mensuel gratuit
fĂŠv. 2019
05
sommaire
LES CÉLESTINS AU POINT DU JOUR
6 > 16 FÉV. 2019
Théâtre Le Point du Jour - 7 rue des Aqueducs Lyon 5e
Le Rosaire des voluptés épineuses
RENDEZ-VOUS
STANISLAS RODANSKI / GEORGES LAVAUDANT
Une sublime pièce surréaliste, entre polar et poésie. LADEPECHE.FR
Illustration Hélène Builly
Lyon, pÉpiniÈre de thÉÂtre
04 72 77 40 00 | THEATREDESCELESTINS.COM
Auteurs, metteurs en scène, comédiens : ça bouillonne à Lyon !
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ETcroix-rousse.com JULIETTE opéra opéra théâtre croix-rousse opéra
d’après Shakespeare William Shakespeare théâtre Boriscroix-rousse Blacher musique d’après Shakespeare Boris Blacher composition Emmanuel Calef direction musicale Boris Blacher musique Jean Lacornerie mise enmusicale scène Emmanuel Calef direction EmmanuelOrchestre Calef direction musicale et Studio Lacornerie mise scène JeanJean Lacornerie mise en scène de l’Opéra deen Lyon Orchestre et Studio de l’Opéra de Lyon
avec avec
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FÉV
FÉV FÉV
malte martin atelier graphique | avec vassilis kalokyris | impression a3 print | photo Stofleth
ROMÉO roméo ETROMÉO JULIETTE et juliette
malte martin atelier graphique | avec vassilis kalokyris | impression a3 print | photo Stofleth
©
St o
fle th
Michel Cavalca©
RelÈve assurÉe
2019
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XROUSSE_1819_40x60.indd 12 XROUSSE_1819_40x60.indd 12
18/12/2018 11:02 18/12/2018 11:02
carte blanche .04
Portrait .08
COLLECTIF ÈS
AGAR AGAR
« Créer ensemble pour faire des solos ou réaliser des solos pour parler de ce qui unit. »
La pop futuriste qui a du chien
Lettres & Ratures .21
Bêtes de scènes .24
Lyon À balle DE bulles La bande dessinée se porte très bien à Lyon
NASSER DJEMAÏ « ... procéder à la catharsis, en live. »
février 2019
Trajectoires .22
MICHEL RASKINE Passeur d’écritures
sommaire
05
Dolorès Marat – Femme aux gants
fokus
DOLORÈS MARAT « Je ne prends qu’une seule photo quand l’émotion vient, à l’heure bleue »
Bêtes de scènes .25
PHIA MÉNARD
Impression : IPS I.S.S.N : 2646-8387
.16 .01
...
Invitée du mois Dolorès Marat
FORME & FONCTION
.10
Déambulations Musiques
Le Design fait pour nous des merveilles
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à la moulinette Manu Payet
.18
Déambulations Arts Visuels
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20 sur Vin In Vino Veritas
.24 Adresse administrative La Hêtraie - 5 impasse des Sources 69390 Vernaison - arkuchi@orange.fr Adresse rédaction 18 rue Belfort - 69004 Lyon
La rédaction n’est pas responsable des textes et photos publiés qui engagent la seule responsabilité de leurs auteurs. Tous droits de reproduction réservés.
Bêtes de Scènes Parcours Spectacle vivant
du simple au complexe, de l’évident au cérébral
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L'ArKuchi du mois
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C’était mieux avant Samuel Fuller
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Cuisine-moi... Le Radis Cogite-toi Rejoignez la communauté ArKuchi
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.12
Street Art Par Graphull
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numéro 05 - fév. 2019
Vue de l’exposition Design et merveilleux au MAMC - Charlotte Piérot / SEM©
contact.arkuchi@orange.fr arkuchi.com (en construction) Février 2019 n° 05 Mensuel gratuit Lyon, métropole & Rhône-Alpes Tirage : 12 000 ex. Direction de la publication Rédaction en chef Anne Huguet - 06 13 07 06 97 Secrétariat de rédaction Emmanuelle Babe Ont participé à ce numéro Valie Artaud, Romain Berthault, Jérôme Bertin, Jeanne Brousse, Lucie Diondet, Émiland Griès, Hector Jackson, Marco Jéru, Trina Mounier, Enna Pator, Nikki Renard, Florence Roux, Nans Vincent Illustration de couverture Dolorès Marat Conception et mise en page
Dolorès Marat©
« Je te claque ta chatte »
carte blanche
Faire œuvre collective est à la fois notre outil et notre propos
En matière de...
Sorti du CNSMD de Lyon, le Collectif ÈS est une compagnie de danse contemporaine qui « cherche, fouille, creuse à trois » autour de la création. En parallèle, ils collaborent, chacun, avec d’autres chorégraphes et artistes (notamment Boris Charmatz, Sylvain Groud, Yan Raballand). Leur dernière pièce 1ère MONDIALE vient d’être créée aux Subsistances dans le cadre du Moi de la Danse.
Karaodance 9 février Moi de la Danse Les Subsistances, Lyon 1er Hippopotomonstrosesquippedaliophobie* 12 février Théâtre des Halles Avignon (84) I wanna dance with somebody 14 février Salle de Montfavet Avignon (84)
Jean-Yves, Patrick et Corinne 7 avril CDCN La Briqueterie Vitry-sur-Seine (94) 10-20 juillet Festival OFF d’Avignon
numéro 05 - fév. 2019
Enna Pator©
1ère MONDIALE 16 mars Lux Scène Nationale Valence (26)
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carte blanche
Nous sommes le Collectif ÈS. Jérémy, Sidonie, Émilie. Nous sommes danseurs, interprètes et coauteurs : nous créons des pièces de danse ensemble, depuis 2011. Faire œuvre collective est à la fois notre outil et notre propos. Cette dimension teinte chacune de nos pièces au plateau, mais aussi des objets plus hybrides, avec une forme participative et engageante pour le public, comme le bal I wanna dance with somebody ou le Karaodance.
SAISON 18/19
Dernièrement, nous nous sommes attaqués à la petite dernière, 1ère MONDIALE – c’est le titre de la pièce. C’était aux Subsistances de Lyon fin janvier. Pour celle-là, comme pour toutes les autres, nous avons gardé notre obstination à créer à trois. Mais cette fois, on s’y est pris différemment : on a démarré chacun de notre côté, on voulait se mettre chacun au challenge de développer son propre solo. Une première fois pour nous. Puis on a rassemblé les idées, les histoires, les essais chorégraphiques, les univers musicaux de chacun. John Travolta, Maurice Béjart, le tube commercial Despacito sont, dans les grandes lignes, nos points de départ. On s’est amusé à tout découper, à croiser les partitions, à observer les coïncidences qui donnaient lieu à des rencontres, à des questions-réponses, à des absurdités aussi peut-être, à un sens commun parfois. Prévert
Y. MOREAU & LÉO C.OLIVIER CALI CHANTE FERRÉ 22 07 & 23 MARS NOV. 18 19
Créer ensemble pour faire des solos ou réaliser des solos pour parler de ce qui unit, drôle de paradoxe. "Pas tant". Ça nous est venu. À force d’éprouver tous les jours un dialogue constant entre soi, ses inspirations, ses aspirations, ses doutes ; et le "plusieurs", sa force, sa richesse de n’être jamais unilatéral, son imaginaire commun, ses folies.
Rosemary Standley & Dom La Nena
BIRDS ON A WIRE 19 MARS 19
Ce partage pour travailler son regard : prendre conscience de son point de vue et savoir en changer. La multiplicité des regards que nous expérimentons dans ce trio créateur, et avec chacun de nos collaborateurs, est aussi une chose que nous voulons transmettre à travers la création. Parce que c’est quelque chose de bien plus large que nous trois. Dans un monde où le chacun pour soi, le délit de solidarité et la réussite personnelle sont à la mode ; d’autres nous parlent aussi de "vivre ensemble", d’être solidaire, de se rassembler. C’est politique, parce que cela concerne tout le monde, mais savons-nous vraiment le faire, en avons-nous vraiment l’opportunité ?
Ceux qui m’aiment...
PASCAL GREGGORY 06 MARS 19
MACHINE DE CIRQUE 12 & 13 MARS 19
THERAPIE TAXI / GRINGE / GASPARD PROUST / KHEIRON / RACHID BADOURI / VINCENT DEDIENNE / JEAN-REMI CHAIZE / FEU! CHATTERTON / CAMILLE COTTIN / JEAN-LUC REICHMANN / MATHILDE SEIGNER / GERARD JUGNOT / GUILLAUME MEURICE / NADIA ROZ ...
Créer devient alors cette opportunité de le vivre vraiment, pas uniquement de le penser. Travailler le corps, entrer en action, utiliser des matières ou des intentions physiques concrètes pour s’engager avec toute sa chair et son âme. Être tout simplement présent. Un état que l’on peut atteindre non seulement individuellement, mais aussi collectivement. Les autres aident, donnent envie de pousser les paroles de chacun au plus loin jusqu’à ce qu’un discours commun s’en dégage. Parce que tous les corps sont intelligents, communiquent et comprennent plus vite que nos pensées ; les idées circulent, se transmettent et se transforment. C’est cette énergie que nous voulons défendre pour continuer d’inventer, et de réinventer.
Locations : Fnac, Carrefour, Géant, Magasins U, Intermarché, www.fnac.com et sur votre mobile.
escollectif.com
Réservations : 04 72 10 22 19 LYON
www.radiant-bellevue.fr 5
CALUIRE
BELLEVUE SAS, 1 rue Jean Moulin, 69300 Caluire - Siret 751 743 618 00025 - Licences n°1-1058565, n°2-1058566, n°3-1058567 © Fred Chapotat /Jeremiah /André rau / William Théberge
Michel Cavalca©
rendez-vous
après la fin ___ Maxime Mansion, l’homme-orchestre Maxime Mansion est un jeune homme discret. Il apparaît parmi les quatre artistes retenus par Schiaretti. à ce titre on verra en mars, au TNP, sa création Inoxydables. Rarement en pleine lumière, cet acteur et metteur en scène de talent est pourtant la cheville ouvrière du festival En Acte(s) qui œuvre à faire connaître de jeunes auteurs à travers des mises en espace théâtralisées. « J'ai du mal avec le mot "mise en scène". Je me sens plus proche de ce qu'on appelle la régie, qui consiste à réunir des talents et à faire en sorte que tout s'accorde, ce que je fais dans En Acte(s). Julie Guichard m'a rejoint pour faire vivre la plateforme que j'avais laissée en jachère ces derniers temps. C'est une vitrine pour ceux que l'écriture contemporaine intéresse, principalement de théâtre. Je mets très haut le plaisir du jeu car c'est lui qui m'a amené à lire, à penser. C'est pourquoi le festival exige que les textes soient sus et joués, non simplement lus. Il est avant tout un art de la voix et de la fragilité humaine. Seule la générosité d'un acteur qui se lance sur un plateau lui donne sa noblesse. » T.M.
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JEUNE CRÉATION
lyon, pÉpiniÈre de thÉÂtre Par Trina Mounier
Ce mois de février sera l'occasion de vérifier grandeur nature que Lyon regorge de jeunes talents et n'a à craindre ni une crise des vocations ni l'absence de relève. Cette dernière est là, et plutôt trois fois qu'une !
