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SOMMAIRE Archibat N°25

Revue maghrébine d'aménagement de l'espace et de la construction

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ÉDITORIAL

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OPINION LIBRE

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Manifeste pour la ville tunisienne de demain

ACTUALITÉ Le prix Pritzker, la Chine à l'honneur

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La biennale internationale d'architecture à Venise

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NEWS NATIONALES

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NEWS INTERNATIONALES

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RÉALISATION

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Le lake forum

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L'architecture en héritage

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Taoufik et Imèn BOUSLEMA

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M’hamed et Inès BEN AYED

38

Taoufik et Monia EL EUCH

42

Farouk et Maya BEN MILED

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Mohamed Ali et Adly BEN SOLTANE

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Ajmi et Sélim MIMITA

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Abdeljalil et Hichem BOUZGUENDA

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Samir et Khansa BAKLOUTI

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SOMMAIRE

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DIPLÔME

Tunis-Marine, trait d’union hydrophile

CONCOURS

Le nouvel institut français de Tunis Concours EUROPAN 2011 Pavillon de la Tunisie à l’exposition internationale, Yéosu Corée 2012

PATRIMOINE

Carte, Mythe et Patrimoine

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URBANISME

Rôle et fonction des urbanistes dans la fabrication des villes du sud, le cas de Tunis (1960-2009)

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TECHNIQUES ET CONSTRUCTIONS Le bois de palmier dans la construction

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INVITé 108

Entretien avec Henda Gafsi, présidente de l’ATU

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AILLEURS

Londres 2012, les jeux olympiques d’été

MAISON

Entre sobriété et confort

ARTS ET DÉCO

Hichem Driss, indépendant jusqu’au bout

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EXPOSITION 96

L’année 2012 fête le 150ème anniversaire de Klimt

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LIVRES ET LIVRAISONS

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ÉDITORIAL ARCHIBAT Revue maghrébine à parution semestrielle, publiée par : ABC Architecture Bâtiment et Communication, SA 19 Rue Abou Bakr Bekri, Imm. Luxor I, Br. M/2 - Montplaisir 1073 Tunis Tél. : 216 71 904 467 - 71 907 952 Fax : 216 71 902 485 E-mail : archibat.com@planet.tn www.archibat.tn Directrice de publication Amel SOUISSI TALBI Rédactrice en chef Alia ALLAL Ont collaboré à ce numéro : Zeineb ENNAIFER Majed Bahri Romeo Carabelli Emilie Destaing Denis Lesage Henda GAFSI Yassine TURKI Morched CHABBI Olfa BEN HASSINE Membres fondateurs Leïla AMMAR Ali DJERBI Amel SOUISSI TALBI Achraf BAHRI MEDDEB Morched CHABBI Denis LESAGE Publicité ABC : Architecture Bâtiment et Communication : Zouhaira TALBI REBAI Sabra DABOUSSI Conception graphique Nadia CHIHAOUI-JAZIRI Abonnement Lobna MCHIRGUI BELHAJ Impression FINZI USINES GRAPHIQUES Site web Mouna MATTOUSSI TRABELSI Les articles publiés dans cette revue, et les idées qui peuvent s’y exprimer n’engagent que la responsabilité de leurs auteurs. Tous droits de reproduction, réservés pour tous pays. Les textes et photos reçus et leurs envois impliquent l’accord de l’auteur pour leur libre publication. VISA N° 2796 Autre publication de ABC

