Nouvelles N° 2205

Page 1

Jeudi 2 mai 2019 - N° 2305 - Hebdomadaire - 15, rue Furtado - 33800 BORDEAUX - Prix : 0,80 euro

JUSTICE SOCIALE, HARMONISATION SOCIALE, SERVICES PUBLICS…

Ian Brossat : « Il faut rompre avec les traités européens » P.4-5

T 11 E I A M 12 1 20 9

10€ -12 ANS GRATUIT

GIRO

NDE

VILLENAVE D’ORNON COURRÉJEAN

ADRESSE ET TRANSPORT : 8 chemin de la caminasse, 33140 Villenave-d’Ornon Rocade sortie 20, parking sur place BUS 11 et 15 ARRÊT : MARÉCHAL FOCH (Villenave-d’Ornon)


ACTUALITÉ BORDEAUX, SAMEDI 11 MAI

CONDITIONS DE VIE DES ENFANTS DE FAMILLES MIGRANTES

Marche pour l’égalité et contre l’esclavage

Le coup de gueule des enseignants de l’école F. Buisson à Bègles

Le 11 mai 2019 à 11h, au lendemain de la journée nationale de commémoration de l’abolition de l’esclavage en France, l’association Mémoires et Partages organise une Grande Marche contre l’Esclavage à Bordeaux. La misère, la guerre, la destruction de l’environnement et les dictatures continuent de pousser des milliers de personnes sur les routes de l’exil et de la déportation. Le cauchemar de la perpétuation de l’esclavage, malgré son abolition formelle, est une honte pour les États du monde entier. C’est pourquoi, il y a urgence à dépasser la liberté formelle pour exiger l’égalité. C’est la condition pour mettre fin au crime contre l’Humanité qu’est l’esclavage, pour protéger les victimes, pour dénoncer et réprimer les réseaux de passeurs qui prospèrent de ce trafic. Notre responsabilité morale et politique est engagée. C’est pourquoi nous devons nous mobiliser, en France et partout dans le monde, ce 11 mai 2019. Départ de la marche : samedi 11 mai à 11h, place de la Victoire à Bordeaux memoires.partages@gmail.com www.memoiresetpartages.com

9 MAI

Toute la fonction publique dans la rue CFTC, CFE-CGC, CGT, FAFP, FSU, Solidaires et UNSA, ont lancé en mars un appel commun pour faire du 9 mai une journée de grève dans la fonction publique. Un appel rejoint par la fédération Force ouvrière de la fonction publique et CFDT-Fonctions publiques en avril. Ainsi, le gouvernement a réussi à faire l’unanimité des organisations syndicales contre lui. Risque supplémentaire pour l’exécutif, en plus de la contestation de la réforme de la fonction publique, les professeurs des écoles sont déjà fortement mobilisés contre la loi Blanquer. Une contestation qui pourrait se transformer en grèves reconductibles au retour, pour toutes les zones, des vacances de Pâques.

SECOURS POPULAIRE FRANÇAIS

« Merci Julien »

Julien Lauprêtre, lors de sa venue pour l’inauguration de l’antenne de Saint-Pierred’Aurillac en mars 2016.

Le président du Secours populaire, Julien Lauprêtre, est décédé vendredi dernier à l’âge de 93 ans, dans un hôpital parisien des suites d’une chute pour laquelle il avait été hospitalisé. Les membres de l’association et de ses nombreux partenaires à travers le monde ont perdu un ami qui a, toute sa vie, « refusé l’inacceptable, la pauvreté, l’injustice ». « C’est vrai qu’il n’était pas un Président ordinaire. Sa porte et son écoute étaient ouvertes à tous, sans distinction, à n’importe quel moment de la journée. Une humanité, une simplicité et une sincérité qui allaient droit au cœur des 80 000 bénévoles de l’Association, a déclaré le SPF. Toute sa vie a été orientée vers les autres. Il a fait de la solidarité son combat quotidien, et du Secours populaire, un grand mouvement de solidarité populaire. Dès son arrivée en 1954, Julien et un petit groupe d’hommes et de femmes vont faire du Secours populaire, l’une des plus importantes associations de solidarité de notre pays. Très vite, il a compris que l’association avait tout à gagner à se recentrer sur son rôle d’association de solidarité plutôt que d’intervenir sur le champ politique. Il en a fait une association rassemblant toutes les bonnes volontés pour que se développe une solidarité populaire indépendante des pouvoirs établis, qu’ils soient publics ou privés, philosophiques, confessionnels, politiques ou syndicaux. » « Avec une ténacité incroyable, Julien a fait front pour ne pas laisser la désespérance prospérer. Il a sillonné le monde, fait le tour de notre pays pour mobiliser les bénévoles à agir sans relâche pour les personnes dans la précarité, et sensibilisé les dirigeants à la lutte contre la pauvreté en France, en Europe et dans le Monde. Il avait aussi à cœur d’offrir aux enfants l’opportunité de prendre la parole, d’agir, de s’organiser. C’est ainsi qu’est né en 1992 le mouvement d’enfants bénévoles au Secours populaire, les “copains du Monde”. Il a consacré sa vie pour que celles et ceux qui n’ont rien, ou si peu, relèvent la tête et soient plus forts pour s’en sortir grâce à la solidarité, dans une démarche d’égal à égal entre celui et donne et celui qui reçoit. » Ce combat pour « faire triompher l’entraide et la solidarité », les membres du Secours populaire sont résolus à le poursuivre « pour et faire reculer la pauvreté et l’exclusion ». Vous pouvez lire la biographie de Julien Lauprêtre sur le site de l’association (https://www.secourspopulaire.fr/documents-de-reference). À lire aussi la déclaration de Fabien Roussel en page 7. Un registre de condoléances est disponible à la fédération du SPF, 95, quai de Paludate, 33800 Bordeaux, qui sera transmis au siège national. 2 • Les Nouvelles 2 mai 2019

Belle mobilisation le 14 avril au Rocher Palmer pour les États généraux des migrations où un enseignant de l’école Ferdinand Buisson témoignait, dans le cadre de la manifestation d’événements Bienvenue qui a permis de collecter 5 000 euros pour l’Aquarius.

Les enseignants de l’école Ferdinand Buisson à Bègles – qui accueille un certain nombre d’enfants de familles migrantes – ont poussé un coup de gueule dans une lettre ouverte adressée aux élus, aux institutions auxquels ils demandent de prendre leurs responsabilités, citant la Déclaration des droits de l’enfant. « Ils se prénomment Anastasia, Eljion, Elisha, Jona, Erdion, Haniel, entre autres. Ce sont nos élèves. Nous les côtoyons tous les jours dans nos classes. Nous les voyons tristes, malades, parfois même ils ont faim. Nous voyons leurs parents inquiets. Ces mêmes parents qui parfois osent se confier à nous, souvent en larmes. Ils viennent à l’école, tous les jours. Ils sont sérieux, tout comme leurs parents. La trêve hivernale étant finie depuis le 1er avril, de nombreuses familles de l’école sont concernées par des expulsions à venir, certaines sont déjà à la rue. (…) Nous les aidons à trouver un logement. Parfois nous parcourons Bègles ou les alentours à la recherche d’un squat. Nous faisons des collectes pour quelques nuits d’ hôtel. Nous leur trouvons des couvertures ou de la nourriture. Nous les hébergeons chez nous, avec nos propres familles, dans notre foyer. Nous leur permettons de prendre une douche à l’école. Nous sommes prêts à les accueillir jour et nuit dans l’école si besoin. Nous sommes en 2019, en France et nous sommes enseignants de l’Éducation nationale. Et nous sommes en colère. » Voici un extrait de la lettre à l’initiative de laquelle est Laurent Joubert, militant Resf et Sud-Éducation, enseignant dans cette école de Bègles qui accueille des enfants de familles migrantes, de Syrie, des Pays de l’Est (Bulgarie, Albanie, Roumanie), d’Afrique noire, et qui vivent dans la plus grande précarité, nous explique-t-il. La fin de la trêve hivernale et une famille qui, à nouveau expulsée, est hébergée par une enseignante, c’est la goutte d’eau qui fait déborder le vase. « Cette famille avait déjà été hébergée par une autre de mes collègues l’été dernier. Ça se répète d’année en année. Je me suis rendu

compte que des collègues prenaient des initiatives comme de permettre à des petits de se doucher dans l’école. Ça m’a beaucoup touché. J’ai donc proposé de faire une lettre ouverte. Notre coup de gueule c’est de dire qu’on fait le job à la place des institutions. On en a marre qu’on nous félicite de notre solidarité, c’est normal qu’on le fasse, c’est humain mais ce n’est pas à nous de le faire. On palie aux manquements des pouvoirs publics. Quand on dit que les familles se confient à nous en pleurs, on ne cherche pas à faire du Zola, c’est une réalité à laquelle nous sommes confrontés régulièrement. » Difficile en effet, de fermer les yeux sur cette réalité lorsqu’elle s’incarne par la présence d’un enfant. « Car chaque jour, quel que soit le temps, quelles que soient les conditions dans lesquelles elles ont passé la nuit, les familles amènent leurs enfants à l’école », explique l’enseignant. Le militant a le sentiment que pour les familles bulgares, albanaises, roumaines, en particulier, les mêmes situations se répètent d’année en année. « Les familles passent de squat en squat. Chacun se renvoie la balle sur la métropole en disant qu’il faut que ça se règle de manière communautaire mais rien de concret n’est fait. Il y a plusieurs années, c’était les Kurdes qui subissaient ça, même avec les menaces qui pesaient sur eux dans leur pays d’origine. On est capable dans ce pays de trouver un milliard d’euros pour réparer une église mais pas pour héberger des familles à la rue… » Laurent Joubert regrette également le « grand silence du rectorat » sur ces situations qui concernent pourtant des enfants scolarisés. Le militant participait aux États généraux des migrations, le 14 avril dans le cadre de Bienvenue, comme témoin des « faits inacceptables » qui font l’objet d’un cahier pour dénoncer à côté de celui des alternatives pour proposer (voir sur le site : egmigrations.org). « C’était très émouvant car ce sont des choses que je prends beaucoup à cœur. On s’en serait bien passé de devoir mobiliser tout ce réseau associatif mais sentir qu’il y a une vraie solidarité, une

vraie entraide et qu’on n’est pas seul, ça fait du bien. Mais si cette solidarité est normale, humaine, quid des institutions ? Est-ce qu’on n’a vraiment pas les moyens d’aider ces familles ? Moi, je crois que c’est un manque de volonté politique ». Du côté de la tour F…

