Vinie Graffiti
Jeudi 31 décembre 2015 - N° 2131 - Hebdomadaire - 15, rue Furtado - 33800 BORDEAUX Prix : 0,80 euro
! 6 1 0 2 e é n n a e bonn t a b m o c e l t n a v a e i s é o p e d rin
BONNE AN
Brins de poésie avant le combat.
Une rose en décembre En plein décembre, ce matin Et sous la neige du jardin J’ai trouvé une rose Elle s’était trompée de temps Et n’avait trouvé que le vent Meurtrie à peine éclose Ô rose, rose bien trop frêle Déjà meurtrie, ma presque belle Qui vous dressez malgré le froid Et contre toute vraisemblance Croyez que le printemps commence Rose, vous ressemblez à moi En plein décembre j’ai trouvé La rose qui me ressemblait Aux pétales de givre Non pas la rose d’un été Non pas la rose d’un bouquet Et de la joie de vivre Mais rose, rose pas très belle Rose à l’espérance fidèle Au risque d’y perdre le cœur Vous qui refusez la tempête Et redressant toujours la tête Comme moi, niez le malheur En plein décembre, je vous ai Cueillie comme je le pouvais Et placée dans un verre Une larme bien oubliée Du temps où je savais pleurer A taché ma paupière Ô rose, rose de courage Un peu fripée, un peu sauvage Les jardiniers riront de nous Tant pis si le froid me démembre Je fleurirai même en décembre Et que me comprennent les fous En plein décembre, ce matin Et sous la neige du jardin J’ai trouvé une rose Une rose
Anne Sylvestre 2 • Les Nouvelles 31 décembre 2015
Et c’est d’abord auprès de femmes, de combattantes, que nous l’avons trouvé. Chez Rosa Luxemburg, évidemment. Depuis ses cellules d’enfermement, la révolutionnaire allemande a produit quelques unes des plus belles lettres politiques. Elle y parle d’amour, de révolution, de poésie, des petits oiseaux et de ses colères. « Au milieu des ténèbres, je souris à la vie, comme si je connaissais la formule magique qui change le mal et la tristesse en
clarté et en bonheur », écrivait-elle. La lettre que nous reproduisons ici est une des dernières qu’elle ait pu faire parvenir à son ami intime, Hans Diefenbach avant qu’il ne soit emporté par la guerre, en octobre 1917. Elle est traversée par cette volonté farouche de vie et, un siècle plus tard, elle nous parle encore. Comme la chanson d’Anne Sylvestre écrite en 1969 mais qui semble avoir été chantée pour les progressistes d’aujourd’hui. « Rose à l’espérance fidèle / (…) / Vous qui refusez la tempête / Et redressant toujours la tête. » Comme 90 familles, Anne Sylvestre a eu la douleur d’apprendre la mort d’un proche, le 13 novembre dernier. Jeune, amoureux lui aussi de la musique, il est tombé sous les balles de haine dans la salle du Bataclan. La chanteuse a 80 ans et une douleur en plus mais elle continue de trimballer ses mots, son courage et son amour de la liberté, simplement. Le courage, celui de Rosa Parks, salué par des artistes sur la grise rue d’Aubervilliers, dans ce Paris pauvre mais coloré. La liberté, celle de ces artistes qui, sur les murs,
réagissent à l’obscurantisme, à la haine qui ont emporté il y a un an nos camarades Charb, Wolinski, Tignous, Cabu… et trop d’autres. Ces mots, ces images ne règlent rien. En 2016 comme en 2015, il nous faudra batailler, lutter contre les vents contraires. Parfois même, nous nous engueulerons pour savoir dans quelle direction aller. Nous aurons alors bien fait de relire Rosa Luxemburg qui, en janvier 1917, écrivait sa « colère » dirigée contre son amie Mathilde Wurm : « Être humain, ca veut dire être solide, clair et calme, oui, calme, envers et contre tout, car gémir est l’affaire des faibles. (…) Le monde est si beau malgré toutes les horreurs, et il serait plus beau encore s’ il n’y avait pas des pleutres et des lâches. Allez, va ! Je te fais un baiser, car tu es, malgré tout, un brave petit gars. Bonne année ! » Si Rosa depuis son cachot en 1917 pouvait dire cela avec tant d’énergie et de bonté alors, nous pouvons bien nous lancer un joyeux, sincère et volontaire : bonne année !
