Jeudi 30 juin 2016 - N° 2157 - Hebdomadaire - 15, rue Furtado - 33800 BORDEAUX - Prix : 0,80 euro
Après le Brexit, entendre l'Europe des peuples ! POUR UN DÉVELOPPEMENT SOCIAL, ÉCONOMIQUE ET ÉCOLOGIQUE, RESPECTUEUX DES SOUVERAINETÉS NATIONALES
Mobilisation pour le retrait de la loi travail : une nouvelle manifestation le 5 juillet.
ILS NE NOUS FERONT PAS TAIRE !
ACTUALITÉ LOUPIAC
Fête du feu VENDREDI 1ER JUILLET 20h30 « Petites histoires en PDF’ », création de la compagnie Vie de Bohème et son atelier théâtre adultes SAMEDI 2 JUILLET 19h30, apéritif offert par la mairie 20h, ouverture des stands associatifs proposant escargots sur réservation (*réservation assiette d’escargots : 10€ au 05 56 62 99 62), grillades, frites, salade, fraises, crêpes, gâteaux et buvette.
Musique avec le « Parti Collectif », Scènes de théâtre avec la « Compagnie Vie de Bohème », Initiations de danses avec « Danse Passion ». 23h - Grand feu tiré sur la colline par Pyro’Zié, suivi d’un bal populaire avec le « Parti Collectif ». DIMANCHE 3 JUILLET De 8h à 18h, organisé par l’ACSOS Nombreux stands, restauration, produits régionaux et artisanat.
DERNIÈRE MINUTE TURQUIE Au moins 36 personnes ont été tuées et 147 personnes ont été blessées mardi soir, dans le triple attentatsuicide à l'aéroport international Atatürk d'Istanbul. Il s'agit de l'attaque la plus meurtrière dans la métropole turque, déjà visée trois fois cette année. Le mode opératoire rappelle les attentats djihadistes ayant ensanglanté Paris en novembre 2015 (130 morts) et à Bruxelles (32 morts dans le métro et à l'aéroport) en mars. Mais à l'heure où nous écrivions ces lignes l'attentat n'avait pas été revendiqué. GRÈVE DES AGENTS BORDEAUX MÉTROPOLE
Des déchets s’entassent dans les rues, les négociations au point mort…
CGT MÉRIGNAC
40 ans un bel âge ! Les agents en grève sur le parvis de Bordeaux Métropole, le 24 juin.
Les agents de la propreté, de la collecte des déchets et de la voirie sont en grève depuis plus d’une semaine. Vendredi 24 juin, ils se sont invités à la session mensuelle du conseil de Métropole exigeant d’être reçus par Alain Juppé. Celui-ci n’a pas apprécié. Mercredi, il décidait de faire appel au privé pour nettoyer l’hyper-centre de Bordeaux. L’Union Locale CGT de Mérignac a fêté ce 23 juin ses 40 ans d’existence et les 80 ans des congés payés. Au milieu d’un bassin d’emplois de 82 000 salariés et 8 100 entreprises, cette UL, au tissu essentiellement industriel à ses débuts, aujourd’hui industriel et de services, est située idéalement au plan géographique sur le passage de nombreux salariés, et a une riche histoire. 150 militants, jeunes et moins jeunes, ont participé à cet anniversaire écoutant avec intérêt Michèle Kocel, l’hôte, animatrice aujourd’hui de cette instance. Régis Saphores et Gérard Calvinhac, deux anciens secrétaires de l’UL ont, avec humour et sérieux néanmoins, retracé les principales étapes de son adolescence et de sa jeune maturité. Jean Lavie, au nom de l’IHS CGT 33 a présenté ensuite une communication sur « 1936 : l’unité syndicale, en Gironde notamment ». Enfin Gilles Pinato, président national de l’ANCAV-TT (association crée par la CGT et quelques unes de ses fédérations pour promouvoir et organiser le tourisme social), a évoqué les congés payés en lien avec l’actualité sociale. Un pot de l’amitié, en musique, a clôturé cette chaleureuse soirée.
Coralie Calvinhac, secrétaire de la vie syndicale CGT explique que tous les soirs et matins sur les sites, Bègles, Eysines, Bordeaux Nord…, il y a rassemblement des grévistes, 60 à 70 % des agents, au moment
de l’appel. Le matin, vers 9h, ils se rendent sur l’esplanade de l’hôtel communautaire. Vendredi dernier, ils ont vu défiler les élus se rendant à la réunion du Conseil de Métropole présidé par Alain Juppé. « Nous avons demandé à être reçus, indique Coralie Calvinhac. N’obtenant pas de réponse, nous avons contourné le bâtiment pour entrer. Mais les principaux élus concernés, dont monsieur Juppé, sont partis. Il ne restait plus que les élus communistes pour nous soutenir. » En effet, d’après la presse locale, Alain Juppé était furieux de l’intrusion, il aurait assimilé les actions du personnel en grève à du hooliganisme et indiqué « nous ne négocierons pas
PRODUCTION DE NOIR CARBONE À AMBÈS
L’avant dernier site en France va fermer, une soixantaine d’emplois vont disparaître
AÉROPORT
Grève à ICTS Atlantique Avant de rejoindre la manifestation contre la loi travail, les salariés d’ITCS Atlantique se sont rassemblés à l’aéroport de Mérignac jusqu’à 10 h 30 pour de nouveaux droits. Outre le retrait de la loi Travail, ils revendiquent le retrait de la loi DIARD, une augmentation de 300 € de salaire de base, une prime annuelle à hauteur de 185 €, la mise en place de la subrogation de salaire sur la part sécurité sociale en cas l’AT et MP, l’application de la Convention collective nationale pour le versement de la PASA, la suppression de la certification et le passage au coefficient 175 au bout de 5 ans. BORDEAUX
Collecte solidaire au centre financier de La Poste Le syndicat CGT des activité postales et de télécommunications en Gironde organisait une collecte devant le Centre financier, jeudi 30 juin, en solidarité avec une collègue mise à pied alors qu’elle était en maladie. « La Direction de La Poste a décidé de supprimer des emplois. Les départs à la retraite ne suffisent plus, alors elle s’en prend aux plus fragiles d’entre nous. Au Centre Financier de Bordeaux, la Direction a trouvé un nouveau prétexte pour tenter de licencier une de nos collègues gravement malade », déclare le syndicat. « Suite à son état de santé, elle ne pouvait s’occuper de ses documents administratifs quels qu’ils soient (témoignage du médecin de prévention). Elle s’est retrouvée convoquée à un entretien préalable à licenciement. À la suite d’un conseil de discipline, la directrice du Centre Financier rend sa décision : deux mois de mise à pied sans salaire ! La Poste sanctionne ainsi la maladie et notre collègue qui subit une double peine. » Le syndicat a appelé à exprimer « la solidarité de tous envers cette collègue » et à « dénoncer la politique scandaleuse de La Poste ». 2 • Les Nouvelles 30 juin 2016
sous la pression ». Le mouvement initialement lancé par la CGT et FO, était rejoint mardi par Sud et la Cfdt dans un appel au boycott du Comité technique paritaire. Ce mouvement vise à gagner « une augmentation du régime indemnitaire de 50 euros qui avait été promise l’an dernier suite à la grève de 2015, la prise en charge par l’administration de l’augmentation de 20 % prévue d’ici 2017 du prix de la mutuelle obligatoire imposée en janvier, l’augmentation du nombre de postes dans certaines filières saturées pour que, suite à la fusion, les agents puissent rester et évoluer à Bordeaux Métropole ». Ces revendications concernent l’ensemble des salariés de l’institution. Mercredi, Alain Jupé refusait toujours de recevoir les grévistes et faisait appel à des moyens privés pour nettoyer l’hyper-centre de la ville. « Il y a de l’argent pour faire appel au privé alors que ça coûte une fortune mais nous, on nous propose 0,6 % d’augmentation en 2 ans », constate la responsable CGT.
