Nouvelles N° 2026

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Jeudi 26 décembre 2013 - N° 2026 - Hebdomadaire - 15, rue Furtado - 33800 BORDEAUX Prix : 0,80 euro

Amandla ngawetu !

Le pouvoir aux peuples


« NOUS SOUFFRONS D’UN MA On nous avait annoncé les derniers jours de Nelson Mandela, il y a plusieurs mois déjà. Nous aurions dû être prêts à recevoir cette triste nouvelle et pourtant, bien des militants anti-racistes, militants des droits de l’homme, militants politiques, militants communistes en particulier n’ont pu retenir leurs larmes. C’est que ces militants communistes ont porté haut et fort ce combat pour la libération de Nelson Mandela. Ils ont eu des liens étroits avec les communistes d’Afrique du Sud et de l’ANC pour défendre la nécessité d’un boycott complet de l’infâme régime d’apartheid. Ils ont versé des larmes de joie et de fierté, ce n’est pas si souvent qu’on en a l’occasion dans une vie de militant, lorsqu’ils ont vu Madiba franchir les portes de la prison et lever le poing en ce mois de février 1990. Alors à Bordeaux comme à Bègles, à Libourne, et dans de nombreuses villes de France, les communistes ont pris l’initiative de lui rendre hommage et de lui dire une dernière fois : merci Madiba.

Jeunes Communistes de Gironde

Mandela, symbole du rejet du racisme et de l’oppression capitaliste Les jeunes communistes ont souhaité, eux aussi, rendre hommage « au leader historique de la lutte pour l’abolition de l’apartheid en Afrique du Sud et figure internationale inoubliable du combat pour l’émancipation des femmes et des hommes, Nelson Mandela ». Par la voie de leur secrétaire général, ils ont exprimé leurs « plus sincères condoléances à tous ses proches et ses camarades de lutte ». « En France, a poursuivi Ulysse Humbert, le nom de Nelson Mandela résonne comme celui de l’un des grands combats de solidarité internationale qui ont marqué plusieurs générations. Nous saluons le combat mené par des générations de jeunes communistes, fers de lance de ces mobilisations, et tout particulièrement Vincent Maurin, figure de la mobilisation ici même à Bordeaux. Pour toute une jeunesse, le combat pour la libération de Mandela a été le signe de ralliement pour rejeter la haine raciste et l’oppression capitaliste. Nous sommes fiers de poursuivre ce combat pour « un monde de paix, de solidarité et de transformation sociale ».

« Nelson Mandela disait luimême : "La pauvreté n'est pas un accident. Comme l'esclavage et l'apartheid, elle a été faite par l'homme et peut être supprimé par des actions communes de l'humanité." Sa disparition n’entame en rien son combat en Afrique du Sud comme en France ! Plus que jamais, la crise mondiale du capitalisme aggrave la misère et l’oppression de bien des peuples. À commencer par les Sud-africains qui luttent quotidiennement pour conquérir une véritable émancipation économique et sociale. Sur tous les continents, et singulièrement tout autour de la Méditerranée, les peuples et les jeunes se mobilisent face à l’arbitraire de leurs gouvernements et aux forces d’extrême droite qui ressurgissent du passé pour combattre les aspirations à renouer avec les solidarités, le partage du travail et des richesses ». Plus que jamais en France l’heure est à de grandes mobilisations pacifiques pour refuser la haine et la violence de l’extrême droite. Nous invitons tous les jeunes de

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France à se mobiliser pour amplifier encore les combats pour refuser les impasses de l’austérité et des discours de divisions. « Les jeunes communistes, je le disais, ont été une force motrice des mobilisations en France pour en finir avec l’apartheid et libérer Nelson Mandela. Nous poursuivrons notre combat sans relâche car nous sommes convaincus que nous ne serons jamais pleinement libres tant qu’un peuple est oppressé dans le monde. Comme le clamait haut et fort Madiba : « Notre liberté est incomplète sans la liberté du peuple palestinien ». Nous ne lâcherons rien jusqu’à ce que la France se mobilise pour abattre le régime d’apartheid qui s’est installé en Israël et en Palestine. Nous ferons libérer Marwan Barghouti et feront reconnaître pour tous les palestiniens un état digne de ce nom. Pour lui, mais surtout pour nous, nous ne lâcherons rien ! « Amandla ngawetu »! (Le pouvoir aux peuples).


