Vivre livre l Or Norme #50

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LE MAGAZINE

D’UN AUTRE REGARD SUR STRASBOURG

b GRAND ENTRETIEN

IVAN JABLONKA Goldman, le livre de la rentrée.

Page 8

c ÉVÉNEMENT

BIBLIOTHÈQUES IDÉALES

D’une Bibliothèque Idéale aux Bibliothèques Idéales.

Page 16

c DOSSIER

AVIGNON 2023

Un formidable cru pour les pépites alsaciennes.

Page 32

SEPTEMBRE 2023 VIVRE LIVRE

a CULTURE

RENTRÉE CULTURELLE

Les programmes les plus séduisants et les plus motivants qui soient...

Page 44

50 Vivre

Livre...

bibliothèques déales

PARLEMENT EUROPÉEN AUBETTE MÉDIATHÈQUES LIBRAIRIES

+ de 70 rencontres & concerts avec notamment :

Amélie Nothomb

Camille Etienne

Abd al Malik

Cynthia Fleury

Thomas Piketty

Régis Debray

Gilles Kepel

Éric Reinhardt

Pascal Ory

Dominique Fernandez

Rébecca Manzoni

Léonor de Récondo

Zhang Zhang

Panayotis Pascot

Laurent Binet

Tobie Nathan

Camille Laurens

Charles Pépin

Éric Fottorino

Alexandre Jardin

Valérie Bonneton

François Jullien

biblideales.fr

Faut vivre!

FESTIVAL STRASBOURG 15-24 SEPTEMBRE 2023

VIVRE LIVRE...

Daniel Pennac – écrivain

Vous tenez entre vos mains le cinquantième numéro d’ Or Norme (auquel il faut ajouter quelques dizaines de hors-séries), et, espérons-le, vous allez prendre du temps, et du plaisir, à lire tel ou tel article, ou bien même, soyons fous, à en dévorer la quasi-intégralité.

Ce plaisir que vous prenez à lire (pas que notre magazine bien sûr), de moins en moins de jeunes le connaissent, en France comme à travers le monde.

Partout, les études montrent une nette diminution de l’enthousiasme pour la lecture chez les enfants de moins de 15 ans, alors que dans tous les pays de l’OCDE, les élèves qui prennent le plus de plaisir à lire obtiennent des résultats scolaires nettement supérieurs à ceux des élèves qui en prennent le moins.

Quand Jules Ferry rendit l’école primaire (et laïque) obligatoire, il formait le vœu de « rendre l’école aimable et le travail attrayant. »

Presque cent cinquante ans plus tard, on se demande bien comment notre tout nouveau ministre de l’Éducation Nationale, va s’attaquer à cette mission d’ordre public.

La tâche est d’autant plus complexe que l’enjeu n’est pas seulement d’initier le plaisir de lire, mais également d’enseigner le goût de l’effort, qui semble s’être perdu

dans les incessantes réformes de l’enseignement, et qui pourtant, est le préalable indispensable à l’accès au plaisir, qu’il soit celui de la lecture ou de toute autre nature.

Les émeutes et les pillages de cet été, comme la multiplication de ces « points de deal » dans les cités, tenus par de jeunes mineurs qui expliquent « gagner 1400 euros par semaine en faisant le guet », participent sans aucun doute, de cette perte de valeurs, de repères et d’une certaine faillite de notre système éducatif.

C’est dans ce contexte que les Bibliothèques Idéales, loin de se contenter d’organiser son festival littéraire, viennent de prendre l’initiative de s’associer à « Savoirs pour réussir Grand Est », soutenue par la Fondation d’entreprise de la Caisse d’Épargne Grand Est Europe.

Ainsi, à l’occasion du 10e anniversaire des Journée Nationales d’Action contre l’Illettrisme, les apprenants de l’association assisteront à la rencontre avec Abd Al Malik. Deux d’entre eux interviendront devant l’hémicycle du Parlement Européen pour une lecture à voix haute autour de l’œuvre d’Abd Al Malik, « comme une démonstration qu’avec motivation, détermination et courage, il est possible de progresser et de sortir de l’illettrisme. » (Savoirs pour réussir)

Là où il y a une volonté, il y a (toujours) un chemin...

« Le temps de lire, comme le temps d’aimer dilate le temps de vivre. »
Par Patrick Adler, directeur de publication
ÉDITO 4 №50 — Septembre 2023 — Vivre livre

RETROUVEZ TOUTE L’ACTUALITÉ ET LES BONS PLANS ÉTUDIANTS SUR

strasbourgaimesesetudiants.eu

@StrasEtudiants

SEPTEMBRE 2023

08-15

b Grand entretien

Ivan Jablonka

« Goldman, le livre de la rentrée. »

32 La fin de la mythique

« Caserne des pompiers » ←

35 Laure Werckmann

« Avec quoi repartent les gens quand la lumière de la salle revient ? »

37 Juliette Steiner

« Il a fallu effectuer une écriture au cordeau… »

40 Fred Cacheux

c Dossier

Avignon 2023

32-43

S Actualités

78 Feux de forêt dans les Vosges Quelles conséquences pour l’économie ? →

84 Langue Pourquoi apprend-on le chinois ?

102 Un été 2023 C’est juste un peu moins gai...

114 Mari in Borderland Bilan(s) carbone

116 Moi Jaja Vous avez fait

quelque chose de grave dans une vie antérieure ?

120 Le parti-pris de Thierry Jobard Diarrhée littéraire

« La théâtralité était déjà dans le roman… »

42 Kathleen Fortin

c Dossier Bibliothèques idéales

16-31

16 François Wolfermann D’une Bibliothèque Idéale aux Bibliothèques Idéales

20 Sorj Chalandon et le petit cinquante-sixième…

24 Pierre Mann Les Mémoires d’un passionné de l’Homme et de la Terre

26 BI 2023 : la sélection de Or Norme

c Dossier La rentrée culturelle

44-63

46 Terry Gilliam au FEFFS

Daniel Cohen y tenait et… il l’a fait !

48 OnR Rêver d’un autre monde

50 OPS Chaque concert est « un monde en soi »

52 TNS Multiplication des points de vue

54 TAPS Questionner le monde

54 Pole-Sud Intensité de la danse contemporaine

56 Espace Django Toutes les énergies

56 Laiterie Musiques actuelles

58 Espace K Tours et détours de l’humour

60 L’Illiade croise les genres

61 PréO Théâtre, danse, musique…

61 Point d’eau Les tourbillons

62 Échappée belle entre jazz et classique, chansons et théâtre

62 Le Diapason L’Attrape-rêves

63 Un Zénith flamboyant

c Dossier

a Portfolio

90 Nos lecteurs ont du talent

« En courant, je me suis débrouillée pour faire parler les gens… » E Société

128 Événement Or Norme

Un soir d’été

Q Or Champ

142 Sabine Ischia

Culture scientifique : il reste tant à faire…

ON numéro 50

64-73

a Culture

74 Cinéma L’odyssée du Cosmos à son début…

102 Le jour où…

106 Wouter van der Veen Expos Van Gogh

110 Christophe Sans interdit

132 Musique Traveling Wilburys

134 Sélection Livres, films, expos...

SOMMAIRE
6 №50 — Septembre 2023 — Vivre livre

« Et soudain,  il ne sera plus là… »

C’est le début de l’été. On se voit dans la Drôme provençale puisque c’est là que Ivan Jablonka passe quelques jours en vacances chez des amis et que notre présence à Avignon pour accompagner la présence des troupes théâtrales alsaciennes permet ce détour plus qu’agréable. Et c’est dans la fraîcheur d’un petit café aux murs séculaires qu’on peut enfin converser longuement avec cet historien de formation et de profession qui n’hésite pas à emprunter les voies les plus inattendues pour mieux nous éclairer sur l’évolution de notre société et nous faire réfléchir sur tout ce qui nous entoure… En racontant Goldman, dans un livre qui sera un des événements de la rentrée littéraire, Ivan Jablonka parle d’un monde qui n’est plus et de notre époque où nous nous débattons…

b GRAND ENTRETIEN
Jean-Luc Fournier Bénédicte Roscot
8 b GRAND ENTRETIEN — Ivan Jablonka №50 — Septembre 2023 — Vivre livre

Il y a sept ans, vous obteniez le prix Médicis avec Laëtitia ou la fin des hommes, cet ouvrage dans lequel vous vous penchiez sur le destin d’une jeune fille de 18 ans, enlevée puis assassinée en 2011. Deux ans d’enquête et de dialogues incessants avec les proches et les acteurs de ce fait divers avaient été nécessaires pour rédiger ensuite ce formidable livre. D’une certaine manière, sur un sujet très différent, vous avez de nouveau travaillé aux frontières de la littérature, de l’histoire et des sciences humaines et sociales pour écrire Goldman, ce texte qui n’est pas un roman ni un essai, ni encore une biographie. J’ai envie de vous provoquer un peu en vous demandant si votre discipline d’origine, l’histoire, vous ennuie un peu au point d’écrire des livres qui sont autant d’Ovnis, mais surtout, ne voyez rien de péjoratif dans les termes de cette question…

Non, non, votre question n’est pas du tout provocatrice puisque j’ai le sentiment de ne faire rien d’autre que mon métier. Je n’ai certes que les diplômes qui peuvent me prétendre historien, mais en matière de méthode et de démarche, si je fais appel à l’histoire, j’emprunte aussi les voies de la sociologie et des sciences politiques et sociales et même un peu celles de l’anthropologie… Si vous me demandez qui je suis, je répondrais chercheur en sciences sociales et j’ai vraiment le sentiment que des livres aussi différents que Histoire des GrandsParents que je n’ai jamais eus (dans ce livre, paru il y a douze ans, Ivan Jablonka revenait sur la brève vie de ses grands-parents qui s’est terminée durant les années de plomb de la première moitié du xxe siècle, bien avant que sa propre existence ne débute – ndlr), Laëtitia ou aujourd’hui, Goldman ne sont jamais que des réflexions sur des sujets qui me paraissent d’intérêt collectif, menées avec les outils qui sont les miens. D’ailleurs, ces livres se ressemblent, ce sont des livres sur la disparition. Mes grands-parents ont disparu, tout comme Laëtitia et Goldman ont disparu même si, concernant ce dernier, c’est une disparition volontaire, contrairement aux deux premiers cas. Votre question n’est pas provocatrice, mais je vais y apporter une réponse déceptive : je ne suis qu’un historien. Et pour écrire ce livre, j’ai appliqué une méthodologie universelle que tous les historiens mettent en œuvre : l’enquête, c’est à dire se poser un problème, chercher des sources pour apporter des réponses et démontrer quelque chose. Mais c’est vrai, j’essaie d’inventer des objets nouveaux, neufs, et j’essaie aussi d’inventer

des formes nouvelles. En ce sens, j’accepte votre remarque où vous qualifiez mon livre d’Ovni. Car son objet, au-delà de Jean-Jacques Goldman, c’est la Pop Culture et mon envie de persuader qu’il faut la prendre au sérieux. Le camping-car de mon enfance, dont je parlais déjà il y a quelques années, les tubes de Goldman qui nous ont fait danser, tous ces objetscultes… bref, la Pop Culture, tout ça fait complètement partie de ce qui relève des sciences humaines et j’essaie d’inventer une forme nouvelle pour en parler. J’ai essayé de réaliser une espèce d’autobiographie collective…

Dans les premières pages du livre, vous écrivez : « Il était normal que j’écrive un livre sur Goldman sans jamais l’avoir rencontré ». Ce qui confirme ce que vous disiez précédemment…

Oui, on est là dans la stricte définition de l’Histoire. L’historien ne rencontre pas des gens, mais simplement leurs traces. Ce n’est pas un scoop : les égyptologues n’ont jamais rencontré Toutânkhamon tout comme les médiévistes qui, eux, n’ont

jamais rencontré Saint-Louis (grand sourire – ndlr). L’Histoire, ce n’est pas tant la rencontre telle qu’on la vit aujourd’hui tous les deux devant une tasse de café, c’est la rencontre d’un être vivant avec des traces de disparus. C’est en ça que Goldman se prêtait de manière merveilleuse à un travail historique : à l’évidence, il n’est certes pas mort, heureusement, mais il n’est plus non plus un personnage public, il est dans un entre-deux que j’appelle l’absence. Il n’est plus là, il manque, pour utiliser un titre d’une de ses chansons. De même que certains peuvent être omniprésents, Goldman est omniabsent. Et cette omniabsence, c’est l’idée qu’il est partout sans jamais être là : je fais un livre sans qu’il ne soit là tout comme il y a des concerts, des albums qui se font sans lui. C’est ça, l’omniabsence…

Vous avouez même que durant cette décennie des années 80, vous n’étiez pas particulièrement un fan absolu de lui, vous n’avez à l’époque jamais cédé à la Goldmania ambiante…

Je suis un banal enfant de cette époque qui était devant sa télé pour ne pas rater le

« Le camping-car de mon enfance, dont je parlais déjà il y a quelques années, les tubes de Goldman qui nous ont fait danser… bref, la Pop Culture, tout ça fait complètement partie de ce qui relève des sciences humaines. »
10 b GRAND ENTRETIEN — Ivan Jablonka №50 — Septembre 2023 — Vivre livre
30-34 Rue du Chemin Vert 75011 Paris +33 (0)1 85 56 97 00 www.carrenoir.com Ce fichier est un document d’exécution créé sur Illustrator version 2021. TONS RECOMMANDÉS (4) LOGO_2021_SIGNAT_CMJN YD - Date 21/05/2021 Que ceux qui veulent devenir porteurs de la flamme lèvent la main. Grâce à Caisse d’Epargne, devenez porteur de la flamme olympique en flashant ce QR code. Communication à caractère publicitaire et sans valeur contractuelle. Caisse d’Epargne et de Prévoyance Grand Est Europe, Banque coopérative régie par les articles L.512-85 et suivants du Code Monétaire et Financier, société anonyme à Directoire et Conseil d’Orientation et de Surveillance au capital de 681.876.700 € - siège social à STRASBOURG (67100), 1, avenue du Rhin - 775 618 622 RCS STRASBOURG - immatriculée à l’ORIAS sous le n° 07 004 738 - Crédit photo : Sacha Goldberger.

Top 50. Et qui a vécu cette époque sait très bien que Goldman était partout. Mais je ne l’écoutais pas comme j’écoutais Renaud, Gainsbourg ou de nombreux chanteurs de la Pop anglophone. Pour le coup, concernant Renaud, je pourrais écrire un vrai livre de fan, car je connais encore par cœur de nombreuses de ses chansons. En fait, pour expliquer ce paradoxe que j’étais le fils du Top 50 sans être spécialement fan de Goldman, je dirais qu’en fait, je ressemblais tellement à Goldman que je ne pouvais pas l’écouter quand j’étais ado. C’est tout simple : quand on est ado, on écoute des gens qui ne vous ressemblent pas, qui vous font rêver et qui vous font imaginer être quelqu’un d’autre. J’étais en fait tellement goldmanocentré que je n’ai pu l’écouter que quinze ans plus tard, devenu jeune adulte. Et j’en arrive donc à la raison profonde pour laquelle j’ai écrit ce livre : faire un portrait en creux de moimême qui puisse me permettre d’apporter des réponses à des questionnements qui étaient déjà les miens, très diffus bien sûr, quand j’étais adolescent : la judaïté, le parcours familial d’immigration puisque les Goldman et les Jablonka ont un parcours migratoire quasiment identique, la question de la social-démocratie et de la mort annoncée du socialisme sans oublier la question de la masculinité qui m’a particulièrement touché. Jean-Jacques Goldman est un des très rares chanteurs à s’afficher comme un homme vulnérable, fragile, en proie à un sentiment de doute et de solitude, à l’opposé d’un Johnny Halliday, par exemple. Johnny, c’est moto, cuir et rebelle attitude, etc. alors que Goldman est l’exact contraire.

Ce qui est curieux, c’est que vous auriez pu en fait facilement le rencontrer à l’époque de sa notoriété naissante. Vous étiez de quasi-voisins, vous dans le XIVe arrondissement de Paris, près de la Porte d’Orléans et lui qui travaillait et vivait à Montrouge, tout comme Renaud et Coluche d’ailleurs…

Il faut avoir vécu à Paris pour comprendre à quel point le boulevard périphérique est en fait une véritable muraille. Comme les remparts d’Avignon ou de Carcassonne. J’ai vécu une enfance parisienne au sein d’un milieu de la bourgeoisie à diplômes, je dirais, tandis que Goldman, lui, était un fils de Montrouge doublé d’un enfant de la classe moyenne voire populaire commerçante. Donc, sociologiquement et géographiquement, il n’y avait aucune raison qu’on se rencontre. Mais ça renvoie à votre première question : jusqu’à quel point peut-on connaître les gens sans les rencontrer physiquement ? Ça, c’est tout le défi de l’Histoire…

Vous rappelez également dans le livre que Goldman n’est aucunement le produit musical des yéyés des années 60. Il est beaucoup plus attiré par la Soul, le Rhythm’n’blues. Vous écrivez même qu’Aretha Franklin « est la drogue qu’il n’a jamais prise »…

Goldman n’est pas le genre qui vole, qui se drogue ou qui jette des pavés. Pour lui, Mai 68 s’est arrêté rapidement au contraire de son demi-frère, Pierre, qui a eu un parcours politique très différent. Comme il l’a dit lui-même, il était politiquement musicien. La musique a été son seul engagement viscéral, et sa dinguerie, sa seule drogue ce fut le Blues, la Soul puis, le son Goldman qu’il a élaboré dans la décennie 80…

D’autant qu’au départ, la musique n’est pas pour lui la seule activité vitale

qu’elle aura été pour tant d’autres. Il est diplômé de l’École des Hautes Études Commerciales, il vivra à Lille durant deux ans au sein de cette école, puis il reviendra ensuite à Montrouge pour travailler dans le commerce familial… »

À l’évidence, il a toujours été très désireux de faire de la musique toute sa vie, mais en revanche, il n’a jamais prétendu en faire son métier. Ça renvoie à ce que les sociologues appellent l’habitus de classe, c’est-à-dire la manière dont on se projette socialement dans un milieu et dans une perspective professionnelle. Chez les parents Goldman, il était formellement impensable de faire carrière dans la musique. Ce n’était pas un métier, comme ce n’était pas un métier de faire du théâtre chez Molière quelques siècles avant. « Passe ton Bac d’abord », comme l’ont dit

12 b GRAND ENTRETIEN — Ivan Jablonka №50 — Septembre 2023 — Vivre livre

des générations de parents. Mais il y avait aussi ce mépris d’origine marxiste vis-àvis de la culture de masse et de la musique industrielle. Pour ces familles-là, la Pop Culture était assimilée à une marchandise fabriquée par le capitalisme et ne représentait absolument rien de positif. J’en veux pour preuve que lors de son premier Olympia en 1984, Goldman n’a même pas invité ses parents. Il n’en était nullement fier, au fond… Néanmoins, il a dès le départ dépensé une énergie considérable pour percer, il lui a fallu pour ça attendre une quinzaine d’années après avoir pu acheter sa première guitare.

Dans les années 70, la chanson française se libère des années yéyés, elle s’émancipe de l’anglais, mais JeanJacques Goldman n’apparait pas pour autant dans les radars…

C’est vrai, la décennie musicale française de ces années-là, outre Brassens, Brel, Ferré, c’est Higelin, Renaud, Michel Berger, France Gall, Souchon, Julien Clerc… Goldman a dû penser que ça allait se faire sans lui et ç’aurait été d’autant plus tragique que ses tubes étaient déjà prêts : le son Goldman, les paroles et musiques existaient déjà en 1977. Mais il faudra encore cinq ans pour que Jean-Jacques devienne Goldman.

Pour autant, il n’a jamais cessé de se revendiquer comme chanteur de variétés. C’était presque un gros mot à l’époque. Chanteur de variétés n’était pas digne d’un grand chanteur français…

C’était tout à fait ça. Mais il a toujours assumé ce fait, car, outre la musique, c’était

son caractère populaire qui lui plaisait. Il voulait des chansons qui marchent, qui fassent danser et qui touchent les gens. Tout cela c’est la définition même de la Pop Culture, non ? On est là dans un trait tout à fait symbolique de Goldman : reprendre le stigmate pour lui. Vous méprisez la variété, je vais faire de la variété. Vous aimez la mode, je serai démodé. Plus tard, il dira même : vous trouvez que je suis réac, alors je suis réac…

Vous ajoutez que c’était une façon de rester « non homologué, c’est-à-dire fidèle aux siens »…

Fidèle au peuple dont il provient. Fidèle à l’histoire de tous les Goldman et des Jablonka du xxe siècle. Mon livre, en fait, raconte presque un siècle de l’histoire française…

Votre livre est riche de plein d’épisodes qui éclairent notre histoire. On est en 1982, c’est le début de cette incroyable Goldmania et Goldman sort Comme toi… C’est assez fascinant de réaliser qu’alors qu’il vient à peine de percer, il consacre une chanson à la Shoah. D’ailleurs, cette tragédie ne s’appelait pas encore comme ça à l’époque, le film éponyme de Claude Lanzmann n’avait pas encore été réalisé : on parlait d’holocauste, et encore… Donc, Goldman qu’on décrivait encore avec mépris comme un chanteur à minettes décide d’écrire une chanson sur le génocide en choisissant de parler d’une petite fille anonyme de huit ans. Il ne parle pas d’Anne Frank, il ne parle pas d’un camp d’extermination, il parle de cette petite fille-là. Et la façon dont il tourne son texte

est extraordinaire puisqu’en fait, ce n’est pas une façon nostalgique de parler de cette petite fille assassinée, il parle à une petite fille d’aujourd’hui, sa propre fille, en fait, qui a exactement le même âge et à qui il dit : « elle était comme toi ». On est là devant une construction assez complexe qui est de se souvenir d’une petite fille disparue tragiquement pour faire comprendre à une petite fille d’aujourd’hui à quel point elle a de la chance et combien elle se doit d’avoir une forme d’immense tendresse par rapport à son homologue du passé. Cette chanson se vend à plus de 500 000 exemplaires, c’est fascinant. Elle montre à quel point Goldman est un homme de fidélité, de fidélité à un parcours, à un milieu social et à une histoire. En outre, que cette chanson arrive si précocement dans sa carrière révèle une forme certaine de courage…

Il ne le sait peut-être pas à ce moment précis, mais il ouvre ainsi une période que les historiens appellent le renversement mémoriel. Le début d’une période où on va enfin parler abondamment de la Shoah et toutes ses conséquences. Avant les années 80, ce n’était pas du tout le cas…

Vous avez raison. Cette nouvelle ère mémorielle va continuer ensuite avec la Première Guerre mondiale puis la deuxième, le film de Lanzmann, les procès de Vichy… Avec le recul que nous avons aujourd’hui, on se rend bien compte à quel point Goldman a été visionnaire…

En même temps, vous listez les raisons du succès énorme de Goldman, outre

« Pour moi, en tant qu’historien, c’était essentiel de comprendre de quelle époque, de quelles structures
Jean-Jacques Goldman était l’héritier. »
13 b GRAND ENTRETIEN — Ivan Jablonka №50 — Septembre 2023 — Vivre livre

son talent : « L’essor des radios libres et l’avènement de Canal+ autorisé par François Mitterrand, l’avènement du Top 50, la production de plus en plus grande des clips musicaux et plus généralement le soutien énorme à la musique et à la culture accordé par les premiers gouvernements de la gauche au pouvoir. C’est le début de la civilisation audiovisuelle » expliquez-vous…

L’immense talent de Goldman ne suffit pas, en effet, à expliquer l’avènement de cette incroyable Goldmania. Vous venez de résumer cette incroyable structure socio-économique qui décuple son succès. Goldman a été le bénéficiaire objectif de tous les changements que vous évoquez. Pour moi, en tant qu’historien, c’était essentiel de comprendre de quelle époque, de quelles structures Jean-Jacques Goldman était l’héritier. Tout cela explique que la décennie des années 80 fut aussi celle de Goldman.

Et malgré ce succès incroyable, Goldman aura été en permanence méprisé par la presse de ces années-là. Objectivement, quelle en est l’explication ?

C’est la presse intellectuelle de gauche, celle pourtant dont ses idées étaient les plus proches de lui, qui l’aura méprisé le plus. Le Monde, Libération, Le Nouvel Observateur, Télérama… ont été très durs avec lui, mais il leur a bien rendu la monnaie de leur pièce. Au moment où il devient enfin mainstream, comme on dit aujourd’hui, au moment où il vend des millions et des millions de disques, il reste massivement méprisé, dénigré, ridiculisé. Forcément, le fait d’avoir rencontré enfin un tel immense succès sans pour autant être devenu légitime sera resté une immense blessure pour lui. Les élites, pour simplifier, ne l’auront jamais reconnu comme digne de valeur…

À l’orée des années 90, Jean-Jacques

Goldman prend peu à peu de plus en plus de distance avec l’incroyable popularité qui est la sienne. Vous parlez d’une position « d’ascèse pour ce saint laïc », c’est une expression très forte. Son succès, sa notoriété se mettent à lui peser de façon incroyable…

Pour les raisons que j’ai déjà évoquées, son histoire familiale, cette politisation de sa famille notamment, Goldman n’a jamais voulu rechercher cette notoriété et a toujours eu besoin et envie de rester dans une forme d’obscurité. Il a souvent dit que son rêve était d’écrire pour les autres sans pour

autant chanter lui-même ses propres chansons. Très vite, et ça va largement au-delà d’une simple réticence, il se met à fuir cette notoriété. Il se dirige vers l’absence, comme je l’écris dans le livre. Il s’insère volontiers dans des groupes qui sont autant de protecteurs et de facteurs d’anonymat. Il essaie de se refondre dans la masse d’autant que c’est la période de ses plus beaux albums pour d’autres chanteurs : Céline Dion, ses multiples collaborations avec Patricia Kaas… C’est le début de son effacement volontaire. 2001 est la date de son dernier album. L’année suivante, c’est celle de son dernier concert. Dans les trois années, il donnera de moins en moins d’interviews. Et soudain, il ne sera plus là ! Enfin, Jean-Jacques ne sera plus avec nous, mais Goldman, lui, restera partout ! Il fait à jamais partie de notre histoire commune.

C’est ce que vous appelez « la cinétique de la célébrité : comment devenir soimême, comment résister et comment rester libre » ?

Il y a une expression d’Alain Damasio, un auteur de science-fiction que j’aime bien : il parle de furtivité. Vous n’êtes plus traçable, vous n’êtes plus une personnalité publique, vous n’appartenez plus au domaine public, vous êtes de nouveau devenu anonyme, furtif… C’est un bon terme pour caractériser ce que Goldman a voulu redevenir. Ses chansons, on les écoute encore et encore et son passage assez récent au streaming prouve qu’il n’a jamais été autant écouté qu’aujourd’hui.

Pour conclure et je vous cite : « Goldman reviendra-t-il ? C’est surtout notre jeunesse qui ne reviendra pas, ce monde sans internet, ni écrans, ni réseaux sociaux ni Google ni Amazon, mais avec des stylos et des 45 tours… »

Il m’a fallu écrire cela pour réaliser vraiment le basculement non seulement d’un siècle à l’autre, mais aussi d’un millénaire à l’autre, comme le marqua l’avènement de l’an 2000. Ce ne fut pas seulement une question de calendrier. Toute une société a basculé dans un autre monde, dans une autre configuration culturelle et technologique. Quand on a des enfants et des petits-enfants, on voit bien qu’anthropologiquement, ce n’est plus vraiment pareil. Le simple fait de formuler à mes trois filles ce qui existait auparavant me transforme illico en diplodocus. Heureusement je reste un historien, ce qui me rappelle votre toute première question. Alors je le suis jusqu’à la fin et je leur dis : vous savez quoi ? Il y a quelque chose qui a changé entre hier et aujourd’hui et on va essayer de comprendre ensemble ce qui s’est passé… Mais attention je ne suis pas devenu pour autant un nostalgique. Je suis tourné vers l’avenir et évidemment, nous allons encore réaliser des choses formidables… Mais cet « objet » Goldman est là pour démontrer à quel point tout a si rapidement changé. Mon travail d’historien reste donc bien de décrire cette tectonique collective, c’est ce que je me suis appliqué à faire avec ce livre… » b

14 b GRAND ENTRETIEN — Ivan Jablonka №50 — Septembre 2023 — Vivre livre
Goldman, Ivan Jablonka – Éditions Seuil.
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PORTES

D’une Bibliothèque Idéale aux Bibliothèques Idéales Événement

Depuis 2006, où Strasbourg voyait naître une nouvelle manifestation littéraire autour de la thématique de la Bibliothèque Idéale, jusqu’à cette prometteuse édition de septembre 2023 des Bibliothèques Idéales, ce festival devenu essentiel et marqueur principal de la rentrée culturelle, a su imposer sa différence, attirant ainsi toujours plus d’écrivains, et toujours plus de monde pour les écouter et les rencontrer.

C’est à quelques semaines du festival, et quelques mois avant que Strasbourg ne devienne Capitale Mondiale du Livre pour une année, au cours d’un été pluvieux et studieux, que nous avons pu échanger avec son fondateur et directeur, François Wolfermann, passionné et passionnant.

c DOSSIER – BIBLIOTHÈQUES IDÉALES
Patrick Adler Nicolas Rosès
16 c DOSSIER — Bibliothèques idéales №50 — Septembre 2023 — Vivre livre

Quand on interroge le programmateur des Bibliothèques idéales sur les dix-sept ans de vie de « son » festival, ses yeux parlent autant que ses mots, pour évoquer l’évolution et les perspectives des « BI », comme beaucoup d’habitués, ainsi que l’équipe organisatrice qui entoure François, aiment à nommer la manifestation littéraire dont les Strasbourgeois sont si fiers.

En évoquant les débuts du festival, François se souvient notamment que tout avait commencé à la suite des « Conversations de Strasbourg », avec lesquelles était déjà vivante l’idée de faire exister la littérature dans des lieux atypiques, de la confronter à d’autres arts, en allant par exemple avec Dominique Fernandez commenter des tableaux du Caravage, ou encore, avec Régis Debray, découvrir l’horloge astronomique de la cathédrale.

Très vite a émergé l’envie d’échanger avec les écrivains autour de leur œuvre, sans forcément être dans la promotion de leur actualité, mais en évoquant notamment leur bibliothèque idéale. « C’était parce que je trouvais que la bibliothèque idéale, c’était lié aux affinités. Qu’est-ce que c’est ta bibliothèque idéale ? Qu’est-ce que tu emmènerais comme livre sur une île déserte ? Quelles sont tes affinités électives ? Qui sont les gens qui partagent ta vie, tes lectures, qui sont les gens qui regardent dans la même direction artistique que toi ? » François a très vite ressenti ce besoin, non pas de proposer une énième foire aux livres, mais de faire grandir le festival en faisant grandir également les écrivains et ceux qui les écoutent et les rencontrent, pour de vrais échanges autour de la littérature.

Tout au long de l’année, désormais…

L’autre axe fort des BI, et qui contribue largement à l’âme du festival, c’est cette volonté d’avoir su habilement mêler tout

ce qui tourne autour des mots, de la littérature à la philosophie, de la musique à la chanson, de la danse au théâtre... tous les arts peuvent se croiser pendant le festival et cela contribue bien sûr à en faire l’événement marquant de la rentrée culturelle strasbourgeoise.

Depuis début 2023, le festival a résolument pris une nouvelle envergure, à la fois en termes de statut, mais aussi de dimension. Ainsi, après avoir vécu pendant des années dans le giron exclusif de la Ville de Strasbourg qui assurait seule son financement, désormais, et suite à un Appel à Manifestation d’Intérêt, c’est un festival littéraire sous un tout nouveau format qui a été demandé à l’association Relatio qui a remporté le dossier.

Cette association, dont Maître Bernard Alexandre est le président, et dont François Wolfermann assure la direction, a ainsi, dès cette année, et après une session « classique » des BI en janvier, pu produire des événements baptisés Les détours des Bibliothèques Idéales.

C’est sous ce format que les Strasbourgeois ont pu assister au Temps des féminismes en mars à la grande salle de l’Aubette, et à un week-end consacré à la question « Que peut guérir la littérature ? » organisé à la BNU, place de la République, courant juin.

Les Bibliothèques Idéales vont donc nous accompagner dorénavant tout au long de l’année, avec le festival proprement dit en septembre et des détours, qui ne manqueront pas de s’intéresser aussi à des thèmes d’actualité : « Le nouveau format de l’association permet d’aller chercher de nouveaux financements, publics ou privés, et donc d’être plus ambitieux, mais surtout il permet une grande souplesse de programmation et d’être très réactif si nécessaire, avec, comme toujours, le désir de montrer ce que la littérature peut apporter comme points de vue différents et éclairants aux grands sujets qui traversent notre société. »

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17 c DOSSIER — Bibliothèques idéales №50 — Septembre 2023 — Vivre livre

Parmi les points importants que souhaite souligner François Wolfermann, quand on lui demande sur quels axes il souhaite travailler, il ne manque pas d’insister sur l’importance de l’implication des libraires indépendants, déjà initiée depuis quelques années, et qui contribuent déjà au festival avec de très belles propositions, comme ce sera encore le cas cette année, que ce soit lors du premier weekend au Parlement européen ou la semaine suivante à l’Aubette.

Le directeur des BI insiste également sur l’importance de la collaboration avec les différentes institutions de la ville, et se félicite justement du partenariat grandissant avec le Parlement Européen, comme il le sera prochainement avec la CEA et la Région Grand Est, mais aussi avec l’Opéra, l’OPS, les Musées de Strasbourg, Arte et bien d’autres organismes publics ou privés.

Un élément majeur semble également consister dans le partenariat fort avec les médiathèques de l’Eurométropole, et une forte volonté d’aller s’impliquer dans la vie des différents quartiers, en initiant notamment des actions avec les collèges, les lycées et les centres socioculturels. La littérature se doit d’être accessible au plus grand nombre et les Bibliothèques Idéales se font fort de remplir également cette mission.

Un Village des BI

Pour cette édition de septembre, après un premier week-end au Parlement européen, François se réjouit également d’aborder un vrai virage d’un point de vue de la convivialité et d’aller progressivement vers un Village des BI, une sorte de « cité idéale » où l’on pourra se retrouver pour boire un verre, faire dédicacer ses livres ou tout simplement échanger avec les écrivains comme avec les autres festivaliers. Ce sera pendant toute la semaine à l’Aubette, place Kléber, où la manifestation prendra ses quartiers, non seulement dans la grande salle, mais également dans les salles muséales et le ciné-bal, avec la bienveillance des Musées de Strasbourg.

Évidemment, on ne pouvait se quitter sans évoquer le label Strasbourg, Capitale Mondiale du Livre qui, d’avril 2024 à avril 2025, mobilisera tout particulièrement les BI et son équipe.

Sans révéler le contenu de tous les événements auxquels l’association Relatio prendra part, aux côtés de Lire notre Monde, la mission du service culture de la ville, qui gère le label et sa programmation, François évoque cependant des créations littéraires et musicales spécifiques, une grande lecture qui sera un moment fort de la semaine d’ouverture, et des grands concerts littéraires, avec une ouverture marquée vers l’Europe et le reste du monde, comme la manifestation y incite par essence.