La société Orion Engineered Carbons, anciennement Cofrablack, implantée au bec d’Ambès a annoncé la fermeture du site à la fin de l’année. 38 personnes sont concernées ainsi qu’une vingtaine de sous-traitants permanents. Depuis le 9 juin, 37 des salariés sont en grève illimitée pour exiger des conditions de départ dignes des efforts qu’ils ont fournis souvent depuis 30 à 40 ans. Depuis 1959, Orion Engineered Carbons, anciennement Cofrablack, produit chaque année près de 38 kt de noir de carbone. Ce dernier est obtenu par cracking contrôlé d’un résidu de pétrole utilisé dans la fabrication des pneumatiques, afin d’en améliorer leurs propriétés mécaniques. « En dépit d’un fonctionnement à
pleine capacité de l’usine et une situation financière du groupe largement bénéficiaire -80 millions d’euros redistribués sur deux ans aux actionnairesle 2 juin, un projet de fermeture de site avec un plan de sauvegarde à l’emploi (PSE) est annoncé », écrit la Cfdt dans un courrier à la députée de la 4e circonscription Conchita Lacuey. « Trente-huit personnes sont concernées ainsi qu’une vingtaine de sous-traitants permanents. En d’autres termes, une soixantaine de personnes, dont une majorité âgées de plus de cinquante ans, qui vont grossir le nombre de demandeurs d’emplois en Gironde à la fin de l’année 2016. Le groupe Orion est géré par un fond de pension américain et allemand, implanté dans le monde entier et coté à la bourse de New York. Nous pourrions parler de mort progressive qui commence en 2002 avec un plan de restructuration incluant
42 personnes. En 2013, un nouveau plan de restructuration, ordonné par la direction, entraîne sept nouveaux licenciements. Le groupe a toujours considéré le site d’Ambès comme étant une usine stratégique, renforcé avec la fermeture de l’usine implantée au Portugal en 2014 ». Dans ce courrier, la Cfdt parle de négociations humiliantes. Patrice Touron de la Cgt explique que la première proposition a été de 200 € par année d’ancienneté, avec un plafond de 5000 €. « Mais nombre de salariés ont 30 à 40 ans de boîte. On a gagné un talon pour les plus jeunes mais pour le reste, ça avance à pas de fourmis. Ils en sont à la 4e proposition, ils font tout pour nous embrouiller. Nous avons mis la barre assez haute en nous calquant sur le plan social de 2002 avec x 2,5 du douzième du brut annuel par année d’ancienneté. Nous sommes en grève depuis le 9 juin et nous sommes déterminés ». De reprise de la production, il n’est pas question. « C’est une production sur brevet, notre site est l’avant dernière usine de noir carbone en France, ils ne veulent surtout pas que le site tombe dans les mains d’un concurrent. » En plus du « piquet de grève », les salariés multiplient les actions pour faire parler d’eux et pour mettre l’employeur sous pression. CD
ACTUALITÉ
Editorial
BORDEAUX-MÉTROPOLE
Quand l’austérité a la peau de l’emploi L’élue communiste de Mérignac Léna Beaulieu a donné l’appréciation du groupe sur le rapport du compte administratif de Bordeaux Métropole. Avec plus de 18 millions de ponction en 2015, la baisse des dotations d’Etat a déjà des conséquences en matière d’investissement local et, surtout, de moyens de fonctionnement pour les services publics. « À notre grande surprise, nous avons appris en commission Finances que les baisses de dotations n’étaient pas un drame et que ce compte administratif prouvait bien qu’on pouvait se passer des 18 millions d’euros dont l’État a amputé la Métropole cette année… Ce n’est pas le son de cloche que nous avons entendu, par exemple, au dernier congrès des maires où, toutes tendances confondues, les élus ont alerté sur l’asphyxie des collectivités locales et sur la suppression d’échelons majeurs de la démocratie locale. Mais il semble que le soutien à la politique gouvernementale rende aveugle, y compris sur les conséquences qu’ont ces baisses de dotations qui représentent encore 48 % des recettes de Bordeaux Métropole,
sur sa capacité d’investissement. Conséquence aussi sur les dépenses de fonctionnement et particulièrement des dépenses de personnel qui sont en baisse importante. Cela pèsera nécessairement sur notre capacité à assurer le service public attendu par nos concitoyens. Les agents de Bordeaux Métropole l’ont exprimé cette semaine par des mouvements divers qui montrent le malaise face à cette situation et face à une mutualisation qui n’a pour objectif que la réduction de l’emploi public. Une position hélas assumée par tous dans cette assemblée. L’autre aspect, c’est évidemment la fiscalité avec une évolution des impôts ménages plus dynamique que les impôts économiques. Un phénomène permanent depuis la suppression de la taxe professionnelle. Voilà donc, en l’absence de fiscalité économique dynamique, sur qui reposent les efforts demandés par l’Etat : sur des familles déjà en grandes difficultés et à qui on expliquera aussi que la piscine ne peut pas être construite faute de moyens nécessaires ou que l’encadrement des TAP dans les écoles sera allégé… Ce n’est pas acceptable. Pour ce qui est des investissements,
ce compte administratif confirme nos craintes avec un tassement sur certains domaines. Pas sur l’habitat, les 50 000 logements et les transports en commun où des taux de réalisation avoisinant les 90 % prouvent l’ampleur des besoins et prouvent même qu’on aurait pu aller plus loin. Pour le reste, les services semblent bien en peine à réaliser les objectifs affichés. C’est le cas et c’est une question, sur des champs aussi importants que la politique de la ville (45 %) et le traitement des déchets (56 %). On peut se demander dans ces cas si les moyens de nos services ne sont pas insuffisants pour remplir nos objectifs. On en revient donc à la politique austéritaire qui va à rebours des besoins. Pour finir, et puisque nous aborderons dans deux semaines le budget supplémentaire, des gestes importants peuvent être faits pour rétablir de la justice dans ce budget : vis-à-vis du personnel d’abord, en accédant, par exemple, à la demande de prise en charge intégrale du surcoût de la complémentaire santé. Visà-vis des petites associations ensuite, en annulant la baisse de 5 % de leurs subventions, comme l’avait suggéré M. Bobet lors du dernier conseil. »
TOUR DE GASSIES
Photo Guillaume Decaix
Les personnels veulent « bien soigner »
En grève, à l’appel de FO, depuis bientôt un mois tout en poursuivant leur mission, la moitié des salariés revendique davantage de moyens humains et matériels. Le 20 juin, ils ont manifesté avec des patients devant le centre de rééducation*. Ce jour-là, kinés, aides-soignantes, infirmières, ASH, personnels de restauration, se sont relayés pour afficher leur ras le bol et dénoncer les réductions d’effectifs. Tous alertent sur la dégradation de leurs conditions de travail qui impacte les soins aux malades gravement atteints. Les témoignages de patients le confirment : « On voit comment les personnels courent partout et font ce qu’ils peuvent ». Les soignants dénoncent « des soins low-cost » et certains ont même honte de ne pas
pouvoir répondre à tous les besoins. « Nous avons de plus en plus de boulot, de moins en moins de moyens, en terme de temps et de matériel, explique une aide-soignante. La sécurité de nos patients n’est plus assurée, on va trop vite. » Depuis le 16 juin, la direction, qui jusque-là avait exigé l’assignation du personnel soignant, a levé cette contrainte. La Tour de Gassies fonctionne depuis avec encore moins de personnel, la moitié étant en grève. « Le centre est un Établissement de santé privé d’intérêt collectif (Espic). Légalement, il doit exiger l’assignation. On ne comprend pas la stratégie de la direction », souligne Marie, une aide-soignante. « Le directeur nous a demandé de faire le deuil du meilleur soin, vous savez ce que cela signifie ? », questionne une
infirmière. « Il n’est question que de commerce, de rentabilité. Dans la réalité, parce que les thérapies évoluent, progressent, parce que l’on sauve des gens que l’on ne sauvait pas il y a une dizaine d’années, nous nous retrouvons à travailler avec des patients de plus en plus dépendants. Notre mission reste la même. Les aider à remonter la pente, le plus possible. » Le syndicat FO dénonce « des séances de rééducation de plus en plus courtes, les toilettes des patients non faites quotidiennement, ou pas en totalité, des dossiers et des tâches administratives en retard qui prennent le pas sur le soin et l’humain ». Jusqu’à présent, la direction n’a pas cédé aux revendications et est restée silencieuse. Après l’assignation des personnels soignants jusqu’au 16 juin, les élus du Comité d’hygiène et de sécurité au travail ont dû lancer un droit d’alerte et appeller le personnel à la reprise du travail pour maintenir la sécurité. La négociation doit avoir lieu début juillet entre une délégation des grévistes et l’Agence régionale de santé. * L’établissement fait partie du groupe Ugecam Aquitaine, qui gère 18 établissements sanitaires et médico-sociaux sur plusieurs sites. Gassies est un ESPIC (établissement de santé privé d’intérêt colletif) et regroupe un centre de médecine physique et de réadaptation, un centre de réhabilitation psycho-social et un centre de reconversion professionnelle.
