Jeudi 7 septembre 2017 - N° 2219 - Hebdomadaire - 15, rue Furtado - 33800 BORDEAUX - Prix : 0,80 euro
MANIFESTATION CONTRE LA LOI TRAVAIL XXL MARDI 12 SEPTEMBRE 11H // PLACE DE LA RÉPUBLIQUE // BORDEAUX
LOI TRAVAIL XXL : les ordonnances au coeur de la rentrée sociale et politique (pages 3 à 5)
EMPLOIS AIDÉS
ACHARNEMENT D’ISRAEL
FÊTE DE L’HUMA
Le point noir de la rentrée
Libérez Salah Hamouri !
Les rendezvous culturels
P.2
P.6
P.8
ACTUALITÉ COURSIERS À VÉLO
POINT NOIR DE LA RENTRÉE SCOLAIRE EN GIRONDE
Une première victoire
Le plan de licenciement des EVS Photo Xavier Ridon/Rue89 Bordeaux
Les coursiers à vélo ont obtenu de la société Deliveroo un premier geste dans la reconnaissance de leur droit à la négociation collective. Une première victoire importante. Le premier septembre, le collectif national des coursiers à vélo (avec la CGT des coursiers de Bordeaux, le Club des coursier de Lyon, le CLAP de Paris, les Bikers nantais), accompagné des fédérations CGT et SUD du commerce et des Services, a rencontré pendant plus de 3 heures les directions de la société Deliveroo. Cette dernière s’est engagée à ce qu’aucun coursier engagé ne soit sanctionné. « Cette première rencontre pose le principe de la reconnaissance d’une représentation collective des livreurs chez Deliveroo, a déclaré le collectif. En plus des quatre villes où existent déjà des associations, des collectifs et syndicats, nous appelons tous les bikers à s’organiser collectivement pour que, dans un futur proche, chaque ville soit représentée ». Deliveroo sévit dans une vingtaine de villes en France. Cette rencontre a aussi permis au collectif de revenir en détail sur ses revendications : un prix de 7,50 € à la course avec un minimum horaire garanti de 15 à 20 €, selon les heures. ÉTAT D’URGENCE BANALISÉ
Urgence pour les libertés Le collectif girondin contre l’état d’urgence*, à l’appel d’un mouvement national, vous invite à demander le retrait du projet de loi relatif à la sécurité intérieure et à la lutte antiterroriste. Déjà voté en première lecture par le Sénat, il prévoit d’intégrer dans le droit commun les principales dispositions prévues dans le cadre de l’état d’urgence. Un rassemblement est organisé le dimanche 10 septembre à 15h, place de la comédie à Bordeaux. Ci-dessous, le communique du collectif. « Depuis maintenant près de 2 ans, notre pays est soumis à un régime spécial du fait de la prorogation de l’état d’urgence. Sous couvert de lutte contre le terrorisme, les dispositions particulières applicables dans ce cadre (assignations à résidence, perquisitions administratives à domicile, bracelets électroniques...), dérogatoires au droit commun et liberticides, ont été mobilisées à d’autres fins, notamment à l’encontre de militants associatifs ou de mouvement sociaux. De nombreux abus d’autorité ont également pu être constatés dans le cadre de l’application de ces dispositions : contrôle d’identité au faciès, violences policières... L’efficacité limitée et les risques associés à la prorogation de l’état d’urgence ont été relevés par de nombreuses instances (commission d’enquête parlementaire sur l’état d’urgence, Défenseur des droits, Commission nationale consultative des droits de l’Homme, commissaire européen des droits de l’Homme du Conseil d’Europe...). À l’application de ces dispositions s’est ajouté le renforcement du dispositif législatif en matière sécuritaire, dont les lois du 3 juin et du 21 juillet 2016 jusqu’à celle relative à la sécurité publique du 28 février dernier. Le nouveau gouvernement vient, non seulement de prolonger l’état d’urgence jusqu’au 1er novembre 2017 et, parallèlement, de proposer une loi permettant d’inscrire dans le régime du droit commun plusieurs dispositions relevant de cet état d’exception. Si ces mesures venaient à être adoptées, elles marqueraient un basculement de notre pays dans un régime d’État autoritaire, disqualifiant toujours plus les libertés individuelles et collectives sous prétexte sécuritaire. Que l’on sache, ni la Belgique, ni l’Allemagne, ni la Grande-Bretagne, également frappées par le terrorisme, n’a osé adopter de telles dispositions. Au prétexte de lutter contre la menace terroriste, notre gouvernement accepte donc de céder sur l’essentiel des principes qui fondent notre démocratie, confortant plus qu’il ne dissuade ceux-là même qu’il prétend combattre. » FONCTION PUBLIQUE
Les syndicats dénoncent les attaques contre leur statut Pour les syndicats de la fonction publique CGT, FO, FSU et SUD le gouvernement a dépassé la ligne rouge. Dans un communiqué de presse commun, ces organisations soupçonnent le gouvernement de vouloir casser le statut des fonctionnaires. L’intersyndicale de la Fonction publique dénonce pêle-mêle: l’augmentation de la CSG, le gel du point d’indice, la décorrélation du point d’indice entre les versants de la Fonction publique, le rétablissement du jour de carence, la suppression de milliers de contrats aidés mais aussi les 120 000 suppressions d’emplois programmées dans la fonction publique, dont 70 000 dans la Fonction publique territoriale. « La continuelle dégradation de la situation sociale est due aux politiques libérales menées en France et en Europe depuis plusieurs années, affirment les syndicats dans un communiqué du 31 août. Ces politiques libérales concentrent les richesses pour quelques-uns et ne laissent que chômage, précarité et pauvreté pour les autres. Les attaques incessantes contre les droits, les acquis sociaux, les Statuts, le Code du travail et les services publics, notamment territoriaux, participent de cette logique. » C’est pourquoi les organisations syndicales CGT et SUD de la fonction publique appellent aussi aux mobilisations du 12 septembre contre la Loi travail XXL. L’intersyndicale rappelle aussi que « le rôle des services publics est déterminant pour construire une société plus juste et solidaire, au contraire des politiques d’austérité qui se caractérisent non seulement par la faiblesse des rémunérations, mais aussi par une réduction drastique des moyens alloués aux services publics qui sont dès lors en difficulté pour satisfaire les besoins des usagers et assurer les missions assumées quotidiennement par les agents ».
2 • Les Nouvelles 7 septembre 2017
Dans cette rentrée qu’on qualifie de « fluide » en Gironde, l’annonce à quelques jours de la rentrée scolaire du non renouvellement des contrats des employés de vie scolaire (EVS) fait des remous : pétitions, grèves, interpellations d’élus sont en cours dans plusieurs établissements. Après un premier rassemblement le 30 août, pour interpeler le recteur à Talence lors de l’accueil des nouveaux personnels, une intersyndicale se met en place pour exiger du gouvernement le maintien en emploi de ces personnels indispensables au bon fonctionnement des établissements scolaire. Justine a 24 ans. Depuis le 3 novembre 2016, elle assistait le directeur d’une école de Baccalan dans ses tâches administratives et accompagnait les sorties scolaires. Son contrat devait être renouvelé le 31 août. « Au mois de juillet, je suis allée au lycée Gustave Eiffel qui recrute les EVS pour savoir si mon contrat serait
bien renouvelé, raconte Justine. Le directeur de mon école était satisfait de mon travail et voulait bien me garder une année de plus. On n’a pas pu me renseigner. En suivant l’actualité, j’ai commencé à m’inquiéter mais les EVS ne semblaient pas concernés par les restrictions sur les contrats aidés. J’ai quand même appelé le lycée qui ne pouvait toujours pas me renseigner. Finalement, le 29 août, à deux jours de la fin de mon contrat et à quelques jours de la rentrée, j’ai reçu un courrier m’indiquant qu’il ne serait pas renouvelé ». Pour Justine c’est le retour à la case chômage, avec des allocations qui ne pèseront pas bien lourd après un contrat de 20h semaines pour à peine 600 euros par mois. 183 EVS du premier degré en Gironde se retrouvent dans la même situation, nous informe Dominique Marchal de la CGT Éduc’action 33. Lorsque le syndicat a été reçu à la Direction des services départementaux de l’éducation nationale (DSDEN) de Gironde, le 1er septembre, celle-ci lui a précisé qu’elle appliquait des mesures gouvernementales intervenant
à quelques jours de la rentrée. « Toutes ces personnes ont su que leur contrat n’était pas renouvelé la dernière semaine, c’est humainement terrible pour des personnes qui étaient parfois en poste depuis plusieurs années, s’indigne le syndicaliste. Ce sont beaucoup de femmes, très investies dans leur travail qui se retrouvent à la porte du jour au lendemain. » Un travail loin d’être « fictif » précise Dominique Marchal. « Cela va forcément retomber sur leurs collègues, notamment sur les directeurs d’écoles qui accueillent parfois plus de 300 élèves ». Macron avait pourtant annoncé qu’il faisait de l’Éducation une priorité notamment par rapport aux restrictions sur les contrats aidés. « C’est une forme d’arnaque, commente le militant CGT, car dans l’Éducation nationale, il y a deux types de postes en contrats aidés, les EVS et ceux qui accompagnent le handicap, seuls ces derniers sont maintenus car il est plus compliqué, politiquement, de les supprimer. Mais ces emplois restent précaires. De toute façon, nous ne sommes pas favorables aux emplois aidés sur ces postes indispensables à l’accueil, l’encadrement et la sécurité des enfants. Nous revendiquons un plan d’embauche massif et de titularisation ». Un point de vue partagé par le Snuipp qui appelait également à un nouveau rassemblement devant la DSDEN de la Gironde le 4 septembre pour faire converger et amplifier les luttes contre ce « plan de licenciement injustifiable ». CD
PROTECTION SOCIALE
