des fleurs meurtries -un rêve brisé

il entrouvre un œil seulement pour s’assurer que je suis bien là

23 octobre 2021 66


Paroles d’un compte erratique

cauchemars violents -depuis je scrute mon lit d'un air soupçonneux

posé sur le banc le papillon roux se prend pour la feuille morte

la nuit se fait froide et me regarde de haut -sous l'auvent je tremble

28 octobre 2021 les plantes en pots — elles fleurissent encore pour narguer l’automne

octobre s'achève et dans le jardin pourtant mille fleurs sauvages

soleil dans les yeux — ses pupilles rétrécies rayent leur topaze

26 octobre 2021 les quelques nuages qui ont obstrue le ciel se sont effacés

herbe déjà haute -au milieu les pâquerettes sourient à l'automne

il s’est allongé sur la table protégé par le dos des chaises

le ciel s'est couvert d'un épais manteau de laine -les étoiles boudent

sur ma lassitude j'ai étendu un linceul et fermé les yeux

lisant sous les chênes aujourd'hui j'aurai un gland pour marquer la page

étroite lucarne qui éloigne de la nuit -buée sur la vitre

29 octobre 2021 aussi vide et creux qu'un vieux puits abandonné je pleure mon eau

les fleurs se referment -bientôt il n'y aura plus que l'ombre et l'hiver

sous le ciel d'orage un arbre mort s'est figé -impatiente foudre

27 octobre 2021 la dernière fleur dans l’épaisseur du laurier il ne reste qu’elle

un tapis de fleurs a recouvert le verger -regard parfumé

le genévrier lui sert d’abri au soleil dans les fleurs des prés

30 octobre 2021 entre les averses le ciel demeure inchangé — il fait grise mine

musique d'octobre -les glands craquent sous mes pas et les feuilles bruissent

il faut le sécher après sa brève sortie — jardin sous la pluie

un petit oiseau s'aventure sous l'auvent -éclair de lumière 67


Paroles d’un compte erratique

toute la journée il a plu sur un jardin sans mélancolie

sous mon parapluie je piétine le gravier qui frissonne à peine

crépuscule gris -les pâquerettes aussi ferment les volets

02 novembre 2021 un ramier s’élance — une flèche dans le vent défie les nuages

la pluie a cessé mais les arbres jouent encore leurs dernières gouttes

soleil revenu son visage resplendit d’une ardente aura

31 octobre 2021 le ciel se découvre et laisse entrevoir au vent un bout de lumière