Rien ne doit se faire sans les peuples d’Europe À presque 52 % le peuple anglais a, jeudi dernier, fait le choix de sortir de l’Union Européenne. C’est une campagne nauséabonde sur fond de xénophobie et de mensonges qui porte ses fruits. Xénophobe parce que, depuis quelques mois, on voit se développer des actes racistes. Contre les ressortissants européens en premier lieu, les polonais, qui sont parmi les plus nombreux européens vivant en Angleterre. Mais bien sûr aussi contre tous ces réfugiés et immigrés qui arrivent en Europe, fuyant les guerres que nous menons au nom de la « liberté ». Tout cela dans un pays qui avait fait du communautarisme le socle de son vivre ensemble. Mensongère parce que, dés le lendemain du vote, le leader du parti UKEEP l’a lui même avoué : les versements faits par le Royaume Uni à l’Union Européenne ne pourront pas être réorientés vers le système de santé britannique, contrairement à ses promesses. Mais cette sortie du cadre européen va-t-elle rendre le peuple anglais plus souverain politiquement ? Tout laisse à penser que non. Déjà parce que l’histoire européenne nous le prouve : chaque fois que les peuples ne s’expriment pas dans le sens des grands décideurs politiques, ces derniers trouvent un moyen de passer outre, les Français ont ainsi encore en mémoire le TCE de 2005. Mais aussi car le pouvoir n’est plus uniquement dans les mains du politique. Aujourd’hui le pouvoir est celui de la finance et du capital, il l’est depuis bien longtemps mais ce phénomène s’est accentué ces dernières décennies. D’ailleurs la banque d’Angleterre a rapidement volé au secours de la City pour amortir la chute boursière déclarant qu’elle pouvait réinjecter plusieurs milliards de livres sterling sur la place. Il nous faut tout faire pour stopper ce mouvement de désinvestissement du pouvoir par le politique au profit de la finance et du capital. Nous pouvons nous satisfaire que le peuple reprenne la main en déjouant les plans de ceux qui on pris l’habitude de gouverner sans les peuples, mais interrogeons nous sur les conséquences que va avoir ce sursaut quand le peuple anglais s’apercevra qu’il avait en réalité le choix entre la peste et le choléra. À partir de ces expériences, il ne faut pas renoncer à refonder l’Europe, dans un premier temps, en mettant fin à tous ces outils législatifs de dumping social, et, dans un second temps, en rompant avec la logique des traités européens. Mais, avant tout, nous devrons nous assurer que rien ne se fera sans les peuples d’Europe parce que ce n’est que par leur volonté commune et partagée que nous pourrons ensemble bâtir une Europe des peuples.
Vincent Boivinet membre de l’exécutif du PCF 33 et du Conseil national
Les Nouvelles 30 juin 2016 • 3
LOI TR ÉLIANE ASSASSI
Malgré la répression, les tentatives de divisions, le mouvement contre la loi Travail ne désamorce pas. Il y avait encore du monde, de la colère et de la détermination dans les rues les 23 et 28 juin. Le 28 juin, le Sénat a adopté un texte qui n'a pas changé d'esprit même si la droite s'est fait plaisir en forçant le trait. Jeudi, le texte revenait d'abord en commission des Affaires sociales à l'Assemblée nationale ou un 49-3 devrait à nouveau le renvoyer au Sénat. Une nouvelle journée d'action est à nouveau annoncée le 5 juillet, elle portera sans doute fortement le rejet du déni de démocratie que représente cette procédure du 49-3. Au Sénat, les élus du groupe Communiste Républicain et Citoyen ont porté 402 amendements, défendus un par un. Nous publions l'interview de la présidente du groupe pour l'Humanité ainsi que quelques moments des débats publiés sur le site du groupe, entre le 22 et le 25 juin. LICENCIEMENTS ÉCONOMIQUES
« La colonne vertébrale du texte a été aggravée mais reste la même » mais également d’amélioration, d’alternative afin de moderniser réellement le droit du travail. Beaucoup trop souvent, nous avons eu face à nous un front commun de la droite sénatoriale et du gouvernement contre nos propositions. (…) Que laisse présager l’attitude du gouvernement au Sénat sur la suite du parcours législatif de la loi travail ? La présidente du groupe Communiste, républicain et citoyen du Sénat revient sur le contenu de la loi travail, l’entente entre la droite et le gouvernement sur le fond, la lutte des sénateurs PCF et les attaques en cours contre les salariés, le Parlement et les syndicats.
Le Medef l’a voulu et c’est vous qui l’aurez fait !
Durant les débats, vous vous êtes opposée au gouvernement et à la droite sénatoriale. Qu’en retenezvous ?
Par Dominique Watrin, sénateur communiste, le 23 juin 2016
Éliane Assassi. Nous menons une belle et difficile bataille politique. Le gouvernement s’est entendu avec la droite pour réécrire un projet de loi qui ressemble étrangement au texte initial proposé par Myriam El Khomri. Nous avons mené le combat dans l’hémicycle avec 402 amendements défendus un par un. Notre ambition était de faire entendre la voix de tous les opposants à la loi travail mobilisés sur le terrain. Nos propositions n’étaient pas seulement des amendements de suppression,
Le débat qui nous oppose au Gouvernement et à la majorité sénatoriale a très bien été résumé par le représentant de la CFECGC lors de son audition par la Commission des A ffaires Sociales : « Ce projet de loi cherche à simplifier le régime du licenciement économique en partant du principe que faciliter les licenciements facilitera l’embauche. Le texte devrait prévoir au contraire qu’avant de procéder aux licenciements économiques, il faut utiliser tous les moyens alternatifs pour éviter de devoir y recourir, pour préserver l’emploi dans l’entreprise ». Eh bien, nous sommes pour cette alternative progressiste. Nous avons fait d’ailleurs des propositions que vous avez été une majorité à rejeter. Et nous voterons bien évidemment contre la facilitation et la sécurisation du licenciement collectif qui résume cet article 30. Alors oui, je sais, vous l’avez dit pour certains, dans les autres pays européens, le licenciement économique est beaucoup moins contrôlé, beaucoup moins régulé. Ce sont les licenciements express, comme en Espagne (le mot évoque bien la situation du salarié jetable dans nos sociétés). Je sais aussi qu’aux PaysBas, l’employeur peut se contenter d’un « motif raisonnable », ce qui laisse effectivement beaucoup de latitude. Je citerais aussi la GrandeBretagne, chère à M. Cadic, et sa définition très extensive du licenciement économique qui peut être motivé par de vagues « motifs non inhérents à la personne » ou la Suède où il n’est besoin de formuler aucune justification ! 4 • Les Nouvelles 30 juin 2016
En somme, les fonds de pension, les actionnaires font ce qu’ils veulent ou à peu près. C’est d’ailleurs pourquoi le Medef porte cette exigence depuis des dizaines d’années. Eh bien, mes chers collègues, madame la Ministre, je vous dirai simplement : le Medef l’a voulu et c’est vous qui l’aurez fait ! Les TPE et PME ont bon dos ! Pour notre part, au groupe CRC, nous ne serons jamais complices d’un tel recul, d’une telle régression qui touche aux protections et aux droits des salariés, mais aussi aux intérêts économiques vitaux de notre pays. Nous constatons aussi avec satisfaction que nous ne sommes pas isolés. Les collègues écologistes, un nombre non négligeable de collègues socialistes ont défendu des positions proches des nôtres. 47 voix pour la suppression de cet article 30, c’est à souligner ! Nous pensons tous au fond que le licenciement doit être de dernier recours et qu’il ne peut être mis en œuvre que lorsque toutes les autres solutions ont été mises en œuvre. Ce peut être le chômage partiel indemnisé en cas de réelles difficultés économiques, ce peut être de l’investissement pour moderniser ou renouveler l’outil de travail. Mais en aucun cas il ne faut faciliter comme vous le faites aujourd’hui, les logiques financières, les délocalisations qui ont déjà suffisamment affaibli notre outil industriel. Et s’il y a des sacrifices à faire, nous disons au groupe CRC que ce n’est pas en premier lieu à des salariés, que l’on va plonger petit à petit dans la détresse et la précarité d’en être les victimes : c’est aux actionnaires d’assumer d’abord leurs responsabilités et de faire des sacrifices !
