The Red Bulletin_1205_FR

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PLUS

aux origines du

Solar Impulse

monde

Grand Angle sur le Cern et l’infiniment petit

vers le futur Bertrand Piccard lève le voile sur son génie énergétique

Despres trace sa voie à Dakar Reportage photo inédit entre craie et ­tableau noir

Captain America est de retour

EASY RIDER peter fonda

Entretien exclusif avec un des derniers monstres sacrés d’Hollywood magazine sponsorisÉ

PLUS: :Habiba HabibaGhribi Ghribi/ Rufus / RufusWainwright Wainwright/ Nora / Nora Arnezeder / Will Smith / Emmeline Ragot / Cian Healy / Santigold PLUS Arnezeder / Will Smith / Emmeline Ragot / Cian Healy / Santigold

mai 2012

un magazine hors du commun

Tél gra écharg not tuitem ez re a ppli ent iPad



LE MONDE DE RED BULL

Mai

66

20

VTT Après avoir publié un Spécial Vélo le mois dernier, The Red Bulletin vous plonge cette fois-ci dans l’envers du décor d’une étape de Coupe du monde de VTT. La Française Emmeline Ragot saura vous séduire.

SANTIGOLD FINGERS Voix prenante, chaleur « ambiançante », performances live tonitruantes, voici Santigold, kaléidoscope musical inspiré des Smith et d’Aretha Franklin. Née Santi White, l’Américaine envoûte et déroute. Embarquement.

PHOTO DE UNE : PATRICK HOELCK. PHOTOS : SVEN MARTIN, DDP, CP IMAGES/ZIPTREK ECOTOURS, LUKAS MAXIMILIAN HUELLER

Qui vivra... Et si vous étiez né au siècle des Lumières ? Ou, à l’inverse, en 2084 ? Ah la belle question, de celles qui vous retournent un cerveau... Vous ne vous l’êtes jamais posée ? Quelle chance ! Si le monde actuel suscite bien des interrogations sur la table des matières de ceux qui prétendent nous gouverner, celui de Red Bull reste, comment dire, un îlot préservé, sorte de parenthèse informelle. Oui, le monde de Red Bull est merveilleux, bla bla bla... Non, rien de tout cela ici. Seulement des personnalités hors norme, des vraies, qui ont les pieds sur terre. Peter Fonda, porté au pinacle du 7e art, insuffle un vent de liberté à ce 7e numéro, quelques jours avant la projection de son nouvel opus The Lazarus Protocol au 65e Festival de Cannes. Première prise, la bonne. Bonne lecture, Votre Rédaction

84 QUEENSTOWN, LA BIEN NOMMÉE

Direction la Nouvelle-Zélande, au sud de l’île du Sud... Nous sommes bien à quelques encablures de nulle part. Et pourtant, c’est là-bas que tout se passe dans un rayon de quelques kilomètres.

30 SOURIEZ, VOUS ÊTES CERN-É !

Plongez-vous dans un reportage au long cours. The Red Bulletin a été autorisé à jeter son regard sur le CERN. 10 000 physiciens s’activent sous terre, près de Genève, pour l’avenir de l’humanité.


LE MONDE DE RED BULL

Mai 25

2012, ANNÉE ARNEZEDER ? Vous vous dites : « Mais je la connais cette fille ! » Oui, vous l’avez vue dans Faubourg 36 et le rôle de Douce, celle qui fait chavirer le cœur des hommes, à l’écran comme à la ville.

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DESPRES, LION DE LA TERANGA Le Français a accepté qu’on le suive dans la grande banlieue de Dakar pour un reportage photo exceptionnel : Cyril Despres sur un banc d’école.

64

HEALY IN THE MIX ! Le pilar de la sélection irlandaise a répondu à quelques questions rugby et musique entre deux matches du Tournoi des Six Nations 2012. Ça décoiffe !

PAJON SUR LE PONT

Si elle n’a pas le déhanché de Shakira, elle ne manque pas de talent. Mariana Pajon est une colombienne de génie.

92 IL EST UN CLUB OÙ LE BAR S’EMBRASE

En ce mois de Festival de Cannes, rien de plus logique qu’un gros plan sur LA boîte qui fait danser La Croisette... le Bâoli !

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FONDA SE CONFIE SUR LE CANAPÉ Quelle famille, les Fonda ! Bio express et entretien exclusif avec Peter dans ce numéro. Easy Rider n’a jamais vraiment disparu des écrans de contrôle. Et c’est tant mieux !

08 Photos du mois 14 Énergisant 16 Red Bull Music Academy 18 Mon corps et... Habiba Ghribi 22 Microscopes d’hier et d’aujourd’hui 24 Will Smith 26 À la rame 28 EXPO-sez-vous !

PHOTOS : DDP, PHILIPP HORAK, GETTY IMAGES, RED BULL CONTENT POOL, BAOLI, MARY EVANS/PICTUREDESK.COM

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LE MONDE DE RED BULL

Mai 74

RED BULL STRATOS Découvrez le 4e volet de notre série consacrée à un des événements majeurs de cette année 2012 au même titre que l’Euro ou les JO. Ce mois-ci : la combinaison sous toutes ses coutures.

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FACES FOR CHARITY

En pole avec Sebastian Vettel et Mark Webber ? C’est possible ! Les portraits des donateurs habilleront les voitures des pilotes du Red Bull Racing, au profit de l’association Wings for Life.

Felix Baumgartner :

« Jeà ressemblais 90 un vendeur »

LA THÉORIE DE NITSCH

Comment s’entraîner pour plonger en apnée ? Herbert Nitsch, détenteur de 32 records du monde, révèle ses secrets. Au programme, un canapé, des séries TV et beaucoup de volonté.

Plus

De corps et d’esprit

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CUISINE

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AGENDA

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MUSIQUE

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FOCUS

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KAINRATH

Les secrets d’un chef ou une recette souvent épicée

48 FAIS COMME L’OISEAU

Après avoir découvert les trésors enfouis du CERN, préparez-vous à un vol plané mémorable et 100 % écolo au-dessus des Alpes avec Bertrand Piccard et André Borschberg.

Rufus Wainwright est un précurseur qui s’ignore. Il se confie ici, chose rare

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EXPRESS

Les disques préférés de Shabazz Palaces

Tour du monde des meilleurs plans Red Bull À ne pas louper Un monde en dessins

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PLEINE LUCARNE

La plume d’Ono-dit-Biot

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MENTIONS LÉGALES

PHOTOS : BALAZS GARDI/RED BULL STRATOS NEWSROOM, BREITLING, RED BULL CONTENT POOL, JEAN REVILLARD/REZO

de voitures bulgare.


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RORY MCILROY | GOLF


utaH , É tat s - u n i s

Bon GrÈs, mal GrÈs

À première vue, cela ressemble à une canine géante. Ne vous y trompez pas, voici la Castleton Tower. Elle culmine à 120 mètres de haut. Ce colosse de grès semble être spécialement sorti de terre pour le BASE Jump. Celui qui s’élance dans le vide sur ce cliché est Michael Tomchek. Son parachute lui permettra de fouler le sol en douceur. À noter que la photographe Krystle Wright a immortalisé l’instant suspendue à un ULM... Tout le reportage sur www.wrightfoto.com.au Photo : Krystle Wright

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du mois



d u baÏ , É m i r at s ar ab e s u n i s

hors limites

Transformé pour l’occasion en practice de golf (sans filet), l’héliport de l’imposant Burj Al Arab a ­récemment accueilli Rory McIlroy dans une démonstration de drive et, moins impressionnant, de sorties de ­bunker. Âgé de 23 ans depuis le 4 mai dernier, ­l’Irlandais du Nord succède à Tiger Woods qui en avait fait de même en 2004. Le duo Roger FedererAndre Agassi avait aussi échangé des balles il y a quelques années. www.rorymcilroy.com Photo : David Cannon/Getty Images

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du mois



Aku r e yr i , I s l an d e

seul au monde du mois

Credits:

Si vous souhaitez un point de vue unique sur les volcans islandais, le Snaefallsjökull saura sans nul doute vous satisfaire. D’ailleurs, Jules Verne ne s’y est pas trompé. C’est de ce cratère que débute son fameux Voyage au centre de la Terre. À quoi bon s’y engouffrer quand le spectacle est aussi beau qu’une photo de Will Copestake ? « Ici, c’est Rémi, mon partenaire d’escalade, dit l’Ecossais. Il semble se tenir devant les portes du ciel. » Le volcan en vidéo sur www.vimeo.com/willcopestake Photo : Will Copestake/Caters News

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Bullevard Énergisant... à petites doses

Chasseurs de tempêtes Dix surfeurs, des vents de force 5 à 7 et la planète comme décor. Le Red Bull Storm Chase revient en 2012. Pour participer, envoyez vos candidatures ou recommandez vos spots préférés. Voici trois suggestions :

MAGHEROARTY (IRLANDE) Au nord-ouest de l’Irlande, les vagues de l’Atlantique heurtent la côte avec une extrême violence. Conditions optimales pour jumper les vagues.

MARRAWAH (TASMANIE) Le spot tasmanien se situe en dessous du 40e parallèle. Les 40e rugissants sont ici au rendez-vous avec des vagues conséquentes.

Tyree Callahan détourne l’usage de la machine à écrire.

DES MOTS IMAGÉS Selon Tyree Callahan, son inventeur, cette machine à écrire transforme les textes en... art. Un roman d’Hemingway retranscrit sous forme de tableau ? La Bible en images ? Ces fantaisies peuvent devenir réalité avec la machine à écrire couleur de l’artiste américain Tyree Callahan : « Le Chromatic Typewriter opère entre art visuel et littérature », confesse Callahan qui troque les caractères d’une

Underwood de 1937 avec des éponges de couleur. Seul hic : il faut remettre de la couleur après chaque frappe. Le procédé n’est pas envisageable pour de longs textes. Les fans de l’artiste se réfugient dans « les poèmes d’amour à traduire ». Atelier visible sur www.tyreecallahan.com

LES IMAGES DU MOIS

TARANAKI (NOUVELLE-ZÉLANDE) Les lames de fond présentes sur ce spot créent des vagues incroyables pour des sauts spectaculaires. Inscription, vote en ligne et infos générales sur www.redbullstormchase.com

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UN INSTANT SVP !