La solidarité se poursuit aussi autour des familles qui occupent les logements en attente de rénovation dans la tour F de la cité Thorez. « Le soutien de la Mairie de Bègles et des différents services et acteurs sociaux concernés (MDSI, CCAS, associations de solidarité…), le soutien des élu-e-s locaux, départementaux et nationaux du territoire, des associations impliquées auprès des migrants, ont permis jusqu’ à maintenant de “stabiliser” la situation », explique Dominique Belougne qui avait mobilisé autour des menaces d’expulsion de ces familles albanaises. Pour lui, il s’agit aujourd’hui de trouver des solutions pérennes, « notamment en obtenant du gouvernement français qu’il reconnaisse la situation difficile du peuple Albanais, dont plus de 10% des ressortissants ont quitté leur pays pour des raisons multiples, et leur accorde un statut de réfugié. La municipalité de Bègles engage une démarche dans ce sens ». Le bailleur VILOGIA semble s’être, lui, engagé à laisser les familles tranquilles jusqu’à l’été et ne fermerait pas la porte à la possibilité de trouver une issue légale à leur situation mais les procédures d’expulsion restent actives. Un moment de partage, d’échange et de solidarité sera organisé le dimanche 19 Mai, de 10h à 17h, à Mussonville, dans la salle à l’entrée du parc. Y sont invités « tous les acteurs institutionnels ou associatifs, les citoyens, les habitants du quartier et de la Cité Maurice Thorez, toutes celles et ceux qui s’intéressent à la question des migrants et de leur accueil en Europe et en France ». Christelle Danglot


ACTUALITÉ

Editorial

POLITIQUE

Emmanuel Macron sort du grand débat par la petite porte Le président s’est enfin exprimé sur la crise des gilets jaunes, pour proposer des mesures ne déviant guère de son programme initial, confirmant des attaques sur les retraites, les allocations chômage ou le temps de travail. Pouvoir d’achat, retraites, démocratie, décentralisation, environnement, le chef de l’État était attendu sur de multiples dossiers. Le diagnostic, il l’a posé à travers des « portraits chinois ». Le chef de l’État fait mine de découvrir les retraites modestes, les familles monoparentales… Mais pas question de changer de cap, les « fondamentaux » des deux premières années du quinquennat doivent être « poursuivis et amplifiés », a-t-il dit, comme si, au fond depuis cinq mois, ce n’était qu’une impatience qui s’est manifestée. Revue de détail.

tive partagée (RIP), qui pourrait être organisable à partir de la signature d’un million de citoyens. « Je crois aux élus, à la légitimité de l’élection (…), sinon il n’y a plus de décision », a également insisté le président. Annonçant vouloir consolider la place des maires, malmenés par les gouvernements depuis des années, il a rappelé que l’exécutif souhaite mettre en place un « nouvel acte de décentralisation » en inscrivant le principe de différenciation territoriale dans la Constitution. Ce qui ouvrirait la porte à une rupture avec le principe d’égalité entre les citoyens. Macron a aussi dit ne pas vouloir du vote obligatoire et du vote blanc. Désirant réformer le Cese et l’ouvrir au tirage au sort, il souhaite aussi, c’était déjà connu, inclure une dose de proportionnelle de 20 % aux législatives, et diminuer le nombre de parlementaires de 30 %, ce qui renforcera de fait les pouvoirs de l’exécutif. La réforme de la Constitution reviendra cet été, a-t-il promis.

aisés et augmenter pour les plus aisés, avec l’ajout de nouvelles tranches… Sur la question de la fraude fiscale et des milliards qui échappent chaque année à l’impôt, le président a dit vouloir confier une mission à la Cour des comptes pour que le montant réel soit évalué.

Tout ça pour ça…

Service public : à moyens constants

C’est la colère nourrie par la suppression des services publics qu’Emmanuel Macron a tenté d’apaiser en promettant dans son « nouveau pacte territorial » que ceux-ci soient « accessibles à tous dans tous les territoires ». Comme les fuites de la semaine dernière l’avaient mentionné, le président de la République a confirmé : « aucune fermeture d’école et d’hôpital sans accord des maires ». Mais cela « ne veut pas dire qu’il n’y aura plus de réorganisation », a-t-il ajouté. Or, Pouvoir d’achat : il faudra comme dans le plan santé présenté compter avec une loupe par la ministre le mois dernier, des disparitions de services ne Pas l’ombre d’une augsont pas à exclure. Pour mentation du Smic, d’aill’école, il a été confirmé leurs la crise du pouvoir une extension du dispod’achat n’est pas liée aux sitif de dédoublement des salaires, aux yeux du préclasses aux grandes secsident. Contesté par de tions de maternelles et des nombreux retraités qui CP et CE1, qui sur tout ont en travers de la gorge le territoire ne devraient la hausse de la CSG, après « jamais dépasser 24 élèves ». avoir constitué un gros Laissant planer la crainte réservoir d’électeurs en des syndicats sur les consé2017, Emmanuel Maquences pour les autres cron confirme un geste niveaux. Parmi les nouet réindexe sur l’inflation veautés : une « maison des les retraites en dessous de services publics », baptisée 2 000 euros. Il y ajoute la « France Service », regroufin de la « sous-indexation » pant ceux assumés par de toutes les retraites en l’État, les collectivités et 2021. La prime exceptiondes opérateurs tel Pôle emnelle de 1 000 euros, déciploi. Le premier ministre dée fin décembre 2018 à doit d’ailleurs présenter un moment où le pouvoir une « réorganisation de comprend que le mounotre administration » avec vement des gilets jaunes plus de « fonctionnaires 2 500 manifestants manifestaient une nouvelle fois samedi 27 avril pour va durer, est pérennisée. l’acte 24 du mouvement des gilets jaunes, preuve s’il en fallait que les sur le terrain » qu’à Paris. La formule est pourtant annonces n’ont pas convaincu. Une façon sans doute de inégalitaire ; selon l’Ifop, justifier les suppressions de le montant moyen n’a été que de Impôts et fiscalité : postes qu’envisage l’hôte de l’Élysée, 450 euros, et la prime n’aurait été ver- un grand bonneteau mais dont il se dit prêt toutefois à sée qu’à trois salariés sur dix dans des revoir l’objectif de 120 000. entreprises privées et publiques. Un Une majorité de Français réclament dispositif permettant un prélèvement le retour de l’impôt de solidarité sur « directement par la CAF des pensions la fortune (ISF) ? Le président affirme Immigration : l’invitée surprise alimentaires lorsqu’elles ne sont pas que c’est son « devoir » de « défendre » la versées » a été confirmé et une prise en suppression de l’ISF. « La vraie justice Macron a conclu son discours sur la compte du statut des « proches aidants » fiscale, ce n’est pas la hausse des impôts question de l’immigration, la liant pour leur retraite annoncée. Si la d’un tel ou un tel mais de les baisser », à celle des élections européennes. À retraite par points comme la réforme lance-t-il. Pourtant la TVA ne baissera ses yeux, « Schengen ne marche plus ». de l’assurance-chômage ont bel et pas. « Je veux des baisses pour ceux qui Il appelle à une « Europe qui tient ses bien été confirmées, le président a travaillent en baissant significativement frontières », et a reproché aux États également évoqué un revenu universel l’impôt sur le revenu », propose-t-il, membres de ne pas tous le faire, en d’activité « pour tourner les prestations les évaluant à 5 milliards. Comment plus de ne pas tous accueillir les migrants, oubliant bien vite que la France sociales vers la reprise du travail ». financera-t-il cette baisse ? Par la elle-même n’est pas à la hauteur. suppression de niches fiscales, par la Quant au couplet sur la montée des « nécessité de travailler davantage » et Démocratie : communautarismes et de l’islam polise méfier du peuple par la « baisse de la dépense publique ». tique, la visée électoraliste à quelques Il faudra donc travailler plus, et bénéfisemaines du scrutin européen n’aura Au référendum d’initiative citoyenne cier de moins de services publics pour échappé à personne. (RIC) réclamé par les gilets jaunes voir les impôts sur le revenu baisser, depuis des mois, il préfère évoquer alors même que les gilets jaunes vouAvec L’Humanité du 26/04/2019 une réforme du référendum d’initia- laient le voir baisser pour les moins

Dans sa conférence de presse du 25 avril, Macron nous a joué la scène finale de sa comédie entamée depuis cinq mois, sur le changement qu’auraient opéré sur lui la crise sociale et les mobilisations des Gilets Jaunes, en proclamant simultanément que « désormais l’homme serait placé au cœur de son projet » mais… « Est-ce pour autant qu’il faudrait tout arrêter, tout ce qui a été fait depuis deux ans ? Je crois tout le contraire. » Là tout est dit ! Aucune remise en cause de sa politique antisociale et de ses réformes néolibérales que la majorité du pays rejette. L’amélioration du pouvoir d’achat, l’augmentation du SMIC et des salaires, la justice fiscale et le rétablissement de l’ISF, le développement des services publics, le besoin de démocratie, l’urgence climatique, toutes ces revendications et cette colère qui se sont exprimées depuis des mois dans la rue et dans les entreprises en luttes, ont été ignorées par le chef de l’État qui parle avec indécence « d’impatience » chez les Français-es dont les fins de mois sont difficiles en déclarant « on a fait des choses qui ne se voient pas tout de suite ». Les quelques miettes accordées, histoire de tenter de calmer la colère du peuple, n’ont pas convaincu plus de la moitié des Français-es (63 % selon un sondage Harris-Interactive) sur le changement de cap de la politique engagée par Macron. Il maintient sa volonté de baisse de la dépense publique, de s’attaquer aux allocations chômage, aux cotisations sociales, au temps de travail et aux retraites et demande aux Français-es de travailler plus et plus longtemps, s’ils veulent une retraite décente. Seule la construction d’un rapport de forces avec toutes les organisations progressistes sera aujourd’hui en capacité de mettre un terme à cette politique dédiée aux ultra-riches laissant sur le carreau la grande majorité du peuple de France. Les rassemblements à venir du 1er mai et du 9 mai contre la casse de services publics et de la fonction publique doivent être de puissantes mobilisations populaires du Tous Ensemble ! Et rappelons autour de nous que le 26 mai, voter pour la liste de Ian Brossat, c’est voter pour l’Europe des gens, pas l’Europe de l’argent, mais c’est aussi donner un carton rouge à Macron.