AL INCURABLE, L’ESPOIR. »

MAHMOUD DARWICH

Le combat émancipateur de Mandela n’est jamais fini

Intervention, à Bordeaux, de Vincent Maurin, conseiller municipal communiste « Récemment, des élus de la République étaient rassemblés au moment où Christiane Taubira était salie par l’abjecte, par quelques relents racistes encore présents aujourd’hui dans notre pays des droits de l’homme, a rappelé Vincent Maurin. Je salue aujourd’hui la présence de plusieurs élus : Max Guichard, Claude Mellier, Emmanuelle Ajon, Martine Diez, représentants, garants de notre République, dans ses combats les plus humanistes ». « Tous les médias du monde, tous les peuples parlent de la perte de cet homme, certainement le plus représentatif du XXIe siècle, a ajouté l’élu bordelais. Tout le monde reconnaît aujourd’hui que le combat émancipateur de Mandela est un combat du quotidien et ce combat n’est jamais fini. Y compris dans ces pays que l’on dit démocraties, il est encore à l’ordre du jour. Dans notre France de 2013, les actes racistes continuent et ils ont même progressé. Le Conseil consultatif des droits

de l’homme a récemment révélé qu’entre 2011 et aujourd’hui, ils avaient progressé de 25 %. On voit comment une ministre en Italie, parce qu’elle est noire, est traînée dans la boue. On voit avec notre ministre Christiane Taubira, comment le besoin d’égalité et de fraternité est encore à l’ordre du jour. » Rappelant sa participation aux grandes initiatives des communistes en 1985 et 1986, « le gouvernement était socialiste depuis 1981, précise Vincent Maurin, certains se prélassaient dans les salons de Pretoria. Il était important de dire stop, de dire qu’on ne peut pas négocier avec l’apartheid. » « Dulcie September, représentante de l’ANC en France, avait reçu pour Mandela la médaille de la ville de Bègles, remise par le maire communiste de l’époque, Bernard Moncla. » Vincent Maurin se rappelle « comment, 2 ans après, Dulcie September a été assassinée en plein Paris, soi-disant par un commando sud-africain, alors

qu’elle était sous la protection de l’État français qui n’a pas pu empêcher son assassinat. » « Mandela a œuvré à donner vie à la charte de la Liberté écrite en 1955 dans la clandestinité, c’est-àdire un état non racial ou chaque homme compte avec une voix. Il a relevé le défi de la démocratie et de la tolérance, pas seul mais avec ses amis communistes, syndicalistes, notamment les mineurs, sportifs… ». Revenant à l’actualité, Vincent Maurin a rappelé que le peuple palestinien, le peuple sahraoui et le peuple kurde étaient aujourd’hui dans des situations de soumission, d’exploitation tout aussi insupportables que l’étaient celles du peuple d’Afrique du Sud. « Nous allons continuer à faire vivre la mémoire de Nelson Mandela, a-t-il conclu, à faire vivre son combat universel. Quelles que soient nos différences politiques, nous saurons encore nous retrouver pour les causes que sont l’émancipation, la solidarité, la liberté des peuples. »

Un appel pressant à François Mitterrand

Extraits du discours de Georges Marchais, secrétaire général du PCF le 6 février 1990 à la Mutualité « Si une brèche spectaculaire peut aujourd’hui être ouverte dans la chape de plomb du régime fasciste de Pretoria , on le doit bien sûr d’abord à l’extraordinaire combativité du peuple noir d’Afrique du Sud ; on le doit d’abord aux sacrifices inouïs consentis, à l’image de Nelson Mandela, par tous les résistants, illustres ou obscurs, que ce peuple a produits, suscitant l’admiration de tout ce que le monde compte de gens de cœurs. « Mais on le doit également _ mes camarades de l’ANC sont les premiers à le souligner _ à la mobilisation de l’opinion internationale, en particulier dans les pays dont les dirigeants politiques et économiques servent de béquilles au racisme institutionnalisé de Pretoria. Je pense naturellement à