Quelle politique de l’architecture et de l’urbanisme pour la Tunisie ? En cette année historique, où le projet de nouvelle constitution tunisienne est en plein débat et concertation à l'Assemblée Nationale Constituante, la revue Archibat souhaite par ce plaidoyer, rappeler que l’aménagement urbain et architectural est nécessairement lié à une volonté politique et sociale de créer les conditions de développement de villes harmonieuses, appréciées et attractives. En effet, l’aménagement urbain et l’architecture de nos villes ont un rôle majeur à jouer dans le développement humain et culturel, de la nouvelle Tunisie. La planification pensée et l’architecture de qualité, contribuent à façonner des villes où il fait bon vivre. Dans la réflexion sur le développement des villes tunisiennes, la valorisation et la sauvegarde de notre patrimoine urbain et architectural doivent désormais être prises en compte, dans le souci constant d’une création architecturale innovante et d’un urbanisme durable. Le cadre bâti doit s’harmoniser avec l’environnement, promouvoir la santé et le bien-être, améliorer la qualité de vie, offrir des possibilités économiques et créer un héritage qui reflète et symbolise la culture tunisienne. Ces défis incombent t-ils seulement aux architectes ? Les professionnels de la construction, les politiques et l’administration doivent collaborer pour que l’environnement bâti réponde aux exigences en matière de sécurité et d’efficacité, assure la durabilité en réduisant au minimum les impacts des activités humaines sur l’environnement, crée des espaces qui soient propices à l’épanouissement humain des occupants, s’adapte à la démographie et aux évolutions de la société tunisienne, constitue un investissement sûr pour la collectivité sur les plans de la qualité et de la durabilité, enrichisse notre culture et constitue un apport adéquat et authentique aux traditions et à la culture régionale. L’ambition de développement de nos villes nécessite la création d’ateliers publics d’architecture et d’urbanisme compétents, à Tunis et dans les villes et dans les régions qui auront la responsabilité de construire un modèle de gouvernance qui prenne en compte les exigences nouvelles de démocratie, tant dans sa dimension représentative que participative avec une vision prospective sur l’avenir des villes et du cadre de vie. A un moment où l’Etat s’engage à définir les contours de la Tunisie de demain, il est judicieux de rompre avec la période de construction où l’urgence des besoins quantitatifs en équipements, avait permis de justifier la standardisation, voire la banalité des constructions publiques. Une mission ministérielle ayant pour vocation de promouvoir la qualité architecturale et environnementale dans le domaine des constructions publiques, devrait veiller au respect des exigences d’ordre urbanistique, esthétique, fonctionnel, technique et économique des constructions publiques.Dotée d’une politique associant réflexion, participation à l’élaboration des textes législatifs et réglementaires, recommandations, cette mission aurait pour rôle, le conseil et l’assistance aux maîtres d’ouvrage publics. Pour impulser la qualité architecturale et urbaine, la promotion et le développement de compétences des métiers d’architectes et d’urbanistes et la mise à niveau de la formation sont aujourd’hui nécessaires pour faciliter l’accessibilité des jeunes diplômés au marché du travail, qui exige une plus grande réflexivité face à la vitesse d'évolution des sciences et des technologies. L’aménagement pensé de nos villes, exige aussi la promotion de la connaissance architecturale et urbanistique auprès des décideurs et citoyens. Notre pays a besoin de toute urgence d’une vraie politique de construction ambitieuse, dont les architectes, urbanistes, ingénieurs, théoriciens de l’architecture, artistes et promoteurs éclairés, seraient les garants soucieux de faire évoluer l’architecture contemporaine tunisienne. Dans cette nouvelle ère de liberté d’expression que vit notre pays, Archibat a choisi d’être à l’écoute des architectes, de leurs réflexions et de leurs préoccupations. Par cette livraison dont le dossier est consacré au thème de l’architecture en héritage, nous présentons les opinions, et les projets de huit agences d’architectes tunisiens qui sont fiers d’avoir transmis la passion de leur métier à leurs enfants. Chanceux, ces jeunes architectes ont bénéficié du « coup de pouce » paternel et nous livrent avec fraîcheur leur vision de l’avenir de l’architecture. Dans un univers professionnel difficile, cette nouvelle génération, entend s’inscrire dans une modernité sans frontières et ainsi marquer son temps. A travers un regard croisé abordé d’une manière décontractée, nous avons souhaité transmettre un certain optimisme quant à l’avenir de l’architecture tunisienne. L’architecture doit être porteuse d’un enthousiasme que nous sommes fiers de partager avec vous. Dans le monde entier, elle est un vecteur culturel pour l’économie et l’emploi, elle est nécessaire à tous et d’utilité publique.