fraîcheur de novembre qui subitement prédit les heurts de l'hiver

dans les pâquerettes il essaie de se cacher mais n’y parvient pas

la nuit est tombée -le chat va à sa rencontre en cueillir les bruits

tout ce que l'on garde au long d'une longue vie ne nous suis jamais

ces bruits dans ma tête -de mon cœur qui bat en traître les échos sournois

la plume indécise -cette douleur au poignet qui revient sans cesse

03 novembre 2021

mon chat égaré dans cette étrange journée qui ne finit pas

un ciel hésitant malgré tout s’est emparé des vertes collines

01 novembre 2021

au bord du sommeil il jette un regard furtif sur mon objectif

ce matin il pleut la fenêtre ouverte encore prise de frissons

un petit vent aigre frissonne dans le feuillage -prélude nocturne

devant ses gamelles il médite un regard flou posé sur le sol

rentré de l'auvent la froidure habite encore ma peau de vieillard

dans le soir qui vient une odeur de pluie persiste à hanter les tombes

mon ombre en silence vient de reposer son verre près de la bouteille

il pleut aujourd'hui les feuilles de marronnier collent aux semelles

04 novembre 2021 68


Paroles d’un compte erratique

dans le ciel limpide les nuages façonnés par un vent taquin

cœur qui tambourine le froid traverse mes tempes dans un train d'acier

sur le toit pentu il ne perd rien de la vue offerte à ses yeux

j'avais dans les yeux son sourire d'écolière et j'étais heureux

laisser en obole âmes et corps inutiles au néant suprême

d'un regard humide je relisais cette lettre à l'encre tranchante

novembre intrépide où les nuits claquent les dents d'un froid intérieur

07 novembre 2021 sur le petit pré les pâquerettes fermées semblent bien fragiles

ce livre m'ennuie -je ne marque pas la page de mes souvenirs

05 novembre 2021

l’oreille abîmée par on ne sait pas trop quoi ne l’altère pas

drôle de lumière mais le yucca va fleurir encore une fois

un peu cabossée la plume reste en attente d'un printemps peut-être

contrejour sinistre un éclair dans son œil gauche pour marquer le temps

mes pas hésitants sous la voûte verte encore font gémir les glands

on entendrait presque les étoiles se briser dans la nuit glaciale

regain de l'automne -l'herbe a encore grandi et atteint l'hiver

auprès de mon ombre dans le fauteuil qui murmure je reprends confiance

08 novembre 2021 les nues côtelées roulées par un vent léger traversent le ciel

un cœur sans passion comme ce ciel sans nuages -une vie bien terne

06 novembre 2021

la toilette encore qui l’occupe un long moment avant le sommeil

le ciel dégagé semble conserver en lui une nuit d’hiver

vieille chose inerte je suis dans mes souvenirs une pente raide

un bout de toilette dans la pénombre complice avant de dormir

automne le soir je referme ma coquille et clos les volets 69


Paroles d’un compte erratique

froid mélancolique -une étoile s'est brisée sous mon regard triste

le ciel se dégage de son haillon de nuages lourd et encombrant

09 novembre 2021

dans les pâquerettes il se prend à rêver d’herbe et mâchouille un brin

dans les pyracanthes nourriture des oiseaux et leur forteresse

journée sans lumière et sans froidure non plus — tiédeur de l'automne

mon chat se confond dans la pénombre irréelle d’un soir de novembre

feuilles de figuier — novembre les teinte en jaune pour freiner leur chute

de tout temps ma vie a buté sur les cahots d'une route oblique

ce matin courage — j'ai taillé les lauriers-roses du printemps prochain

novembre insolite -ce soir sous l'auvent obscur j'ai ôté ma laine

12 novembre 2021 entre ombre et lumière le soleil hésite encore la pluie pour arbitre

étoiles cachées par de larges pans de brume -je me sens bien seul

10 novembre 2021

que veut-il me dire avec sa jambe levée est-ce un signe obscène

ciel d’apocalypse les nuages se dévorent et il ne pleut pas

la pluie du matin cède la place au soleil -suprême élégance

le temps à l’orage ne l’incite pas vraiment à sortir du lit

six heures du soir -j'ai buté dans la nuit noire sur un souvenir

sur la verrière la colère de la pluie me mord les oreilles

le nom des étoiles me sera toujours obscur mais j'ai leur lumière

assis sous l'auvent des embruns d'eau presque tiède courent sous mon cou

13 novembre 2021 rougeoyant encore du spectacle des nuages une aube s’attarde

rentré sans dommage j'accompagne du fauteuil la douce pénombre

le carreau de terre offre un cadre séduisant au chat attentif

11 novembre 2021 70


Paroles d’un compte erratique

entre ailleurs et là ce soir mon cœur vagabonde en pulsations grasses

j'hésite à franchir l'allée de dalles glissantes -la pluie m'intimide

d'une main tremblante je me cramponne à ce verre rempli de tempêtes

16 novembre 2021 depuis la fenêtre cette vision souriante d’un bel écureuil

novembre est trop tiède à peine humide et trop doux -suis-je complotiste

soleil matinal — mon chat vient en savourer le moindre rayon

14 novembre 2021 dans un matin flou le ciel même et les collines brouillés dans ma tête