Faites-nous partager votre univers trépidant en envoyant vos clichés à : phototicker@redbulletin.com Les meilleures photos seront tirées au sort. Le ou la gagnante repartira avec la gourde suisse SIGG siglée The Red Bulletin.

Stockholm

Après sa conférence à la Red Bull Music Academy, Robert Hood, pionnier de la techno, s’empare des platines. Anders Neumann


Fashion Nouvelle collection Red Bull Racing

Red Bull BC One, une aubaine pour les B-Boys

VESTE OFFICIELLE SOFTSHELL HOMME, 134,95 €

TEXTES : FLORIAN OBKIRCHER, ULRICH CORAZZA, ANDREAS ROTTENSCHLAGER. PHOTOS : MIKEY CLANCY, IMAGO (2), TYREE CALLAHAN, EMRE ERMIN/RED BULL CONTENT POOL, CORBIS, DDP

Il ne doit en rester qu’un ! Comme tous les ans, l’heure du Red Bull BC One a sonné. Le Championnat du monde des B-Boys est l’événement de breakdance le plus important de la planète. Les meilleurs danseurs s’affrontent dans un duel œil pour œil, pas pour pas, le tout dans une ambiance d’arène surchauffée. En novembre dernier, à Moscou, le BBoy américain Roxrite ne laissait que des miettes à ses adversaires. Fin 2012, les 16 meilleurs breakdancers se déplacent à Rio de Janeiro pour une finale très attendue. À partir de ce mois de mai, 60 Red Bull BC One Cypher sont organisés à travers le monde. Ils permettent aux BBoys de tous horizons de montrer l’étendue de leur extraordinaire talent. Une occasion unique de pénétrer sur le ring des champions et de se mesurer à des stars comme Lil G ou Neguin. Double vainqueur du Red Bull BC One, notre Lilou national est absent cette année en raison de sa participation à la tournée de Madonna. On le pardonne... Toutes les dates du Red Bull BC One Cypher sur www.redbullbcone.com

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AIR PUR Jack Black étreint sa guitare avec son groupe Tenacious D. C’est sûr, depuis la comédie School of Rock, Jack Black est un fou de musique. Fan de pur heavy métal comme Meat Loaf ou Ronnie James Dio, il est aussi virtuose de guitare électrique et d’Air Guitar. Une raison suffisante pour l’humoriste de 42 ans de se lancer dans une seconde carrière en formant le duo Tenacious D. Ses morceaux satiriques oscillent entre opéra-rock et mégalomanie et sont agrémentés de solos de guitare. À retrouver sur le nouvel album Rize of the Fenix.    : Que cache ce titre ? Jack Black : Notre dernier album n’a pas été un grand succès. Il nous est nécessaire de faire une introspection et

d’affronter nos démons pour renaître de nos cendres. Plus pour sauver le rock que nousmêmes. Qu’est ce qui caractérise un bon « Air Guitariste » ? Kyle Gass : L’ardeur. L’absence de guitare rend la présence d’ardeur essentielle. JB : Les muscles faciaux jouent un rôle non négligeable. Il faut montrer un visage ravagé de douleur, une expression qui traduit à la fois passion et souffrance. Quel est le meilleur solo de guitare de l’histoire du rock ? JB : Eruption de Van Halen ! Une évidence ! KG : J’aime le solo de Just What I Needed du groupe The Cars. www.tenaciousd.com Kyle Gass et Jack Black sont Tenacious D.

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PHOTO GAGNANTE

Fujisawa Le plus grand fan de Sebastian Vettel sait déjà imiter la pose triomphante de son idole. Chikako Yuasa

Rio de Janeiro Le Brésil est bel et bien le repère des artistes du ballon rond. Marcelo Maragni, Red Bull Roda de Bola

Lincoln City

Tao Berman, kayakiste freestyle, démontre ici qu’on n’a pas toujours besoin d’un surf pour s’amuser. Richard Hallman

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B U L L E VA R D

Jean-Michel Jarre dans ses œuvres. Le Français s’est produit dans le monde entier et sera à Lyon ce mois-ci.

Professionnels et amateurs logés à la même enseigne

Ça jibe à Gruissan ! Plus de 1 000 véliplanchistes de tous âges ont rendez-vous du 17 au 20 mai prochain sur le spot de Gruissan, à une dizaine de kilomètres de Narbonne dans l’Aude. Objectif ? 40 km à fond bien calé dans ses foot-straps (quatre bords de 10 km). Les meilleurs parcourent la distance en 45 minutes. Toute l’actu funboard sur www.redbull.fr

Ma Chaîne Sport et Red Bull s’associent pour vous offrir le meilleur de la saison des Red Bull X-Fighters et de Red Bull Cliff Diving. Après avoir retransmis le premier rendez-vous de l’année à Dubaï mi-avril, MCS Extrême diffusera en direct la semaine prochaine l’étape américaine des Red Bull X-Fighters de Glen Helen (12 mai) puis celle d’Istanbul (16 juin). À ne manquer sous aucun prétexte ! www.redbull.fr

Red Bull X-Fighters propose de nouvelles dates en 2012.

Londres Toms Alsberg, vainqueur de

l’étape anglaise de Red Bull Mini Drome. Roman Skyva

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PLEIN LES OREILLES

Red Bull Music Academy est partout !

À l’heure où le printemps bat son plein, ouvrez grands vos tympans. Red Bull Music Academy s’occupe de vous et propose, comme d’habitude, de découvrir ce qui se fait de meilleur. Pas moins de deux festivals majeurs sont investis cette année pour un plateau de choix. À Lyon, dans le cadre des Nuits Sonores (16-20 mai), RBMA programme de jeunes artistes comme XXXY et les Français Étienne Jaumet ou Ned. Ils se retrouvent dans le même cadre que les incontournables Theo Parrish, Kode9, Clark et Chris & Cosey. Trois nuits pour treize artistes d’une programmation haut de gamme. Le clou du spectacle sera sans nul doute cette Red Bull Music Academy Session le 16 mai à 14 h à l’hôtel de ville de Lyon avec, en guest star, un certain Jean-Michel Jarre. À Paris, la crème de la crème a rendez-vous à Villette Sonique du 25 au 30 mai avec les têtes d’affiche François K et Pearson Sound à la nuit RBMA du Cabaret Sauvage le 26 mai à 23 h. Pour rappel, Red Bull Music Academy Radio est une radio numérique tentaculaire. Des centaines de lives, DJ sets, émissions spécialisées et podcasts sont proposés sur internet. Retrouvez tous ces artistes sur RBMA Radio. www.redbull.fr/rbma

Sydney Après les OVNIS, voici les OFNIS, objets flottants non identifiés... Red Bull Rapids en Australie

Séoul Originaire du Nicaragua, DJ Craza, en pleine action lors du Red Bull Thre3Style Show. Incheol Na

PHOTOS : DÉFI WIND/BEACH CONCEPTS, PICTUREDESK, ACTION IMAGES

MCS Extrême met le paquet


pepejeans.com


B U L L E VA R D

MON CORPS ET MOI

HABIBA GHRIBI

3 VICTOIRE EN TÊTE

Dès que quelqu’un doute de moi, je cours plus vite. Mon père me dit un jour : « Habiba, tu es aussi forte qu’un homme. Si tu veux vraiment quelque chose, tu vas y arriver. »

Vice-championne du monde du 3000 steeple à Daegu l’été dernier, la Tunisienne fonde de sérieux espoirs de médaille d’or à Londres. Rencontre.

1 ÉQUILIBRE

La plupart des observateurs pense qu’en steeple il suffit d’avoir de puissantes jambes. Mais le buste et les abdos doivent être à l’unisson. Une musculature du torse bien développée agit sur tout le corps et contribue à garder l’équilibre dans les passages d’obstacles.

4 CARRÉ MAGIQUE

Je suis un régime strict. Je sais à tout instant quoi manger. J’essaie de maintenir mon poids à un niveau stable. Une bonne alimentation a un impact sur la qualité de l’entraînement. De temps en temps, je m’autorise un carré de chocolat noir.

2 DÉSÉQUILIBRE

Je souffre d’un hallux valgus aux deux pieds (il s’agit du fameux oignon qui forme une bosse, surtout chez la femme, à la base de l’articulation du gros orteil). C’est douloureux. Ma foulée est moins efficace. En mai 2010, je subis une opération pour enlever des morceaux de l’os. Le médecin est très clair : cette opération peut sceller ma fin de carrière. L’intervention m’immobilise quelques semaines. Quatre mois plus tard, je retrouve la piste.

18 18

Mon école se trouvait à une quinzaine de kilomètres d’où habitaient mes parents. Quand le bus ne passait pas, j’y allais en courant. « Bibi, tu peux y aller en marchant », insistait mon père. « Oui, mais je veux me rendre sur place plus rapidement », répondais-je.

Faites plus ample connaissance avec Habiba Ghribi sur l’appli iPad

TEXTE : RUTH MORGAN. PHOTO : ANTOINE DOYEN

5 COULÉE DOUCE


PUBLI REPORTAGE

VITE FAIT, BIEN FAIT

Sportifs vainqueurs et parcours victorieux aux quatre coins de la planète.

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Ken Roczen s’impose à Houston dans les AMA East Supercross Series. Tout juste âgé de 18 ans, l’Allemand signe sa première victoire de la saison.

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Le Canadien Kyle Croxall au sommet devant ses fans à Québec lors d’une étape de Red Bull Crashed Ice. Ils étaient 100 000 !

PHOTOS : HOPPENWORLD.COM/RED BULL CONTENT POOL, JÖRG MITTER/RED BULL CONTENT POOL, JONTY EDMUNDS/RED BULL CONTENT POOL, ASP/ROBERTSON

  Après une année 2011 gâchée en raison de blessures à répétition, l’Anglais David Knight a repris du poil de la bête avec deux victoires en Enduro.

Sally Fitzgibbons rayonnante après sa deuxième victoire cette année sur le Tour ASP. C’était à Newcastle (Australie).

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b u l l e va r d

Kaléïdoscope de couleurs et sensibilité extrême. ­Santigold a la foi.

La révolution a un son

oh my santigold !