Maryse Montangon membre de l’exécutif départemental et national du PCF

Les Nouvelles 2 mai 2019 • 3


ÉLECTION EUROPÉ IAN BROSSAT :

Trois ruptures pour sauver l’Europe

Alors que l’élection européenne a lieu le 26 mai, entretien avec la tête de liste PCF, Ian Brossat. Ian Brossat, tête de liste communiste pour l’élection européenne qui aura lieu le 26 mai, sillonne la France depuis plusieurs mois. Mais c’est le débat à 12 sur France 2, le 4 avril, qui l’a fait connaître du grand public. Claires, précises, concrètes, ses interventions et ses propositions lors de cette soirée l’ont imposé dans le paysage politique. L’Humanité Dimanche a rencontré le candidat. Dans un entretien réalisé par Cédric Clérin, il propose de rompre avec les traités européens. Extraits. Ce qu’il retient de ses mois en campagne

« Ce qui me frappe le plus, c’est l’ampleur des mobilisations un peu partout dans notre pays sur l’enjeu des services publics. La question des maternités qui ferment, celles des hôpitaux, des bureaux de poste, des lignes de train qui disparaissent sont devenues un enjeu qui anime un nombre très important de nos concitoyens et qui permet de mesurer concrètement les conséquences des politiques d’austérité qui ont été appliquées depuis une vingtaine d’années dans notre pays. Et tout l’enjeu maintenant, c’est de faire le lien entre cette réalité vécue par des millions de gens et ces politiques d’austérité appliquées à l’échelle de l’Europe et de la France depuis trop longtemps ». « La première chose à rappeler, c’est que la règle des 3 % au maximum de déficit public qu’on nous a imposée depuis le traité de Maastricht conduit directement à la disparition des services utiles au quotidien. Moins de dépense publique, c’est moins de services publics. » Un combat de David contre Goliath ?

« (…) la réalité, c’est que toutes les dispositions prises à l’échelle de l’Europe passent par un vote majoritaire au Parlement européen. Le rapport de forces à l’intérieur même du Parlement européen est absolument décisif. » Pourquoi ne pas sortir de l’UE ?

« Évidemment, il faut respecter le vote des Britanniques. Mais leur difficulté à sortir de l’UE témoigne du fait que 4 • Les Nouvelles 2 mai 2019

les liens entre nos États sont si puissants qu’on n’en sort pas sans casse. Pour autant, il faut s’interroger sur les raisons qui font que les peuples d’Europe éprouvent de plus en plus de défiance vis-à-vis de l’Union européenne. Elle est devenue au fur et à mesure des années une gigantesque machine à produire de la régression sociale et à pourrir la vie des peuples. L’Union européenne ne pourra de toute façon pas continuer comme aujourd’hui. Soit elle change, soit elle mourra parce que le divorce entre les peuples de l’Union européenne sera tel qu’elle ne s’en remettra pas ». Pourquoi ne pas s’unir face à la montée de l’extrême droite ?

« Ce sont les politiques libérales imposées à coups de latte par nos dirigeants européens qui conduisent les peuples à se tourner vers les nationalistes ». « Il est temps de mener une opération vérité sur le vrai programme de l’extrême droite. Quand on regarde les positions défendues par Mme Le Pen en France, on s’aperçoit qu’elle est contre l’augmentation du Smic et qu’elle est contre l’augmentation de l’ISF. Quand on regarde les votes des députés du Rassemblement national au Parlement européen, on s’aperçoit qu’ils ont défendu la directive sur le secret des affaires qui protège les multinationales contre les investigations, notamment celles des journalistes qui enquêtent sur la fraude fiscale. Leurs amis autrichiens ont mis en œuvre la semaine de 60 heures de travail et leurs amis italiens, Salvini en tête, grands patriotes devant l’Éternel, viennent de vendre le port de Gênes et le port de Trieste aux Chinois ! » « On voit là tout le danger qu’il y aurait à limiter le débat européen à un affrontement entre l’extrême droite et les libéraux ». Quelles propositions pour changer cette Europe ?

« Je dirais d’abord qu’il y a une logique globale avec laquelle il faut rompre. Aujourd’hui, l’Union européenne fonctionne à partir de deux dogmes. Le premier, c’est l’austérité et la fameuse règle des 3 % de déficit public à laquelle il est interdit de déroger, faute de quoi on peut être sanctionné. La deuxième, c’est la concurrence libre et non faussée. C’est d’ailleurs une

drôle d’idée d’avoir créé une Union dans laquelle les peuples et les États ne sont pas là pour se serrer les coudes, mais dans laquelle ils passent le plus clair de leur temps à se tirer dans les pattes. Donc, il faut rompre avec les traités européens ». « (…) nous souhaitons que les travailleurs d’Europe puissent enfin vivre de leur travail. Aujourd’hui, ce n’est pas le cas puisque, depuis dix ans, le taux de travailleurs pauvres en Europe est passé de 7 % à 10 %. Alors même que le produit intérieur brut au sein de l’Union européenne est passé de 15 000 milliards d’euros à 17 000 milliards d’euros. Nous avons produit plus des richesses et, dans le même temps, nous nous sommes appauvris. Nous faisons une proposition très simple : un Smic européen fixé à 60 % du salaire moyen de chaque pays, ce qui reviendrait à un Smic français à 1 400 euros net ». « Ensuite, nous voulons une Europe dans laquelle les services publics se développent, au lieu d’être en permanence sacrifiés. C’est la raison pour laquelle nous proposons une clause de non-régression sociale. La France avait développé, après la Seconde Guerre mondiale, un secteur public puissant, adossé à des entreprises publiques qui disposaient d’un monopole. C’était le cas dans le secteur de l’énergie, dans le secteur des transports, dans le secteur des télécoms. Tout cela a été sacrifié parce qu’on nous a imposé des directives de libéralisation ». « Aujourd’hui, nous avons suffisamment de recul pour faire le bilan de ces directives de libéralisation. Et nous constatons que, par exemple, dans le domaine de l’énergie, cela a conduit à une hausse des tarifs de 70 %. Confrontés à ce type de disposition, nous devrions pouvoir faire valoir une forme de droit de veto, une clause de non-régression. L’Union européenne doit accepter qu’en son sein puissent coexister des modèles économiques différents ». « Il faut (…) une troisième rupture sur la question de l’argent et de la répartition des richesses. La BCE, a versé depuis dix ans 3 000 milliards d’euros aux banques privées, sans la moindre condition. Cet argent-là serait beaucoup plus utile s’il allait vers les services publics, vers le bien-être des populations et vers la transition énergétique. Par ailleurs, nous souhaitons une politique de fermeté absolue vis-à-vis de l’évasion et de la fraude fiscales, qui représentent 1 000 milliards d’euros à l’échelle de l’Europe. » Sur le plan international

« L’UE nous a été vendue comme un moyen de faire face à la mondialisation libérale. Aujourd’hui, elle est devenue un accélérateur de cette mondialisation ». « Nous nous opposerons, comme nous l’avons toujours fait, aux traités de libre-échange. Nous proposons au contraire de relocaliser les activités en instituant une clause de proximité dans les marchés publics. Ce qui peut être produit en France doit être

produit en France, et la commande publique doit y contribuer. L’Europe, ça devait être également la paix. Aujourd’hui, c’est l’inverse : c’est la course aux armements. L’Union européenne impose aux États membres de consacrer 2 % de leur produit intérieur brut aux dépenses militaires ». « D’autre part, la fameuse défense européenne indépendante des ÉtatsUnis… est une vaste supercherie. La réalité, c’est que c’est Trump qui nous demande d’augmenter les dépenses militaires. Nous, nous sommes cohérents. Nous voulons l’indépendance. Et donc, la rupture avec l’Otan ». Sur l’accueil des migrants

« L’Union européenne passe son temps à ériger des frontières et dépense des sommes colossales pour empêcher les migrants d’y entrer. En revanche, elle laisse les frontières grandes ouvertes aux fraudeurs fiscaux. Je propose l’inverse. Les chiffres parlent d’eux-mêmes. La fraude fiscale coûte 100 milliards d’euros par an en France. L’immigration nous rapporte 4 milliards d’euros par an. Car les étrangers présents en France travaillent, paient des impôts et des cotisations. Ce que je veux, c’est qu’on ferme les frontières aux fraudeurs fiscaux qui se comportent en parasites. En revanche, pour ce qui est des humains, en l’occurrence des réfugiés, je considère que notre devoir est de les accueillir. Pas n’importe comment, pas de manière anarchique, mais de manière organisée, avec une clé de répartition à l’échelle de l’Union européenne. Il n’est pas acceptable qu’un pays comme la Pologne, qui touche 12 milliards d’euros cash de l’Union européenne chaque année, puisse se dérober à toute forme de solidarité et

laisse les pays du Sud gérer seuls une situation comme celle-là. Donc, oui. Il faut accueillir, il faut héberger. Il faut s’organiser pour cela. » Une gauche dispersée

