The Red Bulletin CF 06/22

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HORS DU COMMUN

SPÉCIAL VÉLO

TOUR DE FRANCE, VTT, ULTRA

LE POUVOIR

DE LA PASSION Kilian Bron explore le globe et régale YouTube grâce à un VTT

TO M C R U I S E / I B E Y I / PAT R I C K S E A BAS E / JA N E G O O DA L L / KO N N Y LO O S E R

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ÉD I TORI AL

BIENVENUE

KEEP ROLLING!

BELLE VUE

Le Français Kilian Bron s’est défoulé dans les montagnes suisses lors du shooting pour The Red Bulletin. Ses photos en action sont à découvrir page 36.

Lorsque Kilian Bron, 29 ans, roule en VTT sur des crevasses en Suisse, des volcans au Mexique ou des rochers pointus dans les Dolomites italiennes, il donne presque l’impression de ne pas être de ce monde. Avec ses vidéos, ce sympathique Français enthousiasme des millions de personnes sur YouTube. En page 36, il nous explique pourquoi la Suisse est, pour lui, un paradis. Le VTTiste suisse Konny Looser, 33 ans, est lui aussi parti à l’aventure : lors de la Desert Dash, il parcourt 393 kilomètres à travers le Namib, le plus vieux désert au monde. Une course de l’extrême qui le pousse à ses limites. Le récit de cette aventure est à lire page 44. Envie de vous essayer à la vie d’un cycliste professionnel ? Page 56, le puriste cycliste Patrick Seabase, 38 ans, nous emmène sur l’une des deux étapes suisses du Tour de France 2022.

DANS SA ROUE

Le Bernois Patrick Seabase nous présente les 183 km de la 9e étape du Tour de France qui se déroulera en Suisse. Page 56

12 287

C’est le nombre de kilomètres qui séparent la cycliste afghane Afsana Nawrozi de sa famille. Son histoire touchante page 62.

TOM MACKINGER

Bonne lecture ! La Rédaction

TRISTAN SHU (COUVERTURE), PHIL GALE

COURS ACCÉLÉRÉ

Escaliers, virages relevés, drops : les bases détaillées que tout débutant en VTT doit maîtriser. Page 68

THE RED BULLETIN

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CONTENUS The Red Bulletin juin 2022

SPÉCIAL VÉLO

TOUR DE FRANCE, VTT, ULTRA

SUJET DE COUVERTURE

36 L’IDOLE DES JEUNES

GRAVEL

62 EN ROUE LIBRE

Afsana Nawrozi a dû quitter son pays pour pouvoir rouler.

VTT

68 LEÇON DE CONDUITE

18 SANS FRONTIÈRE Telle est la joie de Russ Ellis quand il photographie des cyclistes.

Les cinq bases à connaître pour être un bon vététiste.

Le vététiste Kilian Bron, 29 ans, fait rêver des millions de gens avec ses vidéos.

BIKES & ACCESSOIRES

70 FOLIE DOUCE

Plaisir maximum : les derniers modèles et les indispensables.

PORTFOLIO

18 ROUES DE LA FORTUNE ULTRACYCLISME

PERSPECTIVES EXPÉRIENCES POUR UNE VIE AMÉLIORÉE

30 NUITS BLANCHES

Christoph Strasser s’accroche là où les autres abandonnent.

VTT

32 DESCENTE D‘ENFER

L’Autrichienne Vali Höll est la reine incontestée du DH.

82 BIOHACKING. Stressé(e) ? Tapotez-vous, ça vous détendra. 83 PLAYLIST. Les quatre titres favoris du duo musical Ibeyi.

CYCLISME SUR PISTE

84 INNOVATION. Un tee-shirt de sport révolutionnaire.

La championne du monde Emma Hinze tourne à 70 km/h.

86 MONTRES. Pour l’amour de l’aviation : Longines Spirit Zulu Time.

DESERT DASH

87 FITNESS. Méthode BFR ou comment se muscler vite fait, bien fait.

34 SANS LES FREINS

44 LA MATURITÉ

Konny Looser pédale 393 km dans le désert du Namib.

90 GAMING. Coaching exlusif sur GT7, avec la championne de F4.

Patrick Seabase a testé l’une des deux étapes suisses.

92 BOULEVARD DES HÉROS. Trois chercheuses telles des anges gardiens pour sauver les grands singes.

6 GALERIE 12 L’ADDITION, S’IL VOUS PLAÎT !

30 SANS PAUSE L’Autrichien Christof Strasser à propos du marathon vélo le plus dur au monde.

88 LE COIN LECTURE. 88 Names de l’auteur-caméléon Matt Ruff.

TOUR DE FRANCE

56 LÉGENDE À LA TRACE

4

77 VOYAGE. Escalade à choix multpile sur l’île grecque de Kalymnos.

RUSS ELLIS, PHILIPP HORAK, JASON PERRY, TARA METTE

Le photographe Russ Ellis rend hommage à son sport favori.

14 OBJET TROUVÉ 15 LE MOMENT PHILO 91 AGENDA

96 OURS 98 LE TRAIT DE LA FIN

62 SANS PEUR De Kabul en Arizona : la passion d’Afsana Nawrozi l’a menée vers une autre vie.

THE RED BULLETIN


44 PLEINS GAZ Le Suisse Konny Looser (devant) dans le désert de Namibie lors de la course la plus difficile au monde.

THE RED BULLETIN

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MATERA, ITALIE

Sur le vif ! Des murs de pierre, des escaliers raides, des ruelles pittoresques : le fait que la charmante vieille ville de Matera, dans le sud de l’Italie, soit recherchée comme décor pour les compétitions de parkour (entre autres) n’a rien d’étonnant pour les villageois. Ceux qui écarquillent les yeux, ce sont les touristes quand ils aperçoivent une ombre voler au-dessus de leur tête pour atterrir en toute sécurité sur d’étroits murets, comme si de rien n’était. La photographe Anna Rossini a su saisir la grâce de l’instant… rossinianna.it

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ANNA ROSSINI/RED BULL ILLUME


PARIS, FRANCE

Comme l’oiseau Qu’est-ce qui fait la différence entre une photo et une bonne photo ? Primo : un belle toile de fond (ici, le Dôme, le spot de skate le plus célèbre de Paris) ; deuxio : une action digne d’être immortalisée (ici, un slappy nosegrind, une boucle élégante sur l’axe avant de la planche, exécuté à la perfection par Noah Mahieu) ; tertio : l’équilibre (ici apporté par le pigeon que Mahieu a effrayé). « Ce fut un heureux hasard », se réjouit le photographe Clément Chouleur. Instagram : @el_choubi 8


CLEMENT CHOULEUR/RED BULL ILLUME


REIN RIJKE/RED BULL ILLUME


ZANDMOTOR, PAYS-BAS

Briseuse de glace

Lorsque les températures descendent en dessous de zéro aux Pays-Bas, toute une nation dépoussière ses patins à glace, affûte ses lames et attend avec impatience que les lacs et les étangs soient enfin complètement gelés. En tant que photographe, vous risquez de ne pas vous faire beaucoup d’amis si vous choisissez de faire appel à une kitesurfeuse, en l’occurrence Babette van de Vis, pour, littéralement, briser la glace… dans l’unique but de prendre une photo intéressante. C’est exactement ce qu’a fait Rein Rijke. Qui ne tente rien n’a rien ! zoutfotografie.nl

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L’A D D I T I O N S ’ I L VO U S P L A Î T !

TOP GUN

Comme le temps file Tom Cruise revient au cinéma en héros de l’aviation : Top Gun: Maverick devrait prendre un nouveau départ… trente-six ans après l’original. Quelques chiffres parmi les plus marquants autour de ce film culte.

1937

L’année de l’ouverture de l’école d’élite Navy Fighter Weapons School en Californie. Elle porte en interne le nom de Top Gun et a servi de modèle pour le film.

6

500

caméras embarquées livrent, pour la première fois, des scènes de vol en qualité 6K dans les IMAX.

3

Le nombre d’épisodes de la série Urgences joués par Anthony Edwards, aka Goose, le partenaire de Cruise dans Top Gun.

Le nombre de fois où le réalisateur Tony Scott († 2012) a été renvoyé du tournage de Top Gun. Il a quand même réussi à terminer son film.

357 288 178

15

millions de dollars : le coût de la production de 1986. La suite s’est élevée à 152 millions de dollars !

dollars. la hauteur des recettes du premier opus.

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THE RED BULLETIN

CLAUDIA MEITERT

% de candidatures en plus reçues par l’US Navy l’année suivant la sortie de Top Gun.

182

Oscar décerné à la chanson originale Take My Breath Away, du groupe Berlin.

à 8 g : les forces centrifuges que les acteurs de Top Gun: Maverick ont dû supporter lors des prises de vue en vol.

1969

L’année de conception des lunettes Ray-Ban Aviator Classic RB 3025 portées par Tom Cruise dans Top Gun et Top Gun: Maverick.

1

7,5

HANNES KROPIK

Le nombre de films dans lesquels a tourné Tom Cruise avant que Top Gun le propulse au rang de star.

km/h (soit Mach 1,8), c’est-à-dire 1,8 fois la vitesse du son, telle est la vitesse atteinte par le F-18 que pilotent Maverick et ses collègues.

GETTY IMAGES (2)

7

2 222


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O B J E T T RO U V É

WOLFGANG WIESER

Jakob Schubert, 31 ans, champion du monde d’escalade et originaire d’Innsbruck (Autriche).

JAKOB SCHUBERT

TOBIAS HALLER/NODUM SPORTS, SIMON RAINER

Tour de chauffe L’appareil qui permet au champion de s’échauffer. Ce bout de bois diffuse une chaleur brûlante. Mais pas en combustion dans une cheminée. Il provoque une sensation de brûlure douloureuse dans les avant-bras lorsqu’on s’y hisse du bout des doigts. Le champion du monde d’escalade Jakob Schubert utilise ce flash board, qu’il accroche à un endroit approprié à l’aide d’un mousqueton, pour s’échauffer avant de s’élancer sur la roche, comme lors de sa récente performance sur le Sleepwalker, un énorme rocher près de Las Vegas (USA).

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THE RED BULLETIN


L E MOMEN T PHILO

SOCRATE A DIT :

Pourquoi recourir à un coach quand on a un ami ? Engager un coach pour retrouver la forme ou réussir professionnellement est devenu monnaie courante, du moins pour ceux qui en ont les moyens. Une pratique qui existait déjà dans l’Athènes antique. Mais les coaches d’antan devaient affronter les critiques acerbes de Socrate. Dans cette interview fictive, il dévoile les raisons de son opposition.

DR. CHRISTOPH QUARCH

BENE ROHLMANN

   : Vos prises de bec avec les sophistes qui promettaient à leurs clients de leur enseigner l’art de bien vivre sont légendaires. Que leur reprochiez-vous au juste ?  : Une chose et une seule, cher ami : ils ne tenaient pas leurs promesses. Aucun d’entre eux n’a rendu la vie de ses clients meilleure. Mais tutoyons-nous, si vous le voulez bien.

tique, tu t’en remets à quelqu’un censé avoir le mode d’emploi. T’exprimer avec compassion devient ta priorité, tu loues les services d’un coach en empathie. Mais t’es-tu seulement demandé si tu en avais vraiment besoin ? Ne cherches-tu pas au fond à répondre aux attentes des autres ? Ou ne poursuis-tu pas une idée fixe que tu t’es mise en tête ? Certes, un bon coach peut t’aider à devenir ce que tu veux être. Mais qui peut t’assurer que ce que tu veux être est bon pour toi ?

Toi, peut-être ? Certainement pas. Je n’ai aucune idée de ce qui est bon pour les gens avec lesquels je discute. Là réside le problème ! Je ne sais pas comment rendre les gens meilleurs. Je ne suis pas un expert. Je n’ai pas de connaissances à vendre. Je peux seulement les Très bien. Mais n’est-ce pas là un inviter et les guider dans une discussion point de vue réducteur ? Les sophistes où ils apprendront à se remettre en quesétaient, après tout, d’excellents tion : leurs valeurs, leurs objectifs, orateurs, capables d’enthousiasmer leurs obsessions. Je les sors de leur les foules – un talent qu’ils savaient « Il ne revient qu’à zone de confort et les invite à réfléaussi transmettre. toi de déterminer chir. Mais cette réflexion doit venir Sans aucun doute. Tout comme vos ce qui est bon pour d’eux-mêmes. Ils doivent accoucher coaches et conférenciers aujourd’hui. de leur esprit. C’est ce que j’appelle Je trouve cela admirable. Mais, toi. Nul ne peut le la maïeutique. Il ne revient qu’à toi devient-on une personne meilleure faire à ta place. » de déterminer ce qui est bon pour toi, par la seule vertu de maîtriser l’art qui tu es et le sens que tu mets deroratoire ? Devient-on courageux après rière l’idée de vivre une vie bonne et authentique. avoir entendu un discours captivant sur le courage ? Nul ne peut le faire à ta place. Pas instantanément, bien sûr, mais les coaches Mais n’est-ce pas là aussi une forme de coaching ? savent tout de même prodiguer de bons conseils Oui, pourquoi pas ? Mais je ne suis pas convaincu pour sur la manière d’optimiser sa vie – par exemple, la façon de se présenter en public ou de commuautant que cela puisse être une activité commerciale. niquer. J’y vois plus une conversation entre amis. Si telle est la Oui, oui, l’optimisation de soi… Un concept qui pasdémarche des coaches, alors ils ont ma bénédiction. sionne l’homme moderne. Ce qui explique pourquoi vous êtes prêts à payer une fortune à quiconque vous SOCRATE (469-399 av. J.-C.) est considéré comme l’archétype promet d’y parvenir. Mais bien souvent, cet argent du sage grec. Il est célèbre pour avoir déclaré : « Je sais que je ne est tout simplement gaspillé, cher ami. Tout comme sais rien », qui signifie qu’en dehors de l’art de penser, il ne pouvait initier quiconque à quelque connaissance théorique que ce les sophistes de mon époque, vos coaches sont doués soit. Sa seule préoccupation était de libérer les gens de la prison pour les belles idées : « Faites ceci, faites cela ! Applide leurs opinions et de leurs conventions, afin qu’ils puissent quez cette méthode, utilisez cet outil, réservez encore mener une vie conforme à la nature et à la dignité humaine. un séminaire, et le tour est joué. » Mais en quoi cela est-il mal ? Cela ne te sera d’aucune utilité si tu ne sais pas ce qui est bon pour toi. Tu veux retrouver la forme, tu engages un coach sportif. Tu veux devenir charisma-

THE RED BULLETIN

CHRISTOPH QUARCH, 57 ans, est un philosophe allemand, fondateur de la Nouvelle Académie Platonicienne (akademie-3.org) et auteur de nombreux ouvrages, dont le dernier Kann ich? Darf ich? Soll ich? Philosophische Antworten auf alltägliche Fragen (trad. Puis-je ? Devrais-je ? Dois-je ? Réponses philosophiques aux dilemmes du quotidien) ; en allemand, legenda Q, 2021.

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Organisatrice: BikeDays.ch GmbH


SPÉCIAL VÉLO

RUSS ELLIS

Dans ce dossier spécial, nous dédions plus de 50 pages au deux-roues, et honorons tous ses bienfaits : déferlement d’hormones du bonheur, crampes aux mollets, baume à l’âme. On n’a rien sans rien !

Russ Ellis, fan de cyclisme, sait qu’il fait le plus beau métier du monde : il est payé pour suivre et prendre des photos des événements encadrant son sport favori.

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Savoir vivre

Tour de France, 2020 « J’ai aperçu cette superbe voiture ancienne sur le bas-côté et demandé si je pouvais prendre une photo depuis l’intérieur du véhicule », explique Russ Ellis. Un cliché qui encapsule toute l’émotion du tour cycliste le plus prestigieux au monde.


Spécial vélo Portfolio

Seigneur de la route

Si le photographe britannique Russ Ellis est l’un des rares à savoir offrir à la petite reine l’écrin qu’elle mérite, c’est sans doute parce qu’il a appris le métier sur la route. Texte ANDREAS WOLLINGER 19


Spécial vélo Portfolio

L’enfer du Nord

Paris - Roubaix, 2019 Créée en 1896, la reine des classiques qui a lieu en avril dans le nord de la France constitue « l’événement préféré de toute la saison » de Russ Ellis : entre secteurs pavés et chemins de terre, cette course brutale promet des clichés inoubliables. Celui-ci trouverait facilement sa place au musée.

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LE PHOTOGRAPHE

RUSS ELLIS Russ Ellis a découvert sa vocation sur le tard : ce n’est qu’en 2015 que cet Anglais de 45 ans, né à Nottingham, commence à photographier les course cyclistes. Cette année-là, un magazine sportif lui demande de couvrir le mythique Paris-Roubaix : « À ce moment-là, j’ai réalisé que je venais de trouver ma vocation », se souvient celui qui, en conciliant ses deux grandes passions, photo et vélo, a réalisé ses rêves. Et le mieux, c’est qu’on le paye pour ça. La qualité de ses photos trouve justement

« Avant de sortir mon appareil, je m’imprègne de l’atmosphère. » Russ Ellis

son origine dans cette vocation tardive : c’est en effet comme photographe de rue que Russ Ellis fait ses premiers pas, ce qui explique son expérience et sa capacité à prendre une certaine distance pour mieux capturer ces ambiances et ces mouvements si particuliers. Comme il l’explique luimême : « Quand j’arrive sur une course, je flâne un peu avant de sortir mon appareil photo, histoire de m’imprégner de l’atmosphère. » cyclingimages.co.uk

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Spécial vélo Portfolio

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« Je veux que les gens aient envie d’accrocher mes photos au mur. » Russ Ellis

Cadre idéal

Tour Down Under, Australie, 2020

« L’endroit qu’on avait choisi pour les photos près d’Adélaïde manquait de caractère. En cherchant un angle de vue un peu plus intéressant, je suis tombé sur ce vieux pneu au bord de la route. » Ça rend tout de suite mieux !

La victoire dans la boue Cyclocross, Zeven, Allemagne, 2017

« Le cyclocross, c’est une compilation de circuits rapides et nerveux pleins de boue, de terre et d’asphalte qui promettent des courses haletantes et imprévisibles. » Ici : le champion d’Europe belge Michael Vanthourenhout.