Le RSI, achevé comme il est né Le premier ministre a confirmé hier la fin du régime social des indépendants. Celui-ci concerne 6,6 millions de personnes (actifs, retraités et ayants droits). Une mise à mort aussi précipitée que sa création, estime la CGT. Édouard Philippe a entériné la décision : le RSI, ou régime social des indépendants, vit ses dernières heures. Le premier ministre se donne deux ans pour venir à bout de ce régime social décrié, qui sera définitivement supprimé à compter du 1er janvier 2018. « Il ne s’agit pas de tout chambouler pour le plaisir de tout chambouler », a-t-il plaidé, mais de cesser « de bricoler » pour tenter de réparer les dysfonctionnements de l’organisme. Avec quelle garantie de succès ? Toute la question est là. Un organisme, mal troussé dès l’origine
Le RSI est l’héritier malmené d’une histoire de scission. Dès 1945, commerçants, chefs d’entreprise et autres artisans refusaient d’intégrer le régime général de Sécurité sociale, à l’époque sous gestion ouvrière, préférant développer plusieurs caisses autonomes. En 2006, le gouverne-
ment Raffarin décidait de les regrouper toutes en une : le régime social des indépendants voyait le jour, avec pour ambition de simplifier les démarches des 2,8 millions de cotisants concernés. Ces derniers déchanteront. La variété de leur situation et l’évolution rapide des professions rendent la réunification des caisses complexe. La crise qui explose en 2008 trouble encore la donne. Mais la réforme, surtout, a été mal troussée et mal financée. « La précipitation avec laquelle le régime a été mis en place et la réduction de coûts de gestion imposée sous prétexte de simplification induisaient inéluctablement l’échec du RSI », commente aujourd’hui JeanFrançois Naton, conseiller CGT à la Caisse nationale d’assurance-maladie (Cnam). En 2009, la création du statut d’autoentrepreneur finit de gâter la situation en créant une nouvelle caste d’indépendants précaires. Au final, la structure censée tout simplifier devient organisme sous-doté, sommé de gérer des situations sociales contrastées – 460 € par mois de revenu moyen pour un autoentrepreneur, 3 100 € pour les autres indépendants. Les retards de versement de retraites se multiplient, de même que les dossiers non traités. En 2012, la Cour des comptes parlera
de « catastrophe industrielle ». L’absence de visibilité du processus en cours
Fallait-il jeter le bébé avec l’eau du bain ? Les avis sont partagés. Le Syndicat des indépendants et l’Union des entreprises de proximité se félicitent de la décision, laquelle répercute une promesse du candidat Macron. « Si nous étions dans la logique originelle de 1945, visant une sécurité sociale de haut niveau pour tous, ce serait évidemment une bonne nouvelle », reprend Jean-François Naton. Seulement ce n’est pas le cas. Neuf mille suppressions de postes ont été programmées entre 2014 et 2017 dans les organismes de Sécurité sociale (MSA, RSI et régime général), rappelle-t-il, couplées à une amputation de 15 % des budgets. « Dans ces conditions, le regroupement des caisses peut s’avérer un fiasco complet pour tout le monde », poursuit le syndicaliste, notant l’absence de visibilité du processus en cours. Un non-choix stratégique, conclut-il. « On fait porter à un organisme et à ses salariés la responsabilité d’échecs induits par des choix politiques. » avec l’Humanité du 6/09/17
ACTUALITÉ
Editorial
MANIFESTATION CONTRE LA LOI TRAVAIL XXL MARDI 12 SEPTEMBRE 11H, PLACE DE LA RÉPUBLIQUE À BORDEAUX LOI TRAVAIL XXL
Le décryptage prélude à la mobilisation Les partenaires sociaux ont pris connaissance la semaine dernière seulement des ordonnances définitives, lors d’une première et unique réunion multilatérale convoquée à Matignon. Tandis que la première riposte est prévue le 12 septembre, leur contenu (lire page 4) n’a pas manqué de faire réagir. L’Humanité du 5 septembre donne la parole à douze personnalités qui décryptent le contenu des textes (lire aussi l’interview de Corinne Versigny en page 5). Tous alertent sur les conséquences qu’auront les ordonnances du gouvernement dans le quotidien des salariés. Contrairement à la berceuse jouée par l’exécutif, aucun syndicat n’a applaudi cette loi travail XXL. Même Jean-Claude Mailly, secrétaire général de FO, a bien été obligé de reconnaître que les cinq ordonnances ne formaient « pas un ensemble équilibré ». Tout comme la CFDT, « déçue » alors qu’elle avait porté jusqu’au bout, en 2016, le pied-de-biche que constituait la loi El Khomri dans cette opération de casse du Code du travail. Depuis cet été, la riposte s’organise. Un appel à faire grève le 12 septembre est parti des confédérations CGT, Solidaires, FSU et de l’Unef, ainsi que de plusieurs unions territoriales FO et de la fédération des transports FO, soutenues depuis par le PCF, Europe Écologie-les Verts, la France insoumise, les Jeunes communistes, les Jeunes socialistes, le mouvement de Benoit Hamon et même, finalement, le bureau national du PS. Dans les colonnes de l’Huma, Patrice Clos, secrétaire général de FO transports et logistique, explique ce qui va se passer dans son secteur : « les grandes entreprises vont pratiquer encore plus la sous-traitance en cascade et les petites entreprises vont se mener une course au moins-disant social pour remporter les marchés. Donner la primauté à l’accord d’entreprise, c’est introduire le dumping social en France, ce n’est pas autre chose ». « Pour nous, syndicalistes, il va falloir faire œuvre de pédagogie, expliquer aux salariés qu’ils ne seront pratiquement plus aidés par des experts, étant donné, par exemple, que les instances représentatives du
personnel vont devoir payer 20 % de leur poche pour réaliser des expertises. » Chez les cadres, le CDI de projet inquiète particulièrement. « On ne va pas dans le sens d’une plus grande cohésion sociale avec cette loi, mais d’une individualisation », constate François Hommeril, président de la CFE-CGC. « Le véhicule conduit par Édouard Philippe et Muriel Pénicaud a ramassé tout le bric-à-brac néolibéral sur la route, poursuit-il. Même si nous avons été bien reçus lors des réunions bilatérales, ce qui ressort aujourd’hui est une attaque frontale contre les syndicats et une trahison ». Bernadette Groison, secrétaire générale de la FSU, regrette le recours aux ordonnances sur un sujet « aussi essentiel que celui du travail ». « Le gouvernement, en choisissant d’aller vite, empêche tout un chacun de s’approprier les enjeux de cette réforme du Code du travail. Il exclut l’opinion publique d’un débat pourtant nécessaire ». Forme et fonds sont à l’unisson. D’ailleurs, pour Cécile GondardLalanne, codéléguée générale de Solidaires, dans cette réforme « tout se tient ». La négation du lien de subordination entre le patron et le salarié est un point central de cette réforme mais « cette nouvelle attaque n’est pas isolée », constate-telle. « Elle participe d’un processus global de déréglementation du droit du travail. Faciliter les licenciements économiques en mettant en place la rupture conventionnelle collective, et les licenciements abusifs en plafonnant les indemnités prud’homales, va de pair avec l’affaiblissement des outils que les salariés se sont construits collectivement pour se défendre : les outils syndicaux. » Pierre Dharréville, député PCFFront de gauche, souligne qu’il « s’agit d’une mise en cause de l’essence de la loi et de sa force protectrice. Et ces ordonnances sont prévues pour agir comme une fonction reset, permettant de revenir sur de nombreuses conquêtes dans les entreprises et dans les branches. Le dialogue social tant vanté se ferait plus encore à l’avantage de l’employeur, supposé être par nature perclus de bonnes intentions. Plus que jamais, cela nous rappelle à l’exigence d’unité pour ne pas laisser le Medef écrire ses lois comme bon lui semble en jouant des divisions du monde du travail. »
« Du modèle allemand revendiqué par les ordonnateurs libéraux de ces réformes successives, ils n’ont retenu que la précarisation, mais jamais le pouvoir salarié dans l’entreprise, se désole Marie-Noëlle Lienemann, sénatrice PS. Aucun d’entre eux ne rappelle que le modèle allemand est fondé sur la cogestion, que les conseils d’administration y sont composés pour moitié de représentants des salariés, ces derniers ayant un réel pouvoir de veto. L’Insee rappelle que le premier frein à l’embauche pour les patrons n’est pas le Code du travail mais l’incertitude économique : il eût fallu intégrer massivement dans les CA des salariés qui, avec leurs organisations syndicales, auraient pourtant beaucoup à apporter sur la stratégie de leurs entreprises ». Du côté du Syndicat des avocats de France, Judith Krivine s’inquiète d’une possible flambée de violence car « lorsqu’on a plus de droits ni d’accès au juge, on tente de se défendre autrement, explique-t-elle. Collectivement, cela pourrait se traduire par une multiplication des grèves et autres mouvements sociaux. Individuellement, si les conditions de travail dégradées ont déjà multiplié les cas de burn-out ou les suicides, demain, comme l’expliquent certains experts, la violence envers soimême pourrait se transformer en une violence envers les autres ». Sans surprise, Emmanuel Macron pourra donc finalement compter sur le seul soutien résolu des organisations patronales. L’Union des entreprises de proximité (U2P), artisans, commerçants et professions libérales, s’est dite « pleinement satisfaite ». Ainsi, Alain Griset, son président, se réjouit de « La possibilité pour les entreprises de déroger aux règles de branches en fonction de leurs besoins et de leurs priorités ». Du côté de la CPME, on salue « le pragmatisme » des ordonnances. Le président de la Confédération des petites et moyennes entreprises, François Asselin, regrette toutefois que la question des seuils sociaux n’ait pas été « directement traitée » et déplore l’augmentation de l’indemnité de licenciement. Qu’ils se rassurent. Le Medef voit plus loin. Pierre Gattaz considère que « Les ordonnances ne sont qu’une première étape pour redonner confiance aux patrons ». On est prévenu !
