Archibat 41

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SOMMAIRE Archibat N° 41

Revue maghrébine d'aménagement de l'espace et de la construction

Éditorial

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opinion libre Plaidoyer pour l'avènement d'une politique de la ville et des territoires Lettre ouverte à M. le Chef du Gouvernement

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HOMMAGE Foued Elleuch Hommage à la sensibilité de l’architecte et à la générosité de l’homme

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PUBLI-RéDACTIONNEL 20

L’ESAD Tunis conforte sa stratégie d’ouverture sur le monde

Actualités

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Bizerte Smart City Un défi à relever...

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Fondation Djerba Développement Durable

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Programme de Modernisation des Établissements Scolaires (PMES)

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L'École Nationale d’Architecture et d’Urbanisme Des actions qui débordent les murs

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Planification urbaine et aménagement du territoire Retour sur expériences, témoignage de l'urbaniste Jellal Abdelkafi

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Effervescence des espaces dédiés aux Start-up à Tunis

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Start-up Prefabulous Le fabuleux destin du préfabriqué

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NEWS INTERNATIONALES Station F Le plus grand accélérateur de Start-up au monde

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Centre Botín à Santander

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Focus sur les architectes africains émergents Une notoriété à l'international

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Réalisation

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Huilerie et conserverie de Segermès Raviver l’esprit des lieux

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SOMMAIRE Maison

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"Un charme qui se manifeste graduellement..."

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Dar L - Une maison sur mesure

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Villa Anisette - Un morceau choisi

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Villa 44 - Voir sans être vu

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Réalisations marocaines - Filtrage et transparence

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Diplôme Nakhlet Oued El Bey 2017 Restructuration intégrée de « Houmet El Oued » à Gafsa

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Urbanisme Médinatouna Un outil pour accompagner un processus d’appui à des stratégies de développement de neuf villes tunisiennes (SDV)

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Patrimoine Restauration du théâtre municipal de Tunis La bonbonnière fait peau neuve !

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Le Palais Ennejma Ezzahra Projet d’extension et de réaménagement des locaux annexes du palais Ennejma Ezzahra et de ses espaces extérieurs

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PHOTO l’Urbex - Chasse au trésor dans la ville

Art Othmane Taleb - Un artiste libre

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ARCHIBAT

Revue maghrébine à parution tous les quatre mois, publiée par : ABC Architecture Bâtiment et Communcation, S A 19 Rue Abou Bakr Bekri, Imm. Luxor I, Br. M/2 - Montplaisir 1073 Tunis Tél. : 216 71 904 467 - 71 907 952 Fax : 216 71 902 485 E-mail : contact@archibat.com.tn

www.archibat.tn Directrice de publication Amel SOUISSI TALBI Conseillère de la rédaction Alia BEN AYED

Ont collaboré à ce numéro : Alia BEN AYED Fatma JABBERI FARROUKH Henda GAFSI Rachid TALEB Rym RACHDI Membres fondateurs Leïla AMMAR Ali DJERBI Amel SOUISSI TALBI Achraf BAHRI MEDDEB Morched CHABBI Denis LESAGE Publicité Zouhaira TALBI REBAI Jihed SELLAMI Infographie et site web Mouna MATTOUSSI TRABELSI Abonnement Lobna MCHIRGUI BELHAJ Les articles publiés dans cette revue, et les idées qui peuvent s’y exprimer n’engagent que la responsabilité de leurs auteurs. Tous droits de reproduction, réservés pour tous pays. Les textes et photos reçus et leurs envois impliquent l’accord de l’auteur pour leur libre publication. Impression : SIMPACT VISA N° 2796 Autre publication de ABC : Rejoignez nous sur :

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ÉDITORIAL Si la ville est la grande oubliée des autorités publiques, comme le dénonce l’urbaniste Rachid Taleb dans sa lettre ouverte à M. le Chef du Gouvernement, elle suscite, en revanche, un intérêt grandissant de la part de la société civile comme en témoignent les actions citoyennes menées par l’association « Bizerte 2050 » ou encore par la « Fondation Djerba Développement Durable ». Serait-il possible que ces actions conjuguées au programme MEDINATOUNA, qui réunit des organismes et des programmes de coopération internationale, des municipalités tunisiennes et des institutions nationales, parviennent à renforcer la gouvernance locale des villes pour un meilleur vivre ensemble ? Les start-up ont le vent en poupe dans notre actualité nationale. La génération Y bouge les lignes, bouscule les codes et les méthodes du travail. Avec la montée en puissance des Cowrking spaces, des accélérateurs de start-up, ou encore des incubateurs, la Tunisie franchit les frontières de la nouvelle ère économique. À l’international, nous accordons une place de choix aux architectes africains qui font preuve d’un dynamisme grandissant et démontrent leur capacité à exporter leur savoir-faire au-delà des frontières du continent. Respectivement installés à Londres, Berlin et Amsterdam, David Adjaye, Diébédo Francis Kéré et Kunlé Adeyemi, sont bel et bien rentrés dans la cour des grands. Notre dossier est consacré à la maison. Thème incontournable, qui nous permet de prendre la mesure de l’évolution de l’architecture, de ses questionnements, de ses tendances. Nous avons choisi un florilège de maisons conçues par de jeunes architectes marocains et tunisiens qui démontrent la vivacité de l’architecture maghrébine, sa capacité remarquable à se réinventer tout en conservant son authenticité. Le patrimoine est toujours à l’honneur dans Archibat. Cette fois-ci nous faisons la part belle au Théâtre municipal, notre bonbonnière nationale, ce joyau de l’art nouveau, qui vient de se refaire une beauté. Le palais Ennejma Ezzahra n’est pas en reste non plus, avec le projet d’extension et de réaménagement des locaux annexes et des espaces extérieurs dont il vient de faire l’objet. Amel Souissi Talbi



plaidoyer pour l'avènement d'une politique de la ville et des territoires Lettre ouverte à M. le Chef du Gouvernement Par Rachid TALEB, Architecte - Urbaniste

J

e suis un urbaniste tunisien, aux bords de la retraite, et toute ma carrière professionnelle, depuis 1974, a été consacrée au développement urbain et territorial, en Tunisie, dans les pays du Maghreb et en Afrique francophone. Je tenais à partager avec vous ces réflexions sur le futur de nos villes, suscitées par la conjoncture actuelle du pays et par certaines initiatives récentes telles que celle menée sous l’égide de la Fédération Nationale des Villes Tunisiennes portant sur le renforcement et la diffusion des initiatives de planification urbaine stratégique et intitulée « Medinatouna ». Cela fait longtemps en effet que nous militons (professionnels et enseignants) pour l’avènement de ce type de démarche qui, en dehors de toute considération « participationniste », prend en charge l’ensemble des facteurs d’évolution des villes dans le cadre d’une « vision » prospective et intégrée.

OPINION LIBRE

La ville tunisienne, malade de sa mauvaise gouvernance ou d’une volonté d’opacité ? Ce qui a caractérisé le développement de nos villes depuis des décennies, c’est précisément le déficit en matière de prospective et surtout l’absence d’une approche intégrée de son développement, en tant qu’espace vital dans le territoire, interagissant avec lui : de la bonne santé de la ville dépend en effet celle du territoire « commandé » et, inversement, une ville ne pourra remplir correctement ses vocations que si elle est appuyée par un arrière-pays d’où elle puise son énergie, son eau, son approvisionnement, une bonne partie de sa main-d’œuvre, ses matériaux de construction, etc.

s’est occupé du devenir de la ville. Les espaces publics extérieurs ne sont pas en reste, oblitérés par les conflits d’usage avec les commerces et services riverains, et aménagés avec une parcimonie de moyens qui frise l’indigence. Le caractère simpliste de cette attitude masque en réalité une mauvaise foi alimentée par la volonté d’échapper à toute transparence dans la gestion de la ville et de son devenir (un précédent Ministre de l’Equipement, brillant ingénieur par ailleurs, m’avait même rétorqué un jour que les outils de la planification urbaine valaient politique de la ville !). à ce jour, aucun Schéma Directeur d’Agglomération établi en conformité avec le CATU n’a été approuvé dans les formes légalement prévues, ce qui remet en cause leur opposabilité et confirme la volonté d’opacité sur la ville. A titre anecdotique, mais révélateur, le mot Ville apparaît six fois dans le CATU en vigueur (237 pages) dans des locutions anodines où il est question de gaz de ville, d’agglomérations nommément désignées nécessitant l’élaboration d’un SDA ou d’autres détails. Pourtant, ce même CATU avait prévu l’instauration d’un comité interministériel pour l’aménagement du territoire (CIAT) avec notamment pour mission « d’arrêter les grandes options d’aménagement du territoire, d’assurer la cohérence spatiale entre les différents programmes d’aménagement et d’équipement et de donner son avis dans le cadre de ces attributions sur.... les grands programmes de développement des villes ». à ce jour et depuis 1994, le CIAT a du se réunir une ou deux fois et pour ne rien décider.