la Grande-Bretagne de Margaret Tatcher dont les liens privilégiés avec l’Afrique du Sud sont notoires. Je pense aux Etats-Unis dont l’ancien président Ronald Reagan avait « mangé le morceau », comme on dit, en répondant à un journaliste qui l’interrogeait à ce sujet : « Pouvons-nous abandonner à son sort un pays qui, par sa position stratégique, est indispensable à la sécurité du monde libre ? » « Je pense enfin à notre propre pays : il s’y est trouvé des parlementaires de droite pour entamer une croisade immonde en faveur du régime de Pretoria. Ils se sont déshonorés. Malheureusement, le président de la République de la France, berceau des droits de l’homme, a pour sa part commis la faute de refuser à ce jour d’appliquer au régime

d’apartheid les sanctions globales, pourtant exigées par les Nations Unies et toute la communauté internationale. Pis, il a justifié ce refus par le souci _je cite son porteparole_ « de ne pas porter atteinte à l’intérêt national (et de) protéger les intérêts des exportateurs français ! »

une fois de plus un appel pressant à François Mitterrand : « Ecoutez la voix du peuple noir d’Afrique du Sud ! Respectez la volonté de ses représentants ! Appliquez enfin

contre l’apartheid, et jusqu’à sa suppression totale, des sanctions globales, obligatoires et immédiates ! »

« Cela ne fait pas honneur à la France. Aujourd’hui, même les Etats-Unis nous dépassent en matière de limitations des relations avec ce régime honni et criminel ! » « Rien ne peut justifier et surtout pas l’intérêt national_ les complicités avec le régime de l’apartheid. Je suis convaincu de me faire le porteparole de millions de Françaises et de Français (communistes, bien sûr, mais aussi socialistes, chrétiens, antiracistes) en lançant

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AMANDLA NGAWETU

Hors Série

Nelson Mandela

L'Humanité publie un hors-série exceptionnel, accompagné du poster d'un portrait original de Nelson Mandela par Ernest Pignon-Ernest. 84 pages - 8 € La biographie complète de Nelson Mandela. Les lieux symboliques en Afrique du Sud. Son engagement pour la démocratie. Sa pensée. Son héritage. Pourquoi l'Humanité a été de tous ses combats...

Mandela l’inébranlable :

« J’ai adopté comme idéal une société démocratique et libre. Je suis prêt à mourir pour cet idéal ». L’apartheid, terme qui signifie « séparation » en afrikaans, a été institué en 1948. Cet ensemble de lois vise à « légaliser » la traite des Noirs par les Blancs perpétrée depuis trois siècles en Afrique du Sud. En 1964, devant le tribunal où il comparaît pour sabotage et intention « d’établir un régime communiste », Nelson Mandela, avocat de formation, assure lui-même sa défense et répond point par point aux accusations du tribunal. Il assume le recours à la violence, un recours rendu nécessaire par la violence dont l’Etat fait preuve. Et l’accusé de « communisme » rappelle le legs d’un parti qui fut « pendant des décennies le seul groupe politique à traiter les Africains en être humains et en égaux ». Avec cinq autres dirigeants de l’ANC, il sera condamné aux travaux forcés à perpétuité. Le 20 avril 1964, Mandela face à ses juges au procès de Rivona. Je ne nie nullement avoir préparé un plan de sabotage. Je l’ai fait à la suite d’une analyse calme et réfléchie de la situation politique, telle qu’elle résulte de nombreuses années de tyrannie, d’exploitation et d’oppression de mon peuple par les Blancs. Il nous fallait soit accepter un état permanent d’infériorité, soit relever le défi du gouvernement. Nous avons décidé de relever le défi. Nous avons commencé par enfreindre la loi tout en évitant le recours à la violence. Et c’est seulement quand le gouvernement eut