La gauche est à reconstruire ! Cette affirmation est juste, urgente même mais oh combien difficile si nous ne voulons pas retomber dans les errements et travers du passé. • Entre un PS en miette mais dont de nombreux dirigeants n’ont pas abandonné leur soif de pouvoir, jusqu’à un ex-président qui, malgré ses multiples actes de mépris de l’humain durant son mandat, ose se poser en conseil pour un libéralisme acceptable, ce qui rend les militants de ce parti qui restent encore fidèles à leurs valeurs de gauche rouges de colère, • entre un gourou de la pensée unique, la sienne, réfutant tout apport de pensée critique, cœur vivant indispensable à un possible capable, dans la durée, de porter un projet majoritaire, • entre un PCF qui, avec ses militants toujours debout, même si l’inquiétude, l’impatience grandissante après tant d’années de luttes, l’espoir érodé d’offres capables de construire un rassemblement citoyen. Ce rassemblement éclairé étant la seule possibilité, par une démocratie vivante, de bouter tous ces libéraux hors du champ de leurs nuisances imposées par le MEDEF et les maitres de la finance. Avec tous ces « « entre » on pourrait penser que Macron, si vieux par ses méthodes et ses idées, bénéficie d’une autoroute pour appliquer ses basses œuvres sociales, économiques, de guerre, etc. Mais alors, s’il en était ainsi, pourquoi agit-il dans le plus grand secret par ordonnances, reléguant l’Assemblée Nationale à une simple et ridicule chambre d’enregistrement, alors même qu’elle est totalement dévouée à sa cause ? La raison en est que ce pays a un peuple, même martyrisé depuis de nombreuses années mais dont peut surgir, à tout moment, une révolte appuyée sur son histoire révolutionnaire dont les tisons peuvent à tout moment s’enflammer ; surtout si l’alternative se fait jour, si une prise de conscience que notre force des 99 % peut se mettre en marche. Ce d’autant qu’existe dans ce pays un parti, même affaibli, mais dont les ressources idéologiques, militantes, électives sont bien présentes. Voilà bien pourquoi, tout en soutenant et participant aux luttes sociales comme le 12 septembre prochain, nous nous devons, toutes et tous, d’entrer dans notre congrès extraordinaire. Oui, toutes et tous, car ça ne peut pas, ça ne doit pas être appréhendé, vécu comme un congrès de plus, un congrès d’oubli du passé ou un congrès pour un avenir subi. Bien au contraire, tout ce qui nous a amené à ne pas pouvoir atteindre nos objectifs, souvent des plus justes, à être entendus, visibles devra être une des charpentes de nos discussions et décisions. Retrouver une unité, non pas de façade mais riche de sa diversité individuelle, pour faire vivre un collectif actif, donnant à nos concitoyens l’envie du possible, de l’utopie atteignable. La Fête de l’Huma les 15, 16 et 17 septembre peut nous permettre de porter les 1res étincelles pour, enfin ! rallumer les étoiles du bonheur.
Max Guichard membre de l’exécutif du PCF33
Les Nouvelles 7 septembre 2017 • 3
RENTRÉE SOCIAL RENTRÉE POLITIQUE
DÉCRYPTAGE DES ORDONNANCES
La lutte continue, le débat aussi ! Le code du travail en lambeaux Les 36 mesures présentées hier par l’exécutif organisent la casse du droit du travail. Elles s’attaquent de front aux accords collectifs en faisant de l’entreprise l’échelon principal de la négociation sociale, affaiblissent le rôle et les prérogatives des syndicats, et facilitent les plans sociaux.
1. L’entreprise fait sa loi
L’accord d’entreprise prime.
François Ruffin, député FI et André Chassaigne, député communiste, président du groupe GDR, lors d’une rencontre organisée en juin dernier à la bourse du travail à Paris par le journal Fakir et le SNJ-CGT. « Des ordonnances, oui, mais, contre la finance ! »
PCF et France Insoumise ont un objectif commun pour cette rentrée : faire échec dans la rue aux ordonnances Macron et préparer l’alternative à ce gouvernement par défaut. Leurs stratégies comme leurs calendriers divergent pourtant. La rentrée sociale sera chaude ; et elle sera aussi… politique ! C’est ce que, chacun de leur côté, militants communistes et insoumis se sont promis. Quittant une séance parlementaire éprouvante mais stérile en amendements, les 11 députés-es communistes et leurs collègues sénatrices-eurs promettaient que « la bataille n’est pas terminée : à l’automne, les ordonnances écrites en catimini devront être ratifiées. Les mobilisations des salariés s’organisent, avec un premier rendezvous le 12 septembre. » Pour le groupe dirigé par André Chassaigne, il s’agit tout à la fois de « contrer le dynamitage organisé » du code du travail, et d’avancer « des propositions pour un code du travail du XXIe siècle », parmi lesquelles la sécurisation de l’emploi et de la formation, la lutte contre l’emploi précaire ou la création de nouveaux pouvoirs syndicaux. « Nous sommes fiers de nos élus-es », affirmait Pierre Laurent lors des Universités d’été, le 27 août dernier. Mais pas seulement fiers de leur capacité de résistance ; fiers aussi de « leur action (qui) fourmille d’expérimentations sociales, économiques, urbaines, culturelles, qui ouvrent des pistes de ce que pourrait être une société nouvelle ». Pour le PCF, qui est à la fois en rentrée sociale et en préparation d’un congrès extraordinaire pour 2018, l’heure est donc aux chantiers concrets : résistance et recherche d’alternatives politiques. « Nous sommes des résistants, expliquait Pierre Laurent, il n’y a pas meilleurs résistants que nous quand il faut faire face au combat. Mais notre projet communiste n’est pas de la résistance, notre projet c’est la conquête citoyenne, c’est la libération concrète et progressive de la société des entraves et des gâchis capitalistes. » De libération concrète, il en est aussi question dans la rhétorique utilisée par Jean-Luc Mélenchon en
cette rentrée. Cet été, les députés insoumis ont bataillé aux côtés de leurs collègues communistes. Mais pour cette rentrée, ils ont décidé de privilégier leur propre agenda : ce sera, quoiqu’en pensent les syndicats et les autres forces politiques disponibles, le 23 septembre pour une grande marche à Paris. Dans une note publiée le 6 août, l’ancien candidat à la présidentielle fait en 4 lignes un sort à la recherche d’une « opposition de gauche » au sein de l’hémicycle : ignorant les députés communistes et dénigrant les « socialistes de gauche », il conclut qu’il est inutile de chercher un tel rassemblement. Tout juste se limite-t-il à « la méthode des additions ponctuelles » ; additions de positions ponctuellement communes, que ce soit avec les Républicains ou avec les Socialistes. Pour la suite, comme Pierre Laurent, Jean-Luc Mélenchon veut voire plus loin : « (Les gouvernants) savent qu’ils ne savent pas aujourd’hui par quel bout prendre en main une situation qui ne leur a jamais appartenu. Le niveau de l’abstention aux législatives était un signal extrêmement fort de la grève civique froide (…). L’un après l’autre, tous les compartiments de la société ont été mis ou remis en tension. Nos retours de terrain sont formels sur ce point. D’une façon ou d’une autre, nombreux sont ceux qui ressentent quelque chose qui finit par être une évidence : tout cela ne durera pas. Dans ces conditions il va de soi que la marche à laquelle nous appelons le 23 septembre est pour nous un test global. D’abord parce que ce sera un indicateur de la capacité de la société à réagir. Ensuite parce que nous pourrons voir quel arc de forces politiques se constitue pour participer à cette réplique. » Un arc politique dans lequel il faudra bien, un jour ou l’autre, que n’existe pas qu’une seule force et une seule ligne. Dans son discours à Angers, Pierre Laurent en appelait à une nouvelle réflexion sur les conditions du rassemblement et de la composition d’une nouvelle majorité, alternative ; afin de ne pas voir « tous nos espoirs de nouveau confisqués », et de ne pas « revivre demain le second tour MacronLe Pen ». VB.
4 • Les Nouvelles 7 septembre 2017
La loi El Khomry l’avait initiée, ces ordonnances parachèvent l’inversion de la hiérarchie des normes. Derrière cette expression, se cache un principe fondateur de notre droit du travail. Jusqu’à présent, le Code du travail primait sur toute autre forme d’accord émanant de la branche professionnelle ou d’une entreprise, à moins que ces derniers soient plus favorables aux travailleurs. Tout est envoyé cul par-dessus tête. Le Code du travail ne fixera plus que des seuils minimalistes, adaptables au niveau de chacune des branches professionnelles chargées de définir des règles communes de fonctionnement au sein d’un même secteur économique. Règles que les entreprises auront tout le loisir de contourner via toute une série d’outils distillés au fil des cinq ordonnances. Alain Griset, le président de l’U2P (artisans et indépendants), était sans doute le plus heureux de cette évolution. Car, ces contournements s’offrent aux petites entreprises. Jusqu’ici, en l’absence de délégué syndical, celles-ci devaient se conformer à la loi et aux accords de branche. Désormais, les petits patrons auront la possibilité de passer outre en téléguidant des négociations maison (voir par ailleurs).