Éliane Assassi. Les désaccords entre le gouvernement et la droite sont de façade. La colonne vertébrale du texte a été aggravée mais reste la même, avec l’inversion de la hiérarchie des normes, la facilitation des licenciements économiques, les référendums d’entreprise, des attaques contre la médecine du travail et contre les indemnités prud’homales. Le texte reviendra jeudi en commission des Affaires sociales à l’Assemblée nationale. Il sera très intéressant de voir quels retours au texte initial et quels ajouts de la droite elle entendra conserver. Puis il y aura sans doute un retour du 49-3, et un dernier passage au Sénat. Si rien ne se passe, la droite sera satisfaite et le gouvernement sera satisfait. Mais les citoyens et l’Assemblée resteront méprisés… Éliane Assassi. Nous sommes face à une situation extrêmement grave. Il y a une volonté commune du gouvernement, de la droite et du
Medef d’en finir avec notre modèle social et d’en finir avec notre modèle politique. Alors que cette loi travail émane directement des instructions de la Commission européenne, nous constatons que des attaques sont sans cesse menées contre le Parlement. L’utilisation du 49-3 n’est pas le seul exemple. Nous sentons bien que la volonté d’affaiblir le Parlement, de ne l’utiliser que pour ratifier les lois sans qu’il soit un véritable espace de débats et de décisions est partagée par beaucoup. C’est inadmissible. La séquence a été marquée par des attaques antisyndicales au plus haut niveau… Éliane Assassi. Le débat a été teinté de violence et d’autoritarisme. Le premier ministre, Manuel Valls, a été totalement absent lors de l’examen du texte au Sénat. Il n’est pas venu une seule fois en séance. Nous l’avons bien sûr interrogé lors des questions au gouvernement, alors que l’exécutif menaçait d’interdire les manifestations. Il a sans cesse stigmatisé les syndicats et les manifestants, les amalgamant aux casseurs, et allant parfois jusqu’à sous-entendre une complaisance à l’égard du terrorisme. De tels propos sont insupportables. De telles accusations ne peuvent être prononcées sans que toute la lumière soit faite. (…) Entretien réalisé par Aurélien Soucheyre, l’Humanité, mardi, 28 juin
MOBILISATION-LOI TRAVAIL
Pas de vacances en perspective
La votation citoyenne mise en place par l’intersyndicale a envahi, en trois semaines, tous les espaces et récolté 389 124 voix demandant le retrait du projet de loi travail, selon les premières estimations des syndicats. Mobilisés mardi 28, ils rencontraient dans la matinée le conseiller social de l’Élysée. À Bordeaux, l’intersyndicale, à l’issue de la manifestation qui a, à nouveau mobilisé 7 000 personnes, portait plusieurs milliers de bulletins de votation en préfecture. 60 000 personnes ont battu le pavé, jeudi 23, à Paris dans une ambiance particulière, tant le dispositif de sécurité était écrasant. La veille, les syndicats CGT et FO avaient arraché au ministre de l’Intérieur le droit de manifester.
À Bordeaux, le parcours qui devait amener de République à la Comédie, un cortège de 7 000 personnes a finalement été modifié pour un terminus place Jean-Jaurès où la CGT organisait un point de votation. Lorsqu’une partie du cortège s’est retrouvé à vouloir remonter vers la place de la Comédie, elle a été stoppée par un barrage des forces de l’ordre. Les annonces d’interdiction de manifestation du début de semaine avait fortement chauffé les esprits et plusieurs manifestants y ont vu une atteinte à leur liberté. Si les forces de l’ordre en présence, moins importante que dans des manifestations antérieures, se sont montrées aussi moins agressives, tout cela a tout de même fini par un encerclement de la place, des barrages filtrants.
Et c’est maintenant devenu quasiment systématique, à chaque fin de manifestation, on assiste à des violences disproportionnées et des arrestations. Cela a encore été le cas mardi 28. D’ailleurs Nicolas Merle, assistant d’éducation, en a fait les frais au rassemblement du 14 juin place Stalingrad. Alors qu’il avait tenté de dissuader les forces de l’ordre de charger les manifestants qui bloquaient le tramway mais sans participer au blocage comme l’atteste des témoignages, il s’est fait arrêter en remontant une rue après la dispersion. Alors qu’il a été rapidement plaqué au sol sans opposer de résistance, il est accusé de s’être montré violent envers les policiers qui l’ont arrêté. Il sera jugé en septembre, il risque une amende et une peine avec sursis. Mais rien de tout cela ne semble entamer la détermination de ceux qui combattent ce projet de loi depuis des semaines. Philippe Martinez a à nouveau appelé à une journée d’action le mardi 5 juillet, jour où le gouvernement pourrait annoncer un nouveau 49-3. Il faudra être plus nombreux encore pour les faire plier, sans cela, l’été s’annonce sans vacances. Christelle Danglot
RAVAIL MOBILISATION
Du côté des sénateurs communistes, républicains et citoyens Publié sur le site du groupe CRC au Sénat
Les militants communistes mobilisés le 23 juin à Bordeaux pour le retrait de la loi travail et pour la défense du droit de manifester.
Ruptures conventionnelles ; Un moyen pour l’employeur de passer outre ses obligations
« Voici un amendement récurrent du groupe CRC sur la rupture conventionnelle. Près de dix ans après, notre position n’a pas changé : les salariés sont souvent plus contraints qu’enclins à accepter cette rupture, souligne Dominique Watrin. Elle est partagée par le centre d’analyse. Refermons cette brèche dans notre législation relative au licenciement qui permet à l’employeur de passer outre ses obligations : le plan de sauvegarde de l’emploi, le reclassement, le transfert automatique des contrats de travail en cas de reprise de l’entreprise. C’est ainsi que nous écrirons le code du travail du XXIe siècle. » L’apprentissage dès 14 ans ; Et pourquoi ne pas aussi les faire travailler la nuit ?
« L’apprentissage ne doit pas être déconnecté de l’Éducation nationale, prévient Dominique Watrin. Un concours est ouvert entre les responsables politiques : c’est à celui qui annoncera le plus de contrats, d’aides, de primes… Pourtant le taux d’échec en apprentissage reste élevé. Il convient de revaloriser la filière professionnelle, de développer des sections pertinentes dans les lycées professionnels où le taux de réussite est plus élevé - de neuf points en CAP par exemple. En tout cas, ce n’est pas en autorisant l’apprentissage dès 14 ans pour 10 heures par jour, que l’on règlera les problèmes. Et pourquoi ne pas aussi les faire travailler la nuit ? Cet article est un immense retour en arrière. » « Fin 2015, notre pays comptait 400 000 apprentis préparant des diplômes allant du certificat d’aptitude professionnelle au mastère professionnel, 670 000 lycéens scolarisés en LEP, rappelle pour sa part Brigitte Gonthier-Maurin. Il y a chaque année 200 000 candidats au bac professionnel et 400 000 jeunes engagés en DUT, en section de technicien supérieur ou en licence profession-
nelle. Autant dire que l’apprentissage n’est pas la voie privilégiée d’accès à une formation professionnelle. Le taux de rupture précoce des contrats est assez élevé, faute sans doute que les conditions d’un accueil favorable à la bonne transmission des savoirs soient toujours réunies. Il faudrait une vraie évaluation des causes de ces difficultés. » Travailleurs détachés ; Limiter la chaine de la soustraitance
Les sénateurs communistes proposent de limiter la sous-traitance afin de limiter le nombre de travailleurs détachés, notamment. La proposition est jugée pertinente par le gouvernement et la majorité sénatoriale, mais pas au point de la voter. Bernard Vera qui intervient pour le groupe CRC rappelle que « le rapport d’Éric Bocquet de 2013 montrait qu’il y avait une véritable prime à l’obstacle, à la sous-traitance en cascade, récompensant les montages les plus complexes opérés aux dépens des salariés ». Il rappelle que « la sous-traitance, aux termes de la loi du 31 décembre 1975, est normale si l’entreprise titulaire du marché ne comporte pas les compétences nécessaires. Raccourcissons la chaîne de sous-traitance à trois degrés comme en Allemagne -un pays, madame la ministre qui vous inspire beaucoup- et en Espagne ! Le rapporteur, Jean-Marc Gabouty, trouve l’argumentation « très convaincante ». « Toutefois, précise-t-il, une interdiction générale pourrait être considérée comme une atteinte disproportionnée à la liberté contractuelle. Creusons cette piste. Pour l’heure, adopter cet amendement serait prématuré. Myriam El Khomri, ministre, répond à l’interpellation : « l’Allemagne est une de mes sources d’inspiration, mais pas toujours : leurs mini-jobs ne m’intéressent pas ». « Je suis prête à lancer une réflexion avec le sénateur Bocquet sur cette proposition effectivement séduisante, qui est à approfondir. Cela évitera le dumping social et facilitera les contrôles. Le