Ils s'appellent Étienne Gaudillère, Louise Vignaud, Maxime Mansion, Julie Guichard, Baptiste Guiton, Chloé Giraud, Maud Lefebvre… La liste n'est pas exhaustive et même, sans doute, très injuste. Ils ont une petite trentaine d'années. On a déjà consacré à certains d'entre eux, ici un portrait, là 6
l'annonce d'un spectacle à l'affiche. Ce fut le cas pour Louise Vignaud avec Rebibbia, pour Étienne Gaudillère avec Pale Blue Dot, pour Juliette Rizoud et sa Tempête. Et ce n’est pas fini tant leur activité est dense ! Certains seront, en février, sur les planches de plusieurs théâtres : Julie Guichard et Baptiste
rendez-vous
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Michel Cavalca©
Julie Rossello-Rochet et Lucie Rébéré Duo de dames de théâtre Une météore vive, résolue, brillante... Telle fut l’écrivaine Albertine Sarrazin (1937-1967) à qui Julie Rossello-Rochet et Lucie Rébéré consacrent le spectacle Sarrazine1 à la Comédie de Valence. La dramaturge et la metteuse en scène sont membres de son collectif artistique2. L’idée naît du désir de la comédienne Nelly Pulicani d’incarner « une figure forte de femme ». Celle-ci lit cinq fois L’astragale, texte le plus connu de la romancière, en parle à Julie et l’entraîne sur les traces d’Albertine dans le sud de la France… Objectif : écrire la pièce que Lucie met aujourd’hui en scène, avec Nelly dans le rôle-titre. Membres de la jeune garde théâtrale régionale, elles aussi comédiennes, Julie Rossello-Rochet et Lucie Rébéré n’en sont pas à leur premier fait d’armes commun. Les amies d’enfance se sont retrouvées après leur passage en cours de mise en scène au Conservatoire, pour Lucie, ou en classe d’écriture dramatique à l’Ensatt, pour Julie. Ensemble, elles créent leur compagnie, La Maison, en 2014. Elles inventent entre autres Du Sang sur les Roses (2012), Cross, La fureur de vivre (2016) ou, l’an dernier, Atomic man, chant d’amour… Pour chaque pièce, disent-elle, « nous partons de ce qui nous touche, comme femmes et citoyennes ». Puis la dramaturge compose une « matière à jouer » que la metteuse en scène se sent « libre de transformer au plateau ». En confiance. F.R. Création le 7 mars à Saint-Jean-en-Royans (26). En tournée dans le cadre de la Comédie Itinérante, 7 mars au 10 avril Elles sont aussi artistes associées au Théâtre de Villefranche-sur-Saône.
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TNP, Villeurbanne
Meute Julie Richard/Perrine Gérard Après la fin Dennis Kelly/Baptiste Guiton Jusqu’au 21 février Petite Iliade en un souffle Julie Rossello-Rochet Julie Guichard 12 au 30 mars
Inoxydables Julie Ménard/Maxime Mansion 20 mars au 6 avril Projet audacieux ! Détestable pensée ! Ensatt/CNSMD Lyon 11 au 20 avril
À L’AFFICHE, AILLEURS Guiton font partie des artistes choisis par Christian Schiaretti pour intégrer son cycle de transmission. Ils seront au TNP. La première présente Meute, une pièce sur le cycle de la violence et de la vengeance écrite par Perrine Gérard. Cette dernière, lauréate, après sa sortie de l'Ensatt, des Journées de Lyon des Auteurs de Théâtre, a déjà beaucoup écrit, pour Philippe Delaigue notamment. Elle fait partie de ces jeunes auteurs émergents sans lesquels le théâtre serait, sinon moribond, du moins poussiéreux. Quant à Baptiste Guiton, il monte avec le comédien Thomas Rortais, en pleine ascension, une pièce de l'auteur anglais Dennis Kelly, Après la fin, une histoire d'amitié confrontée au chaos du monde… D'autres s'inscrivent aussi dans un projet commun, comme la vingtaine d'artistes rassemblés dans le Collectif X. C'est le cas de Maud Lefebvre avec Maja, au théâtre de La Renaissance : un spectacle jeune public qui renouvelle profondément le genre. Sur scène, à ses côtés, Arthur Fourcade dont La Crèche vient d'être présenté à La Mouche et à l'Élysée (lire p.27, «L'affaire Baby-Loup» Mécanique d'un conflit).
Ces assemblages ne doivent rien (ou pas grand-chose) au hasard. Si les affinités sont essentielles, il est clair que le parcours de formation joue un rôle fondamental. Les grandes écoles, que sont l'Ensatt et la Comédie de Saint-Étienne, avec leurs cursus longs, représentent une fameuse pépinière d'artistes qui, à l'issue de leurs travaux de fin d'études, ont plaisir à se retrouver. N'oublions pas le rôle important que joue aussi le Conservatoire de Lyon dans cette configuration. Quant au NTH8, par le biais du compagnonnage, il met le pied à l'étrier de nombreux jeunes artistes, à commencer par Étienne Gaudillère. Chloé Giraud pourrait faire figure d'électron libre. Issue du Conservatoire de Lyon, elle suit Gwenaël Morin à la grande époque, lorsqu’il monte Les Molière de Vitez, puis Les Tragédies de Juillet. On remarque très vite ce petit bout de femme déterminée, ce qui l'amène à jouer la nonne fantasque, sous la direction de Samuel Achache, dans La Chute de la maison Usher à Fourvière. Une consécration ! Elle sera prochainement au NTH8 dans une création collective (lire p.24, Quatre Parques tissent leur histoire). Enfin, il faut saluer le travail de nombreuses 7
ÉCRITS À VIF Théâtre de L’Élysée, Lyon 7e 1er et 2 mars MAJA Collectif X/Maud Lefebvre Théâtre La Renaissance, Oullins 4 au 16 mars ATOMIC MAN, CHANT D’AMOUR Julie Rossello-Rochet Lucie Rébéré Théâtre Les Arts, Cluny (71) 10 mai Théâtre Dijon Bourgogne - CDN, Dijon (21) 30 mai au 2 juin
salles, qui sont de véritables rampes de lancement. Les plus connues sont, bien sûr, le Théâtre de l'Élysée et les Clochards Célestes qui font de ces découvertes l'essentiel de leur programmation. Mais Les Marronniers et le Théâtre de l'Iris ouvrent aussi leurs portes à ces compagnies débutantes. Sans oublier les initiatives qui entretiennent une émulation, comme Écrits à vif, lancés par Patrick Penot, qui proposent aux élèves du Conservatoire d'explorer des écritures contemporaines. numéro 05 - fév. 2019
portrait
AGAR AGAR Transbordeur Villeurbanne 9 février à 20h30 transbordeur.fr
La synth-pop tous crocs dehors Par Anne Huguet Photo Racket
Après un premier EP Cardan (2016) enthousiasmant, le duo parisien Agar Agar a joyeusement confirmé avec The Dog and The Future, sorti en septembre dernier, qui surprend tous azimuts. Leur électro-pop disco piquante alterne rythmes dansants à l’efficacité redoutable (Fangs Out) et morceaux plus charnels et ralentis (Gigi Song) où la voix ensorceleuse de Clara fait merveille.
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portrait
D A
... Comme Agar Agar, donc. En pleine vague veggie, l’agar agar ou gélatine de mer – obtenu à partir d’algues bouillies – est devenu tendance pour ses propriétés gélifiantes 100 % naturelles. C’est aussi le nom de scène d’un duo arty sans complexe qui casse la baraque. On doit à Armand ce nom intrigant. Il est myrmécologue, entendez qu’il élève chez lui des fourmis, et nourrit ses petites pensionnaires avec de… l’agar agar. De là à en affubler son groupe, il n’y a qu’un pas.
B
... Comme Beaux-Arts. Ils se rencontrent à l’École nationale supérieure d’Arts de Paris-Cergy (ENSPAC). Elle, Clara, 25 ans, voix et machines, plutôt branchée sculpture et rock garage – elle a déjà tourné avec son groupe, Cannery Terror, aux États-Unis – ; lui, 26 ans, synthés et machines, musicien et dessinateur féru d’art vidéo. Composition musicale, mais aussi tableaux, dessins ou vêtements sont autant de terrains de jeux créatifs pour ces deux toucheà-tout. Autre passion commune ? Les jeux vidéo et surtout The Sims qui inspire le morceau Shivers.
C
... Comme complicité. La force du duo lorsqu’ils composent. Ils insistent : ils créent à deux dans une véritable émulsion d’idées et de sons. Après « une baraque » en Normandie pour leur premier 4-titres, ils se sont isolés dans une maison à Biarritz pour dessiner, peindre, écrire et composer… en osmose. Pari réussi.
... Comme dog. Animal fétiche ? Sans doute ! Ils rigolent de s’imaginer en « petits chiens joueurs ». Non contents d’avoir déjà invité sur scène un chien pour faire les chœurs, il y a aussi un canidé sur la pochette stylisée, signée Keith Rankin, de leur premier album The Dog and The Future. Ce 10-titres classieux de pop futuriste est gorgé de boucles de synthés aux sonorités acides et de bricolages savants, tandis que la voix suave et envoûtante de Clara habite littéralement chaque titre. Variée, énigmatique, sombre, charnelle, mystique : voilà autant d’adjectifs qui collent à la musique du duo acid-disco ou synth-pop.
E M P
... Comme esthétique. Identité visuelle forte et univers léchés en 3D et VR*, leurs clips sont signés par la jeune garde du cinéma français : de William Laboury à Anton Peretjatko en passant par l’actrice Garance Marillier. Assez bluffant. © Giovanni Nardi
... Comme MAO. Des bruits courent qu’Armand aurait commencé à composer après avoir dégoté un CD de MAO dans une boîte de céréales. Légende urbaine ? ... Comme Prettiest Virgin. Plus de cinq millions de vues sur YouTube pour ce tube qui les a fait connaître. Entêtant à souhait. In fine c’est bien sur scène que l'on savoure pleinement l’électro-pop technoïde du tandem, la présence hypnotique et la voix incantatoire de sa chanteuse emportant tous les suffrages.