CDD au rabais. Les promoteurs des ordonnances insistent tout de même sur le rôle central des branches professionnelles pour la fixation des salaires minimums, des grilles de qualification, des politiques de formation, de prise en compte de la pénibilité et de l’égalité professionnelle femmeshommes, ainsi que du choix des complémentaires santé. Une façon de souligner que le dumping social tous azimuts entre entreprises d’un même secteur économique avait été évité. Les branches sont dotées d’une nouvelle prérogative : celle du contrat de chantier, dont les modalités étaient jusqu’alors fixées par la loi. Chacune pourra bientôt fixer par la négociation les règles permettant aux entreprises concernées de recourir à ce genre de contrat plus précaire et moins protecteur qu’un CDD. Il n’en reste pas moins que les textes gouvernementaux offrent à la négociation, au niveau de l’entreprise, les moyens de contourner ces seuils fixés par la branche. Un exemple mentionné par le gouvernement ? Une prime d’ancienneté « imposée par la branche » pourra, après négociation d’entreprise, être détournée pour autre chose, comme le financement d’une garde d’enfant. 2. Le licenciement devient presque une formalité
La rupture conventionnelle collective sortie du chapeau.
Symbole de cette prime donnée aux accords d’entreprise, le gouvernement offre un recours généralisé aux accords compétitivité emploi. « Il s’agit d’une mesure majeure, reconnait Muriel Pénicaud. Nous donnons la possibilité aux entreprises de s’adapter vite à une hausse ou une baisse de l’activité économique par des accords simplifiés. » Ces accords étaient jusqu’alors l’apanage de grosses PME ou multinationales (Renault et PSA, par exemple) en proie à des difficultés, souhaitant jouer sur le temps de travail, la rémunération et la mobilité de leurs salariés, dans un laps de temps réglementé, en échange d’une garantie de niveau d’emploi. Les négociations menant à ce genre d’accord vont être « simplifiées », expliquait la ministre du Travail. Et malheur aux salariés qui s’y opposeraient. Leur éviction ne sera plus considérée comme un licenciement économique. Adieu les indemnités et droits au reclassement afférents.
C’est la grosse surprise de la journée. Alors que le gouvernement souhaitait inscrire dans le Code du travail les plans de départs volontaires (PDV), il a finalement proposé à la place une rupture conventionnelle collective. Dans le PDV, la prime de départ est incitative, donc en générale supérieure à celle d’un plan de sauvegarde de l’emploi. Désormais, la négociation sera menée sur le modèle des ruptures conventionnelles individuelles, qui donnent souvent lieu à des indemnités bien moindres, beaucoup d’employeurs se contentant de verser l’équivalent de l’indemnité légale de licenciement. Leur nombre est d’ailleurs en explosion depuis leur création en 2008, avec 35 700 ruptures conclues rien qu’en juin dernier, un record. Ce dispositif, reposant sur le principe erroné que salarié et employeur sont sur un pied d’égalité, fait pourtant couler beaucoup d’encre. Accusée de servir de préretraite déguisée, de n’être souvent qu’à la simple initiative de l’employeur, la rupture conventionnelle collective prédit de nouvelles dérives. Pour Philippe Martinez, secrétaire général de la CGT, « cette création » est aussi une manière d’éviter de mettre en place un plan de sauvegarde de l’emploi (PSE), avec les garanties sociales qui vont avec…
Contrats de chantier,
Le rôle du juge anéanti.
Accords compétitivité-emploi survitaminés.
Après une première tentative avortée dans la loi Macron, l’exécutif réussit cette fois-ci à sérieusement limiter les recours des salariés licenciés devant les prud’hommes. Tout d’abord, les ex-employés voient le délai de contestation devant la justice passer de deux ans à un an. Mais surtout, alors que la compensation allouée au plaignant était laissée à l’appréciation du juge, elle sera désormais plafonnée à vingt mois de salaire brut pour les personnes ayant trente ans d’ancienneté et dont le licenciement a été requalifié sans cause réelle et sérieuse, de six à trois mois de salaire pour deux ans passés dans l’entreprise, et un mois de salaire en dessous de deux ans. Ces plafonds ne s’appliqueront pas en cas de plainte pour discrimination ou d’atteinte des droits des salariés. Cet encadrement drastique augure d’indemnités moindres pour les salariés lésés et d’une sécurisation des licenciements pour les employeurs. Pour tenter de faire passer la pilule, le gouvernement propose en parallèle d’augmenter les indemnités légales de licenciements de 25 %. « Insuffisant », pour Jean-Claude Mailly, secrétaire général de FO. Le plan social facilité. Le périmètre du plan social et son motif économique ne seront plus appréciés au niveau international, mais au niveau local. Pour le gouvernement, il s’agit d’harmoniser les règles avec celles des pays européens : « Cette solidarité de toutes les filiales du monde avec la filiale française en difficulté compte parmi les règles qui pénalisent la France dans les comparaisons internationales et qui détournent les investisseurs. » Rien que cela ! Cette réduction du périmètre rend possible la mise en faillite d’une unité implantée en France alors que la santé du groupe est florissante à l’échelle mondiale. Même si la ministre du Travail précise que des garde-fous seront instaurés, comme un « éventuel contrôle du juge », le risque est réel. 3. Dialogue social : les syndicats au second plan
Des accords pourront être signés sans les syndicats… Contre-révolution dans l’entreprise : les sociétés de moins de 20 salariés pourront négocier avec un employé non élu et non mandaté par un syndicat. Les entreprises de 20 à 50 salariés le pourront avec un élu du personnel non mandaté. Un seuil de 50 que revendiquait la CFDT lors des concertations, rejointe aujourd’hui par Jean-Claude Mailly, de Force ouvrière, qui affirme que les discussions ont permis d’éviter que cela ne s’étende aux entreprises jusqu’à 300 salariés. Maigre consolation pour les autres syndicats. Argument du gouvernement et des patrons ? La présence syndicale dans les PME atteint juste les 4 %, et l’absence de
LE ET POLITIQUE délégués syndicaux impose de se conformer aux accords de branche, sans négociation possible à l’échelle de l’entreprise. Dans les TPE, le chef d’entreprise pourra directement consulter ses salariés, notamment par le biais du référendum.
parce que beaucoup y aspirent. Nous avons porté notre code du travail à Macron, avec toutes ces propositions, visiblement il n’est pas intéressé. On continuera car il faut redonner confiance aux salariés, en leur pouvoir de faire changer les choses. Et je crois en la lutte et la négociation, il ne faut jamais lâcher l’un pour l’autre.
INTERVIEW DE CORINNE VERSIGNY :
« En résumé, les ordonnances, c’est la fin du contrat de travail »
Référendum pour les employeurs dans les TPE. Dans les entreprises comprenant jusqu’à 11 salariés, l’employeur pourra consulter directement ses employés par référendum, sur l’ensemble des thèmes ouverts à la négociation d’entreprise. Dans les entreprises de 11 à 20 salariés, qui ne possèdent pas d’élus du personnel, un référendum à l’initiative de l’employeur pourra aussi être utilisé pour valider un accord d’entreprise. La loi El Khomri avait ouvert la possibilité du référendum mais initié par des syndicats minoritaires. La loi Pénicaud donne cette fois-ci directement la prérogative à l’employeur. Une possibilité qui inquiète même Laurent Berger, le numéro 1 de la CFDT, plutôt sensible jusqu’ici aux propositions du gouvernement. Fusion des IRP et disparition des CHSCT. Osant afficher vouloir « défendre un dialogue social simplifié et opérationnel », le gouvernement a décidé de fusionner les trois instances représentatives du personnel – délégué du personnel, comité d’entreprise, et CHSCT (comité d’hygiène, sécurité et conditions de travail) – en un seul conseil social et économique (CSE) dans toutes les entreprises de plus de 50 salariés. François Hommeril, président de la CFE-CGC, dénonce une « fusion forcée » qui « supprime le CHSCT de sa personnalité morale, ce qui discrédite l’ensemble du projet ». Une commission CHSCT pourra exister dans les entreprises de plus de 300 salariés ou être imposée dans certains cas par l’inspection du travail. L’ensemble des syndicats de salariés dénonce cette fusion qui entraînera la diminution du nombre d’élus et de moyens. Un décret prochain devrait préciser ces chiffres. Le gouvernement ouvre également à hauteur de 20 % la participation du CSE aux frais des expertises, qui jusqu’ici demeuraient principalement à la charge de l’employeur. Une façon d’en freiner le recours car le budget octroyé actuellement au comité d’entreprise n’est pas extensible. Autre bouleversement : par accord majoritaire, il sera possible de fusionner les délégués syndicaux (DS) au CSE, et donc leur compétence de négociation. Dans ce cas-là, le CSE prendra le nom de « conseil d’entreprise ». Or, comme le souligne Philippe Martinez, de la CGT : « Un représentant du personnel et un syndicat, ce n’est pas la même chose. » Stéphane Guérard, Kareen Janselme et Cécile Rousseau, L’Humanité 01/09/2017
NBSO. Comment s’annonce la mobilisation du 12 septembre ?
L’union départementale CGT réunissait 115 militants à la Bourse du travail de Bordeaux, vendredi 1er septembre. Nous y avons rencontré Corinne Versigny, secrétaire générale, qui réagit à la publication des ordonnances, annonce un 12 septembre massif et une bataille de longue durée.