mécanisme de responsabilité solidaire du donneur d’ordre, introduit dans la loi Savary, a été renforcé dans la loi Macron. Reste que les contrôles sont compliqués quand nous faisons face, lors des inspections des 500 plus grands chantiers en France, à des chaînes de dix à vingt sous-traitants. » « Nous sommes prêts à travailler avec le Gouvernement », affirme Dominique Watrin, du groupe CRC. Le chef de l’Office central contre le travail illégal, que nous avons auditionné, nous a beaucoup éclairé sur cette question. « Les fraudeurs ont toujours un coup d’avance sur les règles… En revanche, je ne comprends pas pourquoi il faudrait attendre quand l’Allemagne, soumise à la même directive, limite, elle, la sous-traitance à trois degrés. » Article 44 ; Réduction considérable des prérogatives de la médecine du travail
« Les cadences au travail entraînent un mal-être croissant. Or, tandis que les syndromes d’épuisement ou les troubles musculo-squelettiques se
multiplient, la médecine du travail est en sous-effectif, remarque Laurence Cohen. Une situation organisée depuis des années ! Les universités de Paris, de Lyon ou de Rouen ne fournissent pas les enseignements et stages nécessaires. Et où est la simplification que vous invoquez sans cesse, quand un médecin en santé publique qui souhaite se reconvertir vers la médecine du travail doit s’engager dans un parcours de neuf ans ! Je le répète, les dysfonctionnements sont organisés. Puisque Mme la ministre veut privilégier le dialogue social, que le Gouvernement applique les recommandations du Conseil d’orientation des conditions de travail. » « Les médecins du travail réunis en congrès ont dit la colère que leur inspire votre réforme, rappelle Éliane Assassi. L’article 44 réduit considérablement les prérogatives de la médecine du travail, il remet en cause aussi bien les visites d’embauches pour les postulants à un poste à risque que les rendez-vous périodiques ; et le médecin du travail devra, si le maintien du salarié dans son poste présente un danger pour sa santé, le déclarer inapte - donc le condamner à un licenciement probable. Cette politique n’honore pas la gauche… Visiblement, les leçons du scandale de l’amiante n’ont pas été tirées. La prévention primaire recule. Supprimons cet article. Le conseil de l’ordre des médecins lui-même le demande. » Article 45 ; Des mesures insuffisantes contre le dumping social
« Le Brexit a révélé le divorce entre les peuples et le projet européen, analyse M. Dominique Watrin. Après avoir été le grand projet du XXe siècle, l’Europe est devenue la quintessence d’un régime non démocratique où l’on
pensait faire le bonheur des peuples contre leur gré. Au nom de la liberté de circuler, le dumping social s’est installé. Le nombre de travailleurs détachés a été multiplié par dix en dix ans, et de 25 % de plus cette année. L’article 45 propose des sanctions insuffisantes. La lutte contre la fraude appelle plus qu’un droit de timbre de 45 euros. Il faudra revoir la directive européenne. » 25 juin ; L’examen du texte est achevé
Il est minuit, les sénateurs achèvent la discussion du texte. « Avec la garantie Jeunes, le compte personnel d’activité, le contrat saisonnier ou encore les dispositions sur l’amiante que nous venons d’examiner, ce texte crée des droits pour les salariés, tente de convaincre une dernière fois Myriam El Khomri. Il mérite mieux que les caricatures que l’on en entend à l’extérieur. J’ai saisi l’opportunité de ce temps de débat parlementaire pour faire œuvre de pédagogie. Cette réforme est progressiste, social-démocrate. La majorité sénatoriale l’a souvent combattue, parfois accompagnée. Merci à tous pour ce débat constructif. Il se poursuivra car j’entends mener cette réforme à son terme. » Des propos qui, évidemment, ne convainquent pas les sénatrices et sénateurs communistes. Ceux-ci feront entendre une fois encore leur opposition au texte, en l’assortissant de propositions alternatives comme ils l’ont fait tout au long des débats, à l’occasion du vote solennel de cette loi Travail mardi prochain à 16h.
Bordeaux le 23 juin 2016
Les Nouvelles 30 juin 2016 • 5
INTERNATIONAL UE
Le Brexit rebat les cartes sur la scène européenne les populations de son utilité et de sa nature démocratique ». Et puisqu’il est désormais « possible d’en sortir », la nature de l’Union européenne change, elle doit « convaincre les États qui y adhèrent et leurs peuples de son utilité ». « C’est une grande nouveauté qui va changer considérablement la donne ». « L’impossible discours pro-UE à gauche »
À 51,8 %, les électeurs britanniques ont choisi jeudi de sortir de l’Union européenne (UE). Quels que soient les arguments développés dans la campagne, les électeurs ont dit leur choix ou leur désarroi dans un débat dominé par les surenchères libérales au sein du Parti conservateur. Ils n’ont pas confiance en une Europe qui pèche pour certains par excès de bureaucratie, pour d’autres par sa dimension austéritaire, pour d’autres encore par son ouverture des frontières. Au final, pour une moitié de votants britanniques, l’UE telle qu’on la connaît n’apparaît plus comme un outil incontournable.
Chaque fois, ces dernières années, que des peuples ont été consultés, cela s’est traduit par un revers pour les partisans de l’Europe libérale. Pas plus tard qu’en avril, les Néerlandais ont été consultés sur l’accord UE-Ukraine : il a été rejeté. L’an dernier, les Danois ont refusé un accord de coopération policière. En 2008, c’est le traité de Lisbonne qui n’a pas convaincu les Irlandais : on les a contraints à (« bien ») revoter. En 2005, il n’avait pas plus été tenu compte des « non » exprimés par les électeurs français et néerlandais au traité constitutionnel européen. Pour Romaric Godin, dans La Tribune, le 24 juin, le Brexit est la « défaite de l’UE telle qu’elle est », le résultat de son « incapacité à convaincre
Le journaliste pointe la « politique de la peur » de l’Union européenne qui masque surtout « une incapacité à construire une vision d’avenir “positive” de l’UE », donnant plus de force au discours violemment xénophobe de certains partisans du « Leave », le déficit démocratique des institutions donnant le sentiment aux citoyens « de ne pas maîtriser les décisions de l’UE ». Pour Romaric Godin, le Brexit est aussi le résultat de « l’impossible discours pro-UE à gauche ». Il s’appuie sur la carte du vote et constate que les électeurs traditionnellement attachés aux travaillistes, ouvriers ou anciens ouvriers précarisés, ont choisi « clairement, et contre la campagne du Labour », le camp du Brexit. Le « discours de la gauche britannique du “Remain to change” (“rester pour changer”) n’a pas pris dans son électorat. De même, l’autre argument dominant de la gauche britannique, le “Remain to preserve” (“rester pour préserver” les droits des travailleurs) n’a pas convaincu. » Pour le journaliste, « le traitement infligé par les autorités européennes aux pays en crise », la « politique d’austérité aveugle et l’acharnement contre la Grèce ont affaibli le discours du Labour ». L’UE n’est pas « perçue comme capable de changer démocratiquement ». Il vaudrait donc mieux « en sortir pour peser sur des instances
que l’on connaît ». « Mais c’est aussi une question économique et sociale : l’UE ne se soucie guère de ces populations oubliées et victimes de la désindustrialisation au nom de la “destruction créatrice” et de la “bonne allocation des ressources”. Il est logique que ces populations ne se soucient guère de l’UE. C’est une leçon pour l’avenir. » « Il revient donc aux forces démocratiques de l’UE de construire et débattre sur un nouveau projet européen et de le bâtir avec les peuples », conclue-t-il. Les négociations devraient prendre au moins deux ans
En attendant, les dirigeants européens préparent le départ des Britanniques, explique Gaël de Santis dans l’Humanité. « Le premier ministre David Cameron a annoncé que la demande formelle du Royaume-Uni, en vertu de l’article 50 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (UE), ne serait déposée que par son successeur, après sa démission en octobre. Ses partenaires européens lui ont demandé d’accélérer le rythme ». « L’enjeu fondamental a été exprimé hier par Philip Hammond, ministre des Affaires étrangères britannique : les entreprises britanniques auront-elles toujours “accès au marché unique” ? Et réciproquement ? Angela Merkel souhaite conserver Londres dans le giron européen. Côté britannique, on s’efforce de trouver une solution pour que le RoyaumeUni continue de participer au marché unique. » Les négociations devraient prendre au moins deux ans, du fait des délais légaux. Selon le journaliste de l’Humanité, la fermeté vis-à-vis de Londres varie d’une capitale à l’autre mais tous souhaiteraient « aller vite pour “s’occuper de l’avenir de l’Europe”,
selon les termes utilisés par les ministres des Affaires étrangères des membres fondateurs de l’UE (France, Italie, Allemagne, Luxembourg, Pays-Bas, Belgique), réunis dès samedi ». Refonder, reconstruire, tracer un autre chemin