Amel Souissi Talbi Archibat 25 / 05 - 2012

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MANIFESTE POUR LA VILLE TUNISIENNE DE DEMAIN

OPINION LIBRE

Proposition de l’Association Tunisienne des Urbanistes

La révolution tunisienne qui a pris la ville comme son principal théâtre, a révélé divers maux qui ont constitué un frein pour l’épanouissement et le bien-être de sa population. Les villes ont la responsabilité de construire un modèle de gouvernance urbaine qui prenne en compte les exigences nouvelles de la démocratie, tant dans sa dimension représentative que participative. Ainsi, dans ce contexte, se pose et avec insistance la question de la gouvernance des villes, de l’absence d’autonomie réelle, du contrôle abusif des collectivités locales, de la non démocratisation du pouvoir local et de l’absence de participation citoyenne et de la société civile dans le processus décisionnels locaux. L’histoire de la Tunisie, plus que trois fois millénaire, s’est illustrée par l’importance du fait urbain et du poids politique, économique et culturel de ses villes. Aujourd’hui, avec deux tunisiens sur trois qui résident à l’intérieur de zones communales, la place de la ville dans le territoire est plus que jamais primordiale. Les processus d’urbanisation entamés depuis le début du XXè Siècle ont abouti à un développement spectaculaire des villes, au renforcement de leur contribution à la croissance économique et au développement humain mais ils ont conduit aussi à l’émergence de problèmes qui ont fortement caractérisé la vie urbaine pendant des décennies : habitat spontané, dégradation du cadre bâti ancien, étalement urbain important, sous équipement des quartiers, faible accessibilité et connexion aux réseaux techniques, etc. Outre certains problèmes liés à l’évolution urbaine des villes qui n’ont pu être entièrement maîtrisés par le passé, l’accès à l’emploi dans la ville, aux équipements et aux loisirs, ont fortement affecté la vie urbaine, conduisant parfois à des formes d’enclavement, voire d’exclusion, de certains quartiers et de certaines catégories sociales.

LA VILLE TUNISIENNE, AU CŒUR DE LA CONSTRUCTION DE LA NOUVELLE TUNISIE Pour l’ensemble de ces raisons, la ville doit prendre la place qu’elle mérite dans le projet de la nouvelle Tunisie. La nouvelle constitution qui sera l’œuvre majeure de l’assemblée constituante et les réformes à engager doivent définir le cadre garantissant l’évolution souhaitée des villes tunisiennes. Le présent manifeste de l’Association Tunisienne des Urbanistes, propose les principaux objectifs à atteindre par ces réformes.

Une ville démocratique, autonome et inclusive La ville tunisienne doit être démocratique dans son fonctionnement et sa gestion. Il reviendra à ses habitants de désigner ceux d’entre eux qui auront la charge de gérer les affaires de la Cité. Le principe général d'attribution des responsabilités de gestion de nos villes, de la métropole jusqu’aux quartiers, doit être inspiré par le souci constant de subsidiarité basé sur la proximité optimale du service délivré au citoyen. Instances de représentativité, budget et compétences de proximité, sont à instaurer à différents échelons spatiaux ainsi que des règles d’une gouvernance urbaine performante et démocratique et des mécanismes de contrôle efficaces. La qualité de cette gouvernance urbaine réside également

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dans la mobilisation citoyenne autour d’un projet partagé de ville et dans sa capacité à s'organiser à l'intérieur d'un territoire pertinent, arrondissement, communes urbaines et rurales, agglomérations. Cependant, le traitement de certaines questions (santé publique, droit au logement, protection environnementale et du patrimoine, etc.) continuera à requérir l’intervention de l’Etat qui restera garant de la cohésion territoriale régionale et nationale. Nos villes devront disposer des moyens institutionnels, humains et financiers lui permettant de fonctionner de manière autonome et avoir la capacité d’entretenir des rapports entre elles et avec des villes de la région et du monde. La gestion de la ville doit également être ouverte à la participation de tous les citoyens, quels que soient leurs sexe, âge et date d’arrivée dans la ville.