Les Nouvelles. Nous connaissons enfin le contenu des ordonnances, pouvez-vous revenir sur le processus ? Corinne Versigny. L’utilisation des ordonnances en elle-même constitue un déni de démocratie, c’est un passage en force pour détruire 120 ans de droits du travail. Il n’y a pas eu de négociation mais une concertation avec l’intersyndicale en bilatérale. En tout, chaque organisation a eu six heures. Six heures pour revenir sur 120 ans de construction… À aucun moment nous n’avons pu discuter du contenu exact de ces ordonnances. Le gouvernement nous remettait des fiches. Toutes les organisations ont découvert ensemble le contenu exact hier, en multilatérale. NBSO. Un contenu qui ne vous surprend pas ? C.V. Ce que nous avons découvert est sans surprise en effet mais pas moins scandaleux pour le monde du travail. En résumé : c’est la fin du contrat de travail. C’est le constat que l’on peut faire lorsque l’on reconstitue le puzzle des ordonnances. Avec les contrats à la tâche et les accords d’entreprise, les salariés vont être soumis à la volonté du patronat sur des questions aussi importantes que les salaires, les primes, les congés maternité, etc. Quelque soit la convention collective, l’employeur peut tout remettre en question. Avec la fusion des instances (CE, délégués du personnel et CHSCT) qui deviennent “conseil social et économique”, on va vers des négociations de gré à gré entre employeur et salarié. C’est une attaque frontale contre les syndicats. Ils veulent éliminer les représentants, pour eux le dialogue social, c’est entre l’employeur et le salarié. On voit où le rapport de force se pose. Le contrat de travail gagné de haute lutte, même s’il n’est pas parfait, permettait d’équilibrer justement ce rapport de force. Il permettait de cadrer la journée de travail, les primes,
les salaires… Seul le patron détiendra ce pouvoir si ces ordonnances s’appliquent. Les comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) datent des lois Auroux (NDRL : 1982, sous le gouvernement Mauroy) permettaient de faire de la prévention, de discuter de l’organisation du travail, des conditions, par exemple l’utilisation de produits dangereux, etc. Alors que les maladies professionnelles explosent, on risque d’avoir de plus de plus de salariés abimés par le travail.
« Avec le droit à l’erreur pour l’employeur devant les prudhommes, c’est un permis de licencier qui lui est accordé. » Le CDD fixait le début et la fin du contrat, avec les contrats de mission, l’employeur pourra, à tout moment, mettre fin au contrat, dès qu’il considère que la tâche est finie. Il sera applicable partout et aura pour effet de tout changer au niveau des salaires, de la durée du travail… Dans certains secteurs, les primes vont baisser de 20 %.
« C’est un retour au XIXe siècle. » C’est tout un modèle de société que nous construit Macron. Il augmente la CSG pour les retraités, qui ont pourtant de plus en plus de mal à vivre correctement, à partir de 1200 €, comme si ce niveau de revenus les rendait aisés ! Il annonce l’augmentation du pouvoir d’achat des salariés mais il s’agit en réalité d’un transfert de la part mutualisée des salaires sur la fiscalité. L’objectif est de privatiser la sécurité sociale. L’argent des cotisations, c’est notre argent, on nous le vole ! 120 000 postes de fonctionnaires vont être supprimés et la baisse des dotations aux collectivités locales va impacter l’offre de services publics comme les crèches, les écoles… Les étudiants voient leurs APL baisser de 5 € alors qu’un quart d’entre eux vivent en dessous du seuil de pauvreté et que seulement 10 % des enfants d’ouvrier accèdent aux études supérieures. C’est bien un modèle de société complètement déshumanisée au profit des capitalistes qu’on nous construit. 47 milliards de dollars ont été versés aux
actionnaires, la France est devenue championne d’Europe en dividendes versés. C’est le fruit du travail des salariés, il devrait être réinvesti pour améliorer leurs conditions de travail. Au lieu de ça, on leur propose une précarité absolue qui va toucher l’ensemble du salariat, y compris les cadres. Les ordonnances ne sérient pas de catégories, c’est l’ubérisation pour tous. D’ailleurs, le patronat trouve cette loi parfaite, les salariés peuvent s’inquiéter. C’est une loi de classe, une loi au profit des 1 % les plus riches. L’argument du plein emploi ne tient pas, de nombreuses études montrent que la création d’emploi n’est pas liée au niveau des droits. Par contre on sait que moins il y a de droits, plus il y a d’inégalités et de pauvreté. La loi travail est combattue dans toute l’Europe, il semble que les Italiens aient fait reculer leur gouvernement à ce sujet. Ici tout est à faire mais rien n’est perdu. NBSO. Justement, comment allezvous vous y prendre dans cette rude bataille ? Comment réagissent les militants ? C.V. Les militants sont conscients de la gravité de la situation mais ils sont très déterminés. Il y a une bonne tonalité dans l’assemblée générale aujourd’hui. Nous demandons aux militants d’appeler à la grève et de bloquer les entreprises. Nous voulons, notamment, nous déployer dans les très petites entreprises qui vont être fortement impactées car même les conseillers de salariés ne pourront y intervenir.
« Le 12 septembre est une première étape. La bataille va être dure et longue, les militants en sont conscients, mais elle n’est pas impossible. » Nous avons des propositions pour simplifier le code du travail, avec de nouveaux droits (formation, ancienneté, pénibilité…) pour les salariés, attachés à la personne et non plus à l’entreprise pour que l’employeur soit responsabilisé lorsqu’il licencie. Nous proposons la réduction du temps de travail à 32h car elle est nécessaire pour créer des emplois, parce que nous créons assez de richesses pour cela et
C.V. Le 12 septembre va être massif, il y a eu beaucoup de travail des syndicats cet été avec des assemblées générales dans les entreprises. Tout le monde ne va pas réagir en même temps mais beaucoup de salariés s’interrogent, beaucoup sont en colère. Nous voulons rassembler le plus largement possible. La CGC est très remontée, s’il n’est pas dans sa culture d’appeler aux manifestations nationales, son président a invité ses adhérents à rejoindre les cortèges du 12 septembre. Malgré le positionnement de Jean-Claude Mailly, nous savons que dans les professions des syndicats FO appellent à la manifestation. C’est le cas à TBM ou il y aura aussi la CFTC. L’union départementale FO était présente à l’intersyndicale d’hier avec la FSU, Solidaire, l’UNEF, l’UNEL. Même s’ils attendaient la décision de l’instance confédérale, ils ont confirmé leur opposition aux ordonnances et à leur contenu. Notre champ d’action est syndical, c’est au rassemblement syndical que nous travaillons. Si par ailleurs d’autres organisations décident de rejoindre les cortèges du 12 septembre, tant mieux. Plus nous seront nombreux mieux ce sera. Les 21 et 22 septembre, les ordonnances seront présentées au conseil des ministres. Demain, en CE confédéral, nous déciderons d’une autre date de mobilisation car nous avons conscience que cette bataille devra être menée dans la durée. NBSO. On peut supposer que la rentrée sociale, cependant, ne s’arrête pas à la bataille contre les ordonnances… C.V. En effet, les dossiers ne manquent pas ! Les coursiers à vélo sont toujours en bataille contre Deliveroo, les Ford étaient réunis aujourd’hui en intersyndicale à Bercy. Il y a une forte inquiétude sur les activités de l’ensemble des hôpitaux de la Gironde, avec une bataille particulière pour Saint André et Robert Picqué dont c’est carrément le devenir qui est en question. Dans les collectivités territoriales, il y a beaucoup de remise en cause des primes et même du temps de travail. Les services à la personne continuent de se mobiliser. Le devenir industriel dans la chimie, sur la Presqu’Île se pose pas mal même s’il y a, pour le moment, un déni. Le 28 septembre, les retraités manifestent pour défendre leur pouvoir d’achat et le 13 octobre c’est la fédération de la métallurgie qui sera mobilisée contre un projet de déqualification d’ailleurs lié à la loi travail. Propos recueillis par Christelle Danglot
Les Nouvelles 7 septembre 2017 • 5
INTERNATIONAL ACHARNEMENT ISRAÉLIEN
CORÉE DU NORD
Liberté pour Salah Hamouri !
Un sixième essai nucléaire met le monde au défi
Le Franco-Palestinien Salah Hamouri, déjà embastillé durant sept ans en Israël, a une nouvelle fois été arrêté, au prétexte d’une « appartenance à une organisation ennemie », avant d’être placé en détention administrative pour une durée de six mois. Le militant et avocat francopalestinien Salah Hamouri a été placé en détention administrative, mardi dernier, pour une durée de six mois après son interpellation à son domicile, situé à Jérusalem-Est, le 23 août. Les lecteurs de l’Humanité et les militants communistes connaissent bien le visage de celui qui fut arrêté à un checkpoint de l’armée le 13 mars 2005, alors qu’il se rendait avec des amis à Ramallah, avant d’être libéré près de sept ans plus tard, en compagnie de 550 autres prisonniers palestiniens, dans le cadre de l’échange avec le soldat franco-israélien Gilad Shalit. Son crime ? Avoir participé à un complot en vue d’assassiner le rabbin d’extrême droite Ovadia Yossef, selon le tribunal militaire qui se réunira plus de 20 fois pour tenter d’étayer son maigre dossier. Un film de Nadir Dendoune, L’affaire Salah Hamouri (en accès libre sur www.humanite.fr) a questionné le faible intérêt des médias pour le cas de ce franco-palestinien. Une interrogation d’autant plus légitime qu’à la même époque, le sort du soldat franco-israélien Gilad Shalit, capturé le 25 juin 2006, à la lisière de la bande de Gaza, par des combattants proches du Hamas, avait fait l’objet d’une intense campagne politique et médiatique pour sa libération. Assignés à résidence, forcés à l’exil… Des centaines de milliers de parcours sont similaires à celui que subit le militant. Les persécutions subies par Salah Hamouri, comme par l’ensemble des militants de la cause palestinienne, de plus en plus assimilés par la grossière propagande de Tel-Aviv à des émules de l’« État islamique », illustrent la montée en puissance de ce fanatisme religieux dans les rangs de l’armée israélienne et l’infusion de ses idées au sein d’une population rétive à toute concession faite au camp de la paix. Lors de sa première incarcération, Salah Hamouri avait bénéficié d’une mobilisation sans faille de son comité de soutien, tandis que les autorités françaises se contentaient d’un service minimum. Le 28 août dernier, le PCF rappelait
« le président Emmanuel Macron et le ministre Jean-Yves Le Drian, qui sont restés silencieux depuis l’arrestation de Salah Hamouri », à leur « devoir d’intervenir fermement auprès de leurs homologues israéliens pour que notre concitoyen soit immédiatement relâché sans condition ». Après un premier rassemblement devant le ministère des Affaires étrangères, jeudi soir, à Paris, d’autres se sont tenus, notamment à Martigues (Bouchedu-Rhône) et à Mitry-Mory (Seineet-Marne). Une délégation a été reçue au ministère des Affaires étrangères, mais, visiblement les autorités françaises refusent de prendre la mesure de ce qui se passe : un citoyen français est placé en détention administrative sur la base d’un dossier secret, donc illégalement au regard du droit international. Un diplomate israélien a par ailleurs pris la peine d’écrire officiellement, le 30 août, à des députés français pour leur donner la version de Tel Aviv sur l’emprisonnement du jeune Francopalestinien. Une lettre bourrée de fausses informations et de reprises de faits contredits par la justice française elle-même en son temps (lire dans l’humanité du 2 septembre). Visiblement la mobilisation pour la libération de Salah Hamouri gêne Tel Aviv. « La détention administrative est une des armes utilisées par le pouvoir israélien pour maintenir en prison des Palestiniens sans avoir à justifier ne serait-ce que d’un prétexte, rappelle un communiqué de l’AFPS le 29 août. Le “dossier secret” demeure inconnu de l’accusé et de ses défenseurs. Renouvelable de 6 mois en 6 mois à l’infini elle peut maintenir un opposant indéfiniment en prison sans qu’aucune charge ne lui soit signifiée. Ainsi des dizaines de prisonniers politiques palestiniens ont passé plusieurs années en prison sans connaitre les motifs de leur détention ». L’association appelle nos concitoyens à continuer d’agir fermement, rapidement et sans relâche !