Alors, avant Strasbourg Capitale Mondiale du Livre, avant les Bibliothèques Idéales qui débutent ces jours-ci, François Wolfermann s’enthousiasme, et nous avec lui : « C’est le livre et la littérature qui souvent précèdent ou qui annoncent ce qui va se passer. C’est Barjavel avec le monde qui brûle... On y est. Celui qui ne s’intéresse pas à la littérature, qui ne lit pas, rate quelque chose par rapport à la vie même parce que la littérature nous dit quelque chose sur notre vie à tous, et sur notre vie intime... sur la vie. Et c’est ça, c’est ça les BI ! On y trouve des clés pour comprendre les choses de l’existence et puis aussi, à un moment, on est assis simplement devant un spectacle, et puis on entend des textes, mis en musique... comme ce qui va se passer cette année avec les soirées autour de Christophe ou de Mouloudji… Ce seront des soirées énormes où tout à coup, la littérature sera magnifiée par les arts, voilà c’est ça les BI ! » c

« C’est le livre et la littérature qui souvent précèdent ou qui annoncent ce qui va se passer. (...) On y est. »
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Rencontre le vendredi 15 septembre à 17H30 au Parlement européen.

Sur le plateau des BI

Sorj Chalandon et le petit cinquante-sixième…

Voilà un livre qui saisit son lecteur, le prend à témoin du si peu de considération humaine qui régnait il n’y a pas finalement si longtemps dans notre bon pays de France et qui, à l’image des grands romans du xixe siècle, révèle une intrigue haletante jusqu’au bout du bout de sa dernière page. Celles et ceux qui seront présents lors de la venue de Sorj Chalandon aux prochaines Bibliothèques idéales vont retrouver le plaisir d’entendre – puis de lire – cet auteur qui occupe une place unique dans la littérature française, après avoir été un « monstre » du journalisme de la seconde moitié du xxe siècle…

On sourit quand Sorj nous confirme le lieu qu’il a choisi à Paris, pour réaliser cette interview avec Or Norme : « Je te suggère la brasserie Le Scossa, place Victor Hugo. J’habite tout près. Et tu sais pourquoi elle s’appelle comme ça ? Son premier propriétaire, un Italien, a choisi ce nom, La Secousse, en français, parce qu’en la visitant pour la toute première fois, le sol a tremblé sous ses pieds au passage du métro de la ligne 2… »

Et effectivement, à peine installé en terrasse sous ce beau soleil du début juillet dernier, on sent distinctement la secousse sous nos semelles. Presque le début idéal d’un roman, songe-t-on…

Puis Sorj arrive… avec son allure débonnaire, sa crinière de vieux renard argenté, son regard bleu métallique et son fin sourire toujours bienveillant. Il vient juste de passer le seuil de sa 71e année après une superbe carrière de ce journalisme d’autodidacte qui était encore possible au début des années 70 et dont le moule s’est brisé définitivement il y a déjà un long moment. Sorj, entré à Libération en 1974, a passé 33 ans au sein de la rédaction du journal. Il a débuté

comme dessinateur puis s’est essayé aux montages des pages avant de devenir journaliste au service Société. Reporter puis grand reporter, il a couvert, entre autres, les événements au Liban, en Iran, en Irak, en Somalie ou en Afghanistan.

La reconnaissance suprême est arrivée moins de quinze ans plus tard, en 1988, avec l’obtention du prix Albert-Londres pour ses articles sur l’Irlande du Nord et le procès de Klaus Barbie. Devenu ensuite rédacteur en chef adjoint de Libé, il claqua violemment la porte du quotidien quand le nouveau propriétaire, Édouard de Rotschild, décida alors de tourner la page Serge July. « Ce journal m’a appris à être journaliste… Aujourd’hui je suis en deuil » clame-t-il. Et, avec élégance, il préfère ne pas évoquer plus le sort du titre qui l’a fait naître…

Aujourd’hui, Sorj Chalandon signe chaque semaine dans les colonnes du Canard Enchainé

L’Enragé, qu’il présentera sur la scène des Bibliothèques idéales, est son onzième livre, tous ont été publiés chez le même éditeur, Grasset, « grâce au flair et à la belle pugnacité de mon éditrice d’origine,

Martine Boutang », tient à préciser Sorj. Les distinctions n’ont pas manqué : Prix Médicis 2006 pour Une promesse , Prix Joseph-Kessel et Prix Simenon 2008 pour Mon traître, Grand prix du roman de l’Académie française 2011 pour Retour à Killybegs, entre plein d’autres…

Tous, sauf un…

« Je connaissais l’existence de cette colonie pénitentiaire pour mineurs installée sur Belle-Île-en-Mer. L’administration appelait comme ça ces endroits-là, mais la presse parlait de “bagnes pour enfants”. Celui de Belle-Île a fermé en 1977, mais depuis 1880, des centaines d’enfants y avaient été enfermés et soumis à des conditions de vie et à une violence difficilement imaginables aujourd’hui. Le soir du 27 août 1934, cinquante-six gamins se sont révoltés et ont fait le mur. Cernés par la mer, ils ne pouvaient pas aller très loin et les gendarmes ont décidé d’offrir une pièce de vingt francs argent pour chaque enfant capturé. Alors, les braves iliens se sont mis en chasse et ont traqué les fugitifs partout sur l’île. Tous

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20 c DOSSIER — Bibliothèques idéales №50 — Septembre 2023 — Vivre livre

ont été rattrapés. Sauf un, qui a toujours échappé aux poursuites.

C’est à ce cinquante-sixième gamin que je me suis intéressé. Dans mon roman, tout est vrai… durant un tiers du livre, cette partie où je décris les conditions atroces qui étaient celles de ces mômes… Ils étaient souvent torturés, battus… J’ai même appris que les gosses apprentis menuisiers étaient chargés de fabriquer les cercueils de leurs copains, c’est fou, non ?

Puis j’imagine la vie et le destin de ce dernier môme qu’on n’a jamais retrouvé. La presse de l’époque, que j’ai consultée, est presque unanime pour estimer qu’il a péri en mer. Je n’ai surtout pas voulu lui redonner vie dans la peau d’un petit orphelin malheureux, j’en ai fait un enragé, comme le dit le titre du livre. D’ailleurs, avec mon éditrice, on a longtemps hésité sur ce titre, on a envisagé également “La teigne”…

Les lecteurs de mes livres se souviennent sans doute des rapports douloureux que j’ai pu avoir avec mon père. Quand j’étais môme, une de ses menaces rituelles était de m’envoyer dans ce qu’il appelait une “maison de correction” ou encore une

“maison de redressement”. Une nuit, il m’a même emmené dans la campagne de la région de Lyon, où nous habitions, au pied d’un immense mur, devant une porte close. Il m’a déposé là et m’a dit : “Tu toques à la porte, tu dis que tu t’appelles Chalandon, ils t’attendent !” J’avais douze ans, je lui ai obéi. Mais j’avais compris qu’il cherchait à m’impressionner. Alors, j’ai retraversé la route, je me suis caché derrière de grandes herbes et je l’ai vu revenir et me rappeler : Sorj ! Sorj ! Je suis réapparu : “Ils n’ont pas voulu que je rentre”. “Je sais, je sais” m’a-t-il dit, “j’ai réfléchi, je te donne une nouvelle chance…” Voilà, je vivais avec ça quand j’étais môme. Je me suis littéralement sauvé, ensuite, j’ai été émancipé, comme on disait, sur le coup de mes seize ans… Arrivé à la Gare de Lyon à Paris après un voyage en train effectué sans avoir acheté le moindre billet, j’ai vécu comme un SDF puis, un jour, j’ai entendu un crieur de journaux qui braillait : “Demandez la Cause du Peuple ! (‘l’ancêtre’ du journal Libération – ndlr)” Ç’aurait pu être l’Église de Scientologie ou n’importe quoi d’autre. Après avoir dormi dans pas mal de squats,

ces gens m’ont fait faire la connaissance d’un couple de profs qui m’ont offert pour un temps la chambre de leur fils parti pour ses études et m’ont obligé à passer mon Bac, en candidat libre. Grâce à eux, j’ai découvert les musées, la beauté et toutes sortes de choses qui m’avaient été jusqu’alors interdites. J’ai découvert aussi la morale, la dignité. Et après, je suis entré à Libé. Un jour, Sartre m’a pris le bras pour que je l’aide à traverser la rue. T’es un môme chevelu qui surnage et tu te dis : Putain, c’est Jean-Paul Sartre. Bon, tu connais la suite… »

Et, dans L’Enragé, quand on lui fait remarquer cette liberté totale qu’il s’est permise avec la description si précise (et si affectueuse, au fond) de cet ado enragé, de cet être à qui il a redonné si formidablement vie, il ne faut pas longtemps avant que Sorj confirme : « Oui, c’est bien sûr un peu moi, ce môme. Je vais te dire, si je n’avais pas eu moi-même ces peurs en moi, si je n’avais pas eu cette terreur de mourir sous les coups de mon père, je ne pense pas que j’aurais pu écrire ce livre. Ce sont mes limites en tant que romancier. Je ne peux pas écrire des

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choses essentielles si, à la racine, je n’ai pas vécu moi-même ce dont je parle. Pour écrire Mon traître, il m’a fallu être moi-même trahi, et pour Une joie féroce, j’ai écrit une partie de ce livre à l’hôpital alors qu’on soignait mon propre cancer ! Oui, ce môme, c’est moi… »

La magie du roman

Et après quelques longues confidences sur tout ce qui a resurgi de sa vie pour bâtir la personnalité de ce petit Jules Bonneau, le bon Sorj glisse dans un souffle : « Oui, je l’aime ce môme, je l’aime… Si je n’ai pas voulu en faire un petit orphelin sur lequel on se serait forcément apitoyé, il est devenu dans mon livre un vrai révolté, avec cette colère, cette rage qu’il a au plus profond de lui, mais qui, petit à petit, desserre le poing. C’est ça qui m’intéresse chez ces gens-là : comment arrive-t-on à peu à peu entrer en paix. Ce qui ne sera d’ailleurs pas le cas de mon enragé pour qui toute sa vie va être une guerre… »

Parmi les épisodes qui décrivent la traque nocturne des cinquante-six petits fuyards, celui du poète parisien ne peut que frapper. « Ce n’est pas issu de mon imagination » annonce aussitôt Sorj. Ce poète parisien, qui a vraiment séjourné à Belle-Île, s’était fait remarquer par les iliens de l’époque par une certaine originalité dans son comportement. Témoin de cette nuit où on a incité la population à pourchasser les petits fuyards, il a ensuite écrit un poème : Chasse à l’enfant publié au sein d’un recueil célébrissime : Paroles. Ce poète parisien s’appelait Jacques Prévert…

Oui, on est bien là en plein cœur de la magie du roman. Près d’un siècle plus tard, la tragédie de ce groupe de mômes nous bouleverse et Sorj Chalandon fait revivre le petit cinquante-sixième, dont on était resté sans nouvelle depuis 1934. L’écrivain le fait avec un respect infini, pétri dans

une gangue d’humanité et de bienveillance. Et quand on lui fait remarquer tout l’attachement pour son personnage qu’on devine en lui, Sorj devient soudain mystérieux, plonge la main dans sa poche et explique : « Pour chacun des livres que j’ai écrits, j’ai déniché un gri-gri que j’ai toujours conservé sur moi. Pour mon livre sur la mine, ce fut une véritable taillette de mineur (une petite plaque métallique sur lequel figurait le numéro matricule de chaque mineur, qui devait l’avoir sur soi lors de son séjour sous terre – ndlr). Pour L’Enragé, c’est évidemment la pièce de 20 francs argent de 1934 que les gendarmes ont promis aux iliens qui rattraperaient un des fuyards. C’est le prix d’un enfant, voilà, la valeur de quatre pains d’un kilo à l’époque… Écoute ce bruit… » dit Sorj en faisant tourner la pièce sur la table métallique de La Scossa. « C’est le bruit de l’argent massif, tu fais tourner une pièce d’un euro sur cette même table, ça ne fera quasiment pas de bruit… C’est bouleversant de savoir que cette pièce était le prix d’un enfant, en 1934, à Belle-Île, non ? »

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« Je connaissais l’existence de cette colonie pénitentiaire pour mineurs installée sur Belle-Île-en-Mer.
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L’administration appelait comme ça ces endroits-là, mais la presse parlaient de bagnes pour enfants. »

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Sur le plateau des BI

Pierre Mann, les Mémoires d’un passionné de l’Homme et de la Terre

Il aura gaillardement traversé plus de six décennies, caméra au poing, et transmis à des centaines de milliers de spectateurs sa passion des animaux sauvages et de la nature. Désormais octogénaire, il continue à parcourir le monde pour témoigner, à hauteur d’homme, de la magnificence de la vie animale et des dangers qui la menacent. Pierre Mann sera sur le plateau des Bibliothèques idéales le 18 septembre lors des 100 ans des Éditions La Nuée Bleue qui publient ses Mémoires, récit unique d’un parcours de vie vraiment exceptionnel…

Parmi les nombreux lecteurs qui ne manqueront pas de dévorer les Mémoires de Pierre Mann, beaucoup seront peut-être surpris par les dramatiques souvenirs personnels qu’il évoque et qui datent de la Seconde Guerre mondiale et ses suites qui n’ont pas épargné sa vie naissante et celle de sa famille. « J’avais à peine six ans quand, le 13 février 1945, je me suis retrouvé sous les bombes des avions alliés qui ont complètement rasé la ville allemande de Dresde, un des épisodes les plus tragiques de la fin de cette guerre » se souvient Pierre. « Mais, si jeune, coincé plus d’une fois dans cette cave obscure où nous étions tassés et dont les murs vibraient sous le coup des explosions, à aucun moment je n’ai été traumatisé, pour autant que je me rappelle. Je pense qu’à cet âge, on n’a ni la notion ni la peur de la mort. En fait, la peur que j’ai ressentie dans ces circonstances extrêmes était plus liée à cette partie béante et totalement obscure de la cave qui se trouvait devant mes yeux. Plus tard, nous sommes sortis une première fois de notre abri, et nous n’avons pas fait cent mètres avant que nos cheveux commencent à grésiller. Je me souviens de la vision dantesque d’une véritable tornade de feu qui barrait le fond de notre rue, provoquée par les milliers de bombes au phosphore qui venaient

de s’abattre sur la ville. Nous habitions en bordure d’une très grande place où il y avait, en son centre, un immense réservoir d’eau à ciel ouvert. Je me souviens de ces gens qui couraient désespérément, avec le feu sur eux, pour plonger dans ce réservoir et de ce feu qui ne s’éteignait pas pour autant. Ma tante, avec qui j’étais, ne songeait qu’à fuir cet enfer et lors de notre deuxième sortie, nous avons commencé à longer l’Elbe, mais tous les ponts étaient détruits. Elle m’a alors confié à un vieil homme qui passait à vélo avec l’adresse de ma seconde tante qui habitait dans un petit village, loin de la ville… »

Un second épisode, plus traumatisant celui-là, va marquer le jeune garçon. La guerre terminée, à leur retour à la maison familiale au Neudorf, les parents réalisent qu’ils ont été littéralement spoliés de leurs biens. Un voisin, « résistant de la 25e heure » comme on le disait à l’époque, avait dénoncé mon père, prétendant qu’il était un collaborateur. Il fait également dénoncer nombre d’autres personnes, utilisant à chaque fois la même lettre, ne changeant que les noms. « Emprisonné, mon père n’a même jamais été entendu par un juge », raconte Pierre Mann. « On sait très bien que durant cette période d’épuration, les cas de justice expéditive n’ont pas manqué… », commente-t-il,

sans colère, mais avec de la tristesse dans la voix. Les lecteurs du livre apprendront qu’il aura fallu très longtemps pour qu’il réussisse à raconter cette douloureuse histoire. Son épouse, Sabine Trensz, l’aura mainte fois incité à le faire, mais ce seront plusieurs rencontres avec le cinéaste Costa-Gavras qui auront au final été déterminantes : dans un des courriers que le réalisateur de Z a envoyés à Pierre Mann figure ce simple mot : « Osez ! ». Pierre a fini par oser…

Le cinéma, en autodidacte…

Son père blanchi et rétabli enfin dans ses droits, le petit Pierre Mann est devenu un jeune ado. C’est le Strasbourg des années 50 et il devient littéralement fou de cinéma. À l’époque, les acteurs se succédaient dans la capitale alsacienne et c’était alors la chasse aux dédicaces. Chaque week-end, avec un copain complice, c’était toujours la classique manœuvre des « sans-le-sou », l’entrée par… la porte de sortie des spectateurs de la séance précédente. « Peu à peu, je me suis comme forgé un œil cinématographique, dit Pierre, et, plus tard, je me souviens encore de la réflexion du projectionniste d’un grand cinéma parisien où

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24 c DOSSIER — Bibliothèques idéales №50 — Septembre 2023 — Vivre livre

je venais de présenter mon premier film professionnel Les chemins du désert en présence notamment de Françoise Giroud (rédactrice en chef de l’Express ) et du grand cinéaste René Clair : “Par quelle école de cinéma es-tu passé ?” m’a-t-il demandé. Je lui ai avoué que je n’avais pas suivi les moindres cours… “Et bien, ton montage est incroyable, il faut que tu continues…” a-t-il poursuivi. Pour moi, cet avis était extraordinaire. Plus tard encore, on m’a parlé de la remarque de Claude Lelouch : « Lorsque vous sortez d’une école de cinéma, oubliez aussitôt tout ce que vous avez appris… »

« J’ai toujours préféré les grands films documentaires et bien sûr, ceux consacrés aux animaux. La toute première fois que j’ai découvert l’Afrique, je me suis dit : mais bon sang, ce n’est pas du tout ça !

J’en étais resté aux films de Tarzan avec Johnny Weissmuller que j’avais dévorés au début de mon adolescence ! J’étais dans la savane et je pensais ne trouver que la jungle… (rire) ».

Les combats pour la vie

Parallèlement à la réalisation de ses tout premiers films, Pierre Mann a d’emblée

milité au sein de l’Association Fédérative pour la Protection de la Nature (plus connue aujourd’hui sous le nom d’Alsace Nature) qui venait juste de voir le jour. « À l’époque, nous étions clairement des pionniers, nous étions très minoritaires et on nous considérait un peu comme des rigolos. Dans mes premiers films, je dénonçais déjà la pollution, l’usage des pesticides, la disparition de la forêt primaire… bref tous ces thèmes devenus aujourd’hui très populaires. Tout ce que j’évoquais à l’époque s’est bien sûr gigantesquement aggravé depuis… Mais j’avais trouvé ma voie en filmant la nature et les animaux. Parallèlement, j’avais une famille et un métier. J’ai toujours été soutenu inconditionnellement par Évelyne, ma première épouse. Professionnellement, j’étais cadre bancaire et je dirigeais un large secteur de la Caisse d’Épargne. Il m’est arrivé plus d’une fois de poser mon stylo le vendredi après-midi et de filer attraper mon sac et mon matériel, car j’avais un avion le même soir pour l’Afrique. Et j’utilisais l’intégralité de mes congés pour produire mes films. Les journaux ont commencé à parler régulièrement de mes réalisations. Alors, le grand patron de la banque a fini par dire : “Il va falloir quand même que

Mann choisisse entre le cinéma et notre banque”. Mais comme j’obtenais de très bons résultats, jamais on ne m’a obligé à faire ce choix. D’autant plus qu’à l’époque, FR3 Alsace m’avait demandé d’animer des émissions régulières. Évidemment, j’y avais associé la Caisse d’Épargne… » se souvient Pierre avec malice…

Tout le reste, du prix de la Fondation de la Vocation juste avant ses trente ans (face à plus de 3 000 candidats) jusqu’à la réalisation de dizaines de films (le dernier, monté il y a à peine quelques mois, a déjà été acheté par Arte qui le diffusera l’an prochain), vous le lirez dans les pages de Leçons d’humanité qui sera disponible lors des prochaines Bibliothèques idéales. Le titre résume bien les combats de cet authentique amoureux de la nature, lui qui se plait à répéter sans cesse que « ce n’est pas la planète qu’il faut sauver, mais bien l’espèce humaine qui la peuple… »

Infatigable, Pierre Mann commentera son livre puis il bouclera ses valises pour un nouveau voyage en Afrique, cet automne. « J’ai parcouru la planète entière, les terres glacées, les savanes, les déserts, les jungles… mais les voyages sur ce continent fascinant, je ne les compte plus », dit-il. « Je ne dois pas être loin du 130e, je crois… » c

25 c DOSSIER — Bibliothèques idéales №50 — Septembre 2023 — Vivre livre
Pierre Mann

Pascal Ito – Vincent Muller – JF Paga – Olivier Roller – Hermance Triay – Manon Cha – Bénédicte Roscot – Francesca Mantovani –Hannah Assouline – Fabien Coste

Édition 2023

SAMEDI 16 SEPTEMBRE à 14h

www.biblideales.fr

Rencontre

Camille Étienne

À 25 ans, Camille Étienne est l’un des visages montants du militantisme écologique. Dans son livre Pour un soulèvement écologique (Seuil), elle identifie les mythes qui nous entravent : éco-anxiété, fracture générationnelle, déclic, fausses peurs. Pour elle, les paniques morales n’ont qu’un dessein : nous distraire de la peur qui devrait nous habiter et pourrait nous pousser à désobéir, ralentir ou cesser de coopérer. Elle défend une écologie libératrice, portée par une puissance collective et démocratique.

Parlement européen

André Comte-Sponville

André Comte-Sponville est l’un des philosophes français les plus et les plus traduits dans le monde. Il présentera dans au sein de l’hémicycle européen La clé des champs et autres impromptus (Puf), composé de douze magnifiques textes autour de sujets sombres et douloureux : mort d’un enfant, pandémie, euthanasie… « J’ose croire qu’ils ne seront pas pour autant causes de tristesse, mais aideront plutôt à accepter, aussi joyeusement que possible, la part en toute vie de deuil, de chagrin ou de détresse. » A.CS

Parlement européen

SAMEDI 16 SEPTEMBRE à 16h

Dans son dernier essai La clinique de la dignité (Seuil), la psychanalyste et philosophe Cynthia Fleury se met au chevet des « vies indignes ». Elle convoque la philosophie, la littérature et la psychanalyse pour élaborer une analyse du concept de dignité par ses marges et son envers. Passionnant… et nécessaire.

Parlement européen

26 c DOSSIER — Bibliothèques idéales №50 — Septembre 2023 — Vivre livre

BI : la sélection de Or Norme c DOSSIER – BIBLIOTHÈQUES IDÉALES
Septembre à peine entamé et c’est le retour des Bibliothèques Idéales. Voici notre sélection issue du riche programme concocté cette année, notamment à L’Aubette où un café littéraire sera installé.
Tous les détails et le programme complet sur le site
Rencontre Cynthia Fleury Rencontre
SAMEDI 16 SEPTEMBRE à 15h

DIMANCHE 17 SEPTEMBRE à 14h

Rencontre

Boris Cyrulnik

Le neuropsychiatre Boris Cyrulnik poursuit son exploration conjuguée de l’âme humaine et des monde animaux dans Quarante voleurs en carence affective (Odile Jacob). Les enfants en carence affective risquent de devenir des adultes violents. La parole humaine, source de créativité, engendre aussi l’horreur des guerres de croyance. Comparant les animaux et les hommes, convoquant une somme inégalée de connaissances et d’expériences cliniques, il nous fait ressentir et comprendre la violence du monde et les racines de la guerre. Une œuvre magistrale.

Parlement européen

Rencontre

Thomas Piketty & Julia Cagé

En croisant pour la première fois l’histoire du vote en France depuis 1789 avec celle des revenus et du capital, Julia Cagé et Thomas Piketty portent un regard neuf sur la crise actuelle. Ils signent ensemble Une histoire du conflit politique (Seuil), leur premier livre en commun. Leur venue est un événement !

Parlement européen

DIMANCHE 17 SEPTEMBRE À 15h

DIMANCHE 17 SEPTEMBRE à 16h

Rencontre Abd al Malik

Quand le Roméo du hip-hop écrit à la Juliette de Saint-Germain. Dans Juliette (Robert Laffont), texte poétique et littéraire, Abd al Malik rend un hommage flamboyant à la muse Juliette Gréco, femme libre et rêve et réécrit ses rencontres, avec Picasso, Brel, Prévert, Ferré. Immense.

Parlement européen

Rencontre

Régis Debray

C’est un ami fidèle des Bibliothèques idéales et ses nombreux lecteurs savent à quel point ses déplacements sont rares et précieux. Dans Où de vivants piliers (Gallimard), l’immense philosophe exprime une mélancolie qui accompagne le recul de l’intelligence et le déclin de la culture classique. Il livre une déclaration d’amour à la littérature et rend hommage à ses intercesseurs et éveilleurs.

Parlement européen

SAMEDI 16 SEPTEMBRE à 17h30
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Rencontre

Pascal Ory

C’est un de nos très grands intellectuels européens. Pascal Ory présente à Strasbourg Ce côté obscur du peuple (Bouquins). Dans les dix textes rassemblés ici dont quatre livres, publiés au long de quarante années et qui présentent tous un caractère d’étude historique, il questionne certaines figures récurrentes comme le populisme ou l’anarchisme de droite, et certaines conjonctures radicales, comme le fascisme ou la Collaboration.

Aubette

Rencontre

Marie-Christine Barrault

Formée au cours Simon puis au Conservatoire d’Art Dramatique, Marie Christine Barrault mène sa carrière sur tous les fronts : théâtre, cinéma, télévision, plateformes numériques... Elle a travaillé avec les plus grands. Dans Si tu savais, c’est merveilleux (Stock), on y lit réflexions personnelles, éléments de biographie factuels et hommages joyeux aux morts s’entremêlent pour, au final, voir se dresser un portrait impressionniste de la comédienne. Un ouvrage élégant et lumineux, à son image.

Aubette

Enregistrement Podcast

JEUDI 21 SEPTEMBRE À 18H

Victoire Tuaillon & Neige Sinno

Lecture + musique

Léonor de Récondo

Avec son nouveau roman Le grand feu (Grasset), Léonor de Récondo revient en beauté vers sa passion de la musique. Pour la première fois, elle parle intimement de l’instrument qu’elle pratique depuis toujours, de son apprentissage, de l’émotion qui la saisit en jouant. Musicalité de la langue qui épouse les couleurs, les sensations, les odeurs et les sons du Venise de l’époque… Rencontre autour du livre puis lecture musicale aux côtés de la musicienne Elisabeth Geiger.

Aubette

Victoire Tuaillon est la créatrice du célèbre podcast « Les couilles sur la table ». Elle propose pour les Bibliothèques idéales l’enregistrement en direct depuis l’Aubette de son nouveau podcast « Nous faire justice ». Son invité ? Neige Sinno, auteure de Triste tigre (POL), livre choc de la rentrée, terrible récit d’un abus sexuel affronté par la littérature. Du viol subi de la part de son beau-père, l’écrivaine française en tire un récit à la fois intime et analytique, formidablement mené.

Aubette

JEUDI 21 SEPTEMBRE à 19h JEUDI 21 SEPTEMBRE à 17h
c DOSSIER – BIBLIOTHÈQUES IDÉALES 28 c DOSSIER — Bibliothèques idéales №50 — Septembre 2023 — Vivre livre
MARDI 19 SEPTEMBRE à 20h

Concert hommage

Marceau

C’est une création originale, à la croisée des arts, comme les Bibliothèques idéales en ont le secret. Enfant de Strasbourg, Marceau a construit son identité profonde sur le silence et la sacralisation du geste, comme une urgence et une réponse apaisante aux bruits assourdissants de la Seconde Guerre mondiale. Marceau transmet un message d’urgence par le prisme de son jeu muet. En quelques minutes, il mime notre existence, de la naissance au dernier souffle. Sa marche contre le vent ira jusqu’à inspirer le moonwalk de Michael Jackson et sa conception du corps influencera, entre autres, les chorégraphies de David Bowie… Présentation du livre-événement Histoire de ma vie (Actes Sud) avec les filles du célèbre mime, Aurélia et Camille, et un concert de de Grégory Ott (piano et compositions originales), Sébastien Vela Lopez “Lokos” (création danse et chorégraphie), Roland Grob, contrebasse et le Collectif de danse Faccrew.

LEELA JAMES I MAYA KAMATY I BCUC

ODEZENNE UNPLUGGED I 79RS GANG

LES MAMANS DU CONGO & RROBIN

JUSTE SHANI I ATOEM I DEAD CHIC

KIN’GONGOLO KINIATA I LIV ODDMAN

FRANCKY GOES TO POINTE-À-PITRE

AGORO NANCY JAZZ TOUR I NOTILUS SORTIE D’ALBUM I ÉNAÉ

ROMAIN MULLER I LOLIE TAI SORTIE D’EP

LEXY WALT I OCEYA I CHEAP HOUSE

DEMAIN RAPIDES I BRIQUE ARGENT

FESTIVAL MUSICA I BLIND TEST I KARAOKÉ LIVE

CONCERT “À LA BONNE HEURE” I RAIDS URBAINS

TOURNÉE DES RÉCRÉS ET DES CRÈCHES

LA TOURNÉE DES iNOUïS I APÉRO SCÈNE LOCALE…

SEPT. 2023 DÉC.

TOUTE LA PROGRAMMATION SUR ESPACEDJANGO.EU STRASBOURG NEUHOF
Aubette
№50 — Septembre 2023 — Vivre livre
VENDREDI 22 SEPTEMBRE à 17h

Rencontre

Laurent Binet

Laurent Binet est familier des romans historiques, à rebondissements. Il aime distordre la réalité, questionner la forme et le langage. Avec Perspective(s) (Grasset), roman épistolaire et policier, il ausculte une période complexe de l’Italie du xvie siècle. Un cluedo historique irrésistible, roman incontournable de cette rentrée littéraire !

Rencontre

Zhang Zhang

La Chine, son histoire, la violence de la Révolution culturelle : la violoniste Zhang Zhang nous raconte dans La voie de l’archet (Fayard) la rudesse d’un régime autocratique et la douleur de l’exil. Elle a fui son pays et est désormais Premier violon dans l’orchestre de Monaco. Elle porte une parole libre.

Rencontre

Éric Fottorino & Alexandre Jardin

Concert littéraire Mouloudji

Une création originale des Bibliothèques idéales, hommage à l’immense Mouloudji. Il a chanté l’amour, l’abandon, l’amitié, l’humanité et l’engagement pacifique. Un cœur d’éternel adolescent, des talents multiples : comédien, auteur, peintre et surtout chanteur. Traversant les mêmes sentiers poétiques que Vian, Prévert, Brassens, Cocteau. Une plume alerte, une voix tendre et singulière, un ton authentique, un répertoire varié mêlant des chansons sentimentales, engagées, poétiques, historiques. Mouloudji, c’est tout cela à la fois… Concert littéraire en présence de Annabelle Mouloudji (fille de Mouloudji, autrice), Grégory Mouloudji, (fils de Mouloudji, chanteur), Nathalie Rheims (amie de Mouloudji, écrivaine), Cris Caroll (compositrice des grandes chansons de Mouloudji), Grégory Ott (piano) & Léo Scheer (éditeur).

Aubette

Deux romans familiaux, deux romans à vif, portés par deux auteurs incontournables. Dans Dix-sept ans, Éric Fottorino évoquait le fantôme qui hantait le début de son roman familial : une petite fille née trois ans après lui et aussitôt arrachée à sa mère, Lina, puis adoptée dans la clandestinité d’une institution religieuse bordelaise. Mon enfant, ma sœur est d’abord la quête de cette inconnue, mais aussi la bouleversante recherche de sa propre identité… Avec Frères (Albin Michel) Alexandre Jardin évoque pour la première fois le suicide de de son frère. Dans ce récit à vif, il évoque pour la première fois ce deuil qui ravive le passé et déchire le présent. Avec pudeur, il revisite la légende d’une famille où, entre parents et enfants, les rôles sont inversés, interroge la dualité d’un garçon qui finira par céder à la mort, et élève à ce frère une sépulture de papier.

Médiathèque André Malraux

SAMEDI 23 SEPTEMBRE à 16h Aubette SAMEDI 23 SEPTEMBRE à 15h SAMEDI 23 SEPTEMBRE à 18h30 Médiathèque Malraux
c DOSSIER – BIBLIOTHÈQUES IDÉALES 30 c DOSSIER — Bibliothèques idéales №50 — Septembre 2023 — Vivre livre
VENDREDI 22 SEPTEMBRE à 18h

DIMANCHE 24 SEPTEMBRE à 14h

Opéra national du Rhin

Saison ’23’24

Lecture

Valérie Bonneton, l’humour est-il une arme ?

Valérie Bonneton lit et joue pour nous sur la scène des Bibliothèques idéales ! Avant la reconnaissance de l’actrice et son rôle déjanté dans Fais pas ci, fais pas ça, il y a eu les galères et les drames. Dans Maman à moi (JC Lattès) Gaston prend la parole pour raconter… Qui est Gaston ? C’est un bichon maltais petit, poilu et blanc. Il la voit perdre pied, se battre, renaître, vaillant soldat au service d’un grand amour. Un premier texte tout en fantaisie, pudeur et en émotion.

Aubette

DIMANCHE 24 SEPTEMBRE à 15h

Opéra

Don Giovanni aux enfers Simon Steen-Andersen

Rencontre

François Jullien

Chacun de ses déplacements est un événement. Philosophe, helléniste et sinologue, entre Chine et Europe, François Jullien est l’un des penseurs contemporains les plus traduits. Il nous parle d’intelligence artificielle et nous alerte sur le recul de la pensée dans notre société moderne. Et nous invite, face au marasme ambiant, à mettre en pratique son concept de « décoïncidence » afin de rouvrir des possibles.

Aubette

Lakmé Léo Delibes

Le Journal d’Hélène Berr Bernard Foccroulle

Polifemo Nicola Porpora

Les Fantasticks Harvey Schmidt

Lohengrin Richard Wagner

Guercœur Albéric Magnard

Norma Vincenzo Bellini

Danse

Danser Schubert au XXIe siècle

Kamuyot Ohad Naharin

Chaplin Mario Schröder

Sérénades Brett Fukuda / Gil Harush / Bruno Bouché

On achève bien les chevaux Bruno Bouché, Clément Hervieu-Léger & Daniel San Pedro

Spectres d’Europe Pierre-Émile Lemieux-Venne

Lucas Rodrigues Valente / Alba Castillo

©
de la billetterie le 5 septembre operanationaldurhin.eu
Paul Lannes Ouverture

Avignon 2023

La fin de la mythique « Caserne des pompiers »

C’est un violent coup de tonnerre (dans un ciel azuréen) qui a bousculé le monde du théâtre alsacien et du Grand Est au moment où les premières troupes débarquaient en Provence pour l’édition 2023 du festival Off d’Avignon.

La rumeur a vite été confirmée : ce serait la toute dernière fois qu’elles occuperaient les locaux de la fameuse

« Caserne des pompiers », tout au bout de la rue de la Carreterie. C’est une très belle page du théâtre régional qui se tourne, dans une grande inquiétude pour l’avenir…

Le mot n’est sûrement pas trop fort : c’est un lieu emblématique de la culture régionale qui a disparu avec la clôture de l’édition 2023 du Off d’Avignon.