Forêts verticales et métropoles biodiverses
Stefano Boeri architetti Exposition au CauE RhônE MétRopolE
du 29 janvier au 13 avril 2019 commissaires d’exposition
Stefano Boeri Architetti, Ad Lib architecture, Fabien Brisson architecte
* VR ou réalité virtuelle
Avec le soutien de la Métropole de Lyon, du Département du Rhône et Paysages Actualités
+ d’infos www.caue69.fr
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déambulations
02.02.19 20h30
Punk heroes
musique
Ils ont connu l’explosion du punk à Londres, époque 76/77, et peuvent se targuer d’avoir, en 1976, ouvert pour les Stranglers ou participé au premier festival punk au 100 Club à Londres. Quarante ans plus tard, The Vibrators (littéralement "les vibromasseurs"), reformés en 1996, ont bien vieilli. Mais forts de leur fameux "tube" Baby baby et d’un premier album Pure Mania (1977) entré au panthéon des incontournables punk de tous les temps, ils entretiennent vaillamment la flamme. L’air de rien, les Londoniens ont produit vingt-trois albums, sortant fin 2017 une nième galette, Past, Present and into the Future. La voix, plus garage que punk, semble avoir résisté, la qualité mélodique des chansons demeure, manquent juste, peut-être, le jus et la hargne d’antan. A.H. Les Abattoirs, Bourgoin-Jallieu (38) lesabattoirs.fr The Dead Kiwis
07.02.19 20h00 On découvre un peu par hasard son électronica rêveuse presque initiatique et on tombe dedans. Addiction. Thylacine est un maîtremachine inspiré, aussi saxophoniste à ses heures perdues, qui n’a de cesse de vous entraîner dans des odyssées fantasmées. Après Transsibérien (2015), enregistré dans un train entre Moscou et Vladivostok, c’est l’Argentine qu’il sillonne à bord d’une caravane-studio pour livrer ce concept-album, Roads vol. 1 (sortie fin janvier 2019). Des voix lointaines, des sonorités locales (avec le charango*), ces textures électro vaporeuses, le bruit du vent, la beauté des paysages, de l’émotion, de la tendresse, ses nouvelles compositions La Belleue racontent tout cela. Sur scène, c’est tout aussi Électriq (38) le Grenob à 20h dépaysant, beau et mystérieux à la fois. A.H. 8 mars L’Épicerie Moderne, Feyzin epiceriemoderne.com
EZProduction.fr©
Roadtrip initiatique
09.02.19 20h30
*Sorte de petite guitare qui serait originaire de Bolivie
Hardcore made in Lyon Deux ans après la sortie de l’EP Karate Karnage et leur entrée remarquée dans le milieu hardcore français, les Lyonnais de The Dead Kiwis célèbrent la sortie de leur tout premier album Systematic Home Run (28 janvier). Dans la lignée d’un Dillinger Escape Plan, le quintet mêle riffs et structures complexes, tout en gardant une vraie énergie brute, lui conférant une puissance remarquable en live. R.B. Le Farmer, Lyon 1er LeFarmerLyon
13.02.19 20h00
Icône des années 80
Thylacine
numéro 05 - fév. 2019
Fabien Tijou©
Attention évènement ! Membre iconique et voix inoubliable du célèbre groupe Dead Can Dance, Brendan Perry s’annonce sur scène en février, en amont de la sortie de son troisième album solo prévu pour l'automne. Entre influences arabisantes, ambiances médiévales et sonorités synthétiques, les nouveaux titres, ainsi que des morceaux issus de ses deux précédents opus, permettront de patienter avant la prochaine tournée française des Dead Can Dance (10e album en préparation). V.A. Ninkasi Kao, Lyon 7e ninkasi.fr/agenda 10
Franck Alix©
Aquaserge
Ovni musical Parmi la très sélective programmation de l’Opéra Underground figurent bon nombre de pépites. Tel l’excellent Aquaserge, véritable ovni du paysage sonore français, logé quelque part entre free jazz, rock, pop et musique baroque, mixant chansons surréalistes et autres influences improbables... Riche d’une large palette de styles, le collectif toulousain livre des expérimentations à l’excentricité toujours distinguée. Ces musiciens virtuoses issus du Conservatoire ont su s’inventer un monde aux contours changeants, émaillé de nombreuses collaborations, dont Acid Mothers Temple, Stereolab ou encore April March. Ils vous donnent rendez-vous dans les souterrains de l’Opéra pour découvrir leur dernier opus en compagnie du Quatuor Wassily. V.A. Opéra Underground / Amphi de l’Opéra opera-lyon.com
22.02.19
20h30
Brut et sans chiqué 20.02.19 20h30
Dark folk intimiste
Pas de temps mort du côté de la Grande-Côte et du petit Kraspek Myzik, qui, à peine son Plug & Play bouclé, relance la machine avec une programmation mensuelle toujours défricheuse, souvent confidentielle. Rufus Coates & Jess Smith est un duo irlandais, actuellement basé à Berlin, ou la rencontre du troisième type entre la voix grave et profonde de Rufus Coates et celle tout en volutes de sa compagne Jess Smith. Le duo prépare un nouvel album pour 2019. Univers habité par des cordes et ces deux voix entremêlées, ambiances crépusculaires et une musique un peu austère qui se balade entre indie, folk et blues : il faut se laisser emporter par la beauté ténébreuse de ces chansons, sans arrière-pensée. A.H.
« Nous composons sur scène ». D’accord. Warmduscher est un combo anglais punkoïde du genre illuminé qui officie entre garage-rock, kraut-punk et blues sous acide. Ça éructe pas mal, ça hurle, ça part dans tous les sens, c’est abrasif à souhait. Et sur scène c’est totalement barré, furieusement bordélique. On retrouve au lineup quelques chauds lapins et bad boys du South London, dont des transfuges de Fat White Family, de Paranoid London et de Childhood. De sacrés gages de qualité pour les adeptes du genre. A priori on ne sait jamais qui sera vraiment sur scène ni ce qu’il va s’y passer, même si leur dernier opus Whale City (2018), enregistré live en deux jours, n’est pensé et vécu que pour la scène ! Comme amuse-gueule, les New-Yorkais de Surfbort et leur punk braillard et graveleux ne devraient pas faire tache pour lancer les hostilités. A.H. Les Abattoirs, Bourgoin-Jallieu (38) lesabattoirs.fr
26.02.19 20h45
Underground Heroes
Warmduscher
DR©
Kraspek Myzik, Lyon 1er kraspekmyzik.com
04.03.19 20h30
Tamino, prince d’égypte
Une énergie primitive, crue, portée par des guitares déchirantes et des rythmiques infernales : The Anomalys tient son rang de « groupe le plus sauvage sur scène » depuis ses débuts en 2010. Venu d’Amsterdam, le power trio propose des titres punk garage teintés de rockabilly… sans fioritures. Cinq ans après Deadline Blues, le groupe annonce une nouvelle sortie imminente, à découvrir live. R.B.
Tamino a tout pour plaire. Avec sa dégaine nonchalante et son regard noir ténébreux, sa voix se bal(l)ade de Cohen à Buckley, parfois, sur le fil, à la Thom Yorke… Sans rien envier à ces trois-là, Tamino est un songwriter à part entière. D’origine égyptienne, il revendique sa généalogie avec fierté – il est le petit-fils du chanteur Moharam Fouad. La fierté d’ailleurs, il en fait son affaire. Tamino n’aime pas le misérabilisme de ses compères, et l’on trouve dans ses chansons une résilience à toute épreuve. Son album est un album "photo", à écouter et « regarder » mille fois. N.V.
Le Trokson, Lyon 1er trokson
Transbordeur, Villeurbanne transbordeur.fr 11
numéro 05 - fév. 2019
déambulations
15.02.19 20h00
FORME & FONCTION
Design et merveilleux Jusqu’au 21 avril mamc.saint-etienne.fr
Joris Laarman Lab ©
Joris Laarman, Chaise Adaptation Chair (Gradient Cooper Chair) Achat, 2017. Centre Pompidou, Paris Musée national d’art moderne-Centre de création industrielle.
Le design fait pour nous
des merveilles Par Emiland Griès
Saint-Étienne prend son rôle de capitale du design au sérieux. Alors que la Cité du même nom clôt L’Ornement est un crime, qui exposait un mobilier minimaliste aux formes rationnelles, le Musée d’art moderne et contemporain (MAMC) présente Design et merveilleux, mettant en valeur les relations polymorphes et fécondes que la conception humaine entretient avec la Nature.
D
esign et merveilleux : voilà un titre bien énigmatique qui aiguillonne la curiosité ! Quelles merveilles peut donc recéler le design ? Et que signifie ce mot "merveilleux" ? Pour répondre, il faut s’en remettre à la scénographie de cette exposition qui entraîne le visiteur dans un labyrinthe blanc, à la découverte des différentes facettes du sujet. Les larges et hauts volumes du Musée de Saint-Etienne, offrent, par leur neutralité, un écrin valorisant à la centaine d’objets, numéro 05 - fév. 2019
présentés dans une grande économie de moyens. Les thèmes déclinés sont extrêmement variés, tels La nature comme ornement, Arabesques, Ornement et numérique, Fractales... Ils se découvrent dans une logique de progression allant du simple au complexe, de l’évident au cérébral. Deux rappels historiques introduisent l’exposition. En forme de prologue, l’univers de Piranèse est convoqué avec ses architectures classiques en ruine envahies de végétation. Façon de clore le débat de la suprématie entre création humaine et 12
nature ? L’exposition n’en est ni le lieu ni l’arbitre. L’expérience du design radical des années quatre-vingt est également rappelée avec le mobilier néo-primitiviste d’Andrea Branzi. Disposant des branches de bouleau brutes en dossier d’un banc laqué gris ou comme montants de bibliothèque, il juxtapose matériau naturel et éléments fabriqués dans un même objet, interrogeant ainsi le rapport entre nature et production industrielle. Philippe Starck, comme un clin d’œil, vient compléter ce propos introductif, avec son assise haute W. W. Stool, dont les formes souples vert pâle renvoient à un
FORME & FONCTION
Vue de l’exposition « Design et merveilleux » au Musée d’art moderne et contemporain de Saint-Etienne Métropole, 1er décembre 2018 – 21 avril 2019
Charlotte Piérot / SEM ©
modèle organique trouble et mal définissable. L’exposition présente ensuite des objets du quotidien tels des lampes, des fauteuils, des tables, tous issus de démarches conceptuelles récentes. À partir des années 2000, l’informatique et le numérique, comme nouveaux outils de conception, ouvrent des opportunités encore jamais éprouvées par les designers. Les objets inventés pour servir l’homme au quotidien peuvent donc être générés par le calcul des logiciels de dessin. Cette surpuissance créatrice renvoie à la question fondamentale de l’origine conceptuelle : les designers ne sont plus les uniques démiurges à extraire des objets de leur cerveau ! Mais quelles règles, quelles directions donner à cette puissance de calcul ? Et quelles formes inédites peuvent être engendrées ? Les processus biologiques de croissance sont pris comme référence par les designers, car sans limite d’imagination. La morphogénèse* produit des formes complexes, aux géométries, aux couleurs, aux matières stupéfiantes et apparemment savantes, bien que sans participation humaine. Les nids d’insectes, les coraux marins, les concrétions minérales, les cristaux de neige, les fleurs et légumes sont autant de sources d’inspiration
par leur répétitivité, l’ordonnancement et l’accumulation de leurs formes et motifs. À mi-parcours, un cabinet de curiosités mêle, non sans humour, spécimens naturels et objets qui s'en inspirent plus ou moins littéralement. L’ornement s'impose à nouveau dans le design de l'objet fonctionnel. L’industrialisation n’est plus synonyme de rationalité, comme le propose la chaise échevelée Solid C2 de Patrick Jouin, produite par imprimante 3D. Ce design prend son origine dans le monde minéral ou végétal. Il propose une vision globale qui métisse sciences informatiques et naturelles. Il en résulte des objets utiles, aux formes évoquant la puissance tellurique ou la vitalité du monde végétal et animal en perpétuelle évolution. Le merveilleux, qui interpelle tant, serait-il donc mêlé à nos vies et toujours sous nos yeux ? La Bon Bon Chair de Marcel Wanders, galet creusé et vide, matérialisé par une fragile dentelle de cordes rigidifiée et dorée, en est un bon exemple. Elle combine les références au travail de l’érosion, à l’artisanat traditionnel et aux procédés industriels dans un objet polysémique. Merveilleux, non ?