PÉTITION Pour exiger la libération de Salah Hamouri, signez la pétition sur : liberezsalahhamouri.wesign.it/fr et www.change.org/p/emmanuelmacron-demand-the-immediate-release-of-human-rightsdefender-salah-hamouri
6 • Les Nouvelles 7 septembre 2017
Malgré les sanctions, Pyongyang a procédé à un nouvel essai nucléaire. Le refroidissement des relations sino-coréennes pourrait pousser la Russie à jouer un rôle plus important dans la crise. Pyongyang reste en quête de reconnaissance et les derniers développements prouvent que les dirigeants nord-coréens feront tout pour y parvenir. Sur le plan de la dissuasion d’abord, avec le succès revendiqué, le 3 septembre, d’un sixième essai nucléaire. Après les tirs de missiles balistiques qui ont ponctué l’été, la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord) affirmait avoir mis au point une bombe H (à hydrogène, ou thermonucléaire) pouvant être installée sur le nouvel engin intercontinental. (…). Ce sixième essai marque un nouveau pas dans le programme nord-coréen. La puissance de la secousse détectée était de cinq à six fois supérieure à celle du dernier essai de 10 kilotonnes, daté de septembre 2016. Selon le Centre chinois de surveillance sismologique, un séisme d’une magnitude 4,6 a secoué le nord de la péninsule. Cette bombe, « d’une puissance sans précédent », devrait permettre au pays « d’atteindre le but final, qui est de parachever la force nucléaire de l’État », a expliqué Ri Chun-hee, la présentatrice septuagénaire de la télévision publique. Dans une déclaration sibylline, le président Trump s’est contenté de sous-entendre que seule une solution militaire trouverait grâce à ses yeux : « Le discours d’apaisement avec la Corée du Nord ne fonctionnera pas, ils ne comprennent qu’une chose. » Le perfectionnement de l’arme nucléaire ne serait désormais qu’une question de mois, même si la capacité nord-coréenne à miniaturiser une tête nucléaire pour la monter sur un missile et permettre à ce dernier d’entrer dans l’atmosphère est difficile à évaluer. Il y a un an, la Corée du Nord demandait aux États-Unis à être accueillie dans le club des puissances nucléaires. Et donc d’être traitée comme telle. Le président sud-coréen est favorable à la reconnaissance implicite du statut
de puissance nucléaire à son voisin, afin de mettre fin à l’escalade et de reprendre les pourparlers. En combattant Pékin de manière détournée, Washington a empêché toute solution
Mais Pyongyang n’a jamais voulu des négociations multilatérales et des discussions à six (États-Unis, Corée du Nord, Corée du Sud, Chine, Japon et Russie). Le dirigeant nordcoréen, Kim Jong-un, souhaite avant tout parler d’égal à égal avec Donald Trump. L’inefficacité flagrante des sept trains de sanctions oblige à un changement de méthode. De plus, la menace de tirs d’avertissement à proximité de l’île de Guam, un territoire américain dans l’océan Pacifique, et le survol, la semaine dernière, d’un missile de portée intermédiaire au-dessus du Japon prouvent que la Corée du Nord a la maîtrise de l’agenda. On peut d’ailleurs douter de son intention réelle de viser Guam. Sauf à mener isolément les opérations, et à s’aliéner son opinion publique, le Japon de Shinzo Abe n’a d’autre choix, pour l’heure, que de retourner à la table des négociations. D’autant que les multiples revirements stratégiques de Washington pourraient au final pousser Séoul et Tokyo à régler seuls le problème, comme l’avait déjà suggéré Donald Trump lors de la campagne électorale. Malgré l’escalade militaire, le président américain a luimême été contraint de faire machine arrière, ayant fait la démonstration de son impréparation. Oublié pour un temps, donc, la promesse « du feu et de la fureur », même si, jeudi 31 septembre, deux bombardiers stratégiques B-1B et quatre chasseurs furtifs F-35B américains, conjointement avec des appareils sud-coréens, ont été déployés afin de maintenir la pression sur Pyongyang. Le secrétaire à la Défense, James Mattis, et le secrétaire d’État, Rex Tillerson, ont donné un premier signe dans le Wall Street Journal, en assurant que les États-Unis « ne visaient pas » un renversement de régime à Pyongyang ou la réunification de la péninsule par une intervention armée. (…)
L’instrumentalisation de la menace nord-coréenne comme moyen de mener une guerre commerciale à la Chine a également fait preuve de ses limites. En combattant Pékin de manière détournée, Washington a empêché toute solution. D’autant que la capacité de la Chine à peser sur la Corée du Nord est surestimée. Il est donc urgent de sortir de ce têteà-tête sino-américain. (…) Ici réapparaît le protagoniste russe, qui entend jouer un rôle plus important dans le dossier. Mercredi 30 août, Rex Tillerson a joint son homologue Sergueï Lavrov. Alors qu’on évoque un futur embargo sur le pétrole, Moscou affirme qu’un renforcement des sanctions contre la Corée du Nord serait « contreproductif et dangereux ». À l’issue de leur entretien, un communiqué du ministère russe des Affaires étrangères informe que « Sergueï Lavrov a de nouveau souligné qu’il n’y avait d’autre solution possible que des moyens politiques et diplomatiques pour réduire les tensions dans la péninsule coréenne. Il a estimé indispensable de s’abstenir de toute démarche militaire qui risquerait de déboucher sur des conséquences imprévisibles ». À la suite du tir nord-coréen du missile balistique intercontinental du 4 juillet, la Russie avait ainsi bloqué une déclaration du Conseil de sécurité appelant à prendre « des mesures significatives » contre Pyongyang. D’une part, la délégation russe estimait qu’il s’agissait seulement d’un missile de moyenne portée, incapable d’atteindre l’Alaska, conformément aux premières analyses américaines, d’autre part elle a développé de nouveaux réseaux économiques avec la RDPC, actant qu’un accord sur le nucléaire passera inévitablement par des échanges dans les domaines commercial, technologique ou humanitaire. L’adoption de sanctions inédites par la Chine et l’interdiction de l’exportation du charbon nordcoréen pourraient aider la Russie à jouer le rôle auquel elle aspire. (…)
Lina Sankari, l’Humanité du 4/09/2017
PCF RENTRÉE DES COMMUNISTES
AG DE RENTRÉE
Audacieux, ambitieux et déterminés
Les communistes bordelais sur le pont
Sébastien Laborde a rappelé les mauvais coups de l’été et l’invitation de Pierre Laurent lors de l’Université du PCF à une rentrée « à la hauteur des attaques du gouvernement, audacieuse, ambitieuse, déterminée pour affronter la politique de Macron ». « L’essence même du combat communiste nous impose de résister, mais notre raison d’être est de changer la société, et opposer des mesures de progrès qui visent le dépassement du capitalisme, la construction d’une société débarrassée de toutes les dominations, à commencer par celle du patronat et de la finance mondialisée ». Nous voulons « réussir le 12 septembre
pour construire un mouvement d’ampleur qui rassemblera le monde du travail et la jeunesse » a-t-il ajouté, « et faire vivre lors de la fête de l’Humanité les convergences entre les forces de transformation sociale ». Enfin, début octobre, « une nouvelle initiative fruits et légumes aura lieu sur la métropole, avec des producteurs, particulièrement en direction des quartiers populaires ». Evoquant la préparation du congrès extraordinaire courant 2018, Sébastien Laborde insistait sur la nécessité de « nous réinventer », « réinventer un outil pour les luttes », et « dire ce que nous voulons être ensemble, un Parti communiste du XXIe siècle tant il y a besoin de travailler l’idée du commun et donc du communisme ».