« Je regrette cette dispersion. Le Parti communiste a tendu la main aux autres forces politiques de la gauche anti-austérité ». « Il faut néanmoins avoir l’honnêteté de reconnaître que toutes ces listes de gauche ne disent pas la même chose et n’ont en tout cas pas dit ou fait la même chose sur les enjeux européens. Le Parti communiste a ce grand atout dans cette campagne d’être constant et cohérent. Nous sommes une force politique qui, sur cette question, n’a jamais menti, ni jamais trahi, jamais fait croire à personne que nous construirions l’Europe sociale avec des traités ultralibéraux ». « Depuis 1979, il y a toujours eu des députés communistes au Parlement Européen et ils ont fait la preuve de leur utilité. Ils ont joué un rôle indispensable de lanceurs d’alerte. Sans eux, le projet de Constitution européenne n’aurait jamais été diffusé dès 2003, soit deux ans avant le référendum victorieux. Sans eux, qui aurait relayé la mobilisation des dockers en 2003 et 2006 pour faire échec aux directives de libéralisation des services portuaires ? Sans eux, le programme européen d’aide alimentaire qui profite à 3 millions de Français aurait été purement et simplement supprimé. Et si nous avions été un peu plus nombreux, nous aurions fait échec au quatrième paquet ferroviaire, adopté à seulement 24 voix près, qui a abouti à la funeste loi sur la SNCF et à la fermeture des petites lignes. Il faut donc jeter toutes nos forces dans la bataille pour renforcer notre présence au Parlement européen. »

SMIC EUROPÉEN

« Stop à la régression sociale ! » Ian Brossat a publié une tribune sur le SMIC européen en réaction à la proposition de Nathalie Loiseau (Midi Libre du 13 avril) d’un Smic européen à 50 % du salaire médian. « Peu de gens le savent, mais JeanClaude Juncker touche un salaire de 32 000 euros mensuels. En un mois, le président de la commission européenne gagne tout simplement deux fois plus que le salaire moyen annuel d’un travailleur européen ! Quant à un commissaire européen, il émarge à presque 20 000 euros nets par mois. Comment demander à ces gens de comprendre les problèmes de Monsieur et Madame Tout-lemonde ? » « Aucun des responsables et fonctionnaires européens qui formulent ces propositions ne se rendent compte de ce que c’est de vivre avec 1 170 euros par mois. Pas plus que Nathalie Loiseau, la

candidate LREM aux prochaines élections européennes, qui s’est encore illustrée par une proposition dangereuse pour les travailleurs. Que demande-t-elle ? Un Smic européen fixé à 50 % du salaire médian. En France, cela représenterait un Smic à 900 € par mois, soit le seuil de pauvreté. Ce nivellement par le bas est une folie, et il n’est souhaitable ni en France ni ailleurs en Europe. » « Pour permettre à chacune et à chacun de vivre décemment de son travail, je fais la proposition suivante : oui à un SMIC européen, dans chaque pays, correspondant à au moins 60 % du salaire moyen. En France, le Smic serait ainsi augmenté à 1 400 € nets. Et pour aider les petites et moyennes entreprises qui auraient des difficultés à financer ces hausses de salaires, réorientons vers les TPE et PME les milliards d’euros du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE), versés aux grandes entreprises sans aucune contrepartie ni effet sur l’emploi. »


ÉENNE 26 MAI 2019 PCF

Enjeux et batailles européennes en débat à Bacalan

Pascal Pontac, Charlotte Balavoine et Eric Bourguignon, lors de la réunion publique salle Tachou. Photos Marie-Ange Leblanc

Charlotte Balavoine, attachée parlementaire du groupe Gauche unie (GUE) au Parlement de Strasbourg, Pascal Pontac, syndicaliste Ports et Docks de Saint Nazaire, tous deux candidats sur la liste de Ian Brossat et Eric Bourguignon, candidat sur la liste Die Linke (Allemagne) intervenaient pour une conférence organisée salle Pierre-Tachou, à Bordeaux, jeudi dernier, sur les enjeux de cette campagne électorale et les batailles à mener sur le plan européen. Dans la soirée, après la réunion publique salle Pierre-Tachou, ou dans les jours qui ont suivi, chaque personne, communiste ou non, ayant assisté aux interventions de Charlotte Balavoine, Pascal Pontac et Eric Bourguignon, soulignait la qualité des propos tenus. Chacun de ces trois intervenants, dans son domaine de prédilection lié à son activité politique, a pu porter loin, tant dans l’analyse que dans les batailles à mener, les enjeux qui entourent les élections européennes du 26 mai prochain. La réunion publique de jeudi dernier à Bacalan a donc pu permettre à chacun et chacune de s’outiller davantage en vue du petit

mois de campagne à venir désormais. Dans l’ordre des interventions, Charlotte Balavoine, assistante parlementaire du groupe Gauche unitaire au sein du Parlement européen, a été d’une extrême limpidité : « C’est opaque, fumeux, et ce n’est pas dû au hasard. Tout est structuré pour que les gens n’y aient pas accès », affirme-t-elle dans l’introduction de son intervention au sujet de la construction européenne. Elle cite quelques exemples, comme les traités de libre-échange, qui se négocient dans le dos des parlementaires et de leurs équipes. Elle rappelle aussi le pouvoir exorbitant donné au Conseil européen, composé des gouvernants de chaque pays, qui peut bloquer toute décision démocratique du mécanisme européen, toujours dans le même sens. « Macron, à Bruxelles, il défend toujours les intérêts des mêmes, ceux des capitalistes ». Elle cite aussi des exemples de sujets dans lequel le Parlement européen a poussé initialement le curseur des droits bien plus loin que ce que ne prévoient les textes nationaux. C’est le cas d’un texte voté sur le congé maternité, que les trois derniers présidents de la République ont, chacun leur tour, vidé des avancées espérées.

Des luttes à mener

Mais il n’y a pas de quoi verser dans le pessimisme, pas avec Charlotte en tout cas, quand elle cite les leviers mobilisés pour mener les batailles. Certes le groupe Gauche unitaire (dont font partie les député-e-s communistes français) ne compte que 52 parlementaires, sur une Assemblée de 751 élus, à comparer aussi aux 40 000 lobbystes accrédités, dont la grande majorité travaillent aux intérêts capitalistes. « Mais nous sommes les porte-paroles du mouvement social, dans les luttes du travail ou récemment, dans le débat sur les violences policières. Nous essayons de bloquer des textes, de pousser la contradiction, de renforcer les luttes comme celle contre l’évasion fiscale à l’échelle européenne. Nous travaillons à construire le rapport de forces, au quotidien, en construisant des initiatives en lien avec d’autres pays ». À ce sujet, Pascal Pontac avait de quoi développer un bon exemple de luttes transnationales, dans les ports européens. Un exemple que le candidat sur la liste de Ian BROSSAT, syndicaliste Ports et Docks à Saint-Nazaire, fait naître en 1998 à Liverpool, quand le capital s’attaque aux dockers. « Ce qu’on a vu, c’est de

la répression, dans le sang. On s’est dit, si on attaque Liverpool, c’est aussi nous que l’on attaque. En 2000, on a créé IDC, le conseil international des dockers, pour lutter tous ensemble ». Nouvelle attaque libérale en 2003 : « On s’est opposé, on les a battus, c’est la première fois que l’on faisait tomber une directive ». Idem en 2006, avec un soutien indéfectible du Parti communiste aux côtés des dockers et un Parlement qui « retoque une nouvelle directive ». Depuis, une commission de dialogue a été créé et a permis, en anticipant les mauvais coups, de les tenir à distance. « Mais l’Europe libérale n’a pas dit que c’était fini. Maintenant, elle s’attaque aux États, un par un, pour privatiser les services publics. Les ports ne sont qu’un exemple ». Pascal Pontac cite l’exemple du Portugal, asphyxié par les politiques austéritaires. Évidemment, tout le monde pense aussi au sort de la Grèce. Le « modèle » allemand

Dernier intervenant, Éric Bourguignon, qui avait fait la plus grande distance pour cette réunion publique. Originaire de Dordogne, il est établi depuis une quinzaine d’années en

Allemagne, à Munich. Pour ces élections européennes, Éric Bourguignon, particulièrement engagé dans la lutte contre les discriminations, est candidat sur la liste Die Linke. Son intervention a permis de donner la réalité du fameux « modèle » allemand, vendu à grands renforts médiatiques de ce côté-ci du Rhin. Citons trois points. Les retraites ? « En Allemagne, le système est catastrophique. Il y a de la pauvreté dans la vieillesse. La nonprogression des retraites et la hausse exponentielle des loyers poussent les gens vers la pauvreté. On voit des gens qui font les poubelles pour récupérer les bouteilles consignées. » Les salaires ? « La précarité vient aussi de la libéralisation du marché du travail. Le patronat allemand a baissé les salaires pour reconstituer ses marges à l’export ». Le logement ? Les retraites, les salaires, « ne sont que des exemples d’une longue liste de sujets qui expliquent que les allemands se mobilisent sur la question du logement », explique Éric Bourguignon. Ce qu’il dit de Munich (hausse des loyers, nouveaux bâtiments en R +8 ou 10) n’est pas sans rappeler les évolutions de Bordeaux, avec qui elle a d’autres points communs que celui du jumelage. Des interventions du public ont permis de porter les échanges sur l’énergie, les migrants ou les travailleurs détachés. Cette réunion publique a été aussi l’occasion de pousser un peu plus loin les échanges. Dans la journée, une délégation des intervenants et des élus communistes métropolitains a ainsi longuement échangé avec la CGT du port de Bordeaux. Le lendemain, Charlotte Balavoine animait, rue Furtado, une formation sur l’Europe à l’attention des militants girondins. Olivier Escots