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«Je veux qu’on regarde mes photos en se disant : “J’y étais !” » Russ Ellis

No Time to Die

Giro d’Italia, 2020

À 200 kilomètres de Naples, la petite ville de Matera est connue pour ses habitats troglodytiques (les Sassi). Un décor naturel de rêve pour le Giro, « et pour une super scène de poursuite en voitures dans le dernier James Bond », renchérit Russ Ellis.

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Spécial vélo Portfolio

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Spécial vélo Portfolio

Temps de chien

Critérium du Dauphiné, France, 2020 « Un orage a jeté le chaos au sein du peloton sur les derniers kilomètres de la deuxième étape. » Le soleil ne fait pas toujours le bonheur des photographes. « Avec la boue, la pluie et des drames en rafale, le mauvais temps fait le travail pour nous. »

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« Je veux faire des photos artistiques qui capturent toutes les émotions. » Russ Ellis

À toute vitesse

Tour de France, 2018

Qui prétend que le plus important dans une course, ce sont les cyclistes ? Pour Russ Ellis, les spectateurs sont tout aussi passionnants : leurs visages reflètent la course et offrent un parfait contraste avec la vitesse vertigineuse des coureurs.

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Spécial vélo Portfolio

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« Pouvoir vivre de mes passions, c’est l’aboutissement d’un rêve. » Russ Ellis

Come Together Giro d’Italia, 2018

« J’ai croisé ces trois supporteurs vêtus quasiment à l’identique lors de la 18e étape du Giro. La manière dont ils traversaient le passage clouté m’a tout de suite fait penser à la couverture d’Abbey Road, l’album culte des Beatles. Une image magnifique. »

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Spécial vélo Ultracyclisme

Christoph Strasser

Croyez-moi, ne pas être au top de sa forme n’a rien d’agréable.

Il avale 5 000 km à vélo sans dormir et cumule les records de victoires en Race Across America. Le secret de sa forme se trouve dans sa cave et dans des chansons entendues à l’excès. Texte WERNER JESSNER

Photo PHILIPP HORAK

La Race Across America est la course d’ultracyclisme la plus difficile au monde. Près de 5 000 kilomètres à travers les États-Unis, de la côte ouest à la côte est, en 288 heures maximum. En neuf participations, l’Autrichien Christoph Strasser, 39 ans, remporte la course de légende à six reprises. Ces dernières années, le suspense avait disparu : quand « Straps », comme l’appellent ses amis, est depuis longtemps à l’hôtel, douché, massé et savourant sa victoire un verre à la main, son poursuivant direct a encore une nuit de vélo devant lui. Mais cette année, le « Dominator » a décidé de ne pas prendre part à l’édition 2022. L’occasion pour d’autres de goûter à la victoire, et pour nous de l’interviewer.    : Combien d’heures par an vous entraînezvous ?   : Pas tant que ça quand je ne prépare pas la RAAM (Race Across America, ndlr), disons 1 000 à 1 300 heures. Ah oui, quand même ! Quatre heures de vélo par jour ? Cinq heures par jour. Ce n’est rien. Je les fais en grande partie sur l’ergomètre dans le sous-sol de ma maison. C’est plus efficace et moins dangereux, surtout en hiver.

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Comment faites-vous mentalement ? Pédaler chaque jour pendant plusieurs heures dans un sous-sol face à un mur doit être d’un ennui mortel. Je mets ce temps à profit en regardant un bon film, en écrivant des e-mails ou en téléphonant. Emprunter toujours le même trajet à bicyclette n’est pas passionnant non plus. Avec l’ergomètre au moins, pas de feux rouges, de descentes ennuyeuses ou d’automobilistes distraits. Je suis bien dans mon sous-sol. Peut-on dominer la plus classique des courses d’endurance en équipant son bureau d’un ergomètre et en s’y asseyant à chaque minute disponible ? Je ne veux surtout pas paraître prétentieux. Je sais très bien ce que franchir la ligne d’arrivée du RAAM exige en termes d’efforts. Mais durant toutes ces années, j’ai investi bien plus de temps et d’attention aux détails que quiconque. Il faut aussi ne pas avoir de souci matériel afin de se consacrer uniquement à la course. De plus, j’ai persévéré quand d’autres ont abandonné après une, deux ou trois participations. Aujourd’hui, je dispose d’une importante expérience et d’une équipe parfaitement rodée. Participer à neuf éditions en étant à chaque fois mal préparé aurait été d’une stupidité crasse. Je ne prends jamais un départ si je ne suis pas prêt.

Qu’y a-t-il d’agréable dans la RAAM ? Une semaine où vous ne dormez que six ou sept heures et mangez en pédalant… L’erreur à ne pas commettre est de penser que franchir la ligne d’arrivée, vainqueur ou pas, vous rendra heureux. Nous faisons cette erreur classique tout au long de notre vie : terminer l’école, puis les études, trouver un emploi, obtenir une récompense ou une promotion, fonder une famille, acheter un appartement ou une maison, et ainsi de suite. On se dit à chaque étape que ce sera plus génial quand on aura réussi la prochaine. Mais en général, ça ne marche pas. Le bien-être ne se vit qu’au présent. Une victoire ne fait pas de vous une personne différente. Au fond, rien ne change : si vous êtes un idiot avant, vous le resterez probablement après. Et inversement, si vous êtes heureux avant, vous le serez aussi après. Cette prise de conscience est profondément libératrice. Elle élimine toute pression. À quel moment donc la RAAM estelle appréciable ? Sur la route, quand avec mon équipe nous surmontons la douleur par le rire, en entonnant des chansons entendues à l’excès, jusqu’à l’aversion, mais qui, dans ces moments-là, vous enracinent dans l’instant présent et vous propulsent vers votre destination. Serez-vous spectateur de la RAAM en juin ? Bien entendu ! Je suis fan jusqu’au bout des ongles. Instagram : @straps_377

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« Si vous êtes un idiot avant, vous le resterez probablement après. » Le sportif de l’extrême Christoph Strasser, 39 ans, sur la signification de la victoire.

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Spécial vélo VTT

Vali Höll L’Autrichienne est la première de son pays à remporter une CM de descente VTT. Une ascension fulgurante qui doit beaucoup à son flegmatisme et au respect de ses pairs. Texte WERNER JESSNER

Photo PHILIPP HORAK

Quelque chose a changé à Saalbach (Autriche). Dans la vallée, les gens parlent de Valentina « Vali » Höll en faisant leurs courses et se donnent rendez-vous pour l’encourager via un écran public. Le public viewing en VTT, cela n’existait pas ici avant elle. Dans la montagne, quelque chose aussi a changé puisque Vali est exceptionnellement chez elle et non pas en train de s’entraîner ou de courir le monde. Une règle implicite s’applique sur les pistes de descente : le plus rapide du groupe part en tête, le reste suit. Vali Höll est facilement la plus rapide lors de sorties avec ses amis d’enfance. Et pourtant, elle roule volontairement derrière eux : « Je n’aime pas leur mettre la pression. Je suis devenue plus sociale depuis que je suis sur la route. »

One Höll of a Ride

Malgré tout, il faut imaginer Vali Höll comme une femme extrêmement ambitieuse. « Je veux donner le meilleur de moi-même. Aucune course ne peut être insignifiante au point de me faire me contenter de la deuxième place. » Ce printemps, elle a terminé deuxième lors de deux courses préparatoires : la première fois, à cause d’une crevaison, l’autre, une pédale tordue. Vali fait grrr : « J’ai dû comprendre qu’il valait mieux avoir des soucis techniques pendant la préparation que pendant la compétition. » La décontraction et le lâcher-prise, c’est ce

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qu’elle a appris à l’occasion d’une saison mémorable l’an dernier, lorsque, quatrième au classement général, elle s’est envolée pour les deux dernières courses de la saison aux États-Unis, à Snowshoe, en Virginie : « Si j’arrivais à me classer dans le top 3, ce serait bien », telle était son approche, flegmatique, après une année marquée par les chutes. Le reste appartient à l’histoire : Vali a dominé les deux courses. Notamment parce que la Française Myriam Nicole, pourtant la plus expérimentée et la leader du classement général, a perdu son sang-froid lors d’une chute. Ce qui a permis à Vali d’accéder à la première marche du podium. Si elle se penche aujourd’hui sur cette journée, une autre facette de l’athlète de Saalbach se révèle : c’est une femme d’une grande intégrité sportive. « Cela m’a semblé presque immérité lorsque j’ai remporté le classement général. Myriam n’aurait eu qu’à rouler jusqu’à la ligne d’arrivée dans des circonstances normales. » Tout comme Vali lors de tant de courses qu’elle avait dominées en réalisant les meilleurs temps intermédiaires, puis en gâchant la suite. Cependant, to finish first, you first have to finish. En d’autres termes, 100 % des gagnants ont participé.

Une équipe solide

besoin. L’ancienne coureuse d’enduro française Cécile Ravanel, sa nouvelle entraîneuse, est devenue une personne de confiance, au même titre que sa marraine. Et au lieu d’un coach qui lit et interprète le terrain pour elle à l’entraînement, elle fait confiance, depuis Snowshoe, à son propre feeling et à son œil alerte pour trouver la ligne la plus rapide. Cela doit rester ainsi. L’élite mondiale des courses féminines s’est considérablement développée au cours des deux dernières années, et le peloton est devenu très compétitif. « Désormais, tu ne peux plus monter sur le podium en commettant de grosses erreurs pendant la course », déclare-t-elle. Ce qu’elle trouve être une bonne chose, car cela contribue à l’esprit du sport.

Des adversaires familières

Des parallèles avec sa compatriote, la snowboardeuse à succès Anna Gasser, s’imposent : deux femmes fortes qui poussent leur sport et qui savent, malgré tout, se réjouir pour les autres. C’est surtout ce dernier point que Vali Höll peut valider : « Je n’aurais jamais la prétention d’avoir fait autant pour le downhill qu’Anna pour le snowboard. Nous avons une chose en commun : il est plus agréable de se réjouir avec les autres filles à l’arrivée que de se retrouver seule dans un coin avec une coupe. » Et réciproquement : « Si ma collègue et amie, la Suissesse Camille Balanche, a terminé une demiseconde plus vite que moi, je me réjouis pour elle de sa performance, et nous la célébrons ensemble. Au bout du compte, nous courons contre la montre, pas l’une contre l’autre. » La Coupe du monde UCI de VTT sur Red Bull TV jusqu’au 4 septembre : redbull.com/UCI-live

Avec la confiance en soi de ses 20 ans et la certitude de pouvoir dominer sa discipline, elle a aussi transformé son environnement avec assurance. Finies les idées farfelues, place à ce dont elle a vraiment THE RED BULLETIN


« Nous courons contre la montre, pas l’une contre l’autre. » La gagnante de la Coupe du monde Vali Höll, 20 ans, mise aussi sur l’amitié au sein de l’élite du downhill.

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Spécial vélo Cyclisme sur piste

Emma Hinze Quand elle fonce à 70 km/h dans des virages inclinés, une certitude anime la quintuple championne du monde : la passion est plus forte que la peur. Texte WERNER JESSNER

Photo ARNE MILL

Croyez-en Emma Hinze, on reçoit parfois des compliments inattendus. Lors de son récent déménagement à Cottbus (Allemagne), son facteur a été l’un des premiers à féliciter la quintuple championne du monde de 24 ans. « Il m’a dit qu’il était ravi que j’habite dans le quartier », sourit-elle. Depuis sa médaille d’argent olympique en vitesse par équipe avec Lea Sophie Friedrich, même ceux qui ignorent tout du cyclisme sur piste reconnaissent le visage de la jeune allemande. Petite antisèche : le cyclisme sur piste comprend trois épreuves de sprint : la vitesse individuelle (deux coureurs en opposition directe), le keirin (six concurrents), et la vitesse par équipes (deux équipes de trois coureurs). Très aérodynamiques, les vélos de piste n’ont ni roue libre, ni vitesses, ni freins. Quand on est lancé à plus de 70 km/h, la moindre petite erreur peut faire très mal. Mais Emma, dont le style de course lui a valu d’être surnommée « la meuf la plus couillue » par l’immense sprinteuse Kristina Vogel, a choisi de faire abstraction du danger.

   : Comment gère-t-on le risque quand on fait du 70 km/h, roue contre roue, avec un casque pour toute protection ?   : On est bien conscient du risque, mais on met ça de côté pendant la course. C’est clair que personne n’a envie de tomber, mais parfois on manque de place, tout simplement. Le contact physique est rarement intentionnel. Vous êtes connue pour votre regard féroce sur la ligne de départ. Tactique ou concentration ? J’adopte l’état d’esprit dont j’ai besoin pour réussir ma course. Tant mieux si j’intimide mes adversaires (sourire). Quelles sont les blessures les plus courantes ? Des échardes dans les fesses quand on tombe sur la piste, des brûlures et des fractures de la clavicule. Comment fait-on pour arriver à rouler sans freins ni roue libre sur une piste ovale inclinée ? On se met dedans dès l’enfance jusqu’à être en mode automatique. Je me suis récemment amusée à rouler dans le sens contraire, vers la droite, et c’était super bizarre. J’ai réalisé que ce que l’on fait est très particulier et très difficile.

lant, ce qui prend plus temps. Mais l’absence de frein n’est rien à côté du pignon fixe : si on arrête de pédaler, la force d’inertie des pédales peut nous éjecter par-dessus le guidon. Qu’est ce qu’on ressent à 70 km/h ? C’est le pied ! On sent cette poussée dans les virages et on sait d’instinct si on va vite ou pas. Avec le casque aéro sur les oreilles, on entend à peine le vent, tout juste le bruit de la roue à disque ou le craquement du plancher sur certaines pistes. Quand on s’entraîne avec des hommes qui vont à 5 ou 6 km/h de plus, on sent bien la prise de vitesse avec l’aspiration et la pression vous fait baisser automatiquement la tête. La légendaire championne allemande Kristina Vogel est devenue paraplégique suite à une chute sur piste en 2018. Comment avezvous vécu cela ? Sur le coup, ça a été dur. Mais je vis pour ce sport, arrêter n’a jamais été une option. La peur ralentit et fait faire des erreurs. Pour éviter cela, je reste fidèle à ma manière de rouler et je bloque les pensées négatives. Le courage s’apprend-il ? Je pense qu’on peut apprendre à relever des défis. Êtes-vous courageuse ? Je ne vais sûrement pas sauter d’une tour de dix mètres (rires). Les hauteurs ou les montagnes russes, non merci. En voiture, je ne suis pas rassurée en tant que passagère, mais si c’est moi qui conduis, même à fond, pas de problèmes. L’essentiel est de toujours garder le contrôle, quoi que je fasse. Instagram : @emma_hinzee

Pourquoi l’absence de freins ? Si une concurrente pouvait freiner brusquement, ce serait terriblement dangereux. On ralentit tout en rou34

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« Échardes dans les fesses, brûlures et fractures de la clavicule. » Emma Hinze, 24 ans, à propos des blessures les plus courantes (et les moins graves) dans sa discipline.

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Spécial vélo VTT & vidéo


L’icône française du VTT Kilian Bron, 29 ans, ici sur l’Augstmatthorn.

L’ATTRAPE-RÊVE Le Français KILIAN BRON est considéré comme le pilote VTT et vidéaste le plus créatif de sa génération. Son message : sortez de votre bulle, allez explorer le monde (même sans vélo). Texte RON PERKELINO

Photos TRISTAN SHU

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Spécial vélo VTT & vidéo

L’icône française du VTT Kilian Bron, 29 ans, se déchaîne en Suisse lors d’un shooting pour The Red Bulletin.


K

ilian Bron a plusieurs visages. L’un d’eux se cache derrière un casque intégral. C’est un visage d’autrefois. Celui qu’il affiche de temps en temps, avec plaisir et joie. C’est le visage d’un coureur. Celui d’un homme qui veut aller plus vite que les autres. Ce sont les courses les plus extrêmes qui ramènent l’homme d’Annecy, en France, à l’époque où il n’était pas encore une superstar de YouTube, mais un rider plein d’espoir qui voulait s’exprimer en faisant les meilleurs temps. En 2019, il a remporté la Mountain of Hell, un marathon de descente organisé aux Deux Alpes, au cours duquel un millier

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d’audacieux se jettent dans la vallée, sur leurs vélos, depuis un glacier. Lors des deux dernières éditions de la Mégavalanche de l’Alpe d’Huez, il s’est classé deuxième. Dans ce type de descente, il n’y a qu’une seule ligne, et c’est la plus directe. Mais comment cela s’accorde-t-il avec les vidéos épiques qui le font connaître à un public mondial ? Des vidéos dans lesquelles il évolue avec une précision d’horloger dans des paysages à couper le souffle, seul, suivi uniquement par un drone ? Il s’amuse avec son vélo et invente des lignes qu’on n’attribuerait jamais à un rider ? « Clairement, mon vélo, c’est un moyen d’expression pour

« Le vélo m’a ouvert le monde. » Kilian Bron a parcouru plus de trente pays avec son vélo.