Une ville solidaire, sure, accessible à tous et où il fait bon vivre Tous les quartiers de nos villes méritent d’être des lieux sûrs et accessibles, où l’ensemble des habitants bénéficie de la même qualité urbaine. Pouvoirs locaux et société civile auront la responsabilité de mettre en œuvre des actions d’inclusion des quartiers et groupes sous intégrés, afin que nos villes soient solidaires et profitables à tous. La réduction des inégalités territoriales passe par la solidarité et la contribution des villes à la redistribution des ressources. Mais l'Etat doit être le garant de cette solidarité et veiller à assurer une équité dans l’aménagement du territoire régional et national. La question de l'habitat revêt une importance particulière. La mise en place d'une offre diversifiée en logements, adaptée aux besoins et aux revenus de l’ensemble des habitants, doit constituer une priorité, afin de combattre l'exclusion sociale et de garantir le droit à la ville.

Une ville attractive, créatrice d’emplois Nos villes seront appelées à offrir un cadre de qualité et des infrastructures à même d’attirer les investisseurs locaux, nationaux et internationaux. Elles ne se contenteront pas d’offrir un cadre de qualité aux investisseurs, mais contribueront à travers les synergies à mettre en place entre l’Etat, les services locaux, l’université, les investisseurs et la société civile au développement économique et à la création d’emplois.


Une ville durable, verte, harmonieuse et propre Tout en étant un espace favorisant un développement économique et spatial, nos villes sont appelées à maîtriser les effets du développement sur l’environnement, à veiller à l'efficacité énergétique et à préserver le droit à un environnement sain pour les générations futures. Ceci passe inéluctablement par une maîtrise foncière renforcée et une mobilité maîtrisée, favorisant le transport en commun et les modes de déplacement « doux ». Il est évident que la gestion durable des espaces urbains doit également privilégier d’une part, la propreté de nos villes et la minimisation des effets du traitement des déchets urbains sur les zones réceptives de ces déchets, qu’ils soient à l’intérieur de la ville ou à l’extérieur de celle-ci et d’autre part, garantir un paysage urbain de qualité et une distribution adéquate des espaces publics et des espaces verts.

Une ville, de la créativité et de la culture Nos villes sont des carrefours de civilisations, des lieux d'expression des savoirs et des cultures, des espaces de rencontre et de contacts. Elles doivent favoriser la créativité et la diffusion d’une culture à la fois riche, de qualité et accessible à l’ensemble des habitants. A travers un cadre spatial propice à la création et un réseau dense d’équipements et de manifestations dédiés à l’émergence et à l’accompagnement de la vie culturelle et artistique, nos villes sauront faire de la culture une dimension principale de la vie urbaine. Une ville fière de son patrimoine et dotée d’une vision pour le futur. Nos villes ont des cultures et des modèles urbanistiques et architecturaux différents et divers. Nous devons les préserver et éviter les risques de banalisation des constructions et de standardisation des modèles architecturaux. Mieux prendre en compte cette dimension dans l'aménagement de nos villes et promouvoir la connaissance architecturale et urbanistique parmi les décideurs et les citoyens, constitue désormais une priorité. Dans cette perspective, il est opportun de promouvoir la culture locale, la mémoire et l’identité de nos territoires. Nos villes auront à réussir le pari de sauvegarder et de valoriser le patrimoine urbain, architectural et culturel tout en s’engageant vers une vision futuriste pour des modes d’aménagement, de construction et de gestion intégrant les apports de la recherche scientifique et technologique, pour un cadre de vie des habitants, constamment amélioré et une meilleure maîtrise des effets de l’urbanisation. Les villes doivent rester des vecteurs de progrès, d'innovation et d'adaptation aux évolutions. Il est capital de donner une priorité aux savoirs, à l'innovation, à l'accès à l'éducation, aux activités de recherche, aux activités culturelles et artistiques… ■ Les membres de l'ATU Henda Gafsi, présidente Yassine Turki, vice président Archibat 25 / 05 - 2012

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ACTUALITÉ

LE PRIX PRITZKER

LA CHINE À L’HONNEUR C’est à l'architecte chinois, Wang Shu, âgé de 48 ans, que la fondation Hyatt a décerné le prix Pritzker le mardi 28 février 2012. Véritable "Prix Nobel" de l'architecture, cette distinction est la consécration ultime dans le domaine et c’est la première fois depuis la création du prix en 1979, qu’il est décerné à un chinois.