au fond de mon sac j'ai pioché sans le savoir le plus mauvais pion

je ne savais pas que mon doux minou aimait le pois chiche en boite

soleil aujourd'hui -mais le téléphone rend un bruit gris et morne

à peine novembre et déjà les sapins piaffent aux hypermarchés

perdu sous l'auvent où je ne reconnais plus l'ombre du jardin

ronron de la pompe la chaleur rampe sans force jusqu'à mon fauteuil

17 novembre 2021

averse soudaine -le matou s'est réfugié auprès de mon ombre

le ciel s’est couvert depuis hier soir il fait gris dans ma tête aussi

15 novembre 2021

il semble soucieux et au milieu du salon il reste immobile

il pleut ce matin une bruine de novembre une gaze fine

toute la journée à regarder le plafond -ce vent dans ma tête

il est camouflé sur le nouveau couvre-lit paré pour la sieste

à travers la vitre je souris des petits piafs dans les lauriers-tins

toute la journée il a plu sur mes vieux os suintant de rouille

le froid revenu sous l'auvent emmitouflé de mes souvenirs

perclus de fatigue annulé le rendez-vous chez le spécialiste

18 novembre 2021 71


Paroles d’un compte erratique

Garlaban au loin derrière le grand pin rocher impassible

d'un jardin lointain du bois mouillé se consume dans une odeur âcre

et en même temps qu’il arpente la toiture il compte les tuiles

21 novembre 2021 avant les averses le jardin s’est préparé dans un grand silence

pensif sur le banc regard perdu dans les feuilles que teinte l'automne

devant la cuisine il attend en regardant la poignée de porte

sans entrain je mâche le chat à côté de moi mange comme un goinfre

le cœur qui chahute en ricanant dans les côtes -changer de braquet

l'ombre n'attend pas que j'allume la veilleuse et se sert un verre

dans la cheminée une bûche en chuchotant se souvient de l'arbre

19 novembre 2021 cônes de cyprès en attendant qu’ils éclatent les oiseaux patientent

dialogue subtil entre la pompe à chaleur et mes acouphènes

soleil ce matin sur le gravier du parking et aiguilles de pins

22 novembre 2021

novembre insolent -comme au printemps l'herbe est verte et le ciel limpide

après les averses gouttes d’eau sur les épines de pyracanthas

pendant la balade une mouche m'a piqué sur le bout du nez

le frigo en panne pour me regarder de haut lui sert de perchoir

la nuit vient trop vite aiguillonner ma mémoire de rêves d'enfant

tout mon corps est raide comme cassant le bois dur de l'amandier mort

20 novembre 2021

dans la bruine tiède les lampadaires éteints veillent sur la nuit

sur l'herbe glissante un fier rayon de soleil me fait un clin d'œil

sur l'asphalte humide mes pas claquent dans la nuit au rythme du cœur

un automne humide -pourtant les chênes me disent "ça sent le roussi"

23 novembre 2021 72


Paroles d’un compte erratique

mi raisin mi figue le ciel ce matin m’accable d’une humeur morose

pluie interminable -sur les troncs comme des moules les mousses s'incrustent

portrait d’un filou qui de trop dormir la nuit fait le fou le jour

truffe en chocolat pour soulager mon angoisse puis-je trouver mieux

le cœur ralentit finira-t-il par fléchir avant l'arrivée

le chat est rentré un parfum de nuit pluvieuse le suis sur son lit

mon fauteuil soupire et comme moi il grimace au moindre remous

26 novembre 2021 un ciel mal lavé qui étalé sur les arbres brouille la lumière

le jour souriait mais à travers la fenêtre je l'ai ignoré

24 novembre 2021

d’un œil il surveille le bout tremblant de sa queue — peur qu’elle s’envole

pigeons ou rapaces que ne suis-je ornithologue pour les distinguer

le froid installé -venu d'un nord acéré il tranche les lèvres

devant les rayons il tourne le dos aux livres qu’il a déjà lus

tout en marmonnant la pompe à chaleur nettoie les dents de l'hiver

entre deux orages l'averse prend le relais sur le dos du vent

surpris par le froid le chat cesse de compter les tuiles du toit

soudain plus un bruit vent et orage ont cessé par enchantement

27 novembre 2021 entre les averses le ciel fronce les sourcils et s’ébroue un peu