Le récent exercice de prospective sociétale et économique mené par Les approches sectorielles portant sur la ville, ont toujours été l’ITES (Tunisie 2025) a lui aussi brillé par cet aveuglement génétique caractérisées par leur segmentation extrême : héritage institutionnel ou qui caractérise l’administration tunisienne dès lors qu’il s’agit de la déterminisme assumé, l’action publique sur la ville brille, à ce jour ville ou des territoires. Le mot ville y est cité deux fois sur 217 pages. Le encore, par son incohérence et sa faible efficience. Des fortunes ont plan Régions qui préfigure d’une « nouvelle vision du développement régional, des villes, des infrastructures été dépensées par les pouvoirs publics pour et de l’aménagement du territoire », essayer d’améliorer l’état de telle ou telle Cette négation de l’urbain dans les seuls se résume à une demi-page qui prévoit composante, de tels ou tels types de quartiers documents législatifs et de prospective des investissements publics et privés en ou de telle ou telle institution. Dans le meilleur qui auraient pu y faire référence, est matière d’infrastructures, de logistique et des cas, nous sommes parvenus à éteindre des symptomatique d’un mal profond qui d’aménagement du territoire, mais rien pour incendies ponctuels ou à rectifier une image de la ville, par ailleurs sérieusement écornée. A ronge les pouvoirs publics : celui de la ville et rien en matière de réflexion sur le aucun moment ni dans aucun discours officiel, la spéculation foncière qui constitue rôle que l’espace urbain et régional devra l’espace que représente la ville n’a été abordé l’assise même du pouvoir politique en jouer pour la réalisation des objectifs cités. La ville y est pour ainsi dire totalement ignorée en en tant qu’entité globale à la fois physique, Tunisie. tant qu’espace abritant la plus grande part du sociale, économique, écologique et autre. Tout semble se dérouler comme s’il suffisait de rajouter une ou deux PIB national qui a besoin de réflexions et d’ingénierie pour valoriser opérations de l’AFH, à une zone industrielle de l’AFI et à quelques son potentiel et sur lequel on peut interagir pour mieux enclencher les infrastructures d’échanges et de communication pour considérer qu’on processus de développement régional, chaque ville « commandant »


un territoire plus ou moins vaste selon son statut Nos villes sont encerclées par des le foncier industriel que sous la forme de « administratif et sa capacité de rayonnement. enclaves acquises au prix du terrain zones » s’étendant sur des dizaines d’hectares, Cette négation de l’urbain dans les seuls agricole par des spéculateurs qui est contrainte pour les mêmes motifs à s’exiler documents législatifs et de prospective attendent que la ville « vienne à en dehors des limites du PAU, créant de facto des zones d’appel à l’urbanisation spontanée qui auraient pu y faire référence, est eux » pour réaliser des bénéfices dans un premier temps, puis à l’extension symptomatique d’un mal profond qui énormes et moralement inacceptables inconsidérée du périmètre d’aménagement. ronge les pouvoirs publics : celui de la (enrichissement sans cause). spéculation foncière qui constitue l’assise Alors quand les pouvoirs publics veulent même du pouvoir politique en Tunisie. Pour paraphraser une célèbre formule, on peut affirmer faire du logement pour les plus démunis pour satisfaire des besoins « qu’au commencement était le foncier ». La quasi-totalité des énormes et pour contourner les filières de l’habitat spontané, ils se maux dont souffrent nos villes serait sérieusement atténuée si les heurtent d’emblée au prix des terrains, surévalués du fait des pratiques pouvoirs publics maîtrisaient un minimum les transactions foncières. spéculatives. Cette quadrature du cercle de l’habitat social n’est pas Or, non seulement on ne veut pas les maîtriser, mais bien pire, on près d’être résolue, sauf à revoir complètement la question foncière érige de nouvelles conditions à l’expropriation pour cause d’utilité et le système des aides au logement. Et il en est de même pour toutes publique, stérilisant l’action publique. On n’arrête pas de découvrir les autres composantes du fait urbain, pensées à travers une pratique le nombre de plus en plus impressionnant de projets publics bloqués de planification et de mise en œuvre uni sectorielle, et conditionnées depuis des années pour cause de non- Alors quand les pouvoirs publics veulent par les tentacules de la spéculation foncière. maîtrise du foncier. Des quartiers entiers faire du logement pour les plus démunis Même la loi sur la protection des terres agricoles n’arrive pas à contraindre ces « spontanés » ont été érigés sur des propriétés pour satisfaire des besoins énormes et détournements et des pratiques dérogatoires agricoles publiques, au vu et au su de tout pour contourner les filières de l’habitat sont généralement admises sous l’autorité du le monde. Ces quartiers sont aujourd’hui spontané, ils se heurtent d’emblée au représentant de l'État à l’échelle régionale, devenus des communes de plein exercice prix des terrains, surévalués du fait des au prétexte de la création de l’emploi ou de requérant l’appui de la collectivité nationale l’accélération des procédures. La spéculation alors que les bénéficiaires des lotissements pratiques spéculatives. foncière tient nos villes en otage ! clandestins, ayant détourné des biens publics, et parfaitement connus depuis des lustres, coulent des retraites Sur un autre plan, l’absence de convergence de l’action publique sur heureuses et calmes. Nos villes sont encerclées par des enclaves la ville est patente dès lors que l’on a affaire aux infrastructures de acquises au prix du terrain agricole par des spéculateurs qui attendent transport, de communication, d’eau potable, d’énergie et autres. Le que la ville « vienne à eux » pour réaliser des bénéfices énormes et réseau de TCSP du Grand Tunis converge vers la Place de Barcelone qui n’a jamais été pensée pour cette fonction. On aggrave dans un premier moralement inacceptables (enrichissement sans cause). temps la situation en lui adjoignant les modes du bus et des taxis pour Les édiles locaux, une fois arrivés à la tête des institutions communales, en faire un semblant de gare multimodale. Et la situation va encore mettent leur priorité dans la révision des PAU en vigueur, le plus empirer lorsque le RFR entrera en fonction. Or, il s’agit de la seule souvent pour intégrer ces enclaves au périmètre d’aménagement, place digne de ce nom de tout le grand Tunis avec un ordonnancement alors même que ces PAU recèlent d’énormes potentialités foncières architectural et des constructions à valeur patrimoniale en plein cœur non exploitées, car la TNB est loin d’être dissuasive en Tunisie. Le de l’hypercentre et on l’a tuée avec les transports en commun. Deux Ministère de l'Éducation Nationale a été pour sa part, à l’origine de grandes conséquences de cette absence de vision intégrée et de graves distorsions des périmètres d’aménagement des villes tunisiennes partenariat inter sectoriel : à l’occasion du programme PAQSET financé par des bailleurs de fonds internationaux, par ailleurs très stricts sur le respect de certaines • L’hypercentre de Tunis, désormais accessible, a vu arriver une quantité normes et règles. Les terrains retenus pour des dizaines de lycées et innombrable de populations des quartiers populaires péricentraux collèges sont de façon systématique localisés en dehors des limites et périurbains, paupérisant sa fréquentation et encourageant de PAU, le motif invoqué étant celui du prix du terrain, alors même l’établissement de commerces et de services adaptés à cette chalandise que le PAU a prévu plusieurs emprises réservées à des établissements particulière. d’enseignement et que ces emprises sont gelées et leurs anciens • La deuxième conséquence est le congestionnement de la circulation propriétaires pénalisés pour rien. L’AFI de son côté, ne comprenant dans l’hypercentre du fait du passage récurrent des rames de TCSP,

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en faisant une zone répulsive pour les usagers véhiculés. Paupérisation et perte de fonction de l’hypercentre sont des conséquences directes de la planification du TCSP en dehors de considérations urbanistiques et d’économie urbaine. On a certes considéré l’économie du projet, mais pas celle de la ville qui, en perdant son hypercentre, a perdu un gisement extraordinaire d’attractivité et de compétitivité. Il est arrivé à cet espace ce qui arrivé au lendemain de l’indépendance pour la Médina de Tunis, désertée par ses occupants initiaux et envahie par l’afflux de populations d’origine rurale, entraînant sa perte de fonction et sa marginalisation sociale et fonctionnelle. Aucun autre tissu multifonctionnel n’est pensé dans les projets en cours pour combler ce vide : des opérations d’habitat pour les catégories moyennes et supérieures, des zones industrielles de plus en plus éloignées des zones résidentielles urbaines et... des grands projets, monstres spéculatifs internationaux sans objet, ni demande, ni besoin explicite sinon celui de faire de l’argent sur un foncier à l’origine public. Pour la grande majorité de la population tunisienne à faible revenu, aucun projet public d’habitat n’émerge à ce jour. Tout semble se passer comme si, battus d’avance, les pouvoirs publics abandonnent leurs prérogatives et laissent le soin à l’informel de résoudre ce problème, majeur par son ampleur et par sa dimension politique. Les infrastructures d’eau et d’électricité ne sont pas en reste puisque les organismes concessionnaires ont renoncé dans certaines villes (comme Sfax) à exiger le permis de bâtir et la conformité au Plan d’Aménagement Urbain comme préalable à la desserte des projets individuels. La tendance y est à l’exploitation spontanée du foncier patrimonial (familial) pour contourner les procédures de lotissement et d’autorisation de bâtir. Le résultat en Les efforts pris en faveur est une « Rbatisation » des Jnenes, un du décollage économique encombrement fatal des grands axes ne pourront porter leurs radioconcentriques et au classement fruits que lorsqu’on aura de l’agglomération comme capitale de pris à bras le corps les maux l’habitat informel (pas forcément social urbains et territoriaux du et pauvre, d’ailleurs). Cette nouvelle configuration compromet de plus en plus pays l’accessibilité de l’hypercentre d’origine coloniale et de son extension dans l’opération de Sfax Jadida. Là aussi, l’absence de vision globale et intégrée péjore l’image de la ville, son attractivité et sa compétitivité. Un manque à gagner énorme découle de cette situation qui devrait se traduire par un PIB régional beaucoup plus faible que celui que mériterait l’esprit d’initiative et entrepreneurial des habitants de la ville.

Des grands projets, monstres spéculatifs internationaux sans objet, ni demande, ni besoin explicite sinon celui de faire de l’argent sur un foncier à l’origine public.

Or, cet état de fait n’est pas une fatalité ni le résultat d’une quelconque tare originelle qui plomberait nos villes, à l’histoire féconde et au prestige reconnu. Cette situation de crise urbaine aggravée est préjudiciable au développement économique, social et culturel du pays, car c’est une vérité scientifique que de considérer que l’espace vécu agit sur la société autant que l’inverse. Autant le dire directement, les efforts pris en faveur du décollage économique ne pourront porter leurs fruits que lorsqu’on aura pris à bras le corps les maux urbains et territoriaux du pays. Quel entrepreneur raisonnable s’aventurera avec ses capitaux et ses cadres dans une ville à la ségrégation spatiale poussée, au coût du foncier dépassant en valeur absolue celui des

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grandes capitales européennes, aux conditions de mobilité pénibles, à une situation de l’environnement structurellement défaillante, à la gestion communale presqu’entièrement dépendante de dotations de l'État et au capital patrimonial bâti en voie de dégradation avancée ? Que peut-on attendre des actions publiques détachées des réalités vécues et conditionnées par les volontés éparpillées des ministères de tutelle, sans que personne ne se soucie du devenir global du territoire traité ?

