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Edito
TRIBUNE DE MESDAMES GISÈLE JOURDA ET VIVIANE MALET, CO-RAPPORTEURES DU RAPPORT « LES DÉCHETS DANS LES OUTRE-MER : LA COTE D’ALERTE » AU NOM DE LA DÉLÉGATION SÉNATORIALE AUX OUTRE-MER
Urgence. Oui, il y a urgence à répondre au défi des déchets dans les outre-mer français.
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Les conclusions de nos travaux au nom de la Délégation sénatoriale aux outre-mer sont claires. Sans des plans territoriaux forts, le rattrapage sera lent et compliqué, alors même que les déchets sont un service public de base, sans lequel il ne peut y avoir un développement harmonieux et digne.
Un indicateur offre un aperçu du rattrapage nécessaire : au niveau national, 15 % des déchets ménagers sont enfouis, 85 % étant valorisés. En outre-mer, le rapport est inversé.
À l’exception de la Martinique qui a enfoui, en 2020, 40 % de ses déchets ménagers et de Saint-Barthélemy qui incinère la totalité des déchets non triés, tous les autres territoires affichent des taux d’enfouissement de 70 à 80 %, voire pratiquement 100 % à Mayotte ou en Guyane.
Toutefois, ce constat statistique ne suffit pas à rendre compte de la réalité de certains de ces territoires qui sont confrontés à une vague de déchets qui ne cesse d’enfler. Les dépôts et les décharges sauvages se multiplient. La cote d’alerte est atteinte et plonge ces territoires face à une double urgence : une urgence environnementale et une urgence sanitaire.
Mayotte et la Guyane ont notamment besoin de plans Marshall XXL pour simplement mettre un terme à des situations inadmissibles dans la République française : des enfants jouant au milieu d’une décharge sauvage d’un bidonville comme nous l’avons constaté sur les hauteurs de Mamoudzou.
Enjeu environnemental, enjeu sanitaire, la gestion des déchets revêt aussi un enjeu économique. Le développement touristique ne peut réussir si les plages sont polluées, les routes bordées d’épaves et le paysage abîmé.
Nos travaux ont donc dressé un état des lieux par territoire, avec leurs faiblesses et leurs points forts. 26 propositions précises ont été faites dans tous les domaines pour redresser la situation : financements, coûts, gouvernance, ingénierie, coopération régionale, filières REP, modes de collecte et de traitement…
Ces propositions doivent permettre de relever un double défi : gérer l’urgence, qui suppose des actions rapides, et s’engager sur la voie de l’économie circulaire, qui est souvent un chemin plus long, bien que plus durable.
Pour y parvenir, quatre axes sont prioritaires :
- redonner des marges financières, avec un plan de 250 millions d’euros sur cinq ans et une exonération de la taxe générale sur les activités polluantes ;
- mettre les éco-organismes face à leurs responsabilités ;
- concentrer les moyens en ingénierie sur les projets structurants : déchetteries, centres de tri, unités de valorisation énergétique ;
- développer au maximum les filières locales de valorisation.
C’est cet équilibre, réaliste et ambitieux, que nous devons porter pour les outre-mer.