Architecte à la démarche singulière, Wang Shu est né à Hangzhou, au Sud de la Chine. Il obtient en 1985, son diplôme d’architecture à l’Institut de Technologie Nanjing (Nankin) et fonde dans sa ville natale son agence Amateur Architecture Studio avec l’aide de sa femme Lu Wenyun et dirige depuis 2000 le département d'architecture de l'Académie des Arts d'Hangzho. Wang Shu a reçu en 2011, la médaille d’or de l’Académie d’Architecture en France, en 2010, avec Lu Wenyu, son épouse, le prix Schelling d’ar-

chitecture en Allemagne et, en 2007, le Global Award for Sustainable Architecture. Le lauréat du Pritzker 2012 se distingue par son originalité et son innovation. Loin du travail de ses homologues chinois et des constructions effrénées de son pays, il allie modernité et tradition dans ses réalisations. Soucieux d'intégrer ses projets dans leur environnement, il recycle et réinterprète de multiples matériaux faisant de chacune de ses réalisations un projet unique. Wang Shu accorde aussi un grand respect aux traditions.

© Lv Hengzhong

© Lu Wenyu

Lu Wenyu , Bibliothèque du Collège Wenzheng

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Maison de la Céramique Réalisée entre 2003-2006 dans le parc de Jinhua en Chine


© Lu Wenyu © Lu Wenyu

Campus Xiangshan, Académie des arts de Chine, Phase I 2002-2004, Hangzhou

Depuis une quinzaine d’années, au sein de son atelier, l’architecte chinois développe une architecture responsable, humaniste et respectueuse de l’environnement. Il prône le « slow build », le bâtir lentement, il récupère des matériaux sur des chantiers de démolitions de quartiers anciens pour les recycler dans une interprétation contemporaine, une démarche particulière qu’il aime résumer en une phrase « l'humanité́ est plus importante que l'architecture et l'art de construire plus important que la technologie ». En 2004, il a ainsi réutilisé deux millions de tuiles provenant de maisons traditionnelles détruites pour couvrir la toiture des bâtiments de son camCinq maisons dispersées, 2003-2006, Ningbo, Chine pus à Xiangshan. Plaidant pour un ralentissement de l'urbanisation effrénée de la Chine. Le Président du jury, Lord Palumbo a salué une œuvre « capable de transcender le débat entre tradition et modernité, en produisant une architecture qui est hors du temps, profondément ancrée dans son contexte et pourtant universelle ». Heureux de cette « reconnaissance du rôle que joue la Chine dans le développement des idées architecturales », le lauréat a souligné que « dans les décennies à venir, la réussite de la Chine dans son urbanisation nécessitera de se faire en harmonie avec la culture locale et les besoins locaux ». Une cérémonie officielle récompensera Wang Shu pour son travail le 25 mai 2012 à Pékin. L'architecte se verra décerné une médaille honorifique ainsi qu'un chèque de 100.000 Dollars ■ © Lu Wenyu

© Lang Shuilong

Pavillon Ningbo Tengtou Réalisé en 2010 à l'occasion de l'Exposition universelle de Shangai

Alia Allal Campus Xiangshan de l'École supérieure des Beaux-Arts Réalisé entre 2002 et 2004 à Hangzhou en Chine

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ACTUALITÉ

David Chipperfield

LA BIENNALE INTERNATIONALE D’ARCHITECTURE À VENISE Cette biennale constitue une des plus grandes manifestations mondiales en matière d’architecture, c’est en 1980 qu’a eu lieu l’inauguration de la première exposition d’architecture. Depuis la manifestation a pris son envol pour devenir un évènement incontournable. Pour sa treizième session, la Biennale Internationale d’Architecture, qui se tiendra à Venise du 29 Août au 25 Novembre 2012, sera dirigée par un nouveau directeur en la personne de David Chipperfield. L’architecte britannique qui succède à l’architecte japonaise Kazuyo Sejima, porte à sa mission un intérêt particulier et y est très sensible, il fut l’un des représentants de la Grande-Bretagne en 2000. Cette nouvelle session portera essentiellement selon ses mots sur : « les relations qui lient les grands architectes et les jeunes générations qui se réfèrent à eux ». Une pointure dans le domaine de l’architecture, David Chipperfield, après son diplôme d’architecture, il commence sa carrière en travaillant dans des cabinets de renom comme celui de Douglas Stephe, Richard Rogers ou encore Norman Foster. Il s’installe à son compte en créant sa propre firme en 1984 à Londres, aujourd’hui celle-ci est également implantée à Berlin, Milan et Shanghai. Fort de son succès, il construit un peu partout en Europe et dans le monde, on lui doit notamment le Neues Museum de Berlin, le Literaturmuseum der Moderne à Marback am Neckar en Allemagne, l’America’s Cup Building de Valence, la Cité Judiciaire de Barcelone, le Central Public Library des Moines, Iowa… ■ Alia Allal