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« La Suisse est un paradis pour les cyclistes. »


Spécial vélo VTT & vidéo

moi », dit le Français âgé de 29 ans, qui a commencé à explorer les environs avec son VTT dès l’âge de 13 ans, comme des millions d’autres garçons dans le monde. « Je pense que ma curiosité m’aide beaucoup à me démarquer des autres pilotes. Mission est le nom d’une de mes web-séries. Pour ce projet, je prenais mon vélo pour m’évader en montagne, aller trouver de nouveaux endroits. Mission m’a poussé à emmener mon vélo dans des lieux reculés et sur les terrains les plus abrupts. En somme, jusqu’à aujourd’hui, cela m’a mené dans une trentaine de pays. »

Des vidéos à couper le souffle

Kilian au barrage de Salanfe, en Valais. Scannez le QR code pour voir la vidéo de sa descente. THE RED BULLETIN

Que ce soit sur des crevasses en Suisse ou à travers les paysages magiques de la Cappadoce, dans la poussière de Namibie, sur les rochers pointus des Dolomites ou sur les Slick Rocks polis du désert de l’Utah : les vidéos de Bron se distinguent par un style qui se passe de mots ou de commentaires, tout en restant inimitable. Le magazine spécialisé Ride.ch a qualifié sa vidéo de cinq minutes et demie Switzerland Paradise de « meilleure vidéo drone de l’année 2021 ». La raison ? « J’ai autant de plaisir à rouler qu’à créer des vidéos, des photos ou écrire des articles », résume Kilian. Et il donne tout de suite un aperçu de sa méthode de travail : « C’est important d’être curieux de ce qui se passe dans ton milieu, ton univers, mais aussi dans d’autres pratiques, d’autres choses. Je m’intéresse à ce que font les autres, je lis des bouquins, je regarde des documentaires, je discute avec des potes au restaurant, de sujets variés, et à un moment, j’ai un déclic, un flash, et je note une idée qui me passe par la tête. » Parmi ses modèles, on trouve alors des personnalités aussi différentes que le champion du monde de descente Loïc Bruni ou l’astronaute français Thomas Pesquet. « Si tu commences par te mettre dans ta bulle, vélo ou autre, à ne plus regarder autour de toi pour faire ton truc, ce n’est pas la bonne voie. » Il prône l’ouverture, qu’il vit de manière offensive dans ses projets. Dans une vidéo de VTT de Kilian Bron, les parapentistes ou les skieurs ont leur place au même titre qu’une interprétation moderne du Tour de France, des spots

« Des gens m’écrivent pour savoir où c’est, pas pour le vélo, juste pour y aller. » connus où beaucoup ont déjà tourné côtoient ceux qu’il vient de découvrir. « Je peux aussi me balader sur Instagram, regarder des photos, voir des trucs un peu décalés. J’établis des liens entre les choses, et il y a des concepts qui naissent, des trucs un peu originaux qui prennent forme. On ne part sur rien de précis au départ. » Pourtant, l’amour du voyage à vélo a failli tuer sa carrière dans l’œuf avant même qu’elle ne commence vraiment : « Je me souviens notamment d’un voyage organisé par un sponsor au Maroc, en 2011, à l’âge de 18 ans. Cette première expérience avec mon vélo m’a ouvert les yeux, à tous les niveaux. C’est sur ce même voyage que je me suis blessé. J’ai dû arrêter le vélo pendant cinq mois. J’ai eu le temps, pendant ma longue rééducation, de prendre du recul et de commencer à réfléchir sur mes vraies envies pour la suite de ma vie. » La liste était plutôt courte : VTT. Voyager. Réaliser et produire des photos et des vidéos. « Une fois mes priorités si clairement exposées devant les yeux, je me suis demandé comment faire pour que cela devienne ma vie quotidienne, ma routine ? C’est un peu particulier d’employer ce terme, mais oui : comment faire pour que ces trois choses associées tiennent la route ? » Cependant, « je n’avais pas de stratégie, seulement la volonté et la passion. J’ai un caractère de passionné, et de fonceur. »

En selle 200 fois par an

Deux choses décisives sont venues s’ajouter au fil des années : premièrement, la persévérance, et deuxièmement, de bons contacts. Kilian fait une comparaison éloquente : « Finalement, faire du vélo, c’est un peu comme aller boire un coup et rencontrer de nouvelles personnes. Il y a des moments dans ta vie où tu dois choisir une direction. La plupart de ces moments arrivent en rencontrant des personnes clés pour la suite de nos carrières. Pour moi, au cours des années passées, ce furent Christophe Ubassy et 41


Spécial vélo VTT & vidéo

Kilian en Cappadoce, Turquie, pour Follow the Light.

Les mondes de rêve de Kilian Ses projets vidéo préférés et les plus cliqués Via Ferrata on a Mountain Bike

Colors of Mexico

La vidéo réalisée dans les Dolomites a été visionnée plus de deux millions de fois. Kilian dit : « C’est l’un de mes projets préférés, car j’y ai consacré beaucoup de temps de préparation. »

Follow The Light Les lumières, les montgolfières, les trajets au cœur de la Cappadoce : 260 000 personnes ont regardé la vidéo filmée en Turquie (photo).

Kilian file à travers des rues escarpées et colorées de villages historiques et dévale le volcan actif Popocatépetl à plus de 5 300 m d’altitude. 260 000 vues.

Switzerland Paradise « Je roule en Suisse depuis de nombreuses années et je suis toujours aussi impressionné. La Suisse est un paradis pour les cyclistes. » 214 000 vues. youtube.com/c/KilianBron

Christophe Morera, qui ont été les premiers à me faire confiance, en me soutenant dans la réalisation de mes premiers projets, début 2012. Antonin Pergod était également le premier caméraman/photographe à me suivre. Plus tard, j’ai fait la connaissance de Pierre Henni, qui est aujourd’hui mon caméraman principal. » L’équipe de base des productions de Kilian comprend en outre un pilote de drone et un monteur, ce qui est plutôt mince pour quelqu’un qui produit avec une régularité déconcertante des vidéos qui crèvent le plafond médiatique. Il n’est donc pas étonnant que la vidéo préférée de Kilian soit aussi celle qui a reçu le plus de clics : son parcours époustouflant à travers les Dolomites, Via Ferrata on a Mountain Bike, a été visionné plus de deux millions de fois jusqu’à présent. Son expérience de rider l’aide doublement dans ses projets de film. Il s’entraîne toujours comme un forcené : le charmant Français, qui passe une partie de sa vie dans le paradis du vélo qu’est Andorre, est en selle environ 200

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jours par an. Et enfin, « je reste un compétiteur dans l’âme, même dans mes projets vidéo, je me challenge tout le temps. Je donne tout ce que j’ai ». Contrairement à Fabio Wibmer ou Danny MacAskill, par exemple, qui montrent, dans le générique de fin de leurs productions, un best-of des tricks ratés du tournage, Kilian Bron ne peut recourir à cet outil, pour une raison très simple : lorsque la piste, large comme son guidon, est consignée entre une falaise et un ravin, les chances de faire une seconde prise sont maigres. Le niveau de difficulté est trop élevé ! C’est ce qui rend son œuvre si fascinante : un style de conduite incontestablement… sans erreur.

La liste de Kilian toujours valable

De plus, ce fils de chasseur alpin n’aurait de toute façon pas le temps de se blesser, plaisante-t-il : la réalisation de son rêve de toujours (associer le vélo, le cinéma et les voyages) va de pair avec un emploi du temps qui le fait travailler tout l’été à la réalisation de projets en cours. Et en hiver, il s’attelle à transformer toutes les idées qu’il a accumulées au fil des rencontres, des impressions, des inspirations tout simplement, en nouveaux projets concrets : « Quand j’ai terminé ma saison, quand je n’ai plus la tête à fond dans mes projets, je reprends ces idées, et c’est là que j’arrive à être créatif. » Si Kilian repense à son arrêt forcé après l’accident de 2011, il sait que la liste des trois choses dont il voulait faire son quotidien n’a pas besoin d’être modifiée à ce jour. « Le vélo m’a ouvert le monde. Sans lui, je pense que je n’aurais jamais pu voyager autant ni rencontrer autant de gens. » Selon Bron, c’est la véritable intention de ses vidéos : « Peut-être que les gens auront envie d’aller là où je suis allé à vélo. Car quand je conçois une vidéo en Turquie avec toutes les montgolfières, avec ces belles lumières, tu peux avoir envie d’aller là-bas même si tu ne fais pas de vélo. » Une conclusion surprenante : « Il y a des gens qui m’écrivent pour savoir où c’est, pas pour le vélo, juste pour y aller. » Instagram : @kilianbron Sur Red Bull TV, vous trouverez un grand choix de clips qui célèbrent la culture du vélo. Scannez le QR code et… c’est parti ! THE RED BULLETIN


Kilian savoure un instant de pause au paradis… au barrage de Salanfe, en Valais.

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Spécial vélo Desert Dash

LE PELOTON DE TÊTE Dès la première partie du parcours, six coureurs se sont détachés en tête, dont Konny Looser (devant à gauche).

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La maturité Lors de la DESERT DASH, les participants traversent le plus vieux désert au monde en VTT : 393 kilomètres à travers le Namib, qui poussent le Suisse Konny Looser à ses limites physiques et mentales. Récit d’une aventure. Texe ANNIKA BROHM

Photos TARA METTE


Spécial vélo Desert Dash

NAMIBIE

Windhoek

Swakopmund Désert du Namib

IL

ne lui aura manqué que trente centimètres. Konny Looser tombe à genoux, tête baissée, le visage recouvert de poussière et de crasse. « Et merde ! », s’exclame-t-il. Il est cinq heures du matin à Swakopmund, une ville côtière de Namibie. Looser entend les vagues de l’Atlantique déferler sur le rivage avant de se retirer lentement ; il aperçoit les flashs des appareils photo qui l’encerclent ; il sent le froid envahir son corps affûté. Trente foutus centimètres auront suffi à mettre un terme à sa série de victoires et à faire de Looser un perdant. Quelle ironie du sort. Il prend certes la deuxième place, mais c’est là une bien maigre consolation qui ne rend l’expérience que plus amère. « Au final, tout le monde n’a d’yeux que pour le vainqueur, pas vrai ? », lâche-t-il. Son interrogation laisse transparaître un abattement mêlé de désespoir. « Ça fait combien de temps déjà que les autres attendaient leur tour ? », questionne son beau-père, tout en connaissant parfaitement la réponse. À peine quinze heures plus tôt, Konny Looser savourait encore son statut de légende. Le coureur helvète est à la Desert Dash ce que Michael Schumacher était autrefois à la F1 et ce que le Bayern Munich est à la Bundesliga. En six parti46

LE LONG DU COL

Le trio Tristan de Lange (devant), Konny Looser (au milieu) et Vinzent Dorn a laissé la concurrence derrière lui.

cipations à la course de VTT namibienne, il a décroché le titre à six reprises. « On s’ennuie, disent les fans de la Desert Dash à son sujet, de toute façon, c’est toujours lui qui gagne. » L’un de ses concurrents les plus coriaces dit de lui : « Konny est quasi imbattable. » « Je n’envisage rien d’autre que la victoire », clame le principal intéressé. La Desert Dash est une course de l’extrême qui conduit les concurrents à travers le Namib, le désert le plus ancien au monde. Ils parcourent ainsi 393 kilomètres de la capitale Windhoek à la ville côtière de Swakopmund, en supportant

des chaleurs pouvant atteindre jusqu’à 35 °C sous le soleil de midi et en bravant la froideur de la nuit désertique. Les coureurs arrivés à destination assistent alors à la rencontre des dunes du Namib avec les vagues de l’Atlantique dans un fracas étourdissant. Ceux qui ne parviennent pas à atteindre la côte dans un délai de 24 heures sont éliminés. À l’instar de la nature namibienne et de ses éléments opposés, le peloton est peuplé de coureurs aux ambitions particulièrement disparates. La tête de la course est trustée par les professionnels comme Konny Looser, qui explorent les limites de leurs capacités physiques et mentales. Ils visent les meilleurs chronos et aspirent à décrocher le titre. Celui THE RED BULLETIN


LA LÉGENDE

Konny Looser, quelques minutes après l’arrivée.


Spécial vélo Desert Dash

SUR LE DÉPART

Les participants de la Desert Dash avant le départ à Windhoek.

LES ALLIÉS

Tristan de Lange (à gauche) et Vinzent Dorn avant le départ.

dont Looser est l’éternel détenteur. En queue de peloton, on trouve des coureurs amateurs qui hissent péniblement leur bedaine au sommet des cols et pour qui l’essentiel est bel et bien de participer. Arriver au bout ? Qui sait, l’avenir nous le dira. Les concurrents ont également la possibilité de s’engager en équipe-relais et de diviser ainsi le trajet par deux ou même quatre. Pour un pays aussi peu densément peuplé que la Namibie, la Desert Dash représente un événement majeur. Dans les magasins de vélos et les supermarchés, la « Dash » est déjà au centre des conversations plusieurs semaines avant le jour J. Tout coureur namibien qui ose braver la course en individuel devient provisoirement une célébrité locale. En tant que coureur professionnel européen marié à une cycliste allemande de Namibie, Looser jette un regard amusé sur cette agitation. Après tout, il est habitué à affronter une concurrence d’un tout autre niveau. « Ce n’est pas non plus comme si l’élite mondiale venait se rassembler ici », confie-t-il. Il pressent néanmoins que quelque chose de différent se trame à l’occasion de sa septième participation. Il s’est rendu en Namibie plus tôt que d’habitude, s’est préparé plus intensivement. La Desert Dash se déroule tous les ans à l’occasion d’un jour férié au nom à rallonge : « la Journée des femmes namibiennes et la Journée internationale des droits de l’Homme ». Plusieurs heures avant le signal de départ, les 48

familles garent leur voiture sur le bord de la route, les coffres et les bennes de chargement faisant office de travées pour les spectateurs. Les grillades rôtissent sur les barbecues – qu’ici tout le monde appelle simplement braais – tandis que les ventres dévêtus rôtissent au soleil. Quelques babouins ont pris position sur des arbres et des piquets de clôture à distance raisonnable, comme s’ils voulaient, eux aussi, jeter un œil à ces allumés lancés à toute berzingue sur les chemins de terre en plein été africain.

Dans le tunnel

Looser se trouve à présent dans un tunnel qui est censé le conduire tout droit vers son septième sacre consécutif. Dans la zone de départ installée sur un parking de Windhoek, les enceintes crachent Black Betty de Ram Jam. Alors que le dernier « bam-ba-lam » n’a pas encore fini de résonner, Looser pousse déjà les premiers concurrents à leurs limites. Il mène le peloton hors de la capitale irrespirable, gravit le col de Kupferberg en longeant

Il a des crampes aux jambes, sa tête le fait souffrir, son ventre aussi. Tout est douloureux. les champs d’herbes sèches et les buissons épineux. Il se laisse volontiers distancer en descente, avant de relancer en montée. Il joue avec ses concurrents comme le ferait un enfant cherchant à attirer vers lui une colonie de fourmis avec du sucre, dans le seul but de les écraser par la suite. Le vent lui souffle impitoyablement dans le visage. Mais Looser ne lève pas le pied pour autant et le peloton de tête finit par se réduire à six coureurs. Tout se déroule comme prévu. Ils se frayent un chemin à travers un environnement qui pourrait difficilement être plus hostile. Mais pourquoi s’infligent-ils un tel supplice ? Cette course est en effet loin d’être une partie de plaisir, ce que Konny Looser admet volonTHE RED BULLETIN


tiers. Et la prime d’une valeur de moins de 2 300 CHF ? N’en parlons pas. Looser peine à trouver les mots pour expliquer ce qui peut bien l’attirer en Namibie en plein mois de décembre, année après année. « Il y aurait des milliers d’histoires à raconter sur la Dash. » Par exemple, cette nuit où il s’est retrouvé face à un scorpion éclairé par le faisceau lumineux de sa lampe frontale, alors qu’il assouvissait un besoin naturel. L’insecte s’est mis à exécuter une petite danse comme s’il s’était préparé toute sa vie à briller sous les feux de la rampe. Pour Looser, la Dash est un mythe. « Il faut l’avoir vécu soi-même. » Si l’on s’en tient aux seuls chiffres, le Suisse a déjà surmonté des extrêmes bien plus spectaculaires. En octobre 2021, par exemple, lorsqu’il remporta la course marocaine Titan Desert, avec ses quelque 640 kilomètres, ses 7 600 mètres de dénivelé et ses 24 heures de course réparties sur six jours. Avec moins de 400 kilomètres et 3 000 mètres de dénivelé, la Desert Dash ferait presque figure de lilliputienne. Mais pour Konny Looser, c’est dans la tête que la course namibienne est la plus dure de toutes. Il renonce toutefois à toute préparation mentale, précisément en raison des grandes difficultés que pose cette course dans ce domaine. Sa stratégie : juste ne pas y penser. Se focaliser sur cet aspect des choses ne ferait qu’augmenter le niveau de stress. « La Desert Dash est imprévisible », explique-t-il la veille de la course en sirotant un jus de pomme. Pour la première fois depuis toutes ces années, il sent un sentiment de nervosité s’insinuer en lui. « En réalité, ça ne se passe jamais comme on se l’était imaginé. » Environ 40 % des coureurs engagés dans la course individuelle ne franchiront pas la ligne d’arrivée cette année. Au troisième point d’eau, on aperçoit Daniel Abraham Gebru accroupi à côté de son vélo. Le Néerlandais avait collectionné THE RED BULLETIN

LE TRIO

Konny Looser (devant), Vinzent Dorn et Tristan de Lange sont très proches les uns des autres.

40% des coureurs individuels n’atteindront pas la ligne d’arrivée cette année. l’or aux jeux paralympiques de Rio de Janeiro et de Tokyo. Pour lui, la Desert Dash prend fin dès la première moitié de la course. Une voiture-balai le recueille. « J’ai démarré beaucoup trop fort, et j’ai fini par me cramer. » Il a des crampes aux jambes, sa tête le fait souffrir, son ventre aussi. Tout est douloureux. « Tu feras mieux l’an prochain », lui dit quelqu’un en lui tapotant l’épaule. Gebru lâche un sourire forcé. À ce moment-là, une deuxième participation semble être la dernière chose à laquelle il souhaite penser.

Un air brûlant

Alors qu’il négocie la descente du très raide col d’Us, Looser sent déferler sur lui un souffle tout droit sorti d’un four dont on viendrait d’ouvrir la porte. L’air qui se projette sur son corps brûle tel un feu ardent. Sur le bord de la route, une croix rend hommage à un coureur qui a suc-

combé à une crise cardiaque à cet endroit en 2006. Il s’agit du seul décès déploré sur la Desert Dash à ce jour. Un paysage d’une beauté insensée se déploie à présent devant les yeux des coureurs. Les roues tutoient le vide en longeant les versants escarpés qui défilent à toute vitesse. À la tombée du jour, le ciel prend peu à peu une couleur rouge et mauve. Au loin, on aperçoit un plateau parsemé d’acacias. Les coureurs profitent à peine du spectacle. Ils sont trop occupés à se battre contre la poussière des sentiers qui se dépose sur leurs lunettes et envahit leurs poumons. Le passage à travers la route du col prend parfois des allures de navigation à l’aveugle. Dès le deuxième check-point, le groupe de tête ne comptait déjà plus que trois coureurs. Les dossards 1001, 1035 et 1273 semblent avoir formé une entité homogène. Il s’agit de Konny Looser, du Namibien Tristan de Lange – qui a participé à la dernière course sur route olympique – et de son allié Vinzent Dorn. Personne n’aurait misé un kopeck sur l’étudiant allemand avant la course. Même les organisateurs sont obligés de consulter leur liste pour découvrir le nom du coureur venu s’incruster en tête du peloton. Alignés en file indienne, l’éternel vainqueur, le grand espoir namibien et l’outsider avalent les kilomètres. L’écart entre 49


Spécial Lorem vélo Desert Dash


FIN DE JOURNÉE

Le soleil se couche. Konny Looser (devant) fera les prochaines étapes dans l’obscurité.