Nous voulons « être le Parti de l’éducation populaire, de la rencontre entre le monde des idées, de la recherche et le monde du travail » car « la révolution technologique et informationnelle - confisquée par les capitalistes - ouvre un nouvel âge possible de la société humaine, de l’humanité, du rapport au travail, aux savoirs, aux pouvoirs ». Nous voulons « être le Parti de la solidarité qui est au cœur de notre projet politique pour la France et l’Europe ». Nous voulons « être le Parti de la paix, du désarmement et de l’amitié entre les peuples ». Le secrétaire départemental appelait à « redoubler d’efforts pour exiger la liberation de Salah Hamouri, de Marwan Barghouti et tous les prisonniers politiques palestiniens, et la reconnaissance de l’Etat palestinien ». Après un bref état des lieux financier de la Fédération, qui sera approfondi lors de la prochaine commission «Transparence», Sébastien Laborde informait que le chantier de la fête allait s’ouvrir dès octobre « pour réinventer notre fête fédérale, lui redonner tout son sens d’éducation populaire, culturel et festif, (…) à réinventer pour que cet événement s’inscrive dans la durée ». Concluant : « Tous ces défis et questions sont devant nous. Nous ne pourrons y répondre que collectivement, dans le débat, la prise d’initiative et le respect et la fraternité. »
FÊTE DE LA RURALITÉ
Résister, faire vivre de nouveaux droits
Un échange animé par Julien Ruiz, secrétaire de la section Haute Lande, ainsi que Frédéric Rauch, dirigeant national du PCF, Christine Texier, responsable de la Vie du Parti en Gironde, et Loïc Notais, militant communiste et dirigeant syndical.
Cette nouvelle édition, accueillie chez Raymond Lagardère le 2 septembre, a rassemblé une quarantaine de « débatteurs » autour de la riposte à la loi travail. Puis une centaine de convives ont poursuivi à table des discussions très animées. Introduisant le débat, Frédéric Rauch appuie d’emblée l’idée que s’il faut résister aux attaques contre le monde du travail, le coeur de la bataille politique réside dans l’analyse de la transformation du travail et le développement d’alternatives progressistes. Soulignant la crise du capitalisme, en - relative - baisse de profits, il décrypte les ordonnances Macron visant à faire disparaître les syndicats afin d’asseoir une domination patronale sans partage. Il indique que les couches moyennes de salariés sont les plus touchées par les suppressions d’emplois liées aux nouvelles technologies. Or ces catégories ont besoin d’être mieux
formées et d’accéder à de nouveaux métiers. Il s’agit donc de construire la société libérée à laquelle tous aspirent, et d’explorer de nouvelles voies, de nouveaux droits. Résister, collectivement, et surtout imaginer un autre rapport au travail. Il évoque les propositions du PCF de sécurisation de l’emploi et de la formation tout au long de la vie, à faire connaître et mettre en débat. La CGT pour sa part développe un concept du même type. Loïc Notais, à l’origine de l’organisation à la CGT des coursiers à vélo de Deliveroo, apporte son expérience sur cette forme d’uberisation. Ces jeunes, souvent étudiants au départ, puis devenus autoentrepreneurs, ont vraiment cru se libérer. (cf dossier Nouvelles n° 2217). Le syndicaliste décrit leur désenchantement, leur prise de conscience et alerte sur les dangers qui pèsent sur les services publics qui tentent d’initier ces nouvelles formes d’exploitation, par exemple La Poste sur les livraisons de petits colis (Stuart). Une interve-
nante soulignera ce danger dans les campagnes avec la disparition des services publics de proximité. Christine Texier pose la question « que faire ? » et surtout « comment ? » face aux attaques tous azimuts sur le monde du travail qui s’ajoutent à celles sur les politiques publiques (école, communes, collectivités…). Réussir les mobilisations du 12 septembre nécessite de s’adresser largement aux victimes de cette politique, les salariés des entreprises, bien sûr, mais aussi l’ensemble de ceux qui ont voulu faire gagner un autre projet société, en particulier lors des dernières échéances électorales… Elle invite à diffuser le 4 pages des parlementaires communistes sur la loi travail et invite à soutenir la fête de l’Humanité. Julien Ruiz conclut provisoirement sur la nécessité d’inventer ensemble de nouveaux droits et invite les participants à se mobiliser le 12 septembre, moment « étape » de cette rentrée sociale et politique.
Raymond Lagardère a appelé à “réinventer” cette fête de la ruralité pour lui redonner une dynamique qui tend à s’essouffler, à partir des nouvelles réalités de ce territoire. Un souhait partagé par Julien Ruiz, évoquant une nouvelle population “rurbaine”, afin de prendre en compte leurs aspirations et les conjuguer avec la riche histoire de cette lande.
Ce jeudi soir, 31 août, tout le monde n’est pas encore vraiment rentré de vacances, que ce soit physiquement ou dans les têtes. Pourtant, la trentaine de participants a plaisir à se retrouver pour une remise en route politique. Au menu : • L’actualité caractérisée par la marche forcée imposée par le pouvoir macronien vers plus de dérégulation du monde du travail, plus de pression fiscale sur la population, moins de moyens pour les collectivités, moins d’aides pour les étudiants, suppression des emplois aidés… • Le processus de réflexion sur les évolutions nécessaires de notre parti après la séquence électorale effrénée connue depuis un an et le résultat décevant aux législatives malgré un nombre accru de députés. La rentrée s’annonce donc particulièrement combattive. Les communistes bordelais vont se mobiliser pour apporter leur pierre à la réussite de la journée de mobilisation du 12 septembre en se présentant sur les marchés, devant les postes, les portes des entreprises. Un mot d’ordre : prenez vos affaires en main. Deux sujets typiquement bordelais s’invitent à ce plan de travail : la lutte des coursiers à vélo et le stationnement payant pour les résidents. Côté préparation du congrès extraordinaire de 2018, trois réunions de travail thématiques ont été programmées courant septembre afin d’offrir un maximum de temps de parole aux militants. Elles sont ouvertes aux sympathisants dont le regard sur notre parti ne peut qu’être plein d’enseignements. L’autre rendez-vous de cette rentrée est la Fête de l’Huma à laquelle 15 à 20 communistes bordelais prêteront leur concours. L’Assemblée Générale ne pouvait pas se clore sans avoir évoqué l’emprisonnement de Salah Hamouri pour un appel à sa libération. J.J.B.
SAMEDI 30 SEPTEMBRE
Fête des Communistes du Bassin d’Arcachon Comme tous les ans, la section PCF du Bassin d’Arcachon organise sa fête militante. Elle se déroulera le samedi 30 septembre sur le terrain de son siège, avenue de la Libération (en face du marché couvert). Plusieurs associations participeront à ce rendez-vous fraternel : Le Secours Populaire – l’APEIS – Le Mouvement de la Paix – France Palestine – les jeunes communistes de la Gironde Programme de la journée : - à partir de 10h30, les responsables des associations parleront de leur activité. - à midi, un repas vous sera servi. - Vers 17h un débat sera organisé sur le thème : La France a-t-elle besoin d’un Parti communiste ? Pour se faire inscrire, avant le 23 septembre, quelques numéros ou adresses mail : Danielle Trannoy : 06 08 84 11 85 - danielle.trannoy@orange.fr Christian Darriet : 06 03 36 36 53 - christian.darriet@free.fr Pierre Cléaz 06 07 97 40 52 - pierre-louis.cleaz33@orange.fr Préciser le nombre de participants et le choix du menu.
MATÉRIEL
Le flyer contre la loi travail XXL, et la carte pétition à destination de E. Macron sont disponible à la fédération du PCF 33 LOI TRAVAIL
UTÉS 100 % DES DÉP ET FRONT
S COMMUNISTE C’EST T AUX CÔTÉS GAUCHE SON TOUJOURS DE SALARIÉ-E-S ! DES NON ! MOBILISONS-NOUS POUR FAIRE OBSTACLE AUX ORDONNANCES
MANIFESTATION BORDEAUX MARDI 12 SEPTEMBRE À 11H PLACE DE LA RÉPUBLIQUE
Tout versement par chèque ouvre droit à une réduction fiscale de 66% du montant versé. (chèque à l’ordre de ADF PCF 33). Les ressources financières du Parti communiste sont transparentes. Votre don, aussi modeste soit-il, contribuera effica- cement à la démocratie, à l’expression et la prise d’initiative du Parti communiste. Cet ensemble sont les éléments majeurs pour continuer notre combat dans l’ambition d’une gauche forte et alternative. La fédération de la Gironde du PCF, lance une souscription afin de mener nos prochaines échéances politiques, notre objectif est de 70 000 euros.
Les Nouvelles 7 septembre 2017 • 7
CULTURE À LA FÊTE DE L’HUMA
NOUVELLES IDÉES REÇUES
EXPOSITIONS
Sept propositions pour que votre œil en voie de toutes les couleurs
Vendredi à 13 h 30, « l’Humanité, figures du peuple. Plongée inédite dans les archives photographiques du journal de Jean Jaurès » avec Danielle Tartakowsky, Gérard Mordillat et de Maxime Courban.
La Fête de l’Humanité, c’est aussi un foisonnement d’expositions. La Halle Léo-Ferré en est l’épicentre. « Changez le climat dans votre assiette » évoquera la rencontre entre un cuisinier, un photographe et une journaliste en quête d’éthique et de qualité. La FSGT
propose le travail de la photographe Adeline Monnier autour du thème de l’escalade, qui sera au cœur de l’Espace sports. L’association Zebrock, qui programme la scène musicale éponyme, expose en grand « Reflex », ou le travail des photographes en
herbe conviés à suivre les aventures de l’association. La chaîne culturelle Arte voit les choses en grand cette année avec un hommage à la « French Touch », l’école française d’animation, désormais de renommée mondiale. L’Institut national de l’audiovisuel a puisé dans son fonds les témoignages de grands artistes passés à la Fête. La photographie et l’Humanité, justement, ont partie liée. Avec « l’Humanité reporter », le service iconographique du journal invite à découvrir le regard de Yann Renoult sur les raffineries de pétrole artisanales au nord de la Syrie. L’Agora de l’Humanité accueillera pour sa part « Moments de passion politique » ou les grandes dates politiques et de mouvements sociaux vus à travers le journal l’Humanité depuis 1907.
