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FRANCIS WEYTS
Après avoir obtenu son diplôme en 1984, Francis Weyts s’est spécialisé dans la kiné sportive, la thérapie manuelle et l’analyse du mouvement. Au fil des années, bon nombre d’autres spécialisations et diplômes se sont rajoutés à ce palmarès : Médecine orientale, ostéopathie, endermologie et approche psychosomatique. Francis Weyts a vingt-cinq ans d’expérience au compteur avec des gymnastes et acrobates. De plus, il travaille depuis une trentaine d’années avec des danseurs et danseuses et des pratiquant(e)s de différents sports en accompagnement anatomique. Aujourd’hui, il est également le kiné-ostéopathe de l’équipe fanion D1/H1 du Royal Victory Hockey Club Le spécialiste idéal donc pour poser quelques questions concernant la prévention des blessures et leur traitement dans le contexte du hockey.
Monsieur Weyts, quelles sont, selon votre expérience, les blessures les plus fréquentes chez les joueurs et joueuses de hockey ?
En premier lieu, il y a les claquages à l’aine ou aux adducteurs, associés ou non à une lésion des ischiojambiers (à noter qu’elles sont plus fréquentes à gauche qu’à droite). Les problèmes de dos sont aussi fréquents et plus spécifiquement au niveau des vertèbres D12-L1, le point de rotation de la colonne et l’endroit où l’irrigation sanguine des hanches commence, ainsi que l’innervation des muscles abdominaux obliques et des adducteurs au niveau du pubis. Le bas du dos est également régulièrement sujet aux problèmes, avec des discopathies L4-5-S1 et des problèmes à l’articulation SI. Ceux-ci apparaissent principalement à cause de la position inclinée en avant des joueurs et joueuses de hockey et d’une technique pas toujours au point sur la balle dans la course et le dribble. Il est très important d’apprendre cette technique tôt afin qu’elle soit bien acquise au moment de la croissance. Des distorsions de cheville et des affaissements de la voûte plantaire sont aussi observés chez les joueurs et joueuses de hockey. L’affaissement de la voûte plantaire s’accompagne également de problèmes au niveau du genou en raison de la torsion entre la fibula et le tibia. Enfin, nous sommes aussi souvent confrontés à une instabilité du poignet en raison des nombreux mouvements de poignet et autres impacts. De ce fait, il y a une élongation des ligaments du poignet qui entraîne, à terme, l’apparition d’un kyste, d’une tendinopathie ou d’une instabilité.
Comment ces blessures sont-elles traitées ?
Les problèmes aigus, nous les traitons localement en optant souvent pour le « micro-courant » (la stimulation bio-énergétique ou B-E-St), des techniques de massage classiques, des mobilisations ou la puncture sèche (« dry-needling »). Nous apprécions aussi travailler avec le « recovery pants » de NormaTec, le pistolet de massage d’Hyperice, la crème de massage ou l’andullation, une médecine alternative qui utilise des vibrations mécaniques associées à la lumière rouge et infrarouge pour stimuler les cellules du corps et parvenir ainsi à une réduction de la douleur et à une décontraction. Naturellement, tout commence par la prévention des blessures, dont fait partie une bonne récupération. Nous souhaitons que les sportifs et sportives en soient conscient(e)s, car il est toujours préférable de prévenir que de guérir ! Les exercices spécifiques que nous allons effectuer dans ce contexte dépendent de la cause et de la nécessité. Nous travaillons ici sur une association entre la mobilité, la coordination, l’agilité, la puissance et la vitesse de réaction.
Quelle est la durée de rééducation normale pour ce type de blessures ?
La période de rééducation dépend évidemment de la nature de la blessure. En cas de déchirure musculaire, on parle d’environ une semaine par centimètre déchiré, et ce jusque trois centimètres, au-delà de cela il faut compter environ cinq à six semaines. Cette période est également utilisée pour travailler sur d’autres « faiblesses », à condition de pouvoir le faire sans charger la blessure. En gardant le sportif ou la sportive occupé(e) pendant la rééducation, cela optimise la guérison et crée un processus actif dans lequel le sportif ou la sportive prend davantage conscience de son propre corps. Une autre donnée importante : plus la condition physique de base est bonne, plus la rééducation se passera bien.