PORT DE BORDEAUX

Un atout économique, territorial et écologique à développer

Alors que les différentes collectivités territoriales (Département, Région et Métropole) ont décidé de passer un contrat de partenariat et de projets avec le Grand Port Maritime de Bordeaux, les élus communistes de Bordeaux Métropole sont allés rencontrer les salariés dockers et du port en compagnie de Charlotte Balavoine, attachée parlementaire du groupe GUE et Pascal Pontac, secrétaire CGT du Port de St Nazaire. Aujourd’hui, de nombreuses voix dénoncent la faible activité du Port de Bordeaux et le manque d’activité

fluvio-maritime. Chacun souligne les atouts d’un port pour l’économie locale et régionale. Pour autant, les objectifs divergent entre la Métropole – qui veut urbaniser en grignotant sur les terrains du port – et des salariés du Port, notamment des ateliers (chaudronnerie, charpentier, ateliers mécaniques) – que le groupe a pu visiter et qui sont aujourd’hui mitoyens de la cité du vin – qui veulent maintenir une activité industrielle et économique en cœur de Métropole. Les élus communistes ont de tout temps défendu cette activité portuaire en cœur de ville, notamment avec la réhabilitation des formes

de radoub aux bassins à flots pour accueillir l’entretien des bateaux fluviaux, de plus en plus nombreux avec l’essor du tourisme fluvial. Mais la pression immobilière se fait sentir sur ces activités. Enfin les salariés du port ont fortement pointé que le port et ses 7 terminaux ne pourraient se développer et être attractifs pour les entreprises que si le maillage et les connexions avec son « hinterland* » se développaient, par voie ferrée, fluviale ou routière. Suite à cette visite, Claude Mellier, vice-présidente en charge des infrastructures à la Métropole, est intervenue lors du Conseil du 26 avril, en voici des extraits : « Nous tenons à réaffirmer ici notre attachement à une gouvernance du Port de Bordeaux sous la responsabilité de l’État qui doit être pleinement associé, via ses différents services décentralisés, au contrat de partenariat entre Port et collectivités qui nous est présenté aujourd’hui. Nous regrettons que les principaux acteurs du Port que sont les salariés, au travers de leurs organisations syndicales, n’aient pas été conviés

à la rédaction de ce contrat. Il convient d’appréhender au même niveau de préoccupations les questions économiques, sociales, les conditions de travail ou les questions écologiques. La durée de ce contrat 2019-2020 nous parait très court pour une véritable vision stratégique, ce qui peut laisser penser que ce contrat est fait de bonnes intentions mais peu de réels engagements. La particularité de notre Grand Port Maritime de Bordeaux qui s’étend sur près de 100 km et 7 sites différents le long de l’estuaire jusqu’en plein cœur de Bordeaux nous apparait être un atout plus qu’un handicap à condition que le transport maritime massifié soit totalement interconnecté avec les modes de transports routiers, ferroviaires et fluviaux qui l’alimentent. Pourquoi la SNCF, entreprise publique, n’est pas partenaire de ce contrat si la volonté est de développer le fret comme l’affirme ce document ? Au-delà de la déclaration d’intention, il manque ici des engagements forts pour le fret ferroviaire qui ne cesse de reculer sur notre Métropole comme on peut le voir à Hourcade. Pour le fret

fluvio-maritime, s’ il est mentionné rapidement en citant le groupe de travail de Voie navigable de France, il prend beaucoup moins de place que l’usage touristique du fleuve qui a droit à un chapitre entier de 2 pages ». « Enfin toute une partie de ce contrat est consacrée au foncier du Port qui aiguise les convoitises des promoteurs immobiliers comme ceux de la Métropole. Si dans le contrat on parle de construire une stratégie partagée en matière foncière malgré des objectifs souvent divergents entre le port et les collectivités, nous notons que dans les objectifs concrets listés, il n’y a que des projets immobiliers portés par la Métropole et aucun projet économique en lien avec l’activité du port. » Malgré leurs réserves, les élus communistes ont voté ce contrat de partenariat et de projet, « en espérant que les bonnes intentions exprimées soient suivies d’actes fort, notamment en direction du fret ferroviaire et fluvial ». * Secteur desservi par un port, une voie navigable

Les Nouvelles 2 mai 2019 • 5


PCF ÉLECTIONS EN ESPAGNE

INDUSTRIE MILITAIRE

Les socialistes l’emportent face à l’ascension de l’extrême droite

L’Élysée complice de la mort de civils yéménites

Le PSOE a gagné les élections générales du dimanche 28 avril. Mais faute de majorité, il devra nouer des alliances pour pouvoir gouverner. L’autre donnée majeure du scrutin est l’entrée de Vox aux Cortes, le parlement. Cela faisait onze ans que le Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE) n’avait pas gagné un scrutin général. Ce dimanche 28 avril, la formation de Pedro Sanchez, le président du gouvernement sortant, a enrayé le cycle des défaites, en remportant les élections législatives. Le PSOE obtient 123 députés, contre 85 dans la précédente législature. Des alliances devront être nouées pour gouverner, la majorité absolue étant de 176 sièges. Dimanche soir, les militants réunis rue Ferraz, à Madrid, ont fait savoir leur souhait : « Avec Rivera non ! », ont-ils scandé contre Albert Rivera, le dirigeant des ultralibéraux de Ciudadanos. « Je crois que le message est clair », a répondu Pedro Sanchez sans en dire davantage. Unidas Podemos, la coalition regroupant Izquierda unidas, la formation de Pablo Iglesias et les écologistes d’Equo, résistent tant bien que mal à la stratégie du vote utile défendue par le PSOE face au danger de l’extrême droite. Avec 42 parlementaires, contre 71 en juin 2016, l’alliance rouge, vio-

lette et verte s’impose comme un partenaire incontournable à gauche pour le PSOE. Les deux formations totalisent 165 députés et devront se tourner vers les partis régionalistes ou indépendantistes. Les pactes seront néanmoins compliqués à sceller dès lors qu’il faudra aborder l’épineux règlement du conflit avec la Catalogne. Autre donnée majeure du scrutin, et des plus inquiétantes : Vox fait son entrée aux Cortes. Jamais depuis le retour de la démocratie, l’extrême droite n’avait été en mesure d’avoir des voix au parlement. Le Parti de Santiago Abascal a remporté 24 élus. En jouant à la fois sur la peur de l’immigration, la désintégration de l’Espagne en raison du mouvement sécessionniste catalan, l’extrême droite est parvenue à imposer son agenda et ses thèmes de prédilection, malgré le caractère outrancier et dangereux de son discours. Au terme de ce scrutin, on notera également une participation à la hausse avec 75,75 %, lors de ces élections présentées comme les plus disputées et incertaines. La balle est désormais dans le camp de Pedro Sanchez qui devra au plus vite sceller des pactes s’il souhaite former un exécutif, après quatre ans d’instabilité politique. Dimanche, 28 avril, 2019, Cathy Dos Santos

CUBA

Washington déclare une nouvelle guerre commerciale En activant le chapitre III de la loi Helms-Burton, les ÉtatsUnis veulent faire plier Cuba et asphyxier ses partenaires. Cheville ouvrière des rétorsions économiques contre le Venezuela, le conseiller à la sécurité nationale du président des États-Unis se fait le chantre des nouvelles sanctions contre Cuba. John Bolton était en effet chargé d’annoncer le 17 avril la mise en application du chapitre III de la controversée loi Helms-Burton, autorisant des citoyens des ÉtatsUnis, ou naturalisés, à engager des poursuites judiciaires contre des personnes et/ou des entreprises étrangères qui gèrent des biens nationalisés au lendemain de la révolution, même si ces derniers ont fait l’objet de compensations financières. Jamais, depuis 1996, les locataires de la Maison-Blanche n’avaient activé cette clause. Washington, qui veut reprendre en main la région, espère ainsi asphyxier la Grande Île pour faire tomber ses autorités. L’annonce devait avoir lieu à Miami, fief de l’anticastrisme, où Donald Trump espère capitaliser les voix les plus droitières lors de la présidentielle de 2020, et devant un public qui en dit tout autant : les vétérans de 6 • Les Nouvelles 2 mai 2019

la brigade 2506, ces mercenaires cubains entraînés aux États-Unis qui avaient débarqué en 1961 dans la baie des Cochons pour renverser Fidel Castro. La première puissance mondiale « cherche à resserrer l’étau contre la souveraineté cubaine, en aggravant le blocus et, en particulier, la persécution financière », a dénoncé le président cubain, Miguel Diaz-Canel. Cette nouvelle guerre commerciale vaut aussi pour tous les partenaires économiques de La Havane, en raison du caractère extraterritorial de la législation états-unienne, pourtant contraire au droit international. Mardi, Cuba et l’Union européenne (UE) ont initié leur premier round de « dialogue sur le développement durable » avec à la clé des projets d’investissements de 62 millions d’euros. Dans une lettre adressée à Mike Pompeo, le secrétaire d’État américain, la Commission européenne a menacé de « recourir à tous les instruments à sa disposition », dont l’OMC, « pour protéger ses intérêts », a fait savoir Federica Mogherini, la cheffe de la diplomatie européenne. Cathy Dos Santos, L’Humanité du 18/04/2019