___ ARABESQUE
*Morphogénèse : processus de développement d’une structure minérale ou d'un organisme.
Charlotte Piérot / SEM ©
Andrea Branzi – Banc Animali domestici, 1985 – Bois laqué gris, branches de bouleau. 224 x 140 x 72 cm. – Achat, 1988. Numéro d’inventaire : FNAC 89033 – Dépôt du Centre national des arts plastiques – ministère de la Culture et de la Communication, 2007
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Ce motif ornemental s'inspire de la nature. Rivière qui sinue en cherchant la pente, plante grimpante qui lance ses lianes à la recherche de supports : cette forme souple et apparemment aléatoire a inspiré les artistes et les concepteurs à travers les époques, les cultures et les continents. Elle semble en effet libérer l’esprit humain de ses propres limites pour abolir toute notion géométrique pourtant intellectuellement réconfortante. Centralité, symétrie, ligne droite : plus rien n’existe. L’exposition présente à ce titre le fauteuil Cross Check de l’américain Frank O Gehry. Les objets, les bâtiments qu’il conçoit, tels le Musée Guggenheim à Bilbao ou la Fondation Louis Vuitton à Paris, présentent des formes désarticulées et apparemment libérées de toute contrainte et régulation. Il en est de même pour ce fauteuil conçu en 1992. Il est constitué de bandes de bois laminé qui se déploient souplement dans l’espace, s’entrelacent et s’enroulent pour former, par le miracle des nœuds, une assise, des accoudoirs, un dossier et un piètement.
numéro 05 - fév. 2019
à la moulinette
Emmanuel
Manu Payet, radiostar, acteur, panda, humoriste et maître de cérémonie des César 2018. Dans Emmanuel, il retrouve son prénom intégral et opère un flash-back fun, mais pas que, dans un one-man-show à nu.
manu payet
à nu Interpellé par Florence Roux Photo D.R.
Quel fut le premier rire d’Emmanuel ?
Mes premiers spectacles en CP, pour faire rire la classe. Quel animal est donc Emmanuel ?
Un panda… Longtemps avant de doubler Kung Fu Panda, j’aimais son côté placide, mais pas commode. Quel personnage de BD est Emmanuel ?
Benoît Brisefer, ce garçon qui perd ses super-pouvoirs quand il s’enrhume. Quelle musique choisit Emmanuel ?
Where is my mind des Pixies. Quel autre spectacle ?
La danse du diable où Philippe Caubère se raconte seul en scène : bluffant ! Quel film a fait Emmanuel ?
Retour vers le futur, fondateur... Quelle série aime Emmanuel ?
Les Soprano, Breaking bad, Friends... Emmanuel parle des séries, mais il tient plus du film, moins éphémère. Quel acteur ou quelle actrice adore Emmanuel ?
Meryl Streep ou Marion Cotillard. Quand elles jouent, ça devient la vérité.
numéro 05 - fév. 2019
Quel est le look d’Emmanuel ? En tenue d’Ève, comme sur l’affiche ?
Au contraire : jeans, baskets, gros pull et lunettes de soleil. Quel est l’alcool d’Emmanuel ?
Tous les vins.
À quelle(s) addiction(s) s’adonne Emmanuel ?
L’alcool, la cigarette, les taxis, la nuit, les grandes tables bruyantes bien achalandées. Quelle arme adopte Emmanuel ?
La parole.
Quel est le péché d’Emmanuel ?
La gourmandise… Le spectacle est gourmand, opulent, il se donne.
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Emmanuel 6 février Théâtre Le Rhône, Bourg-lès-Valence (26) 7 février Bourse du Travail Lyon 3e 8 février Salle Marcel Sembat, Chalon-sur-Saône (71)
Les photos de Dolorès Marat cassent les codes : entre peinture et photographie, silence et tumultes, distance et épiphanies, elles creusent une brèche de couleurs dans le réel. Absente depuis presque dix ans, elle revient avec un nouveau recueil, Mezzo Voce. Il était temps.
Photos Dolorès Marat
Par Jérôme Bertin
bleue
L’heure
Jambes, manteau, métro
Le succès s’impose malgré le mépris de certains professionnels : des photos mal composées, arrachées à l’instant, que seul le procédé Fresson* arrivait à peine à sauver. On lui reproche de vouloir photographier New York. C’était ne pas voir que Dolorès Marat cherchait ailleurs : « J’avais besoin de confronter mon regard, de savoir si je pouvais saisir autre chose ; peu importait que mes sujets aient été mille fois photographiés ».
Dolorès Marat travaille alors pour les "grandes" maisons de couture : quelques jours à photographier les vitrines des magasins. « En fin de reportage, je me perdais dans les rues. Je n’avais qu’une heure ou deux pour moi. »
Dans les années 2000, à New York, Berlin, Palmyre ou Bastia, avec un peu de chance, on pouvait voir une femme errer seule, dans les rues, entre chien et loup. Dans des endroits souvent périlleux qu’elle quitte au premier métro, quand elle se sent en danger. Son Leica bien protégé.
La femme du musée grévin
Dolorès Marat
Je ne prends qu’une seule photo quand l’émotion vient, à l’heure bleue
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New York USA (Marval, 2002)
Illusion avec Marie Darieussecq (Filigranes, 2003)
Paris, correspondances (Éditions La Pionnière, 2015)
Mezzo Voce (Éditions Fario, 2018)
Exit New york
* Usage d’un papier spécifique approfondissant la couleur
numéro 05 - fév.2019
Des artistes qui l'accompagnent Mickael Ackerman, Antoine d'Agata, Diane Arbus, Vivian Maier
Aujourd’hui elle rêve de photographier le Mont Ventoux, au matin, seule. Il lui faudra de l’aide pour accomplir cette ascension. Elle y pense le soir, sur sa terrasse, fumant la dernière cigarette de la journée. Un chat et le Palais des Papes, au loin, accompagnent ses pensées.
2018, les éditions Fario lui proposent une rétrospective. L’ouvrage est beau, chaque page semble un abîme : le gris d’un ciel jaune, un bateau comme un jouet sur un lac, des oies clopin-clopant dans un village oriental. S’il n’est pas rare pour un photographe de révéler un paysage, il est plus rare pour le spectateur de l’habiter au premier coup d’œil. Les photographies de Dolorès Marat sont ainsi : elles vous plongent dans l’ombre dense, où le cœur s’accélère peu à peu.
Ses photos sont à l’image de sa vie, faites de ruptures et de miracles. Une enfance rejetée (son prénom lui a été donné par la sage-femme espagnole qui l’a mise au monde) ; puis un métier de couturière et la rencontre avec un photographe de village qui l’embauche et lui apprend tout. « J’adorais ça, je ne lâchais jamais un client sans m’être assurée qu’il ait compris les bases de la photographie : la lumière, la vitesse, l’obturation. ». À Paris, elle est laborantine, développe les photos des autres en écoutant la radio dans la lumière rouge. Enfin, on lui propose de sauter le pas, de photographier les collections dans les vitrines. « Mais, je ne m’autorisais pas encore à faire des photos pour moi. Je gagnais si peu d’argent, je n’avais pas de quoi payer mes pellicules ». À quarante ans, elle passe à l’acte et publie. Ensuite ce sera la maladie qui la coince en Avignon.
Elle peaufine sa technique et se laisse guider par ses ressentis. « Je n’ai aucun projet. Je ne prends qu’une seule photo quand l’émotion vient, à l’heure bleue. Le matin, j’ai dix minutes, le soir j’en ai douze. C’est au développement que je sais si la photo est bonne. Je jette beaucoup. »
déambulations
08.02
23.03.19
L’histoire se répète… Huit ans après sa première exposition, Ludovic Chemarin© revient sur ses propres traces mais sous la forme génétiquement modifiée d’une marque. Fascinant pour les uns, dérangeant pour les autres, l’artiste souhaite, par sa démarche, pointer du doigt les problématiques artistiques contemporaines. Histoire sans fin se veut une expérience différente, dialoguant avec les multiples identités d’un même artiste. Ponctuée d’événements décalés, elle renouvelle les usages pour faire du spectateur un invité libre d’employer, ici, son temps pour lire, boire un thé, écouter de la musique. V.A.
arts visuels
09.02.19
« Cette fleur que personne ne regarde plus »
La BF 15, Lyon 1er labf15.org
En exposant le travail de Farida Hamak, codirectrice artistique des lieux et reporter de guerre au MoyenOrient, la galerie Regard Sud mobilise la mémoire. Celle du Jourdain et de ses riverains, témoins de l’Histoire, celle du visiteur devant ces fragments d’histoires. Sols arides, moutons fuyants, plants de salades, sources soufrées… Cette série de photographies serait intemporelle s’il n’était quelques indices. Comme le visage de George W. Bush dans un téléviseur, incursion du politique indissociable de ce bout de territoire. L’ accès au fleuve est condamné depuis la Guerre des Six Jours. L’ensemble du bassin est devenu zone militaire en 1967. Un interdit qui a dévié la route de la photographe vers la vallée, peuplée de femmes et d’hommes marqués par « le fleuve d’avant », du temps de la pêche et des bains, et par le fleuve d’aujourd’hui, qui « se meurt »… sans disparaître. Borderline. L.D.
10.02.19
Entre avant-garde et classicisme Derniers jours pour découvrir l’exposition consacrée à Roger de La Fresnaye au Musée Paul Dini. De nombreuses œuvres, parmi lesquelles des prêts rarissimes, dressent le panorama d’une carrière d’exception. Et viennent rappeler que derrière la figure de cette célébrité locale se cache un des grands noms du cubisme français qui a su réconcilier, à travers son œuvre fulgurante, avant-garde et tradition. À découvrir d’urgence. V.A. Musée Paul Dini, Villefranche/Saône (69) musee-paul-dini.com
Border Line, au détour du Jourdain Galerie Regard Sud, Lyon 1er regardsud.com
24.02.19
Quand la communication s’engage
Wadi Elrayan, le fleuve mirage, décembre 2005
numéro 05 - fév. 2019
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Farida Hamak©
Avec sa nouvelle exposition Attention : Logo ! consacrée au Secours populaire français, le Musée de l’Imprimerie poursuit son cycle dédié à l’histoire des identités graphiques. On découvre ainsi comment, depuis près de quarante ans, les caractéristiques de l’emblématique main ailée, signée du collectif Grapus, ont été mises au service de la solidarité et de la philanthropie, qui incarnent l’esprit de la célèbre association. Pas moins de 180 documents (affiches, cartes postales, autocollants, badges…) retracent ainsi cette épopée humanitaire et graphique, montrant à quel point l’inventivité éditoriale a réussi à porter haut des valeurs fortes. Un logo qui continue de faire mouche. V.A. Musée de l’Imprimerie et de la Communication graphique, Lyon 2e imprimerie.lyon.fr
déambulations
03.03.19
Les passages photographiques d’Ysel Fournet
Salon, 2018, galerie mfc-michèle didier
Ludovic Chemarin©
La chimie, l’anatomie et un complexe procédé de transfert des photographies sur la tôle ou le bois : le travail d’Ysel Fournet s’annonce sous le signe de la science et de la méthode. Mais dans ces images, l’étrange le dispute vite au trouble. L’organique condition des êtres – la vie, la mort, le passage – s’exprime dans une mise en scène poétique, parfois sombre telle une vanité, d’autres fois drôle ou lumineuse, quand cet homme pédale sur son vélo d’enfant, quand cette fillette vous fixe avec insistance, quand ces seins se dessinent en gros plan et que le relief irrégulier du support crée des accidents : griffures, nervures, froissements… La peinture n’est pas loin. F.R. Calliphora Galerie Vrais Rêves, Lyon 4e vraisreves.com
04.03.19
Claude en mode impérial Faire parler la pierre, le marbre, le bronze. Animer l’homme derrière la silhouette et les traits que saisirent les sculpteurs, quelques années après l’An zéro… Voilà l’ambition, réussie, du Musée des Beaux-Arts de Lyon avec l’exposition Claude, un empereur au destin singulier. Né à Lyon en 10 avant Jésus-Christ, devenu empereur à 51 ans, il a longtemps été décrit comme un être limité de corps et d’esprit, sans envergure. La recherche contemporaine montre au contraire qu’en quatorze ans de pouvoir, Claude eut une gestion avisée. Cultivé, attentif au pays, il soutint ainsi les notables gaulois dans leur demande d’accéder au Sénat. Lyon nti en conserve son discours retranscrit dans le bronze : la fameuse Table Claudienne. L’exposition retrace en sculptures, e Ferra Ferrant’au 3 mars u q poteries, monnaies, peintures et même films, la vie de ce Romain singulier. À Fourvière, au musée gallo-romain, s Ju ée, um-Mus Lugdun on 5e Ferrante Ferranti présente L’esprit des ruines, sur deux niveaux, ses photos des vestiges de l’Antiquité, en vibrant Ly écho à l’exposition. Pour l’artiste, « les pierres sont vivantes ». F.R.