et la nuit humide accroche aux branches transies des frissons glacés

25 novembre 2021

gardien attitré il veille les friandises posées sur sa table

ramier en novembre — dans les chênes enfeuillés il trouve le gîte

j'ouvre la fenêtre une odeur de froid humide s'accroche au volet

noël qui approche il espère sur la table mille friandises

sur l'herbe mouillée pris d'un vertige soudain il glisse inconscient 73


Paroles d’un compte erratique

sous les ombres grises une courte promenade entre chien et loup

les rayons coincés dans la porte l’hiver le soleil s’éclate

28 novembre 2021

il a préféré rester hier soir sur mes cuisses au lieu de sortir

quand le vent les roule les nuages se déchirent et blessent le ciel

l'infirmière dit que je suis encore jeune -elle ment c'est sûr

pas d’affolement il ne fait rien que bâiller mais ça m’impressionne

journée peu venteuse mais les rayons du soleil lançaient des glaçons

un pressentiment -aujourd'hui à tout hasard j'ai rangé mon meuble

dans l'air immobile avant leur chute les feuilles frissonnent de froid

dans la cheminée de vieilles photos s'embrasent de mille couleurs

01 décembre 2021 haché par le froid le premier ciel de décembre s’esquive en lambeaux

là auprès du poêle novembre et déjà l'hiver serre mes entrailles

devant sa gamelle il bâille à s’en décrocher mâchoires et dents

29 novembre 2021 le vent s’est servi — déjà à travers les chênes on voit les collines

j'écoute mon cœur qui frappe dans ma poitrine comme un gong de pierre

posé sur le sol un petit chat de faïence — immobilité

le froid de décembre même devant le foyer vient froisser mes os

lames de rasoir -le vent hache mes oreilles vibrantes de froid

la nuit fut bien longue à essayer des couleurs au blanc du plafond

depuis ma pénombre j'entends les vers dans mes tripes se manger entre eux

02 décembre 2021 le ciel de décembre et l’hiver dans les nuages laissent peu de doute

le vent s'est figé -il ne reste dans la nuit qu'un bloc de froid noir

il est concentré et sa tâche de patoune me transmet ses puces

30 novembre 2021 74


Paroles d’un compte erratique

en poussant la porte un vent brutal m'a surpris d'un frisson sournois

il faut bien penser que tirer sa révérence est le lot commun

malgré mon manteau le froid décape ma peau mais il faut marcher

05 décembre 2021 soulignant la lune un filament de contrails boursouffle le ciel

premier rendez-vous -mon cœur bat si lentement que je n'y crois guère

près du chocolat il espère inconsciemment une part promise

03 décembre 2021 matin de décembre dans le vent et la lumière — clin d’œil du feuillage