Vincent Bordas
HOMMAGE
Rosa Parks fait le mur La Ville de Paris a donné le nom de Rosa Parks à une future station de RER en hommage à la militante américaine. Autour de cette station, rue d’Aubervilliers dans le 19e arrondissement, des artistes ont fait naître la plus grande fresque de street-art de la capitale. La fresque démarrée le 7 octobre et inaugurée le 19 décembre a été réalisée par les artistes Bastardilla, Katjastroph, Kashink, Tatyana Fazlalizadeh et Zepha, avec les habitants du quartier, après plusieurs mois de travail, d’atelier-débats et d’ateliers artistiques. Au lendemain des attentats contre Charlie-hebdo, en janvier dernier, dans le cadre du budget participatif de « reconquête urbaine », cinq street artistes – dont quatre femmes – sont appelés à créer une œuvre s’inspirant de la vie de la militante des droits civiques, Rosa Parks, dont la future station du RER E portera le nom. La rue d’Aubervilliers est symbolique : c’est ici, dans un des quartiers les plus pauvres
Vinie Graffiti
Nous sera-t-il possible de commencer une année, un jour, sans penser aux dessinateurs de Charlie Hebdo disparus le 7 janvier 2015 ? Ils ne furent pas seuls à tomber sous les balles de la barbarie ce jour-là et nous n’avons pas oublié les autres victimes, dont le funeste 13 novembre a encore allongé la liste. Mais nous avons une pensée particulière pour Cabu, Wolinski, Charb, Honoré, Tignous et Maris qui étaient partie prenante de notre univers culturel, de notre espace militant, des camarades dont le regard sur le monde nous manque…
Inutile de faire la liste des sombres affaires traversées en 2015 pour comprendre qu’il a fallu une bonne dose de Champagne pour se souhaiter une bonne année ce 1er janvier. Mais les lectrices et les lecteurs des Nouvelles sont des combattants du quotidien, dans leurs engagements politiques, syndicaux, associatifs… L’accablement peut parfois les effleurer, la capitulation jamais. La rédaction des Nouvelles a donc réfléchit à ce qui leur serait le plus utile avant de repartir aux combats. Et puis, la réponse est venue assez simplement : un brin de poésie. Plusieurs même. Car comment faire partager son idéal quand on ne prend pas le temps de l’exprimer ?
de Paris, qu’ont grandi les frères Kouachi dans les années 80.
de manière à séparer les personnes blanches des Nègres ».
Les œuvres vont rester six mois sur le mur, avant d’être remplacées par d’autres œuvres, d’autres expressions.
Le 1er décembre 1955, à Montgomery (Alabama), une couturière de 42 ans, Rosa Parks, décide de mettre fin à l’humiliation quotidienne. Elle refuse de céder sa place à un « blanc », l’exprime à voix haute. Elle est aussitôt arrêtée. Cet acte de résistance marquera le début d’un grand mouvement de boycott des bus par les afros-américains, animé par le jeune pasteur, Martin Luther King, qui durera un an et seize jours, jusqu’à ce que la Cour suprême des États-Unis affirme enfin que la ségrégation dans les bus est anticonstitutionnelle.