Collection Tony Bertrand - DR©
Claude, un empereur au destin singulier Musée des Beaux-Arts de Lyon mba-lyon.fr
26.05.19
Une jeunesse sous surveillance Après Les jours sans consacrée à la France sous privation, le CHRD dresse le portrait de cette « Génération 40 » – ils avaient entre 13 et 21 ans – qui grandit sous l’Occupation. Cette jeunesse élevée dans l’espoir de la « der des ders », allait être surveillée et utilisée par le régime de Vichy, déracinée par l’exode, éloignée par le STO1, contrainte… ou révoltée. Une jeunesse plurielle dont la violence de l’époque n’empêchera ni les engagements collectifs nés avec le Front Populaire (JOC2, Jeunesse communiste), ni les actes de résistance. De la débâcle à l’immédiat après-guerre, l’exposition nous emmène sur la route de ces jeunes gens, ponctuée de bicyclettes, de témoignages sonores, d’objets du quotidien (comme ces protègecahiers ornés du visage glaçant du Maréchal Pétain) et des pages du journal intime de Denise Domenach-Lallich3, 15 ans en 1939. Des mots - parfois les derniers - et les jeunes visages de nos aïeux, à emporter avec soi pour les raconter aux suivants. L.D. « Génération 40 ». Les jeunes et la guerre. Centre d’Histoire de la Résistance et de la Déportation, Lyon 7e chrd.fr
Villefranche,fête fêtedu duserment sermentdedel'athlète l'athlète,1941 Villefranche, , 1941
Service du Travail Obligatoire - 2 Jeunesse Ouvrière Chrétienne - 3 à voir à l’ENSATT Depuis que nous sommes arrivés il pleut inspiré de Denise Domenach-Lallich et mis en scène par Tatiana Frolova. 4 au 15 février. ensatt.fr
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numéro 05 - fév. 2019
in vino
veritas
20 sur vin
Par Lucie Diondet Photos Jérôme Bertin
A Mélody en sous-sol Direction les collines drômoises pour un Crozes-Hermitage blanc qui nous laisse KO d’allégresse. Les Crozes blancs ne représentant que 8% de l’appellation, voilà une jolie rareté que ce Chaos Blanc, assemblage sec de deux cépages - Marsanne et Roussane dont les notes de miel et de fruits secs invitent à faire traîner la dégustation, de l’apéritif au dessert. Chaos Blanc, AOC Crozes-Hermitage Domaine Mélody (Mercurol, Drôme) Chaos Blanc, AOC Crozes-Hermitage Blanc, 2016 (23€) numéro 05 - fév. 2019
ntic Wine, petite échoppe nichée entre l’illustre Tour Rose et quelques tables étoilées, a quelque chose de rassurant. Sous la grande enseigne aux accents anglais et japonais, nulle vitrine intimidante. Les cartons s’accumulent contre les rondeurs de la façade vitrée. On entre, on s’attarde sous les deux haies d’honneur de nectars en verre. Nous sommes là chez l’un des dix meilleurs cavistes au monde et pourtant, avec son petit lavabo, son comptoir envahi d’objets populaires, le lieu n’a rien de solennel. On se sent vite à l’aise chez Georges Dos Santos et son équipe, surtout quand l’histoire débute avec un verre de Pouilly-Fuissé. Quand on s’étonne des guitares, vinyles et affiches dédicacés à l’entrée, on nous répond que tout se lie. L’homme aime raconter et partager.
On commence avec son goût pour la brocante, la photographie, le rock des années soixante-dix ou l’humour de Psikopat et d’Edika. S’ensuit l’inventaire : 17 ans d’âge, 96 000 bouteilles, 4 800 références, 127 millésimes depuis 1780, 80% des vins goûtés, 80 cartes étoilées… Et la petite leçon d’histoire : celle de l’enfant grandi 20
au bout de la rue, formé dans les cuisines voisines, revenu s’installer dans ce quartier « merveilleux de métissage, de partage et de rencontres » après avoir arpenté cinq années durant les coteaux de la planète. Oui, cette ancienne cave à mûrissement de bananes se devait d’accueillir les vins du monde, comme ses deux autres officines gérées avec quatre passionnés. Combien de cavistes invitent encore à explorer leurs sous-sols ? La visite est une aventure visuelle : sous la voûte classée, Bugey et Maranges côtoient Côte-Rôtie, Romanée-Conti et, bien sûr portos, spécialité de la maison. Plus étonnants, les crucifix en bronze et les ribambelles de babyfooteurs. Le calme est un trésor dans le « bouillonnement du meilleur et du pire ». Goûteur, acheteur, vendeur, Georges Dos Santos est surtout prescripteur. Un Chambolle-Musigny à ce groupe d’amateurs, ce Languedoc-là pour moins de 10€… Alors qu’un calvados antérieur à 1947 nous file des envies de tarte tatin, lui nous avoue son amour du vignoble de Bourgogne, arts et histoire obligent. Il admire ses « seuls artistes, ceux qui travaillent sa terre » et se délecte de la précision ancestrale de la toponymie de ses climats : Les Amoureuses, Les Crais, Les Pucelles… On apprend décidément tant avec le vin. Antic Wine vibre tous les jours, même le dimanche, sauf si Georges s’enferme dans une salle obscure ou organise un concert. Antic Wine 18 rue du Bœuf, Lyon 5e 04 78 37 08 96
Lettres & Ratures
JM BERTOYAS 8 février à 18h30 En dédicace Le Livre En Pente Lyon 1er
Lyon
à balle de bulles Par Marco Jéru
Si la région produit depuis longtemps un foisonnant vivier d'auteurs de bandes dessinées – notamment via l'école Émile Cohl à Lyon –, les éditeurs locaux, pionniers dans le 9e art dès 1945, affichent de nouveau un dynamisme remarquable. Derrière la grosse cylindrée Glénat et les "historiques" (Mosquito à Grenoble, Jarjille à Saint-Étienne), plusieurs petites maisons produisent des livraisons étonnantes. À l'heure où le festival d'Angoulême plie ses cartons, petit tour d'horizon.
D
epuis le super-héros Fantax (1946) et les fumetti1 Zembla et Blek le Roc dans les années cinquante (aux éditions LUG), la bande dessinée s'est toujours bien portée à Lyon. Il y eut ensuite les revues Strange et Marvel, publiées dans les années 70-80 par LUG puis par Organic Comix, le collectif Oeufécalje, la création de Terrenoire Édition la décennie suivante... Puis plusieurs maisons virent le jour au début du siècle : Tanibis, Arbitraire, Lapin, l'Épicerie Séquentielle (Les Rues de Lyon) ou plus récemment Mauvaise Foi. Respectivement fondées en 2000 et 2005, Tanibis2 et Arbitraire3 se font fort de développer des catalogues exigeants, riches d’auteurs désireux de jouer avec les codes du médium, autour de partis-pris graphiques audacieux. Issues toutes deux de la culture fanzine, sensibles à la sérigraphie plutôt qu'à la blogosphère, les deux maisons ont aussi en commun de préférer au réel, dont l'époque est friande, une veine fantastique et poétique. 1 2 3
Nom donné à la bande dessinée en Italie Membre fondateur : Claude Amauger Comité éditorial : Renaud Thomas, Juliette Salique, Pierre Ferrero
Après les dessinateurs Le Lièvre de Mars, Ivan Brun et Tristan Perreton, sans oublier le psychédélique Paul Kirchner, Tanibis défend à Angoulême Jesse Jacobs, un jeune et talentueux illustrateur canadien, qui signe Sous la maison. Sont ensuite prévus cette année Le Sortilège de la femme automate, un conte fantastique du stéphanois Alexandre Kha, une anthologie du dessinateur anglais Chris Reynolds, et une traduction d'Unreal City de D.J. Bryant (chez Fantagraphics). De son côté, Arbitraire vient de sortir le très coloré How to Stay Afloat (« surnager au quotidien »), une autofiction sans complaisance signée Tara Booth, jeune auteur américaine qui, dans une palette et un trait "art brut", conjugue développement personnel et exorcisme du quotidien. Suivront ensuite Puzzle de Zad Kokar, un espiègle Strasbourgeois également musicien à ses heures, les parodies d'actualité d'Antoine Marchalot (leumonde.fr) et l'anthologie de l'indéfinissable JM Bertoyas. Bonnes découvertes ! tanibis.net arbitraire.fr epiceriesequentielle.com 21
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trajectoires
GR avec JJR : Marcher & rêver, Lire & dire Michel Raskine Comédie de Saint-Étienne 14 et 15 février lacomedie.fr Après la fin de Dennis Kelly TNP, Villeurbanne 29 janvier au 21 février tnp-villeurbanne.com
PASSEUR D'ÉCRITURES
Le Monde renversÉ Collectif Marthe Les Célestins, Lyon 2e 15 au 24 mai theatredescelestins.com
Michel Raskine
On le rencontre souvent au milieu du public, dans les grandes salles comme les petites, spectateur avide et curieux. Michel Raskine a longtemps été à la tête du Théâtre du Point du Jour (de 1995 à 2010) et fait partie des rares metteurs en scène qui, à chaque spectacle, déplace un public de passionnés. On se souvient de Max Gericke, de Juste la fin du monde, de Huis Clos, plus récemment du Triomphe de l'amour ou de Quartett… Ce passeur d'écritures n’est plus programmateur, mais il connaît le théâtre, les acteurs, les "maisons". Il porte ce regard toujours exigeant mais attendri sur la création théâtrale et la découverte de talents. L'expérience n'a en rien entaché son credo : « Ouvrir des portes, ne rien fermer ». Par Trina Mounier Photo Jérôme Bertin
En tant que programmateur au Point du Jour, qu’est-ce qui guidait vos choix ? M.R. – Avec Guittier, on n’avait pas de théorie, mais une connivence qui a perduré tout le long de notre histoire commune et une "haute" idée des financements accordés : c'était avant tout l'argent de l'État, l'argent du public. La programmation ? Ce n’était pas difficile : je n’ai jamais cessé d’aller au théâtre. J’aurais même pu programmer de la danse tant j’adorais ! Sur le choix, aucune règle. Créations ou pièces en fonction de ce qu’on avait vu. On choisissait plutôt des compagnies que des spectacles. Le fondamental, c’était la fidélité. À Jouanneau, à tg STAN. Et à partir de Mademoiselle Julie à Gwenaël Morin. Personne en résidence, pas d’obligations liées à un cahier des charges… Qu’est-ce qui vous intéresse dans la formation d’acteurs ? M.R. - J’aime le travail de texte, je ne sais pas faire de l’improvisation, de l’écriture de plateau. Mais enquêter sur les textes, j’adore cela. Ce que je fais avec la promotion 29 de la Comédie de Saint-Étienne autour de numéro 05 - fév. 2019
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Jean-Jacques Rousseau. Je transmets mon plaisir de fouiller dans les mots ; on fait des découvertes ensemble. Si cela conforte leur envie d’aller voir tout seuls, j’ai gagné mon pari. Parlez-nous de quelques spectacles à découvrir prochainement. M.R. - Ce que j’aime le plus finalement, ce sont les acteurs. J’adore Marc Zinga, récemment (re)vu dans L’Échange mis en scène par Schiaretti. Cet acteur noir ne me déçoit jamais, très rigoureux, très respectueux, il trouve dans l’obéissance une extrême liberté. Thomas Rortais, encore, est un acteur parmi les plus brillants du moment. Sa rencontre compte pour moi comme la plus importante de ces dernières années. Prochainement au TNP dans Après la fin de Dennis Kelly… Enfin, je vous recommande vivement d'aller voir aux Célestins, en mai, quatre comédiennes formidables, d'anciennes élèves de la Comédie de Saint-Etienne, dans Le Monde renversé et son sujet improbable, dont le succès ne se dément pas.