Selon une note confidentielle du renseignement militaire, Paris savait que des armes françaises ont été utilisées au Yémen. Ce mensonge d’État fera-t-il couler autant d’encre qu’il a fait couler le sang des Yéménites ? Lundi 15 avril, six organes de presse (dont l’ONGmédia Disclose, Mediapart, Konbini, Radio France, Arte et The Intercept) ont publié les éléments d’un rapport classé « confidentiel défense » sur l’utilisation d’armes françaises au Yémen. Le document prouve sans contredit possible que des engins de mort, made in France, ont bien servi dans ce pays en guerre depuis 2013, notamment dans des régions touchant des civils. Des informations que l’Élysée et Matignon nient en bloc depuis des mois. Ces notes de la

Direction du renseignement militaire (DRM), datées du 25 septembre dernier, ont été portées à la connaissance d’Emmanuel Macron comme à celle de son premier ministre, Édouard Philippe, ou encore de la ministre des Armées, Françoise Parly, et du superVRP de l’industrie militaire française, l’actuel ministre des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian. Elles démontrent que 48 canons Caesar, fabriqués à Roanne (Loire) par l’entreprise d’État Nexter, ont été vus au sein des forces armées saoudiennes, à la frontière avec le Yémen. « Entre mars 2016 et décembre 2018, 35 civils sont morts au cours de 52 bombardements localisés dans le champ d’action de ces canons », détaille Disclose, reprenant les données de l’ONG Acled (Armed Conflict Location and Event Data Project). Le rapport pointe également la présence de chars

Leclerc, « déployés en position défensive du côté d’Aden, dans le sud du Yémen. En novembre 2018, les chars français ont été au cœur de la bataille d’Hodeida. Elle a fait 55 victimes civiles, selon l’Acled », ajoute Disclose. L’enquête montre donc la volonté délibérée de la présidence de la République de continuer à vendre des armes à un pays comme l’Arabie saoudite, bien loin de respecter la convention de Genève. Emmanuel Macron – ultime décideur sur la vente et l’envoi d’armes françaises à des partenaires étrangers (lire L’Humanité du 2 avril) – viole délibérément le droit international. L’article 6 du traité sur le commerce des armes (TCA) signé par Paris est pourtant sans ambiguïté : « Un État partie ne doit autoriser aucun transfert d’armes classiques (…) s’il a connaissance, lors de l’autorisation, que ces armes ou ces biens pourraient servir à commettre un génocide, des crimes contre l’humanité, des violations graves des conventions de Genève de 1949. » L’Élysée savait donc que cet arsenal a été utilisé au Yémen contre des civils. Mais cela ne change rien au problème : un nouveau contrat, signé en décembre dernier avec l’Arabie saoudite, évoque la livraison de véhicules blindés et de canons à ce pays entre 2019 et 2024. Stéphane Aubouard, L’Humanité du 16/04/2019

ALGÉRIE

Une jeunesse déterminée Ni printemps arabe, ni émeutes. La jeunesse algérienne veut faire sa propre révolution pour imposer un État de droit. Rencontre avec le jeune blogueur Merzoug Touati, qui vient de passer deux ans derrière les barreaux. Lorsqu’il relate son calvaire, ses traits se tendent, son front se barre d’une ride. Mais dans le joyeux cortège qui s’ébranle sur l’avenue de la Liberté à Alger, lorsque des milliers de voix s’unissent dans le même cri : « Système dégage ! », le visage de Merzoug Touati s’éclaire d’un sourire. Ce grand gaillard de 31 ans, qui tient un blog depuis bientôt dix ans, a passé plus de deux ans derrière les barreaux. (…) Son crime ? Avoir diffusé sur son blog l’interview vidéo, réalisée par Skype, d’un porte-parole du ministère israélien des Affaires étrangères. « Les faits remontent au début de l’année 2017. Les manifestations se succédaient à Béjaïa (Kabylie) pour contester les mesures d’austérité de la loi de finances. Le ministre de l’Habitat d’alors, Abdelmadjid Tebboune, avait affirmé, le 8 janvier, que les Israéliens étaient derrière ce mouvement social pour déstabiliser l’Algérie. Je voulais répondre à ses accusations. J’ai donc contacté ce diplomate, via un défenseur israélien des droits humains, pour en savoir plus. Il a nié toute implication, affirmant que son pays entretenait, au

nom d’intérêts communs, de bonnes relations avec les autorités algériennes », raconte le blogueur. Au détour de l’interview, son interlocuteur lui assure que Tel-Aviv disposait avant 2000 d’une « ambassade secrète » en Algérie. Merzoug Touati décide de publier la vidéo in extenso. Quatre jours plus tard, le 18 janvier, il est arrêté. En pleine effervescence sociale, son procès offre au système l’occasion de parfaire la rhétorique de la « main étrangère ». Le blogueur, lui, paie ses engagements contre l’austérité et ses publications au vitriol. Les autorités n’apprécient guère sa liberté de ton ni sa dénonciation de la corruption. (…) Le devenir des « printemps arabes » le désespère. « Ce qui se passe ici n’est pas du tout de même nature. Sur le plan politique, on n’importe rien. On fait notre propre révolution, spécifiquement algérienne, elle ne connaîtra pas le même épilogue, insiste-t-il. On a tiré les leçons de notre propre expérience, de celles des autres, on sait comment conduire le mouvement. Et le plus important, c’est que ça reste pacifique, même si le pouvoir cherche à pousser le peuple à la violence. Les émeutes, on en a déjà fait beaucoup. C’est de l’oxygène pour les régimes dictatoriaux, ça leur permet d’imposer leur loi. » (…)

Les juges le condamnent finalement à cinq ans de prison, dont deux ferme, une peine qu’il a déjà purgée. Il reste les trois ans de sursis, comme une épée de Damoclès au-dessus de la tête du blogueur toujours sous surveillance. « Je retrouve le terrain, ce n’est pas facile. J’ai perdu des capacités. Mais le combat continue ! » sourit-il. L’Algérie de demain, Merzoug Touati l’imagine comme « un État de droit, une démocratie où régneraient la liberté et la justice sociale ». « On a des ressources. C’est sur le plan économique qu’il faut changer les choses, pour faire reculer le chômage, créer des emplois pour les jeunes », remarque-til. Le militant respire l’air du large et se fond dans la foule immense qui envahit les rues de sa ville chaque vendredi. Il défile avec les portraits de militants encore emprisonnés pour délit d’opinion. Le soir même, la police annoncera avoir procédé, à Alger, à l’arrestation de 180 personnes et procédera, les jours suivants, à des dizaines d’arrestations dans les sit-in et rassemblements. Ébranlés par un mouvement populaire puissant, profond, déterminé à les déraciner, les hommes du système s’accrochent et jouent leur dernière carte : celle de la répression. Rosa Moussaoui, L’Humanité du 18/04/2019


PCF AÉROPORTS DE PARIS

TOMBOLA

Les urnes contre la privatisation

Soutenez la Fête de l’Humanité Gironde !

Une trentaine d’élus sont allés à la rencontre des salariés en grève de l’aéroport d’Orly, jeudi 18 avril. Ils se mobilisent pour faire aboutir le référendum d’initiative partagée. Ce jeudi 18 avril, n’était pas un jour comme un autre à l’aéroport d’Orly. Le premier ministre, Édouard Philippe, inaugurait le nouveau terminal numéro 3. L’État a investi 500 millions d’euros dans l’opération. Une semaine auparavant les députés de la majorité, isolés, votaient la loi Pacte qui privatise Aéroports de Paris. « Ce nouveau terminal est sans doute un cadeau de bienvenue aux futurs actionnaires et propriétaires d’ADP », entendait-on dans les conversations des salariés d’Orly qui s’apprêtaient à manifester. Face à la porte 45 du terminal 4, ils étaient environ 700 à avoir répondu à l’appel de l’intersyndicale CGT, Unsa, FO, CFDT, Solidaires. La plupart ont revêtu leur veste de travail, d’un orange vif, les militants syndicaux y ont superposé les gilets de leurs organisations et un badge, le même pour tous « Non, à la privatisation ». Le premier ministre n’a pas daigné les rencontrer. Ils ont pu, en revanche, entendre et échanger avec des élus et responsables politiques en première ligne de l’opposition à la privatisation d’un « fleuron national ».

Une large majorité de la population contre la privatisation

L’opposition parlementaire a ouvert un espoir en parvenant à réunir 250 sénateurs et députés pour obtenir un référendum d’initiative partagée (RIP). « C’est une première sous la Ve République. Il fallait obtenir le soutien de 185 élus au minimum, nous en avons mobilisé 250 de gauche, mais également de droite. C’est maintenant au Conseil constitutionnel de statuer sur notre demande (ce dernier doit rendre sa décision le 10 mai – NDLR) », rappelle Fabien Roussel, secrétaire national du PCF. Selon lui, le référendum ne manquera pas d’entraver le projet de privatisation : « Le gouvernement aura du mal à le faire aboutir si un référendum est en cours. Cette zone d’ incertitude peut freiner les investisseurs. » Le député du Nord se félicite que politiques, élus, syndicalistes et salariés se retrouvent : « Quand on travaille ensemble, on a plus de chance de gagner. » À ses côtés, Ian Brossat est lui aussi venu apporter son soutien aux salariés. La tête de liste PCF aux élections européennes a dénoncé « l’obsession de l’Union européenne pour les 3 % de déficit public qui pousse à vendre les bijoux de famille. Macron vend tout. Ce n’est pas un

président mais un commissaire-priseur ». Dans ce département, on sait ce que représente un aéroport en termes économique, social mais également environnemental. Parmi les manifestants, on mesure l’angoisse générée par l’annonce de la privatisation. Le sénateur Pascal Savoldelli (PCF) a pointé de son côté les ravages d’une autre privatisation, celle des autoroutes : « 24 % des emplois ont disparu en dix ans. » Éric Coquerel (FI) a interrogé l’assistance sur les raisons profondes de cette privatisation coûteuse pour l’État. « À ce stade, rien n’est joué. Car dans notre pays, une large majorité de la population est contre la privatisation », a souligné Christian Favier, président communiste du conseil départemental du Val-de-Marne. 4,5 millions d’électeurs seront en effet nécessaires pour faire aboutir le projet de référendum. Bruno Le Maire s’était permis de fustiger cette démarche des parlementaires d’initier un RIP comme affaiblissant « la démocratie représentative ». Des propos « à la fois honteux et antidémocratiques », avait réagi Fabien Roussel. « Lorsqu’un projet de loi rencontre la désapprobation massive de nos concitoyens, lorsqu’il rencontre toutes les oppositions politiques, il est normal qu’en démocratie, le dernier mot revienne au peuple, par la voie du référendum. » Le PCF et ses parlementaires souhaitent que le référendum d’initiative partagé se tienne très rapidement afin que les Français-es s’expriment au sujet d’Aéroports de Paris, en toute connaissance de cause, loin des arguments fallacieux développés par la majorité présidentielle.