Rosa Parks a changé les États-Unis en disant « non » Dans l’Amérique ultraraciste des années 1950, Martin Luther King réunit ses premiers partisans. Le mouvement pour les droits civiques se met en marche. Le « Code urbain de Montgomery » de 1905, toujours en vigueur en 1955, impose au personnel sur les ligne de bus « d’attribuer des sièges de passagers sur leur véhicule
Christelle Danglot
NNÉE 2016 ROSA LUXEMBURG
« Aujourd’hui, nous avons encore eu une journée d’une beauté inconcevable… Je voudrais crier par-dessus le mur ». Lettre à Hans Diefendbach 1, Wronke, 6 juillet 1917, vendredi soir Petit Hans, dormez-vous ? J’arrive avec un long fétu de paille pour vous chatouiller l’oreille. J’ai besoin de compagnie, je suis triste, je veux me confesser. Ces jours-ci j’étais méchante et donc malheureuse et donc malade. À moins que ce n’ait été l’inverse : j’étais malade et donc malheureuse et donc méchante - je ne sais plus. Mais me voilà bonne à nouveau, et je fais le serment de ne plus jamais, jamais écouter les démons qui sont au fond de moi. Pouvez-vous m’en vouloir d’être parfois malheureuse, quand je ne peux plus voir et entendre que de loin ce qui est pour moi la vie et le bonheur ? Mais après tout oui, grondez-moi, et je jure que je serai désormais la patience, la douceur et la gratitude même. Mon Dieu, n’ai-je pas assez de raisons d’être reconnaissante et gaie, puisque le soleil brille si bien et que les oiseaux chantent cette vieille chanson dont j’ai si bien compris le sens ? … Celui qui m’a le mieux ramenée à la raison est un petit ami dont vous trouverez ici le portrait. Ce compagnon au bec insolent, au front abrupt et à l’œil malicieux s’appelle : « hypolaïs hypolaïs », ou plus communément : « oiseau des tonnelles » ou encore : « moqueur des jardins ». Vous l’avez sûrement déjà entendu quelque part, il niche volontiers un peu partout dans les jardins et les parcs touffus ; simplement, vous ne lui avez pas prêté attention : les gens passent souvent devant les choses les plus nobles de la vie sans même les regarder. C’est vraiment un drôle d’oiseau, celui-là. Il ne chante pas de chanson ou de mélodie comme les autres, il est né tribun, par la grâce de Dieu. Il adresse au jardin des discours retentissants, pleins de fièvre et de drame, de transitions audacieuses et de crescendos pathétiques. Il pose les questions les plus impossibles, s’empresse d’y apporter des réponses aberrantes, avance les affirmations les plus hardies, réfute fougueusement des points de vue que personne n’a exprimés, enfonce des portes ouvertes, et triomphe subitement par des : « Ne l’avais-je pas dit ? Ne l’avais-je pas dit ? » Puis il enchaîne par de solennelles mises en garde à tous ceux qui veulent ou ne veulent pas l’entendre : « Vous allez voir ! Vous allez voir ! » (car il a la judicieuse habitude de répéter chaque plaisanterie deux fois). Et ça ne le dérange pas du tout de couiner subitement comme une souris qui se serait coincé la queue, ou d’éclater d’un rire qui se voudrait diabolique, et qui, venant de cette minuscule petite gorge, est incroyablement comique. Bref, il emplit sans relâche le jardin d’absurdités éclatantes, et dans le silence qui règne pendant ses harangues, on croirait voir les autres
oiseaux échanger des clins d’œil et hausser les épaules. Je suis la seule à ne pas hausser les épaules; chaque fois, je ris, comblée, et je lui lance : « Petit palabreur ! » Car je sais bien que cet absurde bavardage est profondément sage et qu’il a raison en tout point. Tel un second Érasme de Rotterdam, il chante en toute conscience l’éloge de la folie, et il tape juste, forcément. je crois qu’il reconnaît déjà ma voix. Aujourd’hui, après plusieurs semaines
guérie de la méchanceté, du malheur et de la maladie. Non, Petit Hans, je ne divague pas en vous décrivant ce bavardage théâtral ! Chaque mot est vrai. Vous pourrez vous en convaincre en allant au Jardin botanique de Berlin, où l’oiseau moqueur niche en masse, et vous rirez aux larmes en écoutant ce drôle de petit gars. Aujourd’hui, nous avons encore eu une journée d’une beauté inconcevable. D’habitude, je regagne ma
La lumière du soleil ourlait ces nuages d’un blanc d’écume éclatant, et au cœur, ils étaient gris, d’un gris très expressif, passant par toutes les nuances, du voile argenté le plus doux au ton orageux le plus sombre. Avez-vous déjà remarqué la beauté et la richesse du gris ? Il a quelque chose de si distingué et pudique, il offre tant de possibles. Quelle merveille, tous ces tons gris sur le fond bleu tendre du ciel ! Comme une robe grise va bien aux