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LE VAINQUEUR

Après son triomphe sur la ligne d’arrivée à Swakopmund : le Namibien Tristan de Lange.


Spécial vélo Desert Dash

PIT STOP les roues des coureurs est si mince qu’on pourrait à peine y glisser une règle. Vu de loin, on croirait voir trois potes fadas de vélo partis en vadrouille à travers l’Afrique. Leurs corps sveltes chevauchent des montures à pneus surdimensionnés et fendent le paysage en direction du soleil levant. Ils signalent de temps à autre la présence d’animaux sur le bord de la route. Ici un chacal, là un groupe de babouins. Chaque coureur prend la tête à tour de rôle, permettant ainsi aux deux autres de rouler dans son aspiration.

À la limite

Ils ne font pas de pause, pas la moindre. Les check-points sont négociés à vitesse éclair. Les coureurs remplissent leurs gourdes, se saisissent d’aliments secs et repartent illico. L’an dernier, Looser avait profité d’un check-point pour s’offrir un sandwich, au grand bonheur de son principal concurrent. Ce n’est qu’au prix d’un effort monstrueux qu’il a été en mesure de refaire son retard. Une erreur qu’il ne répétera pas cette année. De toute manière, son corps refuse de garder le moindre aliment. Son estomac lui joue un mauvais tour. « Trop de sucreries », tranche sa belle-mère tandis qu’elle remballe les encas qu’elle avait préparés. « J’ai la nausée », se plaint Looser d’une voix suffisamment forte pour retentir aux oreilles de ses concurrents. De Lange augmente la cadence, mais pas trop. Après tout, lui et Dorn ont, eux aussi, intérêt à bien répartir leurs efforts. C’est toutefois suffisant pour contraindre Looser à sentir ses limites. L’idée de la Desert Dash a vu le jour à l’occasion d’une longue nuit festive de l’année 2004. L’alcool coulait à flots quand tout à coup, le Namibien Aiden de Lange imagina la proposition suivante : et si on tentait de traverser le désert du Namib en 24 heures ? « Mais tu délires mec, lui a-t-on alors rétorqué, complètement dingue ! » Peu après, de Lange rassemblait quelques-uns de ses amis pour une virée à vélo reliant Windhoek à Swakopmund, en s’arrêtant à mi-chemin pour passer la nuit dans une tente. Un an plus tard se tenait la première course THE RED BULLETIN

Konny Looser remplit sa bouteille au checkpoint 2. Les coureurs de pointe ne font pas de longues pauses.

Les pensées nocturnes sont les pires : était-ce une hyène, un chacal, un lion ?

sur son blog ce jour-là. « Pleins gaz ! » Aujourd’hui, il est bel et bien en train de sillonner le désert à vélo, mais il est loin, très loin de rouler « pleins gaz ». Son estomac gargouille, les ondulations et les bosses des chemins de terre finissent de l’achever. Il vomit à trois reprises, sans même descendre de son vélo.

Dans la nuit noire officielle, réunissant 44 participants à l’époque. En 2021, malgré la pandémie, 24 concurrentes et 187 concurrents prenaient le départ de la course individuelle. Et le sort a voulu que ce soit Tristan, le fils de de Lange, qui rende la vie dure à Looser, lequel connaît parfaitement les stratégies de de Lange. C’est lui qui les lui a enseignées. Il y a deux ans, il avait entraîné le professionnel namibien, et une semaine avant le départ de la Dash, ils se sont préparés ensemble dans le sud aride de la Namibie. Si de Lange le bat aujourd’hui, ce sera avec les armes du Suisse. Les sentiments de Looser envers son disciple oscillent entre fierté, bienveillance et désespoir. Il avait entendu parler du variant Omicron quelque temps avant la course, alors qu’il était sur le point d’embarquer dans l’avion qui était censé le ramener en Suisse. Au dernier moment, il choisit finalement de rester en Namibie. « Ce serait bête de ne pas pouvoir participer à la course après une préparation aussi intense », s’était-il dit. Il s’agit tout de même de défendre sa réputation. “Back in the game for the Dash!”, écrivait-il

Le pire, ce sont les pensées qui assaillent, surtout la nuit. Sans oublier l’univers sonore du désert. Est-ce une hyène que l’on entend au loin ? Un chacal ? Un lion ? L’obscurité est telle que les faisceaux lumineux des lampes sont presque aspirés tout entiers. La visibilité est nulle à plus de cinq ou dix mètres. Après la course, quelques concurrents ont même prétendu avoir vu des fantômes. Une fois les coureurs plongés dans le noir, quand les sens n’ont plus aucun repère auquel s’accrocher, c’est là que la folie entre en scène. « Je suis vidé, complètement vidé, dit Looser. Je devrais peut-être juste abandonner. » Il se ressaisit : « Mais que penseront les autres de moi ? Mes beaux-parents, qui restent éveillés toute la nuit rien que pour moi ? Ma femme, qui m’attend en Suisse ? Mes sponsors ? Tous les rageux qui veulent me voir échouer après six victoires consécutives ? » Il poursuit sa route. Au moins, la demi-lune qui éclaire le ciel cette nuit-là lui accorde un peu de clémence. Le trio de tête éteint brièvement ses lampes afin de profiter pleinement des merveilles nocturnes du désert. Ils voient la constellation d’Orion illuminer la voûte céleste. Orion, qui se prenait lui-même pour le plus grand des 53


Spécial vélo Desert Dash

chasseurs, jusqu’au jour où il succomba à la piqûre d’un scorpion. Cet instant magique prend fin après une poignée de secondes. Aux alentours de deux heures du matin, ils s’approchent du paysage lunaire de Goanikontes, dont les amas de pierres et les cratères laissent définitivement penser que nous foulons le sol d’une autre planète. Hollywood en a fait le décor du blockbuster Mad Max, mais aussi de 2001, l’Odyssée de l’espace. C’est à cet endroit que la course s’est jouée lors des précédentes éditions, et jusqu’à présent, le sort a toujours tourné en faveur de Looser. Le statut d’éternel vainqueur se révélera-t-il une bénédiction ou une malédiction ? Vers trois heures du matin, les coureurs atteignent le dernier des cinq checkpoints. Ils se réapprovisionnent en eau dans l’oasis de Goanikontes. La gourde de Looser est trouée, l’eau ruisselle le long de ses jambes et s’infiltre dans le sable. Rien ne se déroule comme prévu. « Tristan est fort », glisse-t-il à sa belle-mère. Il sait qu’il doit tout donner jusqu’à la ligne d’arrivée dans le sable de Swakopmund. Il ignore où aller puiser les ressources nécessaires. À ce moment de la course, il consomme plus de 900 kilocalories par heure, alors même que son corps tout entier refuse d’ingérer le moindre aliment solide. Seules quelques gorgées de coca et une poignée de shots de caféine maintiennent son organisme en mouvement. Lui-même se demande comment il peut encore tenir sur son vélo.

14 heures, 55 minutes

À 50 kilomètres de l’arrivée, Looser honore la promesse de l’organisateur : il passe à l’attaque. Il distingue au loin les lumières de Swakopmund qui rayonnent comme une bouée de sauvetage dans la nuit. Tout sera bientôt terminé. Looser accélère, il écrase les pédales comme un acharné. Mais cette fois, rien n’y fait, il ne parvient pas à distancer ses concurrents. « Peut-être jouent-ils au chat et à la souris avec moi ? », s’interroge-t-il soudainement, alors que le trio laisse derrière lui le désert et file à travers les rues de Swakopmund. Alliés, de Lange 54

IL L’A FAIT !

Konny Looser sur la ligne d’arrivée à Swakopmund. Il avait gagné ici six années de suite.

Il s’étonne luimême de pouvoir encore se tenir sur son vélo.

et Dorn pourraient facilement se liguer contre lui. Mais ils n’en font rien. À présent, c’est chacun pour soi. L’air dégage des odeurs de sel, leurs poumons se rechargent enfin d’un peu d’humidité, et voilà déjà la plage et la ligne d’arrivée salvatrice qui se dévoilent devant eux. Looser lance le sprint sur le sable. Seulement vingt mètres le séparent de son septième titre. Dix mètres. Trente centimètres. Les spectateurs voient deux coureurs à maillot bleu et casque blanc déferler plein pot sur la ligne d’arrivée avec un écart infime, suivis par un coureur vêtu de blanc et de noir. Quelques mètres plus loin, ils laissent tomber leurs corps atones et leurs vélos dans le sable. Éblouis par les flashs des photographes, ils clignent des yeux, comme s’ils étaient en train de se réveiller. Tout cela s’est-il réellement

passé ? Résultats : Dorn : 14 heures, 55 minutes, 43 secondes. Looser : 14 heures, 55 minutes, 31 secondes. De Lange : 14 heures, 55 minutes, 30 secondes. Looser dira plus tard que de Lange a mérité de l’emporter. Que la course s’est jouée à la loyale et que le plus fort a fini par gagner. Ce n’était tout simplement pas son jour. La frontière entre la victoire et la défaite est particulièrement ténue, c’est la loi du sport, sans quoi tout ça n’aurait aucun intérêt. Après la remise des trophées, la bellemère de Looser se saisit de la coupe, un simple morceau de bois orné d’une gravure en forme de deux. « Il nous servira de bois de feu pour notre prochain braai », s’amuse-t-elle. Pendant un bref instant, Looser oublie sa déception et rit de bon cœur. Dans la lumière du jour, tout a l’air différent, plus accueillant. Il quitte le chapiteau de Swakopmund bien avant la fin du spectacle d’après-course. Il a l’intention de prendre l’avion dès le lendemain, direction Zurich. Plus rien ne le retient en Namibie pour le moment. Au final, tout le monde n’a d’yeux que pour le vainqueur. Pas vrai ? desertdashnamibia.com THE RED BULLETIN


LA POUSSIÈRE

De Lange (à l’arrière), Dorn (au centre) et Konny Looser roulent vers le soleil couchant.


Dans la roue d’une légende

Envie d’un Tour de France ? Véritable puriste du vélo, le Bernois PATRICK SEABASE nous emmène sur une des deux étapes suisses de la Grande Boucle édition 2022. Texte SIMON SCHREYER

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Photos PHIL GALE

THE RED BULLETIN


Spécial vélo Tour de France

UN PEU DE HAUTEUR

Patrick Seabase lors de la montée au Pas de Morgins, à 1 377 m d’altitude.


Spécial vélo Tour de France

Des montagnes, de la sueur et des montées à couper le souffle : le Tour de France sera de retour en Suisse en 2022. Le puriste cycliste bernois Patrick Seabase, 38 ans, nous emmène sur la deuxième étape suisse de la course légendaire.

Située près du lac Léman, Aigle sera cet été le théâtre du départ de la neuvième étape de la Grande Boucle qui y repasse après une escapade dans l’Oberland bernois avant de se poursuivre sur 38 kilomètres jusqu’à la frontière française. Une étape de montagne de 183 kilomètres avec quelques 3 700 mètres de dénivelé au menu. La journée est longue, je passe environ sept heures sur mon vélo. Ceux qui sont déjà familiers de ce genre de terrain et des longues distances devraient mettre sensiblement le même temps, mais rien n’empêche les coureurs chevronnés de faire cette étape en plusieurs jours pour profiter du paysage. Le parcours est judicieux pour deux raisons : il est tactique et part d’Aigle, le siège de l’Union Cycliste Internationale (UCI) pour y repasser une seconde fois à quarante kilomètres de l’arrivée. Quinze kilomètres après le départ, nous atteignons la charmante ville de Montreux, nichée au bord du lac Léman. L’un de mes endroits préférés. À partir d’ici, la route continue à serpenter vers l’est, à travers le « Lavaux », ces 830 hectares de vignobles en terrasses inscrits au patrimoine mondial de l’UNESCO. La pente se fait graduellement plus raide, nous prenons de l’altitude. S’il fait beau, un arrêt s’impose pour profiter de la vue imprenable sur l’immensité du lac ! N’hésitez pas non plus à faire une pause à Chexbres dans le décor

Les vignobles en terrasses de Lavaux, inscrits au patrimoine de l’UNESCO, offrent un panorama magnifique au bord du lac Léman.

A

près un hiatus de cinq ans, le Tour revient en Suisse pour les huitième et neuvième étapes. Je vous invite à m’accompagner sur cette neuvième étape pleine de contrastes. Je m’appelle Patrick Seabase, j’ai 38 ans et j’ai commencé à faire du vélo à l’âge de trois ans. Hugo Koblet (1925-1964), vainqueur du tour de France en 1951, a été l’un de mes premiers héros. J’admirais ce cycliste zurichois autant préoccupé par ses performances que par son apparence. J’ai moi-même participé à quelques courses quand j’étais plus jeune, mais je me suis vite lassé de ce cirque et ai choisi d’approcher ma carrière de manière plus individuelle. Petite précision : être au centre de l’attention et faire de la compétition ne m’intéressent pas.

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183 km de pur bonheur à vélo : Patrick Seabase à Châtel.

« Lors de telles randonnées à vélo, tu apprends à dépasser tes propres limites. » THE RED BULLETIN


Bulle

3 GRUYÈRES

« Les petits villages et hameaux agricoles nous donnent l’impression d’être au XIXe siècle. »

Châtel-Saint-Denis

Côte de Chexbres Rossinière 2 LAVAUX

1

MONTREUX

Col des Mosses

Les Diablerets

DÉPART AIGLE (SUI)

PAS DE MORGINS

COL DE LA CROIX 4

Aigle

Monthey

5 ARRIVÉE CHÂTEL LES PORTES (FRA)

Berne

Étape 9

ÇA VAUT LE

DÉTOUR

Les cinq plus beaux endroits de la neuvième étape du Tour de France 2022 selon Patrick Seabase. 1. MONTREUX

Cette ville au flair méditerranéen se situe sur les rives du lac Léman. Je me suis déjà rendu plus de vingt fois au célèbre festival de jazz, qui se déroule chaque année au mois de juillet.

2. LAVAUX

Il s’agit de la première pépite de la journée, ce paysage est inscrit au patrimoine mondial de l’UNESCO. La vue s’étend sur les vignobles en terrasses et le lac Léman.

THE RED BULLETIN

3. GRUYÈRES

La petite ville médiévale est un bijou idyllique et intemporel. C’est sans conteste l’un des endroits les plus exaltants de l’étape, principalement pour le musée Giger et son univers fantastique tout à fait inattendu.

4. COL DE LA CROIX

La montée la plus difficile de l’étape. Ambiance de haute montagne avec les imposantes Alpes bernoises en toile de fond.

5. PAS DE MORGINS

Depuis le col, situé à moyenne altitude et à cheval sur la frontière franco-suisse, on peut regarder les Dents du Midi dans le fond des yeux.

Le charmant Café de la Poste à Chexbres, un village de 2 000 âmes.

de carte postale du vieux Café de la Poste. Nous atteignons Bulle trente kilomètres plus loin (déjà 60 des 183 km dans les jambes) et roulons à présent sur les routes vallonnées des Préalpes fribourgeoises, le regard happé par les magnifiques cimes du Gastlosen, du Vanil Noir et du Moléson, qui culminent à plus de 2 000 mètres d’altitude. Nous arrivons bientôt à Gruyères. C’est l’occasion d’acheter de quoi s’alimenter et de remplir nos bouteilles d’eau à la fontaine. C’est l’un des grands avantages de la Suisse : on trouve de l’eau potable presque partout. Du grand luxe ! Besoin d’une petite parenthèse culturelle ? Montez jusqu’au château de Saint-Germain qui abrite un musée consacré à l’œuvre du sculpteur et dessinateur H.R. Giger, créateur du monstre « Alien ». En nous enfonçant dans la vallée parsemée de petits villages et hameaux agricoles, on a l’impression d’être revenu au XIXe siècle. À 908 mètres, Rossinière est un véritable village de conte de fées qui abrite l’incroyable Grand Chalet du peintre Balthus. L’ascension continue sur une pente étroite jusqu’au col des Mosses, encore sous la ligne des arbres à 1 445 mètres d’altitude. Nous avons parcouru presque 100 kilomètres. La montée vers le col, ponctuée par trois virages en épingle, est assez tranquille et ne présente pas de difficulté majeure. 59


Spécial vélo Tour de France

1778 m Col 394 demla Aigle Croix 1445 m Col des Mosses 1377 m Pas de Morgins 1297 m Châtel Les Portes

L’étape est bientôt terminée : Patrick sur le Pas de Morgins.