Rythmes électroniques effrénés, basses omniprésentes et refrains tonitruants, bienvenue dans l’univers musical de Santigold. Go, morceau d’ouverture de son nouvel et deuxième album Master of My Make-Believe (dans les bacs depuis le 1er mai dernier), balance une incroyable énergie. Un feu d’artifice sonique pour les cages à miel. Pas seulement. Son manager et mentor Jay-Z y perçoit un caractère ­historique. La chanteuse américaine de 35 ans ­précise : « Parmi les nouveaux morceaux, beaucoup sont antérieurs au Printemps Arabe et au mouvement Occupy Wall Street. Mais tous ont cette même ­vibration, celle d’un bouillonnement, d’un embrasement, aujourd’hui palpables partout dans le monde. Les gens, d’où qu’ils soient, exigent la vérité. Ma musique reflète cette revendication et cette énergie. » Esprit et caractère distinguent la personnalité de Santigold, charme et sourire ravageurs, son physique. Dès qu’elle parle, son corps s’anime, ses yeux pétillent. Avec douceur, elle aborde des questions difficiles et manie l’humour pour les sujets sensibles. Or, tout n’a pas été toujours si simple. Longtemps, 20

Date et lieu de ­naissance Santi White est née le 25 septembre 1976 à Philadelphie (ÉtatUnis). Passé Avant sa carrière solo, elle était, entre autres, dénicheuse de talents dans une maison de disques. Elle a vu ce qu’il ne fallait pas faire... Présent En 2009, un réalisateur menace de porter plainte contre elle si elle ne change pas de nom d’artiste. Il estime que Santogold renvoie au film de catch qu’il tourne en 1985, Santo Gold’s Blood Circus. Elle devient alors Santigold.

elle a lutté contre des accès de colère, conséquences nerveuses du décès de son père. Elle a erré un temps, sans manager ni maison de disques. L’écriture des textes lui est difficile jusqu’à ce qu’un conseil de Dave Sitek, producteur du groupe TV On the Radio, la sorte de l’impasse. « Tu es toujours si serein, comment fais-tu, Dave ? lui ai-je demandé. Sa réponse : Méditation transcendentale. » Santigold plonge et ouvre ses chakras : « Je suis partie pour la Californie rencontrer cette femme de 89 ans connue pour avoir accompagné les Beatles en Inde dans les années 60. Grâce à son aide, j’ai trouvé calme et sérénité. Elle m’a suggéré d’écrire avec pour mantra “ Tu es la meilleure”. Les morceaux Look at these Hoes ou Big Mouth ont été des cas pratiques. La méditation nourrit mes compositions. » Et ça marche. Un mantra simple pour un album d’hymnes à la vie entre New Wave, Dub et Électro et du nom de Santogold paru en 2008. Sorti en 2007, le single L.E.S. Artistes, amuse-bouche savoureux d’une rare fraîcheur de son premier opus, ébranle le monde de la pop. Le clip montre Santi White, alias

texte : florian obkircher. photos : Warner Music, ddp images

Révélation de l’année 2011, Santigold a un vrai talent de composition et une voix hors norme. The Red Bulletin a rencontré une américaine aux doigts de fée. À l’heure où sort son nouvel opus, elle ne laisse personne indifférent.


Santigold, sur un cheval noir, flanquée de deux danseuses martiales, amazones aux épaules carrées mais aux lunettes de soleil rondes. Son style, son esthétique, sa décontraction, tout respire l’air du temps. Santigold a produit Santogold entièrement et en toute autonomie. De l’écriture des textes aux costumes habillant les clips. Une performance qui scelle le respect de ses pairs. Suivent deux années sur les routes où la native de Philadelphie est invitée par une flopée d’artistes renommés tels Björk, les Beastie Boys, Coldplay ou encore Jay-Z. Avant de composer des tubes notamment pour Lily Allen et Christina Aguilera et de chanter en guest pour Mark Ronson et kanye West. Son nom est Master of My Makesur toutes les lèvres, le buzz Believe est dans les est incroyable. bacs depuis le 1er mai (Atlantic/Warner). Les sollicitations nombreuses laissent peu de temps à la New Yorkaise d’adoption pour façonner son deuxième album. « Les gens me demandent pourquoi je mets autant de temps à sortir mes chansons. Maintenant, je sais, dit-elle tout sourire. Je m’isole et travaille assidûment à un album jusqu’à ce que le plus sévère des regards critiques soit satisfait, en l’occurrence le mien. »

« Parmi les nouveaux morceaux beaucoup sont antérieurs au Printemps Arabe et au mouvement Occupy Wallstreet. Mais tous ont cette même vibration. »

Infos, dates de concerts et clips sur www.santigold.com

Santigold : « La méditation nourrit mes compositions. »

INFO CONCERT .COM


B U L L E VA R D

HIER ET AUJOURD’HUI

À la loupe

Les microscopes modernes, dits « à effet tunnel », révèlent les atomes par un froid polaire. The Red Bulletin s’est penché sur la question.

EN GROS

ŒIL POUR ŒIL

Conçu à l’origine pour un seul œil et monté verticalement. Cet oculaire offre un confort sommaire au chercheur.

BOÎTIER

En laiton. Il est péniblement fabriqué à la main.

Un vrai luxe en 1890 : triple objectif, placé directement au-dessus de l’objet à examiner. Combiné à la lentille de l’oculaire, le microscope grossit l’objet 270 fois.

ÉCLAIRAGE

Le miroir concave concentre la lumière sur l’objet. Celui-ci est éclairé par en-dessous grâce à la lumière du jour ou d’une lampe à pétrole.

1890 L’ANCÊTRE C’est avec ce microscope optique signé Reichert que l’Autrichien Karl Landsteiner parvient à différencier les groupes sanguins. La combinaison de deux lentilles permet une amplification mutuelle de leur capacité de grossissement (centième de millimètre). Une lentille est placée sous l’œil, l’autre au niveau de l’objet observé. Un miroir concave sert de réflecteur de lumière.

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Cristal, oxyde d’indium, sous l’œil voyeur du microscope Reichert.


Voir ou découvrir ? Éléments de comparaison

L’ORIGINAL Voici, à la même échelle, le microscope optique.

REFROIDISSEMENT

Une température de – 200 °C est obtenue grâce à l’azote liquide. On l’introduit dans la chambre à travers ces canaux.

BOÎTIER

En inox. La chambre est confinée pour le préserver des impuretés.

EN GROS

C’est ici que se trouve la pièce maîtresse du microscope à effet tunnel. Le point balaie l’échantillon dans sa totalité pour un grossissement de... 50 000 000 de fois.

ŒIL POUR ŒIL

TEXTE : ARKADIUSZ PIATEK. PHOTO : KURT KEINRATH

L’oculaire est formé d’un petit microscope binoculaire pour contrôler la pointe de balayage.

2012

LE SCEPTRE

Ce colosse d’acier d’un mètre de haut ravirait aujourd’hui Landsteiner. Dans la chambre d’acier, une pointe électrique balaie l’objet observé, reconnaissant les atomes grâce au courant. Elle les représente sur une image en noir et blanc. Résolution : 500 millionièmes de millimètres. Température de l’objet analysé : – 200 °C, indispensable pour immobiliser les atomes et les rendre photogéniques.

Le même cristal. Représentés sous forme de petites billes grises, les atomes sont aisément visibles.

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b u l l e va r d

exploration

homme en noir Star mondiale du rap et du cinéma depuis sa plus tendre enfance, Will Smith revient sur les écrans ce mois-ci avec Men in Black 3. The Red Bulletin dresse son tracé unique.

Ca sh Mach in e

Willie et Phillie

Independance Day et Me n in Black propulsent Smith au som met du boxoffice. De Men in Black 2 en 2002 à Hancock en 2008, huit fil ms sont numéro 1 aux États-Unis. Ses films engrangent au total plus de 5 milliards de dollars de gains. Il connaît aussi le succès avec quatre albums solo.

Willard Christopher Smith Junior naît le 25 septembre 1968 puis grandit, à l’instar du « Prince de Bel-Air », dans la banlieue ouest de Philadelphie dont il incarne le rôle dans la série télé. Sa mère affirme qu’il parle avant de savoir marcher. Le jeune Will aime écrire de petites histoires avec des super héros. Il découvre Sugarhill Gang à 10 ans. Révélation.

aux frais du princ e

travai lle r plu s

Smith joue les rappeurs de rues à l’âge de 12 ans. Un prof lui donne comme surnom « le prince ». En 1985, Smith l’ado y ajoute le mot « fresh » avant de passer son bac l’année suivante. Avec son pote Jeffrey Townes, ils enregistrent Girls ain’t nothing but trouble. Le tandem DJ Jazzy Jeff & The Fresh Prince est né.

À 16 ans, Smith estime qu’il est nul et pas assez bon pour quoi que ce soit. C’est là que le déclic se produit. En 2005, pour la sortie de Hitch, c’est avec e un jet privé qu’il assure dans la mêm journée les avant-premières du film à Manchester, Londres et Birmingham.

m et tr e le s ga

poo r boy

Les filles ne causent pas de soucis à Smith. Il n’a pas 20 ans lorsqu’il doit payer 2,8 millions de dollars d’arriérés d’impôts. « Les gens du fisc ont tout ­saisi chez moi. On parle des gens qui paument tout. Moi, j’étais fauché, ­brisé. » Il part pour Los Angeles et ­rencontre Benny Medina, un musicien qui rêve de créer une série télé.

noi r c’e st noi r

comme un prince

Invités chez Quincy Jones, Medina et Smith croisent des producteurs télé. Medina en profite pour présenter son projet qui raconte la vie de la famille Gordy, (homonyme du fondateur du célèbre label Motown) avec Will comme personnage principal. Quincy Jones, emballé, les pistonne. Cinq semaines plus tard, un pilote du « Prince de Bel-Air » est tourné. La série dure six saisons. Le fisc, lui, récupère 70 % du cachet de Smith pendant les trois premières.

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écran géant Après le succès à la télé, place au cinéma. Smith débute en 1992 dans Where the day takes you. Il y joue un adolescent SDF et handicapé. En 1993, il est un charmant escroc dans Six degrés de séparation. Puis c’est Bad Boys en 1995. Smith et son agent analysent les succès du box-office. Effets spéciaux et bons sentiments, c’est la recette gagnante pour cartonner. Ils exploitent le filon.