La Caserne des pompiers a toujours été considérée comme un de ces lieux mythiques qui symbolisent le Off de la Cité des papes. C’est en fait l’ex-Région Champagne-Ardenne qui avait inauguré ce concept d’une maison dédiée aux troupes théâtrales régionales sélectionnées pour présenter leur travail lors du plus grand festival de théâtre du monde. Nous étions alors au milieu des années 90…

A Avignon, les plus de 1 500 compagnies (avec autant de spectacles) qui osent franchir le périlleux pas d’une participation au Off évoluent dans un monde où le privé dicte tout. Dans cet univers baroque des 141 lieux qui accueillent les spectacles se côtoient toutes sortes d’intérêts et, pour beaucoup de propriétaires, l’essentiel est de rentabiliser au maximum ces trois semaines annuelles où l’effervescence se conjugue à la passion des comédiens et des metteurs en scène pour, c’est leur vœu le plus cher, parvenir à hisser leur œuvre au-dessus du lot commun.

Pour chaque compagnie, on estime généralement à 40 000 € (c’est une moyenne minimale) le budget nécessaire pour pouvoir être présente durant toute la durée du festival. Car il lui faut donc louer un théâtre (ou plutôt le créneau quotidien pour présenter sa pièce dans une salle qui va accueillir sept ou huit autres compagnies de 10h à 23h), avoir suffisamment de petites mains pour monter et démonter le décor chaque jour, assurer la promotion quotidienne dans les rues d’Avignon, les affiches, les tracts et bien sûr prodiguer le gîte, le couvert et… les salaires de tous les participants à l’aventure, sans parler du transport aller et retour.

C’est tout le calcul réalisé par les équipes du Conseil régional du Grand Est qui n’a pas hésité à reprendre à son compte l’excellente idée de mutualisation des services et des lieux imaginée en son temps par l’ex-région Champagne-Ardenne.

Ainsi, chaque compagnie sélectionnée par un jury de professionnels (elles ont été quatorze cette année, venues de toute la grande région) n’a pas à payer cette location de théâtre. De plus, elle bénéficie de l’équipe technique et du matériel à disposition sur place et, cerise sur le gâteau, se voit doter d’une subvention spécifique pour produire sa pièce (par exemple, la compagnie strasbourgeoise Quai n° 7 — lire ci-après — a bénéficié de 25 000 € de subvention régionale).

c DOSSIER – AVIGNON 2023
Jean-Luc Fournier ON
La Caserne des pompiers à Avignon
32 c DOSSIER — La rentrée culturelle №50 — Septembre 2023 — Vivre livre

Cette mutualisation des locaux et des moyens techniques et matériels et ce soutien financier sont parfaitement assumés depuis une vingtaine d’années par la collectivité régionale, tous présidents confondus. Le dernier en date, le lorrain Franck Leroy, a déclaré dans sa conférence de presse de début juillet, 48 heures avant le début du festival : « Si on aidait des compagnies pendant toute l’année sans les soutenir pour qu’elles soient présentes à Avignon, on passerait à côté d’un moment essentiel ».

Le budget consacré à cette opération dit mieux que tout l’importance attachée à l’événement : 560 000 euros pour l’édition 2023.

Cette belle et intelligente harmonie a donc subi un grave coup d’arrêt au début de l’été dernier. Subitement (et apparemment sans le moindre préavis), la Ville d’Avignon, propriétaire de la Caserne des pompiers, a annoncé qu’elle avait passé un accord avec une des plus prestigieuses écoles de théâtre parisiennes, l’École internationale de théâtre Jacques Lecocq qui s’installera dans les lieux dès cet automne, après d’importants travaux menés par la collectivité qui ont débuté dès le début août, après la clôture du festival.

Exit donc la Région Grand Est et avec pertes et fracas. Contactée par nos soins, la Ville d’Avignon est restée officiellement muette sur le sujet. Tant la direction de la Culture que l’adjointe concernée ont refusé de répondre à nos questions (« c’est un sujet très sensible en interne » nous a-t-on néanmoins murmuré à l’oreille…).

La Région Grand Est se veut rassurante…

De son côté, la Région Grand Est n’est guère plus prolixe. Rencontrée à Avignon juste avant son retour en Lorraine, la conseillère régionale champenoise Martine Lizola, présidente de la commission Culture s’est voulue optimiste et surtout, rassurante : « Lors de sa venue à Avignon début juillet, le président a été clair : nous recherchons activement des solutions alternatives, la Ville d’Avignon ayant d’ailleurs déclaré son intention de nous aider en ce sens. Nous ne communiquons pas pour l’heure sur nos recherches, ce serait prématuré, mais notre président va s’entretenir dès le début septembre avec la maire d’Avignon. Notre directrice régionale de la Culture passe déjà son temps à visiter des lieux potentiels et nous sommes en contact avec un agent immobilier spécialiste des lieux de culture. Il s’agit donc de trouver la meilleure solution qui soit

pour qu’on puisse conserver les meilleures conditions d’accueil qui soient pour nos compagnies. Si l’enjeu est matériel, tout d’abord, le futur établissement devra présenter toutes les commodités qui conviennent et que nous trouvions précédemment à la Caserne y compris pour l’aspect humain qui devra être pris en compte : Avignon, ça peut peut-être apparaître comme un lieu enchanteur avec les cigales et le soleil pour le grand public, mais tous ceux qui connaissent bien le festival savent à quel point ces semaines peuvent être harassantes. Dans ce sens-là, le futur lieu devra garantir des conditions d’accueil confinant à l’excellence. Personnellement, je ne suis donc pas du tout inquiète sur l’avenir, car la Région possède l’expérience et maîtrise tout le process. Je suis donc très confiante… » Sur le point particulier de l’avenir à très court terme, c’est-à-dire l’édition 2024, Martine Lizola, très consciente qu’il sera quasi impossible de mettre à disposition un nouveau lieu mutualisé, évoque « une externalisation pour chaque compagnie… » Donc, plusieurs lieux. Et la présidente de la commission Culture de reconnaître « qu’il faudra jouer serré au niveau budgétaire, car, évidemment, cela constituera une source supplémentaire de dépenses. Mais quand les budgets des collectivités locales sont en peine, celles-ci ont parfois le réflexe de se servir du budget de la culture, tout comme celui du sport d’ailleurs, comme d’une variable d’ajustement. Le fait que ce ne soit pas le cas pour la Région Grand Est témoigne en fait d’une bonne gestion, je le pense sincèrement… » c

UN RECORD DE FRÉQUENTATION

L’association Avignon Festival & Compagnies (AF&C) a publié ses premiers chiffres début août dernier. L’édition 2023 du Off a enregistré un nouveau record de fréquentation. Près de 2 millions de billets (1 955 000) ont été vendus pour les 1491 spectacles proposés au public du 7 au 29 juillet derniers. Soit 20 % de hausse par rapport à 2019, dernière année de référence (en raison du Covid, ensuite) qui avait réalisé 1,7 million d’entrées.

Laurent Domingos, un des co-présidents du Off, explique ce record par une évolution des habitudes touristiques, les Français étant plus enclins, depuis la crise sanitaire, à revisiter leur pays. Il note également cette réputation de fête attachée à l’événement. Pour autant, en soulignant que 55 % des spectacles du Off ne présentent au plus que deux artistes sur scène, Laurent Domingos pointe que cette statistique « ne résulte pas d’une stratégie artistique, mais serait le symptôme de la morosité économique du spectacle vivant… »

À l’évidence, on est ici en présence d’un signe de plus du décalage entre le foisonnement (et la qualité) de l’offre artistique et la diffusion concrète des spectacles sur le territoire qui fragilise considérablement les compagnies de théâtre. À court terme, une seule solution palliative : renforcer les aides à la diffusion existantes. Mais les temps économiques plus que troublés que nous connaissons ne concourent en rien à cet objectif…

33 c DOSSIER — La rentrée culturelle №50 — Septembre 2023 — Vivre livre
Martine Lizola préside la Commission culture de la région Grand Est.

Un formidable cru pour les pépites alsaciennes

Pour leur dernière saison à la Caserne des Pompiers (lire les pages précédentes), les troupes alsaciennes sélectionnées par la Région

Grand Est ont fait feu de tous bois. Ce cru 2023 est sans doute un des plus brillants jamais présentés au Off d’Avignon. Sur la scène provençale, les compagnies alsaciennes ont impressionné spectateurs, programmateurs et critiques. Nous avons particulièrement suivi quatre d’entre elles et, franchement, elles nous ont bluffés par la qualité de leurs représentations…

J’aime a ébloui le Off 2023

Pour sa première mise en scène, Laure Werckmann a frappé très fort. À partir de l’intrigant roman éponyme de Nane Beauregard (une seule phrase, interminable et sublime, sans la moindre ponctuation…), la metteuse en scène — mais également comédienne, auteure et pédagogue — a bâti une heure de dramaturgie comme on l’adore, du genre où, quand la fin survient, on regrette instantanément et amèrement la rupture de ce charme qui fait toute la saveur du théâtre…

En 2006, le roman de Nane Beauregard (Éd. P.O.L - en cours de réédition) avait impressionné. Songez donc : sur 80 pages, une femme nous parle de celui qu’elle aime.

« J’AIME SA LIBERTÉ… ». Voilà pour les tout premiers mots et ça n’arrêtera plus ensuite…

J’AIME SA LIBERTÉ QUE SES YEUX SE PLISSENT QUAND IL ME SOURIT SON RECUL SON ASSURANCE SES YEUX VERTS LA RONDEUR ABSOLUMENT PARFAITE DE SES PUPILLES LA FAÇON DONT ELLES SE DÉTACHENT SUR LE BLANC DE SON ŒIL SA DÉSINVOLTURE SES CERTITUDES MÊME QUAND JE PENSE QU’IL SE TROMPE L’ESPACE ENTRE SON NEZ ET SA BOUCHE SON NEZ ET SA BOUCHE QU’IL VIENNE D’AILLEURS QU’IL SOIT D’UN AUTRE MONDE QU’IL NE SOIT PAS DE MA FAMILLE QU’IL SOIT NEUF POUR MOI QUE NOUS SOYONS EN TRAIN DE CRÉER NOTRE HISTOIRE ME TROMPER SUR (…)

Ce sont là les premières lignes des pages du roman d’origine. Un texte brillant, fort, qu’on reçoit au plus profond de soi. Osons l’écrire : on est très loin de Me Too mais on est pourtant là au cœur de l’émoi féminin. Seule sur scène, cette femme dit l’intime, elle clame combien l’accueil sans borne de l’être qu’elle aime révèle d’elle-même, combien cela la bouleverse. Elle dit ce qu’elle n’aurait jamais imaginé oser dire et elle le dit avec cette audace et cette fluidité immense qui deviennent celles de nos mots quand l’amour, seul, rythme enfin l’évidence…

Cette longue phrase d’une heure est soutenue par une brillante mise en scène à partir de quelques touches de décor d’une sobriété remarquable : à l’intérieur d’un cabinet de psychanalyse, un grand lustre, deux ou trois lumières chaudes, un fauteuil unique (le mythique modèle Le Corbusier LC2), et, vers la fin, un artifice visuel surprenant qu’on taira ici.

Laure Werckmann est cette femme qui prend la parole et, au fur et à mesure, s’émancipe au fil des mots qu’elle ne parvient plus à retenir.

La performance est évidemment à tous les niveaux, à commencer par l’évitement de l’écueil majeur en telle circonstance, l’impression d’une lecture à peine améliorée d’un texte original. Non, les mots qui s’enchaînent et montent en puissance jusqu’à des hauteurs vraiment insoupçonnées, la force de l’adaptation, le jeu des éclairages, la position du corps, l’expression du visage… rien de tout cela n’est négligé, tout concourt à rendre inoubliable la vision de ce J’aime…». c

c DOSSIER  — AVIGNON 2023
J’aime
34 c DOSSIER — La rentrée culturelle №50 — Septembre 2023 — Vivre livre
Jean-Luc Fournier Adrien Berthet — Alex Grisward — Or Norme — DR
Avignon 2023

Laure Werckmann « Avec quoi repartent les gens quand la lumière de la salle revient ? »

On imagine à quel point l’adaptation du roman de Jane Beauregard a dû être ardue…

« Elle a été longue. Je craignais d’affronter ce texte qui, à lui seul, sur le fond et bien sûr sa forme tout à fait originale, produit en lui-même son effet. Début 2019, c’est Nane, son auteure, qui me l’a confié en fait et qui m’a demandé d’en être son interprète, pour ce qui, au départ, ne devait être qu’une lecture. Évidemment, quand on est simple lectrice de ce roman si atypique, on peut s’arrêter à tout moment, réfléchir et même revenir en arrière si besoin. Au théâtre, toute cette relation avec l’objet n’est pas possible. Il fallait donc créer autre chose, permettre une dramaturgie particulière… D’ailleurs, c’était un tel souci que j’ai volontairement testé l’adaptation avec des spectateurs que je connaissais, pour voir ce qu’elle provoquait en eux. Cette connivence, je l’ai ressentie comme essentielle et très importante depuis le début du travail… D’un bout à l’autre, j’ai conçu cette adaptation en me posant des questions d’actrice : qui étais-je, à qui je parlais, et pourquoi sous cette forme ?

Avez-vous eu spécifiquement des réactions de femmes à l’issue de vos représentations ?

Oui, bien sûr. La dominante est qu’elles sont très émues, vraiment. Bien sûr, chacune d’entre elles réagissait en fonction de ce qu’elle traversait personnellement. Toute ma dramaturgie, je l’avais construite sur cette notion de transfert entre le personnage sur scène et le spectateur, dans la salle. Ce dernier devait donc se retrouver en situation de dérouler à son tour sa propre histoire, avec sa propre langue.

Sans spoiler l’intrigue, comment vous est venue l’idée de la fin de la pièce ?

La femme ne s’arrête plus de parler, la musique monte, monte encore… jusqu’à quasiment recouvrir les mots puis les rendre carrément inaudibles pour finir.

La voix de cette femme, qui pourtant est magnifique et si percutante depuis une heure, finit quand même par s’éteindre… On peut bien évidemment projeter ça… Dans le roman de Nane, il y a un point final au bout des 80 pages. Dans mon adaptation, il n’y a pas de point final, je n’en voulais pas. J’en reviens à la différence entre la lecture du livre et la pièce de théâtre. Avec quoi repartent les gens quand la lumière de la salle revient ? Je ne voulais pas qu’ils repartent avec un point final, comme s’ils avaient assisté à un spectacle-manifeste, en quelque sorte. Pour moi, le spectacle vivant est souvent affaire de sacré, de rituel, ce quelque chose qui nous dépasse, au final. Ce que j’appelle « la convocation du sentiment » n’appartient ni au metteur en scène, ni à l’actrice, ni au spectateur. Ce phénomène flotte entre eux, voilà, il les réunit… Cette fin, je l’ai également testée : en lecture simple, mais aussi avec les spectateurs. Il n’y a pas eu débat : elle a fonctionné immédiatement…

et s’est insérée parfaitement dans la caractéristique principale de ma mise en scène. Je voulais qu’elle soit discrète, en fait… »

Parlons de la comédienne que vous êtes aussi, seule sur scène. Une évidence : vous vous investissez « à mort » comme l’ondit, le rôle est en vous, complètement… En fait, durant toute l’heure du spectacle, on navigue entre les deux piliers du travail de l’adaptation et celui de la comédienne que je suis aussi : la simplicité, comme objet de bouleversement et cette forme de fragilité permanente du propos. Tout pourrait se briser violemment et à tout moment. Pour autant, ces deux caractéristiques n’enlèvent rien à la solidité du spectacle, je crois… Je ne m’en rends compte que maintenant, en fait. » c

Laure Werckmann a ébloui Avignon
35 c DOSSIER  — La rentrée culturelle №50 — Septembre 2023 — Vivre livre
J’AIME… sera visible au Diapason de Vendenheim au courant du premier trimestre 2024 (voir la programmation du Diapason sur www.vendenheim.fr)

Avignon 2023

Services : les femmes de l’ombre sont sur scène

On ne les voit jamais, ces petites mains qui font que le théâtre est… le théâtre. Quand le rideau se lève, tout doit être en place, jusqu’au moindre des détails. Toit doit parfaitement être fluide et fonctionner. Services  met en scène cinq techniciennes de plateau qui préparent la représentation du soir. C’est savoureux, iconoclaste, ébouriffant et mis en scène « au cordeau ». Un régal…

Il faut absolument se prêter au flash-back pour comprendre les thématiques développées par Juliette Steiner, la metteuse en scène de Services. Créée en 1947, la pièce Les Bonnes de Jean Genet avait à l’époque défrayé la chronique théâtrale parisienne. Sur scène, deux bonnes, travaillant pour une très riche bourgeoise « Madame », n’hésitaient pas à revêtir ses propres vêtements et à la singer à qui mieux mieux. Une vraie satire sociale écrite par le déjà sulfureux Jean Genet et qui fut très mal accueillie par la critique de l’époque.

La metteuse en scène Juliette Steiner a effectué avec ses comédiennes et avec la plume de Olivier Sylvestre un long travail d’écriture pour parvenir à s’inspirer de la pièce originelle afin de présenter « Services » aux yeux contemporains. Et c’est parfaitement réussi : les cinq comédiennes — Camille Falbriard, Ludmilla Gander, Ruby Minard, Naëma Tounsi et Ondine Trager) incarnent ces techniciennes qui sont chargées de tout préparer pour la représentation des Bonnes en soirée. Au fur et à mesure de leur activité sont révélées toutes les humiliations qu’elles subissent de la part de l’actrice principale (la Madame de la version 2023) et du reste de l’équipe. Les saynètes de fiction s’enchaînent, c’est inventif, hyperactif, coloré, leurs ustensiles et outils deviennent autant d’armes, d’instruments, de costumes, le bruit de tout leur attirail se diffuse comme une bande sonore et il ne faut pas plus que le réglage d’un projecteur pour que la parole de ces invisibles jaillissent, impitoyable.

Il y a dans cette frénésie décomplexée une critique implacable du petit milieu du théâtre, c’est enlevé et précis comme une montre suisse. C’est très brillant… c

Cinq pétillantes comédiennes sur scène

c DOSSIER  — AVIGNON 2023
36 c DOSSIER — La rentrée culturelle №50 — Septembre 2023 — Vivre livre

Juliette Steiner

a fallu effectuer une écriture au cordeau… »

Après le tourbillon d’1h20 qu’est Services, il y a tout de suite quelque chose qu’on voudrait vous avouer : nous avons été vraiment épatés par ce travail incroyable qui consiste à faire vivre au spectateur quelque chose comme un immense bordel sans nom alors que bien sûr, à l’évidence, tout est parfaitement travaillé…

«  Pour que ça ait l’air bordélique comme vous dîtes, et cependant parfaitement naturel, c’est une écriture au cordeau qu’il a fallu effectuer. Pour l’équipe, ça a été un sacré travail : non seulement le texte, bien sûr, mais aussi la manipulation incessante de toutes sortes d’objets qui est le quotidien des « techniciens » du milieu théâtre et qui se retrouve au centre de Services

Je voudrais réenrouler le film, si j’ose dire : j’avais lu Les Bonnes de Genet à l’adolescence. Ce fut une révélation, j’ai vraiment adoré cette pièce. J’ai beaucoup lu de lui par la suite et compris qu’il n’hésitait jamais à se remettre en question lui-même et tout ça en étant très mordant du point de vue politique. J’ai eu tout ça en permanence en fond de trame quand nous avons suivi notre idée de départ qui était de mettre en scène une équipe technique…

Un peu comme une mise en abyme de votre métier…

C’est tout à fait ça. On a demandé à Olivier Sylvestre, un auteur contemporain d’origine québécoise, de venir écrire à partir de nos plateaux de répétition où nous élaborions la pièce. Ce fut un jeu de ping-pong entre lui et nous, il a même mené des interviews assez personnelles avec nous toutes. Ça a duré quand même trois mois, de l’étape initiale où nous avons amassé toute la matière nécessaire jusqu’au choix final, qui fut une sorte de deuil, car il nous a fallu abandonner pas mal de choses pourtant très intéressantes. Il a été nécessaire de beaucoup couper pour que ça fonctionne au niveau de la dramaturgie, je vous l’avoue… Au départ, j’avais tablé sur une durée de 1h40, mais il fallait qu’on sente cette densité, cette pression qui

est celle des techniciennes de plateau quand il faut tout préparer pour que tout soit parfait au niveau de la représentation à venir et que le temps est terriblement compté. Au final, Services dure donc 1h20, c’est déjà conséquent… Heureusement qu’on joue à La Caserne des pompiers à Avignon. On a une équipe technique tellement géniale… On joue les derniers dans la journée et c’est un avantage, car on ne pourrait jamais démonter à temps si une compagnie nous succédait…

Je crois savoir que la décision de présenter Services à Avignon a été prise, car beaucoup de professionnels n’ont pas pu voir la pièce auparavant, un des effets secondaires du véritable embouteillage créé par la crise sanitaire en matière de créations théâtrales…

C’est exactement ça. On a créé Services en 2021, la pièce a bien tourné jusqu’au début de l’été 2022, mais beaucoup de professionnels, effectivement, qui devaient faire face eux-mêmes à la densité de leur propre saison, n’ont pu la voir. Voilà pourquoi on a misé sur le Off d’Avignon cet été…

On se voit alors qu’il reste deux semaines de festival. Les premiers résultats sont plutôt encourageants ?

Sincèrement, oui. Sur les cinq premières représentations, douze programmateurs ou programmatrices étaient présents. C’est vraiment bien… Ils ont été très réceptifs, on a eu de très beaux retours…

Votre démarche est courageuse. Il y a cinq personnes sur scène, on est assez loin des nouveaux standards de l’époque… Oui, tout pousse aujourd’hui au « seul en scène » et c’est bien sûr essentiellement à cause des contraintes économiques. On essaie de résister, comme le village gaulois. Ce sera encore le cas dans notre prochaine production qui sera créée à Strasbourg en avril, l’an prochain : sept comédiens seront en scène. Je reste une fan dès qu’il s’agit de raconter le travail d’une équipe, mais c’est certain qu’en matière de production, le challenge est de plus en plus difficile… » c

« Il
37 c DOSSIER — La rentrée culturelle №50 — Septembre 2023 — Vivre livre

Avignon 2023

Vivarium Cet étrange Monsieur Cousin…

Romain Gary (sous le pseudo providentiel de Émile Ajar avec qui il réussit le prodige de s’offrir un deuxième Prix Goncourt) est cet auteur magnifique dont les lecteurs devraient ne pas se contenter de lire la magnifique Promesse de l’aube. Parmi beaucoup d’autres livres, Gros-Câlin est un de ceux qui intriguent le plus. En l’adaptant pour le théâtre et en assurant la mise en scène et l’interprétation, Fred Cacheux s’est bâti un univers sur-mesure…

Oh oui, il est bien étrange ce Monsieur Cousin…

Il est statisticien, autant dire qu’il n’a jamais l’occasion de se faire particulièrement remarquer. Il mouline les chiffres et les données, il fait très bien son travail et fait tout pour qu’on ne le remarque pas : jusqu’à la couleur de son costume mal coupé qui le mimétise avec le mur gris derrière lui…

M. Cousin est en énorme manque d’amour : alors, pour combler le trou béant de sa solitude, il a adopté un python et l’a appelé Gros-Câlin…

M. Cousin est au fond de lui un irréductible optimiste et il nous le prouve sans cesse tout au long de cette pièce jusqu’à croire dur comme fer que Mademoiselle Dreyfus, sa collègue de travail, lui rendra un jour l’amour inconditionnel qu’il lui porte. Même si dans ce cas comme pour tant d’autres, avoir chez soi un python est très loin de faciliter les relations sociales…

Fred Cacheux est formidable dans ce rôle qui l’oblige à alterner le pathétique, voire le ridicule, avec l’émotion la plus pure, en permanence à osciller sur le fil des sentiments. Car bien sûr, rien n’est interdit quand on est amoureux et qu’on vit sa vie en permanence à fleur de peau.

Sur scène, seule devant un mur de béton gris, son ombre portée renforce l’implacable solitude dans laquelle se meut son personnage. Son jeu épouse la dramaturgie : Monsieur Cousin tient absolument à tout nous dire de sa vie, de ses espoirs et de ses révoltes intérieures ; alors Fred Cacheux, en revêtant ce costume si banal, se fond dans cet univers et, pour une heure, devient ce Monsieur Cousin qui fait naître chez nous un sentiment très éloigné de la pitié ou de la raillerie : une forme de tendresse assez rare, au fond… c

Il est bien étrange ce Monsieur Cousin

c DOSSIER  — AVIGNON 2023
38 c DOSSIER — La rentrée culturelle №50 — Septembre 2023 — Vivre livre

6 caves

Strasbourg Marché-Gare | Fegersheim | Mittelhausbergen

Strasbourg Austerlitz | Haguenau | Colmar

Et aussi… Le Bar à vin du Théâtre !

41, rue du Marché-Gare — 67200

Strasbourg

Mardi-Jeudi : 9h00-19h00

Vendredi 9h00-21h00

Samedi : 9h00-19h00

Dimanche : 9h00-14h00

Caviste — Bar à vin — Créateur d’événements œnophiles

theatreduvin.fr @theatreduvin L’abus d’alcool est dangereux pour la santé
cœur
Au
de la Halle du MarchéGare
#theatreduvin

Fred Cacheux

« La théâtralité était déjà dans le roman… »

Au sortir de ce « Vivarium » si surprenant, on n’a qu’une hâte, celle de savoir comment vous êtes tombé sur ce roman de Romain Gary qui est bien sûr loin d’être celui qu’on citerait en premier quand on songe à cet auteur qui est l’un des plus flamboyants de la littérature française du siècle dernier…

« Comme beaucoup de gens, je pense, je connais Romain Gary depuis toujours, mais je me suis mis à le lire très tard. On citera souvent La Promesse de l’aube ou Les Racines du ciel, mais le reste de son œuvre est beaucoup plus confidentiel et son roman Gros-Câlin l’est encore plus que d’autres, d’ailleurs. Savez-vous qu’on a découvert il n’y a pas très longtemps qu’il écrivait sous un troisième pseudo, Shatan Bogat ? Il y en a peut-être d’autres… Cela fait une dizaine d’années que j’ai découvert ce roman et ça a été très concomitant avec ce désir du « seul en scène » qui commençait à poindre chez moi. Ça chatouille un peu tous les acteurs, non ? Toujours est-il que ce désir s’est peu à peu accompli à la faveur de la crise sanitaire. Chaque jour de ce confinement, je me suis retrouvé seul dans la salle de répétition, avec mon survêt et mon petit Tupperware et j’ai travaillé mon texte. Pour l’adaptation, je me suis donné trois règles : ne pas changer un mot de Romain Gary, ne rien inverser dans la chronologie du bouquin et ne pas prendre de petits morceaux, mais bien de vrais passages. Comme le temps était comme arrêté, j’ai beaucoup bossé : c’est la 23e version que vous venez de voir, la première durait 2h30, vous imaginez ?..

Est-ce qu’on sait ce qui a poussé Romain Gary à créer un personnage pareil, quelqu’un de si lunaire et décalé ?

Il s’est en fait senti dans la nécessité impérieuse de comprendre son incapacité personnelle à être vraiment lui, en quelque sorte. Il a écrit Gros-Câlin avec beaucoup de cœur, je pense, car le texte est très touchant et c’est tout à la fin de son travail d’écriture

qu’il a décidé que ce serait l’œuvre de son pseudo, Émile Ajar. C’est intéressant, ça : s’il avait signé Romain Gary, qui rencontrait déjà un grand succès, le livre se serait vendu très facilement. Il s’est dit que ce roman était si particulier qu’il fallait qu’il se remette en danger. C’est pourquoi GrosCâlin occupe une place à part dans son œuvre… D’ailleurs, il n’y a pas de narrateur dans ce texte, c’est Monsieur Cousin qui nous parle directement. La théâtralité était déjà dans le roman, au fond…

Parlons de la forme. Cette sobriété dans les décors et les éclairages qui permet encore plus de sertir le personnage dans son univers anonyme, on sent que la pièce est déjà très rodée…

C’est l’aventure un peu singulière de cette production dont l’origine a été la crise sanitaire, comme je l’ai déjà dit. Dès que les rideaux ont pu de nouveau s’ouvrir, on a cherché un maximum d’endroits pour pouvoir donner ce spectacle. Avec

Léna Vergne, en charge de la diffusion, on a estimé qu’il fallait renouer un véritable lien avec le public et puisque les théâtres se retrouvaient de fait engorgés, on s’est activés pour trouver des endroits de rencontres, une école, une salle municipale, une bibliothèque entre pas mal d’autres endroits un peu incongrus. Je jouais sans décor, juste le costume. Peu à peu, on s’est rendu compte qu’il fallait en faire un objet beaucoup plus abouti. Et c’est ainsi que Vivarium est devenu le spectacle que vous avez découvert sur la scène de La Caserne des pompiers à Avignon… Il y a une appétence pour le verbe, au festival Off. Certes, notre proposition est singulière, mais on se sent soutenus et avoir été accueillis dans la sélection de la Région Grand Est nous a beaucoup aidés, c’est certain. Jouer durant trois semaines ici, dans les conditions qui nous sont offertes, est un privilège vraiment incroyable… » c

Fred Cacheux
c DOSSIER  — AVIGNON 2023 40 c DOSSIER — La rentrée culturelle №50 — Septembre 2023 — Vivre livre

Où cours-tu comme ça ?

Le théâtre est aussi une longue course de fond

Arrivée en France tout droit venue de son Québec natal pour étudier l’art de la marionnette à l’École nationale de Charleville-Mézières, Kathleen Fortin, installée à demeure en Alsace, présente ici sa première écriture poétique. Sur le plateau, une scénographie visuelle et sonore tout à fait originale soutient l’énergie de Philippe Cousin qui joue un coureur âgé qui arrive en bout de piste et va devoir passer le relais. Du vrai théâtre, enlevé et surprenant…

« On m’a dit : « Va donc courir, tu reviendras quand tu seras parlable ! » Je ne suis pas sûr d’être revenu… Cette phrase barre très haut l’affiche du spectacle Où cours-tu comme ça ? et, de fait, le personnage si bien interprété par un Philippe Cousin hyperactif sur scène semble de ne jamais s’être plus arrêté (ce qui est le lot de nombreux coureurs, dans la vraie vie).

Pour ce coureur quasi atteint par la limite d’âge, il s’agit de raconter sa course, donc sa vie. Comme pour tout athlète passionné et complètement envahi par son sport, il y en eut des souffrances, des victoires sur soi, des confrontations plus ou moins violentes avec ce corps si complexe, des blessures physiques bien sûr, mais morales aussi (peut-être les plus sévères) sans parler des défaites, plus ou moins avouables. Mais, comme pour tout passionné, retourner dans la course est un objectif qui n’aura jamais été manqué…

Tout comme la course, la scénographie mise en place par Kathleen Fortin recèle des surprises à tout bout de champ. Des rouleaux dessinés s’animent en permanence et font apparaître des images qui soutiennent le fil du propos de l’athlète, comme autant de récits où la confidence est toujours présente. L’idée géniale est d’avoir confié le rythme de la pulsion, que connaissent bien tous les coureurs à pied, à la batteuse Yuko Oshima qui, en live, souligne et amplifie les enjambées et les battements de cœur de Philippe Cousin.

C’est vraiment du très beau travail, vivant, authentique et magnifiquement joué et mis en scène… c

On imagine que la course à pied est un univers qui ne vous est pas étranger. D’où est venue l’idée de vous en servir pour devenir la thématique de votre première écriture théâtrale ?

Oui, au moment où cette idée m’est venue, je courais depuis quelque temps. En fait, tout est parti d’une photo publiée par Paris-Match où on voyait Nicolas Sarkozy courir dans Central Park à New York, avec son t-shirt NYPD et ses Ray-Ban. Ça renvoyait l’image du golden-boy puissant, masculin, powerful, compétitif, winner !.. (rires). Moi qui commençait juste à courir dans des groupes de course, je ne rencontrais vraiment rien de tout ça… J’étais environnée de solidarité, d’écoute, ceux qui couraient le plus vite finissaient toujours par soutenir les derniers, l’idée fondamentale était vraiment de courir ensemble. Ce que je vivais ne correspondait pas du tout à cette image qui, donc, me dérangeait… C’est ce là qu’est née l’idée d’écrire un spectacle sur la course. Et puis, Philippe Cousin qui est un comédien qui court et moi, on a fini par se rencontrer sur la piste cyclable… Quand je lui ai proposé de travailler ensemble sur

Philippe Cousin rejoue sa vie de coureur à pied.
c DOSSIER  — AVIGNON 2023
Kathleen Fortin, des marionnettes à la mise en scène.
Kathleen Fortin
42 c DOSSIER — La rentrée culturelle №50 — Septembre 2023 — Vivre livre
« En courant, je me suis débrouillée pour faire parler les gens… »
Avignon 2023

cette thématique, il a été un peu surpris : « Normalement, il nous faudrait des corps jeunes » a-t-il fait remarquer. Mais moi, en courant dans mes groupes, je voyais beaucoup de sexagénaires et j’ai voulu me baser sur eux. Je me suis mise à l’écriture et nous avons entamé ensemble un beau dialogue, moi avec les expressions de mon Québec natal et lui avec son souci que les mots sonnent juste avec le fil de son histoire. Je voulais écrire en fait le parcours de sa vie. J’ai lu beaucoup sur la course à pied, des romans aux études physiologiques, et moi-même, en courant, je me suis débrouillée pour faire parler les gens. D’ailleurs, en venant voir le spectacle, beaucoup de mes amis coureurs ont retrouvé des situations et se sont reconnus…

L’écriture elle-même a suivi le même long cheminement ?

Non, bien au contraire. Ça s’est fait durant le confinement. Autant le temps de collectage a été long, autant celui de l’écriture a été très rapide. En écrivant une scène par jour, en deux semaines la base du texte final était née…

Une course rapide, donc (sourire)…

Effectivement, mais c’est ça la course. Une longue préparation est nécessaire, mais le jour J, il faut être au top ! D’ailleurs, je vais vous confier une anecdote. En écrivant ce spectacle, puis en le présentant, j’avais rêvé de pouvoir le jouer dans le contexte d’une vraie course, pour que les coureurs puissent y assister et peut-être, s’y retrouver. Et bien ce sera le cas durant ce mois de septembre. Le 10, nous allons jouer à Dossenheim-sur-Zinsel, près de Saverne, là où, sept jours plus tard, aura lieu une course très célèbre dans cette région Les Montées du Daubenschlag. J’attends ces moments avec une grande impatience…

Pour finir, vous travaillez en ce moment sur votre prochaine création et sa thématique sera la chasse. Comme vous le savez, c’est un sujet sensible en ce moment dans notre pays…

Oui, je le sais, mais ce ne sera ni un manifeste pour ni un manifeste contre. J’habite en pleine forêt du côté de Lichtenberg et je m’engueule souvent avec les chasseurs quand je les croise en courant. Mais à force de contacts, je me suis rendu compte que certains lisaient les mêmes auteurs que moi, par exemple. Alors, moi qui ai grandi au Canada dans un milieu assez bigot, moi qui ai été éduquée dans l’idée de rassembler et d’unir les gens, je vais essayer de réaliser mon vieux rêve pieux de faire communiquer ceux qui ne sont pas vraiment d’accord… c

Don Giovanni aux enfers

Direction musicale

Bassem Akiki

Mise en scène, décors, vidéo, lumières

Simon Steen-Andersen

Ictus

Chœur de l’Opéra national du Rhin

Orchestre philharmonique de Strasbourg

Strasbourg (Opéra) 16-21 septembre 2023

Simon Steen-Andersen © Paul Lannes
№50 — Septembre 2023 — Vivre livre

LA REN TRÉE CULTUR ELLE

Septembre 2023 sera dans la lignée du même mois de l’an passé. Pour le secteur de la Culture, encore meurtri par les effets de la crise sanitaire, il s’agira, coûte que coûte, de tout faire pour que le public retrouve complètement le chemin des salles. Et pour ça, chacun a cherché à fabriquer un programme le plus séduisant et le plus motivant qui soit.

