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L’équipe de France à la dure

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Terre nordique

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Les fondeurs français ont préparé l’hiver dans l’Hexagone, à l’exception d’une courte excursion en Italie.

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b CYRIL BURDET

L’ÉQUIPE DE FRANCE À LA DURE

Une nouvelle organisation mise en place au printemps, une préparation à forte connotation hexagonale : l’équipe de France de ski de fond s’est préparée à vivre un hiver où il faudra s’adapter aux contraintes de la crise sanitaire.

b CYRIL BURDET

Madeleine, du commando pour les expérimentés Croix-de-Fer, Maurice Manificat, Jean-Marc Gaillard, Izoard ou en- Clément Parisse, Adrien Backscheider core Mont-Ce- et les jeunes Jules Lapierre et Hugo Lanis. Ces ascensions sentent bon le Tour palus. de France… C’est pourtant à rollerski Le dernier jour, la troupe a gravi l’Iseque les fondeurs tricolores ont franchi ran depuis Bessans aux aurores. Départ ces cols mi-août. Un sacré programme: à 5h15 et... à jeun! « On avait besoin de 250 bornes et 15000 m de dénivelé po- séances au long cours avec du dénivesitif sur quatre jours. lé. Je voulais aussi sortir les athlètes de

Le périple a été imaginé par Alexandre leur zone de confort. On a évolué dans Rousselet, l’entraîneur du groupe de une ambiance particulière avec de la distanceurs dans la nouvelle organisa- rusticité », enchaîne Alexandre Roustion mise en place après le départ de François Faivre. L’ex-patron des Bleus a été remplacé par Olivier Michaud dont la fiche de poste a toutefois varié. Une évolution plus qu’une révolution. « Mon job, c’est l’entraînement et je n’ai pas à m’occuper du reste de la filière. Olivier assure cette partie. Quand on entraîne sur la coupe du monde, c’est compliqué de suivre les circuits nationaux et autres », précise le Jurassien qui a donc voulu innover avec son circuit en skiroues. Avec un double objectif: renforcer la cohésion et préparer un hiver où Les athlètes qui réussiront sont ceux qui ‘‘Olivier Michaud, directeur des équipes de France de ski de fond l’adaptation sera la clé du succès. « Je voient le verre voulais un stage spécifique pour la distance et en comité restreint. » À la limite à moitié plein. 106 | nordic MAGAZINE | n°34

selet. C’est que, on l’a déjà écrit, l’hiver attaqué par le coronavirus sera à géométrie variable.

Cela a commencé par l’officialisation du huis clos à Ruka (Finlande) pour le lancement de la coupe du monde fin novembre. « Il faut être prêt à vivre dans l’incertitude des programmes », dixit le vainqueur de La Transjurassienne en 2004.

Adepte d’un mode de vie épuré, Adrien Backscheider a validé à 200 %. « C’était à l’image de ce qu’on est dans le ski de fond: simples et proches de la nature. Cela collait à l’esprit de notre groupe. » Avec des nuits dans des refuges ou à la belle étoile. Oubliés les stages à l’étranger. La Covid-19 a modifié les habitudes. L’Hexagone a servi de terrain de jeu: « On a de bonnes choses en France pour bien travailler », rappelle le Vosgien.

Cette itinérance, c’est la seule fois de l’été où les six mercenaires ont évolué sans les sprinteurs et les dames durant leur préparation. Depuis plusieurs saisons, collégialité et transversalité sont les règles dans la maison bleue. Elles vont encore s’accentuer. « Les trois groupes nous ont fait remonter •••

Maurice Manificat : « L’hiver va être compliqué »

Le Haut-Savoyard a vécu une drôle de saison passée, sans aucun podium individuel en coupe du monde pour la première fois depuis plus de dix ans. Dans le dur dès les premières épreuves et malade en janvier, il avait décidé de déserter les dernières manches avant que la crise sanitaire ne mette un terme à l’hiver. La page est tournée. Cap sur les Mondiaux d’Oberstdorf en Allemagne pour un Maurice Manificat qui va davantage cibler ses objectifs. Ainsi, il ne participera pas à l’ouverture de la coupe du monde de ski de fond à Ruka, en Finlande.