recours à la force que nous avons décidé de répondre à la violence par la violence. Cependant, la force dont nous usons n’est pas le terrorisme… Nous pensions que l’Afrique du Sud appartenait à tous ceux qui y vivaient, et non à un groupe, qu’il fût noir ou blanc. Nous ne voulions pas d’une guerre inter raciale. La dure vérité était que 50 années de non-violence n’avaient rapporté aux Africains qu’une législation plus répressive. Ce fut seulement quand toutes les voies de protestation pacifique nous eurent été barrées que la décision fut prise de s’engager dans les formes violentes d’action politique. « Nous voulons des droits politiques égaux » L’accusation assure que les buts et les objectifs de l’ANC et du Parti communiste sont identiques. La doctrine de l’ANC a toujours consisté dans un nationalisme africain, qui vise à défendre le droit des Africains à la liberté et au plein développement sur leur propre sol. Il y a souvent eu coopération étroite entre l’ANC et le Parti communiste, mais elle prouve simplement l’existence d’un objectif commun, le renversement de la suprématie blanche, et non une entière communauté d’intérêt. Les communistes ont toujours joué un rôle actif dans le combat des pays colonisés pour leur liberté, parce que les objectifs à court terme du communisme correspondent toujours avec les objectifs à long terme des mouvements de libération. Les divergences théoriques sont un luxe que nous

Les Nouvelles de Bordeaux et du Sud-Ouest S.A.S. au capital de 37 000 euros Associés (à parts égales) : L. Chollon, F. Mellier, S. Laborde Directeur de la publication : Frédéric Mellier Abonnement 1 an : 25 euros. Abonnement de soutien : 40 euros Rédaction, composition, impression : S.A.S. Les Nouvelles de Bordeaux et du Sud-Ouest 15, rue Furtado - 33800 BORDEAUX Tél. 05 56 91 45 06 - Fax 05 56 92 61 01 - Annonces légales : annonces@nbso.fr Comptabilité : compta@nbso.fr - Redaction/Proposition d’article : redaction@nbso.fr Commission paritaire de presse : 0113 C 85932

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ne pouvons pas nous permettre. En outre, les communistes furent pendant plusieurs décennies le seul groupe politique en Afrique du Sud qui fut prêt à traiter les Africains en êtres humains et en égaux, à travailler avec eux pour l’obtention des droits politiques et d’une participation à la gestion de la société. Nous ressentons tous le besoin de quelque forme de socialisme qui permette à notre peuple de rattraper les pays nantis de ce monde et de surmonter l’extrême pauvreté qu’ils nous ont léguée. Ne m’attachant à aucun système social autre que le socialisme, je dois demeurer libre d’emprunter le meilleur à l’Ouest comme à l’Est. Avant tout, nous voulons des droits politiques égaux, parce que sans eux nous restons impuissants. Je sais que cela sonne de façon révolutionnaire pour les Blancs de ce pays, parce que la majorité des électeurs sera constituée d’Africains. Oui, le Blanc a peur de la démocratie. Mais on ne peut permettre à cette crainte de barrer le chemin à la seule solution qui garantira la paix et la liberté pour tous. Il n’est pas vrai que l’égalité des droits aura pour conséquence la domination raciale. La division politique basée sur la couleur est entièrement artificielle et, lorsqu’elle disparaîtra, il en ira de même de la domination d’un groupe de couleur sur un autre. Tel est le combat de l’ANC. Il s’agit d’une lutte nationale. Toute ma vie j’ai lutté pour la cause du peuple africain. J’ai combattu la domination blanche et j’ai combattu la domination noire. J’ai adopté comme idéal une société démocratique et libre où tous vivraient ensemble dans la paix et avec des chances égales. C’est un idéal pour lequel j’espère vivre et que j’espère accomplir. Mais c’est aussi un idéal pour lequel je suis prêt, s’il le faut, à mourir. »

Stade Nelson Mandela

« Aucune chance d’aboutir ? » C’est la question que posait Vincent Maurin en juin dernier en invitant la population à se prononcer pour « que le sport-business ne soit pas la fin de l’histoire » et à ne pas se résigner « à la marchandisation du sport, à ce que le stade où évolueront les équipes des Girondins de Bordeaux et de l’Union Bordeaux Bègles, s’appelle AdidasStadium, Nike-Arena, Total-Park, ou autre marque de banque, assurance, voiture ou lessive ! » Une enceinte sportive doit rester un lieu public, accessible, contrôlé. Un élément du patrimoine d’un territoire. Dont le nom fera le tour du monde et laissera l’empreinte de la ville. Quel meilleur ambassadeur pour la ville et les valeurs sportives que Mandela ?

Signez la pétition vincentmaurin.fr


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