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L’EFFET BADASS

L’EFFET BADASS

Grâce à un rare programme de vélo de montagne adapté, les Québécois en situation de handicap physique peuvent eux aussi se faufiler entre racines et trous de bouette.

mots :: Maxime Bilodeau

Négocier un virage incliné à pleine vitesse, survoler une piste pleine de flow et entendre ses roues retentir sur les planches d’une passerelle – braaaaaap ! – sont autant de privilèges dont peuvent jouir les bien portants. Mais depuis l’année dernière, les personnes à mobilité réduite peuvent elles aussi rouler dans les sentiers de vélo de montagne des massifs de Bromont, dans les Cantons-de-l’Est. Cette initiative a été rendue possible grâce aux Amis des sentiers de Bromont, organisme gestionnaire du Parc des sommets qui a fait l’acquisition de deux vélos de montagne à assistance électrique adaptés à cette clientèle.

« Ça me peine toujours de voir des personnes handicapées être mises à l’écart de la nature. Avec ces nouveaux vélos, elles ont maintenant la possibilité de profiter du réseau du mont Oak », se réjouit Alain Planchamp, directeur général des Amis des sentiers de Bromont. En tout, une dizaine de kilomètres (sur un total de 17) ont été retravaillés afin d’accommoder les besoins de cette clientèle.

« Nous avons élargi des pistes, modifié des courbes et adouci certaines descentes », résume celui qui a compté sur les conseils avisés de la Fondation des sports adaptés pour réaliser ce projet.

C’est justement cet organisme sans but lucratif qui chapeaute les sorties de vélo de montagne adapté proposées durant la belle saison. Trois fois par semaine, les participants partent à l’aventure au guidon de vélos à trois roues – deux à l’avant, une à l’arrière. Le tout se déroule sous l’étroite supervision de bénévoles triés sur le volet ; ces bolides peuvent tout de même atteindre 20 km/h ! Les usagers ont beau ne pas pédaler, « cela leur permet tout de même de profiter d’un sport de plein air », affirme Audrey Larroquette, directrice adjointe de la Fondation des sports adaptés.

De Trois Deux Roues

William Bourassa peut témoigner de cette nécessité de se raccrocher à ses passions, malgré son handicap. Ce Plessisvillois de 36 ans a perdu l’usage de ses jambes en 2015 à la suite d’un grave accident lors d’une compétition de vélo de descente. « J’ai atterri la tête la première sur le sol et ma colonne vertébrale s’est compressée », résume-t-il. Son diagnostic de paraplégie ne l’a pas empêché d’inaugurer les sentiers de downhill au début de la saison suivante, mais cette fois sur un vélo de montagne de marque Bowhead, une compagnie de l’Ouest canadien qui se spécialise dans ce type de produit.

« Avec lui, je pouvais passer partout, ou presque, raconte William Bourassa, en référence au tricycle adapté. Les passages étroits, comme ceux à flanc de montagne, pouvaient par exemple être problématiques. » Il s’ennuie par ailleurs des sensations grisantes que les deux-roues lui procuraient jadis, dans son ancienne vie. « On le tient pour acquis tellement c’est automatique, mais faire du vélo exige de jouer avec son équilibre et sa coordination », souligne celui dont le parcours a fait l’objet, en 2019, d’un documentaire aujourd’hui disponible en ligne : Free/Will.

On y voit le cycliste s’éclater en Colombie-Britannique, « le paradis du vélo de montagne », non pas sur trois, mais bien deux roues. « J’ai conçu un module qui me permet d’être à genoux sur un vélo de montagne à assistance électrique standard », s’enthousiasme-t-il. Sa création, une machine analogue à un motocross qui peut atteindre près de 40 km/h, choque-t-elle les puristes ? À vrai dire, William Bourassa s’en fiche. « Le quotidien d’un invalide à vie n’est pas toujours facile. C’est pourquoi je trouve ça le fun de voir mon sport se démocratiser ; il s’agit d’un pas dans la bonne direction. »

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