DÉCÈS DE JULIEN LAUPRÊTRE

Une grande figure du combat pour la justice et la dignité disparaît Parce qu’il avait, chevillé au corps, depuis son plus jeune âge, le principe de fraternité proclamé par notre République, Julien Lauprêtre aura consacré l’essentiel de sa vie à l’animation du Secours populaire, dont il sera devenu la figure centrale depuis 60 ans. Fabien Roussel, secrétaire national du Parti communiste français réagit, ci-dessous, à l’annonce du décès de cet infatigable militant de la solidarité, le 26 avril dernier. « Avec Julien Lauprêtre, le Secours Populaire aura inscrit tous ses engagements sous le mot d’ordre : “Nos vies s’appellent solidarité.” Il avait coutume d’invoquer les “nouvelles résistances” qu’il convenait d’organiser, et les plaçait dans la continuité du programme du Conseil national de la Résistance. À l’occasion du bicentenaire de la Révolution française, en 1989, il avait même lancé une campagne autour de “nouveaux cahiers de doléances”, initiative qui prend de nos jours une

singulière résonance. (…) Jamais nous n’aurons eu autant besoin de cette vision plaçant l’Humain au cœur des politiques publiques. Les familles qui, chaque année dans notre pays, auront connu pour un court moment le bonheur des vacances, peuvent en témoigner. Les communistes ne sauraient, au demeurant, oublier que Julien Lauprêtre aura fait ses premiers pas militants dans les rangs du PCF. Fils de cheminot communiste et syndicaliste CGT, lui-même tailleur de glace, il rejoindra la Résistance aux heures les plus noires de l’Occupation. Il intégrera alors le réseau clandestin de la Jeunesse communiste, sera arrêté en 1943, et partagera la cellule de Missak Manouchian, figure emblématique de l’Affiche rouge et de la Main-d’œuvre immigrée. Cela le marquera pour le reste de son existence et l’amènera, après la Libération, à devenir l’un des responsables nationaux de la JC puis du Parti communiste français. Il sera ainsi, trente ans durant, membre de

son comité central. Bien qu’ayant décidé de se consacrer exclusivement aux activités du Secours populaire, après 2000, il se retrouvera encore très souvent à nos côtés dans le combat sans cesse renouvelé en faveur d’un autre avenir pour l’humanité. Il était ainsi venu faire partager aux membres du conseil national sa grande inquiétude devant la gravité de la situation des droits humains fondamentaux en France et dans le monde. Aujourd’hui, tous les humanistes, tous les progressistes se sentent orphelins. Julien Lauprêtre restera pour chacun et chacune un exemple de courage, d’humanité et de détermination. Il va terriblement manquer à l’action contre l’ordre absurde de notre société. Au nom du Parti communiste français, j’adresse mes condoléances émues à ses quatre enfants et à sa famille. Et je veux assurer ses proches, ses amis du Secours populaire, de toute notre affection et de notre solidarité. »

T 11 E I A M 12 2019

GIRO

NDE

La Fête de l’Humanité Gironde se déroulera, cette année, les samedi 11 et dimanche 12 mai 2019. Pour soutenir l’événement, la Tombola et sa vente militante sont de retour. Les carnets de 5 tickets à 2 € chacun (donc 10 € le carnet) sont disponibles à la fédération du PCF (15 rue Furtado à Bordeaux) et auprès des militants communistes. En achetant un carnet votre entrée sur la fête est offerte. De nombreux lots solidaires sont à gagner !

AU PROGRAMME DE LA FÊTE DE L’HUMANITÉ

Des livres et des débats À ajouter au programme que nous avons publié la semaine dernière, le débat organisé par l’Adecr33 à l’espace Forum :

« L’enjeu des services publics au coeur des élections européennes », avec Claude Mellier, Patrick Alvarez et le maire d’une commune rurale. Un vin d’honneur suivra avec les élus communistes et républicains ainsi que les vétérans du PCF à 12h30. Histoire, actualité, fiction à l’espace livres organisé par Espace Marx : - Maurice Lemoine, « Vénézuela, chronique d’une déstabilisation », débat à 15h - Alain Ruscio, auteur de « Les communistes et l’Algérie », débat à 16h30 - Bernard Lavallé, « Car ce combat est aussi le nôtre, Bordeaux, le Bordelais et la guerre d’Espagne » - Hervé Le Corre, Dans l’ombre du brasier - Sébastien Gendron Ces auteurs seront en dédicace au stand de la librairie de La Renaissance samedi. Dimanche nous y retrouverons Hervé Le Corre, Bernard Lavallé, Maurice Lemoine et accueillerons Ian Brossat auteur de « Airbnb, la ville uberisée ». D’autres auteur-e-s seront présents sur l’espace pour des échanges toujours attendus, comme Marc Losson et Madeleine Lenoble, Lysiane Rolland, Poètes, Marie-Christine Labourie, Amédée-Pierre Lachal, Franck Lafossas, Dominique-Emmanuel Blanchard, Frédéric Dufourg, Joël Guerin… et des éditeur-e-s comme Les Dossiers d’Aquitaine, Les éditions Dufourg, La Dispute et le Temps des Cerises et des revues comme L’Ormée, La Pensée, les Cahiers d’Histoire Critique, Recherches Internationales, des associations comme l’IHS-CGT, la revue Politis…

RÉUNION PUBLIQUE AU BARP

Mes service publics, j’y tiens ! Et vous ? Les communistes du Val de l’Eyre (Section du Bassin d’Arcachon) vous invitent à débattre des services publics, salle Val de l’Eyre, au centre commercial du Barp, jeudi 9 mai 2019 à 18h.

SOUSCRIPTION

Tout versement par chèque ouvre droit à une réduction fiscale de 66% du montant versé. (chèque à l’ordre de ADF PCF 33). Les ressources financières du Parti communiste sont transparentes. Votre don, aussi modeste soit-il, contribuera efficacement à la démocratie, à l’expression et la prise d’initiative du Parti communiste. Cet ensemble sont les éléments majeurs pour continuer notre combat dans l’ambition d’une gauche forte et alternative. Les versements sont à envoyer à la fédération de Gironde du PCF - 15 rue Furtado - 33800 Bordeaux, à l’ordre de l’ADF PCF 33

ILS ONT DONNÉ 2 668 euros : Mme SOURBE Arlette, Parempuyre ; M. AVRIL Robert , Parempuyre ; Mme MADELPUECH Evelyne, Talence ; Section de Bègles ; Section des Graves ; Section Haute Land ; M. NICOLEAU Yves, Bordeaux ; Mme GOMEZ Maryse, Bègles ; Mme BERNARD Muriel, Salles ; Mme DEMARTY Paulette, Bassens ; M. DARROMAN Serge Michel, Villenave d’Ornon

Les Nouvelles 2 mai 2019 • 7


CHRONIQUE

CULTURE & SOLIDARITÉ

NOUVELLES IDÉES REÇUES

JOURNÉE DU SOUVENIR DE LA DÉPORTATION

par Gérard Loustalet Sens www.nir-33.fr

Du fond de l’enfer, ils ont trouvé les ressources pour être solidaires Dimanche 28 avril, à la mairie de Bègles, était célébrée la Journée du souvenir de la déportation, consacrée au souvenir de celles et ceux, sans distinction, qui ont subi l’horreur des camps de concentration et d’extermination de l’idéologie nazie. Vincent Bordas était chargé du discours par la Fédération nationale des déportés et internés résistants et patriotes (FNDIRP) de Bègles. Nous publions ici de larges extraits évoquant des faits et des noms familiers pour bon nombre de nos lecteurs. « 36 béglais sont morts en déportation. Le plus jeune, Serge Guerstein y est décédé à l’âge de 16 ans le 10 février 1944, le plus âgé Bernard Brittman à 74 ans le 3 février 1944. Beaucoup ont été déportés en tant que démocrates, communistes, opposants, résistants ou gaullistes. Pour les juifs, la déportation était une des étapes de l’extermination décidée par l’idéologie nazie ; entreprise malheureusement soutenue par les agissements du gouvernement de Vichy et du maréchal Pétain. Beaucoup d’autres furent déportés car différents, tout simplement : tziganes, homosexuels, handicapés, francs-maçons … » « J’ai eu la chance de recueillir les mémoires de Simone Rossignol, qui fut maire de Bègles de 1971 à 1984, et sœur de Georges Durou, président de la section béglaise de la FNDIRP, dernier rescapé béglais de la déportation. (…) Les moments où Simone parlait de la déportation de son frère ont été les plus difficiles pour elle, comme lorsqu’elle évoquait le souvenir de René Duhourquet, lui aussi maire de Bègles et lui aussi déporté (à Dachau) avant que son fils Serge ne soit fusillé à Souge.