la pluie raide et froide passe oblique le volet et dilue mes larmes

sommeil sur mes cuisses — il se roule dans son rêve comme dans le vague

corbeille perchée en haut de la mezzanine le chat me surveille

un chien qui aboie -le vent donne de la voix aux volets mal joints

devant l'âtre froid je n'ai pas eu le courage de mettre une bûche

sommeil difficile -pourtant le chat me rassure au creux de l'épaule

06 décembre 2021

ce chemin vicieux -je n'irai guère plus loin qu'au prochain virage

pâle dans la nuit l'étoile s'est égarée au bord du néant

04 décembre 2021

passe le destin d'un torrent impétueux à un fleuve rance

juste avant la pluie les nuages se rassemblent en meute farouche

cernes sous yeux sombres comme un arc d'ébène tendu par la nuit

juché sur la plaque il surveille les feuillets sortir lentement

07 décembre 2021

ô scintigraphie tes lueurs vont traverser mes ombres brumeuses

Garlaban surveille derrière le pin pignon les sautes du vent

je suis optimiste car en m'attendant au pire rien ne me surprend

las sur la banquette il semble très concentré sur le temps qui passe 75


Paroles d’un compte erratique

rigueurs de décembre -le figuier n'a plus de feuilles mais il prend patience

quant à l'avenir je n'y pense même pas tant il est présent

feuillage des chênes peu à peu changé en or lustré par l'hiver

10 décembre 2021 après les averses et une nuit agitée un ciel en coton

dans cet air humide les frissons sont plus prégnants que le froid lui-même

08 décembre 2021

nous voilà tous deux lui endormi sur mes cuisses moi dans le fauteuil

changement de ciel d’un décembre versatile on s’attend à tout

je rêve décembre ce jour où j'ai dû choisir entre deux erreurs

retour au panier en haut sur la mezzanine il y fait plus chaud

"rêver" au futur c'est conjuguer "avoir fait" sans s'en rendre compte

quelques feuilles mortes sous l'auvent et ses ténèbres ont trouvé refuge

ce mot "rémission" il n'a pas vraiment de chance un peu tout de même

plus bruine que pluie ce n'est pas le temps qu' Aubagne souhaite à Garlaban

11 décembre 2021 l’intrépide pie qui lutte contre le vent quête un perchoir

bientôt au scanner fin d'année interminable à quand la prochaine

09 décembre 2021

il fait grise mine peut-être que les croquettes avaient mauvais goût

aujourd’hui le vent vient relever les averses — on n’y gagne rein

le chat endormi dans son panier mezzanine me rassure encore

ostensiblement il veille sur les bocaux pleins de friandises

la brusque rafale qui perturbe le volet décroche mon rêve

le chat est dehors -d'un hiver insaisissable l'humide froidure

encor trois semaines avant que l'an neuf débarque trois bords à tirer

les pieds sur la table les yeux grands ouverts je rêve un autre passé

du miroir brisé un seul éclat est tombé la place du cœur 76


Paroles d’un compte erratique

12 décembre 2021

14 décembre 2021

encore endormie colline illuminée un matin d’hiver

les fleurs de yuccas supportent bien cet hiver humide et frisquet

toilette rapide avant que le sommeil vienne l’emporter au loin

posé la table il est prêt à s’endormir au moindre signal

un homme est un homme avant de se voir poète -et les hommes meurent

rêve incohérent -que m'importe s'il me comble de joie fantasmée

au fond de mon verre une larme imaginaire diluée si vite

la nuit s'évapore dans le regard obsédant et doux de mon chat

menteur et sournois ce n'est jamais mon visage que renvoie le verre

comme une peluche il s'est mis dans sa corbeille et s'est rendormi

petite lucarne tu ne laisses des ténèbres passer que l'hiver

15 décembre 2021 encore des fruits pendus aux pyracanthas pour passer l’hiver

13 décembre 2021 dans le ciel d’hiver vole encore l’espérance du chant des oiseaux

à travers la vitre il regarde les oiseaux dans les pyracanthes

à son habitude il surveille les assiettes mais n’y touche pas

j'ai froid et ce froid se nourrit de mes entrailles qu'étreint la douleur

pourrais-je oublier ce parfum de fin d'automne sa peau d'abricot

sous l'auvent perfide un frisson vient me saisir au bord de la nuit

un abricot sec une truffe en chocolat et un souvenir

je voudrais me taire mais un fer rougi traverse hurlant mes entrailles

la nuit m'enveloppe d'un manteau de cauchemars qui me gratte au col

16 décembre 2021

le chat sur mes cuisses et s'endort profondément devient médecin

traversant le ciel du soleil dissimulé un oiseau d’acier 77


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il sommeille et veille deux efforts en temps pour les friandises

la lune en silence hérisse de ses rayons les frissons de brume

la lune embrumée inonde de ses rayons mon regard humide

sur les feuilles mortes des gouttelettes de givre brisent la pénombre

ce n'est pas l'hiver mais la brume inamovible qui colle au gosier

19 décembre 2021 sans humidité l'hiver paraît supportable et je grince moins

au fond du couloir les ténèbres silencieuses affûtent mes rêves

17 décembre 2021

au-dessus du banc dans l'air d'hiver frissonnant les chênes flamboient

lever de soleil lent et froid sur les collines enchâssées de brume

sous le figuier nu parmi les branches meurtries pourrissent ses feuilles

un petit plaisir — ne surtout pas abuser du bon chocolat

20 décembre 2021 la lune hier soir s’est blottie dans les nuages pour braver le froid