60

1147 m Les Diablerets

908 m Rossinière 810 m Châtel-Saint-Denis 806 m Bulle 558 m Côte de Chexbres 387 m Montreux

399 m Monthey

183 km

173,5 km

156,5 km

145 km

113 km

122,5 km

99,5 km

83,5 km

59 km

394 m Aigle

40,5 km

28,5 km

15 km

394 m Aigle

Départ

Pour moi qui suis Suisse, le coin n’est pas très marquant : visuellement, il ressemble à n’importe quel autre endroit des Préalpes. Après une courte descente, nous continuons vers Les Diablerets, une station bien connue des skieurs située au pied d’un gigantesque massif montagneux au sein duquel trône le fameux domaine skiable de Glacier 3000. Si vous avez le temps, n’hésitez pas à explorer ce paysage alpestre peuplé, si l’on en croit la légende, de petits diables. Sinon, la vue depuis la route vaut déjà son pesant d’or ! Après une impitoyable ascension à 7,6 %, nous atteignons enfin le col de la Croix. À 1 778 mètres, c’est le point culminant de notre étape et le seul endroit du parcours que l’on peut véritablement qualifier de haute montagne. C’est le moment de boire, manger et faire un break. Il est important de reprendre des forces et ses esprits avant la descente, histoire d’aborder celle-ci dans les meilleures conditions. Nous laissons le paysage escarpé des Alpes bernoises derrière nous et dévalons la pente le long d’une série de virages serrés en direction de Villars-sur-Ollon. 23 kilomètres après le col de la Croix et 1 384 mètres plus bas, nous retrouvons notre terrain de départ, Aigle se profile bientôt. Fin du parcours ? Non, car c’est le Tour de France ! Une fin d’étape exceptionnelle nous attend, c’est le moment d’appuyer sur les pédales direction sud-ouest où, après la traversée du Rhône, nous entamons une ascension d’une vingtaine de kilomètres à 6,1 % de moyenne sur des routes

DES HAUTS ET DES BAS

RELIEF CAPRICIEUX

La neuvième étape du Tour de France nous emmène sur 183 kilomètres et 3 700 mètres de dénivelé. Cette étape du Tour de France traverse des villes, des collines et des montagnes. Après Montreux, la pente devient plus raide, on prend de l’altitude. La première montée abrupte mène à 1 445 mètres au col des Mosses, suivie d’une courte descente vers les Diablerets. La montée la plus difficile est celle du col de la Croix (pente : 7,6 %), qui est aussi le point culminant de l’étape avec 1 778 mètres. Suivent de longues descentes avant de repasser par Aigle et de se concentrer sur la dernière ascension : 20 kilomètres de montée vers le Pas de Morgins (pente : 6,1 %) à 1 377 mètres.

larges et dégagées qui nous emmènent au Pas de Morgins, à 1 370 mètres d’altitude, dans un décor préalpin typique de la Suisse romande. Depuis les lacets près de Troistorrents, j’apprécie particulièrement la vue sur les sommets des Dents du Midi, qui culminent à 3 000 mètre au sud. Une vue qui nous accompagne jusqu’à Morgins, où nous traversons la frontière française pour atteindre les Portes du Soleil, l’un des domaines skiables les plus idylliques du coin. Si vous avez trop chaud après la montée depuis la vallée du Rhône, n’hésitez pas à piquer une tête dans le lac de Morgins avant de vous lancer dans la dernière difficulté de la journée, une montée de quatre kilomètres jusqu’à la ligne d’arrivée à Châtel Les Portes du Soleil. Encore un conseil et quelques réflexions : si vous voulez vous épargner THE RED BULLETIN


« La descente, c’est le moment où le vent me rafraîchit et où la vitesse me chatouille les nerfs. L’intérêt est de se battre pour obtenir cette récompense. »

Après 183 km, l’étape se termine à Châtel, en France.

le final vers la France, garez votre voiture à Aigle et n’emportez que l’indispensable avec vous. Soyez indépendants ! Gravir un sommet à vélo par ses propres moyens est extrêmement gratifiant : cela permet de s’impressionner soi-même. Je ne cherche à impressionner personne d’autre que moi. Psychologiquement, ce genre de sorties nous apprend à dépasser nos propres limites sans que cela soit synonyme de souffrance. Je ne prends aucun plaisir non plus à souffrir : c’est surtout la fluidité et les bonnes sensations que je recherche sur la route. Ce qui compte finalement c’est d’entrer dans une transe agréable, d’atteindre le flow tout en couvant la beauté du paysage des yeux. En montée, j’ai parfois l’impression d’être sous l’eau à cause de cette légère pression qui s’exerce sur les tympans en prenant de l’altitude, et aussi à cause de l’économie de mouvements, qui donnent le sentiment d’être au ralenti. Puis vient la récompense : la descente, le vent rafraîchissant et la vitesse qui titille nos nerfs. C’est ce qui fait le sel de tout ça : se donner à fond, aller au bout de soi, lutter pour cette récompense. Dans la vie, ce pour quoi on se bat résonne toujours plus longtemps en nous que ce qui arrive par hasard. Gagner le Tour de France ou reproduire une étape à son propre rythme revient au même : c’est une performance individuelle, un moment qui n’appartient qu’à soi. C’est une sorte d’égoïsme sain, qui ne s’opère pas au détriment des autres. Je considère d’ailleurs que c’est le seul égoïsme à la fois acceptable et propice à l’inspiration. Car c’est de cette confrontation et de cette sollicitation du corps et de l’esprit, l’un permettant de repousser les limites de l’autre, que naît l’équilibre. Patrick Seabase à son arrivée à Châtel, France. THE RED BULLETIN

Instagram : @patrickseabase

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Le long périple d’Afsana À 18 ans, AFSANA NAWROZI est une figure de proue de la lutte contre l’oppression et la misogynie, qu’elle livre avec son vélo pour arme. Voici l’histoire de la meilleure coureuse cycliste afghane et de sa nouvelle vie aux États-Unis. Texte JAMES STOUT Photos JASON PERRY


Spécial vélo Gravel

« Je me dis toujours : “Afsana, tu es forte” », dit Nawrozi, photographiée ici en janvier 2022 près de Sedona, en Arizona.

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Spécial vélo Gravel

S

Nouveau monde : Afsana, après quelques mois, connaît les sentiers de Sedona par cœur.

edona est une ville d’Arizona. Ce patelin de 10 000 âmes niché au pied du plateau du Colorado, à une heure de route au nord de Flagstaff, est au VTT ce que l’Arlberg est au ski : un endroit qu’il faut avoir vu et dont il faut avoir dévalé les pistes au moins une fois dans sa vie. Rares sont les riders qui n’y mordent jamais la poussière, et après quelques jours passés à sillonner ces sentiers, le retour au bercail se fait généralement avec quelques bleus en guise de souvenirs. Afsana Nawrozi a élu domicile ici en octobre 2021, pour un bail qui semble ne pas devoir expirer de sitôt. Elle a amassé plus de bleus que la plupart des riders, sans jamais renoncer. Puis un jour, elle cessa de tomber de son vélo. Sa maîtrise des différents parcours était devenue telle que ni la montagne ni les pistes n’étaient plus en mesure de la mettre à terre. Et il y a plus étonnant dans l’histoire : Afsana Nawrozi est tout juste âgée de 18 ans. Originaire d’Afghanistan, elle est en réalité une spécialiste de la route. Aujourd’hui, elle explore les Red Rocks de Sedona au guidon de son VTT violet, un modèle Santa Cruz de Juliana équipé d’accessoires assortis. « Au début, je n’arrêtais pas de chuter sur ces circuits. Maintenant, je ne comprends plus pourquoi c’était si difficile à l’époque. Ça passe crème ! » Afsana mène une vie on ne peut plus relax. Alors qu’elle nous conduit à travers le campus de son lycée de Sedona, elle laisse transparaître une décontraction

mêlée de désinvolture. Pourtant, il devient rapidement évident que cette sérénité a été acquise de haute lutte. Elle évoque la misogynie à laquelle elle a été confrontée dans son pays natal et les résistances qu’elle a dû vaincre en tant que femme athlète. Comme toute femme pratiquant le vélo en Afghanistan, le harcèlement et l’hostilité faisaient partie de son quotidien, et chacune de ses sorties s’apparentait à un acte de bravoure. Comme ce jour où Asfana s’était rendue à Bamyan pour participer à une course nationale. Après une session d’entraînement, un groupe d’hommes l’attendaient au tournant pour lui jeter des pierres et l’asperger de boue. Car en plus d’être la capitale afghane du cyclisme, Bamyan est aussi l’un des principaux bastions des talibans. Or, dans l’esprit de ces derniers, l’idée qu’une femme puisse participer à une compétition cycliste est loin d’être aussi admise que dans le reste du monde. « J’avais terriblement peur et je pleurais, relate Asfana Nawrozi. Mais ça ne m’a pas empêchée de participer à la course le lendemain. Je me suis simplement dit : “Afsana, tu es forte.” » Les hommes qui l’ont mitraillée de pierres au seul prétexte qu’elle était une fille qui se permettait d’enfourcher un vélo étaient bien des talibans. En 2021, ce mouvement politique ultra-conservateur a repris le contrôle de l’Afghanistan, son pays d’origine qui lui manque tant. Le pays dans lequel vivent ses parents, ses six frères et sœurs, et ses amis. Un pays dont elle ne peut plus fouler le sol. Un retour

En Afghanistan, des hommes lui ont jeté des pierres parce qu’elle faisait du vélo. 65


Spécial vélo Gravel

sur ses terres natales l’exposerait à de trop grands dangers et mettrait un terme immédiat à sa carrière de cycliste. Elle serait aussi privée de tout espoir de mener un jour une vie de femme indépendante.

Son carburant : l’ambition sportive

Nawrazi est désormais une femme indépendante. Elle aimerait un jour devenir ingénieure « ou cycliste professionnelle ». Les deux options sont envisageables. Elle remplit tous les critères pour concrétiser la seconde : depuis 2016, elle s’entraîne avec détermination et ambition, et est considérée comme une cycliste exceptionnellement talentueuse depuis sa toute première course. À peine commençait-elle à prendre son sport au sérieux qu’elle décrochait déjà une quatrième place dès ses premiers pas en compétition. À l’âge de 15 ans, elle intégrait l’équipe nationale de cyclisme d’Afghanistan. Malgré les mauvais tours joués par les talibans, elle s’entraînait au centre d’entraînement situé tout autour de Bamyan et y a établi de nombreux records de pistes. Des exploits qui lui ont valu une certaine renommée dans son pays. Si elle reste aujourd’hui solidement accrochée à son guidon, elle le doit exclusivement à Ahmad Farid Noori, le fondateur de l’ONG MTB Afghanistan. Il a décelé chez elle un fort potentiel. L’Arizona, sa nouvelle terre d’accueil, est le théâtre de nombreuses courses cyclistes qui lui donnent l’occasion de faire ses preuves. Elle manifeste un intérêt marqué pour les courses longue distance en gravel, discipline très en vogue du moment. « Je ne cours pas pour gagner. Je cours pour que le cyclisme devienne une chose normale pour les femmes en Afghanistan ! » Elle puise sa motivation dans un savant mélange d’ambition sportive et d’idéalisme militant. « En Afghanistan, on se doit d’être une militante avant d’être une coureuse cycliste. Il s’agit de s’engager et de se battre pour sa passion ! » Le parcours de Nawrozi se révèle cahoteux, voire sinueux, ce que met également en lumière son voyage à Sedona. L’été dernier, elle apprenait qu’elle avait été admise à l’école de ses rêves en Arizona. Elle prend alors le premier vol de sa vie, direction Islamabad, capitale du Pakistan, afin d’y retirer son visa pour les ÉtatsUnis. Elle était censée rentrer à Kaboul 66

« En Afghanistan, on est d’abord une activiste, ensuite une cycliste. » quelques jours plus tard pour se préparer à l’année scolaire à venir, celle qui devait lui ouvrir les portes de l’université. Mais rien ne se passa comme prévu. « Au moment où l’avion prenait son envol, tout était encore normal et habituel », raconte-t-elle. Mais une fois arrivée au Pakistan, la situation prit une tournure dramatique. En août 2021, le monde entier assistait médusé au retour fracassant des talibans qui, en l’espace de quelques jours, étaient parvenus à se rendre maîtres du pays en terrassant

l’armée afghane après le retrait des dernières troupes américaines. Afsana suivait les événements devant la télé de sa famille d’accueil au Pakistan. Elle avait peur pour son pays et craignait pour son avenir. Alors que ses proches l’imploraient de se tenir éloignée du tumulte, elle tenait plus que tout à retourner auprès des siens. Elle n’en eut pas l’occasion, les talibans ayant fermé la frontière avec le Pakistan. Afsana était donc prise au piège dans un pays étranger, alors même que son visa était sur le point d’expirer. Le chemin du retour étant bloqué, elle s’efforçait de parachever les formalités administratives nécessaires à son voyage aux États-Unis. Mais l’afflux de demandes de visa déposées par les réfugiés afghans était tel que les services d’immigration américains se sont vite retrouvés débordés.

De nouvelles voies en Arizona : Afsana Nawrozi veut participer à des courses sur route, en VTT et en gravel. THE RED BULLETIN


Optimiste : Afsana Nawrozi s’est merveilleusement bien adaptée à sa nouvelle vie en Arizona, USA.

C’est au cours de ce séjour forcé au Pakistan qu’Afsana et moi avons commencé à échanger quelques mails. Au vu de l’immense incertitude qui planait alors sur son avenir, il paraissait inconcevable qu’elle puisse garder un moral d’acier. Mais en dépit de ces tristes circonstances, je découvrais une ado foncièrement positive, qui ponctuait le moindre de ses messages d’un smiley hilare. Une force de caractère qui m’a durablement marqué. Son séjour à Islamabad a duré 90 jours et a mis ses nerfs à rude épreuve. Elle attendais des nouvelles de l’ambassade américaine quant à l’avancement de sa demande de passeport et de visa. Et de sa famille. La délivrance est intervenue au mois octobre : elle tenait enfin le visa tant espéré entre ses mains. Quelques jours plus tard, elle s’envolait pour Chicago, avant de poursuivre sa route vers l’Arizona, direction Sedona.

Nouvelle culture, nouveau système

A-t-elle fait le bon choix en s’installant à Sedona alors même que sa famille était restée coincée en Afghanistan ? Cette question ne cesse de tarauder l’esprit d’Afsana. Elle est née quelques années après la chute de la première dictature talibane. Elle ne connaît la dureté de la vie sous ce THE RED BULLETIN

régime ultra-fondamentaliste qu’à travers les récits qui lui ont été rapportés. Elle a en revanche eu à souffrir directement de la discrimination envers sa communauté. Car Afsana et sa famille sont des Hazaras. Bien que de confession musulmane, ce peuple d’Afghanistan constitue une minorité ethnique. Ces épreuves l’ont marquée à vie et ont forgé sa combativité. Une combativité qui lui rend encore bien des services dans sa nouvelle vie. Les défis qui se présentent sur la route d’Afsana n’ont plus rien à voir avec la discrimination, la persécution ou la violence.

« Je roule pour que le vélo devienne quelque chose de normal pour les femmes dans mon pays. »

Ils n’en sont pas moins difficiles à relever. Désormais, il s’agit de s’adapter à un nouveau système, à une nouvelle culture, et de maintenir un équilibre entre parcours universitaire et carrière sportive. Autant de challenges qu’elle n’affronte pas seule : la cycliste pro Starla Teddergreen et son mari Gino Zahnd ont fourni à Afsana de nouveaux vélos, ont veillé sur elle et l’ont soutenue tout au long de sa phase d’acclimatation. Ils ont même loué une maison de vacances près de Sedona, afin de partir à l’assaut des pistes en compagnie de leur protégée. Jamais Afsana n’aurait imaginé qu’un jour, elle recevrait autant d’aide. Elle s’est merveilleusement adaptée à son pays d’adoption. Mais il y a des choses auxquelles elle peine encore à s’habituer. Pour la première fois de sa vie, elle dort seule dans sa propre chambre, et elle regrette parfois de ne plus pouvoir faire chambre commune avec ses sœurs. Quelles compétitions a-t-elle dans le viseur ? « Beaucoup trop ! », lâche-t-elle en riant. Le choix de courses sur route, de courses de VTT ou de courses de gravel est tellement vaste que ses vacances d’été ne suffiraient pas à les courir toutes. Son goût pour la polyvalence lui vient peutêtre de son admiration pour Peter Sagan. Sacré champion du monde à trois reprises, il est réputé pour ses qualités de sprinter, ses aptitudes techniques, et pour sa faculté à monter et descendre les escaliers sur son vélo de course. Sagan est également connu pour son célèbre tatouage Why so serious? et son étonnante capacité à dominer ses concurrents sans rien perdre de sa légendaire décontraction. Il se garde de prendre l’échec trop au sérieux et ne laisse pas le succès changer sa personnalité. Autant de qualités qui inspirent à Afsana un profond respect. Elle m’a appris à dire « baraka buri »en dari, sa langue maternelle, ce qui signifie quelque chose comme : « C’est parti ! » Cette devise s’apparente chez elle à un genre de philosophie de vie, mais résonne aussi comme un appel aux jeunes femmes à vivre leur vie comme elles l’entendent, quels que soient les obstacles qui se dressent sur leur chemin. Nawrozi ne sait pas encore où son chemin la mènera, mais cela ne l’inquiète pas pour autant. Car une chose est sûre : où qu’elle aille, jamais son vélo ne la quittera. 67


Spécial vélo VTT

ADRIAN GUGGEMOS À 28 ans, cet Allemand pro de motocross et de VTT fait rêver près de 150 000 fans avec ses figures sur deux-roues. Retrouvez Adrian sur Instagram : @ag141

1.

La position de base

Comme son nom l’indique, c’est la posture de base pour le trail et pour toutes les figures. Les pédales à l’horizontale, le bassin bien droit, le haut du corps penché vers l’avant, la tête au-dessus du guidon. Les genoux légèrement fléchis pour rester souple. Les deux mains sur le guidon, coudes vers l’extérieur, deux doigts posés sur les leviers de frein et le regard vers la roue avant.

Cours intensif de VTT Pro du deux-roues, ADRIAN GUGGEMOS nous dévoile cinq techniques indispensables pour bien débuter en VTT. Texte MAXIMILIAN REICH

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THE RED BULLETIN


« La règle numéro un en VTT : s’entraîner, s’entraîner, et surtout : s’entraîner. »

3.

4. Le surplace

Le plus simple est de commencer sur du plat. En position de base, on tourne la roue avant en biais pour garder plus facilement l’équilibre et on joue avec le frein avant et la pression sur les pédales pour créer une tension dans le vélo. Bien penser à fixer son regard wau loin et surtout : de l’entraînement.

ANNIKA BERGFELDER @ANNIKARIDES

TOM MACKINGER

2.

Le virage relevé

Dans un virage relevé, le sol est incliné. C’est pour ça que le vélo et le haut du corps sont de biais. Prolongement vertical du vélo, c’est le corps qui permet au poids de rester centré sur le VTT. La ligne épaules-bassin est orientée dans le sens de déplacement. C’est clair ? Enchaînons : aborder le virage par l’extérieur, jamais par l’intérieur. « Aborder » n’est pas vraiment le terme exact. On n’entre pas dans un virage, on s’enroule dedans. Et pas de freinage brusque, mais un frottement souple et continu.

Descente de marches

Plus on roule vite, plus les descentes sont fluides. Mais le débutant doit commencer lentement : le corps fléchi et tiré vers l’arrière pour rester centré quand la roue avant passe le bord de la marche. Privilégier un freinage continu en douceur : un freinage trop brusque et la roue arrière se décolle, on risque de passer par-dessus le guidon. Avant la dernière marche, relâcher les freins et redresser le haut du corps pour amortir l’impact au sol.

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5.