Pour une politique volontariste de la ville Une politique de la ville, dans sa transversalité assumée, devrait concerner : • La capacité à mobiliser le foncier périurbain au profit du secteur public : condition sine qua non pour limiter la spéculation, assurer à la ville une croissance harmonieuse et rationnelle et prodiguer à l’institution municipale des ressources pérennes et conséquentes. • L’habitat social et des plus démunis : actuellement en dehors des circuits de l’habitat formel et source de frustrations et de désordres sociaux de tout ordre. • L’habitat dit spontané : pour une prise en charge radicale du problème, avec des procédures qui assurent la réplicabilité de l’action publique. • L’habitat ancien : valeur patrimoniale, mais aussi d’usage, considérable et en voie de dégradation avancée. • La mobilité urbaine : tous modes confondus, en relation avec les grands équilibres fonctionnels des tissus urbains. • L’environnement urbain dans toutes ses dimensions d’embellissement, de gestion des nuisances, de sauvegarde des ressources naturelles... • La précarité en milieu urbain : pauvreté, insécurité foncière, le droit à la ville, le droit au logement... • Le coaching des collectivités locales : nouveaux territoires et nouveaux élus. • Les incitations à la création d’entreprises et d’emplois : foncières, financières, fiscales... • La cohérence (convergence) de l’action publique : équipements et interventions sur les quartiers. • La prise en charge des infrastructures urbaines (hors lotissements et PAD) : voiries et autres viabilités. • La mobilisation des acteurs porteurs de stratégies : investisseurs, ONG, think tanks... • L’intégration régionale: capacité des villes à être de véritables moteurs du développement régional. • Une gouvernance territoriale intégrée portant sur un territoire largement dimensionné et dégagée des préoccupations électoralistes : la ville est là pour des siècles, alors qu’un maire ne dure que quelques années ! Il faut bien reconnaître que ces sujets, pourtant essentiels pour le devenir des villes, de leurs populations et de leurs économies, sont pratiquement inexistants des préoccupations et des discours des institutions en place. Ces problématiques ont toujours existé dans nos villes, mais elles ont été systématiquement soit minorées et gérées à travers des lorgnettes sectorielles, soit carrément ignorées. L’espace est perçu, dans le meilleur des cas, comme une résultante des actions sectorielles, désordonnées, incohérentes dans le temps et dans l’espace. Il n’aurait pas de déterminisme propre et donc ne mériterait pas plus d’attention que cela. L’action gouvernementale sur les villes


a toujours été considérée comme la prérogative du secteur de la planification urbaine. Or, cette planification se limite à une répartition spatiale de la rente foncière selon des règles et des normes datant des années soixante (règlement Zenaïdi) sans aucune interférence avec les autres actions gouvernementales ni avec l’action communale. Il s’agit simplement d’établir une règle du jeu pour que la spéculation foncière puisse s’exercer librement. La ville tunisienne souffre également d’un déficit abyssal en matière de réflexions, de recherche scientifique et de débats publics, conforme à la volonté d’opacité citée plus haut. Les institutions chargées de la formation des urbanistes et des chercheurs ont brillé par « l’académisation » de la formation enfermée dans des visions théoriques (souvent scientifiquement La ville tunisienne souffre dépassées) et détachées des également d’un déficit abyssal réalités vécues par les acteurs de en matière de réflexions, de la ville, sans aucune possibilité recherche scientifique et de d’évaluation. Les diplômés sont débats publics, conforme à la souvent désemparés une fois volonté d’opacité citée plus haut. dans le monde du travail. Ne s’en sortent que ceux qui ont eu l’intelligence de se « brancher » sur des matières annexes ou connexes liées aux nouvelles technologies. Le nombre de docteurs produits par l’université tunisienne et le volume de leurs productions de recherche dans le domaine de la ville sont restés à l’échelle anecdotique. Aucun discours officiel émanant d’un Ministre, d’un Chef de Gouvernement ou d’un Président de la République, n’a été prononcé depuis l’indépendance sur les thématiques de l’aménagement du territoire, de la ville ou de l’architecture. Aucun débat officiel public n’a concerné ces mêmes thématiques. Même les « concertations » engagées à l’occasion de la sortie de tel ou tel schéma directeur n’ont jamais dépassé le stade de l’« information » lorsque les populations en sont absentes et que les secteurs concernés invités se font généralement représenter par d’honorables fonctionnaires démunis de toute culture urbanistique ou de pouvoir de décision dans le domaine. Cela prouve le peu d’intérêt porté pour les questions de l’organisation de l’espace de la part des plus hautes autorités de l'État et la volonté de confiner la décision (donc le pouvoir sur la ville) entre certaines mains. Les événements de 2011 qui ont permis de faire évoluer les pratiques et les acteurs politiques, sont essentiellement dus au gigantesque hiatus existant entre les espoirs suscités par les schémas directeurs produits (mais légalement jamais validés) et le manque d’efficience de l’action publique sur les La rigidité de la gestion de la territoires concernés. Cette dépense publique et les « jalousies » tare frappant l’action publique départementales ont fait que est essentiellement due à les contrats de partenariat l’éparpillement spatial des intersectoriels sont l’exception interventions (politique du dans un domaine où toute action saupoudrage), à l’absence de exige pourtant la transversalité prise en charge des actions nécessitant plus d’un opérateur des approches. pour sa réalisation ou de celles nécessitant une mobilisation foncière importante. Même au sein d’un même ministère, deux opérateurs sous tutelle rechignent généralement à coopérer pour réaliser un projet intégré. La rigidité de la gestion de la dépense publique et les « jalousies » départementales ont fait que les

contrats de partenariat intersectoriels sont l’exception dans un domaine où toute action exige pourtant la transversalité des approches. Ce n’est qu’à l’occasion des « projets urbains » à financement international que des montages intersectoriels ont pu rarement voir le jour, comme conditionnalité des aides extérieures. Même à l’échelle locale, les regroupements de communes (intercommunalité) en vue de réaliser des projets d’intérêt partagé ou nécessitant des moyens dépassant ceux d’une seule entité, n’ont jamais pu voir le jour, bien que prévus par les textes en vigueur ! Il s’agit donc d’un problème général de gouvernance (et de partage du pouvoir sur l’espace) qui serait une des causes de l’absence de toute préoccupation spatiale dans les interventions sectorielles. Des pays techniquement plus évolués que le nôtre se sont orientés depuis de nombreuses années déjà vers des Il s’agit donc d’un problème pratiques de « territorialisation de général de gouvernance (et l’action publique », postulant qu’à chaque type de territoire, des enjeux de partage du pouvoir sur spécifiques nécessitent des approches l’espace) qui serait une des particulières. A première vue, cela causes de l’absence de toute semble évident, et pourtant... ! On préoccupation spatiale dans les continue chez nous à créer des lycées interventions sectorielles. d’enseignement général dans des villes situées en pleine zone d’agriculture irriguée faisant que ce secteur économique souffre d’un manque flagrant de personnel formé. Les CFP ne sont pas en reste et sont éparpillés sur le territoire national en fonction d’une logique essentiellement quantitative. On continue à projeter et à réaliser des zones industrielles dans des villes où tout le monde sait que les industriels n’iront pas investir (cf. le nombre des invendus chez l’AFI) alors que ces mêmes villes voient se développer de façon informelle des espaces d’activité et de petits métiers urbains. Ces types de dysfonctionnements sont légion, ils montrent en tout cas que les vraies potentialités de nos territoires sont peu connues et ne sont pas valorisées par l’action publique obnubilée par des règles obsolètes de répartition quantitative de l’investissement public. La ville est la première victime de cette défaillance de la gouvernance nationale. Alors que les pays voisins (Algérie et Maroc) se sont attelés depuis de nombreuses années à définir et à essayer de mettre en œuvre une politique de la ville, la Tunisie, du haut sa rente d’histoire urbaine trimillénaire, continue d’ignorer superbement le problème. Jusqu’à quand ? L’initiative évoquée portant sur la planification stratégique en tête de cet écrit, fait face à celle appuyée par un autre bailleur de fonds et intitulée « Programme d’appui à la structuration de la politique de la ville ». Les composantes de ce programme ont peu de choses en commun avec les présupposés d’une La ville est la victime véritable politique de la ville. Ces deux initiatives, première de cette défaillance louables par ailleurs, sont chaperonnées par deux ministères différents qui courent après des objectifs de la gouvernance proches, mais qui, dans leurs prérogatives officielles, nationale. n’ont pas explicitement en charge les questions et les problèmes de la ville. S’agirait-il d’un nouveau « territoire » convoité pour lequel on cherche à se positionner ? Faudra-t-il un jour recourir à l’arbitrage entre des institutions censées se préoccuper du développement du pays et du bien-être de sa population ?