« À gauche, des voix s’ élèvent pour tracer une autre voie pour l’Union européenne » affirme Gaël de Santis mais « Plus que jamais, la construction européenne semble prise en étau entre ceux qui veulent faire exploser l’Union européenne à des fins réactionnaires et autoritaires sans remettre en cause la domination des marchés, et ceux, au pouvoir aujourd’hui, qui se servent de l’UE pour imposer l’austérité ». « Ce week-end, il n’était que les forces de gauche non social-démocrates à vouloir tracer un autre chemin, à “refonder l’Europe sur les valeurs de la démocratie de la liberté, de l’égalité et de la solidarité”, selon Alexis Tsipras, qui a une nouvelle fois vilipendé les “choix extrêmes d’austérité” ». « Nous refusons le faux dilemme imposé par les partisans de l’austérité, entre l’enfoncement dans la crise sociale et l’autoritarisme, ou la dislocation sur fond de rivalités nationalistes », a déclaré Pierre Laurent. Le secrétaire national du PCF appelle à une « reprise en main du projet européen par la gauche », qui passe par « la construction de l’Europe du développement social, économique et écologique, respectueuse des souverainetés nationales ». Pour ce, il faudrait « un gouvernement de la France qui soit au combat sur la scène européenne ». « Après le choix des Britanniques jeudi, rappelle Gaël de Santis, une partie de l’avenir du Vieux Continent se jouera ici l’an prochain ». À lire en page 7, la « Déclaration de la délégation du PCF reçue à l’Elysée »
ESPAGNE
La droite tire profit de l’impasse politique Les élections de dimanche en Espagne renforcent les conservateurs, qui revendiquent le droit de gouverner. Le Parti socialiste reste la première force à gauche au détriment de la coalition Unidos Podemos. Les négociations pour former un exécutif ne font que commencer. Il y a six mois, les élections générales avaient donné lieu à un blocage politico-institutionnel. Après quatre mois d’âpres négociations, de surenchères et d’alliances contre-natures, la formation d’un gouvernement a disparu du champ du possible. Les Espagnols ont donc revoté ce 26 juin, avec une participation en baisse, de 69,84 % contre 73 %. Dimanche soir, personne n’était vraiment à la fête, à l’exception des conservateurs du Parti populaire (PP). La droite a su manœuvrer, tirant profit de l’impasse politique. Elle a totalisé 33,28 % des suffrages, contre 28,7 %, soit un gain de 690 6 • Les Nouvelles 30 juin 2016
655 voix, obtenant 14 députés supplémentaires (137 sièges contre 123). Cette majorité parlementaire ne sera pas suffisante pour gouverner de manière autonome. On reconnaîtra néanmoins à l’ancien président du gouvernement, Mariano Rajoy, une certaine habilité à récupérer la lassitude provoquée par l’incapacité du Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE) à constituer un cabinet. Le conservateur a su manier le registre des fantasmes, en prônant l’impérieuse nécessité d’une Espagne « stable » et « sûre » face à la menace que pouvait constituer un très bon score de la coalition de gauche Unidos Podemos. Le chef de file des conservateurs n’a pas eu de mal à convaincre son électorat traditionnel. De fait, le PP est parvenu à siphonner les voix de Ciudadanos (C’s). Craignant une répétition du scénario du 20 décembre, à savoir une impossible alliance parlementaire entre le PSOE et la jeune formation de droite conduite par Albert Rivera, une
frange des électeurs s’est reportée sur le PP. Les « Citoyens » ont certes obtenu 3 123 769 suffrages mais perdent 376 677 voix, passant de 40 députés à 32. Mariano Rajoy ne s’est pas privé de revendiquer dès dimanche le soir « le droit de gouverner ». De quel exécutif pourra se prévaloir le Parti populaire ? À droite, les conservateurs et Ciudadanos totalisent 169 députés alors que la majorité absolue est de 176 sièges. Mais le président de C’s, Albert Rivera, plaide toujours pour une grande coalition avec le PP et le Parti socialiste. On voit mal cependant le chef des socialistes, Pedro Sanchez, se rallier à cette coalition, sauf à prendre le risque de connaître le même sort que son homologue grec, le Pasok. Il a d’ailleurs annoncé qu’il voterait contre l’investiture de Mariano Rajoy, après être parvenu à endiguer le « sorpaso » (le dépassement) d’Unidos Podemos, comme l’avançaient les enquêtes d’opinion. Avec 5 424 709 votes (22,83 %), soit une différence négative de 105
984 voix, le PSOE perd 5 députés, passant de 90 à 85. Ce résultat, le plus mauvais depuis le retour de la démocratie, pourrait bien ravaler les socialistes au rang d’arbitre des négociations à venir. Dimanche soir encore, le leader socialiste renvoyait la responsabilité de son échec à Pablo Iglesias, le secrétaire général de Podemos, dont « l’intransigeance et l’intérêt personnel (…) ont permis d’améliorer les résultats du PP », oubliant un peu trop vite le pacte contre-nature convenu entre le PSOE et Cuidadanos en vue de gouverner ensemble. La déception dans le camp progressiste vient surtout du score d’Unidos Podemos. La coalition de gauche, qui regroupe Podemos, Izquierda Unida (IU), le parti écologiste valencien Equo et les confluences régionales comme en Catalogne ou en Galice, conserve le même nombre de députés qu’en décembre si l’on additionne les scores de Podemos et IU, à savoir 71 députés. Mais avec ses 21,26 %,
elle est loin de la victoire à gauche annoncée. La perte de 1 062 704 voix n’est pas non plus pour rassurer. La loi électorale espagnole, pour si injuste qu’elle soit (il faut 57 709 voix au PP pour élire un député, contre 71 123 à Unidos Podemos) n’explique pas tout. Au sein de la coalition, Izquierda Unida s’en sort plutôt bien avec l’obtention de nouveaux députés, dont un siège dans la province de Guipuscoa. À noter également ses bons scores en Catalogne, au Pays basque et même en Navarre, où l’alliance électorale de gauche devient la seconde force dans ce fief de la droite proche de l’Opus Dei. À l’annonce des résultats, l’heure n’était plus à l’euphorie même si certains rappelaient que le score obtenu par Unidos Podemos aurait satisfait bien plus d’une formation. Avec l’article de Cathy Ceïbe, dans l’Humanité du 26 juin
PCF PCF RIVE DROITE
BREXIT
Loi El Khomri
Déclaration de la délégation du PCF
Lettre ouverte à Mme Conchita Lacuey, députée de la 4e circonscription de Gironde reçue à l’Elysée La loi El Khomri déconstruit le Code du Travail, en particulier : - L’inversion de la hiérarchie des normes et la suppression du principe des dispositions les plus favorables vont permettre de faire primer l’accord d’entreprise sur la loi ou l’accord de branche. Le Code du Travail, aujourd’hui plancher commun à tous, va devenir à géométrie variable, le SMIC ne sera pas garanti. - La réforme des licenciements économiques va permettre de licencier sous la seule volonté du patron. - L’extension des accords de compétitivité va permettre d’imposer une augmentation du temps de travail sans augmentation de salaire, davantage de flexibilité dans les horaires, du travail de nuit, des mesures de mobilité… Le salarié qui refusera que les clauses de son contrat de travail soient modifiées sera tout simplement licencié. En conclusion, il n’y a rien, dans ce projet de loin qui ressemble à du progrès social. Vous n’avez pas voté contre, n’avez pas été l’une des parlementaires qui ont écrit leur
désaccord au président Hollande, et la démocratie a été bafouée avec le 49-3 que vous avez applaudi : ça ne passe pas ! Le gouvernement doit suspendre le débat parlementaire sur la loi travail et ouvrir la négociation avec les syndicats ! D’autres choix sont possibles. La loi El Khomri est la loi du MEDEF. C’est aussi une loi directement proposée par l’Europe. Pour combattre le chômage et le dumping social, nous avons besoin d’une loi de sécurisation de l’emploi et de la formation, d’une réduction du temps de travail, de lutter contre les coûts de la finance et du capital, comme celle qu’élaborent les parlementaires communistes. L’entêtement du gouvernement que vous soutenez est une preuve qu’il est aux abois, lâché par celles et ceux qui l’ont porté au pouvoir (plus de 60 % des français rejettent cette loi travail). L’obstination du gouvernement ouvre la porte à la droite et à l’extrême droite pour s’emparer du pouvoir dans moins d’un an et mettre en œuvre une politique de régressions sociales
et démocratiques incommensurables. Devant cet immense danger, quelle position allez-vous adopter Madame la Députée ? Devant cet immense danger, la mobilisation sociale contre la destruction du Code du travail est une chance pour la France et pour la gauche. Face à l’autoritarisme du gouvernement, la mobilisation qui grandit porte une logique d’espoir pour la défense des principes d’égalité, de solidarité et de fraternité, fondements de notre pacte républicain. Face à l’exploitation des peurs et des divisions de la société française, elle défend l’action collective des salarié-e-s, de la jeunesse, des citoyen-ne-s. C’est pourquoi nous appelons à soutenir la mobilisation, et à se rassembler : à la fois pour que soit retirée cette loi inique, et pour que se construise, pour ce qui nous concerne, un nouveau Front populaire, à partir d’un débat entre les citoyens de la 4e circonscription de la Gironde. Les communistes de la 4e circonscription
BASSIN D’ARCACHON VAL DE L’EYRE
Le PCF ne se taira pas
Suite aux menaces de mort inscrites sur les murs de la section, de très nombreuses personnes ont témoigné leur colère et réprobation. Des témoignages de solidarité ont été adressés aux communistes du Bassin d’Arcachon qui organisaient un rassemblement, le 25 juin devant leur siège, auquel M. Bruno Lafon, maire de Biganos, est venu apporter son soutien. On nota la présence de Sébastien Laborde, secrétaire départemental, ainsi que des représentants de syndicats, d'associations et de très nombreux communistes.