Voici l’essentiel de ce que proposent les structures strasbourgeoises et périphériques…

c DOSSIER – LA RENTRÉE CULTURELLE
Véronique Leblanc – Jean-Luc Fournier Illustration par Celia Housset. Photos du dossier par Nicolas Rosès – Alban Hefti – Grégory Massat – Nicolas Roses – Axelle de Russé – Vincent Lappartient – Shudufhadzo-Lubengo – Thierry Danet – Frédéric Ferranti – Anca Lacob – P. Groslier –Monty Python Official Site – Arthur Leroy – Ernest S. Mandap – Matt Lipsen –Pierre Colletti – DR
45 c DOSSIER  — La rentrée culturelle №50 — Septembre 2023 — Vivre livre

L’ÉVÉNEMENT CINÉMA

Accueillir Terry Gilliam au Festival du film fantastique de Strasbourg ?

Daniel Cohen y tenait et… il l’a fait !

Comment fait-on pour convaincre l’immense Terry Gilliam d’être l’invité d’honneur du 16e Festival du film fantastique de Strasbourg ? « En usant de persévérance », répond son directeur artistique Daniel Cohen…

Défendre le cinéma de genre à l’international

Discret, Daniel Cohen n’insiste pas sur la notoriété du FEFFS aujourd’hui bien installée : « C’est vrai que, dès 2008, nous avons conçu le festival comme un événement européen et international et ce y compris dans la manière de le programmer en y intégrant des films qui n’étaient pas sortis en France en espérant leur offrir un espace d’exploitation », admet-il. « Nous avons aussi intégré la Méliès International Festivals Federation, réseau de festivals de films de genre (fantastique, horreur et science-fiction) regroupant une trentaine de festivals dans le monde. Il décerne des prix européens – les Méliès – et nous sommes le seul festival en France à avoir décerné ce prestigieux prix l’an dernier. »

Fort de cette dimension internationale, le FEFFS reste plus que jamais déterminé à défendre le cinéma de genre : « Ces films ont besoin de trouver un public « en communion » rassemblé devant un grand écran », souligne Daniel Cohen, « et le festival leur permet d’être repérés par des distributeurs ».

Un créneau qui sera approfondi cette année avec le lancement de deux journées de rencontre professionnelles baptisées EUROGENRE auxquelles participeront distributeurs, exploitants et ayants droit européens.

Elles comprendront des sessions pitchings de projets en développement et une table ronde sur la coproduction européenne des films de genre.

Terry Gilliam, anticonformisme, humour et talent

« N ous l’avions déjà contacté à plusieurs reprises via l’un de ses proches, il n’était pas disponible, mais on peut imaginer que notre opiniâtreté a fini par payer. Il a peut-être réalisé combien nous tenions à sa venue et le fait que nous avions déjà reçu de grands noms l’a sans doute rassuré. »

« Cette année, les planètes se sont alignées » pour que le FEFFS accueille le réalisateur de Brazil , Fisher King , Sacré Graal et L’Armée des douze Singes. Un sacré événement !

Quant à Terry Gilliam, il sera présent pour la cérémonie d’ouverture le 22 septembre et recevra un prix d’honneur pour l’ensemble de sa carrière avant d’animer une master class au cinéma VOX.

Une rétrospective lui sera consacrée au STAR ainsi qu’une « Carte blanche » pour laquelle il a choisi deux films bien différents : La grande Bouffe de Marco Ferreri et Les Sentiers de la gloire de Stanley Kubrick.

« Bon vivant, amateur de controverses, passionné, engagé et doté d’une énorme dose d’humour, Terry Gilliam est un cinéaste qui sort du lot et s’est toujours

c DOSSIER  — LA RENTRÉE CULTURELLE
Daniel Cohen
46 c DOSSIER — La rentrée culturelle №50 — Septembre 2023 — Vivre livre

inscrit à rebours de ce qui se faisait à son époque », souligne Daniel Cohen.

Il a critiqué la bureaucratie dès 1985 dans Brazil, s’est révélé écolo avant l’heure et a décrit une humanité décimée par un virus meurtrier dans L’Armée des douze singes en 1995, bien avant que ne se répande un certain Covid-19.

Visionnaire, il sera sans doute attentif à la rétrospective thématique que le FEFFS 2023 consacre à l’appétence de nos sociétés pour les spectacles violents.

Avec — entre autres — Rollerball de Norman Jewison, Course à la mort de l’an 2000 de Paul Bartel, Mort en direct de Bertand Tavernier, Westworld de Michael Crichton, la société du spectacle s’y révélera dans ses délires de voyeurisme et de manipulation des esprits.

Désormais bien identifié dans le milieu du cinéma qu’il fréquente depuis 23 ans, Daniel Cohen a un carnet d’adresses bien rempli et participe à de nombreux jurys à travers le monde.

« C’est formidable de pouvoir rencontrer des réalisateurs venus de partout, dit-il. On se retrouve de festival en festival, ces interactions sont très riches ». Une reconnaissance qui a certainement incité Terry Gilliam à faire confiance au FEFFS, mais son directeur artistique n’y revient pas. Il préfère conclure en insistant sur le plaisir qu’il a « à poser les yeux avant tout le monde sur un film », avant d’en entendre parler, avant les critiques.

Dans un moment de pure cinéphilie… c

www.strasbourgfestival.com

LORAINE DAMBERMONT / PHILIP VENABLES / LENIO KAKLEA / MAUD LE PLADEC / JR MADDRIPP /

MAXIME COZIC / HENDRICKX NTELA / BRIGITTE SETH / ROSER MONTLLÓ GUBERNA / ALAIN BUFFARD / LISBETH GRUWEZ / MAARTEN VAN CAUWENBERGHE /

JONAS CHÉREAU / RÉGINE CHOPINOT /

ÉTIENNE ROCHEFORT / ANNE NGUYEN /

YVES MWAMBA / FRANK MICHELETTI / MARCELA SANTANDER CORVALÁN /

HORTENSE BELHÔTE / OLGA MESA /

OLIVIA GRANDVILLE / RUTH CHILDS /

NADIA BEUGRÉ / YVONNETTE VELA LOPEZ / NOÉMIE CORDIER / SOLÈNE WACHTER / NACH /

SAFIA NOLIN / CLAIRE DAYS / LEÏLA KA /

THOMAS LEBRUN / GIUSEPPE CHICO /

BARBARA MATIJEVIC / AYELEN PAROLIN / BRAHIM BOUCHELAGHEM / YOUNESS ABOULAKOUL /

MARIE BARBOTTIN / BORIS CHARMATZ /

TRAJAL HARRELL / LÉO LÉRUS /

RADHOUANE EL MEDDEB

POLE-SUD.FR

+33 ( 0 ) 3 88 39 23 40

1 rue de Bourgogne - F 67100 Strasbourg

23 / 24 №50 — Septembre 2023 — Xxxxxxx
PHOTO © ISABELLE WENZEL

OnR « Rêver d’un autre monde » à l’Opéra national du Rhin

est en tout cas l’ambition de l’OnR pour cette future saison qui placera sous le thème de l’utopie le prochain festival « Arsmondo ».

« L’opéra lui-même n’est-il pas né d’une utopie ? », souligne le directeur de l’OnR, en évoquant cette « forme complexe fusionnant tous les arts en un seul » afin de « recréer la totalité du monde en l’adressant à chaque individu ».

Pour transformer chaque représentation en invitation au voyage intime et pourtant partagée, un moment essentiel dans nos sociétés crispées.

Avec, à chaque fois, tout un monde à rêver.

Deux créations mondiales

Huit opéras sont programmés cette saison, dont deux en création mondiale. Le premier, Don Giovanni aux enfers ouvrira la saison du 16 au 21 septembre par un spectacle total débutant par le final du Don Giovanni de Mozart.

« Nous suivrons le libertin dans les enfers », précise Alain Perroux enthousiasmé par cette œuvre commandée au compositeur et plasticien danois Simon Steen-Andersen par l’OnR et par le festival MUSICA. D’une inventivité folle, elle emmène le public dans les « enfers » du théâtre, ces zones derrière les coulisses ou sous la scène où il n’est jamais admis. Grâce à la vidéo, l’opéra lui-même devient un personnage qui interagit avec les interprètes révélant un autre monde dans une partition où l’on retrouve Monteverdi, Boito, Berlioz…

Autre création mondiale (dans sa version scénique) du 13 au 21 décembre

au Théâtre de Hautepierre, Le Journal d’Hélène Berr mis en scène par Matthieu Cruciani, directeur de la Comédie de Colmar, avec la pianiste Jeanne Bleuse et, pour incarner la bouleversante Hélène, la mezzo-soprano Adèle Charvet.

Bernard Foccroulle signe la musique de ce drame nouant la vie passionnée d’une étudiante juive dans le Paris de l’occupation, juste avant qu’elle soit fauchée par la barbarie nazie.

Lakmé, Polifemo, Lohengrin…

Jamais plus donné à Strasbourg depuis 1957, Lakmé de Léo Delibes sera à l’affiche du 2 au 12 novembre avec la soprano colorature Sabine Devielhe dans un rôle-titre devenu sa signature.

Histoire d’amour impossible au cœur d’une Inde un peu rêvée, cette œuvre poétique est mise en scène par Laurent Pelly dans un décor inspiré des traditions épurées du théâtre asiatique.

Rarement programmé également, Polifemo de Nicola Porpora est annoncé du 5 au 11 février dans une mise en scène de Bruno Ravella « qui s’est inspiré des péplums avec humour et féerie », annonce Alain Perroux.

Le rôle de Paci tenu à l’origine par le castrat Farinelli sera interprété par le stupéfiant contreténor sopraniste argentin Franco Fagioli qui sera pour la première fois sur la scène de l’OnR. Avec, à la direction musicale, Emmanelle Haïm, « une amoureuse des voix ».

Lohengrin reviendra à Strasbourg du 10 au 22 mars avec le ténor Michael Spyres dans son premier rôle wagnérien.

Aziz Shokhakimov dirigera l’Orchestre Philharmonique de Strasbourg et Florent

Siaud signera la mise en scène de cette nouvelle et très attendue production de l’OnR. Suivra, du 28 avril au 7 mai, Guercoeur de Albéric Magnard, une « rareté » jamais plus présentée en France depuis sa création en 1931 à l’Opéra de Paris, 17 ans après la mort tragique de son créateur qui fit le choix de disparaître avec ses partitions plutôt que céder devant l’envahisseur allemand.

Christof Loy signe la mise en scène de cet opéra en trois actes où se rêve l’utopie d’un monde enfin réconcilié.

La saison se conclura du 11 au 20 juin avec Norma de Vincenzo Bellini mis en scène par Marie-Eve Signeyrolle, avec la mezzo-soprano Karine Deshayes dans le rôle-titre de ce chef d’œuvre absolu du bel canto romantique. c

www.operanationaldurhin.eu

C’
« L’opéra peut aussi se transformer en tout un monde à rêver », comme le dit Alain Perroux, directeur de l’Opéra national du Rhin.
c DOSSIER  — LA RENTRÉE CULTURELLE 48 c DOSSIER — La rentrée culturelle №50 — Septembre 2023 — Vivre livre
Don Giovanni et Lohengrin

OPS Chaque concert est « un monde en soi »

« C’est une très belle reconnaissance », commentait Marie Linden, directrice générale de l’Orchestre philharmonique de Strasbourg rencontrée en juin dernier, peu après l’annonce du « Prix de la personnalité musicale de l’année » décerné à Aziz Shokhakimov, chef d’orchestre et directeur musical de l’Orchestre.

Mais au-delà de cette distinction personnelle, poursuivait-elle, ce « Prix de la Critique 2023 » consacre le travail d’un chef avec les musiciens et leur confiance réciproque. ».

La prochaine saison sera « vibrante » poursuit Marie Linden, « nous l’avons voulue protéiforme afin que chacun puisse se reconnaître au travers d’œuvres extrêmement diverses interprétées par des artistes venus d’horizons différents ». Le lancement en sera donné dès le 7 septembre avec le Ring sans paroles resserrant les quatre journées de la Tétralogie de Richard Wagner en 70 minutes de musique. « Puissance et démesure », commente la directrice de l’OPS qui souligne en parallèle les moments « intimistes » de la programmation, « Bach en musique de chambre, par exemple ».

« Avec Aziz, nous construisons chaque concert avec soin afin d’en faire un monde en soi qui puisse se goûter dans son unité ».

Wagner, Bahms, Rachmaninov et bien d’autres…

Entre le Ring sans paroles et le Requiem allemand de Brahms programmé en juin en clôture de saison, l’année sera marquée par le cent cinquantième anniversaire de la naissance de Sergueï Rachmaninov, compositeur russe dont Aziz Shokhakimov se sent « très proche des partitions ».

Trois de ses concertos ainsi que ses Danses symphoniques sont au programme avec, pour les porter, les pianistes russes Daniil Trifonov, Anna Vinnitskaya et Nikolaï Lugansky. Ce dernier se produira le 9 février avec le Concerto pour piano n° 2 en do majeur pour lequel le chef Marko Letonja reviendra diriger l’orchestre.

Au rang des « liens très forts » avec certains artistes qui peuvent sublimer un concert, Marie Linden cite le ténor Michael Spyres qui reviendra en janvier pour interpréter avec Joyce DiDonato le grand duo d’amour extrait des Troyens de Berlioz, tandis que la mezzo-soprano chantera la mort de Cléopâtre. « La connivence humaine qui se noue dans la durée entre les musiciens et certains artistes ouvre de nouvelles voies musicales, on va plus vite, plus loin ». Et le public ne demande qu’à suivre les artistes dans cet élan.

Nouveauté : les concerts « relax »

À noter aussi, au sein d’une riche programmation disponible sur le site, la poursuite de la résidence de Bruno Mantovani avec la création le 6 octobre de la Suite Siddharta commandée par l’OPS.

Sans oublier la programmation jeune public qui tient « vraiment au cœur » de Marie Linden, les actions dans le quartier de Hautepierre et une nouveauté : les « concerts relax » lancés cette année pour les personnes porteuses de handicaps tels que l’autisme, la maladie d’Alzheimer, les maladies psychiques et même la surdité puisque des gilets vibrants seront à la disposition des malentendant(e)s. « Ces trois concerts pleinement intégrés dans la programmation seront labellisés, et les spectateurs qui parfois peuvent être plus démonstratifs dans leurs émotions seront accueillis avec une immense bienveillance », précise Marie Linden pour qui « il est important de bousculer les codes ».

Pour ouvrir le concert à tous et vibrer ensemble au plus universel de la musique. c

www.philharmonique.strasboug.eu

c DOSSIER  — LA RENTRÉE CULTURELLE « 50 c DOSSIER — La rentrée culturelle №50 — Septembre 2023 — Vivre livre
Aziz Shokhakimov, Prix de la personnalité musicale de l’année

Bienvenue dans votre nouvelle vie quartier sud a Colmar

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BELLIS

TNS Multiplication des points de vue au Théâtre National de Strasbourg

Avouant avoir quitté Strasbourg « un peu fâchée » il y a quatorze ans au terme de sa formation au Théâtre National de Strasbourg, Caroline Guiela Nguyen se dit heureuse de revenir « dans cette magnifique maison de création » dont elle prend la direction en ce mois de septembre.

J’avais l’impression que les paysages et les récits de mon enfance n’étaient pas encore présents dans le théâtre », se souvenait en juin cette jeune quadra, française aux origines vietnamienne, algérienne et indienne qui « présentera son travail » au public strasbourgeois avec deux spectacles annoncés au printemps : la reprise de Saïgon qui fit forte impression au TNS en 2018 et Lacrima , sa nouvelle création en tant qu’auteure et metteuse en scène.

De nouvelles esthétiques

« Il était une fois une princesse qui va se marier », dit-elle de Lacrima , mais c’est autour de la robe de l’épousée que tout se nouera.

D’une maison de couture parisienne aux ateliers d’Alençon et de Mumbai, le

rêve de dentelle naîtra dans le secret et la violence, car « souvent », relève l’auteure-metteuse en scène, « du secret naît la violence ».

La programmation qui s’égrènera à partir de janvier jouera de nouvelles esthétiques au travers de récits de migration, de filiation, de langues et d’identités qui raconteront le monde en décalant les points de vue et en mêlant les pratiques.

En janvier, Le Lench d’Eva Doumbia contera les vertiges d’une jeunesse afro-européenne déchirée entre des injonctions contradictoires. Suivront La Chanson [Reboot] de Tiphaine Raffier, La Langue de mon père de et avec Sultan Ulutas Alopé, Sans tambour de Samuel Achache, Great Apes of the West Coast de et avec Princess Isatu Hassan Bangura, Fajar de Adama Diop, Cosmos de Maëlle Poésy, ancienne élève du TNS, Vielleicht

de Cédric Djedje, mais aussi Amours (2) qui marquera en mars le retour de Joël Pommerat au TNS.

D’une ville nouvelle née de Disneyland Paris à la Sierra Leone, de l’Anatolie centrale au Sénégal… la scène du TNS enchaînera les embarquements immédiats au rythme des chansons d’ABBA, des lieder de Schumann, des mélodies orientales, des rythmes africains…

Un premier trimestre toujours signé Nordey

D’ici Noël prochain, le premier trimestre a quant à lui été programmé par Stanislas Nordey. On le retrouvera en décembre dans Évangile de la nature d’après De la nature de Lucrèce traduit par Marie NDiaye.

En septembre, La Tendresse interrogera — « dans une joie assez contagieuse », précise la metteuse en scène Julie Berès — la construction du masculin hier et aujourd’hui.

Suivront en octobre Oui de Thomas Bernhard adapté par Claude Duparfait et Célie Pauthe, en novembre un très original Radio Live – La Relève signée par Amélie Bonin et la journaliste Aurélie Charon et, au tournant de décembre, Le Voyage dans l’Est où Stanislas Nordey mettra en scène le texte de Christine Angot sur l’inceste.

À ne pas rater, fin décembre, Molière en italien dans Il Tartufo proposé par Jean Bellorini, directeur du Théâtre national populaire rejoint par la troupe du Teatro di Napoli. Spectacle bouillonnant où les rimes ont été conservées.

De l’audace et « de la joie » annonce le metteur en scène et ça tombe bien, car, comme l’a dit Caroline Guiela Nguyen en présentant la saison, « nous aurons besoin de beaucoup de joie ».

Est-ce pour cela qu’à la fin mai Koudour de Hatice Özer transformera la scène du TNS en salle de fête de mariage ?

Point de mariés, mais des spectateurs invités à devenir les convives d’une clôture de saison frappée du sceau de l’hospitalité. c

www.tns.f

« c DOSSIER  — LA RENTRÉE CULTURELLE
La Tendresse mise en scène par Julie Bérès ouvrira la saison du TNS.
52 c DOSSIER — La rentrée culturelle №50 — Septembre 2023 — Vivre livre
S A U N A S 1 1 - D E S I G N B Y S T U D I O F . A . P O R S C H E

TAPS Pole-Sud Questionner le monde Intensité de la danse contemporaine

C’est un Monte-Christo aux accents rock n’roll qui ouvrira la saison 2023-2024 du TAPS entre les 4 et 6 octobre. Porté par la compagnie « La Volige », il nous mitonne une vengeance « tarantinesque » dans un désert « morriconien ».

Viendra ensuite le pas de deux de Fred Cacheux et Nils Öhlund dans 1972, un regard sur les enfants de la société de consommation qui espèrent changer les règles avant qu’il ne soit trop tard. Tango des rescapés d’un monde apocalyptique, la Fin de partie de Beckett mise en scène par Laurent Fréchuret s’annonce vertigineuse…

Avec De la poussière dans le grenier en novembre, la compagnie Je, Tu, Elle signe sa deuxième création écrite et mise en scène au TAPS où elle est en résidence. Un repas de famille où la tension monte sur fond d’enfance tragique jusqu’à réveiller les vérités enfouies.

Souvenirs aussi, égrenés entre comique et tragique par Francis Freyburger dans En attendant Théo – Ich wàrt uf de Theo écrit par Pierre Kretz et mis en scène par le directeur du TAPS Olivier Chapelet.

Regarde-moi clamera à Orphée une Eurydice rebelle fin novembre. Le mythe est bousculé dans cette œuvre musicale et lyrique où la tragédie se dansera.

Hamlet ouvrira décembre dans la mise en scène exigeante de Catherine Umbdenstock, Friendly lui succédera et questionnera les vertiges de l’amitié homme-femme dans un texte inédit de Thierry Simon mis en scène par Guillaume Clayssen entre cirque et théâtre. Mis en scène par Mathieu Létuvé, un texte de Joseph Pontus clôturera 2023 par un retour À la ligne des enjeux de nos modes de production.

Avec une phrase à la fois belle et dure : « Tu te rends compte, aujourd’hui c’est tellement speed que je n’ai même pas eu le temps de chanter ». c

www.taps.strasbourg.eu

« Une programmation se révèle une fois bouclée », constate Joëlle Smadja Directrice de Pole-Sud, Centre de développement chorégraphique national de Strasbourg, « et cette saison 2023-2024 se révèle… engagée, pressée, voire… énervée ».

Il y a beaucoup d’intensité, poursuit-elle. Quelque chose qui sort du cadre » sans pour autant renoncer à l’humour et à l’espoir. Cette saison 100 000 volts comptera 32 artistes et sera très diverse dans ses styles, ses esthétiques et les générations qui s’y croiseront.

« Des artistes reviennent », précise Joëlle Smadja en citant Régine Chopinot ( Top , les 5 et 6 décembre). « Pionnière des années 80, elle a toujours porté la modernité et est aujourd’hui entourée d’une troupe de jeunes artistes venus de différentes disciplines ».

Avec la reprise de Good Boy d’Alain Buffard par Christophe Ives (22 et 23 novembre), ce sont les années sida qui ressurgiront en écho à la grande exposition organisée au musée d’art moderne.

En 2024, Thomas Lebrun ravivera la mémoire de Marguerite Duras et Boris Charmatz celle de la « non danse » dans son travail sur le mouvement.

En janvier Leïla Ka succédera à Étienne Rochefort en tant qu’artiste invitée. « Très engagée sur le féminin et formée chez Maguy Marin », précise Joëlle Smadja, « elle assurera le final du festival « L’année commence avec elles » et l’une de ses interprètes, la Belge Loraine Dambermont assurera l’ouverture de saison avec Toujours de ¾ face !. Un solo teinté d’humour sur l’apprentissage de l’auto-défense. Ce sera les 12 et 13 septembre.. c

www.polesud.fr

Monte Cristo
c DOSSIER  — LA RENTRÉE CULTURELLE « 54 c DOSSIER — La rentrée culturelle №50 — Septembre 2023 — Vivre livre
Top de Régine Chopinot, les 5 et 6 décembre à Pôle Sud

Espace Django La Laiterie Toutes les énergies

annonce l’Espace Django et on les croit !

La saison s’ouvrira le 23 septembre avec moult « joyeuseries » : une expo « hors les murs » qui investira l’allée Reuss de scènes de vie saisies par la photographe

Lilia Zanetti au marché du Neuhof, un vernissage déambulatoire mis en percussion par le Baka Lab’ et une Boum ! Rock Zouk concoctés par Francky goes to Pointe-à-Pitre. Chemise à fleurs conseillée !

Octobre déménagera avec Odezenne Unplugged et la tournée 2023 des INOUïS lauréats du Printemps de Bourges Crédit Mutuel qui s’arrêtera chez Django le 18 avec le jazz techno des locaux « Cheap House », la poésie délicate de Brique d’argent et l’énergie de Demains rapides.

Suivront AGORO + 79RS GANGE et les incroyables BCUC Une tornade découverte chez Django en 2018 et devenue depuis déferlante mondiale. Ils reviennent avec un nouvel album soul et punk qu’ils présenteront le 24 octobre après le concert afro pop des KIN’GONGOLO KINIATA venus de Kinshasa.

Novembre débutera avec le néo soul de Leela James en exclusivité française, se poursuivra avec le quintet Notilus qui présentera son nouvel et dansant album, retrouvera l’Afrique entre berceuses bantoues et afro-house avec les Mamans du Congo & Rrobin et vibrera au talent électrisant de Dead Chic et Liv Oddman.

Soirée Rap le 30 novembre avec le premier EP de la Strasbourgeoise Lolie Tai et Enaé avant un bouquet final confié à Juste Shani.

Des femmes de talent, en phase avec le temps. c

Musiques actuelles

Fidèle à son ADN depuis presque trente ans, La Laiterie proposera plus d’une centaine de concerts durant la saison 2023-2024, tous frappés au sceau de ces musique(s) actuelle(s) défendues par Artefact PRL.

Artistes internationaux, nationaux ou régionaux, artistes en découverte ou en développement, talents confirmés se succéderont sur cette scène strasbourgeoise désormais bien identifiée par sa logique d’excellence.

C’est à La Laiterie que se tiendra la soirée d’ouverture du festival Musica avec le groupe de hip-hop CLIPPING venu de Los Angeles précédé par l’ensemble néerlandais Asko|Schönberg qui interprétera Vespers For A New Dark Age, les Vêpres contemporaines de Missy Mazzoli et Hoketus, un battle légendaire de la musique répétitive signée Louis Andriessen.

Must see !

Concerts en cascade ensuite.

Rock hétéroclite du combo alsacien Redstones, rap français de Zed Yun Pavarotti, pop mélancolique du suédois Jay-Jay Johanson venu présenter son nouvel album Fetish… On en passe, beaucoup et que des meilleur(e)s.

Le 16 novembre sera belge avec l’insolent Pierre De Maere révélé en 2022 par son splendide EP Regrets et confirmé par son single d’or Un jour je marierai un ange. Il succèdera à COLT, duo belge à l’énergie à vif qui prépare un EP après avoir cumulé plusieurs millions de vues sur son single Insomnies

Miossec et son nouvel album Simplifier  — pour ne rien s’interdire — ainsi que l’introspective et électronique Symphonie des éclairs de Zaho de Sagazan sont d’ores et déjà annoncés en avril la Laiterie. La chanson française modernisée par des productions musicales audacieuses, c’est aussi à La Laiterie.

www.artefact.org

« Une offre artistique nerveuse, éclectique, prête à stimuler la curiosité ! »
c
BCUC
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en concert chez Django le 24 octobre
Choisissez votre propre alternative pour vous déplacer en ville, à la campagne ou à la montagne. Strasbourg , Parc des expositions www.automotoandco.com 20 22 oct. STRASBOURG 24-26.11.2023 PARC DES EXPOSITIONS / HALL 2 & 3 ST-ART.COM FOIRE D’ART CONTEMPORAIN ET DE DESIGN NOS PROCHAINS ÉVÈNEMENTS

Espace K

La Laiterie Espace K OnR Tours et détours de l’humour

« Quoi de mieux que les pas de côté pour tordre le cou à la sidération-résignation ambiante » annonce Jean-Luc Falbriard directeur de la salle. L’humour peut prendre bien des formes, s’exprimer par le corps chez les clowns ou éclater dans le talent des musiciens. »

La programmation nous invite donc à bousculer nos habitudes pour rallumer nos grains de folie des plus douces aux plus grinçantes.

Avec, dès l’automne, après une soirée Devos proposée par Angel Ramos Sanchez le 9 septembre, deux spectacles inclassables. Dans Madame Fraize, Marc Fraize usera de son singulier comique en suspension pour parler sans cynisme de l’amour et du temps qui passe.

Ce sera du 28 au 30 septembre, juste avant la Carte blanche de Julien Cottereau annoncée du 5 au 8 octobre. Passé par le Cirque du Soleil, ce clown-mime-bruiteur a beaucoup tourné et imposé à l’international son personnage cueilleur d’instants interactifs magnifiés par l’impro avec des artistes insoupçonnés issus du public. Charme, autodérision, absurde… On rit beaucoup ! Du 9 au 12 novembre, Élodie Hatton croisera clown et flamenco en ouvrant un mystérieux sac abandonné sur un quai de gare. Voyage il y aura, mais en terre andalouse et burlesque, au rythme de castagnettes qui deviendront boucles d’oreilles, miroir de poche ou… moule à déguster.

Sans oublier, du 7 au 22 décembre, le fameux Krismass Show qui en sera à sa 7e édition.

Pour clore sans chichi 2023 avec un cocktail d’artistes présenté par l’irrésistible Mister Wonderful. Des paillettes, quelques brins de sensualité, une lichette de dérision, une rasade de parodie, un zeste d’absurde, une poignée de performances et surtout beaucoup d’humour ! c

www.espace-k.com

Attention, travaux !

Pas de panique, la saison prochaine se déroulera comme de coutume dans les trois salles strasbourgeoises concernées par les grands chantiers à venir, l’Opéra national du Rhin, La Laiterie et, par effet collatéral, l’Espace K, ces deux derniers lieux culturels étant installés de part et d’autre de la rue du Hohwald. Ce n’est qu’à l’automne 2024 que le branle-bas de combat débutera forçant chacun à penser « autrement » sa programmation 2024-2025.

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Olé de Élodie Hatton, à l’Espace K du 9 au 12 novembre

ais le mot « attention » a plus d’un sens », remarque Thierry Danet d’Artefact PRL, l’association qui gère La Laiterie.

« Durant les mois qui viennent, nous serons tous très concentrés sur ces futurs travaux et leur impact sur une salle que nous savons chère aux spectateurs, aux artistes et aux voisins ».

Tout comme Alain Perroux, directeur de l’Opéra, il se réjouit de l’annonce faite par l’équipe municipale d’entreprendre enfin ces chantiers évoqués depuis longtemps.

Alain Perroux s’est dit « optimiste » lors de la conférence de presse de présentation de saison en mai dernier : les consultations entre Ville et institution sont prometteuses et « les choses sont prises dans le bon ordre ».

« Tout va se caler progressivement », estime pour sa part Thierry Danet qui espère un « avant-projet définitif » à l’automne tout en reconnaissant – sans s’en plaindre, bien au contraire – qu’il reste « beaucoup de choses à définir ». Ce qui va effectivement mobiliser l’attention de toute l’équipe qui devra en même temps programmer une dernière saison de haute volée dans la Laiterie actuelle..

Rififi à l’Espace K

Pour Jean-Luc Falbriard, directeur de l’Espace K, la pilule a été plus amère à avaler et il l’a fait savoir lors de l’annonce du chantier de la Laiterie voisine.

Celui-ci prévoit en effet la relocalisation du « Club » de La Laiterie dans l’actuel « Salon des curiosités » de l’Espace K installé au Hall des Chars en face de la salle de concert.

Un chambardement à venir pour lequel Jean-Luc Falbriard regrette – le mot est faible – ne pas avoir été consulté en amont. Prévenu par la bande, il a sollicité un rendez-vous avec les élus qui l’ont rencontré… une heure avant le Conseil municipal où les travaux ont été actés.

Aujourd’hui, s’il sait que personne ne reviendra sur la décision de déménager le « Club », il constate que l’équipe municipale manifeste « une réelle volonté de venir à la rencontre de l’équipe de l’Espace K pour entendre ses demandes et ses propositions ».

« Une rencontre a aussi eu lieu entre nous, La Laiterie et le TAPS qui a son entrée dans la même cour que l’Espace K et sera indirectement affecté par les travaux. L’ensemble du site doit être repensé, il

faut que nous travaillions en concertation. »

Mais, souligne-t-il, nous ne serons directement concernés qu’en 2026. Ce qui laisse du temps, mais représente une « charge mentale » dont l’artiste et son équipe se « seraient bien passés » durant la préparation de leur grand projet prévu pour octobre 2024 : une comédie musicale dans l’esprit anglo-saxon intitulée Rififi.

« Broadway à Strasbourg », résume Jean-Luc Falbriard. « Ça va chanter, danser et se conclure dans un happy end très « années 50 » sous la houlette d’une chorégraphe venue du West End londonien pour s’installer en Alsace ».

Côté Laiterie, le chronomètre s’est enclenché avec beaucoup plus d’urgences avant des travaux prévus de septembre 2024 jusqu’au premier trimestre 2026 en ce qui

concerne la « grande salle » où la jauge doit passer de 870 à 1 164 places. La relocalisation du « Club » (294 places) s’échelonnera quant à elle sur 2026.

La Laiterie veut garder son âme

« Tout ne sera pas livré en même temps », résume Thierry Danet qui travaille avec son équipe à une programmation hors les murs qui reste à « caler » dans un timing à « affiner » en tenant compte du modèle économique spécifique à cette salle autofinancée à 75 % grâce à la billetterie et au bar.

Le départ du « Club » vers le Hall des Chars situé en face représente un défi également pour La Laiterie, souligne-t-il en insistant sur « la relation créée avec le lieu par les artistes et le public ».

« Nous devons la repenser à l’échelle du site et non plus à celle du bâtiment si nous voulons que chacun – y compris les voisins –le vive bien. Il faut inventer un « nouveau scénario » qui s’articule avec les habitués, les artistes et l’environnement si nous voulons réussir cette nouvelle et nécessaire mutation. » Pour y parvenir, le dialogue « avec les habitants et les habitués » sera central durant la saison 2023-2024. Des ateliers sont envisagés, notamment sur la question des espaces publics qui évolueront avec cette nouvelle configuration de La Laiterie dont l’entrée sera installée rue-du-Ban-de-la-Roche.

« La Laiterie est une salle à rayonnement international, mais elle doit absolument rester ancrée dans l’identité et le récit du quartier, dit-il, c’est une très bonne chose que les architectes retenus, Patrick Weber et Pierre Keiling, y soient installés ». Sans compter que le second, ancien bassiste du groupe de rock Kat Onoma, avait réaménagé les locaux de l’ancienne coopérative de de collecte laitière en salle de concert, en 1994, il y aura bientôt trente ans.

« Enthousiaste » à l’idée que La Laiterie reste « au cœur du quartier qu’elle habite », l’équipe d’ARTEFACT PRL veut mettre à profit « tout ce que le lieu a pu enseigner depuis sa création ».