Simone parlait de cette absence, de leur inquiétude et elle parlait des premiers jours de la Libération ; ceux pendant lesquels les drapeaux tricolores fleurissaient dans le quartier Birambits et pendant lesquels les voisins fêtaient la victoire contre l’Allemagne nazie. Tous dans le quartier avaient mis le drapeau tricolore aux fenêtres. Tous sauf la famille Durou, qui attendait avec anxiété le retour de Georges. Et lorsqu’il revint, en juin 1945, elle comprit que le regard de son frère ne serait jamais plus le même. Simone, Georges, comme mes propres grands-parents et comme beaucoup de familles béglaises porteuses de cette histoire, ont ensuite consacré une part importante de leur vie à la lutte contre le racisme et contre l’exclusion, dans l’espoir que plus jamais le monde ne connaisse de telles périodes. En cela, même si le combat n’est jamais fini, nous leur devons beaucoup. Les générations suivantes, les nôtres, ont le devoir de le poursuivre ce combat. Et les occasions ne manquent pas. Les attentats meurtriers que vient de connaître le Sri-Lanka nous le rappelle cruellement. (…) Ne vivonsnous pas cette époque terrible où le président américain consacre l’essentiel de son énergie à la construction d’un mur pour empêcher les miséreux de pénétrer son pays ? » « À Souge, il y a quelques années, mon père racontait lui aussi la fuite de sa grand-mère avec ses enfants dans les bras. Son mari arrêté, elle avait peur et partait sans rien vers le Lot-et-Garonne, pour s’abriter. Heureusement, quelques portes se sont ouvertes. C’est le même défi auquel nous sommes confrontés face à des jeunes, des familles, venus du continent africain ou d’Europe de l’Est avec parfois le même regard

perdu et traumatisé qu’a vu Simone Rossignol dans les yeux de son frère revenu. On pourrait désespérer de la situation mondiale. Mais il faut constater que si le ventre d’où surgit la bête immonde est toujours fécond, le réseau solidaire et les gestes de fraternité arrivent aussi. Et, comme souvent dans son histoire, la ville de Bègles en est riche. D’abord elle accueille un nombre important de squats, de familles en détresse dont il faut scolariser les enfants et accompagner les adultes ; c’est une tâche ardue quand d’autres villes ferment les lieux d’accueil potentiels. Ensuite, c’est ici qu’est né – pour ne parler que de cela – , ces derniers mois, le club de rugby Ovale citoyen, qui réunit des réfugiés, des sans domiciles, et tous ceux qui le veulent pour refaire la société autour du sport. Aidée par le club de rugby de Bègles, par la ville et par bien d’autres acteurs, cette initiative est une de celles qui portent encore le message des déportés revenus de l’enfer. Ovale citoyen travaille d’ailleurs en lien étroit avec le comité de Bègles du Secours populaire, une association dont le président, Julien Lauprêtre vient de nous quitter ; il avait été enfermé à l’âge de 17 ans aux côtés de Missak Manouchian et des résistants de la Main d’œuvre ouvrière immigrée (MOI), connus sous le nom de ceux de l’Affiche rouge. En un mot et pour finir, si Jo Durou, si Julien Lauprêtre, si toutes et tous leurs camarades ont su trouver les ressources au fond de l’enfer pour être solidaire, en aidant les plus faibles, en partageant le quignon de pain qui restait, pourquoi serions-nous incapables, nous, ici et maintenant, de retrouver ce chemin de la solidarité ? » ANNONCES LÉGALES AVIS DE DISSOLUTION

M&N FINANCES SARL au Capital social de 2 000 Euros 3 RUE ROBERT SCHUMAN 33130 BEGLES N° 824 121 420 – RCS de Bordeaux Aux termes d’une AGE en date du 01/01/2019 les associés ont décidé la dissolution anticipée de ladite société. La société subsistera pour les besoins de la liquidation jusqu’à sa clôture. M. BENKHIRAT Mohammed, demeurant 2 rue Petite Frappe 33910 Saint Denis de Pile est nommé liquidateur. Le siège de la liquidation est fixé au 3 rue Robert Schuman 33130 Bègles C’est à cette adresse que la correspondance devra être adressée et que les actes et documents devront être notifiés. Pour avis et mention Le Liquidateur AVIS DE CONSTITUTION

Les Nouvelles de Bordeaux et du Sud-Ouest S.A.S. au capital de 37 000 euros Associés (à parts égales) : L. Chollon, F. Mellier, S. Laborde, M. Lavallée Directeur de la publication : Frédéric Mellier Abonnement 1 an : 25 euros. Abonnement de soutien : 40 euros Rédaction, composition, impression : S.A.S. Les Nouvelles de Bordeaux et du Sud-Ouest 15, rue Furtado - 33800 BORDEAUX Tél. 05 56 91 45 06 - Annonces légales : annonces@nbso.fr Comptabilité : compta@nbso.fr - Redaction/Proposition d’article : redaction@nbso.fr @nvlbx Les nouvelles de bordeaux nbso.fr Commission paritaire de presse : 0123 C 85932

8 • Les Nouvelles 2 mai 2019

Il a été décidé de constituer une société dont les caractéristiques sont les suivantes : Forme : SARL Dénomination : FOOD TRUCK TACOS BURGER Siège social : 112 Avenue Thiers 33100 Bordeaux Capital : 1 000 € Objet : Activité de restauration rapide à emporter Durée : 99 ans à compter de la date d’immatriculation Gérant : M. DJAURA Massy demeurant 112 avenue Thiers 33100 Bordeaux Pour avis,

Services publics : pourquoi tant de haine ? Quand on y pense, cela fait tout de même un demi-siècle (hormis une courte parenthèse) qu’est infligée à ce pays la même politique néo (ou ultra ou ordo) libérale. Depuis un demi-siècle, c’est le même programme autour de trois axes : réduire méthodiquement le champ de l’intervention publique ; abaisser systématiquement le niveau de la protection sociale ; rogner obstinément les droits des salariés. Et cela au nom d’une doctrine économique présentée comme la seule vérité et appuyée sur quelques dogmes, toujours les mêmes : des « charges » sociales exorbitantes pèsent sur un coût du travail toujours trop élevé, d’où la nécessité d’une « modération » salariale ; toute élévation du salaire minimum provoque du chômage; le code du travail «décourage» les entreprises de créer de l’emploi ; les chômeurs se satisfont d’une situation d’ « assistés » et doivent être « incités » à rechercher un emploi ; les dépenses publiques sont démesurées et le déficit est « abyssal », etc, etc. On connaît la chanson et ses inépuisables clichés. Et cela fait 50 ans que l’on nous vend la même salade sous des emballages divers: politique de «rigueur», politique « d’austérité », politique de « désinflation compétitive », politique « de l’offre »… Et toujours avec la caution de doctes économistes qui s’efforcent de donner un contenu « scientifique » à leurs préjugés idéologiques tout en prenant soin de neutraliser académiquement toute argumentation contradictoire et toute théorie concurrente. Et le relais est médiatiquement assuré par un journalisme dominant fait d’éditorialistes de cours et de perroquets de concours, rivalisant de conformisme et se copiant les uns les autres dans l’incompétence et la médiocrité… C’est ainsi que le macronisme n’est qu’une péripétie subalterne de ce libéralisme qui a envahi toutes les sphères de la société et dont le seul projet est la destruction de ce qu’on appelle le modèle social français, ses services publics, son système de protection sociale. Le programme est déjà bien avancé mais il faut toujours en rajouter car si les mesures libérales échouent, par exemple en matière d’emploi, ce ne serait pas parce qu’elles sont mauvaises mais parce qu’elles ne sont jamais assez libérales… Mais pourquoi tant de haine ? Le modèle social français est issu d’une sorte de compromis historique à la fin de la Seconde Guerre mondiale, dans les années 1944-46. Ce compromis résulte d’un double attachement, attachement à la puissance de l’Etat chez les gaullistes, attachement à la justice sociale chez les communistes. C’est ainsi que la puissance de l’Etat a été mise au service de la justice sociale. Certes, tout n’a pas été aussi simple. Il y a eu des débats, des refus, des reculs, des inerties, des utopies… Mais l’esprit des Jours heureux, premier titre du programme du Conseil national de la Résistance a été longtemps maintenu. Il a été par la suite caricaturé par les libéraux sous la fameuse expression d’Etat-providence, comme si les bienfaits de la protection sociale tombaient du ciel à la suite de quelque mandement divin. La formule est d’ailleurs certainement d’origine catholique et issue de la doctrine sociale de l’Eglise à la fin du XIXème siècle. En fait, il s’agit d’un Etat régulateur garant de l’efficacité de l’Etat social lequel n’est évidemment pas le socialisme. Sa mise en place a été aussi permise par la mémoire de trois faits historiques : la disqualification du libéralisme d’avant-guerre et de son « Mur d’argent » ; la marque des luttes sociales du Front populaire ; l’effondrement de la droite traditionnelle et du patronat compromis dans le pétainisme et la collaboration. Le principe même du service public se heurte frontalement à l’idéologie libérale. Il est la preuve qu’une activité humaine peut se passer de la recherche du profit individuel. Il assure une forme de redistribution des revenus et en ce sens on a pu dire que les services publics constituaient le patrimoine de ceux qui n’ont pas de patrimoine. Il faut ajouter que le service public n’est pas fondé sur l’idée de partage d’un gâteau dont chacun aurait un morceau mais sur celle bien plus solidaire de bien commun. Enfin, les notions de continuité et d’ accessibilité pour tous excluent par définition toute logique de rentabilité financière. Toutes choses insupportables pour les libéraux. D’où leur acharnement à accabler le service public, à le déconsidérer, à le priver de moyens, à chercher à lui imposer des pratiques du privé incompatibles avec ses missions auprès de la population.


Turn static files into dynamic content formats.

Create a flipbook
Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.