Lors du rassemblement à Biganos, le 25 juin, en riposte à « l’acte qui a souillé le local du PCF par des inscriptions à caractère fasciste », Danièle Trannoy, secrétaire de la section, a remercié les personnes rassemblées et informé du dépôt d’une plainte car « lancer une menace de mort est extrêmement grave et dangereux ». « Toutes les atteintes aux libertés d’opinion et d’expression sont des atteintes inacceptables et intolérables à la vie démocratique » a-t-elle poursuivi, soulignant que « lorsque le Parti Communiste Français est attaqué, on porte aussi atteinte à tous les citoyens de notre pays », faisant
référence notamment à tous ceux qui « luttent pour le retrait de la loi Travail du gouvernement et qui, parce qu’ils manifestent dans la rue, sont touchés par les violences policières, les arrestations, d’autres condamnés à la prison parce qu’ils refusent que leurs usines, leurs emplois, soient délocalisés. » Une plainte a donc été déposée car « les lois punissent les actes de racisme comme l’incitation à la haine raciale, les propos diffamatoires ou insultants contre les personnes en raison de leur sexe, orientation sexuelle, de leur handicap ». Elle a rappelé la loi Gayssot et que « le racisme, l’exaltation à la haine, ne sont pas des opinions, ce sont des délits ».
Déplorant « le climat détestable où à longueur de journée, dans les médias, sont déversés des incitations à la peur de l’autre, où sont désignés les nouveaux boucs-émissaires qu’ils soient musulmans, africains, migrants… », ajoutant qu’aujourd’hui « ce sont les syndicalistes, les militants, les jeunes… qui sont frappés, gazés dans les manifestations », elle a dénoncé le rôle des médias dans « la banalisation au quotidien, des idées et la valorisation des organisations d’extrême-droite, aidée en cela par tous les partis politiques qui agissent pour le maintien du système capitaliste ». « Ne sommes-nous pas dans une situation qui ressemble à celle où les communistes étaient désignés comme les ennemis de la Nation ? Où la bourgeoisie disait “plutôt Hitler, que le Front Populaire” ? Pourtant les communistes et leur Parti ont payé un lourd tribut pour délivrer la France du fascisme et du nazisme ». Avec les communistes, la secrétaire de section affirmait que « non, le PCF, ses militants, ne se tairont pas, nous continuerons à alerter sur les dangers du fascisme en France et en Europe ». Rappelant les sources de financement du PCF (cotisations, reversement des indemnités de ses élus), elle a souligné que ce local « est notre bien commun ». Il a été financé « avec les économies de quelques camarades, mais aussi grâce à une trésorerie faite des cotisations, des fêtes et initiatives » et « nous permet d’agir dans le cadre d’un parti politique ». Elle a conclu en appelant à rester vigilants : « Ils » ne passeront pas ! Je reprendrai, « No Pasaran » !
Dans le cadre des consultations menées par la Président de la République après le vote du Brexit, la délégation du PCF, dirigée par Pierre Laurent a rappelé son analyse de la situation. La sortie du Royaume Uni de l’Union Européenne est le résultat des surenchères populistes et nationalistes de la droite britannique qui a joué avec le feu. C’est une nouvelle alerte, un désaveu de la construction libérale de l’UE, conséquence des dénis répétés de démocratie depuis le referendum de 2005. Après ce vote, le risque est grand que les dirigeants européens fuient une nouvelle fois leurs responsabilités et cherchent à faire payer le Brexit aux travailleurs britanniques et européens. C’est l’Europe qui doit changer. La délégation a clairement signifié que l’heure n’est pas à l’immobilisme mais à la refondation progressiste de l’Europe, jusqu’à l’élaboration d’un nouveau traité centré sur le progrès social et écologique et la lutte contre la finance. Assez de mots, des actes ! Nous avons présenté des propositions concrètes dont la France devrait être porteuse au Conseil Européen : - Mesures contre le dumping social : suspension des négociations sur les traités de libre échange (TAFTA, CETA, TISA), stopper la mise en œuvre des directives de déréglementation sociale, à commencer par la Loi travail en France, renégociation
immédiate de la directive sur les travailleurs détachés. - Mesures pour sortir de l’austérité : renégociation du traité budgétaire, conférence européenne sur la dette, fléchage des 80 milliards d’euros injectés chaque mois par la BCE sur les marchés financiers vers les services publics et l’investissement public, lutte contre l’évasion fiscale. Pour refonder l’Europe, les peuples doivent être écoutés et respectés. Le mandat de la France et l’avenir de l’Europe ne doivent plus se décider dans leur dos. Nous exigeons un débat public national et avons proposé une conférence citoyenne, associant tous les partis politiques, les organisations syndicales, les ONG et les associations citoyennes. À l’issue de ce dialogue avec François Hollande et Manuel Valls, nous n’avons pas le sentiment qu’ils seront à l’offensive pour changer l’Union Européenne. L’angle mort dans l’approche du Président et du Premier Ministre est assurément la question sociale. Les parlementaires communistes porteront ces propositions dans les débats à l’Assemblée, au Sénat et au Parlement Européen. Nous tiendrons un débat national ouvert à tous jeudi 30 juin « Pour une politique offensive à gauche de la France en Europe ». Pierre Laurent, Patrick Le Hyaric, Michel Billout, Anne Sabourin
BASSIN D’ARCACHON
Fête des communistes Samedi 9 juillet, à partir de 10h, à Biganos 61 bis, avenue de la Libération Débat sur Cuba avec interventions des invités, suivi d’un repas fraternel à 12h30 (menu 15€). Animations musicales toute la journée Présence de : Secours Populaire - Jeunes Communistes - APEIS - France Palestine
Souscription Ils ont donné un total de 5 050 € M. VILLATE Christian, Lesparre Médoc M. GONZALEZ Gérard, Villenave d’Ornon Section PCF Rive Droite M. FITTE William, Bègles M. VALENTIN Bernard, Saint-Médard-d’Eyrans Mme BARDY Lydie, Lalande de Pomerol
Je verse ……………………………… € (ma remise d’impôt sera de 66% de ce montant) Nom-Prénom ……………………………………………… Adresse …………………………………………………… ……………………………………………………………… Chèque à l’ordre de ADF PCF 33
Les dons sont limités à 7 500 € par personne Les versements ouvrent un droit à déduction de 66% du don dans la limite de 20% des revenus nets imposables. Ainsi, un don de 100 € permettra une réduction d’impôt de 66 €
Retournez à PCF - 15, rue Furtado - 33800 Bordeaux
Les Nouvelles 30 juin 2016 • 7
CULTURE & SOLIDARITÉ
NOUVELLES IDÉES REÇUES
FIFRES DE GARONNE
par Gérard Loustalet Sens
Provoquer un sursaut historique de l’indice du bonheur
Au micro, Francis Lacroix, à sa gauche Stéphane Denoyelle et tout à droite de la photo Carole Poutays.
À Saint-Pierre d’Aurillac, en bord de Garonne, Carole Poutays, présidente des Sous-fifres qui n’aime pas faire de discours invite à regarder, lire, écouter, danser, sentir… Et vous voilà embarqué dans l’édition 2016 du Festival des Fifres de Garonne, du Brésil à l’Inde en passant par la Bretagne, le Berry… Flûtes, percussions et cuivres en tous genres font monter la température d’un week-end pas vraiment estival. La qualité des spectacles surprend encore les nouveaux visiteurs. « Et tout ça gratuit » entend-on parfois. Francis Lacroix, président des Garonnais avertis pour une vallée épicurienne et solidaire (Gavès) rappelle cependant, au moment de l’inauguration, que le festival a besoin de soutien financier pour assurer un spectacle de qualité et assurer aux artistes, aux intermittents, une vie décente. « Ce festival c’est la Garonne, les fifres, la création, comme la Ripataoulère, la musique et les danses d’ici et du monde,
la gastronomie ». « La fête est un espace de gratuité. Nous pensons que la culture doit être ouverte au plus grand nombre. Alors que le moindre événement dans notre société est annoncé avec son coût. Ici la Petite médiathèque donne des livres et quel plaisir de voir des gens amener ou emporter quelques ouvrages. C’est ça notre fête, pleine de “gasconitudes”. » Le maire du village, Stéphane Denoyelle, après les salutations et remerciements d’usage a fait une annonce surprenante, allusion à peine voilée à l’éclatement de la Cdc des Coteaux macariens. « Cette année je dois vous avouer que j’ai longtemps hésité à vous faire un discours, je ne voulais pas que certains d’entre vous se disent “il va encore en profiter pour faire de la politique, il n’a qu’à parler du festival. Ça suffit !”. Ils ont parfaitement raison. Cette année, j’ai donc décidé de ne vous parler que du festival, sans le discours idéologique écolo coco du maire du village d’irréductibles gaulois/gascons qui a fait peur à nos amis de l’autre côté du fleuve et qui pourrait effrayer nos nouveaux partenaires. »
S’ensuit une démonstration que le festival est « parfaitement adapté aux contraintes de notre époque », ayant fait son « coming out libéral », comme le gouvernement… « La saine émulation compétitive généralisée entre le comité des fêtes, les Sous fifres, les Garonnais avertis pour une vallée épicurienne et solidaire, les viticulteurs, l’Association Vacances Loisirs permet à ce festival de toujours viser l’excellence et la performance. Sans demander plus d’argent public, le festival a su chercher des partenaires privés, développer son actionnariat (…) Notre festival a même décidé cette année de s’intéresser à la monnaie en créant le Souf … la seule monnaie dans le monde à être indexée sur le cours de la bière artisanale ! Enfin c’est un festival rentable car une récente étude du centre international des statistiques économiques de la vie rurale et vicinale garonnaise a indiqué que le Festival des Fifres de Garonne avait contribué de manière décisive à inverser la courbe du désespoir et de la sinistrose et provoqué un sursaut historique de l’indice du Bonheur national brut. Donc, vous le voyez nos voisins avaient tort de craindre notre singularité, nous sommes parfaitement assimilés à notre environnement et avons renoncé à toute idéologie… ou presque. » Parce que quand même l’élu propose à tous ceux qui le souhaitent de continuer à « placer l’humain au centre de nos actions » et invite les uns et les autres, autour d’un verre de l’amitié et de la fraternité, à se laisser aller à refaire le monde.