Avant de partager l’affiche avec son fils , Jaden l’année prochaine dans After Earth Black 3. Smith revient ce mois-ci avec Men in La bande annonce promet toujours plus même d’action avec des monstres gluants et t bien aurai qui s temp le rs un voyage à trave aidé les réalisateurs du film. Le scénario met du temps à décoller avant de transformer l’essai. La sortie de Men In Black 3 est prévue le 23 mai. Plus d’infos sur www.meninblack.com

texte : Paul wilson. illustration : lie-ins and tigers

nt s Le talent d’acteur de Big Willie ne se résume pas à affron ter les méchants. Le rôle de Mohamm ed Ali demande un an de préparation . Programme quotidien : 5 km de footing à 6 heures du matin, petit-déjeu ner, visionnage de vidéos des comb ats, entraînement à la technique d’Ali, déjeu ner, cours de dictio n, étude de l’Islam, mu sculation jusqu’au dîner. « Quand le tournage démarre, dit-il, je su is Ali. »


b u l l e va r d

Cinéma, théâtre, chanson, Nora Arnezeder touche à tout avec brio. À seulement 23 ans.

heroïne

Hip hip hip nora !

Nora Arnezeder, révélation de Faubourg 36, est l’une des valeurs montantes du cinéma français. The Red Bulletin vous invite à faire connaissance avec une beauté. Fatale.

Date et lieu de naissance 8 mai 1989 à Aix en P.

texte : christophe couvrat. photo : Roxanne Lowit/H&K

Filmographie 2012, Sécurité rapprochée 2010, La Croisière 2008, Faubourg 36 Sorties prévues Ce que le jour doit à la nuit d’Arcady (12 septembre 2012) The Words (automne 2012) Théâtre Après tout, si ça marche… avec Michel Boujenah au Théâtre Marigny jusqu’au 23 juin prochain

Son arbre généalogique situe le personnage. Grandmère russo-égyptienne, mère égyptienne d’Alexandrie, père autrichien originaire de Neukirchen, entre Salzbourg et Innsbruck, Nora Arnezeder se nourrit de ses origines : « Je me sens plus proche de ma mère, chaleureuse, sensuelle. Elle aime s’emporter, il faut que ça sorte. C’est la vraie orientale. Mon père est plus cartésien. » La famille avant tout. Dix oncles et tantes et puis Léa, sa petite sœur, basée à New York. « Très bonne comédienne, brune aux yeux noisette, et drôle. » Nora et Léa, toute une histoire. Elles écrivent leur première pièce intitulée Les deux bonnes femmes, l’histoire de deux amies d’enfance qui se retrouvent vingt ans plus tard. Nora joue une catho, Léa une poissonnière de Marseille à l’aise avec sa gouaille et ses rondeurs. Contraste flagrant. L’aînée se rappelle. Extraits : « Que faisait votre mari avant de mourir ? » lançait Nora. Et la poissonnière de répliquer : « Bah, il ­faisait... Ahaaaaah ! Ahaaaah mon Dieu ! Je vais ­mourir ! » Nora sourit : « Cette réplique nous faisait mourir... de rire. » Née à Aix-en-Provence en 1989, Nora s’envole, à 14 ans, pour Bali. Au retour en France du clan ­familial, à Paris, elle suit chaque après-midi, après

l’obligatoire lycée du matin, des cours de comédie musicale. Dont de la danse classique. « On me disait : “Tu es trop grande, pas en rythme”. La danse m’a ­permis de savoir gérer l’espace. » Le Cours Florent, des apparitions dans des séries, un casting réussi et Nora décroche le premier rôle féminin du deuxième long-métrage de Christophe Barratier, réalisateur des ­Choristes. Surprise maximale. « L’attente a duré six mois. Je ne m’y attendais vraiment pas. » Le rôle de Douce dans Faubourg 36, chanteuse guillerette et innocente à la voix d’ange qui fait chavirer Clovis Cornillac, lui sied à merveille. Elle a 18 ans. Sa ­carrière décolle. Pause californienne l’an dernier à Venice Beach pour Nora, en vacances avec sa copine Leila. Coup de fil alléchant. « Mon agent me dit d’aller à New York passer le casting d’une production avec Denzel Washington. » La suite ? Sécurité rapprochée, sorti sur les écrans français en février dernier. Puis ce sera le tour du prochain film d’Alexandre Arcady aux ­côtés d’Anne Parillaud et de Vincent Perez et The Words en compagnie de Bradley Cooper et Dennis Quaid (sortie programmée à l’automne). Actuellement, elle planche sur une adaptation théâtrale du film de Woody Allen, Whatever Works. Ses partenaires de jeu : Michel Boujenah et Cristiana Reali. Excitant pour une première sur les planches. Après quelques dates de rodage en avril à Nice, la troupe est au Théâtre Marigny jusqu’en juin. Mais Nora est une saltimbanque qui turbine. Amoureuse aussi de musique (« Au départ, je voulais être ­chanteuse »), elle prépare un premier album avec le guitariste Korey Richey. « Il vient de Louisiane et sait tout faire. » Comme elle. Plus d’infos sur www.nora-arnezeder.net

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B U L L E VA R D

FORMULE MAGIQUE

QUEL SKIFF !

À moins de trois mois des JO de Londres, The Red Bulletin vous aide à réviser vos classiques en aviron, discipline où la France brille depuis des décennies. Plus d’infos sur www.marcelhacker.com

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LA THÉORIE* Un bateau d’aviron se déplace à partir d’un point d’appui. Dans l’eau, la palette utilise ce point d’appui pour propulser la coque. En physique, ce phénomène s’explique par la loi dite de conservation. Le rameur chasse vers l’arrière une petite quantité d’eau. Grâce au maintien de la propulsion, la coque accélère dans la direction opposée. L’aviron immobilisé dans l’eau doit, pour assurer le maintien de la propulsion globale, exercer une poussée dans le sens inverse du déplacement de la coque. La vitesse de propulsion du bateau est obtenue par

une équation qui calcule l’emplacement et la vitesse du bateau, du rameur et des pelles : la masse globale m (bateau et rameur) multipliée par la variation de la vitesse du bateau est égale à la somme de toutes les forces exercées sur le bateau dans le sens de son déplacement. Il s’agit là de la force de propulsion exercée par l’aviron, de la force de résistance de l’air et de la force de frottement du bateau sur l’eau. L’équation du mouvement permet de comprendre comment améliorer la performance. Principalement par l’augmentation de la force de propulsion et la réduction


PHOTO : DDP IMAGES. ILLUSTRATION : MANDY FISCHER

Une fusée dans l’eau. Champion du monde et médaillé olympique en skiff, Marcel Hacker vise l’or à Londres.

de la force de résistance. La force de propulsion est générée par l’interaction entre la palette et l’eau. La force de propulsion maximale est atteinte quand la pelle se trouve dans une position quasi perpendiculaire au bateau, juste avant l’amorce du dégagement. La puissance augmente avec le carré de la vitesse de la palette par rapport à l’eau. La vitesse relative entre la palette et l’eau équivaut à la différence de la vitesse tangentielle, L∆Ф/∆ t, et la vitesse de la coque v. L représente la longueur extérieure du manche et ∆Ф/∆ t la vitesse de rotation de la pelle actionnée par la force exercée

sur le manche. La force de résistance diminue avec le coefficient de structure du bateau. Les coques longues et effilées étant les plus avantagées. LA PRATIQUE « L’aviron sollicite à 70 % les muscles des jambes, à 25 % les muscles du dos et à 5 % ceux des bras », explique Marcel Hacker, Champion du monde en skiff en 2002 et vrai candidat à un podium aux JO de Londres cet été. Pourquoi les bateaux sont-ils aussi rapides ? « La longueur de propulsion est plus grande. Du coup, la poussée peut

être constante sur la totalité de la pelle. S’ajoute à ceci les facteurs tels que le poids, la forme et le coefficient de structure. » Les conseils de Hacker : « Prendre du plaisir. Ramer avec régularité, maîtriser le mouvement et apprécier la glisse pendant le dégagement. »

*Professeur Thomas Schrefl, enseignant et chercheur à l’IUT de Sankt Pölten, en Autriche, et à l’Université de Sheffield, en Angleterre.

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B U L L E VA R D

CHIFFRES DU MOIS

À CHACUN SON EXPO

2012 rime avec Exposition Universelle. Elle se tient à Yeosu, en Corée du Sud, jusqu’en août prochain. The Red Bulletin vous propose de revisiter quelques-unes des précédentes éditions.

Londres 1851

New York 1939

La première édition se tient à Londres au Crystal Palace, au cœur de Hyde Park. Conçu par Joseph Paxton, le palais de verre abrite une série de curiosités très surprenantes pour l’époque. On y trouve par exemple le plus grand diamant Koh-i Noor, le premier télécopieur de Frederick Collier Bakewell, le revolver de Samuel Colt et les premières toilettes publiques payantes dessinées par George Jennings. En cinq mois et demi, l’Exposition Universelle de 1851 dégage une recette de 3 447 livres.

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À l’occasion de l’Exposition Universelle de 1893 à Chicago, Herman Webster Mudgett alias Dr Henry Howard Holmes construit un hôtel. Il part en fumé en 1895. Le propriétaire des lieux est suspecté d’être à l’origine de l’incendie. Les ruines du bâtiment livrent des faits terrifiants comme la présence de nombreuses trappes et des chambres à torture. Les dépouilles de plus de 100 cadavres sont découvertes. Holmes est soupçonné du meurtre de plus de 200 personnes. Il en avoue 27 avant d’être exécuté par pendaison.

L’Expo de 1967 est probablement l’exposition universelle la plus importante du siècle passé. 50 millions de visiteurs font un triomphe à Montréal. 45 ans après, les pavillons construits pour l’événement sont toujours debout. En 1976, un incendie détruit partiellement le pavillon américain, géode de 62 mètres de hauteur. Reconstruit, le pavillon abrite aujourd’hui la Biosphère, musée de l’Environnement. Le pavillon russe est expédié à Moscou et constitue la pièce centrale du All-Russian Exhibition Center.