NORDIC MAGAZINE. Avec le recul, comment analysez-vous vos difficultés de l’hiver passé?

Maurice Manificat. J’accorde beaucoup d’importance à la préparation et les sensations n’étaient pas là. Il n’y avait pas une journée qui allait mieux que l’autre et j’ai fini par m’enterrer là-dedans. Il y avait de l’inquiétude car je n’avais pas l’adrénaline des belles séances. Parfois, cela ne veut rien dire. On peut se refaire... mais là, avec cet hiver sans neige… Dans le Vercors, on skiait toujours au même endroit. Il n’y avait pas grand-chose auquel se raccrocher. Je rentrais chez moi et, mis à part la famille, je n’avais rien pour décompresser. J’étais dans l’attente du résultat qui ne venait pas et puis la maladie est arrivée. J’ai passé janvier au lit. La crève, la fièvre, la bronchite et une sinusite… C’était la totale!

Arrivez-vous à vous projeter sur la saison à venir malgré la crise sanitaire?

L’hiver va être compliqué. Ce sera pénible mais on se projette quand même. Le calendrier est établi et on sait quelles courses on va cibler. Le maître-mot, cela va être l’adaptation car il y aura des imprévus. On en a eu un aperçu durant l’automne. Cela n’empêche pas de se concentrer sur le travail à faire. On ne peut pas dire: “On arrête de s’entraîner et on se prépare pour dans un an en prévision des Jeux olympiques.” Il faut faire comme si l’hiver allait être normal, même s’il ne le sera sans doute pas…

Allez-vous cibler davantage certaines épreuves?

Avec l’enchaînement des courses, j’ai parfois une santé fragile. Je vais essayer de moins me disperser et préparer des week-ends spécifiques. Les Mondiaux d’Oberstdorf seront le point d’orgue de la saison. J’axerai mon hiver dessus et il y aura peut-être moins de courses en amont. Mais il y a un gros niveau dans l’équipe. Les jeunes sont morts de faim et il va déjà falloir prouver que j’ai ma place! Courir pour s’enterrer dans le fond du classement, cela ne sert à rien. Ce qui m’anime, ce sont les podiums. J’ai encore envie de grosses performances. Je n’imagine pas un second hiver comme celui que j’ai vécu. Mentalement, c’était assez rude. Le plaisir passe par les résultats. En sport de haut niveau, il faut que ça claque!

leur volonté de davantage partager leurs expériences et compétences », argumente Olivier Michaud qui a demandé à Cyril Burdet de jouer les coordinateurs. L’intéressé reste l’entraîneur des sprinteurs, tout comme Thibaut Chêne celui des dames.

Olivier Michaud au-dessus de la mêlée

Cette réorganisation du staff n’a impacté qu’à la marge le fonctionnement. « Cela n’a pas changé notre manière de travailler, abonde Renaud Jay. On reste sur la dynamique des années passées. » Alors pourquoi changer? Pour repartir sur un nouveau cycle – le mandat de François Faivre a duré six ans – et placer un homme ou une femme au-dessus de la mêlée. C’est la condition sine qua non pour avoir ce recul qui peut faire défaut quand on est plongé la tête dans le guidon. « Par le passé, François assurait le coaching du groupe de distance, mais aussi le management. Cette nouvelle organisation soulage les coachs », reconnaît le Savoyard.

Olivier Michaud s’est donc présenté comme la personne idoine. Il maîtrise les différentes strates de la Fédération française de ski. Ces dernières années, il était le sélectionneur de la coupe d’Europe et l’entraîneur des juniors. « Mon rôle, c’est manager l’ensemble de la filière: l’encadrement, les techniciens, la relation avec les cadres de région, les politiques sportives nationale et régionale... Je suis aussi le sélectionneur pour les coupes du monde et d’Europe en lien avec Stéphane [Bouthiaux, le patron du ski nordique français] et la direction technique nationale. »

Dans ce sport individuel qu’est •••

Il faut être prêt à vivre dans ‘‘Alexandre Rousselet, responsable du groupe des distanceurs.

l’incertitude des programmes.