TNBA, BILAN, PROJETS, OCCUPATION ET PRÉOCCUPATIONS
« Et pourtant Elle et ils créent ! » Mardi dernier, dans le hall de la salle Vitez, Catherine Marnas, directrice du Tnba donnait, entourée de son équipe, une conférence de presse entre la saison qui s’achève et celle qui s’annonce… Elle souhaitait que se déploie « une profusion d’ imaginaire » propre à élargir le public du Tnba et du spectacle vivant. Le travail est bien lancé puisque la saison passée, malgré une annulation et des déplacements scolaires perturbés pour des raisons de sécurité, 60 590 spectateurs sont venus. Le taux de remplissage a été de 94 %. Les abonnés (5 292 en 2014/15) sont 6 739 cette saison et le public s’est nettement diversifié (33 % d’étudiants et de jeunes). Comme l’a vivement rappelé Cathe-
rine Marnas, ce n’est pas le théâtre obligé : « tout le monde ne doit pas y venir », mais « tout le monde peut y venir ». Cette année encore quarante enfants de 9 à 13 ans (venus des centres d’animation des quartiers de Bordeaux) seront une semaine au festival d’Avignon. L’ Etsba (École supérieure de théâtre de Bx Aquitaine) peut se réjouir d’avoir vu, lors de cette session, le nombre de candidats doubler. Ceux qui viennent de quitter cette école réussissent dans l’ensemble une insertion professionnelle inespérée : par exemple sur les six recrutés par la Comédie Française, trois viennent de l’école supérieure de Bordeaux. Tous ces efforts et ces résultats relèvent de ce que Marie-Josée Mondzain nomme « le travail invisible ». L’année
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8 • Les Nouvelles 30 juin 2016
CHRONIQUE
qui vient, avec 178 représentations (comme en 2015/2016) proposera 7 000 places de plus (séances plus nombreuses). Le critère des choix* est dominé par la volonté de présenter des spectacles d’une grande diversité, avec des comédiens en nombre. Répondant à une question des Nouvelles de Bordeaux et de L’Ormée, Catherine Marnas est revenue sur les évènements récents. Le Tnba a été occupé un mois par le collectif des intermittents et des précaires. Cette occupation rejoint totalement les préoccupations du monde de la culture. Catherine Marnas rappelle que la question des annexes 8 et 10 de l’accord n’est pas réglée. Selon elle, il serait dangereux pour l’avenir que l’État, qui peut changer d’orientation, se substitue financièrement à l’insuffisance de l’accord. Elle a fait part de la très grande préoccupation des directeurs de salles et de leur syndicat (Syndéac). Ils ont même envisagé une démission collective. En effet, depuis dix ans les subventions stagnent ou sont en baisse, et les exigences… se marchandisent. Vincent Taconet *Programme disponible à partir du 30 juin au Tnba- www.tnba.org- 05 56 33 36 80
Le religieux et le social Les faiseurs d’opinion que sont les médias dominants ont imposé, dans le champ intellectuel, M. Gilles Kepel comme principal spécialiste, en France, de l’islam. Fort de sa position hégémonique dans le sous-champ des études islamiques, M. Kepel récuse avec arrogance toute contradiction. C’est ce que l’on a vu dans une interview, étonnamment complaisante, parue dans l’Humanité en février dernier (26.02.2016). M. Kepel s’en prend violemment à Alain Gresh, du Monde diplomatique, sous l’accusation supposée infâmante « d’alliance islamo-gauchiste » sans que la journaliste, Mina Kaci, daigne relever l’outrance diffamatoire du propos, pas plus que d’obscures divagations sur on ne sait quelle « ex-avant-garde marxiste »… Mais M. Kepel n’épargne pas ses collègues. Il a bâti sa notoriété sur la notion passe-partout de radicalisation de l’islam qui lui permet d’amalgamer sans le moindre scrupule le foulard des petites lycéennes de Creil en 1989 et les exactions effroyables de Daesch aujourd’hui. Et on n’a pas intérêt à le contrarier. Un de ses pairs, Olivier Roy, a osé inverser son expression et évoquer plutôt une islamisation de la radicalité… M. Kepel n’a pas ici assez de sarcasmes : « élucubrations… idées fausses… sophismes modernes… paresse intellectuelle… » (toujours dans la même interview de l’Humanité). Voilà ce qui s’appelle un débat argumenté ! Cela dit, ces deux notions apparemment opposées ont, en fait, en commun de surestimer la dimension religieuse des phénomènes considérés. C’est une tendance lourde de l’idéologie dominante ayant pour objectif d’occulter la réalité des diverses formes de domination, réduites à du fanatisme religieux, ce qui permet de dénaturer les luttes des opprimés. Un essayiste, Jean Birnbaum, a écrit tout un ouvrage, sous le titre Un silence religieux. La gauche face au djihadisme, pour reprocher à la gauche « d’escamoter la puissance propre à la religion », tout en réduisant lui-même celle-ci au djihadisme, ce qui est méthodologiquement inepte et d’une mauvaise foi confondante. Qui a intérêt à faire disparaître la dimension sociale des révoltes sous une dimension religieuse hyperbolisée ? Nous en sommes presque arrivés au stade ultime de ce que Alain Bertho appelle la « confessionnalisation générale de la question sociale » (Les enfants du chaos. Essai sur le temps des martyrs, La Découverte, 2016, p.33). En fait l’image même du djihadisme est cultivée comme un repoussoir monstrueux face aux tentatives de révoltes des opprimés de partout. Un peu comme, toutes proportions gardées, les exactions des « casseurs » sont utilisées pour disqualifier les manifestations contre la loi-travail. La confusion délibérée entre djihadisme et islam (Birnbaum, Kepel…) est à la fois une mauvaise action et une erreur grossière (pour ne pas dire intéressée). Il y a des islamologues pour le dire. Selon Olivier Roy, « les djihadistes sont en marge de la communauté musulmane : ils n’ont presque jamais un passé de piété et de pratique religieuse, au contraire » (le Monde, 25.11.2015) ; selon Farad Khosrokhavar, « ils (ces jeunes) s’identifient au djihadisme moins pour des raisons religieuses qu’identitaires et sociales » (le Monde, 19.11.2015). Hé oui, on n’évacue pas d’un revers de main la question sociale et, comme le rappelle Frédéric Lebaron, « la religion est un fait social parmi d’autres : le travail du sociologue consiste à comprendre les déterminations sociales qui sont à l’oeuvre derrière l’engagement religieux » (le Monde, 19.03.2016). Enfin, on ne peut pas, ici, ne pas rappeler ce qu’en disait un certain Karl Marx en 1843 : « la misère religieuse est tout à la fois l’expression de la misère réelle et la protestation contre la misère réelle. La religion est le soupir de la créature accablée, l’âme d’un monde sans cœur, de même qu’elle est l’esprit d’un état de choses où il n’est point d’esprit. Elle est l’opium du peuple »… comme soulagement illusoire de la souffrance. Reste une question le plus souvent éludée, un authentique tabou de l’histoire, celui de la responsabilité des religions monothéistes dans l’institutionnalisation de l’intolérance dans les sociétés humaines. Les religions monothéistes n’ont pas le monopole des massacres de masse mais la conquête et le prosélytisme sont dans l’essence du monothéisme comme détenteur d’une vérité unique, transcendante et universelle. Il faut convertir les infidèles, les impies, les hérétiques en des croisades implacables qui ont été les premières des pires violences de l’histoire…