À commencer par la capacité à « s’adapter tout le temps », en « porosité » avec l’environnement et l’époque : « Plus qu’un équipement culturel, La Laiterie est un lieu. Nous devons porter « attention » à ce que les artistes, les habitués et les habitants mettent dans ce lieu. »  c

M
Alain Perroux Jean-Luc Falbriard
59 c DOSSIER — La rentrée culturelle №50 — Septembre 2023 — Vivre livre
Thierry Danet

EN PÉRIPHÉRIE… Tour d’horizon des salles où ça bouge bien aussi…

ILLKIRCH-GRAFFENSTADEN

L’Illiade croise les genres

C’est avec Amine Radi – expert-comptable humoriste – que l’Espace culturel L’Illiade d’Illkirch-Graffenstaden ouvrira sa saison, le 30 septembre prochain. Un one man show ensoleillé et revigorant !

En octobre, Sebastian Marx contera dans un décalage lumineux les affres de la vie d’un quadra argentino-juif-new-yorkais pacsé à une Française avec 3 enfants en bas âge. La langue française est une jungle !..

Toujours en octobre, Chimène Badi chantera Piaf, 60 ans après la disparition de la môme et les Sea Girls livreront leur jubilatoire Anthologie ou presque !.

Les Rythmes folk du Churchmann’s Odd Ballads Trio, finaliste de Blues sur Seine, suivront en novembre avant les voix et musiques corses d’Alte Voce et le nouveau one-man band électroacoustique du Strasbourgeois Jacopo Costa, à mi-chemin entre Robert Wyatt et Prince.

Côté classique, en octobre, le Duo Emhorizos explorera les résonnances entre nature et émotions et, en décembre, Vincent

de Murcia, professeur au Conservatoire de Strasbourg, croisera Brahms et Baudelaire. Du théâtre aussi avec de l’impro et du boulevard, Embrasse-moi idiot en novembre et Le meilleur de l’homme c’est sa femme en décembre.

Destination Buenos Aires en novembre pour un voyage aux racines du tango argentin avec la Compagnie Argentina. Un spectacle visuel et sensuel.

Et que diriez-vous de découvrir La vraie vie — très bluffante — du magicien Adrien Wild en novembre ?

Quant à la féministe indocile et drôle Klaire, elle fera « GRR » en décembre avant deux spectacles proposés par la compagnie chorégraphique de François Mauduit : Madame Butterfly, le 15 et Casse-noisette le 16. Vibrants. c www.lilliade.illkirch.eu

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Madame Butterfly par la compagnie chorégraphique François Mauduit, le 15 décembre à l’Illiade
60 c DOSSIER — La rentrée culturelle №50 — Septembre 2023 — Vivre livre

OSTWALD

Théâtre, danse, musique… au PréO I

maginez… nous sommes le vendredi 13 septembre 1964 et des bombardiers américains ont reçu par erreur l’ordre d’anéantir Moscou. Mis en scène par Robin Goupil, neuf comédiens nous feront rire et trembler dans une parodie des archétypes de la guerre froide. Rythmé, déjanté et drôlement pertinent en ces temps troublés, ce spectacle a été nominé aux Molières 2023 de la meilleure comédie.

Suivra en octobre The Circle of Dancers, battle de danse Hip-Hop orchestrée par la Compagnie Mira et un concert jeune public tourbillonnant au vertige d’un Grand Huit signé Tartine Reverdy.

Humour toujours, et toujours en musique avec Oh la Belle Vie ! revigorée par les artistes de Cinq de cœur. Une ribambelle de morceaux cultes allant du générique de Game of thrones à Aretha Franklin en passant par Dassin, Gainsbourg ou Imagination. Ce sera

Les tourbillons du Point d’eau

Théâtre, danse, musique, humour, mais aussi beaucoup de cirque avec l’accueil de grandes compagnies internationales telles que CIRCA, le Cirque Éloize et, le 24 novembre, les acrobatiques Québécois de « Machine de cirque ».

Entre humour et nostalgie, six personnages en quête d’humanité rivalisent d’ingéniosité et de haute voltige pour retrouver les rescapés d’une apocalypse.

Acrobates, jongleurs, trapézistes et clowns, tous sont époustouflants.

Des temps festifs émailleront la saison, le « Séniwé Festival » des arts et cultures africaines du 17 au 17 septembre, le festival O.Q.P. (Opérations Quartiers populaires 2023) du 26 septembre au 1er octobre avec un saisissant « Royaume » où le chorégraphe. Hamid Ben Mahi questionne la brutalité du patriarcat.

« Guten Tag Madame Merkel » déclarera Anna Fournier en octobre dans un seule en

scène épique et satirique. Juste après, le Young Actors Theater Strasbourg (YATS) reviendra au Point d’eau avec « Fiddler on the Roof », violon sur le toit en langue anglaise.

Musique cubaine ensuite avec « Vivelo » avant deux soirées indiennes au cœur du festival « Happy Diwali ! » et, en novembre, l’expérience d’un concert rock à 360° orchestré par « La Colonie de vacances ». Quatre scènes d’où les musiciens se répondent et le public au milieu pour une totale immersion. Avec, entre ces deux soirées musicales, « Le Misanthrope » mis en scène par la Compagnie du Matamore.

En décembre, le No Limit Orchestra emmènera le public dans une « Symphonie galactique » en quête de nouveaux horizons où réinventer la vie. Conçue pour être interactive, chaque représentation sera unique.

www.lepointd’eau.com

le 4 novembre juste avant Le Bal à Boby Lapointe !, le lendemain.

Suivra un Schubert in love né de la rencontre entre Rosemary Standley, chanteuse du groupe Moriarty et des instrumentistes de l’Ensemble Contraste. Les Lieder immortels se teinteront d’une texture classique, pop, jazz, folk et soigneront l’automne d’une vigueur tout sauf monotone. Le 25 novembre, Anne-Laure Hagenmuller nous proposera de Battre le ciel tant qu’il est drôle et tendre. Histoire de faire front contre les coups du sort et croire en la vie toujours ardente.

Et pour finir l’année en absolue légèreté quoi de mieux que les bulles de savon du catalan Pep Bou s’élevant en musique dans ses poétiques Experiències ? Avant d’entamer 2024 aux accents électro pop de la multirécompensée Émilie Simon. c

www.lepreo.fr

OBERHAUSBERGEN
No Limit annonce le PréO Scène d’Oberhausbergen dès son spectacle de rentrée le 30 septembre. De l’humour ultra pas sérieux pour traiter un thème on ne peut plus grave : le sur-armement, le nucléaire, la guerre.
Le Bal à Boby par la Compagnie NGC 25, au PréO le 5 novembre
C’est un tourbillon d’émotions qu’annonce le Point d’Eau d’Ostwald.
Machine de cirque au Point d’eau le 24 novembre
c
61 c DOSSIER — La rentrée culturelle №50 — Septembre 2023 — Vivre livre

Échappée belle entre jazz et classique, chansons et théâtre

Du jazz, beaucoup de jazz jusqu’en décembre. Le Pamina Beroff Quartet ouvrira la saison le 20 septembre avec un Unfolding aux couleurs de l’ouverture à soi.

Suivront les Broken Lines du tromboniste Robinson Khoury et le super groupe new-yorkais Abraham Inc. Feat.David Krakauer Fred Wesley & socalled dans une collision improbable entre tradition ashkénazes et funk incandescent.

Brexit Music n’aura rien d’une ode à Boris Johnson, mais tout d’une relecture de chansons made in UK par Baptiste Trotignon et ses complices : des Beatles à Radiohead en passant par Police, Pink Floyd, Bowie, Queen, Led Zeppelin et les Stones.

Autre Musical tribute, celui dédié à l’immense pianiste McCoy Tyner par Avery Sharpe qui fut son bassiste. Ce sera le 24 novembre avant les… Inoxydables Célestins et leur jazz New Orleans.

Décembre s’ouvrira avec le Jimmy Hendrix de l’orgue Hammond alias Lachy

Doley suivi du concert du saxophoniste Benjamin Petit Quartet dédié à John Williams.

L’Échappée belle sera aussi celle des musiques venues d’une Turquie contée par l’auteure Sedef Ecer et la chanteuse Gülay Hacer Toruk avant de se déployer dans les ruelles d’une métropole imaginée aux couleurs du monde dans le Radiopolis Projekt d’Electrik Gem.

Elle reviendra en France grâce aux Immortelles de Tim Dup.

Côté théâtre, la 114 Cie de Nicolas Petisoff et Denis Malard construira Parpaing après parpaing l’identité d’un jeune homo et côté danse le jeune chorégraphe Léo Walk mettra en mouvement les relations tissées au sein de sa compagnie La Marche bleue.

En ce qui concerne le classique, ne ratez pas le concert de la jeune guitariste russe Vera Danilina. De Bach à Duplessy, du baroque au contemporain, la virtuose confondante de présence scénique partagera ses coups de cœur. c

VENDENHEIM

L’Attrape-rêves du Diapason

Je rêve, tu rêves, nous rêvons tous…

Et pour rêver plus encore, direction le Pôle culturel du Diapason à Vendenheim.

Clowneries, humour, burlesque, musique, danse, théâtre, opérettes, chansons, tango, blues, jazz, hiphop et fanfare y feront sarabande lors d’une saison qui s’annonce pétillante.

Vivre c’est rêver à des ailleurs portés par la musique. Celle des chants venus des montagnes de Bulgarie pour être sublimés par le trio Ispolin en ouverture de saison. Celles d’ici et de bien plus loin collectées pendant des années pour être contée dans le très multiculturel et envoûtant Monde en orchestre d’Ernest, en octobre.

C’est aussi s’interroger sur l’Histoire avec un grand H donnée à entendre par les voix d’Asie, d’Afrique et d’Arabie rassemblées dans Race, de Pascal Rambert, mis en scène par Beatriz Guttierez pour la

compagnie strasbourgeoise Les Gladiateurs. Des voix mortes qui demandent réparation pour avoir enduré le génocide et disent l’horreur pour ne plus tomber au piège des pires cauchemars.

Vivre c’est danser en novembre au Bal perdu, mais retrouvé par Guillaume Schleer et Marie Dubus dans un concert où se mêlent musette, tango, swing, Rag-Times et Rock teintés de jazz et de chansons.

Rêver encore, rêver sans bruit avec Pss Pss, merveille d’onirisme créée par les tendres clowns de la compagnie Baccalà déjà applaudie dans plus de cinquante pays sur les cinq continents.

Ce sera en décembre, histoire de dire au revoir à 2023 sur la pointe des pieds. c www.vendenheim.fr/culture

SCHILTIGHEIM
c DOSSIER  — LA RENTRÉE CULTURELLE
La saison 2023-2024 de « L’Échappée belle » à Schiltigheim se veut « Ode à la liberté. »
Pss Pss par la compagnie Baccalà, le 8 décembre au Diapason Le trio Abraham Inc en concert à la Briqueterie le 10 octobre
62 c DOSSIER — La rentrée culturelle №50 — Septembre 2023 — Vivre livre

Un Zénith flamboyant dans les six mois à venir…

Tout en haut de la liste, le concert-événement de Matt Pokora qui signe ainsi son grand retour sur les scènes françaises. « L’enfant du pays » fêtera ses vingt ans de carrière avec Epicentre son nouveau spectacle. Le Zénith Europe de Strasbourg sera évidemment une de ses premières étapes. Deux dates sont prévues : le samedi 14 et le dimanche 15 octobre prochains.

Parmi les autres chanteurs français prévus au programme de la salle strasbourgeoise, Christophe Maé le 13 octobre, Maxime Gasteuil le 18 octobre, Pascal Obispo le 17 novembre, Claudio Capeo le 18 novembre, l’inoxydable Michel Sardou pour son retour sur scène le 22 novembre, les rappeurs Djadja & Dinaz le 2 décembre et 50 Cent le 31 octobre, Damien Saez le 3 décembre, Nej le 8 décembre et Veronic Dicaire le 31 janvier. Shaka Ponk dynamitera la scène du Zénith le 25 novembre prochain.

De brillants musiciens instrumentistes sont également annoncés : le trompettiste Ibrahim Maalouf aux spectacles toujours aussi inventifs (le 7 novembre), le pianiste (et compositeur) Sofiane Pamart le 16 décembre.

Des spectacles très divers réuniront leurs fans : le toujours formidable Lord of the Dance et ses Irlandais virevoltants (le 6 octobre), l’Infamous Festival qui reviendra après une première édition qui a rassemblé plus de 4 000 personnes avec un line-up qui rassemblera la crème des musiques urbaines actuelles (le 21 octobre), le Top Music Live le 7 décembre et, plus classiques, le ballet Casse-Noisette le 10 décembre ou encore les comédies musicales Notre-Dame de Paris les 3 et 4 février et Bernadette de Lourdes les 20 et 21 décembre sans oublier les humoristes, Booder le 21 janvier et Alban Ivanov le 10 février. c

La vaste arène d’Eckbolsheim s’apprête à vivre une exceptionnelle fin d’année avec une belle gamme d’événements et de spectacles appelés à connaître un beau succès.
Détails et réservations sur www.zenith-strasbourg.fr
63 c DOSSIER — La rentrée culturelle №50 — Septembre 2023 — Vivre livre
Matt Pokora , Ibrahim Maalouf, Lord of the Dance
ECKBOLSHEIM

50 EL CINQUA NTIÈME   !

c DOSSIER — LE CINQUANTIÈME

Cinquante numéros…

Douze ans et demi de frénésies trimestrielles, de passion ponctuée de quelques angoisses bien plombantes mais aussi, et c’est ce qu’on retiendra de toute façon, douze ans et demi de travail en équipe qui ont généré de formidables rencontres humaines et aussi, souvent, une grande fierté. Cette fierté d’avoir tenu le pari de départ et de le tenir encore plus aujourd’hui, cette fierté d’avoir créé de toutes pièces un trimestriel d’information générale de qualité, écrit par des journalistes et fabriqué selon les normes de la presse traditionnelle. Mais un magazine gratuit, selon le postulat de départ resté immuable, avec ses 15 000 exemplaires diffusés très largement… Oui, le pressentiment d’origine était le bon. Il manquait à notre ville un vrai magazine indépendant, capable de se faire écho de tout ce qui bouge et innove à Strasbourg.

Alors oui, douze ans et demi et cinquante numéros plus tard, on s’est dit que ce serait peut-être sympa de jeter un petit coup d’œil dans le rétro et de faire se redérouler les cinquante couvertures depuis le numéro 1 de décembre 2010. En les ponctuant, pour certaines, d’une sorte de making of, car, celles et ceux qui ont fait partie de l’aventure le savent, il y eut tant de moments, heureux ou moins, où il fallut tenir la plume d’une main ferme et ne pas renoncer à justifier opiniâtrement le sens de notre titre.

On a essayé de vous raconter tout ça, au moins pour les numéros saillants, mais la place nous a manqué pour témoigner de l’ensemble des cinquante parutions d’un magazine atypique dont certains prédisaient la disparition inéluctable à peine l’encre du premier numéro avait-elle séché… Alors, en route pour le revival !

Jean-Luc Fournier
65 c DOSSIER 50
Jean-Luc Fournier

N°1 DÉCEMBRE 2010

L’expo Klimt et Vienne 1900 de la Fondation Beyeler en couverture, de nombreuses pages sur l’expo inaugurale brillantissime du musée Pompidou à Metz. Tiré à 20 000 exemplaires (dont 8500 distribués directement dans les boites aux lettres de certains quartiers sélectionnés), le premier numéro d’Or Norme a été évidemment très remarqué. En fait, il aurait dû paraître… deux ans plus tôt. C’était sans compter sur la gigantesque crise financière de l’automne 2008 qui avait immédiatement « vitrifié » toute l’économie. Deux ans plus tard, aucune amélioration spectaculaire n’avait été enregistrée, mais on s’est lancé quand même…

N°3 SEPTEMBRE 2011

En titrant, « La gastronomie, une passion alsacienne », il fallait des témoins à la hauteur. Certains, Émile Jung et Guy-Pierre Baumann, nous ont quittés depuis, mais, avec Jean-Georges Klein, ils avaient enchanté cette table ronde réunie à la winstub Chez Yvonne, alors sous la houlette de Jean-Louis de Valmigère. Un moment unique… N°4

DÉCEMBRE 2011

La fierté de se retrouver six longues heures en pleine salle d’opération au NHC pour témoigner d’une greffe de poumons réalisée par les équipes des professeurs Massard et Santelmo. Un reportage rare sur une vie qui renaît. Des êtres exceptionnels sur quinze pages.

N°6 JUIN 2012

Le phénomène naissant Abd al Malik, à cœur ouvert.

N° 5 AVRIL 2012

Sans le savoir, un numéro qui allait semer quelques petits cailloux bien pugnaces. En suggérant à Jean-Luc Fournier de choisir Israël comme thématique pour ce numéro spécial « Destination de légende », Patrick Adler s’est retrouvé finalement du voyage et pendant douze jours, a compris quelques subtilités du métier de journaliste. Nul doute qu’il s’en est souvenu quelques années plus tard…

N° 8 DÉCEMBRE 2012

On inaugure nos « Expos TGV » du numéro de décembre. Le Paris de l’art devient la banlieue de Strasbourg…

N° 9 MARS 2013

La Namibie, mais aussi La Havane, Venise et Rome : Or Norme part à la rencontre des Alsaciens du monde entier…

66 c DOSSIER №50 — Septembre 2023 — Vivre livre 50

Réduire son empreinte GES, une nécessité qui devient de plus en plus urgente.

Les conséquences du réchauffement climatique se feront d’année en année plus pressantes, accentuant les effets sur les écosystèmes, notre société et notre économie. Le dioxyde de carbone et les autres gaz émis lors de la fabrication des matières premières, des encres ou encore la logistique jusqu’au point de livraison sont autant d’exemples qui permettent de saisir l’impact que peut avoir l’activité d’impression.

Préserver cette activité, pour ses employés et ses clients, passe par la mesure de ses émissions de gaz à effet de serre puis leur réduction d’année en année.

Pour se faire DS impression, labellisée Imprim’Vert depuis 2016 et Print’Ethic depuis 2021 ajoute à ses moyens l’outil ClimateCalc sur le site de Geudertheim avec 2022 comme année de référence.

Cette étape nous permet d’aller plus loin dans notre démarche et surtout d’identifier les leviers dont nous disposons pour réduire le coût de l’impression tant sur ses aspects économiques, sociaux que environnementaux. C’est la volonté de participer à notre échelle à la diminution des émissions absolues de gaz à effet de serre (GES), préparer l’avenir de notre entreprise ainsi que la dynamique et l’accompagnement du label Print’Ethic, de l’UNIIC et d’Ecograf qui a motivé la mise en place d’un outil de mesure de notre empreinte équivalent carbone. Comment agir, sans tout d’abord mesurer ?

Des besoins et des demandes de plus en plus présents côté clients.

Aujourd’hui, nos clients sont constamment en demande de données, d’informations sur les impacts de leurs choix en matière d’impression et sur la manière de réduire leur empreinte carbone.

Basé sur la méthode du “GHG protocol” (GreenHouse Gas protocol), l’association ClimateCalc propose un outil sectoriel pour la mesure des émissions sur 6 gaz à effet de serre et ce sur les 3 Scopes. Cette approche nous permet d’avancer de manière considérable et de répondre à leurs besoins en remontant jusqu’à l’empreinte de la fabrication de notre matière première et estimer à la fois l’empreinte équivalent CO2 liée au site (moins de 3%) mais aussi au produit (environ 97%).

Baisser nos émissions de GES, qu’elles soient directement ou indirectement liées à nos sites de production ou à nos produits est une nécessité et constitue le socle de nos futurs engagements en termes de responsabilité sociétale.

C’est surtout un outil, un filtre qui guide nos décisions stratégiques au même titre que l’aspect humain, financier ou celui d’innovation.

Et concrètement ça donne quoi?

L’enjeu pour les équipes est maintenant la mise en place de manière collaborative d’un plan d’action.

Au niveau de notre site de Strasbourg, la souscription à une offre d’énergie verte (hydroélectrique, solaire, biomasse), le changement de

largeur de nos laizes, une meilleure optimisation des flux de production avec des innovations internes au groupe Agile (Agile XP et la solution OKTO) ainsi que de nouvelles machines, la gestion des flux de déchets en interne mais aussi pour nos clients avec une solution d’upcycling des imprimés en bâche ou en akylux proposée par la Recyclerie d’Hortense constituent les premières étapes dans la diminution de notre impact.

Concernant l’aspect produit, le développement des outils numériques vise à réduire la part de logistique nécessaire pour acheminer nos impressions chez nos clients en complément de la mise en place d’un nouveau site à Lyon.

Ce sont désormais 3 sites répartis sur Strasbourg, Paris et Lyon qui peuvent imprimer au plus proche de nos clients, diminuant ainsi la quantité de GES émis pour la livraison.

L’impact le plus important étant au niveau de la fabrication des matières premières (3/4 de notre empreinte équivalent CO2), il nous faudra donc repenser nos références disponibles afin de favoriser une baisse rapide de nos émissions et tenir nos engagements.

Thibault Chaillon

Management de la Transition Écologique et Solidaire chez DS Impression

      03 90 22 75 75 contact@ds-impression.com www.ds-impression.com Une société Agile Group. 5, rue de l’Artisanat 67170 Geudertheim Strasbourg • Paris • Lyon © 08/2023SAS au capital social de 56.620€. Siret 450 655 543 00020. IMPRESSION XXL POUR LES MARQUES & LES RETAILERS : AFFICHE, PLV, SIGNALÉTIQUE, PACKAGING, THÉÂTRALISATION & ÉVÉNEMENTIEL COMMUNIQUÉ SOYONS LOGIQUE AUTANT
QU’ÉCOLOGIQUE
PUBLI-COMMUNIQUÉ

N°11 DÉCEMBRE 2013

Un imam, un curé et un rabbin, hilares et fraternels, campent en couverture, œuvre du photographe JR exposé chez Burda à Baden. Elle fera couler beaucoup d’encre cette couverture, déclenchant quelquefois quelques critiques tout à fait hors sujet…

N°17 JUIN 2015

Un des plus marquants des grands entretiens qui ont toujours ouvert les pages du magazine. Pierre Rabhi, chez lui, en Ardèche, parle de la sobriété heureuse…

N°14 OCTOBRE 2014

« Strasbourg, bougetoi ! » disait le titre. Et suivaient une vingtaine de personnes dont on ne parlait jamais et qui, cependant, dynamisaient si bien la capitale alsacienne.

N°16 AVRIL 2015

Une interview exclusive de Captain Paul Watson, le fondateur de Sea Shepherd : « Le truc que j’ai toujours aimé chez les pirates, c’est qu’ils font les choses. Ils ne restent pas assis à en parler… »

À la fin d’une longue journée au Festival de l’image sous-marine de Strasbourg, au sortir du parking de la place de la Bourse, cette boutade : « Eh Captain, ne te trompe pas de destination. Si tu vas à gauche, tu te retrouves direct en Allemagne. Là-bas, il y a un mandat d’arrêt contre toi… » Rire énorme du géant aux cheveux d’argent…

N°19 DÉCEMBRE 2015

Les attentats de novembre à Paris viennent endeuiller nos Expos TGV. Quelques mois auparavant, c’était la tragédie de Charlie, évoquée par un numéro spécial diffusé à 30 000 exemplaires après que la manifestation de Strasbourg ait réuni plus de 40 000 personnes…

N°22 SEPTEMBRE 2016

En couverture, l’édition 2016 des Bibliothèques idéales dont Or Norme a été partenaire dès son premier numéro.

68 c DOSSIER №50 — Septembre 2023 — Vivre livre 50

Sept

| Déc

Ouvertures de saison

Rencontres avec Caroline Guiela Nguyen, visites et déambulation dans le théâtre, concerts gratuits, repas sur le parvis

Ven 15, sam 16, dim 17 sept

La Tendresse

Julie Berès, Lisa Guez, Kevin Keiss, Alice Zeniter | Julie Berès

4 | 14 oct

Oui

Thomas Bernhard | Célie Pauthe

24 | 28 oct

Radio live − La relève

Amélie Bonnin, Aurélie Charon

7 | 18 nov

Le Voyage dans l’Est

CRÉATION AU TNS

Christine Angot | Stanislas Nordey

28 nov | 8 déc

Il Tartufo

Molière | Jean Bellorini

12 | 16 déc

Évangile de la nature

CRÉATION AU TNS

Lucrèce | Christophe Perton

La Tendresse © Axelle De Russé
13 | 21 déc 03 88 24 88 24 | tns.fr | #tns2324
T NS Théâtre National de Strasbourg

N°27 DÉCEMBRE 2017

De longues pages sur le succès magistral de l’expo Hélène de Beauvoir au musée Würth. Sollicitée par nos soins, la directrice d’alors des Musées de Strasbourg, avait refusé de l’organiser : « Aucune valeur muséale » avaitelle tranché avec morgue. Il reste du travail pour que Strasbourg ose « l’hors-normalité »…

N°26 SEPTEMBRE 2017

Pour le grand entretien de ce numéro, Michel Serres nous reçoit dans sa petite maison de la proche banlieue parisienne. Ayant noté une heure plus tardive, il nous accueille, confus… en pyjama ! Il passe vite fait une chemise et un pull, mais garde le pantalon : « C’est plus confortable et vous n’aurez qu’à cadrer soigneusement les photos » rigole-t-il. Suivent deux heures absolument brillantissimes où le philosophe prouve par A+B que non, « ça n’était pas mieux avant ». Comme pour des millions de Français, sa disparition soudaine, moins de deux ans plus tard, nous bouleversera…

N°29 JUIN 2018

Un énorme dossier « Urgences : hôpital en souffrance » avec le témoignage exclusif de soignants. Refus d’interview de la part du directeur du NHC de l’époque, refus de prises de vues dans l’enceinte du CHU, mais, à la parution, des réactions plus que positives venues des différents services dont certains ont affiché format A3 les pages d’Or Norme dans les salles de détente des personnels…

N°28 MARS 2018

Pour la première fois, un magazine consacre vingt pages à l’intense pollution atmosphérique qui accable Strasbourg. Notre dossier « Strasbourg tu respires ? » interpelle les élus locaux et nationaux…

70 c DOSSIER №50 — Septembre 2023 — Vivre livre 50

N°32 MARS 2019

Peut-être le numéro le plus emblématique de toute l’histoire d’Or Norme. Il fait suite aux attentats du marché de Noël de Strasbourg. Grâce, notamment, aux excellents contacts noués par Nicolas Rosès, un de nos photographes, au niveau des services de police, nous publions l’interview exclusive du directeur départemental de la Sécurité publique qui a dirigé les opérations et dont l’un des équipages a abattu Cherif Chekatt, l’assassin des cinq victimes de ce funeste 11 décembre 2018. Dans le même numéro, on peut lire l’interview déchirante de Dorota Orent, la mère de Bartek, pleuré par tant de gens à Strasbourg et celle de Damian Myna, le musicien sur lequel le terroriste s’est acharné, lui assénant treize coups de couteau et lui faisant frôler la mort. Damian Myna avait réservé à Or Norme la primeur de son témoignage. Il va beaucoup mieux aujourd’hui : lorsque nous nous sommes retrouvés il y a quelques semaines, il nous a appris qu’il allait émigrer au Brésil avec son épouse Rosana… 40 pages auront été consacrées à ces tragiques événements qui ont marqué à jamais les Strasbourgeois. Un numéro à la hauteur de ce que doit être un vrai magazine d’information hyper-connecté à sa ville…

N°36 MARS 2020

Grâce à Amélie Deymier, nous ouvrons le dossier du loup, de retour dans les Vosges voisines, mais ce numéro comporte également une interview sur le pouce de Wim Wenders venu à Bâle pour participer à la splendide expo Hopper de la Fondation Beyeler. Rencontré au débotté très tôt dans les salles encore désertes de l’expo, le cinéaste allemand a fini par céder à l’amicale, mais insistante pression pour confier sa passion du peintre américain…

N°39 SEPTEMBRE 2020

Un numéro qui raconte un futur enchainement fatal : la couverture : « Parlement européen : je suis venu te dire que je m’en vais… » Nos informations font jaser, ça râle de partout y compris au plus haut niveau de l’État… mais aucun démenti de qui que ce soit par rapport aux informations exclusives publiées ne viendra jamais… Commentaire (off) d’un haut fonctionnaire proche du dossier et… de l’Élysée : « Béton, les informations de cet article… »

N°37 JUIN 2020

Un autre numéro marquant, celui qui raconte les luttes, les angoisses, les peines, les dévouements, l’altruisme et l’humanité des Strasbourgeois face au virus du Covid…

71 c DOSSIER №50 — Septembre 2023 — Vivre livre 50

N°41 MARS 2021

Une couverture très Or Norme, le baiser de deux femmes en très gros plan. Avec, en pages intérieures, le rappel du manifeste des 343 salopes, cinquante ans plus tard…

N°48 MARS 2023

La publication du grand dossier sur « Le grand fiasco du REME strasbourgeois » aura provoqué bien des réactions. Mutisme total de la SNCF qui a lu et relu le dossier sans trouver à redire… Juste pour prévenir, on annonce déjà une suite-bilan dans trois mois, au sein de notre numéro 51.

N°43 SEPTEMBRE

2021

Encore une grande enquête-révélation avec les dessous cachés de la fermeture du grand magasin Le Printemps. Un festival d’incompétences et d’imprévoyances venues du plus haut niveau de la hiérarchie du grand groupe parisien…

N°44 MARS

2022

À l’occasion de la Présidentielle 2022, trois grands entretiens pour le prix d’un : Emmanuel Todd, Marcel Gauchet et Jérôme Fourquet. Qui dit mieux ? Personne…

N°47 DÉCEMBRE 2022

N°45 JUIN 2022

Notre numéro spécial « Slava Ukraïni ! » avec le grand entretien percutant de Raphaël Glücksmann et le témoignage de nombreux réfugiés ukrainiens à Strasbourg… Or Norme continue son job !

Le grand retour des « Destinations de légende » avec l’Islande, en XXL panoramique dans Or Norme un des numéros aujourd’hui encore les plus réclamés. Au vu des demandes de contact, beaucoup de Strasbourgeois sont allés en Islande cet été, c’est certain…

N°50 SEPTEMBRE 2023

Vous l’avez en main !

VIVRE LIVRE LE MAGAZINE D’UN AUTRE REGARD SUR STRASBOURG № SEPTEMBRE 2023 VIVRE LIVRE № 50 SEPTEMBRE 2023 b GRAND ENTRETIEN IVAN JABLONKA « Et soudain, il ne sera plus là… » Page 8 a CULTURE RENTRÉE CULTURELLE Des programmes les plus séduisants et les plus motivants qui soit. Page 45 c DOSSIER BIBLIOTHÈQUES IDÉALES D’une Bibliothèque Idéale aux Bibliothèques Idéales. Page 14 c DOSSIER AVIGNON 2023 Un formidable cru pour les pépites alsaciennes. Page 32 50 Vivre   Livre... 50
72 c DOSSIER №50 — Septembre 2023 — Vivre livre 50

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RÉUSSIR ENSEMBLE

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© Guillaume Devos

CINÉMA MUNICIPAL L’ODYSSÉE DU COSMOS

N’EN EST QU’À SON DÉBUT…

En ce début juin dernier, les palissades sont tombées, les affiches des films et cycles en cours égaient la façade rénovée, le bar (devenu Le Bardu, café-restaurant du Cosmos) a installé sa terrasse et elle accueille Étienne Hunsinger, responsable de la programmation du cinéma, pour une interview « de rentrée » d’autant plus nécessaire qu’il s’agit d’y voir plus clair sur ce qui va constituer l’essentiel de l’activité de l’atypique cinéma municipal de Strasbourg…

a CULTURE – RENCONTRE
Jean-Luc Fournier Nicolas Rosès
74 a CULTURE №50 — Septembre 2023 — Vivre livre
Étienne Hunsinger, responsable de la programmation du cinéma Cosmos.

Un mot tout d’abord sur cette équipe qui a remporté l’appel à projets lancé par la nouvelle municipalité de Strasbourg dès son élection il y a trois ans maintenant…

Le Troisième Souffle, c’est le nom de notre association, a été créé en 2010 dans le but de candidater à la reprise du cinéma municipal de Strasbourg. Nous avons candidaté une nouvelle fois en 2015-2016, sans succès. La troisième a été la bonne et notre association s’est alors transformée en coopérative depuis novembre dernier avec une soixantaine d’adhérents, individuels ou structures liées à l’audiovisuel…

Quelle est la légitimité en matière cinématographique de l’équipe qui dirige aujourd’hui le Cosmos ?

En ce qui me concerne, entre fin 2020 et début 2022, j’ai été formé à la FEMIS (également nommée École nationale supérieure des métiers de l’image et du son – ndlr ) en direction d’exploitation cinématographique. Une formation très riche en termes d’apprentissage, mais aussi grâce à beaucoup de rencontres avec nombre de professionnels du secteur. J’ai pu ainsi avoir confirmation de l’aspect très particulier du Cosmos : c’est un cinéma municipal, avec un cahier des charges axé sur les politiques publiques en matière culturelle, c’est à dire beaucoup de missions à remplir. Le Cosmos est serti dans le milieu du cinéma local et concourt à la complémentarité entre les différents exploitants : un multiplex, un cinéma généraliste, deux cinémas reconnus au niveau national et même européen pour l’art et essai et notre salle municipale qui est aussi un joyau historique. Notre légitimité est entièrement basée sur notre projet cinématographique, le cœur de notre activité, qui comporte aussi la volonté que les Strasbourgeois puissent se réapproprier ce cinéma. Une des illustrations de cette formule de coopérative est la mise en place d’un conseil de programmation : ainsi, la programmation du cinéma se fait désormais de façon collective, après des échanges entre plusieurs personnes impliquées dans la durée sur cette question-là. Ce sont onze personnes qui vont à chaque réunion proposer une liste de films et la défendre. Ces personnes sont donc également dépositaires du cahier des charges de la Ville : programmer du cinéma art et essai, valoriser les cinémas européens et respecter la clause de non-concurrence vis-à-vis des

« LE CŒUR DE NOTRE ACTIVITÉ, (...) COMPORTE AUSSI LA VOLONTÉ QUE LES STRASBOURGEOIS PUISSENT SE RÉAPPROPRIER CE CINÉMA. »

autres exploitants, ne pas proposer au Cosmos des films en sortie nationale, notamment…

Le public aimerait beaucoup savoir ce qui va pouvoir être visible concrètement… Les grands classiques, d’autres films réunis sous des cycles thématiques ?

Bien sûr, on trouvera tout ça, avec aussi des films qui, pour des raisons variées, n’ont pas forcément trouvé l’exposition que leurs producteurs auraient souhaité à leur sortie. Et, évidemment, il y aura des reprises…

En octobre, nous allons entamer un cycle sur les géométries amoureuses au cinéma. L’exemple type est bien sûr César et Rosalie, le film de Claude Sautet. Ces relations compliquées, ambiguës, voire conflictuelles, ont beaucoup inspiré les cinéastes.