Shanghai 2010

1 032 700

En 2012, Shanghai montre un retour certain vers l’essence même de ce genre de manifestation, soit une célébration mondiale de l’industrie. Sans surprise, l’exposition chinoise devient la plus courue avec ses 73 millions de visiteurs. Répartis sur un parc de 5,28 km², 246 pays ont dépensé 12 milliards de yuans (1,4 milliards d’Euros) pour 13 milliards de yuans de recette. La journée du 16 octobre 2010 enregistre plus d’un million de visiteurs, 1 032 700 précisément, soit un nouveau record.

Montréal 1967

Dr Henry Howard Holmes

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Le thème de l’Exposition Universelle de 1939 à New York est : « Le monde de demain – optimisme et futur ». La Deuxième Guerre Mondiale éclate quatre mois plus tard. Une capsule est enterrée dans le parc de Flushing Meadows à l’attention des générations futures. Ce cylindre de 2,39 mètres pour 362 kg regroupe un essai de 22 000 pages sur microfilm, des objets du quotidien comme des cigarettes, des rasoirs jetables, des vêtements et... des jetons de poker. Il est censé être réouvert dans 5 000 ans.

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Yeosu 2012

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Lorsque l’Expo 2012 ouvrira ses portes ce samedi à Yeosu en Corée du Sud, deux pays seront absents pour raisons diverses : la Grèce, qui a décliné l’invitation en raison de la crise économique, et... le Canada. L’absence de cette dernière nation a de quoi surprendre. Une étude réalisée à la demande du gouvernement canadien révèle que les habitants d’Ottawa et autres Toronto n’ont, au fond, qu’un faible intérêt pour le pavillon de leur pays en 2010. Sauf si le Cirque du Soleil se charge de l’animation... www.worldexpo2012.com

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TEXTE : PAUL WILSON. PHOTOS : GETTY IMAGES (2), CORBIS (3), PICTUREDESK.COM

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Action

MAtiÈRE PREMiÈRE Royaume des particules élémentaires, le CERN n’ouvre que très rarement ses portes au monde extérieur. Ici, l’avenir de l’humanité s’éclaircit. The Red Bulletin a eu accès à cette impressionnante concentration de matière... grise. Texte : Andreas Rottenschlager Photos : Lukas Maximilian Hüller 30


« Machine à Big Bang ». Situé dans le tunnel LHC, le détecteur de particules ALICE analyse l’état de la matière immédiatement après le Big Bang, soit, chez les physiciens, un millionième de seconde plus tard.

Cours de physique accéléré À cheval sur la frontière franco-suisse, près de Genève, le Centre Européen de Recherche Nucléaire (CERN) exploite, à 100 mètres sous terre, l’accélérateur le plus puissant du monde. Son nom : LHC (Large Hadron Collider, soit Grand Collisionneur de Hadrons). Dans son tunnel circulaire de 27 km, des protons ou ions de plomb entrent en collision frontale à une vitesse proche de la lumière et à de très

hautes énergies. Le résultat : de nouvelles particules qu’analysent quatre détecteurs gigantesques (CMS, ATLAS, ALICE, LHCb). Des équipes de physiciens du monde entier cherchent un des chaînons manquants de la théorie des particules, le boson de Higgs, surnommé « particule-dieu » qui donnerait une masse à toute matière présente dans l’univers. Aux planètes, aux hommes et même au magazine entre vos mains.


Action

Joe Incandela (États-Unis)

Il dirige l’équipe de recherche en charge du détecteur CMS (Compact Muon Solenoid), une des deux expériences génériques du LHC.

Comment attraper la «particuledieu»? « Au CERN, nous n’utilisons pas ce terme. En tant que physiciens, nous préférons celui plus prosaïque de “boson de Higgs”. Le Higgs est la seule particule élémentaire non observée à ce jour. C’est le chaînon manquant du modèle standard de la physique. Nous voulons le produire par la collision de protons pour tenter de découvrir quelque chose de fondamental et intemporel pour la compréhension de notre univers. Le Higgs est à l’origine de toute masse. Savoir de quoi nous sommes constitués est légitime. Ce sont des questions philosophiques. La physique des particules joue un rôle important dans notre culture. Je ressens une grande responsabilité en tant que directeur de l’équipe CMS. Parfois, j’ai l’impression d’être une caméra numérique constituée de millions de faisceaux de mesure qui doivent tous parfaitement fonctionner. Les trois mille scientifiques qui travaillent au détecteur CMS collaborent dans un esprit d’égalité et facilitent ainsi les choses. À la fin de mon mandat, je redeviendrai moi-même : un scientifique parmi d’autres. » 32

Produire un boson de Higgs Le professeur Incandela expose un scénario possible pour produire un boson de Higgs dans le détecteur CMS. Le croquis ci-dessous montre deux protons sur le point d’entrer en collision (en haut, à gauche et à droite). Les protons renferment des particules élémentaires, des gluons (représentés, ici, sous forme de ressorts en spirale) et des quarks. « quand deux gluons produisent ensemble un quark top, ce dernier associé à un antiquark top, peut former le Higgs », explique-t-il. La masse exacte du boson de Higgs (M ?) reste, à l’heure actuelle, la grande inconnue.

Les données de la collision de particules sont analysées dans la salle de contrôle du CMS à Cessy dans l’Ain. Des physiciens autrichiens, suisses et allemands collaborent aux expériences menées.


CMS Détecteur polyvalent compact Le détecteur solénoïde compact pour muons (CMS) étudie les collisions de différentes particules (protons et ions de plomb) et poursuit les mêmes buts scientifiques que l’expérience ­ATLAS mais a opté pour d’autres solutions techniques. L’aimant solénoïde à l’intérieur du CMS a une puissance 100 000 fois supérieure au champ magnétique de la Terre.

Poids : 12 500 tonnes Longueur : 21 mètres Diamètre : 12 mètres Champ magnétique : 4 teslas


Action

ATLAS Géant sous terre Situé 100 mètres sous terre afin d'être au niveau du croisement des deux faisceaux de protons de l’accélérateur, le plus grand détecteur de particules au monde se trouve dans une caverne souterraine aussi haute qu’un immeuble de 6 étages. ­ATLAS et CMS, au même champ de recherches, vérifient réciproquement leurs expériences. Le nom ATLAS (A Toroidal LHC ApparatuS – dispositif instrumental toroïdal pour le LHC) vient de la forme de son aimant extérieur (torus), semblable à un tore.

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Poids : 7 000 tonnes Diamètre : 25 mètres Longueur : 46 mètres


Fabiola Gianotti (Italie) Pianiste de formation, elle dirige ATLAS, sans doute la plus grande expérience scientifique au monde.

Le piège à particules Tous les détecteurs de l’accélérateur LHC sont constitués de plusieurs sous-systèmes voués à l’enregistrement des collisions de particules. Fabiola Gianotti nous parle du calorimètre électromagnétique d’argon liquide placé à l’intérieur du détecteur ATLAS. « L’argon est un gaz qui ne se liquéfie qu’à moins 200 degrés, d’où la nécessité pour nous de le stocker dans un appareil de réfrigération. Le Higgs (H) peut se diviser en deux photons (yy). Ils interagissent avec le détecteur et produisent une pluie de particules secondaires que nous mesurons. C’est l’une des approches possibles pour observer la particule de Higgs.

Que savonsnous de l’Univers ? « La recherche démontre que 25 % de notre Univers est constitué de ce que nous appelons la matière noire, une matière que nous ne pouvons pas encore définir car elle ne contient ni molécules ni atomes. Nous cherchons à l’observer avec le détecteur ATLAS. Tout comme le Higgs. 2012 est une année spéciale pour la recherche, nous voulons assister d’ici à décembre à la fin de l’un des plus grands mystères de la physique. Car nous connaissons maintenant le champ de masse où se cache le Higgs. Dans les prochaines années, nous planifions de doubler l’énergie du rayon de particules pour générer encore plus de particules lourdes et recueillir davantage de données. Je suis devenue physicienne parce que cette science donne des réponses. L’expérience ATLAS est une véritable collaboration internationale dans laquelle physiciens israéliens et arabes, chinois et taÏwanais travaillent main dans la main avec la même ambition scientifique. Au CERN, une seule règle régit les rapports humains : la meilleure idée prime, peu importe son auteur, qu’il soit un chercheur reconnu mondialement ou un simple étudiant. »


Action

Michael Doser montre une copie de la bombe antimatière vue notamment au cinéma : « Les faits sont faux mais, depuis, les gens sont plus curieux. »

AEgIS L’antiparticule de Galilée Au CERN, les expériences sur l’antimatière ont un accélérateur de particules dédié. Les chercheurs ambitionnent de démontrer, entre autres, la relation entre antimatière et force de gravitation, en référence aux expériences sur la chute des corps réalisées par Galilée du haut de la Tour de Pise (croquis page de droite).

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Le CERN est le seul endroit du monde où l’on peut produire de l’antihydrogène.


Michael Doser (Autriche) Responsable de la production d’antihydrogène.

Moyen-Âge – High-Tech, la rencontre Il y a plus de 500 ans, Galilée lâche, depuis la Tour de Pise, une balle en bois et une autre en plomb pour prouver qu’elles tombent toutes deux à la même vitesse. En 2014, l’équipe de Doser veut réitérer l’expérience, mais ce sera cette fois pour vérifier si la force gravitationnelle agit à l’identique sur un antihydrogène (H) et sur un hydrogène (H). Si tel est le cas : longueur de chute (X) = ½ gravitation (g) multipliée par le temps au carré (t²).

Comment produire de l’antimatière? « Elle est identique à la matière, mais avec des charges inversées. L’antihydrogène nécessite un antiproton et un antiélectron. Si on les laisse rentrer en collision, elles peuvent former un atome. Aujourd’hui, l’antimatière est utilisé dans les PET Scan, chargés de dépister le cancer. Ce qui explique la participation de médecins aux expériences du CERN. Nous injectons de l’antimatière dans des cellules de hamster et vérifions si la tumeur peut ainsi être traitée et guérie. L’objectif premier est la compréhension de l’antimatière. Notre expérience étudie le comportement de l’antihydrogène par rapport à la gravitation. Sa production est encore très inefficace. Un vaisseau spatial à propulseur Warp comme dans Star Trek ou une bombe antimatière font partie de la fiction. Avec la méthode actuelle, il faudrait un milliard d’années pour produire un gramme d’antimatière. Mais les erreurs d’appréciation publique présentent un avantage : être pédagogue pour démontrer à un public plus large que la réalité est bien plus excitante que la fiction. »


Action

John Ellis (GrandeBretagne) Physicien théorique et adepte du chaos méthodique.