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Installation, reconstruction de favelas en briques au milieu des jardins, "Ironie-Arrete"


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NEWS NATIONALES 18 Mai 2012

journée internationale des musées La réouverture au public du musée national du Bardo et du Musée

liers nouveaux et installation d’un ascenseur). Il a également mis en

lieu le 18 mai 2012, à l’occasion de la Journée Internationale des

l’essentiel au milieu du 19e Siècle) avec ses décors mariant diverses

Archéologique de Sousse, en travaux depuis de longs mois, aura Musées. C’est ce qui a été décidé par le Ministre de la Culture, en

concertation avec le Ministre du Tourisme. Quelques finitions seront sans doute à terminer après cette date, pour permettre d’organiser

prochainement une inauguration-évènement. Mais l’essentiel étant achevé, il était temps de donner aux touristes de nouvelles raisons de visiter la Tunisie, terre de culture depuis des millénaires.

Le Musée National du Bardo, qui couvre l’histoire de la Tunisie

depuis la préhistoire jusqu’au début de l’ère arabo-musulmane, a

été créé en 1882 dans l’esprit des « cabinets de merveilles » du

19e Siècle, dans une partie du palais des souverains de Tunis : Le Bardo.

Régulièrement enrichie depuis la création du Musée, sa collection de mosaïques est aujourd’hui la plus importante du monde et jouit d’une renommée internationale.

Le projet de réaménagement et d’extension du Musée du Bardo,

rendu nécessaire par l’afflux des visiteurs (600.000 par an environ)

valeur le monument historique que constitue le palais (construit pour influences, turques et italiennes notamment.

Le Musée Archéologique de Sousse a été installé en 1951 dans une partie de l’ancienne Kasbah, monument historique qui domine toute

la ville avec la tour du phare – Tour el Khalef –. Il exposait des chefs

d’œuvres antiques de la région, à l’étroit dans des locaux mal adaptés.

Le projet de réaménagement et d’extension du Musée Archéolo-

gique mis au point par une équipe de consultants internationaux a un double objectif :

- d’une part, rendre sa majesté à la Kasbah, qui avait été envahie

au cours du 20e Siècle par des bâtiments parasites (casernement, prison, notamment),

- d’autre part, présenter les collections dans un cadre adapté, doté des commodités de la muséographie contemporaine.

Le choix conceptuel adopté pour atteindre cet objectif, a consisté à enterrer la salle d’exposition du Musée d’environ 1.500m2 au centre

et la saturation de ses espaces d’exposition, a été élaboré par une

de la cour centrale de la Kasbah et à installer l’accueil, l’administra-

améliorer la qualité, la sécurité et le confort de la visite, y compris

forteresse.

équipe interdisciplinaire internationale et vise essentiellement à pour les personnes handicapées.

Les extensions, d’environ 9.000 m , soit une surface équivalent à 2

celle existante, ont permis de doter le Musée du Bardo des équi-

pements qui lui faisaient défaut : espaces d’accueil des divers pu-

blics, salles d’interprétation et de présentation, locaux d’animation

pédagogiques, lieux de convivialité, boutiques culturelles, réserves et ateliers de restauration.