L’idée de ces cycles est de présenter chaque fois une vingtaine de films sur une durée de cinq semaines, choisis dans tous les cinémas possibles, pas seulement dans le cinéma français ou le cinéma américain : on souhaite travailler sur un spectre le plus large possible. S’il le faut, si on ressent une attente particulière, rien ne nous empêchera de programmer un deuxième cycle sur la même thématique. À terme, nous souhaitons que chacun de ces cycles soit comme un mini-festival…

Notre intention est de beaucoup travailler sur la communication : nous l’imaginons attrayante, attractive, et sur plusieurs déclinaisons : l’affichage, avec des entrées par jour ou par horaire

et pas seulement par film. On a déjà sorti la nouvelle maquette de notre brochure, réalisée avec une forte implication de tous les membres du conseil de programmation et dans laquelle on trouvera une présentation de chaque film avec des partis-pris très incarnés. Notre leitmotiv est de partager au maximum l’émotion… Notre numéro daté de juin-juillet dernier s’est arraché, on a dû même mettre en place des restrictions de distribution pour pouvoir tenir jusqu’aux derniers jours de la période de programmation…

On peut parler de l’accueil des événements extérieurs. Pour cette rentrée de septembre, on a récemment appris que le Festival Européen du Film Fantastique de Strasbourg (le FEFFS, programmé par Daniel Cohen et ses équipes) allait trouver sa place au Cosmos…

C’est exact. Nous programmerons leur sélection des films de court métrage – trois programmes sur six séances –, nous diffuserons aussi des films en réalité virtuelle, et nous accueillerons aussi des rencontres professionnelles organisées par le FEFFS. C’est important pour nous, ça va permettre au Cosmos de faire corps avec le reste de la vie culturelle de Strasbourg et son Eurométropole. Notre envie est de consolider l’existence du Cosmos, de faire en sorte qu’il rayonne au sein de la vie strasbourgeoise, et tout cela en travaillant sur la durée et avec beaucoup de modestie, sans forcément verser dans le clinquant… »

Contact : agora@cinema-cosmos.eu 03 88 52 09 35

a
76 a CULTURE №50 — Septembre 2023 — Vivre livre

Feux de forêt dans les Vosges

S ACTUALITÉ — ALERTE
SDIS
Marine Dumeny Marine Dumeny –

Quelles conséquences pour l’économie ?

Il est le poumon vert du Grand Est et bouffée d’air favorite des Strasbourgeois. Le palpitant cœur forestier du massif des Vosges s’est embrasé en 2022, sur une cinquantaine d’hectares, dans un feu de forêt sans précédent. Une criante alerte renouvelée en juin 2023.

Tu te souviens quand Grand pa’ nous racontait qu’ils allaient faire les coupes en ciré et bottes de pluie en été ? », Denis et Yves, scieurs, partagent leur déjeuner sous un des rares rayons de soleil de la semaine. Si l’été précédent n’était que canicule et sécheresse, celui-ci douche la région (bien que sans remplir les nappes phréatiques significativement). Pourtant, ils confient leur inquiétude : « Jamais nous n’aurions cru voir un jour les Vosges brûler. C’était un choc. »

Il faut dire qu’en matière d’économie, ces feux sont une des premières notes d’une mélodie nouvelle sur la complexe partition de la filière bois. Déjà fragilisée par le scolyte, insecte endémique du massif dont les galeries graphiques peuvent tuer un épicéa en 6 semaines, qu’en sera-t-il si les feux de forêt rejoignent eux aussi le refrain estival ? Or Norme vous emmène dans le massif vosgien, auprès des acteurs économiques, de prévention et d’intervention.

LES VOSGES BRÛLENT-ELLES ?

10 août 2022. Au commencement était l’alarme. Twitter (X, aujourd’hui) s’ouvre sur un message du SDIS 88 : la forêt de Brouvelieures est sujette à un départ de feu. Ce qui marque, c’est la taille du front de feu : plus de 300 mètres. Pour tout

79 S ACTUALITÉ
« En matière d’économie, ces feux sont une des premières notes d’une mélodie nouvelle sur la complexe partition de la filière bois. »
«

En avril dernier, le SDIS a testé l’écopage de Canadair dans le massif vosgien

journaliste ayant couvert des feux dans le Sud, le déclic est aisé. C’est à surveiller. Les moyens engagés ne cessent de gonfler. La gendarmerie des Vosges se mobilise pour l’évacuation des riverains. Joins, les Sapeurs Pompiers des Vosges, confirment ce qui est craint : une demande de renfort aux départements limitrophes est lancée. C’est une première en vingt ans. Plus de 600 pompiers luttent pendant 56 heures contre les flammes. L’incendie de Brouvelieures et Mortagne sera noyé par largages. Il aura consumé 30 ha de forêt, courant dans le sol tourbé et jouant à chat avec les équipes qui se relayaient.

Le 12 août, c’est Biffontaine qui s’embrase. Pour endiguer l’incendie, 800 litres d’eau en 11 largages d’hélicoptères seront nécessaires. Après 4 heures de mobilisation de 84 sapeurs-pompiers et 60 engins, 10 hectares partent en fumée.

Alors que l’émotion est encore présente dans le massif, la série noire continue. Le Ménil, le week-end du 15 août. Nouveau départ de feu. Il nécessite l’intervention de 616 pompiers de six départements voisins. Ce sont 236 largages qui sont effectués par les hélicoptères

bombardiers d’eau. Sur cette trentaine d’heures d’intervention, 70 hectares n’ont pas survécu aux flammes. Il s’agit du plus conséquent de l’histoire humaine du massif.

Sur le seul mois d’août 2022, ce ne sont pas moins de 79 départs de feux de végétation qui surviennent. En moyenne, 6 à 12 départs par jour surviennent durant cet été.

Alors, en 2023, lorsqu’un feu d’habitation s’étend à la forêt, près de Bois-de-Champ, les sapeurs-pompiers du SDIS 88 sont prêts. Les flammes atteignent, ce 13 juin, jusqu’à 15-20 mètres de haut. Au plus fort de ce feu forestier, plus de 200 soldats du feu, et un hélicoptère bombardier d’eau (avec 3,5 tonnes d’eau pour 51 largages) sont sur les lieux. Les départements voisins apportent leur concours (67, 68, 54, 57, 55, 52, 70, 89, 71). 30 hectares sont perdus. Il ne s’agit pas du seul feu survenu cet été. Deux autres, de quelques hectares, sont à dénombrer en juin : à Darney et à Bruyères. Un plus conséquent, à SaintBaslemont, le 7 juin, a parcouru 6 hectares. Afin de préserver ce massif forestier,

№50 — Septembre 2023 — Vivre livre 80 S ACTUALITÉ

« Sur le seul mois d’août 2022, ce ne sont pas moins de 79 départs de feux de végétation qui surviennent. En moyenne, 6 à 12 départs par jour surviennent durant cet été. »

le plus densément peuplé du territoire métropolitain, des mesures supplémentaires sont prises.

QUELLES CONSÉQUENCES SUR L’ÉCONOMIE ?

Les principales activités économiques du massif sont celles de la filière bois, et l’agriculture – au sens large. Les Vosges comptent plus de 280 000 hectares de forêt, dont 190 000 hectares publics. Cette dernière est en partie gérée par l’ONF (Office National des Forêts) sur sa part communale et domaniale. Ici, l’économie des communes, mais aussi celle de toute une filière repose sur une gestion durable du massif forestier.

L’agence territoriale ONF Vosges Montagnes et son directeur Patrick Kubler expliquent : « Sur notre secteur, ce sont 95 150 ha de forêts publiques qui sont gérées durablement afin d’alimenter la filière bois. Concernant le volume de bois récolté, pour l’essentiel les unités de première transformation dans le massif vosgien et à sa périphérie, s’élève en moyenne,

ces dix dernières années, à 466 000 m3 et génère une recette moyenne annuelle, nette des frais d’exploitation, de 15 millions d’euros. »

Et d’ajouter que « les propriétaires en ont réinvesti une partie dans des travaux d’entretien et de renouvellement de leurs forêts ».

Une conscience de l’importance d’une bonne gestion que l’on retrouve de bout à l’autre de la filière… ou presque. Quelques scieurs rétorquent encore aux hectares brûlés qu’il « n’y a et n’aura pas d’impact ». Réponse on ne peut plus correcte si l’on considère que les arbres brûlés, encore blancs à l’intérieur, peuvent encore être commercialisés. Preuve en est d’ailleurs faite avec les ventes sur pied à l’unité au Ménil, ou sur Mortagne, écoulés en contrat d’approvisionnement (bord de route).

ALORS FINALEMENT QUEL SERAIT LE PROBLÈME ?

Il réside dans l’avenir. Dans l’âge de l’arbre : un arbre jeune ne peut être valorisé à la hauteur prévue… voire être inexploitable

selon les essences, et il s’agit d’un problème particulièrement relevé par l’UCFF (Union des Coopérations Forestières Françaises) au niveau national. Et dans la baisse déjà visible des recettes de la filière bois à cause du scolyte, qui en période de sécheresse, fait des ravages parmi les épicéas et les sapins pectinés. « Depuis 2018, avec les sécheresses et canicules, nous vivons une véritable crise sanitaire », explique Patrick Kubler de l’ONF, « elles créent un stress hydrique qui affaiblit l’arbre et le laisse sujet aux attaques d’insectes. Pour l’épicéa, il pond sous l’écorce dans une galerie et les petits consomment les tissus conducteurs de sève. Il faut six semaines à un épicéa de 30 mètres pour mourir. S’ils ne sont pas rapidement commercialisés, ils deviennent inexploitables. Depuis peu, nous avons constaté le même phénomène avec les sapins pectinés. Ce qui dénote un changement d’ère certain. »

Endémique de la région, cet insecte est d’après Fi-Bois (filière bois) « responsable d’en moyenne 3 % de perte de recette sur l’ensemble du circuit ». Attentive à la lutte contre les feux de forêt, l’organisme rappelle qu’avec une logique simple : « une

81 S ACTUALITÉ №50 — Septembre 2023 — Vivre livre

forêt protégée est une forêt dont on peut préserver l’activité économique ».

Même son de cloche à l’ONF et du côté des organismes préfectoraux : « Les plans d’aménagements de l’ONF sont actuellement établis sur quinze à vingt ans. Au vu de la répétition des épisodes de sécheresses, il faudra pour une gestion durable intégrer les aléas de dépérissements créés par le scolyte et ceux des feux de forêt ».

Le Commissaire au Massif des Vosges, Olivier Braud, annonce une approche de la vulnérabilité du massif des Vosges aux feux de forêt à venir en début d’année prochaine (2024) en partenariat avec l’ONF.

UNE ÉCONOMIE, ÇA S’ENTRETIENT

« Si l’ignorance de l’incertitude conduit à l’erreur, la certitude de l’incertitude conduit à la stratégie » (Edgar Morin). L’anthropocène, au sens géologique du terme, se dirige vers un scénario à +3 °C. Avec une augmentation significative des périodes de sécheresse, il faut d’ores et déjà se préparer à de nouveaux scénarios de feux de forêt similaires à 2022. Les pouvoirs publics l’ont bien compris, d’autant que voir les Arrentes brûler a de quoi choquer.

Du côté de l’ONF, de nouveaux peuplements seront reconstitués dans la zone Vosges Montagnes au travers d’installation naturelle de semis » issus des graines produites par les essences en place sur 4/5 de leur surface. Parmi ces semis, le gestionnaire forestier favorisera ceux des essences les plus adaptées au changement climatique. Et la plantation d’essences adaptées au changement climatique sur 1/5 de leur surface. », détaille Patrick Kubler, directeur d’agence.

Pour la Préfecture, Blaise Gourtay, secrétaire général pour les affaires régionales et européennes (SGARE) Grand Est, Marie Aubert, préfète déléguée pour la défense et la sécurité auprès de la préfète de la région Grand Est, également préfète de la zone de défense et de sécurité Est et préfète du Bas-Rhin et Anne Gillot, directrice des sécurités, adjointe du directeur de cabinet (Préfecture du Bas-Rhin) appuient les efforts fournis ces deux dernières années. En 2022, la décision de l’État de renouveler et faciliter les contrats de location des hélicoptères bombardiers d’eau avait permis une meilleure réactivité. À savoir que la Cour des Comptes évaluait le financement complet du renouvellement des flottes aéroportées de la sécurité civile à plus de 1,3 milliard d’euros sur une

leur

période comprise entre dix et quinze ans dans son dernier rapport. Ce qui explique ces contrats de location.

Autre mesure qui s’est par ailleurs avérée déjà efficace : la création du dispositif Sentinelles en janvier 2023. Coordonné par l’unité d’Intervention Tout Terrain, des bénévoles (alertent, renseignent et guides les sapeurs-pompiers sur les feux de forêt. La formule a du succès et compte à la rédaction de cet article plus de 200 participants. Ces citoyens — bénévoles ont déjà permis la localisation de feux naissants sur la Région.

De même un nouveau DDRM (Dossier Départemental des Risques Majeurs) est à venir. Si celui de 2021, pour les Vosges, comprenait déjà le risque « feux de forêt », il sera ajusté et précisé. Aux communicants et médias de s’en emparer et le vulgariser pour le rendre digeste.

« Nous nous appliquerons également à continuer le travail de sensibilisation auprès des usagers du massif », ajoute Anne Gillot.

Et les usagers, d’ailleurs ? 90 % des feux de forêt naissent de l’activité humaine.

Doit-on leur limiter l’accès au massif dès que la règle des 30 est approchée (30 km/h de vent, 30 °C, moins de 30 % d’humidité) ? « Absolument pas. », se rejoignent les interrogés. Chez Alsace Nature, Francis Dopff, bénévole – copilote du réseau forêt Alsace Nature basé à Orbey – regrette que « les agents forestiers ne soient pas réaffectés à leur fonction d’origine, c’est-à-dire de police de l’environnement » et relève que, s’il faut croire en la capacité d’adaptation des forêts et ne pas courir à l’artificialisation, il ne faut pas oublier pour autant le changement de paradigme auquel nous faisons aujourd’hui face. Les patrouilles de l’ONF, celle de Gendarmerie (qui vient de créer en juin 2023 un commandement environnement et santé), et les affichettes du Club Vosgien le martèlent : pas de feux, pas de mégots négligemment jetés au sol. Pour rappel, lors du feu du Ménil en 2022, une partie du massif avait été fermé aux promeneurs et autres usagers.

Strasbourgeois, pour continuer à randonner, te balader, profiter de ce luxuriant poumon vert, il faut en prendre soin. Et ne pas oublier qu’il est nécessaire à l’économie de la Région. S

82 S ACTUALITÉ №50 — Septembre 2023 — Vivre livre
« 90 % des feux de forêt naissent de l’activité humaine. Doit-on
limiter l’accès au massif ? »
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Pourquoi apprend-on de plus en plus le chinois ?

On ne peut que constater le fort engouement des collégiens et lycéens pour la langue chinoise. Et pourtant, elle n’est pas réputée pour être la plus simple. Rencontre avec San Michaut-Yi, native de Taïwan, professeure de chinois au collège Lucie Berger et au Gymnase Sturm, hauts lieux fusionnés de l’apprentissage de cette langue à Strasbourg…

San Michaut-Yi dément de suite ce préjugé de la difficulté de la langue chinoise. Sur des post-it, elle explique qu’il n’y a pas de conjugaison, le verbe est toujours à l’infinitif, et pas de genre féminin ou masculin. Bien sûr, fille, ou garçon. Mais ensuite, pas de il ou elle. On dit table ou chaise, et on les symbolise par le pictogramme (petit dessin simple) ensuite agrémenté selon les prononciations par différents caractères. L’être humain est représenté comme un Y à l’envers, donc un tronc et deux jambes ! Plus facile à retenir que le « Mensch », allemand ! L’allemand est a contrario une des raisons d’apprendre le chinois : « tout, sauf l’allemand ! »

Pauvre Goethe !!!

Martin, qui entre en terminale, confirme ce choix, et cette professeure passionnée l’a convaincu. Pour lui le chinois représente une culture foncièrement différente, il est fier de reconnaître

les caractères dans les dessins animés (le japonais étant composé essentiellement de caractères chinois) et dans les quartiers chinois d’autres villes.

FAIRE RÂLER

LES BOOMERS

San Michaut-Yi a des élèves de la 6e à la terminale et en retrouve certains tous les ans. Nous savions quand même que le chinois s’écrivait de haut en bas et de droite à gauche, et que l’on commence le livre par sa fin. Elle a constaté que la lecture des mangas (petites BD japonaises qu’on lit également de la fin au début) a beaucoup attiré les élèves vers les langues asiatiques. Ils adorent aussi les nems et sont donc curieux de cette nourriture. Ils trouvent tous ça très « cool », ce qui est un argument de poids ! Entre aussi en ligne de compte une petite part de rébellion adolescente : « c’est une langue

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S ACTUALITÉ — TENDANCE
Isabelle Baladine Howald Alban Hefti

que mes parents ne comprennent pas ! »

On est passé de l’affichage de posters hurlants sur les murs de nos chambres à l’apprentissage du chinois pour faire râler les « boomers » !

Ceci dit, tous les élèves plus âgés ont souligné qu’apprendre la langue était un atout pour leur avenir étant donné la puissance économique de la Chine. Connaître alors cette langue est un point très positif sur leur futur CV, cela compte pour le moment plus que la spiritualité ou la culture chinoise. Certains sont conscients du régime politique fermé, concernant les restrictions durant le Covid par exemple. Martin lui est aussi très attiré par la beauté des paysages chinois.

Eliott, également en terminale, parle des montagnes spectaculairement belles et des parcs nationaux, ainsi que de son attrait pour l’architecture de Pékin et de la muraille de Chine.

Il dit sa fascination pour la diversité des caractères de la langue et avoir aimé faire l’effort pour l’apprendre. Il est sensible au maintien des traditions familiales et ancestrales qui demeurent au cœur de cette société. Il a constaté que cette économie et cette culture sont devenues centrales en Europe, lors du Nouvel An chinois par exemple.

Le nombre d’élèves a nettement augmenté dans les classes. Le but de la dizaine de professeurs de chinois à Strasbourg est de rendre la langue accessible et vivante. Cette langue imagée correspond bien à notre civilisation portée aux émojis, icônes et mangas.

Les personnages de ceux-ci ouvrent d’aussi grands yeux que nous devant les rideaux de pluie de cette langue !

Comme dit Evan, 8 ans : « quelle merveille d’être différent ! » S

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« Le but de la dizaine de professeurs de chinois à Strasbourg est de rendre la langue accessible et vivante. »
San Michaut-Yi

C’est juste un peu moins gai depuis que Jane Birkin s’en est allée…

Quel drôle d’été nous avons vécu !

On a commencé en fanfare, si on peut dire, avec des vitrines brisées dans un Strasbourg traditionnellement plutôt en marge des mouvements de rébellion. On a pu rester perplexe devant le pillage de magasins a priori adulés par les jeunes adultes, aucun pourtant n’étant en reste d’iPhone dernier cri. Il faut bien avouer que quelque chose nous aura échappé dans cette affaire, mais on a bien compris qu’une dark révolte est en braises qui, périodiquement, nous rappelle que ne dirige pas la société qui le croit.

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S ACTUALITÉ — UN ÉTÉ 2023…
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Cela rappelle une scène de ce film terrifiant, mais exceptionnel de Ladj Ly, Les Misérables

Dans une explosion de violence folle en banlieue, un jeune policier, qui autrefois l’a aidé, se retrouve acculé face à une sorte de petit prince noir qui dirige tout le quartier, un ange du mal défiguré, splendide, perché en haut d’un escalier dans une ambiance d’apocalypse. Il regarde quelques secondes le policier, et… le laisse partir. Puis, ce sont des enfants maintenant qui enflamment tout et poussent d’étranges cris en signe de ralliement, comme s’il n’y avait plus de langage possible. Y a-t-il encore un petit prince pour l’humanité ? Pas sûr…

Il y eut alors, plusieurs jours durant, cet étrange soleil de scotch sur une vitrine brisée d’une grande librairie de la ville. Des panneaux de bois ici ou là pour masquer ce qui pouvait l’être.

Puis tout le monde s’est remis à déambuler, les pieds sur cette terre qui se fissure de tous les côtés.

CANICULE, AUTOMNE, PUIS L’ÉTÉ, PUIS ENCORE L’AUTOMNE…

Une mamma baignait ses pieds dans les petits bassins de la place Kleber avec qui nous avons échangé un sourire complice. La canicule s’annonçait.

Lorsque nous étions enfants, les étés étaient très secs, les pluies nombreuses à l’automne et au printemps, la neige haute en hiver. Depuis une dizaine d’années il y a du vent, les branches du saule au jardin volent comme des cheveux, il ne pleut plus guère, la chaleur est forte et la neige a quasiment disparu. Une enfance sans neige, est-ce une enfance ?

L’adaptation est devenue le maître mot de notre époque.

La fête nationale se déroule sans encombre, on encaisse les orages en priant pour que la voiture ne prenne pas les grêlons sur le toit, le petit chat passe tous les soirs pour son bol, on lui a donné un nom latin pour changer de l’anglais (nous sommes ignares en chinois).

Les semaines s’égrènent, l’enfer des travaux partout, comme tous les étés. Résignés, nous sommes dans un bus aussi bondé que tape-cul, on sent nos vertèbres se rempiler brutalement, on s’amuse avec les bébés qui tripotent leurs pieds nus en l’air dans les poussettes, on propose à une femme de partager avec nous d’étranges sièges trop grands pour une personne, mais trop petits pour deux (nous avons des

petites fesses alors ça va). On prend un café à une terrasse aux tables très sales et on passe une heure à refaire le monde et surtout nos vies confrontées aux amis vieillissants pour lesquels il est bien difficile de savoir quoi faire…

Kundera vient de mourir, une certaine Europe n’en finit pas de disparaître.

Ailleurs, soldes partout, tous les centresvilles se ressemblent, un kebab côtoie les hamburgers-frites, et une enseigne mondialiste de baskets s’installe à la place de la brasserie, comme si tout le monde entier courait le marathon. Aller du Monoprix aux bouquinistes s’avère toujours une traversée d’une mini-vallée de la mort, il ne manque que les crotales, pour la chaleur, on y est presque, on s’arme de courage, on s’équipe, eau, lunettes et si on n’a même pas peur, chapeau de soleil, et on y va.

Et puis, sur un banc, une toute jeune fille pleure. Seize ans peut-être. Le visage inondé de larmes, belle comme un cœur. Elle nous dit : « j’ai juste un chagrin

d’amour ». Que lui dire d’autre que : « ça va passer, ne vous inquiétez pas, ça va passer ». Jolie comme elle est, elle aura d’autres amours. Elle sourit à travers ses larmes, elle est à l’aube de sa vie, mais si notre expérience ne lui sert à rien, quelques paroles peut-être peuvent la réconforter.

On croise des copains de retour ou sur le point de partir. Un peu en dehors de la ville, les moissons sont faites, les pois de senteur s’élancent, les figues explosent, les petits crient dans l’eau, on lit au frais, le Tour de France transpire dans les Alpes. C’est juste un peu moins gai depuis que Jane Birkin s’en est allée.

Fin juillet et tout le début août, c’est l’automne qui se sera brutalement invité.

Mais septembre, le vrai, est enfin là, la ville va pouvoir fêter la littérature. C’est parti pour l’automne bis ? Tout change, rien ne change et notre jeune fille au cœur brisé se trouvera un amoureux qui lui remettra des étoiles dans les yeux… S

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« Puis tout le monde s’est remis à déambuler, les pieds sur cette terre qui se fissure de tous les côtés. »
JE T’ENVOIE CES QUELQUES MOTS MA CHÈRE AMIE , TANDIS QUE NOS PALAIS SI DISTANTS GOÛTENT CHACUN DE LEUR CÔTÉ TANT DE SAVEURS DÉLICATES. À TRÈS VITE ! 5 AV. DE LA MARSEILLAISE NEUSTADT RÉSERVATIONS AU 03 67 68 70 70 CHERE-AMIE.FR BRASSERIE DE L’HÔTEL DES POSTES STRASBOURG Design : Pascal Claude Drach Crédit photo : Preview

NOS LECTEURS ONT DU TALENT

Dans notre 50e numéro, nous publions notre 50e portfolio… C’est dire si dès le départ, il y aura bientôt treize ans, nous avons affirmé ce postulat que la photographie avait toute sa place dans Or Norme.

Il y a treize ans, les mêmes débats qu’aujourd’hui traversaient déjà le monde des photographes et leur art. Bousculés par l’arrivée du numérique il y a un quart de siècle, ils s’étaient rapidement sentis marginalisés : à quoi bon appliquer scrupuleusement ce qu’ils avaient acquis avec la patience qui les caractérisait ?

Quand il y a Photoshop (et maintenant plein d’autres apps subterfuges), à quoi bon étudier un super-cadrage quand on peut triturer à tout va l’image, à quoi bon attendre longuement la bonne lumière quand on peut filtrer la ressource numérique comme un malade, à quoi bon travailler la profondeur de champ quand on peut si facilement

sélectionner une zone et la flouter ou renforcer sa netteté à volonté ?

Et à quoi bon tenter de gagner sa vie avec son métier quand plein d’autres proposent des images pour des queues de cerises ?

De toutes parts, depuis quelques années, on rapporte que beaucoup de jeunes photographes retrouvent les joies de « travailler à l’ancienne », bien conscients que n’importe quel tâcheron peut aujourd’hui s’intituler photographe et produire son petit effet sur les réseaux sociaux.

Alors, il y aura toujours de la place dans Or Norme pour publier les œuvres des vrais photographes. C’est promis…

En tout cas, merci à vous tous, si nombreux, qui avez répondu à notre appel et nous avez fait parvenir vos visions de Strasbourg.

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Jean-Luc Fournier
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Anatole B, La dame à Vélo
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En haut : Bernard Larcat, Ponts couverts À droite: Sigrid de Nigris, La Star Bourgeoise

En haut : Yves Burtschell, The musician

À gauche : Cyril Bécard, Vox

Page suivante : Jordan Haller, Ça baigne (Orangerie, mai 2015)

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En haut : Caroline Paulus, Sans titre À droite : Nello Mastrofabi, Parc de l'orangerie

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Marc Swierkowski, Réveil enneigé
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LE JOUR OÙ… LOUIS-NAPOLÉON A TENTÉ UN COUP D’ÉTAT DEPUIS STRASBOURG

En 1836, Louis-Napoléon Bonaparte n’est pas encore Napoléon III. Il est Napoléon, c’est déjà beaucoup, mais pas assez pour lui. Exilé en Angleterre, il rentre clandestinement dans Strasbourg le 30 octobre et tente de soulever la troupe qui y stationne pour marcher sur Paris et renverser le roi Louis-Philippe. Fiasco.

Voilà ce que c’est de vivre à l’ombre des grands hommes. Ça vous échauffe les sens et ça fait naître des rêves immenses que tout le monde n’est pas capable d’assumer. Prenez Louis-Napoléon, neveu de qui l’on sait. Avec la lignée qui est la sienne, la grandeur qui s’attache à son nom et son tempérament de feu, comment pourrait-il ne pas croire qu’il est appelé à un destin immense ? Et un destin, ça se forge, même quand on est un Bonaparte et que votre oncle qui avait l’Europe à ses pieds vous faisait sauter, enfant, sur ses genoux.

Alors, c’est sûr, les choses n’ont pas tourné comme elles auraient dû. Il y a évidemment eu le désastre de Waterloo, le 18 juin 1815, quand les Britanniques alliés aux Allemands, aux Néerlandais et à l’instant décisif aux Prussiens ont précipité la chute de l’Empire. Et puis tout s’est enchaîné. La deuxième abdication de l’Empereur le 22 juin, l’exil sur un caillou perdu au milieu de l’Atlantique dont le nom est Sainte-Hélène, la disgrâce de toute la lignée et pour finir le retour de la monarchie.

Louis-Napoléon n’a pas huit ans quand son oncle, auquel il continue de vouer une admiration sans bornes, est irrémédiablement vaincu. Le voilà contraint de se cacher à Paris avec ses parents, Joseph, le frère aîné de l’empereur, Hortense, sa mère, fille de Joséphine de Beauharnais. Un bagage toujours bouclé, prêt à décanil-

ler à la moindre alerte. Jusqu’au moment où ce n’est plus tenable. Le 12 janvier 1816, tous les Bonaparte sont bannis et contraints de céder leurs biens. Il faut quitter la France pour s’installer en Suisse et pour partie en Autriche.

Au château d’Arenenberg, sur la rive droite du lac de Constance, le clan s’est scindé. Les parents se sont séparés, Hortense est là avec Louis-Napoléon, son frère aîné à Rome avec son père. Celui que Victor Hugo appellera un jour « Napoléon le petit », mais que l’on surnomme alors « oui-oui », parce qu’il ne dit jamais non, profite de cet exil forcé pour se construire un bagage intellectuel et se forger une conscience politique sous la férule de l’helléniste Philippe Le Bas.

STRASBOURG ET LE 30 OCTOBRE 1836

SONT ENCORE LOIN, MAIS ON S’EN RAPPROCHE

Pour l’instant, Louis a appris l’allemand et découvert l’histoire de la Révolution française, il veut changer le monde, rêve de gloire et de champs de bataille. En novembre 1830, il a 22 ans. Dans sa famille on pense déjà à commémorer les dix ans de la mort de Napoléon Ier (le 5 mai 1821), Louis-Philippe vient d’être sacré « roi des Français » et en Italie les patriotes ont pris les armes pour se libérer de la domination de l’Autriche et de la tutelle du Saint-Siège. L’Italie, ça lui parle. Son cousin Napoléon François Joseph, le fils de l’empereur déchu et défunt, avait été proclamé « roi de Rome » à sa naissance quand la capitale italienne n’était plus que le chef-lieu de l’un des 130 départements de l’empire français, au même titre qu’Amsterdam ou Barcelone.

Alain Leroy BNU a CULTURE – HISTOIRE
102 a CULTURE №50 — Septembre 2023 — Vivre livre

Alors sus aux Autrichiens aux côtés de libéraux italiens qui veulent unifier leur pays et se libérer de l’emprise papale aussi. Son frère Napoléon-Louis est de la partie. Le jeune homme veut se faire un numéro puisqu’il a déjà le nom. Le soir en s’endormant, il s’imagine triomphant, vengeant à distance son oncle et redonnant tout son éclat à sa dynastie.

Sur place, il se distingue et plonge au cœur des combats aux côtés des Carbonari, cette société secrète « protomaçonnique » à laquelle il a adhéré. Il n’a peur ni du feu ni du sang. En première ligne lors du soulèvement de Parme et de Modène, il participe activement à la prise de Civita-Castellana dans le Latium et, dans les cours européennes, ses faits d’armes font jaser. Un Napoléon, et même deux, sur les champs de bataille, voilà de quoi donner des sueurs froides aux monarques.

Évidemment, tout ça tourne mal. Rapidement, l’Autriche siffle la fin de la partie et envoie 20 000 hommes rétablir l’ordre. Les frangins Napoléon sont acculés du côté de Forli. Leur mère vole à leur secours, tout ça est très beau, sauf qu’entre-temps une épidémie de rougeole a emporté Napoléon-Louis et que son frère, Louis-Napoléon, est très malade. Déguisé en laquais avec un faux passeport britannique, ce qui est un comble pour un Bonaparte, il revient à Paris pour se faire soigner le 14 avril 1831 avant de retourner en Suisse. Mais la graine qui germait en lui a éclos. Il sait qui il est, un Bonaparte, et ce qu’il veut, le pouvoir.

REFAIRE LE COUP DE L’ÎLE D’ELBE

Finies les révolutions de salon fomentées en bâillant et en avalant des petits fours, lui veut agir. Vraiment. Reprendre ce qu’il

« RAPIDEMENT, L’AUTRICHE SIFFLE LA FIN DE LA PARTIE ET ENVOIE 20 000 HOMMES RÉTABLIR L’ORDRE. »

103 a CULTURE №50 — Septembre 2023 — Vivre livre
Louis-Napoléon Bonaparte à Strasbourg

pense être un dû, la France donc. Les Français l’aideront, ils n’ont besoin que d’un déclic pense-t-il. Et le déclic c’est lui, qui d’autre ! Alors, pendant près de cinq années, il va écrire des lettres, des traités militaires, échafauder son plan et se constituer un réseau partout en Europe.

L’idée, c’est de refaire le coup de l’île d’Elbe ! Le 1er mars 1815, son oncle, jusqu’alors exilé sur cette petite île au large de l’Italie, avait débarqué sans prévenir avec un embryon de troupe à Vallauris et avait remonté le pays, ralliant à lui casernes et régiment. Pour finir par arriver triomphalement à Paris et reprendre le pouvoir le 20 avril. Voilà, c’est ça l’idée, il va entrer en France et rallier à son panache une première garnison, les autres suivront.

Aussitôt dit (presque) aussitôt fait. Le 30 octobre 1836, Louis-Napoléon Bonaparte muni de faux papiers entre dans Strasbourg accompagné d’une quinzaine de conjurés. Pourquoi Strasbourg ? Parce que la place militaire est d’importance d’abord avec près de 10 000 hommes stationnés, mais aussi parce que la ville et l’Alsace ont toujours été des soutiens indéfectibles à son oncle. Il y a ici plus de généraux napoléoniens qu’ailleurs, les noms de 24 d’entre eux sont inscrits sur l’Arc de Triomphe. Les exploits de Kléber, de Kellermann, de Rapp sont dans toutes les mémoires. L’Alsace aime tellement Napoléon qu’elle lui a donné un surnom « D’r Napi » et que son portrait est encore accroché dans bon nombre de chaumières.

La brume matinale n’est pas encore dissipée que la petite troupe qui brandit un étendard surmonté de l’aigle impérial pénètre dans le quartier du 4e régiment d’infanterie dirigé par le colonel ClaudeNicolas Vaudrey. Il est de mèche et leur ouvre grand les portes. Louis-Napoléon distribue des billets, promet décorations et galons : « Soldats ! Marchons ensemble contre les traîtres et les oppresseurs de la patrie… ». C’est parti ! Voilà la troupe qui s’arme, se met en ordre de marche et en branle. Elle défile à moins qu’elle ne parade dans les rues de Strasbourg qui en ont vu d’autres. Cap sur la préfecture d’abord : le préfet est arrêté par les insurgés. Le général de la place est également mis aux arrêts, le plan fonctionne parfaitement. Sauf que les fantassins du 46e de ligne n’ont, eux, aucunement l’intention de se rallier à l’aventure. Et là, tout déraille. On imagine les palabres, le ton qui monte, les menaces, le bruit des culasses que l’on arme. Mais le rapport de force étant ce qu’il est, les artilleurs

baissent les armes, Louis-Napoléon, les bras. La tentative de putsch aura duré moins de deux heures. Le préfet et le général Voirol sont libérés et le petit aigle se retrouve en prison.

Une nouvelle fois, sa mère vole à son secours. Elle intervient auprès du roi Louis-Philippe, implore sa clémence, il est jeune, c’est une tête brûlée, mais pas un mauvais garçon au fond vous savez bien, et s’il partait en exil plutôt que de rester en prison et d’être comme une épine dans votre pied ? Mais oui, c’est ça l’idée, exilez-le Votre Altesse, aux États-Unis, c’est bien ça les États-Unis, il ne viendra plus faire le zouave à l’improviste, on le verra arriver de loin.