Connaissezvous la théorie du Tout ? « Les physiciens théoriques expérimentent et ­développent des modèles mis en pratique dans ­l’accélérateur de particules. La théorie du Tout, c’est-à-dire une formule qui explique l’ensemble des phénomènes physiques, constitue pour la physique théorique une sorte de Graal. Néanmoins, je ne sais pas si on trouvera cette théorie de mon vivant. Je travaille au CERN depuis 1973. C’est la deuxième fois que je suis à la tête du département de physique théorique. Ici, de brillantes personnes se confrontent aux problèmes les plus difficiles de l’Univers. C’est comme garder une meute de chats où chacun court dans une direction différente. Mais cela a aussi de bons côtés. Je veille à ce que tous travaillent dans de bonnes conditions. Depuis toujours, ma devise est qu’un bon directeur est un directeur invisible. Un crayon, du papier et un carnet de notes restent mes outils de travail préférés. Dès le lever du soleil, j’épluche les dernières publications scientifiques. Sous la douche, je réfléchis à ces ­différentes l­ ectures. Aujourd’hui, par exemple, je lis un papier chinois sur les neutrinos supraluminiques. La supersymétrie, théorie qui peut expliquer la matière noire du cosmos, est un sujet qui ­m’occupe beaucoup en ce moment. » 38


Les chantiers du cosmos Nous demandons au docteur Ellis de résumer par un dessin 4 000 ans de physique théorique. Deux minutes lui suffisent. Le modèle standard (SM) et la théorie de la relativité générale (GR pour General Relativity) ne lui posent aucun problème. Le tracas des physiciens, ce sont les neutrinos (v) que la mécanique quantique (qM) n’explique que partiellement. quelques points relatifs à la théorie des cordes (String ?) et à la matière noire (DM) demeurent aussi sans réponses. une théorie du Tout (ToE pour Theory of Everything) doit apporter des réponses à ces questions.


Rolf-Dieter Heuer (Allemagne) Le directeur général du CERN est à la tête du plus grand accélérateur de particules au monde depuis 2009.

« Vif intérêt du Pape pour nos recherches » Big Bang, crise économique, Vatican... Rencontre exclusive avec le successeur de Robert Aymar à la tête du CERN. est souvent vrai. Dans notre cantine, vous trouvez des étudiants assis à côté de lauréats du prix Nobel. Nous ne faisons aucune distinction. En raison de la crise économique, craigniez-vous le retrait d’états membres ? Pour le moment, je ne vois pas de signes annonciateurs. Il ne peut y avoir de recherche scientifique sans expérimentation fondamentale. Nous

directe sur le quotidien. Mais si vous utilisez votre GPS sans prêter attention à la théorie de la relativité, vous n’arrivez pas où vous voulez. L’expression « particuledieu » est-elle une arme marketing pour le CERN ? Non, puisque l’expression vient de Leon Lederman (lauréat américain du prix Nobel de physique en 1988, ndlr) qui l’utilise dans son livre. Le Higgs est une particule élémentaire qui n’a aucun rapport avec Dieu. Les travaux du CERN sontils comparables à de la philosophie ? Les expériences non, mais leurs interprétations le sont. Être si proche du Big Bang soulève inévitablement des questions. C’est une zone délicate pour un physicien (rires). L’an dernier, j’ai rendu visite au Pape. Il a montré un vif intérêt pour nos recherches.

Circuit souterrain Détecteur ATLAS Boson de Higgs, supersymétrie, trous noirs

Détecteur LHCb Recherche de l’antimatière disparue dans le cosmos

À quelques encablures de Genève, le tunnel du LHC, d’une longueur de 27 kilomètres et d’un diamètre de 8,8 km, repose sous terre entre 60 et 100 mètres de profondeur. quatre détecteurs enregistrent les collisions de particules (voir graphique).

Détecteur CMS Similaire à l’ATLAS mais conception différente du système magnétique

GENÈVE

Détecteur ALICE Étude de l’état de la matière, juste après le Big Bang

La chasse aux particules, de Genève à Cuba Fondé en 1954, le Centre Européen de Recherche Nucléaire regroupe des chercheurs de plus de 110 pays qui mettent leur savoir au service de la recherche sur les constituants de la matière. En plus de ses 20 états membres, l’organisation coopère avec des instituts et laboratoires scientifiques basés en Asie, en Afrique, en Amérique du Nord et du Sud. Le budget annuel du CERN était de 850 millions d’euros en 2011. Pour plus d’informations : www.cern.ch

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PHOTO ADDITIONNELLE : GETTY IMAGES. ILLUSTRATION : SASCHA BIERL

   : Comment gère-t-on un conglomérat de 10 000 scientifiques ? -  : Grâce à la crédibilité, l’autorité acquises dans son domaine d’expertise et une approche constructive et familière avec tous les chercheurs qui travaillent ici. Le niveau de complexité des expériences que nous menons ne peut être l’affaire d’un seul homme. Que peuvent apprendre les autres organisations de l’approche collaborative pratiquée au CERN ? Tout ne fonctionne pas du haut vers le bas. L’inverse

sommes à l’origine de technologies nouvelles liées à la réfrigération et à l’électronique comme par exemple la toile ou la grille informatique. Les pays impliqués héritent en retour de ce savoir. Vous ambitionnez d’ici à la fin de l’année de confirmer ou d’infirmer l’existence de la particule de Higgs. Êtesvous sous pression ? Nous testons le modèle standard de la physique depuis 40 ans. Le boson de Higgs qui donne de la masse aux particules élémentaires est l’ultime chaînon manquant. Même si nous ne le trouvons pas, nous avons, pour la première fois, un grand trou dans le modèle standard, ce qui est aussi une découverte en soi. Mais le boson de Higgs n’a aucun impact dans la vie de tous les jours… La théorie de la relativité et la mécanique quantique n’ont pas non plus d’incidence


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Peter Fonda est à l’affiche de The Lazarus Protocol, film projeté pour la première fois au Festival de Cannes à la fin du mois.


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Fonda : « Je ne m’aimais pas » Intime de John Lennon dans les années 70, fumeur de marijuana devant la caméra d’Easy Rider, Peter Fonda, présent à Cannes à la fin du mois, est un des derniers monstres ­sacrés du septième art. The Red Bulletin a rencontré un des apôtres de la contre-culture. Sans écran de fumée... PHOTO ADDITIONNELLE : ddp images

Textes : Herbert Völker Photos : Philipp Horak

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de l’histoire d’Hollywood. Soudain, il apparaît. Charismatique et détendu en dépit d’une longue journée de tournage de son nouvel opus, The Lazarus Protocol (voir encadré p. 45). Peter Fonda s’amuse à faire tournoyer entre ses doigts une petite bouteille en plastique vide. « Plastique sans bisphénol », précise aussitôt ce grand défenseur de l’environnement. Le comédien l’a amenée des États-Unis pour la remplir à ras-bord d’eau du robinet de Vienne. Il a entendu dire que celle de la capitale autrichienne est sans doute la meilleure au monde. Il veut en juger par lui-même. Fonda n’a aujourd’hui qu’une seule obsession : la qualité de l’eau sur terre. La transition est toute trouvée pour échanger à bâtons rompus sur l’hygiène de vie, la politique et la liberté. Première et dernière prise.

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route est déserte, je me lâche ! Mais je sais où sont mes limites. Je me méfie toujours des feux et panneaux de signalisation. Je fais attention car n’importe qui peut surgir n’importe où. Ce qui est arrivé à James Dean… Oui. Mais lors de l’accident qui lui a coûté la vie, James roulait vraiment très vite (la Porsche 555 Spyder de James Dean a été percutée de plein fouet par une voiture qui lui a coupé la route. L’acteur américain est mort sur le coup, le 30 septembre 1955, ndlr). Je suis à fond quand personne n’est sur la route. Le problème, c’est ma taille. Je suis très grand, avec de longs bras et de longues jambes. La moto est plutôt faite pour les gens trapus. Quand je suis dessus, je ressemble à un gros insecte. Mais, ce n’est pas grave parce qu’au moindre obstacle, je peux réagir rapidement. Ce que je ne pouvais pas faire avec une Har-

« Mon père est vite devenu le personnage central de ma vie. Comme père et non en tant qu’acteur. » sur les routes de Californie avec cette MV Agusta F4 ? Les gens s’inquiètent beaucoup pour moi (rires). J’aime l’idée que vous ne m’imaginiez pas en simple cadavre à la fin d’Easy Rider mais plutôt comme un mythe. Un esprit invisible. Et, me voilà de retour sur Terre au guidon d’une F4 ! C’est vraiment une moto cool. Ma pièce de collection, mon Modigliani. Je la gare dans mon salon, au grand dam de ma femme. Pouvez-vous la piloter sans être à nouveau la cible d’un shérif ? Quand il n’y a pas de police et que la

ley ou une Triumph. Même pas avec ma BMW R100 RS de 1978. Pourtant, une sacrée bécane ! Tout le monde se souvient de sa première voiture. Votre père, Henry Fonda, vous avait offert une vieille Coccinelle. Pour mieux vous éloigner des paillettes d’Hollywood ? À la maison, le glamour et son décorum n’étaient pas tolérés. Gary Cooper et James Stewart, mes parrains, étaient avant tout des amis. Personne ne les considérait comme des acteurs ou des célébrités. Quand John Wayne et

PHOTOS ADDITIONNELLE : CORBIS (2), DDP IMAGES

e rendez-vous a lieu dans un des salons du Das Triest, splendide palace viennois. Le patronyme a de quoi impressionner. Peter Fonda, fils d’Henry, père de Bridget et jeune frère de Jane. Voilà pour le tableau généalogique. Les Fonda, pan entier

the red bulletin : Vous semblez en super forme, particulièrement affûté, un peu à l’image de l’époque Easy Rider. Être Peter Fonda, ça conserve ! peter fonda : J’ai une tête et un cœur en bon état. Je bois beaucoup d’eau. Tout va bien. J’essaie d’être bon avec les autres. Je n’ai pas un fond méchant mais si quelque chose me déplaît, là on me trouve. Cette force vient de mon âme. Je suis resté un gamin très heureux. Officiellement, j’ai 72 ans. En réalité, je n’en ai que 8. Votre vie ressemble à un véritable conte de fées. Dans Easy Rider, vous campez le personnage de Captain America, hippie à moto qui meurt dans l’explosion de sa Harley à la fin du film. C’était en 1969. On vous retrouve aujourd’hui, septuagénaire fringant au guidon de la moto la plus rapide du moment. Êtes-vous un danger public