Vous avez déjà mentionné que la prévention des blessures est très importante. Comment se passe-t-elle dans la pratique ?
La mobilité, la coordination, l’agilité, la puissance et la vitesse de réaction sont pour ainsi dire les fondements pour une personne sportive en bonne santé. Dans notre club, nous avons commencé à effectuer un examen/contrôle de base des jeunes qui se trouvent en pleine puberté. Cette tranche d’âge est en effet une période à risque lorsqu’il s’agit des blessures. Pendant la puberté, le corps change constamment, que ce soit au niveau de la croissance ou de la force, et cela peut s’accompagner de différentes lésions. L’examen de ces jeunes joueurs et joueuses nous fournit une sorte de passeport sur lequel sont indiqués les éventuels points plus faibles, les risques pourrait-on dire. À partir de là, nous pouvons établir un plan de travail. B-Gold, le programme qui prépare les jeunes à l’intégration dans l’équipe nationale « senior », applique également cette méthode de travail pour les joueurs et joueuses sélectionné(e) s. À mon humble avis, il serait intéressant de rassembler toutes ces informations, avec l’aide également d’autres clubs. Ainsi, nous pourrions répertorier les différentes blessures et avoir une meilleure idée de la charge que représente ce sport. Et si je peux encore donner un conseil : se rendre trois à quatre fois par an chez un ostéopathe peut aussi aider à éviter pas mal de problèmes, en particulier au niveau du dos et du bassin.
Avez-vous un protocole standard pour traiter les joueurs et joueuses de hockey ?
Nous utilisons un protocole de base de SpartaNoval, un spin-off de l’UGent et de la VUB spécialisée dans la prévention, la rééducation et l’entraînement. Il repose sur les piliers suivants : la force dans les membres inférieurs, la souplesse des hanches et du bassin, la stabilité de la ceinture abdominale/des jambes, l’équilibre dynamique et l’alignement. Comme je l’ai déjà mentionné, une collaboration entre les clubs et B-Gold pourrait offrir une plateforme plus large. Nous pourrions élaborer des plans d’entraînement avec différents kinésithérapeutes pour les fournir aux sportifs et sportives, fixer des rendez-vous et échanger des idées sur la rééducation, etc.
Après une blessure, quand un joueur ou une joueuse est-il/elle prêt(e) à rejouer et qui prend cette décision ?
J’ estime qu’un joueur ou une joueuse doit pouvoir effectuer au moins deux entraînements complets avec l’équipe. Ensuite, si nous avons affaire à quelqu’un qui joue dans le onze de base, il ou elle peut jouer un match avec la deuxième équipe. À ce moment, plusieurs éléments sont tenus à l’œil pour vérifier si le joueur ou la joueuse est réellement prêt(e). Le kiné peut décider avec le reste du staff médical que le joueur ou la joueuse est prêt(e) pour vraiment reprendre du service. S’il y a encore le moindre risque ou problème, il est possible de décider en concertation avec le coach d’essayer un certain nombre de minutes de jeu. Le kinésithérapeute et le reste du staff médical sont là pour faire en sorte que les joueurs et joueuses soient prêt(e)s à jouer et en forme, et qu’ils/elles le restent. Ils préviennent des risques éventuels et tâchent de travailler de manière préventive. Nous pouvons par exemple aider les joueurs et joueuses avec du taping, une manipulation du dos ou des membres et la mobilisation des muscles. Nous insistons également sur l’importance de réaliser un bon échauffement et retour au calme, ainsi que d’effectuer des étirements dynamiques avant le match et des étirements statiques après. Vous pouvez le remarquer : en réalité, la prévention des blessures occupe toujours une place centrale !