- 20h00 s r a m 1 . n e V
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L
+
(RAPHAËLE LANNADÈRE)
ANAÏS
MUSIQUE
Køuples Menotti | Hindemith Wolf-Ferrari | Markéas Stephan Grögler Nicolas Farine Operact
nces a c a v s e d z Profite ger une soirée pour partaansons ! toute en ch
Opéra de chambre
du
au
mars
mars
07 09 Saison 2018 I 2019
INFOS ET BILLETTERIE EN LIGNE THEATRETHEOARGENCE-SAINT-PRIEST.FR 04 81 92 22 30 Théâtre Théo Argence - Place Ferdinand Buisson - Saint Priest
Oullins Lyon Métropole | 04 72 39 74 91 | www.theatrelarenaissance.com
Paul Bonmartel©
Bêtes de scènes
Une étoile pour Noël 7 et 8 février Théâtre de Villefranche theatredevillefranche.com Immortels de Nasser Djemaï Cie Paroles en Acte 6 au 10 mars Théâtre des Clochards Célestes clochardscelestes.com
Une étoile pour Noël
Nasser Djemaï
Singulière matrice d’une œuvre Par Florence Roux
Homme de théâtre grenoblois, Nasser Djemaï reprend en comédien son premier texte, Une étoile pour Noël. Un seul en scène "très peuplé" qu’il considère comme la matrice de ses autres pièces. Un titre au singulier, un seul en scène : Une étoile pour Noël se distingue de vos autres pièces. Que représente-t-elle ? La matrice de ce que je fais à présent. C’est ma première pièce, créée en 2005 . Elle contient tous les archétypes de mes personnages futurs. Si je suis seul sur scène, ce n’est pas un "one" man show ! Je joue vraiment huit rôles, inspirés de personnes connues pour la plupart, qui entrent petit à petit en interaction et qui participent au tourbillon général autour d’un adolescent. La pièce raconte une perte de repères, la "dévoration" par les autres qui, à force de bonnes pensées, finissent par détruire une personne. C’est universel. Qui est cette personne ? Nabil est jeune. Son père ne veut surtout pas qu’il lui ressemble, mais qu’il devienne premier ministre. Son prénom dérange et il ne connaît pas ses origines, ne maîtrise pas les codes sociaux. Il avance masqué sans le verbaliser. Aveuglé par la réussite, il accepte tout ce qu’on lui demande de faire, va jusqu’à changer son prénom pour celui de Noël,
sur les conseils de la grand-mère d’un copain. Cette foule de personnages constitue une matière théâtrale riche, avec des situations cocasses. Mais elle dit aussi la violence et la difficulté de trouver sa place, son identité face à un genre dominant. Quelle différence entre ses origines et son identité ? Les origines sont multiples : sociales, ethniques, religieuses. L’identité est une addition, une construction au fur et à mesure de la vie. On peut être né au Liban, vivre au Japon, rencontrer sa femme en Australie… Tout mon travail, depuis vingt ans, est de montrer que tout est ouvert, sans non plus faire de la sociologie sur scène. Le théâtre, par essence, permet d’incarner des personnages, de procéder à la catharsis, en live. J’aime le travail de Wajdi Mouawad, de Joël Pommerat, de Robert Lepage ou d’Ariane Mnouchkine qui traitent de sujets de société de manière épique. Ils inscrivent ces histoires-là dans l’universalité, montrent le monde tel qu’il est, mais avec poésie.
Quatre Parques tissent leur histoire Création collective, cet Ici, Agneau X est porté, imaginé, joué par quatre femmes rassemblées pour l'occasion. Adèle Gascuel, Chloé Giraud, Nicole Mersey etCatherine Hargreaves sont toutes actrices, metteuses en scène et auteurs. Cet épisode X est le dernier d'une longue série d'étapes et de chantiers qui ont été joués, puis détruits. Comme autant de brouillons géniaux qu'on se décide à mettre
numéro 05 - fév. 2019
à la corbeille, pourtant : un vrai sacrifice sans lequel l'œuvre finale ne verrait jamais le jour. Ce sacrifice si intimement lié aux origines du théâtre… Les origines, justement, elles ont choisi d'en parler ; de leur enfance, de leur parcours, et d'imaginer leur vieillesse aussi, de faire en un mot le récit de l'expérience, un voyage à travers le temps et l'espace, de l'élever au rang de mythologie, quatre destins 24
qui s'entremêlent sur un plateau de théâtre… Quand elles évoquent parallèlement l'effondrement du monde, on sent là comme le poids de la tragédie. Mais elles le promettent, le macabre sera teinté d'humour et le carnaval sera joyeux. T.M. NTH8, Lyon 8e 12 au 14 février nth8.com
Plus jamais proie
Marie Clauzade©
Bêtes de scènes
On le sait, les pièces de Phia Ménard sont dérangeantes, obsédantes, mais aussi plastiques, sensibles, poétiques... Jamais vides de sens, c’est sûr. Artiste inclassable, souvent proche de la performance, elle aime se colleter aux éléments pour bousculer les principes, les idées et les stéréotypes. Après avoir dansé et jonglé avec de la glace, de l’eau, du vent et de la vapeur, c’est la
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Le Rosaire des voluptés épineuses
APARTÉ L’appel sauvage du Grand Nord. La rencontre du Grand Nord, des percussions et de l'aquarelle. Rencontre improbable mais hautement maîtrisée pour cette adaptation du roman de Jack London qui nous amène au contact d'une nature sauvage et rude. Quentin Dubois, qui dirige l'ensemble TaCTus, utilise tous les sortilèges des percussions pour faire craquer la glace, aboyer les loups, siffler les fouets, hurler les hommes. Les esquisses vibrantes - dessinées à vue et projetées - de l'aquarelliste Marion Cluzel viennent tracer les contours d'un décor sublime, souligner les contrastes entre faiblesses humaines et noblesse des loups et faire naître l'émotion. Une belle réussite esthétique, théâtrale, pour aborder L'Appel de la forêt. T.M. Théâtre de la Renaissance, Oullins 19 et 20 février theatrelarenaissance.com
Comédie de Valence 13 et 14 février comediedevalence.com
sueur et l’envie de « tellurisme » qui nourrissent Saison sèche, objet protéiforme singulier créé à Avignon l’été dernier. Ici c’est au patriarcat et à la domination masculine qu’elle s’attaque férocement, telle une Artemis vengeresse. Sujet brûlant en plein #MeToo qu’elle transforme en rite guerrier pour raconter l'insoumission, créer le trouble et le doute. Sur le plateau, sept danseuses et sept corps se débattent, rampent, convulsent, frissonnent, trépignent, se rebellent dans un espace vital, d’un blanc immaculé, qui se déploie et se rétracte, comme animé de sa propre vie. Chorégraphie minutieuse, intensité physique du geste et colère palpable : pendant une heure trente, Phia Ménard exige beaucoup de ses performeuses jusqu’à les laisser exsangues mais galvanisées par cette séance d’exorcisme – parfois caricaturale – et l’enjeu de cette réflexion – trop manichéenne ? – sur les rapports biaisés hommes-femmes et la question du genre. ça démarre fort avec un « Je te claque ta chatte » qui met dans le bain, de suite. A.H.
Jean-Luc Beaujault ©
Les délices du frisson. C'est toujours une fête que le retour à Lyon du grand metteur en scène Georges Lavaudant. Cette fois-ci, la fête sera macabre, surréaliste et fantastique avec Le Rosaire des voluptés épineuses, unique pièce d'un poète ''maudit'', Stanislas Rodanski, qui mena une vie complètement marginale avant d'être interné jusqu’à sa mort, en 1981. La pièce qui tient du polar est vénéneusement mise en scène par un Lavaudant au sommet de son art : les personnages naviguent dans un espace-temps d'une grande beauté aux frontières mouvantes de la mort et de la normalité. T.M. Théâtre du Point du Jour, Lyon 5e 6 au 16 février theatredescelestins.com
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Giono et Sartre à la fête. Pour ceux qui ne l’auraient jamais vue, l’Espace 44 redonne la pièce Un roi sans divertissement, créée il y a plus de 25 ans, d’après le roman de Jean Giono. Ici comédien, André Sanfratello s’en donne à cœur joie dans un seul en scène réjouissant où il incarne un collectionneur d’histoires qui raconte des disparitions étranges dans un village d’autrefois. Et comme un Sanfratello peut en cacher un autre, le directeur de l’Espace 44 met en scène Huis Clos, présenté hors les murs dans le cadre du festival Turbulences. Là, Sandrine Bauer, Arnaud Chabert et Léa Pellin incarnent Inès, Garcin et Estelle, les trois personnages que Sartre a relégués dans un salon bourgeois où ils doivent se supporter… Puisque « l’enfer, c’est les autres ». F.R. Huis Clos Hors les murs, Salle Paul Garcin, Lyon 1er 7 au 9 février Un roi sans divertissement Espace 44, Lyon 1er 12 au 17 février espace44.com
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Per Morten Abrahamsen©
Bêtes de scènes
Dans le Jardin des Délices
L’étrange voyage
Bosch Dreams 7 et 8 février Le Théâtre Scène Nationale de Mâcon (71) theatre-macon.com
Projet décalé, et sans doute ambitieux, pour les circassiens des 7 Doigts de La Main qui viennent se frotter, avec Bosch Dreams, à l’univers torturé de Hieronimus Bosch. Les Québécois comptent parmi les grands noms du cirque contemporain : ils sont, on le sait, excellents quand ils font de l’acrobatie, des équilibres, de la main à la main ou de la voltige. Ce qu’on aime chez eux, c’est aussi cette volonté de se renouveler et de réinventer l’art du cirque avec des spectacles hybrides qui font se télescoper esthétiques et disciplines. À l’occasion du 500e anniversaire de la mort du peintre de la Renaissance flamande (1450-1516), ils ont fait le pari de se plonger dans son imagerie fantastique avec un spectacle un peu fou, qui fait se croiser Moyen Âge, Renaissance,
Dali et Morrison, enfer et paradis, réalité et virtualité. Sans doute le cirque s’est-il un peu perdu là-dedans ! À la caméra, le vidéaste Ange Potier – on lui doit aussi les costumes – signe les animations, assez époustouflantes, qui permettent littéralement de plonger dans les peintures de Bosch, notamment son fameux Jardin des Délices, tandis que les artistes – sept sur le plateau – s’incrustent et se fondent dans le décor. Parfois trop … ? En tout cas, monstres plus ou moins gentils, curieux bestiaire et étranges créatures se croisent dans ces paysages hallucinés, occasion d’appréhender l’œuvre de cet artiste visionnaire, souvent méconnu, qui continue de fasciner par-delà les siècles. A.H.