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­ andolph Scott jouaient une partie de R pitch (jeu de cartes des cow-boys, ndlr) dans le salon, avec mon père, il arrivait que John vienne me piquer mon pistolet en plastique de gamin pour le poser sur la table de jeu comme dans un western. Juste pour se marrer comme on le fait simplement entre amis. Aucune frime làdedans. J’ai mis du temps à réaliser que le boulot de mon père avait quelque chose de spécial. Ma mère est décédée quand j’étais très jeune (sa mère, Frances Ford

succès aurait pu vous perdre, vous, l’homme de convictions. Comment avez-vous pris le dessus ? Grâce à mes gènes paternels. C’est-à-dire ? Gamin, je détestais mon prénom. Je ­demandais à mes amis de m’appeler ­autrement. En fait, je ne m’aimais pas. Je me trouvais trop maigre avec des mains trop efféminées. La signification de l’expression « Peter out »(1), c’était le comble ! Puis, j’ai découvert que « Peter » venait

« Soudain, Picasso dit : Vous êtes de la merde. On ­dirait qu’un oiseau vous a chié dessus. Inimaginable. »

Seymour, figure de la haute société new yorkaise, s’est suicidée à l’arme blanche dans un hôpital psychiatrique. Peter Fonda avait 10 ans, ndlr) et mon père est vite devenu le personnage central de ma vie. Comme père et non en tant qu’acteur. Les gens pensent qu’en étant le fils d’Henri Fonda tout devient facile. Mais jamais il ne m’a parlé du métier d’acteur, jamais expliqué comment il travaillait. J’ai appris en le regardant. Parfois, il m’emmenait avec lui sur un tournage, uniquement lorsqu’on pouvait s’occuper de moi. D’autant qu’à la maison, j’écoutais tous ces gens venus parler de leur métier. Je devais avoir 14 ans quand j’ai entendu Gary Cooper avouer : « Lorsque je suis à fond dans mon personnage, je n’ai pas l’impression de faire l’acteur. » Je me la suis appropriée : « Quand vous êtes à fond dans le personnage, vous n’avez pas l’impression de jouer. » Si tout paraît naturel, c’est gagné. On s’approche au plus près des spectateurs. C’est le secret du métier. Easy Rider est sorti en 1969. Il n’était écrit nulle part qu’il allait devenir culte et marquer l’histoire du cinéma. Ce

Peter Henry Fonda Famille Né le 23 février 1940 à New York City. Il est le fils unique d’Henry Fonda. Sa demisœur Jane, de trois ans son aînée, est aussi actrice. Marié quatre fois, Peter Fonda vit aujourd’hui à ­Paradise Valley dans le Montana. Parcours Débute au théâtre sur la scène du Omaha Community Playhouse, dans le Nebraska. Marlon Brando y lança sa carrière. Il débarque ensuite à Hollywood après un passage à Broadway. Débuts au cinéma en 1963 dans Tammy et le docteur.

Films marquants Les Vainqueurs (1963, nomination aux Golden Globes dans la catégorie du meilleur espoir masculin), Easy Rider (1969, nomination aux Oscars dans la catégorie du meilleur scénario), L’or de la vie (1997, Golden Globe du meilleur acteur, nomination aux Oscars), Passion of Ayn Rand (1999, Golden Globe du meilleur second rôle) et 3 h 10 pour Yuma (2007). Divers Ami des Beatles, il enregistre un disque en 1968. Anticonformiste, il aime donner son avis sur la politique.

de « petros », du grec ancien qui signifie la pierre, le roc. Quant à « Fonda », mon nom vient du mot italien « fondo ». Nos origines familiales remontent au XIIIe siècle en Italie. « Fondo » se dit « bottom » en anglais, soit le fond. Peter Fonda est donc devenu « Rock Bottom »(2). Quand j’ai su tout cela, je n’étais pas mécontent. Bien au contraire. Je n’avais donc qu’une seule façon de m’en sortir : viser haut. Je ne pouvais que m’améliorer tout au long de ma vie. Voilà pourquoi je pense que mon histoire familiale m’a permis de rester sur la bonne voie. On ne peut pas dire qu’Easy Rider ait délivré le message d’une vie saine… Avec l’argent gagné grâce à ce film, je me suis acheté un voilier de 25 mètres. Le plus beau que je n’ai jamais eu et que je n’aurai jamais. C’était ma maison. J’adore être sur l’océan et naviguer. J’ai

souvent effectué des traversées de plus de 4 000 milles nautiques (soit près de 7 500 kilomètres, ndlr). Je navigue toujours à l’aide d’un sextant, même si aujourd’hui le GPS est beaucoup plus précis. L’archipel d’Hawaii est devenu mon havre de paix. Je vais bientôt retourner à Maui pour naviguer, faire de la randonnée en montagne et du vélo. C’est un mode de vie sain. En mer, les problèmes de drogue disparaissent aussitôt. Les gens pensaient que j’étais sans arrêt défoncé sur le bateau. Mais, la nuit, un voilier, ça ne se gare pas comme une voiture. Sur l’eau, vous devez toujours être en éveil et vous ne pouvez pas utiliser un sextant si vous êtes défoncé. Il faut être clean. Vous avez la responsabilité de ceux qui sont à bord. Votre découverte de l’art a aussi joué un rôle important dans votre vie… Oui, grâce à Dennis Hopper (réalisateuracteur d’Easy Rider, icône, comme Peter Fonda, de la contre-culture américaine, ­décédé le 29 mai 2010, ndlr). Avec lui, j’ai pu rencontrer une flopée d’artistes célèbres. Par exemple, Dennis m’a tout expliqué du pop art, il m’a présenté à Claes 45


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cherchent leur voie ont mon respect. Je n’ai aucun préjugé. Quand j’avais 9 ans, j’ai demandé un jour à mon père en rentrant de l’école : « Papa, ça veut dire quoi nègre ? » Furieux, il a explosé : « Ne prononce plus jamais ce mot. » Mais il ne m’a pas expliqué pourquoi. Il était juste en colère. Le premier homme noir que j’ai rencontré était Nat King Cole. Si noir de peau, presque pourpre. Un homme adorable. J’en ai déduit que tous les gens de couleur étaient les personnes les plus agréables au monde. Prenez ça pour de la naïveté ou simplement de la nondiscrimination mais je n’ai pas changé aujourd’hui. Votre franc-parler a égratigné les politiques. Vous avez notamment ironisé sur le QI de George Bush et plus récemment, vous vous en êtes pris à Barack Obama après la marée noire dans le Golfe du Mexique. Pourquoi ? Leur incroyable ignorance m’agace. Surtout sur le manque d’eau et la piètre qualité de l’air sur la planète, alors que les conséquences sur la santé et la faim sont profondes. Par exemple, je soutiens 46

Médecins Sans Frontières. Aux États-Unis, nous avons Waterkeeper Alliance, organisation dirigée par Robert Kennedy Junior, quelqu’un de très brillant. Il est écrit dans la constitution américaine que l’eau appartient à tous et que nous n’avons pas le droit de la polluer. Et pourtant, des types comme Cheney, Bush et autres montrent ou ont montré une incroyable arrogance. Quel mépris ! On est en pleine décadence. Les gens ne se rendent pas compte qu’ils détruisent parce qu’ils n’écoutent que ces leaders politiques. Revenons à Easy Rider. Depuis la mort de Dennis Hopper, êtes-vous toujours en contact avec Jack Nicholson ? Je ne le vois pas beaucoup mais on se ­téléphone de temps en temps. C’est un mec vraiment marrant et un acteur énorme. Rappelez-vous la scène du feu de camp. Elle est mythique. Devant la camé-

Juste un sourire. Jack reprend : − Attends... Attends, laisse-moi voir. Ça sent bon. Il se penche vers moi. J’allume le joint. Jack le prend, tire dessus longuement et me lance : − Humm, ça sent bon. Tu es sûr que ça ne va rien me faire ? Je ne réponds pas, puis lui glisse : − Tu dois garder l’air dans les poumons longtemps. Le voilà qui retient sa respiration. Le plan suivant est sur Dennis (Hopper). Il est là, à côté de nous en train de parler de soucoupes volantes et de toute cette merde qui, soi-disant, vient de Mars ou de Jupiter. Dans son coin, Jack retient sa respiration. Je lui glisse : − Hé mec, t’es défoncé. − Je sais, oui. Mais j’ai vu ces trois objets, ils se déplaçaient. Ils ont fait du surplace

« Les gens adorent Easy Rider. Même aujourd’hui. Ils m’identifient à mon personnage. Mais je suis Peter Fonda. » ra, je prépare un joint. Jack a l’habitude de fumer depuis longtemps. Là, pour son rôle d’avocat paumé, il joue le type qui n’a jamais touché à ça. En lui tendant le joint, je murmure : − C’est de l’herbe. − Tu... Tu veux dire de la marijuana ? Je suis déjà assez fracassé avec l’alcool et tout le bordel. Je ne veux pas devenir accro. − Tu ne deviendras pas accro. − Je ne sais pas. Tu dis qu’il n’y a pas de problème ? La caméra revient sur moi. Je ne dis rien.

puis ils sont partis à toute vitesse. Puis, Dennis enchaîne et continue de ­parler d’extraterrestres… La performance d’acteur de Jack est bluffante. En une seule prise et quelques minutes, on avait tout dans la boîte. Mille fois merci, Jack ! Ce rôle pour Jack Nicholson… (Il coupe) Quand j’écris le scénario en 1967 au Canada, je m’interroge beaucoup. L’avocat, rôle joué par Nicholson, va être tué. Il est le plus innocent de tous. Dans toutes les dramaturgies grecques que j’ai étudiées, l’innocence est toujours la première vertu mise à