Le drop

Le drop consiste à sauter d’un point plat en hauteur comme un mur ou un trottoir. On reprend la position de base, buste légèrement fléchi, on roule vers le bord. À ce moment-là, on relève le guidon tout en poussant sur les pédales avec les talons et on maintient cette position jusqu’à ce que les deux roues aient franchi le bord. C’est pour ça qu’il est préférable d’aborder le drop à bonne vitesse pour éviter de garder la roue en l’air trop longtemps. Si on atterrit sur du plat, les deux roues doivent toucher le sol en même temps. En pente, la roue arrière en premier. 69


Spécial vélo Bikes & accessoires

QUE DE BELLES CHOSES !

Pas de nouvelle saison de vélo sans son festival d’innovations ! Petite sélection du meilleur de 2022 pour des moments inoubliables sur deux roues. Texte WERNER JESSNER

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Prochaine étape de l’évolution SPECIALIZED KENEVO SL Marre des ebikes trop lents ou trop lourds ? Place au Kenevo SL et ses 5,5 kilos de moins que le Kenevo classique ! Le cadre en carbone de ce poids plume abrite une batterie 320 Wh et un moteur électrique de 240 watts. Conduite dynamique garantie grâce aux six points de pivot de la suspension arrière, un favori du champion de descente Loïc Bruni lors de la Coupe du monde UCI. Env. 16 000 CHF ; specialized.com

Plaisir retrouvé, Kenevo SL signe la fin des vélos électriques trop lourds. THE RED BULLETIN

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Spécial vélo Bikes & accessoires

Ascenseur sur deux roues KTM MACINA PROWLER EXONIC Avec un débattement avant de 170 mm, ce VTT est prêt à conquérir les bikeparks et les montées qu’il avalera en souplesse grâce aux suspensions intégrales Fox Factory. Le montage « Mullet », avec roue avant de 29 pouces et roue arrière de 27,5, offre une traction idéale en montée comme en descente. Moteur avec batterie Bosch 750 Wh facile à enlever, écran pour vérifier l’état de charge. Env. 10 600 CHF ; ktm-bikes.at

Sur ce vélo, la roue avant est plus grande que la roue arrière.

La montagne, ça vous gagne SAC À DOS TATONKA MTB 14

Que la lumière soit LUPINE ALPHA Quand le champion de trial Tom Öhler travaille sur ses tricks jusqu’au bout de la nuit, il sait qu’il peut compter sur sa Lupine Alpha pour rentrer chez lui. Elle éclaire les chemins comme en plein jour. Six lentilles, trois types d’éclairage et une luminosité max. de 570 lux – 57 fois la puissance prescrite par la législation allemande ! La Lupine se démonte en un clin d’œil pour vos sorties sous le soleil. Env. 1 110 CHF ; lupine.de

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Un bon sac à dos de VTT, c’est un investissement à long terme. Promesse tenue par le fabricant haut de gamme Tatonka avec son Bike Backpack MTB. Idéal pour les sorties d’un jour ou d’un week-end, grâce à son volume de 14 litres, ses fonctions séduisantes avec son système ergonomique, son porte-casque et sa housse anti-pluie : un compagnon solide pour l’aventure. Env. 130 CHF ; tatonka.com

Un bon compromis entre volume (14 L) et liberté de mouvement. THE RED BULLETIN


À toute épreuve ABUS AIRDROP MIPS Le premier casque intégral d’ABUS est équipé du MIPS, un système utilisé pour les casques haut de gamme. La fixation de la visière est composée des points de rupture afin d’éviter les blessures, tout comme les bords de la mentonnière pour protéger la clavicule. Et il est compatible avec QUIN, cette puce qui détecte les chocs et envoie un signal aux contacts d’urgence en cas de chute. Env. 240 CHF ; abus.com

Ce casque appelle à l’aide en cas d’urgence.

Transmission 2.0

Contre la rampe

STROMER ST3 PINION

GIANT REVOLT E+

Le Stromer ST3 dispose d’une transmission intégrée Pinion à 9 vitesses et d’un entraînement en carbone par courroie. La plage de transmission de 568 % permet de changer les vitesses à l’arrêt. Grâce à une batterie de 983 Wh, il est possible de parcourir 180km par charge. Placé dans la roue arrière, le moteur de 820 watts permet d’atteindre 45 km/h. Protection antivol grâce à la localisation GPS. Env. 8 400 CHF ; stromerbike.com

La révolution du ebike atteint le gravel avec le Revolt E+ de Giant. Cadre en alu, batterie de 500 Wh montée dans le tube diagonal aérodynamique et reliée à un moteur Shimano pour parcourir jusqu’à 160 km dans les meilleures conditions sur ce modèle de 17,8 kilos. Fini de trembler devant les grosses montées ! Env. 5 300 CHF ; giant-bicycles.com

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Spécial vélo Bikes & accessoires

Comme un champion

Un pour tous

GHOST NIRVANA 4X

ROSE BONERO

Des championnats du monde au Crankworx, Tomáš Slavík a déjà tout gagné en four-cross. 2022 marque sa dixième saison pour l’équipe allemande Ghost. Pour tous ceux prêts à suivre les traces du champion entre dirt jumps et pumptracks, voici le Nirvana 4X : cadre en alu direct et agile, singlespeed, freins à disque et fourche à suspension X-Fusion Slant 34 RC pour plus de sécurité lors des atterrissages. Env. 1 420 CHF ; ghost-bikes.com

Petit ou grand (XS avec roues de 27,5 pouces ou XXL avec roues de 29 pouces), débutant ou confirmé, pour s’entraîner ou pour voyager : avec son nouveau Bonero, le fabricant allemand à décidé de s’adresser à un public très large. Cadre aluminium, débattement de 140mm, 12 vitesses et détails pratiques comme l’option de montage pour porte-bagages. Trois modèles différents disponibles. Env. 1 530 CHF ; rosebikes.de

Super héros olympique SCOTT SPARK RC Avec deux victoires olympiques et plusieurs titres de champion du monde, le Spark est le VTT toutsuspendu le plus titré de l’histoire. Le Spark nouvelle génération se veut encore plus performant en descente avec son débattement de 120 mm et son cintre plus plat. Adieu amortisseur et câbles pleins de boue, ils sont désormais intégrés dans le cadre. Env. 10 170 CHF ; scott-sports.com

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Montée en vitesse constante, descente plus rapide.


Le précurseur HAIBIKE ALLMTN SE

Un classique avec un équipement de pointe.

Le fabricant allemand Haibike a vite vu venir la tendance des e-VTT. Son nouveau modèle carbone souligne son savoir-faire : moteur Yamaha et batterie de 600 Wh, plus la crème de la crème du moment avec la suspension Öhlins, le dérailleur SRAM XX1 Eagle et les freins Shimano XTR. Env. 10 170 CHF ; haibike.de

Souplesse et durabilité MONS ROYALE MOMENTUM 2.0 Place à la durabilité pour la prestigieuse marque néo-zélandaise avec la laine de mouton mérinos : thermorégulatrice, douce pour la peau, antibactérienne, c’est le nouveau composant phare de plusieurs produits spécialisés comme ce short Momentum 2.0. Coutures bien placées, robustesse, taille adaptable et poches pratiques : modèle homme ou femme, le partenaire idéal de vos sorties vélo. 140 CHF ; monsroyale.com

Signé Wibmer GANTS ZANIER SIGNÉS GABRIEL WIBMER

Logique : durabilité signifie aussi longévité.

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Fabio et Gabriel Wibmer marquent le monde du VTT (voire celui de la moto) de leur empreinte. Gabriel Wibmer s’associe à Zanier, le spécialiste du gant, pour un modèle personnalisé : couleur de son choix, impression silicone sur la paume, dos soyeux, compatibilité touchscreen et le petit truc en plus : sa signature des deux côtés du gant. Qui dit style dit Wibmer ! 40 CHF ; zanier.com

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PERSPECTIVES Expériences et équipements pour une vie améliorée

DE BAS EN HAUT !

GLORIA RAMIREZ PHOTOGRAPHY @GLORIAPATTYPHOTO AND MATT RAY

MATT RAY

L’escalade sur l’île grecque de Kálymnos en mer Égée

Non sujet au vertige : l’écrivain voyageur Matt Ray empruntant la voie Axium (6c+) à Kálymnos.

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La lumière du couchant sur le village de Masouri qui est le point de rencontre des grimpeurs.

« Nous gravissons une paroi de 30 mètres nommée Ghost Kitchen. J’en oublie presque de respirer. » Matt Ray, grimpeur et écrivain voyageur

L

a main recouverte de craie blanche, je tâtonne le calcaire orange et saisis une saillie. Mon avant-bras brûle sous l’effet de l’acide lactique. Le sol est 30 mètres plus bas. « Garde le corps tendu », m’exhorté-je avant de contracter les muscles du tronc si fort que j’en oublie presque de respirer. Nous gravissons la voie Axium sur un rocher au nom fantomatique de Ghost Kitchen, classé 6c+, difficulté moyenne à élevée. Ghost Kitchen sur l’île grecque de Kálymnos est l’une des nombreuses formations calcaires idéales pour l’escalade. Je prends une vive inspiration et enfonce mes doigts dans une cavité. Puis, je prends appui avec mon pied droit sur une minuscule saillie oblique afin de me propulser vers le haut. Mon corps se crispe. Mes bras s’engourdissent. Mes doigts lâchent et je m’entends hurler : « Je tombe ! » Mon corps chute dans le vide un instant. La corde fixée à mon harnais se raidit puis se bloque dans le mousqueton vissé au rocher. Une secousse traverse mon corps et la chute s’arrête. Impuissant, je remue dans le vide, bercé par le vent. Une incroyable vue s’offre à mon regard : une sorte de plafond orange recouvre la cuvette de pierre qu’on aurait dit sculptée par un titan de la mythologie grecque. Au loin

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s’étendent des prairies rocheuses tapissées de thym sauvage. Et plus bas encore scintille la mer Égée bleu azur. Jamais chute ne fut aussi belle.

La plage de Masouri : idéale pour piquer une tête après l’effort.

L’île aux 3 400 voies Kálymnos n’est devenue un haut lieu de l’escale que récemment. C’est dans les années 1990 que les grimpeurs sportifs découvrent cette partie de l’archipel et l’incroyable diversité de ses formations calcaires. Le guide d’escalade actuel édité en 2019 y répertorie 3 400 voies alors que l’édition de 2015 en listait 2 700. De nouvelles voies viennent sans cesse allonger la liste. Kálymnos est pour moi l’occasion de tester mes limites. Les pitons en acier inoxydable fixés dans la paroi et dans lesquels on accroche la corde font de l’escalade sportive la plus sûre de toutes les formes d’escalade. Le niveau de difficulté des voies de l’île va de 4 à 9. Avec mon niveau d’expérience, le Ghost THE RED BULLETIN


PERSPECTIVES voyage

Voyage Transport : un vol pour Kos, l’île voisine, puis direction le port de Mastichari (en bus ou en taxi depuis l’aéroport) puis, un ferry pour Kálymnos (temps de traversée : 30 à 45 minutes). Se loger : entre le MasouriBlu BoutiqueHotel, l’hôtel Elena Village et ses nombreuses chambres, les nombreux appartements destinés aux grimpeurs — l’hébergement est disponible dans le village Masouri ou dans des localités à proximité des falaises.

Grèce

Athènes

Notre protagoniste sur la voie 7b Omiros dans le secteur Odyssey : le guide d’escalade de Kálymnos classe les falaises par niveau de difficulté.

Masouri KÁLYMNOS Pothia

MATT RAY (2), GLORIA RAMIREZ , GETTY PREMIUM

MATT RAY

Kitchen, de niveau 6c+, constitue un beau défi après deux années où seule la grimpe en salle était possible. En revanche, les voies de niveau 8 et 9 sont si exigeantes que seule l’élite internationale s’y frotte.

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Conseils d’un champion du monde L’Italien Stefano Ghisolfi, actuel champion du monde IFSC d’escalade en plomb (ou lead climbing, escalade avec corde. NDLR), est l’un des meilleurs grimpeurs au monde. À Kálymnos, il affectionne tout particulièrement le secteur Odyssey. Cette falaise plus isolée offre une palette de voies allant du débutant au 8b. Avant de rentrer dans le vif du sujet, le jeune homme de 28 ans m’accompagne pour une séance d’entraînement et me donne des conseils pour surmonter la peur de la chute. « Je me fixe toujours des objectifs intermédiaires, explique-t-il. Cela améliore ma concentration et décompose un

Mastichari KOS

Bon à savoir Cinq conseils d’initiés pour Kálymnos 1. SE DÉPLACER La location d’un deux-roues et un peu de marche vous donneront accès à la totalité des sites d’escalade. 2. MATOS Les magasins spécialisés en escalade ne manquent pas à Masouri. 3. GUIDES Le manuel d’escalade Kálymnos Climbing Guidebook (2019) répertorie la plupart des sites d’escalade de l’île et l’application gratuite Vertical-Life fournit les infos topo. 4. SE LOGER Si les hébergements à Masouri sont complets, de nombreuses solutions existent à proximité des falaises notamment dans les villages d’Arginonta et de Panormos. 5. TENUES Prévoir une veste de type polaire. Au printemps et en automne, les températures peuvent être très fraîches le soir et tôt le matin.

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PERSPECTIVES voyage

Éloge de la lenteur J’explore du coup des options que je n’aurais pas envisagées auparavant. Et ça marche : sur une minuscule saillie rocheuse, mon orteil soutient à lui seul le poids de mon corps. Après avoir essayé de grimper une trentaine de mètres d’un seul élan, Dourdourekas m’indique une autre erreur classique : 80

« Mon orteil soutient à lui seul le poids de mon corps. » L’écrivain Matt Ray a acquis de nouvelles astuces d’escalade.

« Profite des grandes saillies rocheuses pour te reposer un instant et secouer les bras – tu dois apprendre à ralentir. » Apprendre des grimpeurs plus expérimentés est une vieille tradition de ce sport. Lors de ma tentative suivante sur Axium, j’avais les mots de Loukas en tête. Cette fois, je guette les endroits où je peux souffler. À 35 mètres de hauteur, je m’appuie latéralement sur la paroi, en gardant mes bras aussi droits que possible. En arrivant à nouveau au passage décisif, là où j’ai échoué la fois précédente, je constate qu’il me reste suffisamment d’énergie et d’endurance. Une fois au sommet, je pousse un cri de victoire et sens l’endorphine envahir mon corps. En me retournant, je vois en contrebas la mer qui scintille. C’est encore plus beau vu d’en haut. Matt Ray est écrivain et photographe spécialisé dans les sports d’action. Il a grimpé partout : des falaises de grès du Peak District, en Angleterre, aux parois désertiques du Wadi Rum, en Jordanie. adventurefella.com THE RED BULLETIN

GLORIA RAMIREZ

grand défi en une série de petits objectifs réalisables. Se concentrer sur un objectif permet d’oublier sa peur et de booster la motivation. » Sur le secteur Odyssey, le coach Loukas Dourdourekas (le premier Grec à avoir réussi une voie 8c+) m’aide à transposer l’expérience de l’escalade acquise en salle sur un rocher naturel. « En salle, les prises tendent à être similaires et relativement spacieuses, explique Dourdourekas. Dans la nature, le défi est tout autre. Il faut avant tout ne pas craindre de poser le pied sur de toutes petites prises. »

MATT RAY

Stefano Ghisolfi, grimpeur de classe mondiale, sur l’Atena Wall (6b+). Son conseil : « Fixez-vous des objectifs intermédiaires. »


DES AIIILES POUR L’ÉTÉ.

AU GOÛT D’ABRICOT-FRAISE.

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STIMULE LE CORPS ET L‘ESPRIT.


PERSPECTIVES biohacking TROUVER L’APAISEMENT

L’énergie du bout des doigts Chaque mois, le biohacker professionnel Andreas Breitfeld nous révèle une astuce pour améliorer la vie quotidienne. Cette fois-ci : comment atténuer la nervosité en un clin d’œil et la faire disparaître.

Stressé(e) ? Tapotez les zones en rouge avec deux doigts, cela vous calmera en l’espace de quelques secondes. amygdale

méridiens

glandes surrénales

Un système bien câblé

Notre corps est recouvert de voies énergétiques appelées méridiens. Ils aboutissent tous au même endroit, l’amygdale, c’est-à-dire la partie de notre 82

ANDREAS BREITFELD, 49 ans, est le biohacker le plus célèbre d’Allemagne. Il est chercheur dans son laboratoire spécialisé de Munich. En termes simples, le BIOHACKING englobe tout ce que les gens peuvent faire eux-mêmes pour améliorer leur santé, leur qualité de vie et leur longévité.

TOUT, VOUS SAUREZ TOUT SUR LE BIOHACKING En scannant le QR code ci-contre, accédez à des contenus digitaux pour entraîner votre mémoire et booster vos performances mentales… THE RED BULLETIN

ANDREAS BREITFELD

Pourquoi est-ce que je fais cela ?

cerveau où sont gérées les émotions. Selon l’endroit du corps où je stimule le flux des méridiens en tapotant doucement, je peux influencer ces émotions de manière magique. En tapotant rythmiquement les voies énergétiques, le système limbique (dont fait partie l’amygdale) est désactivé, ce qui a pour effet de dilater les vaisseaux, de faire baisser le rythme cardiaque et la pression artérielle. De plus, la production de cortisol, l’hormone du stress, est réduite. Au bout de seulement quelques minutes, l’effet est mesurable et perceptible.

PRIVAT

I

l y a toujours des situations où le cerveau reptilien prend les commandes. Une réflexion calme, une analyse posée ? Aucune chance. Nervosité, stress, panique, mode combat ou fuite. Si la respiration en pleine conscience ne m’apaise pas (assez), je mise sur le pouvoir de guérison miraculeux du tapotement, également appelé « tapping ». Vu de l’extérieur, cela a l’air un peu bizarre : je m’assois et je tape avec l’index et le majeur sur une seule et même partie du corps pendant plusieurs minutes.

SASCHA BIERL

L’amygdale est la gare principale des douze méridiens (voies énergétiques) du corps. Elle est notamment responsable de la gestion des émotions. En tapotant de manière rythmée sur des zones spécifiques du corps, l’amygdale reçoit des signaux apaisants. Et ordonne ensuite à son tour aux glandes surrénales de stopper la production de cortisol, l’hormone du stress.


PERSPECTIVES playlist IBEYI

« Prince, c’est notre soutien » Les sœurs jumelles du duo musical Ibeyi présentent leurs quatre chansons préférées, celles qui leur ont permis de forger leur style unique.