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Que faire, aujourd’hui ? La situation de crise urbaine aiguë nécessite des réponses énergiques et radicales, échelonnées dans le temps avec une feuille de route adaptée à l’architecture institutionnelle du pays et à la complexité des problèmes à résoudre. à court terme : • Préparer une réunion du Conseil Interministériel pour l’Aménagement du Territoire (CIAT) dans une session extraordinaire pour examiner la situation existante des territoires et des villes et mettre en place un train de réformes. La préparation de cette session ne devrait pas être confiée à un département ministériel particulier. Préférer un panel d’experts indépendants. • Organiser, sous l’égide du CIAT et dans la foulée de la session extraordinaire, un débat national sur le futur des villes et des territoires. • Mettre en place, au sein même du gouvernement, un pôle de transversalité associant les départements de l’aménagement du territoire, de l’urbanisme, des affaires locales, de l’environnement et du développement. Ce pôle serait habilité à interpeller les départements sectoriels et capable de parler d’une seule et même voix ferme et coordonnée, dès lors qu’il s’agit d’intervenir sur l’espace. Cela permettra notamment de dire « non » aux implantations hors PAU, de faire converger l’action publique vers la résolution des problématiques locales, de favoriser l’intégration de la planification spatiale et celle du développement économique et social. • Créer des agences d’urbanisme et d’aménagement dans les grandes villes du pays (une étude est en cours et ses résultats mériteront toute l’attention des décideurs). • Préparer (avec l’aide de l’INS) les conditions de l’avènement d’une connaissance nominative et détaillée des populations en situation de précarité afin de concentrer les aides publiques au logement. à moyen terme : • Créer une Instance Supérieure chargée de la politique de la ville et de l’aménagement du territoire, placée sous la tutelle du Chef du Gouvernement et dont le financement, le fonctionnement et les démembrements régionaux seront déterminés en temps voulu. • Adopter les textes juridiques qui donnent priorité à l’achat à la collectivité locale compétente de tout foncier distant de 10 kilomètres des limites des agglomérations et qui fixent les conditions de leur acquisition, sans qu’il soit besoin de passer par les procédures du PIF et du PAD. • Créer une caisse (ou un fonds) auprès de la CPSCL, qui sera devenue Banque des CL entre-temps, en vue du financement de ces acquisitions. • Organiser l’action des agences d’urbanisme et d’aménagement en tant que bras opérationnel de l’Instance évoquée. • Mettre en place des incitations réelles et crédibles pour une répartition rationnelle de la population, des investissements et des infrastructures sur le territoire national. • Doter les futures collectivités locales de moyens humains conséquents et adaptés à leurs prérogatives. • Remplacer les systèmes d’aide « à la pierre » par un dispositif d’aide à la personne en vue de favoriser l’accès au logement aux plus démunis. • Restructurer l’appareil de formation universitaire dédié à la ville et aux territoires et encourager fortement la recherche dans le domaine. à plus long terme : • Adapter les interventions du secteur public sur les tronçons sensibles de la politique de l’habitat (le spontané, le social, l’ancien) à la demande réelle de la majorité des Tunisiens. • Prendre en charge l’habitat ancien avec des formules de partenariat public/privé ou de société d’économie mixte associant l'État, les futurs Districts, les collectivités locales et le secteur privé. • Permettre aux futures collectivités locales de développer des pratiques de marketing territorial dans le cadre d’un système d’émulation contrôlé et régulé par l'État. • Instaurer une politique d’aménagement et de préservation des espaces publics urbains, propriété de tous et apanage de la communauté. • Mettre en place de nouvelles procédures de production de la ville, intégrant des tissus polyfonctionnels, et des nouvelles dispositions de financement et de gestion des espaces produits. ■ Rachid TALEB, Architecte - Urbaniste

Acronymes : CATU : Code de l’Aménagement du Territoire et de l’Urbanisme PAU : Plan d’Aménagement Urbain SDA : Schéma Directeur d'Aménagement PIF : Périmètre d’Intervention Foncière PAD : Plan d’Aménagement de Détail

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HOMMAGE

FOUED ELLEUCH

HOMMAGE à LA SENSIBILITÉ DE L’ARCHiTECTE ET à LA GÉNÉROSITÉ DE L’HOMME Foued Elleuch fonde son agence à Tunis en 1980. Jusqu’en 2016, en son sein, verront le jour une variété infinie de projets, équipements hôteliers, immeubles de bureaux, habitations, espaces commerciaux, villas. Tous auront pour point commun l’empreinte créative et sensible de cet architecte hors normes.

S’

il fallait dresser son portrait, il faudrait commencer par évoquer ses idées qui, comme il le disait lui-même, « se bousculaient trop rapidement dans sa tête », ses idées qu’il fixait à longueur de journées, un porte-mine épais à la main, dans des croquis presque abstraits qu’il racontait oralement et minutieusement à ses collaborateurs les plus proches. Ses idées avant-gardistes, toujours novatrices, il les transmettait ainsi à son équipe telle des offrandes afin qu’elles soient développées et matérialisées soigneusement. Chef d’orchestre génial, il accordera soigneusement des compétences choisies minutieusement, d’une équipe multidisciplinaire, constituée d’architectes de divers horizons, des pilotes de chantier et architectes d’intérieur, dessinateurs… qui forgeront une expérience décennale. « Si Foued » laissera le souvenir d’un père, respectant la créativité et la sensibilité de chacun de ses collaborateurs, coordonnant et catalysant énergies et pensées diverses. Car l’un de ses traits les plus prégnants et qui expliquait aussi sa brillante gestion d’équipe, était son humanisme, son empathie et sa fine compréhension de la psychologie humaine. Aussi dès les premières rencontres avec ses maîtres d’ouvrage, il allait non seulement comprendre mieux que quiconque leurs désirs, leur complexité mais répondre immédiatement par des propositions de scénaris fascinants d’espace et de vie en leur promettant qu’il ne leur vendait pas du rêve mais leur future réalité. Maternant chaque projet comme s’il

était l’unique, l’accompagnant dans les différentes phases, de l’esquisse à l’exécution dans ses moindres détails, cet architecte chevronné, qui travaillait 12 h par jour n’hésitera pas à suivre des chantiers ardus défiant sa propre santé pour la réalisation de ce rêve de projet commun. Il parviendra ainsi à fidéliser ses différents maîtres d’ouvrage, fascinés par des projets inégalables qui dépasseront leurs propres attentes. Architecte visionnaire, complètement moderne et toujours à l’affût d’innovation, Foued Elleuch, diplômé de l’ITAAUT, était aussi profondément attaché à sa tunisianité, et à ses origines. En effet natif d’une grande famille sfaxienne, il gardera de son éducation un sens développé de l’esthétique même ordinaire et une fine sensibilité qui a su s’exprimer dans sa passion et son métier. Son architecture, à son image était un mariage entre tradition et modernité. Installé pendant plus de trente ans au cœur du quartier La Fayette, au centre-ville de Tunis, au 6 rue de Damas, l’Agence Foued Elleuch a néanmoins conçu des projets divers du nord au sud de la Tunisie, Tataouine, Tamerza, et dans le Maghreb, Alger, Hassi Messaoud, Constantine, Tripoli. à cet architecte chevronné, à ce maître hors pair de l’architecture, l’ensemble de ses proches, de ses collaborateurs, intervenants, entreprises, ingénieurs et son équipe lui rend hommage, et lui exprime sa gratitude pour avoir baigné pendant des années dans sa lumineuse aura. Paix à son âme. ■ Imen Landoulsi, architecte

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Hôtel Tamarza Palace


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PUBLI-Rédactionnel

L’ESAD TUNIS CONFORTE SA STRATéGIE D’OUVERTURE SUR LE MONDE

ECOLE D’ETE « Conception et construction éco énergétiques et durables » ESAD – ENAU – TUM Confortant sa politique d’ouverture sur son environnement universitaire, l’Ecole Supérieure d'Architecture, d'Audiovisuel et de Design (ESAD) poursuit son cycle de workshops en développant un partenariat avec des universités publiques et privées, à l’échelle nationale et internationale. Après les deux workshops tenus l’année dernière, en partenariat avec l’Université de Stuttgart et le troisième qui a réuni l’ESAD, l’ENAU, l’Université Technique de Berlin et l’Université Aïn Shams au Caire, cette année une école d’été a été organisée en partenariat avec l'École Nationale d'Architecture et d'Urbanisme (ENAU) et le département « Conception et construction éco énergétiques et durables » de l'Université Technique de Munich dirigé par le Professeur Werner Lang.

Du fait de sa situation géographique, la Tunisie est particulièrement exposée vis-à-vis du réchauffement climatique. Les changements concernent l’augmentation de la température et la baisse des précipitations, deux phénomènes qui ont des effets négatifs non seulement sur les ressources naturelles, mais également sur les secteurs économiques et en conséquence sur les niveaux socioéconomiques. Signataire de l’accord de Paris, concernant la limitation de l’augmentation de la température globale, la Tunisie s’est engagée dans une politique volontariste qui vise à encourager l’écoconception. Consciente de la nécessité de renforcer la formation de ses étudiants dans le domaine de la conception durable, l’ESAD s’engage résolument dans ce sens, et ce d’autant plus que le contexte tunisien est particulièrement vulnérable face aux effets du changement climatique. L'école d'été « Conception et construction éco énergétiques et durables » a été organisée dans ce cadre. Elle vise à améliorer la connaissance des étudiants architectes en termes de conception de bâtiments éco énergétiques et durables. Le programme, qui s’est étalé sur deux semaines, comprend des conférences, des discussions et des ateliers de projets. Les conférences ont concerné l’introduction de concepts fondamentaux, la présentation d’applications et de techniques récentes favorisant la conception et la réalisation de bâtiments éco énergétiques, elles ont été l’occasion de faire un état de l’art des avancées effectuées par les recherches les plus 20 Archibat 41 / 08 - 2017

récentes dans le domaine. Lors d’ateliers de projet, les participants ont été encouragés à mettre à l’épreuve les connaissances nouvellement acquises à l’occasion d’un exercice de conception novatrice de bâtiment à faible énergie, qui répond à la fois aux conditions climatiques et aux spécificités socioculturels. Le travail s’est appuyé sur un projet réel, celui d’un centre culturel visant à promouvoir et à diffuser la culture et l'héritage de l'île, en mettant l'accent sur son authenticité architecturale, initié par la Fondation Djerba pour le Développement Durable. Une trentaine d’étudiants de l’ESSAD et de l’ENAU ont mené leur travail sous la direction du Professeur Werner Lang, Christine Röger, Wael Mousa et Mahmoud Gadelhak enseignants de la TUM, de Kabil Fekih, Chedly Souga, Soukaïna Cherif, Ismaïl Haddad enseignants de l’ENAU et de Mouldi Chaabani, Monia Ouerfelli, Sami Mimita enseignants à l’ESAD. Aborder le projet au prisme de la thématique éco énergétique a été stimulant pour les étudiants. En appui sur les connaissances acquises et ils ont pu proposer des solutions architecturales à la fois innovantes et pertinentes, du point de vue de l’éco conception, mais également, bien situées dans le contexte architectural, urbain et paysager de Djerba. Au cours du workshop Salha ENNAJEH, responsable du DAAD (Office allemand d’échanges universitaires) a présenté, au cours d’une conférence, les opportunités dont pouvaient bénéficier les étudiants tunisiens pour poursuivre leurs études doctorales en Allemagne. Cette conférence a suscité l’intérêt d’un grand nombre d’étudiants de l’ESAD et de l’ENAU.