ARTS VIVANTS
Théâtre et stand-up s’invitent à la Fête ! Pour la deuxième année consécutive, la Scène arts vivants se met à l’œuvre pour vous montrer diverses pièces de théâtre et stand-up. Le spectacle d’Odah et Dako et le Nouveau Spectacle de Pierre-Emmanuel Barré (humoriste et ancien chroniqueur à France Inter, il démissionne en avril dernier à la suite de la censure d’une de ses chroniques défendant le point de vue des abstentionnistes lors des élections présidentielles) sont à l’honneur
pour cette nouvelle édition de la Fête de l’Humanité. De quoi faire rire et ravir les spectateurs. Le Maniement des larmes – troisième volet de la trilogie l’A-démocratie –, de la compagnie Un pas de côté, et la Violence des riches, de la compagnie Vaguement compétitifs, ouvriront le bal de ce riche et attrayant week-end. À cela s’ajoutent, le samedi, la pièce de la compagnie Amin Théâtre, Mirad un garçon de Bosnie #1, ainsi que la pièce Rappel à l’ordre,
du collectif Manifeste rien. Le même jour, les spectateurs auront l’occasion d’assister à 18h à la Messe des Sœurs de la Perpétuelle Indulgence, qui sera suivie d’un temps d’échange avec le public. Enfin, pour couronner le tout, ce long week-end estival s’achèvera avec des improvisations théâtrales, organisées par la Ligue d’improvisation française, et avec le Rendez-Vous du 18 mars, des Amis et amies de la Commune de Paris.
HALLE LÉO-FERRÉ
Des livres, des auteurs et du ciné Découvertes et rencontres avec les auteurs au village du livre Rencontrer les auteurs qu’on trouve plaisir à lire toute l’année dans les colonnes de l’Humanité. Repartir après le plaisir de l’échange, avec son livre dédicacé sous le bras : chaque année, des milliers de visiteurs de la Fête de l’Humanité viennent se presser dans les 1 700 m2 du Village du livre, dans la Halle Léo-Ferré. C’est la librairie Renaissance, créée à Toulouse par des résistants communistes en 1944, qui se charge depuis quelques années maintenant d’organiser la partie librairie du Village du livre. Cette année encore, l’Humanité invite 200 auteurs. Parmi eux, on retrouvera des noms célèbres, et d’autres qui aspirent à se faire connaître, toutes
CHRONIQUE
disciplines confondues : romanciers, essayistes, auteurs de littérature jeunesse ou de bande dessinée. Le cinéma dans tous ses états Après avoir séduit le jury du Grand Prix du Festival de Cannes, 120 Battements par minute va émouvoir le public de la Halle Léo-Ferré. Coloré, rythmé, intime, ce film réalisé par Robin Campillo se souvient des années 1990, lorsque parler du virus du sida n’allait pas de soi. Robin Campillo dépeint avec justesse la ferveur militante du collectif Act Up Paris, dont il a fait partie dès 1992. Il offre un témoignage des débats, de l’énergie, des voix qui exprimaient cette quête de reconnaissance. La tournée de Satire dans la campagne,
Les Nouvelles de Bordeaux et du Sud-Ouest S.A.S. au capital de 37 000 euros Associés (à parts égales) : L. Chollon, F. Mellier, S. Laborde Directeur de la publication : Frédéric Mellier Abonnement 1 an : 25 euros. Abonnement de soutien : 40 euros Rédaction, composition, impression : S.A.S. Les Nouvelles de Bordeaux et du Sud-Ouest 15, rue Furtado - 33800 BORDEAUX Tél. 05 56 91 45 06 - Fax 05 56 92 61 01 - Annonces légales : annonces@nbso.fr Comptabilité : compta@nbso.fr - Redaction/Proposition d’article : redaction@nbso.fr @nvlbx Les nouvelles de bordeaux nbso.fr Commission paritaire de presse : 0118 C 85932
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un film de Marc Large et Max Carsel, s’arrêtera aussi à la fête de l’Huma. En faisant parler des dessinateurs, des humoristes, des chroniqueurs, ce film qui était présenté il y a peu par Marc Large, Urbs et Soulcié au ciné l’Utopia de Bordeaux, interroge le rôle de la satire dans notre société à travers la dernière campagne électorale. Ça part dans tous les sens, c’est un peu douloureux parfois. La satire, bouffée d’oxygène salvatrice ou soupape d’évacuation qui sert le système ? Ceux qui s’expriment dans ce documentaire n’ont visiblement pas l’intention de servir le système alors poser la question, c’est déjà y répondre. On (re)découvrira également avec plaisir La Sociale, de Gilles Perret. Un documentaire engagé, historique et authentique. On y parle de la naissance de la Sécurité sociale. Ce rêve humaniste, né il y a soixante-dix ans, porté par le mouvement ouvrier et bâti par l’un de ses pères, Ambroise Croizat. Focus sur le 93 qui célèbre trois productions cinématographiques réalisées et jouées par des talents locaux : À voix haute, de Stéphane de Freitas ; Patients, film coréalisé par Mehdi Idir et Grand Corps Malade ; l’Ascension de Ludovic Bernard. De quoi fêter ensemble le meilleur du cinéma.
par Gérard Loustalet Sens
Du racisme social à l’indignité politique Ainsi, selon le président Macron, le monde se divise en deux catégories : « ceux qui réussissent » et « ceux qui ne sont rien ». On a rarement poussé aussi loin, dans les sphères du pouvoir, le mépris de classe. Et avec autant d’arrogance et de naturel. Ce mépris est une des formes du racisme social : celui-ci est constitutif de tout système de domination et d’exploitation. Il est inhérent au pouvoir de la bourgeoisie. Chez Sarkozy, le mépris de classe était surjoué, il lui fallait afficher les goûts dispendieux des riches, se démarquant ainsi du commun, comme sauf-conduit pour accéder à cette caste de la grande bourgeoisie qui ne l’a jamais considéré autrement que comme un parvenu assez vulgaire mais bien utile jusqu’à ce qu’il soit jugé trop encombrant. C’est en janvier 2015, à un dîner de l’AFEP (Association française des Entreprises privées, discret lobby de la centaine de patrons les plus importants et les plus influents et bien plus déterminante que le MEDEF) que le lâchage s’effectue : Sarkozy n’est décidément pas de leur monde, il n’a pas fait les bonnes études… Les patrons ont vite compris tout le parti à tirer de la duplicité pateline de Hollande, le pacte de responsabilité les allèche, la loi Macron (déjà) les convainc. Chez Hollande, le mépris de classe, comme tout le personnage, se fait cauteleux et même un peu honteux mais bien réel. Il jure ne pas avoir moqué les « sans-dents », mais cela ne s’invente pas : c’est bien dans son style. Ostensible et utilitaire chez Sarkozy, le racisme social se fait blagueur chez Hollande. Il devient spontané et libéré chez Macron : c’est celui de cette pseudo-sociologie rudimentaire de garden-party où d’élégant(e)s invité(e)s pérorent, entre deux louches de caviar, tout gonflé(e)s d’autosatisfaction, sur l’abîme qui sépare l’élite « qui a réussi » -eux- de la plèbe « qui n’est rien » et qu’ils (elles) se représentent comme une masse pitoyable et soumise tant qu’elle est préservée des agitateurs bolchevico-staliniens de la CGT… Mais si, ma chère, ça existe toujours… Heureusement qu’il y a des syndicats « raisonnables » qui « ne croient pas », eux, à cette horrible lutte des classes… Quant au prétendu philosophe de l’Elysée, il devrait savoir que jamais personne n’est rien. Peut- être connaît-il Montaigne pour qui « chaque homme porte en soi la forme entière de l’humaine condition », cela ne l’immunise pas, contre un racisme de classe où l’alcoolisme et l’illettrisme qu’il prête aux classes populaires seraient la cause de leur hostilité aux « réformes ». Macron n’hésite pas à insulter ce peuple archaïque qui décidément ne comprend rien aux joies de la « destruction créatrice»! C’est la dernière faribole pêchée chez la nouvelle coqueluche de l’orthodoxie économique, un nommé Schumpeter (1883-1950) : votre emploi est supprimé, vous êtes licencié… Réjouissez-vous, cela va permettre, d’en créer un autre ailleurs… Si,si… En attendant, débrouillez- vous, dans la société libérale vous n’êtes rien et votre survie n’est qu’une affaire individuelle. Le racisme social est le fondement idéologique d’un escamotage politique de plus en plus radical des classes populaires. On le sait, la démocratie libérale et bourgeoise a été conçue sur la défiance à l’égard du peuple et aménagée pour l’écarter du pouvoir. Or, de longue date, de bons esprits ont notifié la disparition de la classe ouvrière et voilà que les mêmes, qui ne sont pas à une contradiction près, la font resurgir pour la stigmatiser en l’accablant du vote Front national. C’est une véritable entreprise de délégitimation politique véhiculant l’image de « prolos racistes et bornés», comme le remarque le sociologue Gérard Mauger. La social-démocratie, avec en particulier son think tank Terra Nova, s’est empressée de théoriser le rejet politique de classes populaires que de toute façon elle avait déjà perdues. Le cliché, complaisamment repris par les médias, du FN premier parti ouvrier est évidemment un faux grossier : 1 ouvrier sur 7 vote FN selon Gérard Mauger ; c’est proportionnellement moins que d’autres catégories sociales, artisans et commerçants, petits et moyens patrons, etc. Et il y a toujours eu des ouvriers pour voter à droite. Il s’agit bien d’une opération politicoidéologique visant à forger l’indignité politique des classes populaires. Socialement méprisées, économiquement exploitées, politiquement stigmatisées, elles doivent devenir invisibles et inaudibles. La loi travail fait partie de cette opération. Le peuple ne serait plus ainsi une cause à défendre mais un problème à résoudre !