SULEIKA MULLER

MARCEL ANDERS

À l’âge de 19 ans, les jumelles francoafro-cubaines Naomi et Lusa-Kaindé Diaz, plus connues sous le nom d’Ibeyi, ont sorti leur premier album du même nom. Les magazines musicaux ont fait l’éloge de ce premier disque, mélange de sons électro parcimonieux et de chants yoruba (prédominants au Nigeria, au Bénin et au Togo), de jazz cubain et d’acrobaties vocales à la Björk. Hommage à leur père décédé, Angá Diaz, le légendaire percussionniste de Buena Vista Social Club, Ibeyi a rapidement gagné une fan éminente : Beyoncé ! Elle a offert aux sœurs Diaz de participer au clip de son album Lemonade. Les jumelles, aujourd’hui âgées de 27 ans, ont confectionné leur troisième album, intitulé Spell 31, comme un plaidoyer pour l’empathie et la tolérance. Pendant la production de ce dernier opus, elles ont puisé leur inspiration dans la nature, et dans ces quatre titres.

Accédez au podcast d’Ibeyi sur Spotify en scannant le QR code. facebook.com/Ibeyi

ANGÁ DIAZ

ROSALÍA

MESHELL NDEGEOCELLO

KENDRICK LAMAR

REZOS (2006)

SAOKO (2022) Naomi : « Rosalía a écrit cette chanson il y a longtemps, mais ne l’a sortie qu’au début de l’année. C’est l’une de ses meilleures, elle est incroyable, très expérimentale. Le texte parle de métamorphose et de transformation. Nous suivons Rosalía depuis le début de sa carrière. Sa façon de mêler flamenco et pop est sublime. Et dans ce morceau, j’adore l’alliance qu’elle a réussi à faire entre reggaeton et jazz. »

PLEASE DON’T LET ME BE MISUNDERSTOOD (2012)

HOC (2010)

Lisa-Kaindé : « Notre père, grand percussionniste cubain, est l’auteur de cette chanson géniale. Il y égraine les noms de tous les musiciens disparus qui ont été ses compagnons de route. Nous avons samplé sa voix pour le morceau Los Muertos. Une manière à nous de chanter avec lui. Nous citons son nom, celui de ses parents, de notre sœur, et de musiciens comme Prince, qui ont été nos fidèles inspirateurs et soutiens. » THE RED BULLETIN

Lisa-Kaindé : « Ce titre me tient particulièrement à cœur. Je suis une grande fan de Meshell depuis mon adolescence. J’ai beaucoup appris en l’écoutant. De plus, j’ai découvert cette chanson en écoutant ma déesse Nina Simone, la première à l’avoir enregistrée. Alors quand Meshell chante Nina Simone, ce sont mes deux déesses qui ne font plus qu’une pour mon plus grand plaisir. »

Naomi : « Ce morceau (qui est extrait de Overly Dedicated, la quatrième mixtape solo du rappeur, en 2010, ndlr) est grandiose, comme à peu près tout ce que fait Kendrick Lamar. Je suis une fan absolue de cet artiste. Il y a eu un avant et un après Kendrick Lamar en musique. Je lui voue une profonde admiration. Naomi aussi d’ailleurs. Et nous adorerions travailler avec lui… Alors à bon entendeur. (rires) »

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PERSPECTIVES innovation

IDÉES POU R U N AVENIR MEILLEU R

shirt QUS qui risque fort de mettre ceinture pectorale, cardiofréquencemètre et autres applications de course à pied au rebut. Le maillot (env. 400 CHF) intègre deux capteurs qui mesurent toutes les données importantes : d’un côté, les informations GPS comme les kilomètres parcourus, le dénivelé ou la vitesse ; de l’autre, les données vitales comme la fréquence cardiaque, la fréquence respiratoire ou la variabilité de la fréquence cardiaque. « Les mesures s’effectuent directement sur le corps, sans extrapolation. Des études montrent que les erreurs de cardiofréquencemètres dues

Prêt à retrouver une forme olympique ? Ce vêtement connecté contribuera à vous mettre sur les bons rails.

Vitesse, fréquence cardiaque, respiration – le tee-shirt QUS capte toutes les données critiques pour un entraînement optimal.

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T

WOLFGANG WIESER

Un tee-shirt sur mesure

out démarre avec cette citation de Kevin Plank, fondateur du fabricant américain d’articles de sport Under Armour : « Réfléchissez au fait que vous en savez plus sur votre voiture que sur votre corps. » Pas faux, se dit Hannes Steiner, 44 ans, PDG de l’entreprise textile de Styrie (Autriche) sanSirro. Ce dernier se met alors à réfléchir à un moyen simple mais précis de collecter toutes les données utiles aux sportifs. C’est ainsi que naît le tee-

Le smartphone affiche tous les paramètres clés de l’état de votre forme personnelle.

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SANSIRRO, AMPHIRO, GIN PAUL LOZZA,

SPORT


EN BREF UN PETIT COUP D’ŒIL Des innovations, des idées et des personnes inspirantes de Suisse.

Un beau dos qui ne fait pas que plaire. La puce entre les omoplates collecte les données.

aux mouvements brusques atteignent jusqu’à 30 battements par minute », explique Marko Stankovic, ambassadeur de la marque et responsable des ventes de sanSirro. Les données recueillies sont stockées dans une puce fixée au tee-shirt, puis transmises en temps réel à une application. Il devient ainsi possible de détecter pendant l’effort une méforme inhabituelle ou une infection potentielle. Stankovic, ancien footballeur professionnel, explique : « Les fréquences cardiaques et respiratoires sont liées. Si elles s’écartent de la norme, cela est visible d’un coup d’œil. » Une information qui permet d’éviter les efforts contre-productifs ou les blessures. « QUS est une technologie de pointe, insérée dans un tee-shirt lavable », explique Stankovic. Un détail en apparence banal, mais c’est pourtant là où pêche la concurrence. sansirro.com

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DOUCHE SMART La douche d’Amphiro fonctionne sans alimentation électrique externe - car elle puise l’énergie nécessaire dans le flux d’eau. amphiro.com

GAMING

La vie en jeu ! Johanna Pirker enseigne la conception de jeux à l’Université technique de Graz (Autriche). Selon elle, les jeux vidéos nous rendent meilleurs.

E

lle est la pianiste du groupe indé grazois Coinflip Cutie, se met chaque année à un nouveau sport (dernier en date : le vélo de course), aime Londres, les livres du psychiatre Viktor Frankl et Nothing Else Matters de Metallica. L’Autrichienne est convaincue que le gaming fait de nous de meilleures personnes. « Je pense, affirme-t-elle, que les jeux nous enseignent l’empathie », c’est-à-dire une compréhension émotionnelle. Trois jeux en sont le fer de lance, estime Johanna Pirker.

Johanna Pirker, 33 ans.

Gorogoa se base sur des milliers d’illustrations fantastiques faites à la main – à l’origine, cela devait être un roman graphique. Dans Life is Strange, un événement dramatique réveille la capacité de Max à voyager dans le temps. Et Path Out est inspiré de la réalité : cette production autrichienne raconte l’histoire vraie du réfugié syrien Abdullah Kamar.

ALAN FREI Minimaliste, entrepreneur, junkie de l’optimisation : le cofondateur d’Amorana Alan Frei nous donne des conseils sur la manière d’atteindre une efficacité maximale dans la vie.

Le numéro actuel INNOVATOR. Infos et abonnement : redbulletininnovator.com

Tête haute : Johanna Pirker avec des lunettes de réalité virtuelle.

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PERSPECTIVES montres

LONGINES SPIRIT ZULU TIME

Le temps de l’aventure

Une montre en hommage aux pionniers qui ont traversé les fuseaux horaires sans jamais perdre la notion du temps. Le « zoulou » dans la Longines Spirit Zulu Time ne désigne pas le peuple sud-africain, mais la lettre Z. Celle-ci désigne à son tour, dans l’aviation, le temps universel (la même heure sur tout le globe), et est en quelque sorte un symbole pour tous les aventuriers du monde. Prix : 2 850 CHF. longines.com

LE BRACELET ... est en acier, mais il existe une alternative en cuir.

LA LUNETTE ... est bidirectionnelle, l’échelle de 24 heures permet de lire un fuseau horaire additionnel.

11 000 MILES EN SOLO LA COURAGEUSE AMY JOHNSON

« Cette montre souligne notre relation de longue date avec l’aviation. » Matthias Breschan, PDG de Longines Amy Johnson et son avion, lequel est exposé au Science Museum (Londres).

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WOLFGANG WIESER

LE MOUVEMENT ... est un nouveau calibre Longines exclusif in-house, doté d’un spiral en silicium, qui permet l’affichage des fuseaux horaires.

Posant fièrement devant son avion à moteur, Amy Johnson (1903-1941) est à ce jour la pilote la plus célèbre de Grande-Bretagne. Elle fut la première femme à voler en solitaire de l’Angleterre vers l’Australie, avec l’appui de Longines. Le 5 mai 1930, elle atterrit à Darwin dix-neuf jours après avoir décollé de Croydon (près de Londres), ayant parcouru plus de 11 000 miles (env. 18 000 km) et bravé des tempêtes de sable et une pluie battante.


PERSPECTIVES fitness

ENTRAÎNEMENT

Sous pression Ni le temps ni la patience de faire de la muscu ? Voici une technique rapide pour développer vos muscles et améliorer votre santé. Gustavo Vaz Tostes connaît les avantages d’un d’entraînement régulier. Cet ancien footballeur professionnel a commencé la musculation à 12 ans. Aujourd’hui, à 34 ans, il est expert en CrossFit de niveau 2. Mais Vaz Tostes sait que trouver le temps n’est pas toujours facile. « Après la naissance de ma fille, le volume de mes entraînements a chuté de 70 %. » Le Brésilien a donc introduit l’entraînement par occlusion de la performance ou restriction du flux sanguin (BFR) dans sa routine. En ralentissant le flux sanguin dans le haut ou le bas du corps, les muscles travaillent plus, même avec un poids plus léger. « Cela accélère la vitesse à laquelle vos muscles s’épuisent, ce qui est le but de l’entraînement. Cela me permet de faire en 40 minutes ce qui me prenait deux heures. »

Gustavo Vaz Tostes, entraîneur de fitness et défenseur du BFR, se sent à l’étroit.

poids qui ne représente que 30 % de votre poids habituel. De nouveaux produits (les tee-shirts et les shorts BFR et Hytro, par exemple) sont dotés de sangles réglables au niveau des bras et des jambes, ce qui permet aux utilisateurs d’administrer en toute sécurité la bonne pression.

MATT RAY

Un effort minimal

La doctrine est généralement le « plus » : plus de poids, plus d’exercices, plus de séances. Peu importe le nombre de séries que vous faites, ou le poids que vous utilisez, tant que vous mettez le même stimulus dans ces muscles. Des études montrent que l’entraînement BFR nécessite un THE RED BULLETIN

Points douloureux

Toute personne qui soulève régulièrement des haltères connaît la douleur musculaire à retardement (DOMS), c’està-dire la douleur ressentie dans les muscles enflammés pendant la phase de réparation post-entraînement. « Appliquer une pression puis la réduire accélère la récupération entre les séances d’entraînement, explique Vaz Tostes. Vous pouvez vous asseoir devant la télé avec le short. »

Une formule adaptée

« Le BFR permet d’accélérer la récupération. » Gustavo Vaz Tostes

Vaz Tostes fait faire à ses clients des séances d’entraînement hybrides : trois séries d’exercices de muscu ordinaires, puis quatre séries de BFR, en baissant le poids. Avec un format de répétitions scientifiquement étayé (30,

15, 15, 15, avec 30 secondes de repos entre chaque série), l’épuisement musculaire est atteint en nettement moins de temps. « Cette méthode a un avantage physiologique. Et c’est plus sûr.»

De la force à revendre

Une séance hebdomadaire de renforcement musculaire peut réduire de 20 % la mortalité due à toutes les maladies non transmissibles. « Je dis à mes clients d’apporter des bandes de résistance avec eux. Elles ne pèsent rien, mais en les associant au BFR, vous pouvez faire une très bonne séance de musculation dans votre chambre d’hôtel en une demi-heure seulement. » Suivez Vaz Tostes et apprenez-en plus sur WIT Fitness via Instagram : @gus.witfitness ; son programme BFR sur : hytro.com

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PERSPECTIVES le coin lecture

Coup de foudre L’auteur américain Matt Ruff n’a écrit que sept romans en 33 ans de carrière. Ils n’ont absolument rien en commun, à une exception près : ils sont tous incroyablement bons. Texte JAKOB HÜBNER

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att Ruff est précédé d’une certaine réputation : talent d’exception, écrivain rare, auteur culte. En ce qui concerne le choix de ses thèmes, de ses approches et de son style, cet Américain, né à New York en 1965, est à peu près aussi imprévisible que la foudre quand elle frappe au hasard. Fool on the Hill, sorti en 1988, marque le point de départ de ce parcours audacieux. Il semble que Ruff, qui

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n’avait alors que 23 ans, n’arrivait pas à se décider : allait-il écrire un conte de fées fantastique, une comédie estudiantine, une histoire d’amour, une fable animalière ou un slasher horrifique ? Il a donc tout fait en même temps et a ainsi écrit l’un des meilleurs premiers romans jamais publiés. Les critiques n’en sont pas revenus et tous ont attendu avec impatience la deuxième œuvre de ce jeune super talent. Matt Ruff les a fait languir pendant dix

ans avant d’enchaîner, en 1998, avec Un requin sous la lune, un space opera délirant qui se lit comme un clin d’œil à Douglas Adams (auteur, entre autres, du Guide du voyageur galactique) qui fait faire des contorsions à votre cerveau. Cinq ans après ce kamikaze étrange, Ruff a écrit son livre le plus sensible à ce jour. La proie des âmes (2003) est un roman de l’âme déguisé en thriller, centré sur Penny et Andrew, deux êtres sans point d’ancrage et souffrant tous deux de troubles de la personnalité multiple. Un roman magnifique qui va droit au cœur. L’étape suivante de ces montagnes russes littéraires s’intitule Bad Monkeys et date THE RED BULLETIN

VINZ SCHWARZBAUER

SUCCÈS DE GUINGOIS


88 Names, chapitre 1, Première remarque préliminaire SHERPA – est payé pour guider les joueurs dans un jeu de rôle en ligne massivement multijoueur. Les sherpas fournissent à leurs clients des personnages, l’équipement, des coéquipiers compétents et leur permettent de se familiariser avec le contenu du jeu pour joueurs expérimentés sans avoir à y consacrer des centaines d’heures. Les sherpas sont souvent des indépendants et n’ont aucun lien avec les entreprises qui ont publié ledit jeu.

de 2007 : dans une cellule d’interrogatoire de l’aile fermée d’un centre pénitentiaire de Las Vegas, Jane Charlotte, accusée de meurtre, raconte au médecin une invraisemblable histoire aussi démente qu’irréelle. Ruff met en scène ce duel subtil comme un théâtre intime paranoïaque dans lequel folie et réalité se frôlent dangereusement. En 2012, Ruff passe à la vitesse supérieure dans le mécanisme intermédiaire de la réalité avec The Mirage. Le décor : le 9 novembre 2001, deux avions s’écrasent sur les tours du Centre mondial du commerce de Bagdad, un troisième sur le ministère de la Défense d’Arabie saoudite à Riyad. Le plus étonnant dans ce récit alternatif radical (à la Philip K. Dick), c’est que Ruff dresse le miroir déformant du fondamentalisme chrétien avec beaucoup d’humour et sans le moindre soupçon de cynisme. Si vous pensez que la part la plus substantielle de sa production est derrière lui, détrompez-vous : Lovecraft Country a suivi en 2016. Il n’y a que lui qui sache comment réunir de manière abracadabrante dans un vulgaire roman feuilleton pulp les horreurs de la discrimination raciale des années cinquante aux États-Unis avec des éléments effrayants tirés des récits d’horreur de H. P. Lovecraft. Beaucoup savent aujourd’hui (notamment THE RED BULLETIN

grâce à la série télévisée du même nom) qu’il est possible d’y parvenir avec panache. Ce qui nous amène au dernier coup d’éclat de Matthew Theron Ruff : 88 Names. L’auteur s’aventure à nouveau en terrain inconnu, cette fois dans celui du monde virtuel des jeux de rôle en ligne massivement multijoueurs dans lequel le sherpa professionnel John Chu est confronté à un client ambigu dont le personnage de jeu pourrait bien cacher le dictateur nord-coréen Kim Jong-un. Ce qui n’est que le deuxième plus gros problème de John étant donné le désir de vengeance de son ex-petite amie Darla, passablement échaudée… « Pure geek gold », « Un bijou de geekitude », a commenté le réputé magazine new-yorkais d’actualité littéraire, Publishers Weekly. Conclusion : qui ne s’est pas plongé une fois dans un roman de Matt Ruff voit sa crédibilité littéraire sérieusement entachée.

MATT RUFF 88 Names En anglais

CONSEILS DE LECTURE

Ils veulent juste jouer Cyber-écrivains : comment s’immerger dans des mondes virtuels et ce, sans allumer son ordinateur.

DANIEL SUAREZ À la seconde précise où le génie du jeu informatique Matthew Sobol meurt, son héritage numérique prend vie : un cheval de Troie viral qui règle ses comptes – au sens propre du terme – avec la civilisation humaine. Avertissement : avant d’entamer ce thriller hi-tech ou sa suite, FreedomTM, il est suggéré de faire le plein de provisions pour au moins deux jours. Daemon (Fleuve noir, collection Thriller)

ERNEST CLINE Avec le best-seller mondial Ready Player One (adapté au cinéma par Steven Spielberg), Ernest Cline a réussi l’exploit de catapulter une réminiscence des années quatre-vingt d’environ 400 pages dans un cadre de jeu très complexe de l’an 2045. Malheureusement, la suite, Ready Player Two, n’a pas été à la hauteur de ce « rallye de Pâques » au rythme effréné. Ready Player One (Michel Lafon)

TAD WILLIAMS Un jalon du genre datant de l’âge de pierre numérique : la tétralogie Autremonde de l’Américain Tad Williams publiée en français en huit tomes. Le premier volet est paru en 1996 et est considéré comme une sorte de source littéraire pour l’exploration de mondes parallèles virtuels. Il convient de faire preuve d’un certain amour du détail au vu des presque 4 000 pages de la fresque complète. Autremonde (Payot, collection « SF »)

CORY DOCTOROW Activiste, blogueur, auteur… Le gourou canadien de l’Internet Cory Doctorow a déjà affronté les promesses de la numérisation sur plusieurs fronts. Ses romans de la série Little Brother, dans lesquels il engage la lutte contre l’État de surveillance totale dans le plus pur style orwellien, sont remarquables. La préface de la réédition de 2021 est d’ailleurs signée par le lanceur d’alerte Edward Snowden. Little Brother (Pocket Jeunesse)

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PERSPECTIVES gaming

« Servez-vous des fonctions d’aide à la conduite comme l’ABS et les vitesses automatiques, cela renforce l’assurance, préconise-t-elle. Et respectez les marquages au sol jusqu’à ce que le circuit vous soit familier. Il s’agit avant tout de maîtriser les bases. »

Jeu de pédales

« Maîtrisez la pression exercée sur vos pédales dans la réalité comme dans le simulateur. Vous parviendrez à mieux maintenir la vitesse dans les virages. Le simulateur donne l’impression de se déporter, mais avec un bon timing, vous l’augmenterez de 10 %. »

La jeune Indienne Mira Erda est championne de F4, et imbattable à GT7.

