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Conclusion
from Les politiques du logement dans les Suds : la promotion de la propriété individuelle et ses limites
Dans le contexte mondial d’une libéralisation des politiques de l’habitat, ce premier papier de recherche sur les politiques du logement abordable dans les pays à revenu intermédiaire a mis en lumière l’essor des dispositifs d’accession aidée à la propriété pleine et individuelle depuis les années 1980. Du Mexique à l’Afrique du Sud, les pouvoirs publics ont organisé et soutenu une massification de l’accès à la propriété immobilière en combinant des aides à la demande d’une part, par des subventions et des garanties sur les prêts immobiliers octroyés aux ménages, et des aides aux promoteurs immobiliers d’autre part, avec des garanties accordées aux prêts à la construction, un accès facilité aux terrains, ou encore une fiscalité avantageuse. Le bilan de ces politiques publiques est toutefois mitigé. Leur objectif est en partie atteint avec des millions de ménages des classes moyennes émergentes qui sont désormais propriétaires de leur logement, et dessecteurs immobiliers et bancaires qui se sont positionnés comme des moteurs de croissance économique en investissant ces nouveaux marchés. Néanmoins, ce papier a souligné toutes les limites de ces dispositifs. Les ménages acquéreurs se retrouvent lourdement endettés, parfois précarisés et souvent captifs d’ensembles immobiliers résidentiels de faible qualité situés en périphérie des villes, à distance des bassins d’emploi et des services urbains. Dans le même temps, ces programmes d’accession à la propriétéalimententles dynamiques d’étalement urbain qui dégradent l’environnementet accélèrent le réchauffement climatique. De plus, ces politiques publiques contribuent au creusement des inégalités de patrimoine entre propriétaires et non-propriétaires. Or, en Afrique du Sud, en Inde, en Jordanie, au Liban et au Mexique, au moins 40% des ménages les plus pauvres (déciles de revenu 1 à 4) ne peuvent pas prétendre à ces filières d’accession, pourtant souvent présentées par les pouvoirs publics et certains acteurs de l’habitat comme destinées à loger les plus modestes. Sans compte bancaire, sans épargne préalable, et sans revenus formels suffisants ou réguliers pour obtenir un crédit immobilier, la propriété immobilière ne reste alors qu’un mirage pour les ménages modestes et une partie des classes moyennes inférieures.
Autrement dit, si l’accession aidée à la propriété pleine et individuelle constitue l’une des composantes de toute politique publique du logement, elle ne peut prétendre être une solution pour tous les ménages, en particulier les plus modestes. Ce constat souligne en creux la nécessité de diversifier les politiques de l’habitat dans les pays à revenu intermédiaire afin d’élargir l’offre de logements abordables, décents et sécurisés sur le marché, et d’ainsi répondre au défi de loger les 40% des ménages les plus pauvres. C’est tout l’enjeu du second papier de recherche sur les politiques du logement abordable dans les Suds, qui discute et explore les outils d’action publique de cette nécessaire diversification, en s’intéressant notamment aux dispositifs alternatifs et plus inclusifs d’accession à la propriété, d’autoconstruction encadrée ainsi qu’aux divers instruments permettant de relancer la production de logements locatifs abordables.