Entretien avec Najla Allani Quelle place est accordée à l’ENAU au Développement durable et à l’écoconception ? L’engagement de l’ENAU pour sensibiliser les étudiants à la question de l’environnement et du développement durable s’annonce dès la première année avec un cours obligatoire qui s’intitule : « Environnement naturel et bâti ». Cette sensibilisation touche les notions d’écosystème, de nature, de l’écologie, etc. et s’arrête essentiellement sur le soin et le respect que doit apporter le concepteur à la nature et à sa préservation. La thématique est ensuite développée durant tout le cursus à travers des cours théoriques, des séminaires ou en atelier, en particulier, au niveau de la cinquième année puisque la thématique « Démarche environnementale et durable » compte parmi les quatre grandes thématiques proposées. En plus de cet engagement au niveau de l’enseignement, l’ENAU multiplie les cycles de conférences en invitant des universitaires et des professionnels œuvrant dans le domaine de la construction écologique. Quelle est la portée de cette action tripartite ? Cette initiative tripartite a visé un triple objectif, le premier est de s’ouvrir sur des partages et des collaborations avec des partenaires engagés dans les mêmes axes d’intérêt et soucieux d’un échange utile et fructueux. Le second objectif est d’engager l’université publique et l’université privée dans un projet commun, celui d’un enseignement de qualité et une approche valorisante pour les étudiants, futurs architectes. Comme le précise le pédagogue Guy Le Boterf, la qualité d’enseignement est une question d’acteurs et non de facteurs, c’est pour cela que nous avons engagé nos enseignants respectifs pour rejoindre nos collègues allemands dans cette action et à s’aventurer pendant deux semaines, avec les étudiants tunisiens, dans la recherche active de solutions d’énergie passive pour le projet culturel djerbien. Le troisième objectif est celui d’engager les étudiants tunisiens, jeunes diplômés architectes, ainsi que ceux de mastère et de doctorat dans un travail de partage collectif.

À l’issue du workshop, une séance de travail a réuni le Professeur Najla Allani Directrice de l’Enau, Mouldi Chaabani Directeur de l’ESAD, le Professeur Werner Lang, Wael Mousa et Mahmoud Gadelhak de la TUM, pour initier un programme de coopération scientifique et pédagogique entre les trois institutions. Ce programme vise à favoriser la mobilité des enseignants et des étudiants des différents cycles de formations en architecture. L’avantage est donné aux étudiants du cycle doctoral qui peuvent profiter des opportunités offertes par la DAAD pour poursuivre leurs études supérieures en Allemagne. ■

Envisagez-vous qu’elle puisse déboucher sur une collaboration plus pérenne ? Cette initiative est justement prometteuse. Sa réussite annonce un souhait d’engagement de la part des trois partenaires pour des projets futurs. Toutes les conditions sont favorables pour une collaboration durable à savoir l’enthousiasme des Tunisiens et des Allemands pour davantage d’échanges et de partages, la disponibilité des financements internationaux (et particulièrement allemands) pour la mobilité scientifique à la fois des étudiants et des enseignants et la confiance mutuelle des partenaires quant aux niveaux requis des enseignements pour des formations universitaires communes. Le workshop s’est clôturé avec des projets de collaboration sérieux comme le souhait de création d’un mastère commun traitant la thématique de l’éco-construction et de l’efficacité énergétique, l’engagement de la TUM à prendre en charge des étudiants tunisiens de thèse de doctorat en Allemagne, l’organisation d’autres workshops en Tunisie et en Allemagne, inviter d’autres partenaires nord-africains à travailler dans les mêmes projets de collaboration et finalement organiser des séjours scientifiques pour les enseignants dans les pays respectifs pour le partage des expériences et des compétences. ■ Archibat 41 / 08 - 2017

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actualités

BIZERTE SMART CITY un défi à relever ...

L’événement Bizerte Smart City, tenu le 26 et 27 avril courant, est une action citoyenne initiée par l’association « Bizerte 2050 ». En soi l’initiative est louable, dans la mesure où, pour une fois, elle émane des habitants de la ville qui, par définition, sont les plus à même d’en mesurer les limites et les potentialités, en regard de leur mode de vie, des valeurs qu’ils partagent et de la façon dont ils souhaitent cohabiter à l’avenir. En quoi ce concept peut-il être porteur pour un avenir où il fera bon vivre à Bizerte ? Quelles sont les retombées de l’événement ? Quelle suite à donner ?

Une vision prospective Une Smart City, ou « ville intelligente », est une ville utilisant les technologies de l'information et de la communication (TIC) dans le but d’améliorer la qualité des services urbains ou encore de réduire sa consommation énergétique, et ses coûts de gestion. Ce nouveau concept, aux contours mouvants, désigne un type de développement urbain capable de s’adapter à l'évolution des besoins des institutions, des entreprises et des citoyens, aussi bien sur les plans économiques et sociaux qu'environnementaux. Ce concept multidimensionnel, en termes d’acteurs, de domaines ciblés et de briques technologiques, a parfois été mis au service de visées marketing émanant de sociétés commerciales ou de villes, alors même qu’elles n'en traitent qu'un des aspects. Qu’en est-il du cas de Bizerte ? L’association « Bizerte 2050 », à l’initiative de l’événement Bizerte Smart City, milite pour un espace public de qualité. D’emblée saluons l’intelligence des initiateurs de l’événement et leur capacité à trouver les bons leviers et à se donner les moyens pour permettre la réalisation de leurs ambitions. En effet, ils ont su fédérer l’ensemble des parties autour du comité d’organisation qui a réuni, aussi bien, la société civile représentée par ses associations (Bizerte 2050 - Hippo Dirutus ...), que les députés de la région (Dr. Béchir Lazzem et Madame Lamia Dridi), les autorités régionales et locales (Gouvernorat - CGDR - Municipalité ...), 22 Archibat 41 / 08 - 2017

les organisations (CCINE - UTICA ...) ainsi que les entreprises et acteurs économiques régionaux (MAC SA - GROUPEMENT DTA ...). Ceci augure déjà de la réussite de l’opération, ou tout au moins de l’appropriation du projet par l’ensemble des acteurs, en premier lieu les habitants. De plus, s’inscrivant dans le droit fil de la stratégie nationale du développement durable du territoire et des villes, ainsi que celle visant la digitalisation du pays, le projet a pu bénéficier de l’appui politique nécessaire à la mise en œuvre de leur entreprise. Dans un contexte d’urbanisation accélérée et de mobilité accrue, Bizerte, plus que toute autre ville, avec la construction du nouveau pont (voir Archibat 40), est appelée à connaître de grandes mutations, en particulier numériques et technologiques, qui vont affecter ses modes de vie. De plus, face aux exigences de la gestion des ressources naturelles et de l’économie de l’énergie, ces mutations devront s’inscrire dans une démarche de développement durable. L’idée est d’accompagner ces mutations, et plus encore, de les considérer comme un enjeu central pour l'élaboration des stratégies de développement. La gestion des données avec le Big Data est au cœur des défis que devront relever les villes en transformation. C’est également une opportunité dont Bizerte doit, dès aujourd’hui, se saisir pour créer les conditions d’une transformation digitale, d’un saut technologique et, en conséquence, d’un développement fondé sur l’exploitation intelligente des données collectées.


Inscrire la connectivité comme objectif prioritaire de Bizerte, devrait lui assurer, ainsi qu’à l’ensemble de son écosystème, une accélération maîtrisée des échanges d’informations, la création de nouveaux services et en faire un vivier majeur de création d’emplois à forte valeur ajoutée. « Dans le cas de Bizerte, notre approche s'articule autour de deux thématiques majeures qui viendront en appui à notre écosystème socioéconomique actuel, l’énergie et la technologie, à travers un ultime objectif de faire de Bizerte une terre d'Innovations et de progrès ! » affirme Borhène Dhaouadi, architecte manager en politiques urbaines, Président de l’Association Bizerte 2050. Il faut dire que « Bizerte Smart City » est en cohérence avec l’esprit même de la ville. En effet, parmi les villes tunisiennes, Bizerte fait figure d’exception en termes de démarche avant-gardiste. Puisque dès l’après-guerre et, sans doute, du fait de sa situation géographique privilégiée, elle a retenu l’attention de l’équipe menée par l’architecte Bernard Zehrfuss, Grand prix de Rome, en charge de la reconstruction du pays et de la modernisation de ses équipements. C’est à Bizerte qu’a été expérimenté pour la première fois, bien avant Chandigarh ou Brasilia, le concept de ville nouvelle préconisé par la Charte d’Athènes. C’est donc dans le droit fil de cet esprit de modernité que s’inscrit la vision prospective qui vise à faire de Bizerte un cas exemplaire, à l’avant-garde, en phase avec les tendances les plus actuelles d’un monde connecté. Anticipant la décentralisation, préconisée par la constitution postrévolutionnaire, cette vision conforte

la priorité accordée à la collectivité locale pour une gouvernance plus efficiente du territoire. Visant la réconciliation de la ville avec son lac, elle dessine une prospective à l’échelle de la métropole.

Un événement inaugural L'événement inaugural Bizerte Smart City organisé les 26 et 27 avril 2017 a réuni plus de 1.500 participants, dont 5 ministres, 160 institutions publiques, 700 entreprises nationales une centaine d’entreprises internationales dont des multinationales, des universitaires et des associations. C’est dire l’intérêt qu’il a suscité et la suite positive de l’opération qu'il augure. Le but de l’événement était le lancement d’un "Think Lab" destiné à étudier et programmer la mise en place du projet. Il s’est organisé sous la forme de workshops autour de six thématiques : la stratégie Smart city, l’énergie, le transport et la mobilité, la gestion des déchets, l’aménagement urbain et les bâtiments intelligents, l'Internet des objets (IOT). À l’issue de la conférence deux actions concrètes ont été lancées, en présence de Madame La Ministre de l'Énergie Hela Cheikhrouhou : - La déclaration de la région de Bizerte Territoire à Énergie Positive à l'Horizon 2025. - La proposition de création d'un Pôle d'Excellence Régional Dédié aux Énergies Renouvelables. Ces déclarations augurent de la bonne marche du projet.