murmure du froid qui descend par le conduit de la cheminée

infinie patience — il attend que je m’avance et brosse son poil

ah que nous étions beaux je veux dire vraiment beaux -ces vieilles photos

musique grinçante -avachis dans le fauteuil tous mes os rechignent

j'ai mis la polaire par dessus le cachemire et le poêle à fond

un halo de brume cajole la lampe inerte même sous l'auvent

18 décembre 2021 un boudin de nuage venu de quel abattoir on n’en sait pas plus

terre et ciel complotent une sublime vengeance après le printemps

dans sa profondeur qu’est ce que je dois comprendre de ce regard fixe

21 décembre 2021

dans le cendrier quelques pièces de monnaie vieillissant paisibles

le même visage de jour et la lune en moins malgré les nuages 78


Paroles d’un compte erratique

avant de dormir il a rejoint sa corbeille à côté de moi

dans la nuit humide la brume asservit la lune qui rend sa couronne

en salle d'attente la demi-journée entière c'était épuisant

des sons étouffés rampent depuis la vallée -mes pensées s'égarent

sacrée dépression -tellement de chocolat que j'en suis malade

24 décembre 2021 sur la mezzanine doux minou s'est endormi je l'entends rêver

un rêve noyé jusqu'à la dernière goutte au fond de mon verre

silence du poêle -j'ai laissé les cendres froides chuchoter entre elles

22 décembre 2021 nuages sauvages — ils encerclent le ciel bleu avant de charger

ce soir de fatigue j'ai laissé mon auvent seul veiller sur la nuit

il entrouvre un œil pour voir ce que je mijote au-dessus de lui

25 décembre 2021

nus sous le soleil et nos pieds que clapotait le petit ruisseau

arbre de noël cime dénudée d’un chêne sous la bruine lasse

sensation étrange -un souvenir me revient comme au Jokari

la nuit de noël est passée comme en un songe il en dort encore

étoiles noyées dans une soupe de brume insipide et froide

nous enfermons tous dans de noirs placards humides des secrets sordides

23 décembre 2021

ils poussent la porte et parfois viennent s'asseoir aux repas de fêtes

ciel humide et froid où les nuages dolents mangent les couleurs

le rire en rictus se complaît sur les visages à noircir les traits

son bol coccinelle perché sur le frigidaire devient son domaine

26 décembre 2021 le ciel délavé en guise de serpillière macule l’hiver

l'épaisse pénombre dialogue avec le silence -miettes de murmures 79


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en face de moi pour une fois qu’il regarde droit dans l’objectif

ce soir la douleur qui se fait plus insistante flatte l'insomnie

le calendrier parfois dans la solitude me tient compagnie

mon urine épaisse a ce relent de cancer du fond des entrailles

Il fait doux ce soir le chat en a profité pour cacher la lune

29 décembre 2021 aquarelle sale au loin un oiseau traverse le ciel barbouillé

quelques fruits séchés un ballon de Saint-Amour glisse la soirée

27 décembre 2021

un chat de faïence — pourtant son duvet soyeux le trahit encore

la pluie s’est remise à tomber sur les collines et les arbres nus

sous mes doigts usés j'imagine une guitare aux cordes de rêve

tandis que mon chat efface de sa fourrure les dernières gouttes

la vallée brumeuse dans les bras de sa rivière étouffe la nuit

je les ai vécus -mes rêves ne sont jamais que de vrais pastiches

je suis fatigué de porter à bout de bras cette vie pesante

pénombre accueillante -baissant le bruit du silence un rêve en sourdine

30 décembre 2021 la douceur de l’air n’atténue pas l’impression d’un ciel hivernal

derrière le voile auréolé de la brume des étoiles froides

28 décembre 2021

il hume la nuit dans sa corbeille perché mon chat de lucarne

linge mal lavé le ciel dégouline encore sur les arbres las

le vent s'est levé un vent souriant qui chasse les miasmes humides

la fête passée il ne reste dans les bols qu’un fond de nausée

le jardin larmoie -à peine j'ai pu lui dire qu'il manque déjà

j'aimerais bien finir avant que claque le mien ce livre ennuyeux

malmenées les feuilles épandues sur le verger rêvent de printemps 80


Paroles d’un compte erratique

31 décembre 2021 la pluie de la nuit a laissé comme un cadeau au cèdre voisin il reste pensif entre cuisine et cellier — hautaine ignorance dans ce faux printemps les feuilles rousses demeurent caution de l'hiver douleur soutenable -je me demande parfois d'où me vient ce doute comme un tronc rongé qui garde encore haute allure mon bois se corrompt

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