Louis-Philippe ne se fait pas prier trop longtemps. Il en a soupé des Bonaparte alors si en plus, il faut se farcir un procès, déchirer encore davantage le pays et offrir une raison à ses opposants de ruminer… Va pour le Nouveau Monde. Un mois plus tard, Louis-Napoléon le petit embarque à Lorient à bord d’une frégate militaire qui l’emmène vers New York après une escale de plusieurs mois à Rio de Janeiro. Ses rêves de grandeur et de pouvoir sont remis à plus tard. Ils viendront. a

« MAIS LE RAPPORT DE FORCE ÉTANT CE QU’IL EST, LES ARTILLEURS BAISSENT LES ARMES, LOUIS-NAPOLÉON, LES BRAS. »
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WOUTER VAN DER VEEN UN STRASBOURGEOIS AU CŒUR DES PROCHAINES EXPOS VAN GOGH À ORSAY ET À AUVERS

Rencontré en juin, l’historien d’art strasbourgeois se préparait à un été studieux, prélude à deux expositions

Van Gogh qui débuteront à l’automne.

Entièrement consacrée aux œuvres produites par Vincent Van Gogh durant les deux derniers mois de sa vie à Auvers-sur-Oise, la première exposition sera accrochée aux cimaises du musée d’Orsay entre le 3 octobre 2023 et le 4 février 2024.

La seconde, intitulée « Van Gogh les derniers voyages », sera accueillie au château d’Auvers-sur-Oise du 6 octobre au 27 septembre 2024.

Auteur d’un texte pour le catalogue de la manifestation parisienne, Wouter

van de Veen assure le commissariat de celle qui se tiendra dans la ville où mourut Van Gogh.

UNE DÉCOUVERTE INATTENDUE

Chercheur aussi atypique qu’infatigable, il est à l’origine de « trois ou quatre trouvailles » qui se sont répercutées à Orsay raconte-t-il en évoquant ce cadre retrouvé par hasard en farfouillant dans la cave de l’auberge Ravoux où logeait Van Gogh à Auvers.

« Ce cadre était emballé dans du papier journal des années trente et portait une étiquette “Vincent Van Gogh Salon des indépendants 1905” qui m’a renvoyé à un échange de courrier entre Johanna, la femme de Théo, frère de Van Gogh et le fils du docteur Gachet qui accompagna le peintre à la fin de sa vie. Ils s’entretenaient de la manière dont Vincent voulait voir ses œuvres encadrées. Bois, dimensions, peinture verte… tout concordait et le musée d’Orsay a décidé de réencadrer quatre tableaux selon ce “design” conçu par l’artiste. »

Cette découverte qui succède à celle de l’endroit exact où Van Gogh peignit sa dernière œuvre « Racines » à Auvers illustre bien la démarche atypique de Wouter van der Veen.

« Je regarde en toute liberté, dit-il, mais j’ai un fond académique qui me permet de

Wouter van der Veen
– DR a CULTURE — EXPOSITIONS VAN GOGH
Véronique Leblanc Saint-Louis Art Museum
106 a CULTURE №50 — Septembre 2023 — Vivre livre

mesurer l’importance de la vérification et de l’échange avec d’autres chercheurs. »

Une manière de faire que retrouve à Strasbourg ce Néerlandais d’origine. « C’est une ville inclassable qui affiche indépendance et humour, mais de manière très cadrée, une terre bon enfant qui tente, mais ne fait pas n’importe quoi. »

LES LIEUX DE VAN GOGH VUS PAR

D’AUTRES PEINTRES

L’expo d’Auvers conçue par Wouter van der Veen qui y est le conseiller scientifique de l’Institut Van Gogh sera essentiellement consacrée aux artistes qui ont peint aux mêmes endroits que Vincent.

Une quarantaine d’œuvres seront présentées dont celles de Léonide Bourge, « peintre hors genre, hors époque, très libre dans sa pratique ».

La dernière partie du parcours sera immersif et racontera Van Gogh au travers du témoignage de Johanna qui fut chargée de son héritage artistique après la mort de Théo. Cela veut-il dire que le commissaire est fan des expos immer-

sives ? Loin de là… Il y voit « un massacre de l’image : cela n’aurait aucun sens de faire tourner les tournesols et cela n’amènerait personne à visiter un musée, dit-il. Les œuvres sont immobiles, c’est à l’œil de bouger et à l’être de s’ouvrir à l’émotion. L’immersif ne laisse pas de place à cette belle fragilité ».

Pas question pour autant de rejeter l’IA qui « va tout redéfinir pour les gens qui écrivent des biographies et nous permettre de voir le monde différemment. L’IA me fascine, c’est un train en marche et moi j’aime bien être dans la locomotive ».

Son rêve : une vaste espace immersif conçu comme un teaser menant à une pièce vide où l’on se retrouve, seul ou presque, face à une œuvre d’art…  a

« CHERCHEUR AUSSI ATYPIQUE QU’INFATIGABLE, IL EST À L’ORIGINE DE “TROIS OU QUATRE TROUVAILLES” QUI SE SONT RÉPERCUTÉES À ORSAY. »
Vincent Van Gogh, Escalier à Auvers, huile sur toile, 1890
108 a CULTURE №50 — Septembre 2023 — Vivre livre

NOUVEAU RENAULT AUSTRAL

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CHRISTOPHE SANS INTERDIT

Déjà cheville ouvrière d’une expo sur Gainsbourg qui avait frappé par son originalité et sa sensibilité, la Strasbourgeoise Michelle Ruffenach récidive, à partir du 30 septembre avec Christophe dans un lieu très original, la concession Lexus du Groupe Hess à Souffelweyersheim.

L’exposition va s’intituler « Christophe sans interdit ». Pourquoi ce titre qui intrigue ?

Un de mes titres préférés s’appelle Comme un interdit et je n’aime pas les interdits, voilà tout ! J’ai toujours aimé Christophe et j’ai eu envie de lui rendre hommage ainsi. Pour être franche, j’avais commencé à travailler sur une expo David Bowie & Patti Smith, mais c’était compliqué sur beaucoup de plans. Mais après le bilan très positif de notre précédente expo sur Gainsbourg, toute l’équipe avait hâte de récidiver. Avec mon complice Christophe Rougerie qui est en quelque sorte un artiste complet puisqu’il est musicien, peintre, entre autres…, nous avons créé l’association Art MC4 qui est l’organisatrice officielle de l’expo…

Et d’où est venue cette idée de l’organiser dans un grand garage ?

Christophe, c’est bien connu, avait une immense passion pour l’automobile, alors pourquoi ne pas surfer sur cette idée ? Ça a marché. Notre projet a été très bien accueilli et l’exposition se tiendra dans les locaux de la concession Lexus du groupe Hess, à Souffelweyersheim. Et nous aurons le privilège de bénéficier d’un lancement exceptionnel, avec une soirée consacrée à Christophe le 23 septembre dans le cadre des Bibliothèques idéales, soirée pour laquelle François Wolfermann nous a donné carte blanche. Sur le plateau, il y aura beaucoup d’amis très proches de Christophe, musiciens ou non.

Michelle Ruffenach Jean-Luc Fournier Nicolas Rosès — Richard-Schroeder — Georges Douna
a CULTURE — EXPOSITION 110 a CULTURE №50 — Septembre 2023 — Vivre livre
A U R A S E R V I C E S , U N P A R T E N A I R E A U N I V E A U A Y E Z L E M A T C H P A R F A I T ! C O N T A C T E Z - N O U S ! W W W . A U R A - S E R V I C E S . F R C O N T A C T @ A U R A - S E R V I C E S . F R P R E S T A T I O N S É V È N E M E N T I E L L E S P O U R P R O F E S S I O N N E L L E S , C L É S E N M A I N A F T E R W O R K , S O I R É E S P R I V É E S D ’ E N T R E P R I S E , S É M I N A I R E S , A N N I V E R S A I R E S D ’ E N T R E P R I S E S C O N C I E R G E R I E T O U S T Y P E S D E B E S O I N S E T U R G E N C E S , T R A N S P O R T S P R E S T I G I E U X , A C C O M P A G N E M E N T H A U T D E G A M M E G E S T I O N D ’ H Ô T E S E T H Ô T E S S E S R E C H E R C H E E T M I S E E N P L A C E D E P E R S O N N E L Q U A L I F I É E N F O N C T I O N D U S T A N D I N G D E L ’ É V È N E M E N T

Et concernant l’exposition elle-même, qu’y verrons-nous ?

Il y aura beaucoup de surprises que je ne veux pas dévoiler trop tôt, mais les bonnes fées se sont penchées sur nous puisque nous aurons, parmi beaucoup d’autres, des contributions de Enki Bilal, Lucie Bevilacqua (la sœur du chanteur) ou encore Richard Schroeder qui a réalisé parmi les plus belles photos de Christophe. Il y aura beaucoup de photos privées qui vont nous être prêtées par des très proches de Christophe. Et le tout sera entouré par les voitures de la collection Hess Classic dont certains modèles ont été aussi plébiscités par le chanteur… Christophe a eu une longue carrière et lors de ses dernières années, il était devenu culte pour beaucoup de générations qui n’avaient pas connu ses débuts. Ce succès trans-générationnel est la marque des grands artistes…

On avait été frappé par la qualité du contenu de l’expo Gainsbourg et, après avoir fait votre connaissance, on avait réalisé que vous aviez une très forte appétence personnelle pour tout ce qui entoure les milieux de la musique, au point d’avoir développé une véritable expertise en matière de rock’n roll…

C’est parce que je suis vieille (rires) Blague à part, ça vient de mon éducation : mes parents nous ont toujours appris qu’on n’avait jamais assez de culture ou de savoirs, qu’il nous restera toujours quelque chose à apprendre et que pour cela, il ne faut jamais cesser de s’ouvrir le plus possible à toutes sortes de choses. Ce qui fait que le beau me bouleverse. C’est comme si j’avais une sensibilité particulière : ajoutée à la curiosité et la passion, elle me permet d’aller le plus possible au bout des choses. La peinture, par exemple, a été pour moi une révélation dès l’adolescence : ce fut lors d’une visite d’une exposition de Max Ernst. Je me suis dit : waoooh ! On peut donc ressentir avec la peinture les mêmes émotions que m’avait procurées la poésie, par exemple, jusqu’alors.

Cette passion pour la culture rock date de quand ?

Je devais avoir cinq ou six ans. C’était la vague de yéyés, les Teppaz (un électrophone populaire et très bon marché permettant d’écouter les fameux 45 Tours –  ndlr ), les émissions de la télé dont

Âge tendre et tête de bois mais avec un amour particulier pour la génération des Buddy Holly, Gene Vincent et autres Eddie Cochran ou Jerry Lee Lewis… Ils me transcendaient. En évoluant en âge, ma passion s’est ouverte à d’autres : par exemple ; j’ai toujours autant adoré Serge Reggianni que les rockers et aujourd’hui encore, je suis ouverte à certaines formes de rap. Tout ce qui est créatif m’intéresse… Évidemment, j’étais trop petite pour me rendre compte, mais plus tard, j’ai compris que cette culture rock avait beaucoup bougé un monde qui était bien trop figé au sortir de la Seconde Guerre mondiale… On a d’ailleurs encore beaucoup de chance que certains d’entre eux soient encore là : Bruce Springsteen, Mick Jagger, Keith Richards qui dit partout qu’il a enterré ses trois derniers médecins... a

CHRISTOPHE SANS INTERDIT

LexusStrasbourg– HessAutomobiles, 42RuedesTuileriesàSouffelweyersheim.

Ouvertdu30septembreau28octobredulundiauvendredide14hà19h, lesamediainsiquelesdimanchesdeportes ouvertesde14hà18housurrendez-vous.

EXPO
112 a CULTURE №50 — Septembre 2023 — Vivre livre

10e ÉDITION

Profondément ancrée sur son territoire, Café Sati est une entreprise familiale et indépendante. Depuis trois générations, Café Sati porte un vif intérêt pour l’art contemporain, le design et la photographie.

Les Talents Sati se sont développés autour d’une opération de mécénat pérenne et originale, et mettent chaque année en lumière des jeunes talents issus d’une des écoles d’art partenaire de France, Allemagne, Belgique et Suisse (*).

« CONFIER L’USINE SATI AUX ARTISTES

C’EST CONTRIBUER À METTRE EN LUMIÈRE LES LIENS ENTRE L’ART, L’INDUSTRIE ET LA VILLE. »

Les Talents Sati offrent aux artistes l’opportunité d’investir la façade de la torréfaction située au port du Rhin, à la frontière entre Kehl et Strasbourg. Suite à un projet européen particulièrement exigeant, un jury indépendant constitué de représentants du monde économique et culturel, sélectionne l’œuvre lauréate qui sera intégralement financée par Café Sati et exposée pendant un an dans un cadre exceptionnel.

Depuis 2013, 9 lauréats ont vu leurs œuvres produites et exposées. 35 finalistes ont été récompensés, et plus de 250 projets ont été éxaminés.

Sous la présidence du Doyen de la Faculté des Arts de Strasbourg Stefan Kristensen, le jury 2023 a choisi l’œuvre l’Heure Bleue d’Elisa Sanchez. Le projet de l’artiste sera dévoilé à la rentrée.

LES TALENTS SATI DEPUIS 2013

www.lestalentssati.com

Ecoles partenaires en 2023

/

Nicolas Schulé, Président de Café Sati. Heure Luxueuse, 2013 de Margot Dien & Baudoin Lindas Haute école des arts du Rhin (FR) Intemporel, 2017 de Pierre Boyer & Youri Asantcheeff Haute école des arts du Rhin (FR) Situ Sati, 2020 de Maëva Sanz & Eli Bouisson Haute école des arts du Rhin (FR) Trombines d’usine, 2014 de Alexis Reymond Haute école des arts du Rhin (FR) Curiosités industrielles, 2018 de Joanna Hateley & Thomas Roger Haute école des arts du Rhin (FR) Arcadia, 2021 de Victoria Kieffer Haute école des arts du Rhin (FR) Blazing Darkness, 2016 de Nina Kronenberger, Maria Sieradzki & Merle Sommer Hochschule der Bildenden Künste Saarbrrücken (DE) Fenêtre sur canal, 2019 de Justine Siret Ecole supérieure d’art et de design Reims (FR) A Window in Time, 2022 de Johannes Musiol & Ozan Güngor Hochschule für Gestaltung und Kunst FHNW, Basel (CH)
Tous droits réservésLes Talents Sati juillet 2023
*En France : Ecole supérieure d’art et de design de Reims - Ecole nationale supérieure d’art de Nancy - École supérieure d’art de Lorraine - Haute école des Arts du Rhin - En Allemagne : Hochschule Offenburg, Hochschule Pforzheim, Staatliche Hochschule für Gestaltung Karlsruhe, Hochschule der Bildenden Künste Saarbrücken - En Suisse : Hochschule Luzern, Design & KunstHochschule für Gestaltung und Kunst FHNW Basel.

MARI IN BORDERLAND BILAN(S) CARBONE

S ACTUALITÉ — UNE JOURNALISTE UKRAINIENNE EN FRANCE
Maria Pototskaya
114 S ACTUALITÉ №50 — Septembre 2023 — Vivre livre

de départ de la municipalité de Strasbourg

chose de séduisant. Ambiance Burning

place du Château.

près

pas même besoin de brûler l’installation. Le petit bonhomme, ou Nemeton, cette œuvre d’art éphémère installée le long de la Cathédrale n’aura pas eu besoin d’interaction humaine, artistique ou d’odeur de souffre, pour entamer sa fin de vie et peiner les pro-life.

Le vent, l’erreur humaine, tout simplement, auront suffi. Composé de métal, de bois, de plexiglas dichroïque et de miroirs, l’œuvre fabriquée par UV Lab, s’est effondrée quelques heures avant même le début des festivités. Une autodestruction, suffisante à placer Strasbourg sur la carte médiatique culturelle européenne... Au moins ça de réussi... C’est incroyable comment une gestion imparfaite peut facilement détruire la mise en valeur du patrimoine culturel même si cela est sans comparaison avec ce que nous vivons en Ukraine. Pour tout vous dire, je ne sais même plus ce qui est encore debout dans ma région natale de Zaporijia, jusqu’à la statue de Maxime Gorki, désormais en zone occupée, au-delà des lignes de visibilité. J’espère, un jour pouvoir à nouveau m’assoir sur ses genoux.

Alors qu’en Europe de l’Ouest, l’on dissèque, boîte de pop corn à la main, notre blockbuster national dont Prigojine, Poutine, Choïgou et quelques autres oligarques se sont arrogé les premiers rôles, la journaliste ukrainienne que je suis se plait désormais à observer le débat politique local, pack de bretzels à la main.

Celui sur la défense du siège parlementaire de Strasbourg est à ce titre particulièrement intéressant. Face à des opposants bruxellois appuyant sur la « gabegie » financière et environnementale d’un tel projet, Jeanne Barseghian, pourtant écologiste et tenante du discours affirmant que « toute activité humaine génère des gaz à effet de serre », contre attaque en brandissant une autre menace existentielle : celle de l’euroscepticisme et, par ricochet, du populisme et du nationalisme en Europe, dont la poursuite des déplacements, dont aériens vers Strasbourg, serait, trois jours par mois, une digue incontournable. À peu de choses près, un sentiment de déjà-vu venant d’un pays où la livraison de F-16 est

devenue un enjeu vital pour préserver ce que la Russie semble s’extasier à détruire.

À CHAQUE TEST DE SIRÈNE…

À titre d’exemples, et pour en rester sur le plan environnemental, le complexe militaro-russe est aujourd’hui à l’origine de la déperdition de 10,5 millions d’hectares de terres agricoles en Ukraine. Grenades, mines et autres projectiles explosifs détruisent nos bâtiments qui, ce faisant, libèrent à leur tour des quantités impressionnantes d’amiante. Des obus frappent régulièrement des dépôts d’hydrocarbures, qui à leur tour s’infiltrent dans nos sols. Je vous passe la partie missiles de croisière. Lutte contre le réchauffement climatique, lutte contre le nationalisme ne sont de ce point de vue effectivement pas totalement étranger.

Cette idée, j’y pense ici à chaque test de sirène, chaque premier mercredi du mois. Dans une notice diffusée par la ville, « il faut prendre très au sérieux une alerte diffusée par les sirènes, car ce moyen n’est utilisé qu’en situation particulièrement grave ». « Rentrez immédiatement chez vous ou à l’intérieur d’un bâtiment (entreprise, établissement public…). Si possible, rejoignez un local clos. Fermez les portes et les fenêtres et bouchez les ouvertures (aérations, fentes…). Coupez les ventilations, chauffages et climatiseurs. Écoutez la radio, des consignes vous seront données ; respectez-les ». Sentiment, là encore, de déjà-vu. La peur en moins, mon cerveau comprenant que je suis ici en sécurité, et que l’endroit le plus proche où me précipiter est le Snack Michel dont je fais à chaque passage le plein de gâteau à la framboise. Bien mieux qu’un sous-sol d’immeuble. Mais bien plus inquiétant pour une autre ligne, cette fois paisible et non aérienne S

115 S ACTUALITÉ №50 — Septembre 2023 — Vivre livre
L’idée
avait quelque
Man,
À ceci
qu’ici,

MoiJaja...

Vous avez fait quelque chose de grave dans une vie antérieure ?

« Quand la fracture est bien réelle, il n’y a vraiment plus aucun doute #ActeManqué ».

Même ça, il n’y est pas parvenu : prendre son avion sans se prendre les pattes dans le tapis, ai-je soupiré devant Tato.

Quelque jours plus tôt, à l’occasion du Match Racing – Werder de Brême, l’apercevoir dans l’exercice d’un « Storcky » boiteux m’avait déjà inspiré quelque affliction : lui, seul, isolé, à côté du baraquement VIP du club, puis à nouveau seul – enfin, quasi seul – dans sa tribune présidentielle, le temps d’une dernière photo de trois quarts face, souriant à une tribune Nord, bien moins esseulée...

L’ÉLÉGANCE D’UN TIR DE CANON À EAU

Pouxit, clopin-clopant avec sa béquille, distant d’une bière et d’une tarte flambée de Tato et moi. J’avais songé à de multiples attractions pour début août ; pas celle-ci. Et dire que je me l’étais déjà imaginé refaire son monde, plage de Laiya –Manille, cocktail « Expired » servi sur un lit de glace. « #ActeManqué », comme il dit. Aucune idée de comment il a réussi à se gâcher encore. Peut-être une « technique de la grue » mal maîtrisée, mais à quoi bon

se muer en apprenti Karate Kid au risque de rater son avion ? À moins de chercher à anticiper, à écumer les effets boomerang des nouvelles fonctions de son épouse. Elle, qui, après avoir conseillé l’Elysée en matière de santé, voyait la crise du Covid nous submerger. Elle, qui après être avoir été nommée ambassadrice près le Conseil de l’Europe, observait la Russie envahir l’Ukraine. Elle, qui à peine nommée ambassadrice de France à Manille, vivait cet été sa première bataille navale, lorsque les gardecôtes chinois eurent l’élégance de tirer au canon à eau sur des navires philippins en mer de Chine méridionale. À croire que les communautés de destin existent vraiment au sein du couple.

Croyez-le ou non, mais Pouxit va vraiment me manquer. Je m’en sentirais presque orphelin, sans offense à Tato. Imaginez : « Moi, Jaja... », sans Pouxit... Comment poursuivre, comment repenser mes chroniques sans mon personnage préféré ? Sans celui qui m’a fait grandir, édition après édition ? Sans celui qui, toutes ces années durant, a su me

S ACTUALITÉ — MOI JAJA
Pink Jaja Charles Nouar
116 S ACTUALITÉ №50 — Septembre 2023 — Vivre livre

ravir à chacune de ses apparitions « politiques », tantôt grimé en David Bowie, tantôt en Lucky Luke ou en Aquaman ? Sans celui qui, bien mieux que n’aurait su le faire tout artiste associé du TNS, s’est brillamment paré des habits rêvés d’un calife strasbourgeois sans n’être pourtant jamais parvenu à rassembler sur son nom. Pouxit, bien plus qu’un héros de roman, une philosophie. Le digne héritier de Goscinny et de Tabary et de leur personnage Iznogoud, la reconnaissance littéraire en moins. Iznogoud : la francisation de l’expression anglophone He’s no good, née de l’imagination du tandem franco-belge. Ceci explique sans doute en partie mon désarroi. Et « cela », aussi.

TONTON FOOTIX ET LA STRATÉGIE DE L’ESSUIE-GLACE

Vers qui me tourner désormais ? Coach Vieira, pourrait répondre à certains critères d’éligibilité. À commencer par un système de jeu digne d’une pose d’essuie-glaces chez Norauto susceptible de ne tirer le

public d’une lente somnolence que par une Donnarumma de Matz Sels. Comprendre pour les non-initiés : un dégagement au pied du gardien sur le premier adversaire venu afin de lui permettre de glisser la balle dans ses propres filets, vides jusqu’alors, rempli une fraction de seconde après. 0-1.

À moins de trouver en urgence un véritable numéro 10, susceptible de nous ressusciter l’esprit d’un Mostovoï, tonton Footix pourrait créer la surprise et décrocher le rôle. Fiche de poste : échouer à moins de changer quelque chose. Avec moins d’un tiers de ses matchs remportés au cours de ces trois dernières années d’entraineur, l’élève bilingue françaisanglais susceptible de défendre la cause des supporters devant le nouveau boss américain du club pourrait rapidement s’imposer comme un cas d’école en matière de RH. Traçant un parallèle avec l’ère Proisy, Pokaa, par l’entremise de son rédacteur Nicolas Kaspar, trace déjà une ligne à ne pas franchir : « McCormack a été à Strasbourg l’équivalent de la Budweiser : on a envie d’y goûter pour tester les saveurs

de l’Amérique et de son argent, mais on se retrouve à boire quelque chose dont le goût ne déplairait pas aux amateurs d’urinothérapie ». Croisons les ailes pour que Blue and Co ait meilleure saveur et que la Budweiser n’ait pas celle d’une Heineken. …

N’EST PAS DAVID QUI VEUT

Parce que la magie locale est qu’ici être grand n’est pas gage de réussite, surtout si l’on est classé dans la catégorie « prédateurs étrangers ». Leur taper dessus est monnaie courante. Gueuler, geindre, cogner, tout en suppliant par la même occasion est dans l’ADN local, accompagné d’un zeste de mégalomanie déplacée. Nos écologistes n’y font pas exception, lorsqu’ils annoncent à grand renfort de communication institutionnelle – l’argent de nos impôts – la tenue de la « première fête de la bière de Schiltigheim sans Heineken », en représailles à la fermeture annoncée de la brasserie de l’Espérance d’ici janvier 2026. Sans Heineken, mais avec Fischer en vedette, marque du groupe... Donc sans Heineken, mais avec Heineken. Objectif : pousser le géant néerlandais à céder sa marque Fischer pour qu’elle reste locale. J’imagine d’ici la peur dont a dû être saisi Dolf van den Brink, le PDG du géant néerlandais face à tant de pression politique. Dans une ville joliment imprégnée de culture hébraïque, n’est pas David qui veut.

MONDE : MOT SINGULIER DANS LE LANGAGE INSTITUTIONNEL LOCAL

Fort heureusement, Strasbourg, bien qu’incapable de longue date d’assumer pleinement son statut de capitale départementale, régionale ou européenne –l’épisode Osmose n’y changera rien dès lors que le Parlement s’engouffrera dans la brèche de l’ouverture des traités pour y imposer son choix de ville siège, ne manque pas d’ambition pour son futur, désireuse de se muer en un acteur majeur de la scène internationale. Mieux : elle ambitionne désormais d’être capitale mondiale. Après Noël, Pâques, l’Europe, l’Amour et je ne sais quoi encore, c’est peut-être à cela que nous destinent nos élus restants : à commencer, l’an prochain, par la Capitale mondiale du Livre. Un moyen ambitieux de se hisser au rang des plus grands : Charjah, Kuala Lumpur,

№50 — Septembre 2023 — Vivre livre

Tbilissi, Guadalajara, Accra... villes lauréates des cinq précédentes éditions... Pas certain, de mon point de vue, que cet épisode littéraire ne soit davantage parvenu à les hisser sur le devant de la scène que leurs liaisons dangereuses avec le Régime Poutine, la criminalité organisée, Daesh, Wagner et autres cartels. Mais soit. Au pire, pouvons-nous toujours tenter de constituer une chorale d’élus municipaux sur « We are the world » aux Bibliothèques idéales 2024. Cela ne coûtera pas plus cher que le site Internet de l’événement, qui outre une charte graphique et une navigabilité conçues pour concurrencer un blog de village des années 1990, n’offre qu’un accès en langue française à l’événement. Le Monde : mot particulièrement singulier dans le langage institutionnel local. Quant à l’attractivité des thèmes retenus, l’atelier « Wouah, je crée ! », mis en avant dans la rubrique « Ville créative et poétique », comment vous dire d’un point de vue étranger... ? La prochaine fois que les organisateurs de l’événement considèreront l’exclamation du petit Lucien, ravi de pouvoir se servir de la serpette de Tonton ou Tata pour simuler l’atterrissage d’une soucoupe volante dans un champ de maïs, peut-être serait-il bon de leur rappeler que l’on sort clairement du brainstorming éditorial envisagé pour rayonner à l’international. À moins de considérer le petit Lucien, quatre ans, comme Ghost Writer de l’équipe municipale avec déjà, à son actif, un « l’Avenue des Vosges est la plus belle avenue du monde » (sic !), déclamée quelques mois plus tôt par Petit Poney Rose devant un parterre de résidents sidérés par tant de flagornerie printanière. Ceci, au point de provoquer, chez certains, une envie irrésistible de prendre contact avec le département lasagnes de Findus afin de couper court à la ridicule obséquiosité du propos.

UNE CHOSE M’ÉCHAPPE

Lire est important. Mais, à ce rythme, fuir pourrait rapidement le devenir tout autant, face à tant de génie créatif. Critiquer est facile, me direz-vous – Tato en premier. Mais là, on est sur du lever comme diraient certains. Le problème, en France, est qu’à force de niveler par le bas de manière à être compris de tous, personne n’a plus envie de vous écouter. Prenez simplement la politique des transports urbains : objectif plus de voitures, hausse des tarifs publics, promotion « environnementale » du tout électrique dont la chaine de vie

ferait peur à n’importe quel écologiste sérieux. Prochaine étape : mamie dans le bac d’un vélo cargo ? Vivement la rentrée politique... Sans Pouxit, certes, mais pas trop loin quand même : en guise de cadeau de départ, en sus de « deux plaques et cinq vis strasbourgeoises dans la cheville », mon héros a été nommé en juillet « Conseiller maître » à la Cour des comptes avec pour mission principale de s’assurer du bon emploi de l’argent public et d’en informer les citoyens. Ceci, en exerçant « la fonction de magistrat au sein de l’institution » –basée à Paris – et de « participer aux délibérations collégiales ». Question naïve de pingouin rose : comment, en résidant à plus de 10 000 kilomètres de la Cour ? #UneChoseMechappe. #TerryGilliamSorsDeCeCorps

LE DAR SHAEIR DE MONSIEUR SALAH

En France, vous avez cette jolie phrase : « on a les élus que l’on mérite ». Nouvelle question : vous avez fait quelque chose de grave dans une vie antérieure ? Parce qu’en ce qui me concerne, cela me donne pour seule envie de me poser sur l’une des banquettes du Dar Shaeir de monsieur Salah : un architecte de Rabat qui a redonné vie à la demeure du premier ambassadeur envoyé par le roi Hassan Ier pour le représenter en Europe, après que la bâtisse ait été un temps reconvertie en Maison de la Poésie. Du bon sens et de la poésie. C’est ça qu’il nous faudrait. À l’ombre d’une tonnelle de toit de Medina, livre sans prétention politique sous l’aile, entre la rue des Consuls et la Kasbah des Oudayas. S

118 S ACTUALITÉ №50 — Septembre 2023 — Vivre livre

Diarrhée littéraire

En France on aime les livres. On aime les Auteurs, on aime les Idées, on aime la Littérature. Ah, qu’est-ce qu’on aime ça ! Alors on a des prix. Mais plein. 635 prix littéraires, soit presque deux par jour. Hors Goncourt, Fémina et autres Renaudot, le prix des lectrices de Elle, le prix littéraire de lycéens, celui des collégiens, le prix du roman de la Gendarmerie Nationale (je n’aimerais pas l’avoir celui-là)… Et sans doute celui du club de pétanque du Guilvinec. Tout le monde y va de son prix. Dame, c’est qu’il y a de la besogne. 644 romans à paraître pour la rentrée 2023. Et les éditeurs se sont retenus, c’est 5 % de moins que l’an dernier ; bel effort. 644 tout de même. N’y aurait-il pas là quelque chose d’un peu absurde ? Tant de livres…

D’autant plus qu’en 2021-2022 la lecture a été promue Grande Cause Nationale. Comme si l’amour de la lecture, si hautement proclamé, n’était pas si universellement répandu, comme si on voulait se raconter qu’on aime lire parce que « ça fait bien ». Du moins chez certain·e·s encore. Mauvais esprit ? Pas si sûr. Après tout, on sait combien de livres sont achetés, mais on ignore combien sont lus. Et si les Français déclarent consacrer en moyenne

41 minutes par jour à la lecture (en incluant la notice du nouvel aspirateur, je présume), ils sont devant un écran (hors lecture évidemment) durant 3h14…

La Grande Cause Nationale des familles concerne en fait les plus jeunes puisqu’« un jeune sur cinq affirme ne pas lire du tout »  (2), alors que, selon la même étude, 80 % des 15-24 ans « se déclarent lecteurs »…

SIX MOIS D’ÉCRITURE, SIX MOIS DE PROMOTION, UN EMPLOI DU TEMPS DE SPARTIATE

Nonobstant, il y a tout lieu de se réjouir de la rentrée qui est là. Tous les lecteurs (les vrais comme les faux) seront satisfaits, l’offre est pléthorique, il y en aura pour tout le monde, et le petit milieu éditorial et médiatique ébullitionne. Un Nothomb, un Foenkinos, un Eric-Emmanuel Schmitt, un Reinhardt, un Marc Lévy… ils seront tous là, pondant, avec la régularité d’un coucou suisse, leur petit paquet de feuilles annuel. Six mois d’écriture, six mois de promotion, voilà un emploi du temps de spartiate. Qui a osé dire que le romantisme était mort ? Un tel amour de la littérature côtoie l’absolu. Je ne sais plus

120 S ACTUALITÉ №50 — Septembre 2023 — Vivre livre
S ACTUALITÉ – LE PARTI-PRIS DE THIERRY JOBARD
« On voit tout le temps en automne/Quelque chose qui vous étonne ». (1) Ainsi commence la première poésie que j’ai apprise. Il y est surtout question de la couleur changeante des arbres, des feuilles qui jaunissent ou rougissent avant de tomber. Mais ce qui m’étonne, moins que les feuilles des arbres qui tombent, ce sont celles des livres qui poussent. Et avec une telle vigueur qu’on pourrait se demander si cette montée de sève n’est pas pathologique.
Thierry Jobard Nicolas Rosès

qui je ne sais plus quand, a dit que ce qui distinguait un véritable écrivain c’était le caractère vital pour lui d’écrire. Appliquer ce critère permettrait, j’en suis certain, de faire un joli tri parmi les 644 romans de la rentrée. Rappelons-nous du message lassé des éditions Gallimard durant le confinement, demandant de ne plus envoyer de manuscrits tant leur nombre rendait impossible leur lecture (3). Tout d’un coup, pléthore de pécores se découvrait, entre deux séries avalées goulûment, un talent pour la prose. C’est étonnant comme s’emmerder stimule les idées à la con.

On devrait se féliciter de cette belle fête de rentrée, ce régal pour l’esprit et le cœur auxquels contribuent rencontres et festivals. Foin des esprits chagrins ! Réjouissonsnous de cette passion nationale pour les belles lettres, alléluia ! Ceci étant, et loin de moi l’idée de vouloir troubler le potage, à y regarder de plus près le tableau paraît moins rieur. Car il n’aura pas échappé aux plus sagaces d’entre vous, merveilleux lecteur, merveilleuse lectrice, que l’édition française a connu une évolution marquée depuis quelques années, à savoir une concentration de plus en plus forte. Le livre est un marché comme un autre.

Le feuilleton du rachat d’Hachette par Editis, filiale de Vivendi – propriété de Vincent Bolloré – touchant à sa fin, naîtra un groupe possédant les deux tiers de l’édition scolaire et parascolaire et des éditions de poche. La libre concurrence c’est bien, mais si on peut trouver des accommodements c’est mieux. Quand on sait par ailleurs que Bolloré dévitalise tout ce qu’il touche en le droitisant à mort, tous les espoirs sont permis. Mais Bolloré n’est pas le seul. Gallimard, via le groupe Madrigall, contrôle Flammarion, Denoël, Casterman, P.O.L, Minuit… Les quatre premiers groupes français (Hachette, Editis, Madrigall et Média Participations) représentent plus des deux tiers du chiffre d’affaires du livre en France. La somme des petits éditeurs récolte à peine 11 %. Ce qui induit un certain nombre de conséquences, ici comme ailleurs, mais ici moins visiblement qu’ailleurs.