Debout les clowns ! Depuis 2000 et sa première Nuit des Hommes Seuls, Le Polaris enchaîne ces rendez-vous annuels qui mêlent spectacles et festin… Histoire de croiser les publics dans une ambiance joyeuse. Cette fois, les organisateurs misent grand : ils invitent trois compagnies de clowns, des vrais, des qui “ne doutent de rien”, “sont libres et sans tabous, sincères, donc pleins d’espoir”. D’abord, il y a la compagnie des Chercheurs d’air et la Zaz, leur “zone d’acclimatation aux zôtres”. Les zôtres sont des êtres différents « qui font tout pareil que nous » et s’ingénient à investir notre territoire, en premier lieu Le Polaris. Ils y instaurent un souffle de folie
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douce et de légers décalages qui pourraient, si l’on n’y prenait garde, faire perdre le nord ou le sud (!) aux plus zélés et raisonnables des spectateurs. Comme pour brouiller plus encore les pistes, une dizaine d’enfants des environs, qui ont participé à des stages de clown fin 2018, se glissent parmi les six comédiens. Le deuxième spectacle, Urban et Orbitch, met en scène un homme seul, Bobitch, incarné par le clown Boris passé par Archaos ou Gosh. Seul certes, fragile sans doute, il rivalise d’ingéniosité et de tours pour dompter sa solitude par le rire, celui des autres en priorité. Dans Tu me suis, le collectif Le 4e souffle met 26
en scène le duo d’une bavarde, extrêmement bavarde, bravache et insistante, dans les pas d’un taiseux, sérieux comme un pape mais "hiphopeur" virtuose du locking… Au rythme d’une batterie non-stop, ce spectacle mené au cordeau étonne et détonne. Fatigué ? Affamé ? Le Polaris a tout prévu avec un grand buffet, piloté par le cuisinier Edouard Frilet. F.R. La Nuit, Debout les clowns et Hip Hop ! 9 février Le Polaris, Corbas lepolaris.org
Bêtes de scènes
L'affaire « Baby-Loup »
mécanique d’un conflit
Prendre comme thème ce qu'on a appelé « l'affaire Baby-Loup » et de surcroît entreprendre de le jouer dans des quartiers sensibles, comme La Duchère, avant d'aller séduire des publics plus avertis, comme celui de l'Élysée, c'est "couillu", inconscient, ou pire incendiaire. Rien de tout cela chez le metteur en scène Arthur Fourcade, ni chez l'auteur François Hien. François Hien vient du cinéma, plus particulièrement du documentaire. Quand il assiste à la représentation de Ça ira de Joël Pommerat, c'est un coup de cœur qui va changer sa vie professionnelle. Avec le Collectif X, il mettra dorénavant "en théâtre" des sujets de société, il utilisera le plateau pour montrer comment les conflits naissent de pas grand-chose, se nourrissent du désir des camps arc-boutés sur leurs convictions et prospèrent sur une méconnaissance générale des faits. Ce qu'il apporte ? Une faim insatiable de comprendre qui s'appuie sur des recherches très approfondies. Ajoutons une démarche empathique pour les différentes parties, quel que soit leur point La Crèche / Collectif X L'Élysée, Lyon 7e de vue. C'est précisément ce qui l'a intéressé dans 29 et 30 janvier le spectacle de Pommerat.
lelysee.com La Mouche, Saint-Genis-Laval 31 janvier la-mouche.fr Théâtre Jean Marais, Saint-Fons 30 mars theatre-jean-marais.com
François Hien©
« Ce que j'aime dans le travail de François, ajoute encore Arthur Fourcade, c'est qu'il propose des situations de parole, montre des gens qui se débattent dans les sables mouvants du malentendu. La Crèche a été plutôt bien reçue, notamment à La Duchère où nous avons rencontré un public très diversifié qui nous a réservé de belles surprises... » T.M.
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l'arkuchi du mois
musique, littérature, bd, cinéma… L’Arkuchi du mois attrape en un clin d’œil ce qui fait vibrer la scène actuelle. C’était mieux avant regarde dans le rétroviseur le foisonnement culturel d’hier et s’attarde sur les pépites qui brillent encore… Plutôt "bien maintenant" ? plutôt "mieux avant" ?
Bienvenue dans le New York crasse et corrompu de Don Winslow, là où trafiquants, mafieux, flics, avocats et politiciens trouvent de sales petits arrangements entre amis pour mener tranquillement leurs affaires. Dans Corruption, Dennis Malone est flic : il est le chef de la Task Force – unité d’élite du NYPD – et le "roi" des ghettos de Manhattan North. Il est sans foi ni loi. Drogué aux amphéts. Arrogant, véreux, violent, mais aussi attaché à sa ville (« L’abondance sucrée et fétide de cette ville […] New York est le monde », p.130) et malgré tout doté d’une conscience. On dévore les 584 pages de ce polar qui ne dresse pas un portrait très glam d’une Amérique pourrie jusqu’à la moelle. Écriture au scalpel, récit haletant, corruption à tous les étages et petit jeu de « Je te tiens, tu me tiens » jusqu’à la dégringolade finale parce qu’un jour il faut payer la note. « L’enfer, ce n’est pas de ne pas avoir le choix. C’est de devoir choisir entre deux choses épouvantables. » Électrique et addictif. A.H. Corruption de Don Winslow Harper Collins Noir / Parution : 7 novembre 2018
Septembre 1975, l’Angola frôle l'indépendance. C’est le chaos, la guerre civile en pleine Guerre froide. Terré dans un hôtel de la capitale, le reporter polonais Ryszard Kapuscinski ne se résout pas à rester à l’abri. Dans la zone de conflit qu’il atteint au prix d’un voyage cauchemardesque, il devient le seul journaliste au monde à vivre et couvrir au quotidien les combats qui ébranlent le pays. Animation, images d'archives, prises de vue réelles, témoignages des protagonistes, visions oniriques... Another day of life, adapté du livre de Ryszard Kapuscinski, est un film hybride et indispensable sur la réalité post-coloniale, sur la question du rôle du journaliste dans les conflits et sur À lire re guer le confusão des cœurs et des esprits D’une ngola 1975 A . e en ces temps d'Histoire troubles. L.D. r t l’au rd
« Je ne comprends pas », lâche Fabrizio Pietromarchi, le premier ministre italien (Guido Caprino), lorsqu’il voit pour la première fois la vierge, en PVC, qui pleure du sang au rythme de neuf litres par heure… D’emblée, la série Il miracolo, écrite et mise en scène par le romancier Niccolò Ammaniti, nous plonge dans le mystère d’un miracle et dans celui des êtres ballottés sur fond de crise amoureuse et politique – l’Italie s’apprête à dire non à l’Europe dans un référendum –, de drame familial et d’addictions en série. L’intrigue, sombre, captive sur huit épisodes. L’image, de fondus enchaînés en superpositions, de gros plans en perspectives, donne le vertige. Et, comme un leitmotiv, les personnages nous regardent… La vierge pleure du sang et tous ces yeux fixent la caméra d’un regard pudique, mais intense (tous les acteurs, enfants comme adultes, jouent magnifiquement). Que faut-il comprendre ? Quel est le miracle ? Et que donnera l’enquête, au final ? F.R.
Another day of life de Raúl de la Fuente et Damian Nenow (Espagne, Pologne - 1h25) Sortie nationale : 23 janvier
Il miracolo Une série de Niccolò Ammaniti (Arte Éditions) En ligne, Arte TV, jusqu’au 23 février Également en DVD/VOD, boutique.arte.tv
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sza de Ry cinski s u p Ka marion) (Flam
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c'était mieux avant
Un troisième visage de Samuel Fuller et Christa Lang Fuller Préface de Martin Scorsese (Allia Editions) Shock Corridor et The Naked Kiss (Wild Side) The Big Red One Version longue (Warner Home Video)
samuel fuller
Des volutes de cigare au ciel Par Nikki Renard Photo Loïc Lostanlen
1993, Travelling New York, 4e festival de cinéma de Rennes L’invité de marque de cette édition-là n’est autre que Samuel Fuller. Je découvre l’artiste dont me parle souvent mon ami Loïc Lostanlen, qui le photographie, d’ailleurs, à cette occasion. Portrait rare de Fuller sans son éternel cigare. La projection de Shock Corridor (1963) est un électrochoc. Un journaliste ambitieux incarné par Peter Breck tente, pour élucider une mort suspecte dans un asile d’aliénés, de s’y faire interner afin d’enquêter. La folie contagieuse signera sa perte. Dès les premières secondes, Fuller livre des images d’une telle intensité que cela terrifie autant que cela fascine. L’amorce et l’accroche sont des qualités que l’auteur maîtrise à la perfection, maniant la caméra comme un journal. Filmé en dix jours dans un décor unique, ce couloir, "la rue" où déambulent les "fous", dépeint une Amérique malade et tarée. La scène, violente et sans concession, qui voit une horde de nymphomanes se jeter sur le héros, dérange et reste obsédante. Entre cauchemar et réalité, le trouble m’étreint à la sortie de la projection.
Journaliste, scénariste, écrivain et metteur en scène, Samuel Fuller (1912-1997) a vécu mille vies… Passionné par la presse, il travaille dès douze ans pour le New York Journal et devient, à dix-sept ans, le plus jeune reporter criminel. Il s’engage en 1941 et se retrouve reporter de guerre. Il restera hanté par ses campagnes au front. Il est l’auteur-réalisateur de plus de vingt films dont certains deviendront des classiques.