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La suite Plusieurs actions ont été initiées à la suite de l'événement. En premier lieu la mise en place et la coordination d’un Concours International d’Urbanisme : Bizerte Ville Durable à l’horizon 2050 en collaboration avec les Ministères concernés. L’évaluation des solutions proposées s’appuierait sur un modèle informatique évolutif, élaboré par l’équipe, permettant la simulation des différentes options de développement territorial, urbain et paysager et fournissant des supports d'aide à la décision, crédibles. Des opérations pilotes ont été sélectionnées. La première s’intègre dans le cadre de l’aménagement durable et intelligent de la corniche en vue de la restituer au piéton et d’améliorer la pratique de l’espace public. Une opération pilote devait être mise en œuvre durant l’été sur une vingtaine de mètres côté Ras El Balat. La deuxième concerne la mise en place d’une cellule de coordination pour intégrer l’ensemble des réflexions rattachées à la Smart City dans les études d’exécutions du nouveau pont permanent entre l’autoroute A4 et la Ville de Bizerte. La troisième concerne le centre-ville. Elle concerne la piétonisation de la zone comprise entre deux accroches urbaines importantes (le jardin Bougatfa et la place Annaba) avec la création de trois parkings sous-terrains d'une capacité totale de 2.000 places dans une première phase. Elle concerne, également, la création d'une place publique minérale à l'arrière de la mairie. Cette opération s’accompagne du transfert du Tennis Club à Aïn Meriem à travers un projet ambitieux qui permettra d'organiser des tournois. Cinq opérations immobilières de grande envergure seront également programmées. Un programme de renouvellement urbain accompagnera cette dynamique visant à redonner au centre-ville de Bizerte son éclat et sa splendeur d’antan en le modernisant tout en étant attentif à son patrimoine architectural. ■ Piétonisation du Centre Ville

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Le projet Bizerte 2050 Smart City Dix axes structurants : 1 - Mise en place d'un schéma directeur à court, moyen et long termes, pour identifier, organiser et prioriser les opérations de transformation numérique. Lancement de deux chantiers d’expérimentation d’ici la fin de l’année 2017. 2 - Création d’une commission de coordination Smart City Ville connectée qui organise, pilote et exécute les projets identifiés ; 3 - Mise en œuvre de la fibre optique dans le Grand Bizerte, accès à la 5G et au wifi haut débit public. 4 - Intégration dans les projets d’infrastructure du déploiement des capteurs intelligents et des objets communiquants permettant la collecte des données, visant l’amélioration des services existants ou la création de nouveaux. 5 - Construction d’un système d’information permettant de fédérer les différents acteurs urbains pour une interaction plus efficiente.

6 - Création de services numériques des administrations publiques « e-administration », pour améliorer leur agilité et leur transparence et en faciliter l’accès pour les citoyens, les entreprises locales ou étrangères. 7 - Adoption d’une politique d’Open Data offrant à la société civile et aux entreprises la possibilité d’utiliser les données et les inciter à inventer de nouveaux services urbains. 8 - En plus de l’offshore inscrit au plan de la transformation digitale en Tunisie, création de compétences locales par le biais de formations de haut niveau et de transferts technologiques visant l’expertise et l’offre de services à très haute valeur ajoutée. 9 - Création et animation d’un Technopark faisant de Bizerte un pôle de nouvelles technologies majeur et jouant le rôle d’incubateur de strat-up. 10 - Aménagements fiscaux attractifs à l’endroit des investisseurs financiers (tunisiens ou étrangers) visant la mise en œuvre de projets locaux ou plus ouverts vers l’Afrique.

Suites et Perspectives Institutionnalisation de la démarche Bizerte Smart City (juillet 2017) Démarrage des Think Labs’s Thématiques août 2017). Programme de partenariats institutionnels avec les Villes de Grenoble – Bézier et Marseille (septembre 2017). Participation au Smart City Word Congress à Barcelone (novembre 2017). Workshops de Synthèses des Think Labs’s Thématiques (janvier 2018) Clôture des Think Labs’s Thématiques et validation du BAT (février 2018), Bizerte Smart City - EDITION 2 (Avril 2018).

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FONDATION DJERBA DÉVELOPPEMENT DURABLE La ville fait l’objet d’un intérêt grandissant de la part de la société civile, en témoignent les associations qui voient le jour comme « Bizerte 2050 » ou « Djerba Développement Durable » qui vient de célébrer le lancement des travaux de son siège. Cette fondation milite pour la sauvegarde et la mise en valeur des spécificités architecturales, paysagères et culturelles de l’île. Le 5 août dernier a eu lieu le lancement des travaux de la Maison de La Fondation Djerba Développement Durable. Cette fondation réunit plusieurs associations et acteurs de la société civile, amoureux de l’île, conscients de l’urgence d’agir face aux dégradations qui affectent ses spécificités paysagères et architecturales. Le terrain prévu pour le siège de la fondation est un don du Dr Sadok Besrour en témoignage de son engagement et de son attachement vis-à-vis de son île natale. Les études d’architecture, quant à elles, sont également réalisées à titre gracieux par Ines et Sami Mimita, un couple de jeunes architectes brillants, membres de la fondation DDD. Le programme comprend un espace culturel avec une salle de cinéma et une salle d’exposition, une maison des seniors et un théâtre en plein air pour 300 personnes. Mobilisés dans l’action, les membres de la fondation militent, non seulement, pour arrêter les transformations sauvages que subit le paysage architectural, mais également, pour mettre en valeur ce haut lieu du tourisme méditerranéen, ses richesses écologiques et son patrimoine culturel. Dans ce cadre, la fondation soutient l'AsSIDje (Association de Sauvegarde de l'Île de Djerba) pour inscrire Djerba sur la liste du Patrimoine de l’Humanité de l’Unesco. À ce titre son Président, Mohamed Ben Jemâa appelle à une plus grande mobilisation des Djerbiens. Il prévoit de lancer un fond d’investissement destiné à financer des projets structurants, qui participent de cet effort collectif de développement respectueux de l’environnement. Dans ce sens, la fondation œuvre pour la mise en place d’un comité d'experts et de chercheurs en étroite relation avec les collectivités locales, les associations, la société civile et les citoyens, pour élaborer et mettre en application une stratégie urbaine et de développement durable pour Djerba à l’horizon 2030, voire 2050. ■ 26 Archibat 41 / 08 - 2017


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PROGRAMME DE MODERNISATION DES ÉTABLISSEMENTS SCOLAIRES (PMES) Dans le cadre de ses orientations stratégiques pour le secteur de l’éducation, le Gouvernement tunisien envisage la modernisation et l’amélioration de la qualité du système éducatif. À cet effet, le Ministère de l'Éducation a mis sur pied un programme d’équipement, de construction et de rénovation des écoles secondaires, nommé « Programme de Modernisation des Établissements Scolaires ». Ce programme, d'une durée de quatre années, a démarré fin 2016 et devrait donc se terminer fin 2020.

Le PMES prévoit la construction de 59 nouvelles écoles et la rénovation de 310 installations, sur l’ensemble du territoire tunisien, avec une capacité d’accueil de plus de 36.000 nouveaux élèves. Il vise également le renforcement des capacités des Ministères de l'Éducation et de l'Équipement, au niveau central et régional, en matière de design de constructions scolaires, d’exécution de travaux, de passation de marchés, et de suivi/évaluation de travaux. Le budget alloué à l’opération est de 220 millions d'Euros (environ 600 millions de Dinars), cofinancé par le gouvernement tunisien, la Banque Européenne d'Investissement (BEI), la KfW et l’Union Européenne. Les établissements bénéficiaires ont été sélectionnés sur la base d'une évaluation multicritères des besoins en termes d'importance stratégique et de spécificités locales d'accès à l'éducation. La mise en œuvre du programme et de ses activités a été confiée à une unité de gestion au sein du Ministère de l'Éducation. Cette équipe, composée d'une douzaine de cadres, est chargée de la bonne exécution générale des activités et des marchés, du respect des calendriers et des conditions fixées dans les différents accords de financement. Cette équipe bénéficie de l'assistance technique de différents spécialistes d'origine internationale et nationale (architectes, ingénieurs civils ou autres spécialistes des constructions pédagogiques et/ou bioclimatiques, du suivi de chantiers, de la gestion de programme, de l'équipement, des procédures et des questions environnementales). Cette tâche d’appui a été confiée à un consortium dirigé par la Société de Conseil en Ingénierie, Louis Berger comprenant les bureaux d’études, GOPA et SCET Tunisie. 28 Archibat 41 / 08 - 2017

Par ailleurs les nouvelles constructions feront l’objet d’un concours national pour donner l’opportunité aux concepteurs tunisiens d’exprimer leur créativité. Ce concours sera régi par la réglementation tunisienne et se basera sur les cahiers des charges type élaborés par l’AT dans le respect de la charte et des normes de la BEI (Référentiel environnemental et social, référentiel design scolaire, dossier d’appel d’offre type…). Notons qu’en parallèle, une seconde assistance technique est mobilisée, de manière concomitante, pour la mise en œuvre d’un Programme d’Interventions Qualitatives (PIQ) qui vise, quant à lui, à améliorer la qualité de l’environnement scolaire et le climat disciplinaire dans les écoles bénéficiaires, deux facteurs dont l’amélioration est susceptible d’avoir des effets positifs sur les performances des élèves dans le pays. Le programme de Modernisation des Établissements Scolaires s’inscrit, en effet, dans le droit fil du courant de pensée de l’école efficace. Ce courant qui a mis en évidence le bénéfice de “l’effet établissement” sur la réussite des élèves. L’objectif est d’améliorer, aussi bien, la qualité de l’environnement scolaire que la cohésion sociale et la discipline dans les écoles bénéficiaires, car l’amélioration concomitante de ces trois facteurs est susceptible d’avoir des effets positifs sur les performances des élèves. Ainsi, par le lien qu’il fait entre modernisation des constructions et modernisation des enseignements, le programme PMES pose clairement la question de savoir comment l’architecture et l’équipement scolaire peuvent contribuer à la réussite de tous les élèves ainsi qu’à l’amélioration du climat dans les établissements scolaires. ■


ENSEMBLE, IMAGINONS ...