Le réaménagement des espaces existants, a mis à la disposition de l’exposition les anciens locaux de services du palais, autrefois occu-

pés par les réserves, et a facilité les circulations (création de 2 esca-

tion, et les ateliers de restauration, dans les locaux historiques de la

L’accès au Musée, à partir de l’extérieur de la Kasbah, ou intra muros depuis la Médina, constitue un véritable parcours de découverte de cette forteresse, et le passage vers la salle d’exposition enterrée

se fait à partir d’une porte fortifiée datant du moyen-âge comme si l’on remontait dans le temps. Les mosaïques sont présentées dans

la salle, soit au sol, en dénivelé par rapport aux circulations des visiteurs, soit sur des cimaises délimitant des espaces thématiques

dans la salle comme des paravents. Trois de ces espaces, communicants, présentent un ensemble saisissant de stèles funéraires des époques punique, romaine et chrétienne. Denis Lesage

Le salon international de la construction et du bâtiment Cet évènement biennal, organisé par la société des Foires internationales de Tunis, est devenu au fil des années un rendez-vous incontournable pour les métiers de la construction et du bâtiment. Pour sa session de l’année 2012, le salon se tiendra du 16 au 20 mai prochain au Palais de la Foire du Kram qui se transformera pour l’occasion en un espace privilégié.

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Deux partenaires majeurs soutiennent la bonne marche du salon, le Ministère de l’Equipement et le Centre Technique des Matériaux de Construction de la Céramique et du Verre (CTMCCV). Cette nouvelle session 2012, s’articulera principalement autour de trois thèmes, les nouveautés et les innovations, la problématique écologique ainsi que les dispositifs d’économie d’énergie.


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NEWS

INTERNATIONALES

RÉAMÉNAGEMENT DU 1ER ÉTAGE DE LA TOUR EIFFEL

LA DAME DE FER SE FAIT LIFTER La société d’exploitation de la tour Eiffel (SETE) investit un budget de 25 millions d’euros pour entreprendre des travaux de réaménagement du premier étage de la Tour Eiffel, la construction de nouveaux pavillons et le réaménagement des espaces publics. De gros moyens pour de grandes idées, marcher au-dessus du vide à 57 mètres du sol ou faire accéder des personnes à mobilité réduite à tous les espaces, voilà les prouesses qu’offrira le premier étage de la Tour Eiffel avant la fin de 2012. Pour sa troisième rénovation depuis sa construction en 1889, la Tour Eiffel s’offre les services des architectes Moatti et Rivière et de l’entreprise Bateg pour la réalisation des travaux. Les concepteurs redonnent un coup de jeune au monument, qui n’a pas été transformé depuis 30 ans. Il s’agit d’abord de répondre à des exigences de normes techniques mais aussi de satisfaire les attentes des visiteurs et mieux gérer le flux très important de ces derniers.

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Les architectes respectent l’oblique et la transparence du monument et mettent en valeur son vide intérieur. Le premier étage est pensé et aménagé en place urbaine avec ses rues, ses bâtiments… Au terme de la transformation, les visiteurs de la grande dame de fer pourront jouir d’une salle de réception et de conférence, d’un pavillon pour les accueillir avec restaurant et boutique, d’un parcours muséographique et de la découverte du vide et du parvis. Le résultat promet d’être à la hauteur de la notoriété du monument le plus emblématique de Paris.

Le Shard Tower, soit la plus haute tour d’Europe… C’est à Londres que culmine désormais la plus haute tour d’Europe, conçue par l’architecte Renzo Piano. L’équipe de ce dernier s’est penchée sur le projet une dizaine d’années, certes cela représente pas mal de temps de travail, mais le pari semble être réussi. Le Shard, dont la livraison est prévue pour juin 2012, offre un subtil dialogue entre forme et programme. La tour abrite des bureaux, des logements de luxe, un hôtel, des restaurants et un belvédère public, les architectes avaient la ferme volonté de garantir la flexibilité sinon la réversibilité des espaces. Ce nouvel emblème de la capitale britannique, qui a coûté la bagatelle de 1,8 milliard d’Euros, financé à 80 % par quatre banques et fonds d’investissement de l’émirat, est entièrement vêtu de verre. Un verre « extra-white », totalement transparent, ce qui procure à l’édifice une légèreté malgré son imposante hauteur. Aussi, son sommet en forme de pointe fait incontestablement communiquer le Shard avec les cieux.