Conduite sportive

La pilote de course Mira Erda connaît la victoire en course dès l’âge de 12 ans. Un talent qui, sans surprise, lui permet aussi de briller dans Gran Turismo 7…

Mira Erda a passé sa vie à dépasser, à 240 km/h, les clichés. À 21 ans, elle cumule plus de dix ans d’expérience en courses. À 12 ans, elle signe sa première victoire en kart, puis ses résultats parlent pour elle : Erda devient la plus jeune femme à courir en F4, championne de l’année des recrues de F4 en 2016. La Fédération des clubs de sport auto en Inde la désigne deux ans plus tard « femme d’exception dans le sport automobile », et en 2019, elle devient la première femme en Inde à monter sur un podium international de F4. Elle œuvre désormais pour plus de présence féminine dans ce sport. « J’ai ouvert une académie dans laquelle nous 90

formons des centaines de jeunes. » Son talent de pilote s’exprime aussi dans Gran Turismo 7. La pandémie limitant l’accès aux circuits, elle a installé un simulateur chez elle. Voici ses conseils, valables sur circuit réel et virtuel…

Merci l’assistance

Pour ses débuts en course réelle, Erda n’a bénéficié que de 25 jours d’entraînement. Mais pour GT7, elle conseille une approche moins intense.

Ouvert à l’inconnu

GT7 propose plus de 400 voitures, maîtrisez d’abord les voitures classiques avant de vous lancer dans des voitures plus performantes. « Dans une course réelle, la voiture dont vous disposez ne correspond pas toujours à vos attentes. Sur simulateur, j’opte pour un réglage basique et adapte mon style de conduite à la voiture. »

« Pour changer les choses, je suis condamnée à gagner. » Mira Erda

Tenue de route

Erda revient sur sa première victoire malgré un départ en dernière position : « C’est à ce moment-là qu’il faut se surpasser et se battre. J’ai dépassé quatorze concurrents en trois tours et terminé avec une énorme avance. Les gens n’en revenaient pas de voir une fille faire ça. J’ai alors compris que pour changer les choses, j’étais condamnée à gagner. » Gran Turismo 7 est déjà disponible sur PS4 et PS5 ; gran-turismo.com ; suivez Mira Erda sur Instagram : @mira_erda THE RED BULLETIN

STU KENNY

Formule gagnante

L’un des plus grands défis qu’Erda a dû relever a été d’acquérir la puissance pour rivaliser avec les hommes. « La conduite à grande vitesse exige une bonne condition physique, qui permet de pousser la voiture et d’améliorer les résultats. » Quotidiennement, Erda s’impose au moins 45 minutes d’entraînement avec au menu : musculation, réflexes et endurance.

VRAJESH ERDA

DRIVE


PERSPECTIVES agenda

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juin COUP D’ENVOI DU RED BULL CLIFF DIVING Des sauts acrobatiques, des athlètes intrépides et des sites pittoresques : les Red Bull Cliff Diving World Series sont de retour ! Les plongeurs débuteront le 4 juin à Boston (USA) avant de s’arrêter sept fois de plus pour démontrer leur talent. Pour ceux qui souhaitent voir les plongeurs de falaise en direct en Suisse, Sisikon les accueillera à nouveau les 10 et 11 septembre. Toutes les compétitions seront diffusées en direct sur Red Bull TV.

12 FOTOMTINA, RICARDO NASCIMENTO/RED BULL CONTENT POOL, JEAN-CHRISTOPHE DUPASQUIER/RED BULL CONTENT POOL, AMANDA NIKOLIC

au 15 mai SOUS LES FEUX DE LA RAMPE À Zurich, la Cycle Week se transforme en festival national du vélo : pour lancer la saison du vélo, l’événment qui se tient mi-mai, met toutes les facettes du vélo sous les feux de la rampe : tester les derniers modèles, voir des shows, participer à des ateliers et profiter de la musique unplugged et de l’offre food & drink. cycleweek.ch

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juin BREAKING BATTLE

au 9 juillet BACKSTAGE À L’OPENAIR FRAUENFELD

Soyez de la partie lorsque les quatre meilleures B-Girls et seize B-Boys de Suisse s’affronteront lors du Red Bull BC One Cypher Switzerland au Trafo de Baden ! Les vainqueurs de l’événement représenteront la Suisse en novembre à la Red Bull BC One World Final à New York City, où ils se mesureront aux meilleurs du monde. Infos et billets sur redbull.com/bconeswitzerland

ASAP Rocky, Sido, Loredana : les stars de la scène hip-hop se réuniront à nouveau à l’Openair Frauenfeld début juillet. Et avec le Red Bull Unforeseen, il y aura, comme en 2019 déjà, un espace backstage secret très spécial avec de nombreuses surprises. Comment y accéder ? C’est également un secret. Toutes les infos bientôt sur redbull.com/unforeseen

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B O U L E VARD DES HÉROS

JANE GOODALL, DIAN FOSSEY, BIRUTĖ GALDIKAS

ANGES GARDIENS

MICHAEL KÖHLMEIER raconte les destins hors du commun de personnages

inspirants, dans le respect des faits et de sa liberté d’écrivain. Ce mois-ci : comment trois grandes dames ont consacré leur vie à celles des grands singes.

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MICHAEL KÖHLMEIER

BENE ROHLMANN, CLAUDIA MEITERT

GETTY IMAGES (4)

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n a parfois besoin d’un mentor, très tôt constaté à quel point les différences quelqu’un capable de déceler les entre humains et animaux se brouillaient. talents cachés d’un individu et de Quand une femelle chimpanzé la regardait le pousser à embrasser son destin. dans les yeux, elle se sentait prise en défaut et Louis Leakey fut un véritable mentor, éprouvait une sorte de culpabilité. En même dans le sens le plus noble du terme. Anglais temps, ce sentiment se mêlait à une envie de d’origine, il vécut toute sa vie au Kenya et fut se battre, de faire face à la concurrence. Une l’un des plus célèbres paléoanthropologues du nuit, elle eut ce rêve : elle était tombée d’une MICHAEL KÖHLMEIER XXe siècle. Un paléoanthropologue étudie les L’écrivain autrichien est falaise, des chimpanzés l’avait trouvée et l’un des meilleurs origines de l’Homme, en remontant jusqu’à transportée dans un hôpital géré par des chimconteurs du monde gerpanzés. Une femelle chimpanzé, vêtue d’une la séparation des Hominidés d’entre les Homanophone. Dernière minina – nos plus lointains ancêtres. En plus blouse blanche de médecin, l’avait examinée parution en français : d’être un scientifique hors pair, Leakey avait avant d’annoncer le verdict : il n’y avait plus La petite fille au dé à l’enthousiasme contagieux, mais surtout le rien à faire, elle allait mourir. coudre, Éd. Jacqueline Chambon, 2017. don de se moquer des préjugés. C’est grâce à Certes, il existait bien une solution au problème, un moyen de contrer l’issue fatale, mais lui, à ses encouragements et à son soutien sans c’était presque impossible à envisager : il valait mieux se faille que trois jeunes femmes, qui ont un jour croisé son résoudre à accepter la mort – qui lui apparaissait d’ailleurs chemin en Afrique ou dans une classe d’université, ont pu sous les traits d’un singe – et à s’y préparer. Sur ces mots, réaliser leur rêve et devenir les plus grandes primatologues que le monde ait connues. la médecin-chimpanzé lui tourna le dos, se remit à quatre Jane Goodall a vingt-trois ans quand elle rencontre pattes et commença à partir. Mais Jane Goodall l’avait interpellée : « Attendez ! Que dois-je faire pour ne pas mouLeakey. Elle qui n’a pu, faute de moyens, faire de longues rir ? Dites-le-moi, je vous en prie ! » La femelle lui répondit études, possède un simple certificat de secrétaire. Mais alors : « Vous transformer. » Ce fut à ce moment que Jane l’Afrique la fascine et la jeune femme ne résiste pas à l’invitation d’une amie à la rejoindre au Kenya : c’est là-bas Goodall se réveilla en sursaut. Et fut prise d’un grand éclat qu’elle rencontre le célèbre anthropologue, qui est alors de rire. Mais elle prit ce rêve au sérieux, se mit à fouiller, à sonder au plus profond d’elle-même sa part de chimpansurpris par l’intelligence, la vivacité d’esprit et l’empathie zé, ce minuscule vestige de son héritage commun qui de la jeune Anglaise. Au bout de quelques semaines, il la sommeillait encore en elle – et elle finit par le trouver. persuade – en sachant qu’elle n’y connaît rien en paléoanthropologie – de faire partie de son équipe. Cet ultime lambeau de son ancienne peau de primate, Trois ans plus tard, Jane Goodall s’installe définitiveJane Goodall l’a protégé, choyé, entretenu et savouré, ment en Tanzanie et se lance à corps perdu dans la misjusqu’à ce que ce lambeau devienne une seconde envesion qu’elle s’est donnée et qui va déterminer le restant loppe et que Jane devienne, comme elle le décrivit ellede sa vie : observer les chimpanzés du parc national de même, un tiers chimpanzé, deux tiers humaine. Dans les Gombe Stream. Elle racontera bien plus tard qu’elle avait années 70, le dessinateur Gary Larson a fait imprimer un


En partant du haut à gauche dans le sens des aiguilles d’une montre : les spécialistes des singes Dian Fossey, Jane Goodall et Birutė Galdikas.

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BOULEVARD DES HÉ ROS

tee-shirt avec l’un de ses dessins, où l’on voit un couple de chimpanzés : la femelle est en train de retirer un cheveu blond du pelage de son compagnon en disant : « Encore des “recherches” approfondies avec cette pétasse de Goodall ! » Jane Goodall prit la blague de Larson avec humour, et quand on lui conseilla de porter plainte, elle se contenta d’en rire : pour elle, tous les moyens étaient bons pour interpeller les Hommes sur le sort qu’ils réservaient aux animaux, et l’humour était en fin de compte un moyen bien plus efficace que la colère. Jane Goodall continue aujourd’hui de se battre pour la défense des animaux. Fruits de ses longues études réalisées sur le terrain, ses contributions à la connaissance animale sont immenses.

À

l’âge de cinquante-trois ans, Dian Fossey est retrouvée morte dans sa hutte du Karisoke Research Center au Rwanda. Des traces de lutte sont décelées, ce qui n’est pas étonnant, compte tenu du caractère bien trempé et farouche de la primatologue américaine. Elle était armée mais son revolver lui a échappé des mains pendant la bataille. Ses agresseurs lui ont fendu le crâne et l’ont laissée morte, sans rien toucher de ses affaires. Les premiers soupçons se portent sur les braconniers qu’elle pourchassait sans merci, avec des méthodes qui ne lui attiraient pas toujours la sympathie. Elle conseillait à ses étudiants et ses assistants de circuler armés et de tirer sans sommation s’ils apercevaient des braconniers. On finit par abandonner la piste des braconniers, au motif que ceux-ci n’auraient certainement pas risqué de s’aventurer dans un camp surveillé pour la tuer quand ils auraient pu le faire facilement dans la forêt. Le meurtre en 1985 de cette passionnée des gorilles est resté un mystère. Selon la thèse la plus communément admise aujourd’hui, Dian Fossey aurait été tuée par des mercenaires payés par une organisation touristique qui voulait développer le tourisme forestier au Rwanda. Le meurtre d’une Américaine en pleine forêt aurait effrayé les touristes. Et l’on savait à quel point Dian Fossey combattait le développement du tourisme forestier, qu’elle ne supportait pas ces hordes de curieux qui troublaient le quotidien des gorilles et détruisaient leur habitat. Quant aux braconniers, elle les haïssait, eux qui avaient massacré son gorille préféré, lui avaient coupé les mains et scié la tête. Son petit protégé s’appelait Digit. Dian avait retrouvé son cadavre atrocement mutilé. Il était alors commun de vendre les mains des gorilles à de riches touristes étrangers en mal d’idées macabres.

En découvrant un gorille dos argenté, Dian Fossey sut que plus jamais, elle ne retournerait à la civilisation.

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La tête de Digit fut empaillée pour servir de décoration murale dans une bibliothèque en Angleterre. Dian et Digit se connaissaient depuis dix ans : elle avait passé plus de la moitié de son temps à observer les siens et avait fini par être acceptée comme un membre de la famille. Les gorilles lui faisaient confiance, lui confiaient leurs bébés pour qu’elle les surveille ou leur chante des chansons. La mort de Digit fut le traumatisme de trop : Dian Fossey s’éloigna de plus en plus du monde des humains et se réfugia au fin fond de la forêt rwandaise. Les gens du coin finirent par l’appeler Nyirmachabelli, la « femme qui vit seule dans la forêt ». Alors qu’elle travaillait en Californie comme thérapeute pour enfants handicapés, Dian Fossey était fascinée par l’Afrique : lors d’un périple de plusieurs mois sur le continent africain, la jeune Américaine fit la connaissance de Louis Leakey, qui la prit sous son aile et lui confia ses premières missions d’observation. C’est en découvrant pour la première fois un gorille dos argenté qu’elle sut que plus jamais, elle ne retournerait à la civilisation. Qu’elle finirait ses jours dans cette forêt. Mais Dian Fossey ne se contenta pas d’observer les structures familiales et les modes de communication entre les gorilles : pour tout connaître de ces magnifiques créatures, elle savait qu’elle devait faire partie de leur monde. Les découvertes qu’elle fit bouleversèrent les frontières que les Hommes, dans leur obsession de se distancier du règne animal, avaient établies au fil des siècles. Quand elle quittait ses chers gorilles pour aller enseigner, donner des conférences ou collecter des fonds pour son centre ou d’autres projets, c’était uniquement dans l’intérêt de ses protégés. Elle bâtit toute sa vie pour que les Hommes considèrent enfin les grands singes comme leurs alter ego et leur reconnaissent un statut juridique et moral. Au fond de la forêt qui entourait le Karisoke Research Center, le centre qu’elle avait fondé au Rwanda, elle se sentait chez elle. Dian Fossey disait en parlant de Digit qu’elle avait pu développer avec lui une forme de communication par la pensée et qu’ils arrivaient à se raconter leurs rêves. Un jour, Digit lui fit comprendre qu’il avait rêvé de sa propre mort, puis il l’avait alertée sur les menaces qui planaient aussi sur elle. Dian Fossey raconta sa vie passée au milieu des gorilles de montagne dans un livre biographique, Gorilles dans la brume : le film sorti en 1988 avec Sigourney Weaver fut un succès international.

V

enue un peu plus tard compléter le trio formé autour de Louis Leakey, la Canadienne Birutė Galdikas n’a pas passé sa vie en Afrique mais dans les forêts de Bornéo, à étudier les Orangs-Outans. Son parcours est similaire à Goodall et Fossey, avec la même passion pour les grands singes, le même désir d’en savoir plus sur ceux qui sont nos plus proches parents, la même rencontre avec Leakey, qui va changer sa vie. Installée à Bornéo, elle fonde, avec le soutien de la Leakey Foundation, sa propre station de recherche pour observer les Orangs-Outans dans leur milieu naturel, ces créatures qu’elle considérait comme « les plus belles de Dieu » – avant d’ajouter en

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Enfant, la petite Birutė ne savait pas marcher normalement. Elle était toujours en train de courir. riant que si, pour la plupart des biologistes et des zoologues, Dieu n’était pas un facteur essentiel de l’Évolution, c’était sans doute parce qu’ils n’avaient jamais rencontré un Orang-Outan en liberté. Pour elle, ces singes étaient une preuve de l’existence de Dieu. D’origine lituanienne, Birutė Galdikas a grandi au Canada et a fait la connaissance de Leakey lors de ses études d’anthropologie à l’UCLA (Californie). Dans cette même conférence, elle avoua ne s’être véritablement intéressée aux comportements humains que dans la perspective d’expliquer les comportements des autres animaux ; que l’enfant qu’elle était ne savait pas marcher normalement ; qu’elle était toujours en train de courir. La phrase qu’elle a entendue

le plus souvent durant ses premières années ? À l’âge où toutes les petites filles de son âge rêvaient d’avoir un cheval, la petite Birutė, elle, aurait préféré être un cheval. Son père finit par la mettre en garde : « Ma chérie, lui dit-il, il faut que tu arrêtes ça. Imagine que tu arrives à l’école et que tu racontes à ton voisin de classe que tu veux être un animal. Les enfants vont se moquer de toi et ne voudront pas jouer avec toi ! » La veille de son tout premier jour d’école, Birutė fit un rêve : elle était un cheval et vivait au milieu des animaux. Il n’y avait autour d’elle aucun être humain et il n’y en aurait jamais. Et le père de tous les animaux, qui, trois fois par jour, le matin, à midi et le soir, préparait la soupe, était un singe géant, avec des bras si longs et des doigts si fins qu’il pouvait dénicher, dans chaque magasin de la ville, les nombreux ingrédients dont il se servait pour concocter sa soupe. Elle se souvient avoir eu peur de cet immense singe aux longs bras. Ce rêve l’avait transformée : à son réveil, la petite Birutė ne voulait plus devenir un cheval – elle rêvait désormais de devenir un grand singe. Birutė Galdikas est aujourd’hui professeure d’anthropologie à la Simon Fraser University (Canada). Elle se rend encore régulièrement à Bornéo pour rendre visite à ses chers Orangs-Outans.

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