Kipling 2 raconte, dans une de ses histoires indiennes, que chaque jour vers midi, un troupeau de buffles est emmené loin du village. Ces bêtes gigantesques, qui en quelques minutes pourraient écraser sous leurs sabots un village tout entier, suivent docile ment la baguette de deux petits paysans à la peau sombre, vêtus d’un simple tricot, qui les conduisent d’un pas décidé au lointain marécage. Là, les bêtes, dans un énorme bruit, se laissent glisser dans la boue, s’y vautrent avec délice et s’y enfoncent jusqu’aux naseaux, pendant que les enfants se protègent des rayons impitoyables du soleil à l’ombre d’un maigre acacia, mangent lentement une galette de riz qu’ils ont emportée avec eux, observent les lézards endormis au soleil et, en silence, regardent vibrer l’espace … « Un après-midi comme celui-là leur semblait plus long qu’à bien des hommes une vie entière », lit-on chez Kipling, si je me souviens bien. Comme cela est bien dit, n’est-ce pas? Moi aussi, je me sens comme ces enfants indiens, quand je vis une matinée comme aujourd’hui. Une seule chose me fait souffrir : devoir profiter seule de tant de beauté. Je voudrais crier par-dessus le mur : je vous en prie, faites attention à ce jour somptueux! N’oubliez pas, même si vous êtes occupés, même si vous traversez la cour à la hâte, absorbés par vos tâches urgentes, n’oubliez pas de lever la tête un instant et de jeter un œil à ces immenses nuages argentés et au paisible océan bleu dans lequel ils nagent. Faites attention à cet air plein de la respiration passionnée des dernières fleurs de tilleul, à l’éclat et la splendeur de cette journée, parce que ce jour ne reviendra jamais, jamais ! Il vous est donné comme une rose ouverte posée à vos pieds, qui attend que vous la preniez, et la pressiez contre vos lèvres. R. Rosa, la vie, Les Éditions de l’Atelier / Les Éditions ouvrières, Ivry-surSeine, 2009. Traduit de l’allemand par Laure Bernardi.
de silence, il a recommencé son raffut, et s’est installé sur le petit noisetier juste devant ma fenêtre. Quand toute joyeuse, je lui ai lancé mon salut habituel : « Petit palabreur ! », il m’a crié je ne sais quelle impertinence que l’on pouvait presque entendre comme : « Folle toi-même ! »… Je l’ai immédiatement admis dans un rire reconnaissant, et sur-le-champ j’ai été
tanière à 10 heures du matin pour travailler, aujourd’hui je n’ai pas pu. J’étais étendue dans mon fauteuil en osier, la tête renversée en arrière, et, sans bouger, j’ai regardé le ciel des heures durant. D’immenses nuages aux formes fantastiques recouvraient le bleu tendre du ciel qui ça et là apparaissait entre leurs pourtours déchiquetés.
yeux bleus profond. Pendant ce temps, devant moi, le grand peuplier de mon jardin bruissait, ses feuilles tremblaient comme dans un frisson voluptueux et étincelaient au soleil. Pendant ces quelques heures où j’étais tout entière plongée dans des rêves gris et bleus, j’avais le sentiment de vivre des millénaires.
1 - Hans Diefenbach (1884-1917) Médecin. Fréquente les cercles des sociaux démocrates. C’est là qu’il rencontre Rosa Luxemburg. Ils deviendront amis; elle l’aimait tendrement, secrètement. Il était de treize ans son cadet. Il est enrôlé pendant la guerre, et mourra en octobre 1917, déchiqueté par une grenade alors qu’il servait comme médecin.» 2 - Rudyard Kipling (1865-1936), écrivain britannique.
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ANNONCES LÉGALES AVIS DE CONSTITUTION
CHANGEMENT DE NOM
En date du 09/12/2015 il a été constitué une SASU ayant les caractéristiques suivantes : Dénomination : COLIBRI Développement Objet social : Activités de holding et de conseils Siège social : 35 rue Renière 33000 Bordeaux Capital : 1 000 € Durée : 99 ans à compter de son immatriculation au RCS de Bordeaux Président : M. Antoine VERGIER, demeurant 35 rue Renière 33000 Bordeaux
Monsieur José Gabriel RAVAOJANAHARY, né le 20 octobre 1960 à Mahamasina Tananarive (Madagascar), de nationalité française, demeurant 71 chemin de Bougnard, Résidence Bougnard bât A1, appt. 302, 33600 PESSAC, en sa qualité personnelle et en sa qualité de représentant légal de sa fille, Hantamalala, Sandrina RAVAOJANAHARY née le 17 novembre 1998 à Tanarive (Madagascar), dépose une requête auprès Procureur de la République près le Tribunal de Grande Instance de Bordeaux, à l’effet de substituer à son nom patronymique et au nom patronymique de sa fille, celui de MATHILE.
Pour avis,
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VENTE SPÉCIALE L’HUMA DIMANCHE