VOTRE BIEN-ÊTRE

Adresse : Centre Urbain Nord Immeuble Nour City, Bloc B - 2ème étage B2-1. 1082 Tél. : +216 71 82 23 33 - Fax : +216 71 82 22 00 - E-mail : elbiri.immobiliere@topnet.tn


actualités

L'ÉCOLE NATIONALE D’ARCHITECTURE et D’URBANISME

des actions qui débordent les murs

© Ali Hassyaoui

Bien au fait de l’évolution du métier d’architecte, de plus en plus ouvert sur le monde et sur la société, et de plus en plus éloigné du stéréotype du créateur solitaire, l'École Nationale d’Architecture et d’Urbanisme accompagne ses étudiants vers plus de mobilité, encourage l’intérêt pour la recherche, pour une meilleure prise en considération des enjeux sociétaux et environnementaux ainsi qu’une meilleure connaissance des avancées technologiques. Elle poursuit d’un pas assuré sa politique d’ouverture sur son environnement universitaire, professionnel, social et culturel, à l’échelle nationale, mais également internationale. En témoigne les actions, conduites cette année sous la direction de Najla Allani, qui visent à renforcer cette politique en développant des partenariats pérennes avec des institutions universitaires ou des associations. En témoigne également l’engagement de l’école, et de l’équipe pédagogique, à centrer les thématiques proposées aux étudiants architectes sur des problématiques réelles et actuelles.

Tout au long de l’année, plusieurs workshops, des conférences et des expositions ont été organisés suscitant l’intérêt d’un public nombreux d’étudiants, d’enseignants et de visiteurs. Les journées portes ouvertes, dont l’initiative a été lancée l’année dernière dans le cadre des séminaires de 5ème année, ont été, également, reconduites cette année, instaurant une tradition appelée à se perpétuer. Ces journées, qui sont l’occasion d’inviter des professionnels, des industriels et des personnalités du monde universitaire, se sont élargies aux ateliers de 5ème année et à l’international. Des conférenciers du Maroc, d’Italie de Suisse, et de Pologne, en plus de Monsieur Youssef Seddik invité d’honneur dès la première édition, sont venus faire part de leurs expériences aux étudiants, alimentant de leur point de vue pratique les thématiques inscrites dans les séminaires théoriques, favorisant ainsi l’agrégation des savoirs et le renforcement des compétences. Parmi les conférenciers étrangers citons, notamment, le Professeur Antonio Al Magro Gorbea éminent spécialiste de l’architecture andalouse ou Driss Kettani, brillant architecte marocain, premier prix de l'Archmarathon Awards 2015 dans la catégorie Éducation, pour l'École Supérieure de Technologie de Guelmim et lauréat de la catégorie senior rive sud du Mediterranean Mimar Sinan Price avec ses collègues Saad el Kaabaj et Mohamed Amine Siana, qui ont fait salle pleine. Rappelons, à ce titre, que les trois étudiants primés dans la catégorie Junior « rive sud » 30 Archibat 41 / 08 - 2017

sont de l’ENAU avec Mohamed Batran 1er prix, et Hassene Jeljeli et Ali Abidi Mention Honorable. Citons également Mario Cucinella et Paolo Belloni deux architectes italiens reconnus dans le domaine de l'architecture scolaire qui ont animé le colloque portant sur l’innovation dans ce domaine intitulé « Quelle Architecture pour l’école de Demain ? », organisé en collaboration avec le Ministère de l'éducation, l’Institut Culturel Italien, l’Ambassade d’Italie et La Polytechnique de Milan. La présence de Monsieur Neji Jalloul, Ministre de l’éducation, qui a présidé la séance d’ouverture des travaux, et celle de Son Excellence Raimondo De Cardona Ambassadeur d’Italie ont marqué l’événement et contribué à renforcer le statut d’acteur public de l’ENAU. L’ouverture sur le monde culturel s’est manifestée par des marches artistiques et de nombreuses expositions organisées en dehors de l'école, dans différents espaces tels que la Galerie Hédi Turki (en janvier 2016), la Municipalité de Sidi Bou Saïd (en avril 2017), la Maison de la Culture Ibn Rachik (à deux reprises en février et avril/mai 2017) et le Palais de la Rose (en mai 2017). Ce cycle d’exposition s’est achevé en apothéose, le 14 juin 2017, avec le vernissage de l'exposition de fin d'année des travaux d’étudiants, qui s’est poursuivie jusqu'au 8 juillet 2017, et dont la plus grande partie concernait le site archéologique de Carthage, thématique qui a fédéré plusieurs niveaux et différents modules. Cet événement a été couronné


© Salma Omri

par la visite de son Excellence Olivier Poivre d’Arvor, Ambassadeur de France, qui a honoré l’école de sa présence. Étaient présents également deux invités de marque, deux archéologues renommés spécialistes de Carthage, Madame Ladjimi Leïla Sebaï et Monsieur Abdelmajid Ennabli. Tous deux n’ont pas manqué de répondre présents tout au long de l’année aux nombreuses sollicitations de la part des étudiants. Ainsi a-t-on pu admirer, au cours de l’exposition, les carnets de voyage réalisés par les étudiants de première année à l’occasion du séminaire de représentation, ainsi que les projets de ces mêmes étudiants réalisés dans le cadre de l’exercice commun portant sur la conception de l’entrée du musée de Carthage. On a pu voir également, les projets et maquettes réalisés par les étudiants de 4ème année à l’occasion du projet d'extension du musée de Carthage, ainsi que les films de reconstitution de certains monuments emblématiques de Carthage réalisés dans le cadre du module Image de synthèse. Ces travaux sont le fruit d’une expérience qui a démarré cette année grâce à l'extraordinaire appui de l'association des « Amis de Carthage », avec laquelle a été signée une convention de partenariat qui augure d’un partenariat fructueux autour d’un projet commun celui de la mise en valeur du site de Carthage. Ce partenariat permettra de fédérer différentes équipes pédagogiques de l'ENAU autour d’une problématique réelle et de capitaliser les travaux entrepris en leur donnant la possibilité d’avoir une visibilité révélant la nature de la réflexion pédagogique entreprise à l’ENAU et la consistance des résultats qui en découlent. Durant l’exposition de fin d’année, nous avons également eu l’occasion de voir les travaux des étudiants de 3ème année, en particulier ceux portant sur la conception d'une maison de culte commun située à La Goulette, ville à l’histoire multiculturelle où Musulmans, Chrétiens et Juifs vivaient en parfaite harmonie, ainsi que ceux portant sur le renouvellement urbain de la ville de Sidi Bou Saïd. Le projet da la maison de culte commun constitue une expérience pédagogique inédite, qui a été menée cette année pour la première fois à l’ENAU en donnant l’occasion aux étudiants de concevoir un lieu de culte regroupant les trois religions monothéistes (plutôt qu’une mosquée comme à l’accoutumée), les incitant à la réflexion et à la tolérance. Ces travaux ont été exposés le 3 février au Musée National du Bardo à l’occasion de la conférence « Lieux Saints Partagés, Affinités Architecturales » donnée par Najla Allani et l’architecte italien Paolo Belloni. Les travaux réalisés à l’occasion de ce projet ont suscité beaucoup d’intérêt du fait des messages d’ouverture et de tolérance qu’ils véhiculent. Par cette initiative, l’école s’engage contre la montée des extrémismes, considérant de son devoir de faire face aux réalités du contexte sociétal en contribuant à élargir les horizons de ses étudiants et

en les encourageant à mieux connaître l’autre (soi-même par ricochet) pour mieux l’accepter (s’accepter ). En plus des enseignants de l’atelier, le Père Silvio, prêtre à la cathédrale Saint Jean de Tunis, (Avenue Habib Bourguiba), Mme Brigitte Hayoun, responsable au comité Juif de Tunisie et M. Nejib Ben Lazrag, commissaire de l'exposition "Lieux Saints Partagés" étaient présents au jury. Le projet de renouvellement de Sidi Bou Saïd visait à sensibiliser les étudiants à la conciliation des deux axes d’intervention architecturale et urbaine propres à la problématique du projet d’architecture en milieu urbain. L’exposition de ces travaux du 3 au 10 mai dernier, à Sidi Bou Saïd au siège de la Municipalité, constitue les prémisses d’une collaboration visant à offrir aux étudiants l’opportunité d’entreprendre un stage d’été leur permettant de finaliser leur proposition. Sans compter les journées doctorales qui ont, deux jours durant, du 12 au 13 mai, permis de faire le point sur l’état de la recherche à l’ENAU, une autre action et pas des moindres, fut cette année la finalisation d’une quarantaine de thèses de doctorat. Les soutenances ont été enrichies de la présence de collègues algériens, marocains, espagnols, français, italiens et suisses en plus de nos collègues tunisiens d’autres spécialités et d’autres écoles doctorales. Prenant une dimension méditerranéenne, elles ont été des moments d’échanges et de débats intenses et fructueux. Une autre occasion pour développer l’ouverture de notre école doctorale et pour donner plus d’appétit à la recherche à nos actuels doctorants. Dans ce sens, citons la finalisation du partenariat avec l'ETSAB (École Technique Supérieure d'Architecture de Barcelone) pour favoriser l'échange d'étudiants qui sera effectif à partir de la rentrée prochaine, ou encore les conventions récemment signées avec l'INP, celles avec Cerway (opérateur de la certification HQE), ou les entreprises Knauf et Lajnef qui vont donner l’occasion d’ancrer les thématiques abordées sur des enjeux technologiques actuels. Pour clôturer cette année intense, l’habituelle cérémonie de la fête de fin d'année, occasion pour rendre hommage à nos lauréats, nos diplômés et nos enseignants partant à la retraite, a été rehaussée de l’exposition de quelques meilleurs travaux de mémoires d’architecture s’inscrivant dans la thématique "Recréer le patrimoine". Exposition à laquelle a été convié un invité de marque Monsieur Amor Mansour Gouverneur de Tunis qui a pu ainsi prendre connaissance de la consistance de ces travaux. La cérémonie a été agrémentée par de belles prestations musicales, des talentueux étudiants Skander Tlili et Fawez Jridi et à leurs groupes respectifs Fendose et Eshmoun, prouvant si besoin est la sensibilité artistique des étudiants architectes. ■

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actualités

PLANIFICATION URBAINE ET AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE

RETOUR SUR EXPÉRIENCES, TÉMOIGNAGE De l'URBANISTE Jellal Abdelkafi Le séminaire de clôture de l'exposition Gros Plans, Paysages Urbains de Tunisie, organisé le 25 mai 2017 à la Municipalité de Tunis, a été l'occasion de s'arrêter sur le bilan des politiques urbaines et d'aménagement du territoire en Tunisie et surtout de questionner leur évolution à l'aune de la décentralisation qui se profile. Sur ces deux points, Jellal Abdelkafi, Architecte Paysagiste et urbaniste a apporté son témoignage.