Reprenons les termes de l’équation. La concentration est de plus en plus forte, mais le nombre de titres reste très élevé. Il n’y a donc pas de réduction de l’offre, bien au contraire, comme on pourrait s’y attendre du fait de la diminution du nombre d’acteurs indépendants. Sachant, qui plus est, que la concentration, voire

l’hyper-concentration, renforce d’autant plus la concurrence et fait baisser le chiffre d’affaires, il faut faire preuve de créativité pour écouler sa marchandise. Fort heureusement, hormis Madrigall, chacun des groupes cités possède ses propres médias (Europe 1 ou Canal+ pour Vivendi par exemple) qui relaieront avec insistance les annonces de parutions des livres du groupe.

NE PLUS FAIRE DU LIVRE UNE FIN EN SOI, MAIS UN MOYEN

Mais il est également un autre effet, bien plus sournois, qui apparaît désormais : ne plus faire du livre une fin en soi, mais un moyen. Éditeur est un métier qui a beaucoup changé. Auparavant, il s’agissait d’aider et d’accompagner un écrivain dans la construction d’une œuvre. Désormais, pour beaucoup, il s’agit de produire du contenu. Qu’est-ce qu’un contenu ici ? C’est une matière transposable. On va chercher à publier des romans calibrés de telle sorte qu’il donneront matière à une adaptation en film ou en série. Bingo niveau pépettes. Ce qui nous vaut une accumulation de films français tout aussi mièvres et glands les uns que les

№50 — Septembre 2023 — Vivre livre

autres. Rien d’étonnant à cela puisque les récits d’origine exploitent pour la plupart la même veine, celle de l’autofiction languide ou larmoyante, ou bien un néoréalisme sans recul sur un réel qu’on prétend être transparent. Que c’est pauvre…

Voyez ici comme les choses sont bien faites : une production industrielle (de la littérature) conduit à l’accumulation de livres standardisés. Ici, comme ailleurs, on misera sur des marques, afin d’être bien assuré de (re-)trouver ce qu’on attend. Les marques étant en l’occurrence les auteurs. On achètera donc du Nothomb, du Schmitt, du Musso, etc. Auteurs qui, je le rappelle, quand ils n’écrivent pas, se transforment en VRP de leur produit, se déplaçant en librairie, sur les salons, dans les festivals, animant des ateliers d’écriture, participant à des résidences… Ceci à la fois pour se montrer, se faire connaître et reconnaître (selon une tendance à la peopolisation de plus en plus nette) et, pour les moins connus, afin de pouvoir manger, tout simplement. 40 % des auteurs vivent avec un revenu en dessous du SMIC. C’est un peu comme au cinéma, quelques stars rentables accumulent les films tandis que la piétaille des seconds, troisièmes et autres petits rôles survit vaille que vaille entre participations alimentaires, doublages et rayon charcuterie de chez Leclerc.

26 000 TONNES DE LIVRES DÉTRUITS PAR AN

Naguère, les éditeurs généralistes suivaient le modèle de la péréquation. Autrement dit, ils compensaient les faibles ventes de la littérature exigeante par celles, volumineuses, de la littérature facile. Cet équilibre leur permettait de maintenir un équilibre, source de diversité de leur catalogue. C’est de moins en moins le cas et tout porte à croire que la tendance va s’accentuer. En effet, les groupes investisseurs et acheteurs de maison d’édition ne sont pas éditeurs de métier (Madrigall mis à part).

Sachant que l’économie est désormais financiarisée, quelle est l’expression qui résume leurs attentes ? Je vous souffle ? Optimisation de la rentabilité. Et qui dit optimisation dit rapidité.

122 S ACTUALITÉ №50 — Septembre 2023 — Vivre livre J
S ACTUALITÉ – LE PARTI-PRIS DE THIERRY JOBARD
« En résumé, la rentrée littéraire c’est ce moment où paraît au grand jour la production industrielle de contenus formatés, à la langue pas trop compliquée, sur lesquels les grands groupes balanceront toute la soupe publicitaire afin de vendre vite et beaucoup. »
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En résumé, la rentrée littéraire c’est ce moment où paraît au grand jour la production industrielle de contenus formatés, à la langue pas trop compliquée, sur lesquels les grands groupes balanceront toute la soupe publicitaire afin de vendre vite et beaucoup. Saturer l’espace médiatique est l’horizon visé. Que voulez-vous, le panier de la ménagère n’est pas extensible, surtout pour ce qui concerne les choses dites culturelles, non plus que que les tables des libraires. Surtout pas de risques, ou le moins possible. Pour ce on n’aura pas la naïveté de faire confiance à la sainte loi de l’offre et de la demande ; on formate l’offre, on la ramène à du déjà connu, bref on tambouille la même cuisine en variant légèrement l’accompagnement.

Quant aux livres invendus (20 à 25 % du total), ils seront renvoyés au bout de quelques mois à l’éditeur qui, pour éviter des frais de stockage, procèdera à un pilonnage massif : 26 000 tonnes de livres détruits par an… En voilà un beau système économique. (5)

Il reste quelques éditeurs qui font un vrai travail, ce sont eux qu’ils importent de soutenir, et non les cadors des grands tirages. Et qu’on ne vienne pas me bassiner avec le couplet usé et niaiseux de l’élitisme. La vraie démocratisation de la littérature, c’est l’élitisme pour tous. Ce ne sera pas du mille-feuille.

Moi quand j’étais petit on m’avait dit que la littérature c’était une expérience, une ouverture, un choc, un éblouissement, une trouée sur l’espoir, sur l’amour, sur l’utopie. Que c’était une chose qui changeait la vie et notre façon de voir le monde, voire qui créait un autre monde. Cela pouvait aussi faire mal. Pauvre Mallarmé, pauvre Joyce, pauvre Dostoïevski, aujourd’hui la « littérature » industrielle ne change rien, ne dérange rien, elle va et vient et disparaît sans vagues. Dors tranquille, brave lecteur consommateur, tu as ta conscience pour toi ; tout est tranquille tandis que rotatives et pilons rythment sans fin ton sommeil béat. S

(1) L’automne, de Lucie Delarue-Mardrus

(2) Les Français et la lecture, Études du CNL, 2023

(3) Rassurez-vous, ils ne les lisaient pas davantage avant. Le coup du manuscrit génial envoyé par la poste c’est juste au cinéma

(4) Je ne saurais trop conseiller à tous les professionnels du livre et à ceux que le sujet intéresse la lecture de Le fétiche et la plume, d’Hélène Ling et Inès Sol Salas, chez Rivages, qui fait une analyse pénétrante de l’évolution de la littérature et de son marché aujourd’hui.

124 S ACTUALITÉ №50 — Septembre 2023 — Vivre livre
« Moi quand j’étais petit on m’avait dit que la littérature c’était une expérience, une ouverture, un choc, un éblouissement, une trouée sur l’espoir, sur l’amour, sur l’utopie. »
S ACTUALITÉ – LE PARTI-PRIS DE THIERRY JOBARD

Crois en tes rêves, même les plus fous, et ceux qui sont éloignés des nôtres. Je t’avoue que l’équilibre entre la famille et le verre de vin est fragile. Si le jus de raisin fermenté ne te fait pas vibrer, de grâce, ne choisis pas cette voie. Elle est merveilleuse, mais elle déroule aussi son lot de contraintes et son aura de stress. Quoi qu’il arrive, les grandes personnes qui reprennent une entreprise par obligation deviennent mélancoliques. Dans cinquante ans, tu auras largement eu le temps de faire ton choix professionnel. J’aimerais néanmoins te laisser quelques notes pour plus tard, au cas où le vin colorerait tes pensées.

Pour la première fois depuis la révolution industrielle, notre génération – celle de papa et moi – est économiquement plus fragile que la précédente. En agriculture, la vigne est l’une des branches qui a le plus de valeur ajoutée. Pourtant, l’augmentation de la taxation par l’État et la baisse de la consommation, entre autres, esquissent un futur complexe. Les idées reçues, elles, s’accrochent. Tu rencontreras inévitablement des gens qui te verront comme une grande fortune de France. Les étiquettes, je te disais. Chez les vignerons, je t’assure que les droits de succession et l’achat d’un tracteur ont de quoi donner le vertige.

Ces dernières années, la médiatisation de notre métier est souvent de mèche avec le vin mauvais. Ceci, au grand dam de ceux qui cherchent à perpétuer leur savoirfaire, et l’art de vivre à la Française. Une

meilleure pédagogie autour du vin permettrait aux consommateurs de boire mieux, et d’entretenir un rapport plus serein avec la dive bouteille

LA QUÊTE DE SENS S’IMMISCE DANS LE QUOTIDIEN…

Dans le monde entier, les défis climatiques se multiplient. Ils influencent la physiologie de la vigne et la qualité des récoltes. Des raisins gèlent et d’autres brûlent. Les vignerons y voient une grande source d’anxiété.

E SOCIÉTÉ — VIN
« Mon bébé… Tu es né sous une bonne étoile, et nous espérons que celle-ci se reflète dans tes yeux le plus longtemps possible. Certains nuages, teintés par les préoccupations environnementales et sociétales, marqueront le chemin de ta génération, appelée Alpha. À peine né, on te colle déjà une étiquette. Face à un flux d’actualités anxiogènes, nommer les choses, ça rassure les gens…
Jessica Ouellet Caroline Paulus
J
POUR
TARD… 126 E SOCIÉTÉ №50 — Septembre 2023 — Vivre livre
Père et fils à la tâche
NOTES
PLUS

JC’est que la hausse des températures et une pluviométrie irrégulière stimulent la prolifération des maladies de la vigne. La sécheresse, quant à elle, tend à remonter la culture vers le nord. Le berceau de Shakespeare et la Belgique, notamment, troquent leur traditionnelle chope à bière contre un verre à pied.

Heureusement, des solutions techniques émergent, et la quête de sens s’immisce dans le quotidien. Ainsi, certains choisissent d’implanter des cultures alternatives et complémentaires à la vigne, telles que le colza, le trèfle, le lin ou le radis noir. Au final, je t’avoue que les habitudes de consommation nous inquiètent davantage que la nature qui pousse, puisqu’elle est toujours plus sage que nous. Le nombre de domaines qui ont fait le pas vers une culture biologique apporte aussi sa pierre à l’édifice. Ce qui est le plus biologique est ce qui n’a pas été créé certes, mais c’est un bon compromis.

Les choix des consommateurs sont portés par une poignée de tendances – méthodes de vinification, élevage, étiquettes rigolotes – et l’opinion de certains professionnels. Depuis quelque temps, j’ai l’impression qu’un vin excellent ne suffit plus. Les dégustateurs sont devenus orpailleurs. Prends le temps de développer une singularité, et accroche-toi aux vins qui font chanter tes papilles.

Le conditionnement en verre est une étape qui pèse lourd dans notre empreinte carbone. À vue de nez, les cannettes et Bagin-Box nous semblent être des options astucieuses pour un avenir plus écologique. Actuellement, les recherches s’accélèrent. Je pense aux bouteilles en fibre de lin et résine d’arbre, ou encore en carton recyclé. Le marché français est très attaché à l’esthétique des conditionnements et l’art du service lié au vin. Pour le moment, je suis perplexe quant à l’approbation d’un choix moins sexy.

MON BÉBÉ, N’OUBLIE PAS DE T’ENNUYER EN CHEMIN…

J’ai le sentiment de te dépeindre une vision plutôt sombre du monde viticole. Il y a pourtant tant de choses qui se sont améliorées depuis le début des années 2000 ! Les vins sont plus sains, loyaux, et marchands. En d’autres mots, le vin n’est plus hasardeux. À vrai dire, la qualité des vins d’Alsace fait écho dans le monde entier.

Le Crémant d’Alsace, notamment, a le vent en poupe. Dans les vignes, la pénibilité au travail s’est nettement améliorée. Ton arrière-grand-mère fauchait les vignes à la faux. Ton père réalise les travaux d’entretien des sols sur un siège à suspension pneumatique, avec la radio dans les oreilles. À ce rythme, je soupçonne qu’un robot pourra épauler ton travail. Certaines

personnes associeront l’aide de la technologie à de la fainéantise. Je te promets pourtant que la douleur n’est pas rédemptrice, et ne garantit pas un supplément d’âme aux vins.

Le monde viticole, inhérent à notre quotidien, est en plein bouleversement ; nous valsons entre excitation et instabilité. Depuis la crise sanitaire liée à l’épidémie de Covid-19, nous avons beaucoup de mal à esquisser le futur de notre métier. Nous finirons bien par trouver un mot pour cette époque. Être vigneron est, plus que jamais, un métier de passion. Heureusement, cette passion nous anime.

Papa et moi sommes contraints par différentes temporalités : la nature qui pousse, l’obsession d’optimiser nos journées. Et toi, à qui on essaie de donner le meilleur, même si parfois on se trompe. J’espère que nos choix pourront épauler les tiens, qu’ils soient près ou loin du jus de raisin fermenté. À l’exemple des paroles de Mon Roi du rappeur Youssoupha ; si tu ne peux pas faire de grandes choses, fais de petites choses avec grandeur. Mon bébé, n’oublie pas de t’ennuyer en chemin. L’ennui stimulera ta créativité, et t’éloignera accessoirement des étiquettes qui seront collées à ta génération. C’est bien d’être le meilleur, mais c’est meilleur d’être le plus original. E

128 E SOCIÉTÉ №50 — Septembre 2023 — Vivre livre
Les paysages de la vigne sont remarquables.

É V ÉNEMENTO R EMRON

Le 15 juin, journée exceptionnelle pour les partenaires du Club

Or Norme, grâce à l’Espace H, avec un rallye-découverte à bord d’une flotte BMW/Mini, au cours duquel nous avons été reçus aux Tanneries Haas et au Domaine Wach. Inoubliable !

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Le 9 juillet, changement d’ambiance, pour une soirée lyrique et champêtre au festival La voix des Forges à Jaegerthal, et un cocktail épatant : Opéra + tartes flambées !

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DR 130 E SOCIÉTÉ №50 — Septembre 2023 — Vivre livre

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MUSIQUE

THE TRAVELING WILBURYS Vol.1 (folk pop)

Il y a une constante et deux variantes dans l’histoire des Traveling Wilburys. La constante, c’est que ce groupe est celui dont les membres ont vendu le plus grand nombre d’albums dans l’histoire de la musique : environ huit cents millions.

Playlist

Flashez le QR Code ci-dessus et retrouvez une playlist Traveling Wilburys et les supergroupes.

Et il y a deux variantes. La première est celle d’une bande de (faux) frères venus de nulle part et qui, à l’image des Ramones, se sont créés un nom et des blases pour faire plus rock’n’roll. Wilbury est leur nom. Otis, Nelson, Charlie, Lefty et Lucky sont leurs prénoms. Et ils proposent une musique dans la lignée des groupes folk pop de l’époque, comme The Eagles ou Fleetwood Mac. Mais avec un faux air de Beatles, voire de Bob Dylan, et quelques déjà classiques du rock et de la pop.

La seconde variante vient un peu confirmer l’ensemble. En 1988, Harrison (The Beatles) doit enregistrer une face B pour un 45T. Pas d’inspiration. Mais un copain, Jeff Lynne (Electric Light Orchestra), est en studio pour produire le nouvel album de Roy Orbison. Ce dernier propose aux deux Britanniques d’utiliser le studio personnel de Bob Dylan. À la condition d’être de la partie sur la chanson.

Mais il manque une guitare à Harrison, qui passe chez Tom Petty (The Heartbreakers) pour en emprunter une. Les cinq boys se retrouvent donc en studio pour enregistrer ladite chanson. Leur label l’écoute et là, c’est la stupéfaction : une telle chanson ne peut rester une simple face B. Un album est donc lancé.

Mais ce sont cinq copains, avant d’être cinq musiciens d’expérience et de talent, qui vont entrer en studio pour ce Vol.1. Chacun aura ses lignes de chant, les egos restent à la porte du studio. Et les chansons défilent. À l’image de Handle with care, premier single, où Harrison débute, laissant le refrain à Orbison et son timbre si particulier. Puis vient le Zim’, futur Nobel, etc. Et, signe de la décontraction totale des garçons,

cette chanson n’a toujours pas de titre, après son enregistrement. Harrison regarde autour de lui, voit un carton sur lequel est écrit « Handle with care »… Et voilà comment naît le titre d’une chanson !

Vol.1 regorge de soleil, d’amitié, de mélodies. On passe de la folk à la pop, ou à la country (Dirty world) et au rock’n’roll (Rattled). Aucune limite n’est posée, si ce n’est celle du plaisir. Comme si les cinq faux frangins avaient décidé de faire ensemble ce que leurs carrières respectives empêchaient, par crainte d’un rejet de leurs fans. Avec quelques perles absolues, comme ce You’re not alone anymore qui touche au paradis : imaginez Roy Orbison remplacer John Lennon sur une chanson des Beatles en hommage à Elvis, et vous aurez une idée à peu près approchante du résultat. Il sera même récompensé aux Grammy Awards.

Le groupe travaillera rapidement à un Vol.2. Mais le décès brutal de Roy Orbison l’interrompra. Alors, en hommage, l’album ne sortira pas. Néanmoins, ils attaqueront tout de suite leur second et dernier album, sobrement intitulé Vol.3

132 a MUSIQUE №50 — Septembre 2023 — Vivre livre

LE SENS ET LA HAUTEUR DE VOS PROJETS

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FESTIVAL, LIVRES GALERIES, ETC.

Chaque trimestre, la rédaction de Or Norme a lu, écouté, visionné l'essentiel de ce qu'on lui fait parvenir. Cette sélection fait la part belle à ses coups de cœur...

1KEXPOSITION

Aux temps du sida. Œuvres, récits et entrelacs au MAMCS à partir d’octobre

Dévastatrice, l’épidémie de Sida qui a explosé dans les années 1980 a emporté une génération de créateurs et créatrices et entraîné une crise profonde des formes de représentation.

Plus rien ne pouvait être comme avant. L’art est devenu le lieu de paroles engagées, voire militantes, allant parfois jusqu’à répercuter les luttes pour plus de tolérance, de visibilité et de droits pour les minorités.

Conçue comme un voyage chrono-thématique qui place visiteur et visiteuses dans un maelström de sensations et de réflexions, l’exposition qui sera ouverte au Musée d’art moderne et contemporain à partir du 6 octobre s’articulera en sections qui mettront en évidence les entrelacs unissant les énergies mobilisées contre ce qui n’est pas une

maladie, mais un scandale comme l’avait dit Élisabeth Lebovici.

Les œuvres de Sophie Calle, Copi, Marlene Dumas, Nan Goldin, Hervé Guibert, Avram Finkelstein, Luc Chery, Serrano et bien d’autres y côtoieront objets d’archives et montages audiovisuels de l’INA.

L’exposition s’accompagnera d’une permanence où les visiteurs pourront, s’ils le souhaitent, échanger avec des professionnel(le)s du monde de la santé ou de la solidarité.

L’épidémie, on le sait, n’est toujours pas surmontée malgré d’importantes avancées médicales. a

a CULTURE – SÉLECTION SPECTACLES
Du6octobreau4février2024 www.musees.strasbourg.eu
Alain Ancian – Benjamin Thomas DR
№50 — Septembre 2023 — Vivre livre a SÉLECTION 134
Luc Chery, Drifting – Suites nocturnes, 1983-1986

PRÉPAREZ VOTRE RENTRÉE DES SPECTACLES !

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MASCARADE DIM 29 OCT 50 CENT MAR 31 OCT CLAUDIO CAPEO SAM 18 NOV CASSE NOISETTE DIM 10 DÉC SEIGNEUR DES ANNEAUX 3 VEN 20 OCT DJADJA & DINAZ SAM 02 DÉC BOODER DIM 21 JAN 2024 MICHAEL FLATLEY’S VEN 06 OCT BERNADETTE DE LOURDES MER 20 & JEU 21 DÉC BIGFLO & OLI VEN 03 NOV VERONIC DICAIRE MER 31 JAN 2024 PAT PATROUILLE DIM 28 JAN 2024 M POKORA SAM 14 OCT & DIM 15 OCT SHAKA PONK SAM 25 NOV 500 VOIX POUR QUEEN SAM 13 JAN 2024 NEJ VEN 08 DÉC MICHEL SARDOU MER 22 NOV SOFIANE PAMART SAM 16 DÉC INFAMOUS FESTIVAL SAM 21 OCT DAMIEN SAEZ DIM 03 DÉC TRIAL INDOOR SAM 27 JAN 2024 ALBAN IVANOV SAM 10 FÉV 2024 CHRISTOPHE MAÉ VEN 13 OCT KAAMELOTT - 1ER VOLET VEN 22 DÉC IBRAHIM MAALOUF MAR 07 NOV MAXIME GASTEUIL MER 18 OCT GLORIOUS DIM 26 NOV NOTRE DAME DE PARIS SAM 03 & DIM 04 FÉV 2024 ROCK SYMPHONY MER 08 NOV PASCAL OBISPO VEN 17 NOV DISNEY 100 ANS SAM 09 DÉC JOB DATING 2023 MER 20 SEPT SALON MER & VIGNE 29 & 30 SEPT - 01 & 02 OCT TOP MUSIC LIVE 2023 JEU 07 DÉC

1KEXPOSITION

porté depuis plus de vint ans par un autre enfant du pays, Rodolphe Burger.

DÉVALER ! a pour ambition de faire redécouvrir la richesse d’un patrimoine unique et remarquable, tout en valorisant la démarche d’artistes contemporains, tous liés à ce territoire.

Le parcours va relier de lieux forts et emblématiques (chapelles, église, anciens commerces, anciens ateliers et bureaux des entreprises textiles…)

Une quinzaine d’artistes originaires du Val d’Argent ou ayant un lien intime et puissant avec cette vallée sont annoncés et seront rejoints par quatre autres artistes ayant été accueillis en résidence dans la ville dans le cadre des projets organisés en partenariat avec le FRAC Alsace.

DÉVALER Un original parcours d’art contemporain à Sainte-Marie-aux-Mines

Si dévaler est cette sensation de vertige, d’adrénaline et d’excitation ressentie lorsqu’on descend rapidement d’un point haut, c’est aussi le joli nom choisi par Christophe Urbain et Michel Bedez, les deux artistes à l’origine de ce projet dont la première édition va voir le jour fin octobre prochain dans ce Val d’Argent cher à leurs cœurs et plus particulièrement à Sainte-Marie-auxMines, encore si marquée par son passé industriel minier et textile.

Cette première édition se déroulera en complicité avec le festival de musique C’est dans la vallée imaginé et

Enthousiaste (c’est sa marque de fabrique depuis toujours lui qui fut notamment à l’origine de L’Industrie Magnifique à Strasbourg, Michel Bedez, lui-même natif du Val d’Argent, souligne que « DÉVALER ! est avant tout un projet de cœur, un retour aux sources salvateur, un désir personnel de faire rayonner les territoires un peu oubliés. À terme, ce parcours artistique pourrait devenir l’ambassadeur artistique et sensible des vallées – perdues ou retrouvées. On y évoquera leurs déclins et leurs beautés, leurs tristesses et leurs richesses, leurs abandons et leurs renaissances.

On parlera de ces territoires particuliers, de l’impact de leurs topographies sur les femmes et les hommes qui les habitent… ». a

DÉVALER ! à Sainte-Marie-aux-Mines,

durant les deux week-ends (vendredi,samedi,dimanche) entre les 20 et 29 octobre prochains. Contact : www.devaler.fr (à partir du 6 septembre)

136 a SÉLECTION №50 — Septembre 2023 — Vivre livre
Christophe Urbain (assis) et Michel Bedez, les créateurs de DÉVALER !
Samins g Eu opole

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FESTIVAL EXPOSITION

La terre au cœur de Marie-Anne Mouton

FORMAT(S) 2023

Design graphique Central Vapeur

Peintre plasticienne, Marie-Anne Mouton expose avec les 25 artistes de son atelier des œuvres inspirées du livre de Hubert Reeves La terre vue du cœur

Ces créations, aux techniques multiples, nous relient au cœur du vivant et nous questionne sur le devenir de notre précieuse terre mère, pourvoyeuse de vie.

Parmi ces œuvres qui invitent à un regard en conscience, six artistes ont créé une fresque évoquant la communication souterraine en symbiose avec les arbres, à l’image du réseau entre la terre et les hommes.

À noter deux conférences durant la durée de l’exposition : le 24 septembre, Émilie Chalvignac exposera le concept de « l’espace sûr et juste pour l'humanité » et le 8 octobre, Philippe Class, géologue de formation et ancien directeur santé, sécurité et environnement, tentera de mettre en lumière the Wood Wide Web, la toile de réseaux forestiers. a

La terre au cœur CINÉ de Bussière – 15 rue Kempfà Strasbourg Du 15 septembre au 15 octobre 2023

Lors de cette seconde édition de FORMAT(S), festival de design graphique à Strasbourg, l’objectif est de montrer pendant plusieurs jours l’activité du design graphique dans le Grand Est, en France et ailleurs à travers des expositions, des conférences, un salon d’exposant·e·s, des workshops et des flash' conf à Strasbourg. Parmi la vaste programmation, à noter une exposition d'affiches dédiée à l'histoire du graphisme suisse de 1924 à 2021 s'installera à l'Aubette 1928 tout le mois d'octobre, un cycle de conférences tout public entre les auditoriums de la HEAR, de la BNU et de la Médiathèque Malraux, ou encore le Salon graphique où il sera possible d'acheter des livres, des éditions indépendantes, des affiches, etc. les 7 et 8 octobre à Garage Coop.

À l’initiative de Central Vapeur qui soutient, diffuse et promeut l’illustration et la bande dessinée depuis 2010, cette nouvelle édition de FORMAT(S) prend place du 27 septembre au 4 novembre (avec un temps-fort le week-end du 7 et 8 octobre).

Le festival s’adresse à tout le monde, étudiant·e·s, professionnel·le·s, créatif·ve·s, curieux·ses, passant·e·s... C'est un événement gratuit et ouvert à tous·te·s. a

Toutleprogrammesur: formats-festival.org

Insta :@formats_festival

FORMAT(S)2023–DesignGraphique Du27septembreau4novembre
138 a SÉLECTION №50 — Septembre 2023 — Vivre livre
Tous les jeudis de 18h00 à 22H00 Tous les jeudis de 18h00 à 22H00 apéro huîtres huîtres huîtres apéro apé ro 9 quai des pêcheurs 67000 Strasbourg 9 quai des pêcheurs 67000 Strasbourg réservations : 03 88 35 77 81 contact@ cafe-atlantico.net réservations : 03 88 35 77 81 contact@ cafe-atlantico.net Suivez le bateau

Ils ont fait la légende du Racing

Julien-Thomas Will fait l’événement

3KLIVRES

Des mammouths dans la vallée Sylvie de Mathuisieulx

Le gardien des âmes Pierre Kretz

Ces histoires nous plongent dans plus de 70 ans de la vie du Racing. Les noms de ces joueurs ont été scandés dans le stade de la Meinau. Certains ont été des comètes qui ont brillé le temps d’une saison, d’autres ont prolongé leur histoire avec le Racing Club de Strasbourg durant des décennies. Tous sont restés liés à vie au club et ont marqué plusieurs générations.

Le journaliste Julien-Thomas Will a entrepris de rencontrer quelques-uns de ces hommes qui ont construit la légende du Racing et en ont fait un club dans lequel se reconnaissent désormais tous les Alsaciens. Gardien, défenseur, milieu ou attaquant, chacun s’est livré sans fausse pudeur, mettant ses souvenirs à nu pour se raconter et raconter son rapport au grand club alsacien.

Grâce à ces grands témoins, héroïques, légendaires, ce livre nous permet de replonger dans les riches heures et les petites anecdotes de l’histoire du Racing Club de Strasbourg. a

Ce dixième volume de la très belle collection Graine d’Histoire évoque la vie des Néandertaliens dans la vallée de la Bruche, il y a des dizaines de milliers d’années.

Mana vit dans une grande famille. Sa sœur, Essa, attend un bébé. Yona, leur grand-mère, est guérisseuse. Et leur cousin Kouro est aussi vaillant qu’insupportable... Le clan se prépare pour un voyage de plusieurs jours : il a rendez-vous au pied d’une falaise de grès rose. Comme chaque printemps, il va y retrouver d’autres tribus de Néandertaliens. Ce sera l’occasion d’échanger des nouvelles, d’organiser de grandes chasses, mais aussi de faire la fête ! Elle l’ignore encore, mais Mana se souviendra longtemps de ce rassemblement...

À la fin du livre, on retrouve un cahier historique de Daniel Fischer. a

Desmammouthsdanslavallée SylviedeMathuisieulx (illustrationsdeBenjaminStrickler) ÉditionsLaNuéeBleue–10€

Volontairement reclus dans la cave de sa maison familiale, au cœur d’un village alsacien, entouré de photos et de documents, un homme s’est transformé en « gardien des âmes », celles des soldats disparus en Russlànd, des femmes restées seules, des anciens de la guerre d’Algérie. En cherchant à renouer, dans une impossible psychanalyse, les fils d’une histoire familiale déchirée par les violences de l’Histoire, il fait revivre les figures de ses proches, parents et amis d’enfance. Sa confession, belle et envoûtante, ouvre les portes d’un apaisement, d’une sérénité lucide, d’une réconciliation. Sans complaisance, mais plein de tendresse et d’humour, ce roman en dit bien plus long sur l’histoire malmenée et sur la mémoire meurtrie de l’Alsace que tant de livres de souvenirs ou d’érudition.

Dans cette nouvelle édition, le roman de Pierre Kretz est enrichi d’une postface de l’historien Daniel Fischer. a

Legardiendesâmes
Julien-ThomasWill
Pierre Kretz Éd.LaNuéeBleue–21€ IlsontfaitlalégendeduRacing
Éd.LaNuéeBleue–25€
140 a SÉLECTION №50 — Septembre 2023 — Vivre livre

La Terre demande toute notre attention

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2050

La Terre demande toute notre attention, est l’engagement de chacun d’entre nous à être, chaque jour, totalement impliqué à atteindre nos objectifs, ambitieux et passionnants, éthiques et pragmatiques, pour l’environnement.

Au programme : neutralité carbone en 2050, recyclabilité et réutilisation à 100% de tous nos nouveaux produits et préservation de la biodiversité dans tous nos sites. Parce que notre engagement doit être durable, nous avons créé notre programme d’actions collaboratives « Tous engagés pour la Terre ».

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CULTURE SCIENTIFIQUE : IL RESTE TANT À FAIRE…

Fondée en 1982, l’Association des Musées et Centres pour le développement de la Culture Scientifique, Technique et Industrielle (Amcsti) œuvre pour la reconnaissance et le développement des cultures scientifique, technique et industrielle (CSTI).

Dans une société du XXI e siècle résolument empreinte par les sciences et les innovations technologiques qu’elles engendrent, les sujets traités par l’association n’ont jamais été aussi importants et transversaux. C’est pourquoi, il semble aujourd’hui indispensable de favoriser l’articulation avec les territoires et de développer davantage les relations avec l’ensemble des partenaires, en privilégiant les mondes de la recherche et de l’industrie. Cet objectif permettra ainsi d’asseoir davantage la position de l’association et de poursuivre les échanges avec les ministères en étant force de proposition.

Riches de ces membres singuliers et implantés sur l’ensemble du territoire, nous offrons de nombreux espaces de dialogue pour faire connaître et relayer des projets au niveau national tout en enrichissant les pratiques de chacun. Aujourd’hui, les forums régionaux ont toute leur place dans les territoires, il s’agira donc pour demain de mieux les

articuler sur le plan territorial et au niveau national. Pour y parvenir et renforcer les liens entre les territoires et l’association, l’Amcsti pourra profiter de l’opportunité de visibilité offerte par la plateforme Echosciences, en lui confiant son pilotage national.

Chercheurs et scientifiques sont à l’origine de la production des savoirs et disposent de la légitimité pour rétablir des vérités scientifiques, dans une société où la frontière entre sciences, croyances et opinions est parfois brouillée. En cela, les universitaires travaillent d’ores et déjà main dans la main avec les acteurs de la CSTI, notamment par le biais d’actions de médiation communes. Grâce aux entrée et relations institutionnelles dont dispose l’Amcsti, il s’agira demain de faire se rencontrer des partenaires potentiels et d’encourager la réalisation de projets communs tout en développant son réseau avec de nouveaux acteurs dont les liens sont encore à créer.

Encore peu développées au sein des CSTI, les actions autour de l’industrie et de l’innovation ne mériteraient-elles pas de gagner du terrain ? L’Amcsti comptera-t-elle demain, parmi ces membres, davantage d’acteurs de ces domaines ? Elle a, c’est certain, un rôle à jouer dans ces domaines et elle aurait tout à y gagner

d’intégrer parmi ses membres des acteurs qui s’intéressent au patrimoine industriel et technologique ou qui abordent les questions d’innovation à la fois technologique, social et environnemental. C’est en tout cas les réflexions que souhaitent porter cette nouvelle présidence lors de son mandat en endossant le rôle de facilitatrice. Ainsi, l’association pourra une fois de plus accroître ses objectifs en offrant des espaces de débat et de médiation autour de grands questionnements sociétaux : la démarche scientifique, l’écoanxiété, le progrès, … a

sabine.ischia@alsace.eu

Or Champ est une tribune libre confiée à une personnalité par la rédaction de Or Norme Comme toute tribune libre, elle n’engage pas la responsabilité de la rédaction de la revue, mais la seule responsabilité de sa signataire.

OR CHAMP
143 a OR CHAMP
par Sabine Ischia directrice du Vaisseau et présidente de l’Amcsti. Nicolas Rosès

Directeur de la publication

Patrick Adler 1 patrick@adler.fr

Directeur de la rédaction

Jean-Luc Fournier 2 jlf@ornorme.fr

Photographie

Franck Disegni 15

Zoé Forget

Alban Hefti 16

Yann Levy

Vincent Muller 17

Caroline Paulus 18

Nicolas Rosès 19

Ce numéro de Or Norme a été tiré à 15 000 exemplaires

Dépôt légal : à parution

N°ISSN : 2272-9461

SEPTEMBRE 2023

Rédaction

Alain Ancian 3

Eleina Angelowski 4

Isabelle Baladine Howald 5

Erika Chelly 6

Marine Dumeny 7

Jean-Luc Fournier 2

Emmanuel Didierjean

Alain Leroy

Jaja 8

Thierry Jobard 9

Véronique Leblanc 10

Jessica Ouellet 11

Barbara Romero 12

Benjamin Thomas 13 redaction@ornorme.fr

Contact : contact@ornorme.fr

Site web : www.ornorme.fr

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Couverture  Illustration par Célia Housset celiahousset.com

Portraits de l'équipe Illustrations par Paul Lannes www.paul-lannes.com

Or Norme Strasbourg est une publication éditée par Ornormedias 1 rue du Temple Neuf 67000 Strasbourg

Publicité Régis Pietronave 20 publicité@ornorme.fr

Direction artistique et mise en page Cercle Studio

Directrice Projet

Lisa Haller 21

Typographie GT America par Grilli Type Freight Pro par J. Darden

Impression Imprimé en CE

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© Crédit Photo : Getty Images.

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