Pour son modernisme, parce que l’Amérique d’alors ne veut pas voir la vérité crue de ses failles, il sera banni d’Hollywood. L’année suivante, il tourne The Naked Kiss (1964) : il enfonce le clou définitivement, abordant des sujets tabous comme la perversion sexuelle et délivrant une critique féroce de la société. D’une audace quasi suicidaire, le film est un échec aux États-Unis et précipite le départ de Fuller vers l’Europe. La poésie visuelle et la sincérité qui émanent de ses films suscitent cette "incandescente" flamme qui vacille sans jamais s’éteindre. Et pour le citer : « Un film est un champ de bataille : amour, haine, violence, action, en un mot : "é-mo-tion". » 29
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cuisine-moi
au marché
... Le Radis
• 1 radis noir de taille moyenne • 1 petite poignée de radis roses • 2 clémentines • 1 bouquet de persil plat • ½ jus de citron
• 1 filet d’huile d’olive • Sel, poivre du moulin • Quelques graines de grenade (facultatif)
Quand tu n’as plus un radis ! Le temps est venu de faire une petite pause détox et d’écouter ton cher petit corps. Une recette crue à déguster seul(e) et tout(e) nu(e) dans sa cuisine…
Jeanne Brousse
Vous êtes seul(e) et alors ? Votre petit corps est en mode pause ou en jachère… Qu’à cela ne tienne, prenez soin de vous, chérissez-vous avec une petite salade tonique et vitaminée. Lavez et équeutez le bouquet de persil plat. Épluchez et rincez le radis noir, râpez-le grossièrement. Réservez dans un bol avec le jus de citron au frais. Taillez votre persil dans un grand verre à l’aide d’une paire de ciseaux. Mélangez le persil et le radis noir râpé. Assaisonnez de sel et de poivre du moulin. Enlevez la peau de vos clémentines, puis découpez les tranches d’agrumes. Lavez vos radis roses et tranchez-les en petites rondelles. Mélangez le tout au reste de la préparation. Pensez à mettre de côté quelques radis roses à croquer, plantezles fièrement dans votre assiette. Placez au frais pendant une heure. Arrosez d’un peu d’huile d’olive. Pour les plus gourmands, ajoutez quelques graines de grenade. Dégustez ce petit plat frugal revigorant et sans complexe, en attendant les beaux jours, la douceur du renouveau, le printemps…
1 heure
15 minutes
cogite-toi
F.V.©
1 personne
A
B C D
1
E
F G H
I
J
HORIZONTALEMENT
1. Mot pour maux. 2. Fut longuement enfumé - Esquimaux. 3. Titre - Blanc du Valais. 4. Appréciée sans surévaluation - Argon. 5. Pomme, voire reine ! 6. Pierre légère - Tôles ondulées sableuses. 7. Début de colère ancienne Vieux grand luth. 8. Indication de lieu - Ses Amours du Poète ne furent pas son Chant du Hector Jackson Cygne. 9. La Gitane, même bien roulée, ne les intéresse pas 10. Remise au tribunal - Pose solutions ou place. arkuchi 04
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VERTICALEMENT
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A. Même gratuites, on n’est pas tenu d’y croire ! B. Hâbleur - C’est le lieu avec l’accent. C. Se la joue en cachette… ou en vol - Son patron fut Jean Moulin. D. Au milieu ou en fin du verbe Les gens branchés le sont. - Parfois hirsutes et en désordre. E. Polie tout en apportant Abréviation bien connue des usagers de l’interface. F. Partie d’un mot composé - Eux, ils font de la résistance. G. Impénitente. H. Bien entendu - Appartient aux Lanthanides. I. Vogua avec Colomb - Type. J. Bois en coupe - Levant.
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N A T I V I T E S
0 E L L C A Z E R R I EMP O T E Q L E E T A RGO T OUDA N I R
S A B L E U X
A R L E S I E N
P I N E S T T I T T R A R S MA UB AN
N U E F E N D I S
street art
Kara Yaga Par Graphull
Croix-Rousse. Halte des oiseaux migrateurs et colorés de l’artiste Kara Yaga. 31
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où trouver
Bourg-en-Bresse Le Brou. Théâtre de Bourg-en-Bresse. La Tannerie. Bourgoin-Jailleu Les Abattoirs. Bron Espace Albert Camus. Ciné Les Alizés. Ferme du Vinatier. C Louis Aragon. Pole Pik. Médiathèque de Bron. Université Lyon II. Caluire-et-Cuire Bibliothèque municipale. Cinéma le Méliès. Le Radiant-Bellevue. Chassieu Le Karavan théâtre. Corbas Le Polaris. Dardilly Pôle Culturel L'Aqueduc. Décines Le Toboggan. Centre de la Mémoire Arménienne. Feyzin L’Épicerie Moderne. Irigny Le Sémaphore. L’Isle-d’Abeau La CAPI. La Mulatiere Aquarium de Lyon. Lyon 1 À chacun sa tasse. L'Antirouille. À Thou bout d’chant. Bar 203. Bar à vin. Bistrot Chardonnet. La Boîte à café. Le Bomp. Cabane café. Café des Capucins. CAUE Lyon Métropole. Cinéma Opéra. La Condition des Soies. Dangerhouse. Drac. Ecoworking. ENBA. Espace 44. Galerie AMR Pallade. Galerie la BF 15. Galerie Mathieu. Galerie PomeTurbil. Galerie Le Réverbère. Le Gargagnole. Hemingway’s. Ho36 Terreaux. Librairie Archipel. Librairie À titre d’aile. Librairie le Bal des Ardents. Librairie Musicalame. Librairie Le Tasse-Livres. Jarring effects. Kraspek Myzik. Mapra. Mas Amor. Médiatone. Musée des Beaux-Arts. Le Nombril du Monde. Opéra de Lyon. Original Watt. Le Perko. La Pinte douce. Radio Canut. Le Romarin. Sofffa Terreaux. Les Subsistances. Théâtre de l’Accessoire. Théâtre Les Clochards Célestes. Technoir. Tikki Records. Trokson. Unique en série. Les Valseuses. Vins Nature. Le Voxx. Lyon 2 Archives municipales. Bar Petit Grain. Centre national de la Danse. La Cloche. Docks 40. ESMA. Fondation Bullukian. Goethe Institut. MJC Confluence. Mob Hôtel. Librairie Expérience. Librairie Gibert. Librairie Momie. Librairie Passages. Musée des Confluences. Le Périscope. Théâtre des Ateliers. Théâtre des Célestins. Théâtre Comédie Odéon. Université catholique de Lyon. Lyon 3 Auditorium. De l’Autre côté du pont. Archives départementales. Café du Rhône. Gnome et Rhône. Hooper. IFRA. Librairie Esprit Livre. Librairie du Tramway. Mairie du 3e. La Métropole de Lyon. Pôle Emploi Scène et Images. Salle des Rancy. Taverne Gutenberg.Théâtre Improvidence. Lyon 4 Aquarium Ciné Café. L’Assiette du vin. Aux Gogniols. Le Bistrot du Boulevard. Le Bistrot fait sa Broc. Le Canut et les Gones. Capucine bazar. Collectif la Machine. Le Comptoir du vin. Le Déjeuner. Le Diable Rouge. Les Enfants du Tarmac. ENFIP. Galerie Vrais Rêves. Le Grain de Folie. L’Instant. IUFM. Labelalyce Librairie La BD. Librairie le Livre en Pente. Librairie Le Magasin des Livres. Le Modern Art Café. Ninkasi Croix-Rousse. Ô Vins d’anges. L'Oiseau sur la branche. Paddy's Corner. Le Petit Troquet. La Soierie. Théâtre de la Croix-Rousse. Théâtre Sous le caillou. La Valise d’Elise. Villa Gillet. Vivement Dimanche. La Voguette. Lyon 5 Le Bar Bu. Brasserie du Doyenné. CRR de Lyon. CNSMD. Collège Hôtel. École du Cirque Ménival. ENSATT. Espace Gerson. La Gargouille. Instituto Cervantès. Librairie Virevolte. Mairie du 5e. La Mi Graine. MJC du Vieux-Lyon. MJC Saint-Just. Musées Gadagne. Musée Gallo-romain. Ninkasi Saint-Paul. Le Sonic. Théâtre du Point-du-Jour. Lyon 6 L’Apéro Rock. L’Astragale. Café Chloé. Mairie du 6e. Musée d’Art Contemporain. L’Odyssée. Le Tout Petit Café. Le Riso Amaro. Lyon 7 Atelier Garage. Bibliothèque Diderot. Le Bistroquet. Le Café 76. Centre Berthelot. CHRD. Cinéma Comœdia. La Commune. Court-circuit. ENS. L’Elysée. Les Fauves. La Fourmilière. Galerie Tator. Ho36 Montesquieu. IEP. L’Indocafé. Librairie Bédétik. Librairie Rive gauche. Librairie Terre des Livres. Librairie La Voix aux chapitres. Mairie du 7e. Le Mondrian. Ninkasi Kafé. Le Petit Bouclard. Le Petit café rose. Pimpon bar. Les Raffineuses. Sofffa Guillotière. Lyon 8 Faculté de médecine. Institut Lumière. Mairie du 8e. Maison de la Danse. MJC Monplaisir. NTH8. Salle Genton. Lyon 9 Campus René Cassin. Ciné Duchère. CNSMD. Librairie Au Bonheur des ogres. Médiathèque de Vaise. MJC de la Duchère. TNG. Mâcon Le Cadran lunaire. La Cave à Musique. Mâcon Scène nationale. Miribel L'Allégro. Mornant Espace Jean Carmet. Oullins La Mémo. MJC d’Oullins. Le Syndrome Peter Pan. Théâtre de la Renaissance. Pierre-Bénite Maison du peuple. Portes-Lès-Valence Train-Théâtre. Rillieux-la-Pape CCNR. Espace culturel Marcel André. Médiathèque. MJC O Totem. Piscine du Loup Pendu. Saint-étienne Cité du Design. La Comédie de Saint-Etienne. Le Fil. Le MAMC. Saint-Fons Mairie. Médiathèque Roger Martin du Gard. Théâtre Jean Marais. Centre d’arts plastiques. Théâtre Jean Marais. Saint-Genis-Laval La Mouche. Médiathèque. B612 Sainte-Foy-lès-Lyon Cinéma Mourguet. Tassin-la-Demi-Lune Théâtre L'Atrium. Vaulx-en-Velin Centre culturel Charlie Chaplin. École d'architecture. ENTPE. Planétarium. Valence Comédie de Valence. Vénissieux Bizarre ! Médiathèque Lucie Aubrac. Théâtre de Vénissieux. Vienne Théâtre de Vienne. Villefontaine Théâtre du Vellein. Villefranche-sur-Saône Auditorium. Cinéma Les 400 Coups. Médiathèque Mendès-France. Musée Paul Dini. Théâtre de Villefranche. Villeurbanne Atome Village. Le Bieristan. Campus de la Doua. CCO. CCVA. Cinéma Le Zola. Galerie Domus. Double Mixte. ENMDAD. Espace Info. Espace Tonkin. IUFM. IUT B. Librairie Lettres à Croquer. La MLIS. Pôle Pixel. Studio 24. le Rize. Théâtre Astrée. Théâtre de l'Iris. Le TNP. Toï Toï Le Zinc. Le Totem. Le Transbordeur. L’URDLA... ainsi que dans la plupart de vos mairies, bibliothèques et MJC.
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