D

epuis sa naissance au début du 20ème siècle, l’urbanisme en tant que discipline autonome en gestation, est devenu une authentique spécialité, et, en même temps le contraire d’une spécialité dans la mesure où le recours aux sciences, aux arts et aux techniques, implique la multidisciplinarité ; l’urbanisme est également interdisciplinaire car les pratiques d’aménagement supposent la participation de professionnels aux savoir-faire différenciés, nécessaires pour répondre aux besoins de sociétés urbaines et rurales hiérarchisées, en compétition économique et en situations politiques fragmentées. C’est ce que j’ai découvert au terme de ma formation universitaire et professionnelle en prenant fonction à la direction de l’urbanisme de la ville de Tunis, puis à l’Association de sauvegarde de la médina. J’ai tout simplement découvert, avec la naïveté d’un urbaniste fraichement diplômé, l’étonnante complexité de la « question urbaine » de la première République de la Tunisie, qui pratiquait enfin, le suffrage universel, s’engageait dans les processus de croissance économique et de développement national tout en bâtissant le dispositif institutionnel et juridique des territoires régionaux et locaux ; tout ceci dans le contexte spécialement délicat de la décolonisation. Sous la tutelle des deux gouverneurs maires de Tunis, j’ai appris que l’urbaniste ne fabrique pas la ville comme on dit souvent avec excès de métaphore, mais que l’urbaniste contribue à la régulation sociale et spatiale en planifiant, dans la mesure où la capacité politique du maître d’ouvrage est reconnue par les citadins/citoyens.

Ce retour sur expérience professionnelle ne pouvait toutefois prendre sens que par référence aux éminents travaux des universitaires et des syndicalistes qui, dans les années 50-60 ont apporté les connaissances nécessaires aux débats politiques et manifesté leur engagement pour lutter contre la misère urbaine et l’indigence rurale. À l’occasion des « entretiens interdisciplinaires sur les Villes dans les sociétés musulmanes » conduits par F. Braudel (EPHE 1958), la question des migrations rurales a été mise sur la table politique : Dardel et Klibi enquêtant sur le Djebel Lahmar s’interrogeaient sur la clandestinité de ce faubourg qui a été réalisé dans une marge de la commune de Tunis par des paysans sans terres devenus citadins sans emplois, par transgression des lois et règlements d’urbanisme. Ces deux sociologues s’inquiétaient de la répression policière et des mesures autoritaires de renvoi au douar d’origine, ce qu’on a appelé par la suite la dégourbification. Cette évocation de « Djebel Lahmar, faubourg clandestin » veut rappeler que l’urbanisation informelle, non réglementaire constituée de logements en auto-construction, souvent précaires, couvre les territoires des communes de formes d’habitat anarchiques, sans voiries ni réseaux divers, difficilement accessibles aux services municipaux d’enlèvement des ordures ménagères, se poursuit toujours par le canal de lotisseurs clandestins qui savent mettre sur le marché foncier des terrains à bâtir que les économiquement faibles peuvent acquérir avec facilité de paiement.

Dans la perspective des prochaines élections municipales annoncées pour le 17 décembre 2017, les gouvernants et les gouvernés de la seconde République de la Tunisie, sont appelés à affronter les enjeux prioritaires des ségrégations sociales et spatiales des nouveaux territoires des communes, ségrégations qui ne pourront pas se résorber ou tout au moins s’atténuer sans un effort sans précédent de développement régional et sans la manifestation de solidarité, certains parlent de discrimination positive, pour assister les sociétés civiles des territoires défavorisés à construire les paysages urbains du futur comme le propose la recommandation de l’Unesco 2011.

Compte tenu de cette persistance de la production de l’habitat spontané que tous les urbanistes rencontrent dans l’établissement des Plans d’aménagement, comment planifier la ville ? Les services municipaux peuvent-ils empêcher l’accaparement du foncier et le détournement des domaines publics ?

C’est dans cette situation inédite de transition politique que j’ai ressenti le besoin de faire retour sur mon expérience d’architecte paysagiste et d’urbaniste, objet de « Gros Plans », cette exposition des projets de planification urbaine et d’aménagement du territoire que j’ai dessinés (et parfois réalisés) souvent en équipe avec des ingénieurs et des architectes, des géographes et des agronomes, des sociologues et des économistes, des historiens et des archéologues, des juristes et des géomètres.

En bref, la planification urbaine et la production de l’habitat sont les procédures complémentaires d’une politique publique de la ville, actuellement conduites par le Ministère de l’équipement. Que va-t-il se passer au moment où la décentralisation des services de l'État va entrer en application effective et transférer des responsabilités aux communes ? à titre d’expérience/repère, M. Mokhtar Hammami me permettra sans doute de citer l’étude conduite par La Direction générale des

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Sans politique de prévention comme l’avaient noté l’Agence Française de Développement (AFD), la Banque Mondiale et la Banque Européenne d’Investissement (BEI) dans des études récentes, les institutions de l'État (ARRU, AFH) pourraient apparaître comme cautions de l’urbanisation informelle intra et périurbaine.


Exposition Gros Plans, Paysages Urbains de Tunisie collectivités locales (2008-2012) relative au projet de « Réhabilitation de l’habitat ancien et de régénération urbaine des Centres Historiques de la Tunisie » (PCHT) soumis à l’approbation en conférence exécutive par les trois ministères concernés (Intérieur, Équipement, Culture) le 5 juin 2015. Ce projet de réhabilitation/régénération d’une vingtaine de villes anciennes et de villes nouvelles juxtaposées, constituant l’armature urbaine de la Tunisie contemporaine, n’est pas entré en exécution bien que les bailleurs de fonds de la coopération bilatérale et internationale aient fait preuve de leur disponibilité à financer la démarche sous réserve de la mobilisation des communes comme maîtres d’ouvrage publics pour concrétiser la méthode du projet partagé à l’échelle locale impliquant la participation citoyenne. Compte tenu des prérogatives incontournables des administrations centrales qui conduisent la planification urbaine et l’aménagement du territoire de façon sectorielle, compte tenu de la quasi-paralysie du comité interministériel d’aménagement du territoire (CIAT), la décentralisation se présente comme un bouleversement administratif radical dont personne ne sous-estime les risques politiques. Pour mettre en marche l’urbanisme opérationnel dont les élus municipaux vont avoir immédiatement besoin pour répondre aux aspirations de leurs électeurs, il conviendrait « de démarrer par le local pour affirmer progressivement la région » (AFD, Notes techniques N° 23/2016). Cette façon pragmatique de conduire la planification urbaine a déjà été engagée par trois institutions innovantes, à savoir : - 1943-1948 : Création du « Service d’architecture et d’urbanisme » au Secrétariat Général du Gouvernement de la Régence de Tunis, Premier Ministère, placé sous la direction de B. Zehrfuss architecte en chef qui recrute une vingtaine d’architectes et d’urbanistes. Sans le SAU, les villes n’auraient pu être planifiées correctement (Sfax notamment) et la reconstruction menée à bien. - 1967-2017 : Création de l’Association de Sauvegarde de la Médina placée sous l’autorité du Maire de Tunis et mise en place d’un Atelier d’urbanisme et d’architecture recrutant des compétences professionnelles et universitaires. Sans l’ASM, la réhabilitation de la Médina et la Sauvegarde de son patrimoine monumental n’auraient pu être mises en marche. - 1972-1995 : Création du District de Tunis placé sous l’autorité du Premier Ministère, géré par un conseil d’administration réunissant les collectivités locales de la région capitale.

Sans le District de Tunis, la restructuration du territoire de la capitale, l’implantation de la maille des voiries à l’échelle régionale et du métro léger n’auraient pas été possibles. Ces trois institutions ont dérogé à la classique hiérarchisation bureaucratique des compétences classées selon des grilles administratives régulièrement contestées. Dans les trois cas de figure, le pouvoir politique a favorisé la constitution d’équipes qui ont su répondre à la complexité de la question urbaine. La question des savoirs universitaires et des compétences professionnelles organisées en équipe d’urbanistes, a sans doute été une innovation préfigurant les formes futures de la décentralisation ; compte tenu de ces méthodes alternatives de planification territoriale, la formation et la professionnalisation des urbanistes nécessaires à la communalisation intégrale du territoire, ont été à nouveau débattues le 20 mai dernier au cours d’une journée d’étude organisée par l’Association Tunisienne des Urbanistes (ATU). Les 350 communes vont avoir besoin d’une sérieuse assistance technique pour faire fonctionner leurs services municipaux. Les institutions de coopération internationale et bilatérale devraient pouvoir contribuer à la mise en place d’un système spécifique de formation pour les communes, ce qui faciliterait probablement la décentralisation des services de l'État. ■

Un second séminaire a été organisé en marge de Gros Plans, Paysages Urbains de Tunisie sur la formation et professionnalisation des urbanistes, le 20 mai au Palais Kheireddine. Premier temps du séminaire, la lecture de la situation actuelle. Le bilan montre que grâce surtout à l'engagement des professionnels et des académiques, des formations dédiées à l'urbanisme ont été établies mais que celles-ci restent généralistes et privilégient l'orientation disciplinaire dès le baccalauréat, excluant les autres formes d'enseignement (post diplomation, formations continues...). Parmi les propositions discutées dans la seconde partie du séminaire, figurent le montage de formations destinées aux cadres territoriaux en association avec les structures nationales de formation des cadres, la prise en compte des évolutions du contexte et des pratiques dans les formations actuellement dispensées, le renforcement des enseignements de l'urbanisme chez les architectes et les ingénieurs et la (re)mise en place d'une formation à la recherche.

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