Jules Lapierre et Hugo Lapalus, deux représentants de la nouvelle génération des bleus.

b CYRIL BURDET Les jeunes nous empêchent ‘‘Maurice Manificat, triple médaillé olympique

de devenir trop bourrus.

Ils amènent leur insouciance.

le ski de fond, l’homme parle d’abord collectif: « Les équipes de France ne sont pas basées sur un homme seul, mais un système. Cela ne peut fonctionner et performer que si chaque maillon est lié. » Aussi entend-il se rapprocher de la base: « Je serai présent sur le circuit national pour voir mes collègues entraîneurs régionaux. Ce lien est très important. On est une grande famille et, même si l’on n’est pas d’accord sur tout, il faut se parler et que chacun s’exprime. La puissance du ski nordique français part des clubs et des régions. »

En résumé, on ne déconstruit pas tout ce qui a été fait avant et a porté ses fruits, mais on met de l’huile dans les rouages: « La philosophie menée ces quinze dernières années est la bonne. Sur certains points, il fallait peut-être amener de la fraîcheur et un vent nouveau aux athlètes. On change des petites notes de musique mais pas l’orchestre », détaille encore Olivier Michaud.

Une évolution favorable à Maurice Manificat à l’hiver passé cauchemardesque? S’il n’est plus un jeune loup, le Haut-Savoyard a encore de belles années devant lui. « Nous n’étions pas forcément demandeurs pour changer, mais de la tension s’était créée dans le groupe. Nous voulions retrouver de la sérénité et c’est passé par ces changements », indique le triple médaillé olympique. Comme un coup de pied aux fesses d’un groupe rajeuni. Maurice Manificat toujours: « L’équipe est à l’image des derniers relais médaillés. Ce mélange de générations fait notre

force. Avec Jean-Marc [Gaillard], on a un peu plus de bagout et cela apporte aux jeunes. Inversement, ils nous empêchent de devenir trop bourrus! Ils amènent leur insouciance. »

En père tranquille, comme il l’est avec ses deux jeunes enfants, Adrien Backscheider reste serein par rapport au changement d’entraîneur chez les distanceurs: « Quand tu es senior, tu es autonome. Tu sais ce qui marche ou pas à l’entraînement. La base, quels que soient le pays et l’entraîneur, est toujours la même 80 % du temps. Le rôle du coach, c’est de t’accompagner, te stimuler et te mettre en confiance. Chacun a sa personnalité. François [Faivre] et Alexandre [Rousselet] ne sont pas les mêmes, mais le contenu des séances a à peine changé. Les maîtres-mots, comme Olivier Michaud l’a rappelé, c’est la cohésion et la bienveillance. » Le bien-être du groupe, on y revient. Quand l’hiver sera rude, hachuré, secoué, les liens tissés à plus de 2000 m d’altitude dans les Alpes feront peutêtre la différence.

La crise sanitaire va rebattre les cartes

Comme toutes les grandes nations du ski de fond, la maison bleue a Oberstdorf et les Mondiaux allemands de fin février-début mars dans le viseur. « Ce sera le point d’orgue », confirme Olivier Michaud. Covid ou pas, Alexandre Rousselet est confiant: « Ce sera important de bien lancer la saison, notamment au niveau mental. Il faut retrouver de la sérénité. On a une belle armada et le ski de fond français se porte bien. Les jeunes arrivent et ont la force pour pousser la génération en place qui a déjà fait des médailles et veut encore en faire. »

Dans la hiérarchie mondiale, avec des Norvégiens qui ont été privés de stage en altitude, la crise sanitaire pourrait en outre rebattre les cartes. « Les athlètes qui réussiront sont ceux qui voient le verre à moitié plein. Dans notre discipline, il faut avoir des plans. Là, il faudra être capable de les changer au dernier moment », pronostique Olivier Michaud. Adrien Backscheider en a bien conscience: « C’est un hiver qui sera différent. Le changement, c’est excitant. Il n’y en a pas tellement dans notre sport. Alors s’il y a deux ou trois subtilités, cela va pimenter le truc et on s’en souviendra. » Les podiums n’en auront que plus de saveur. n

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