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NEWS

INTERNATIONALES

SIÈGE DE LA CONSTITUTION DE L’IRAK LIBRE À BAGHDAD C’est à travers un prestigieux concours international auquel ont participé plus d’une trentaine de grands noms de l’architecture mondiale, qu’a été sélectionné le projet du futur Secrétariat Général du Conseil des ministres. Le lauréat est un architecte irakien Manhal Al Habbobi, détenteur d’un master en philosophie de l’architecture et concepteur de la CAP Emirates. La tâche n’a pas été simple, la conception du bâtiment est chargée de symboles pour arriver à retracer des milliers d’années d’histoire, et pas n’importe laquelle, celle d’une des plus anciennes civilisations au monde, la Mésopotamie. C’est l’histoire d’une civilisation, d’une région, d’un pays, d’un peuple… que l’architecte transpose dans sa réalisation. Dans sa démarche, Manhal Al Habbobi, commence par rechercher et développer un concept, symboliser les caractéristiques du projet dans une composition linéaire et enfin symboliser une métaphore de la forme en illustrant la naissance et le développement d’une créature vivante. Ce projet lui a permis de remporter le prix WAN 2011.

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LE PARC DES EXPOSITIONS DE CHARTRES

ZAHA HADID DANS SON GRAND ART…

C’est le prestigieux cabinet londonien de Zaha Hadid qui a été retenu pour la construction du nouveau parc des expositions de la ville de chartres. Jusque-là célèbre grâce à sa Cathédrale, son riche patrimoine et son parfum, Chartres va dès la fin 2013, date prévue pour l’ouverture, redécouvrir une seconde jeunesse par ce projet aérien et futuriste. Implanté sur une superficie totale de 16.000 m², dont 12.000 m² sont couverts et les 4.000 m² restant aménagés en espaces extérieurs fermés, le nouveau Chartexpo promet d’être attractif. Comme à son habitude, la talentueuse architecte britannique a impressionné par sa conception, inspirée par la nature et par les bâtiments environnants. Elle transpose ingénieusement ce paysage dans son projet comme elle l’explique : « les volumes des halles dessinées en toiture selon une organisation radiale, facilite la transition entre le bâti et le végétal de manière à pouvoir intégrer les prescriptions paysagères du plateau Nord-Est. Les longues courbes sur l’horizon se plient et se déforment afin d’établir un dialogue architectural avec la Cathédrale par son contraste formel ». La toiture est montée de châssis ouvrants comme pour mieux dialoguer avec la nature, et les espaces intérieurs sont divisibles en un, deux ou trois halles distinctes, grâce à des cloisons amovibles, ce qui permettra à la ville de pouvoir accueillir plusieurs expositions en même temps. De plus, l’aspect innovant du bâtiment répond parfaitement à sa fonctionnalité. Au premier étage, un restaurant est aménagé, offrant une vue panoramique sur les paysages naturels alentours et sur la Cathédrale. Chartres saute à grands pas dans le IIIe millénaire en s’offrant une telle œuvre architecturale.

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INTERNATIONALES

L’OPÉRA JINAN SHANGAI La région de Jinan, à proximité de Shanghai en Chine, s’est dotée d’un nouveau complexe culturel qui s’étend sur une superficie totale de 72.000 m² dont 60.000 m² sont réservés au centre commercial. Le projet ayant fait l’objet d’un concours lancé par l’« Institute of Jinan west railway station area » a été remporté par l’architecte français Paul Andreu, architecte mandataire et Richez Associés, ils ont collaboré avec des confrères locaux, BIAD (Bejing Institute of Architectural Design). Le complexe, composé de trois dômes, se situe dans l’axe du quartier, au centre du jardin et face à trois tours. Les concepteurs ont imaginé trois volumes distincts abritant

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trois salles : une salle d’opéra, pour opéra occidental et traditionnel, comédies musicales, spectacles de magie, etc. Cette première salle peut accueillir jusqu’à 16.000 spectateurs. La seconde est une salle pour des concerts symphoniques (avec chœur), concerts de musique de chambre, récitals. Le volume contient 1.500 places. La troisième salle correspond à une salle multifonctionnelle, pour des représentations de théâtre, musique amplifiée, défilés de mode, etc., la salle peut accueillir 500 personnes. Le projet dont les esquisses ont débuté en avril 2010, doit être livré en décembre 2012 et ouvrira ses portes courant 2013.


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