PHOTO ADDITIONNELLE : ddp images

Oldenburg, Roy Lichtenstein et ­Robert Rauschenberg (maîtres d’œuvre du pop art américain, ndlr). Grâce à mon père, j’ai aussi pu accéder au studio de Picasso. Un jour, Pablo me dit soudain : « Je vais faire un petit truc pour vous maintenant. » Il jette un coup d’œil à sa palette puis parle à haute voix en espagnol à ses peintures. Il enchaîne : « Vous êtes de la merde. Vous n’êtes rien. On dirait qu’un oiseau vous a chié dessus. » Et ajoute en français : « Vous êtes beau. Si joli. Tout en vous est équilibre et perfection. » Avant de reprendre : « Vous n’êtes qu’une merde. » Inimaginable. Une vraie performance d’acteur. Une démarche spirituelle comme le bouddhisme ne vous a jamais tenté ? Non, mais j’ai beaucoup de respect pour la méditation parce qu’elle apporte réellement quelque chose. Tous ceux qui


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mal. Il n’y a aucune raison qu’il soit tué mais ça arrive parce qu’il se trouve avec nous. Cette d ­ ramaturgie oblige les spectateurs à c­ hoisir avec qui ils ont envie de continuer le voyage. Il ne reste plus que deux personnages : Billy (joué par Dennis Hopper, ndlr) et moi (Peter Fonda incarne Captain America, le pote de Billy. Tous deux quittent Los Angeles au guidon de leur chopper pour rallier la Nouvelle-Orléans, ndlr). Voulez-vous suivre un type déjanté armé d’un couteau ou vous embarquer avec un mec énigmatique mais cool ? Si vous souhaitez prendre la route et mener une vie au jour le jour, il vaut mieux filer avec Captain America et non Billy. Quels sont les ressorts de la séquence finale ? Quand Billy se fait descendre, c’est un choc pour les spectateurs. Captain America fait demi-tour pour le secourir. Vous

voyez les types qui ont tiré dans le pickup dire : « Faut faire demi-tour. » Quand j’écris cette scène en ce 27 septembre 1967, je veux que les spectateurs s’imaginent que les tueurs vont retourner aider Dennis parce qu’ils ont réalisé l’horreur de leur acte. Mais, en fait, j’ai toujours prévu qu’ils revenaient pour se débarrasser du témoin. Et Captain America, sorte de personnage mythologique, se fait tuer à son tour. Sa moto explose. Sur le plan final, vu du dessus, on voit ma moto en flammes et le corps de Dennis plus loin. Vous n’apercevez pas le mien. Il faut passer image par image pour le deviner. Mais, je me répète, j’aime bien l’idée que l’on ne voit pas mon corps, comme si je n’avais été qu’un rêve, un mythe. Les gens adorent encore Easy Rider. On me le dit tout le temps. Ils m’identifient à mon ­personnage. C’est faux : je suis Peter Fonda. Je suis « Rock Bottom » mais les gens l’oublient. (1) Peter out signifie s’épuiser (2) Rock bottom pour toucher le fond 65e Festival de Cannes du 16 au 27 mai et sur www.festival-cannes.fr

The Lazarus Protocol, LE film Le film sera projeté pour la première fois à Cannes dans quelques jours. ­Produit par Terra Mater Factual ­Studios, Tomcat Productions, Finger Films et... Peter Fonda, The Lazarus Protocol déroule un scénario insoutenable autour des événements du 11 Septembre 2001 grâce à une multitude d’images d’archives. Le réalisateur Paul Finelli est derrière la caméra de ce long-métrage incontournable qui ­devrait défrayer la chronique sur la Croisette.

je ­prononce une phrase que George Bush a vraiment dite : « Soit vous êtes avec nous, soit vous êtes avec les terroristes. » Dans le film, je déclare aux terroristes : « Comment ce bouffon – en parlant de George Bush – dit que je dois vous appeler ? Les scélérats ? » Les scélérats ! Ce sont les deux seuls mots que j’ai ajoutés au texte. Cela rend encore plus réel le discours ­politique parce que c’est une remarque complètement débile. Du niveau cours élémentaire. Quiconque utilise un tel mot pour parler des ­terroristes est lui-même un bouffon. Ce terroriste doit recruter des

the red bulletin : Croyez-vous à la théorie selon laquelle le gouvernement américain est derrière les attentats du 11 septembre ? peter fonda : J’en ai entendu ­parler mais je ne la partage pas. Il était intéressant de jouer un type, fondamentalement mauvais, qui pense cela. Je crois aussi que, comme pour l’assassinat du président Kennedy, nous ne connaissons pas toute la vérité. Dans ce film, il y a notamment une scène où je reviens chez moi et parle à mon fils qui me croyait mort. Il réalise alors ce qui s’est vraiment passé le 11 Septembre. Je lui dois la vérité. Il comprend que je suis le cerveau derrière les attentats. Dans cette confession, je lui dis aussi à propos des terroristes à qui certains promettent le ciel après les attentats : « Qu’est-ce qui t’attend au ciel ? Malheureusement, nous n’avons plus de vierges à offrir mais peutêtre qu’il y aura soixante-dix belles chèvres. » Toujours sur les terroristes,

­ amikazes pour les attaques k contre les USA et les motiver pour cela. Il a votre look, votre côté décadent et votre humour irrévérencieux... Je suis d’accord avec l’humour ­irrévérencieux parce que j’adore les Marx Brothers. Ils étaient totalement irrévérents, très drôles. Je pense que notre gouvernement est vraiment décadent. C’est mon sentiment. Le style de vie américain doit être fou. Ce film montre-t-il que le monde est dirigé par la terreur ? Parfois je pense que le gouvernement affirme détenir des informations uniquement pour maintenir ce sentiment d’insécurité. Je sais que nous avons des ennemis. Je n’aurais aucune envie de les croiser mais ils ne m’effraient pas. Je raisonne comme ça car j’ai déjà un long vécu. Il n’y a que deux choses qui font peur aux bébés : la chute et les bruits. Ensuite, c’est la vie qui nous révèle toutes les autres. On n’échappe pas à cela. 47


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L’aventurier, psychiatre et ­aéronaute, Bertrand Piccard dans le cockpit du HB-SIA : « Nous voulons mettre en ­évidence la folie énergétique. »

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Tour du monde en avion

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avec le soleil pour unique carburant Un aventurier, un pilote de chasse et un avion qui carbure à l’énergie solaire. Les Suisses Bertrand Piccard et André Borschberg sont les cofondateurs de l’expérimental Solar Impulse. The Red Bulletin porte au pinacle cette révolution énergétique. Texte : Andreas Rottenschlager

Photos : Jean Revillard


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L’avion solaire HB-SIA au-dessus de Payerne, en Suisse. L’envergure d’un Airbus, le poids d’une petite voiture mais zéro émission polluante.

vec difficulté, Bertrand Piccard s’installe dans le cockpit étroit de son avion solaire. L’espace est réduit. Il peut à peine bouger et s’y sent comme prisonnier. Un technicien doit se hisser jusqu’à lui pour le relier par câble à l’ordinateur de bord. Ce Suisse de 54 ans, psychiatre et aéronaute, qui a signé le premier tour du monde sans escale en ballon, est paré d’une combinaison isolante, d’un gilet de sauvetage et, sur le dos, d’un parachute. Au-dessus de lui, 10 748 cellules solaires en silicium monocristallin, agencées sur les 200 m² de la partie supérieure des ailes, captent la lumière du soleil couchant. L’avion, immatriculé HB-SIA et long de 63 mètres, ressemble à un planeur et a l’envergure d’un Airbus A340. Mais lui doit se contenter d’un cockpit réduit. Grand comme une moitié de cabine téléphonique. Bertrand Piccard précise : « Je ne vois même pas les ailes. La vue d’ici est celle d’un cheval portant des œillères. » Cinq assistants poussent l’engin à mains nues pour le mettre en position de décollage. Lourd de 1 600 kilos, l’avion solaire le plus puissant du monde atteint à peine le poids d’une petite voiture familiale. Quand le pilote s’installe dans le cockpit, les ailes en fibre de carbone vibrent d’une extrémité à l’autre. La station météorologique a annoncé un vent de quatre nœuds (7,4 km/h). Une brise légère balaie l’aérodrome militaire de Payerne, dans le canton de Vaud (Suisse), où nous nous trouvons, à 50 kilomètres de Berne. Piccard scrute l’horizon. Il s’apprête à faire son troisième vol-test de l’année. Les pompiers et leurs camions prennent position au bord de la piste de décollage. 51


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Flashback. 24 heures avant le vol-test. Dans le hangar de l’aérodrome de Payerne, Bertrand Piccard, yeux bleu d’acier, se prélasse dans un canapé. Il est le descendant d’une famille d’aventuriers. Son grand-père, Auguste, fut le premier homme à monter dans la stratosphère et battit, en 1931, le record du monde approchant les 16 000 mètres d’altitude. En 1960, Jacques, son père, gagna, à bord du bathyscaphe Trieste, la profondeur de 10 916 mètres dans la fosse des ­Mariannes. Nouveau record du monde, propriété de la famille. « La curiosité fait partie de mon éducation », concède Bertrand. En 1999, il réussit, à sa troisième tentative, le tour du monde en ballon sans escale, bouclé en Égypte après 42 810 kilomètres et près de 20 jours de vol. La première tentative avait échoué au large de Toulon alors qu’un atterrissage forcé en Birmanie avait mis un terme à la deuxième, en f­ évrier 1998. « C’est à cette époque que je prends conscience de notre dépendance au gaz propane. » À travers son projet Solar ­Impulse, Bertrand Piccard souhaite mettre en évidence la folie énergétique : « Personne ne veut renoncer à son confort de vie. Mais est-il si indispensable ? Des technologies propres, au potentiel énorme,

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L’ex-pilote de chasse ­André Borschberg dans le simulateur de vol à Dübendorf (page de droite). Trois jours et Trois nuits à son bord pour préparer le tour du monde 2014. Vol de nuit dans le simulateur (en bas). Pour quelques ­minutes de sommeil, les pilotes carburent à l’autohypnose ou au yoga. ­Borschberg dans le cockpit, cicontre : « Une façon révolutionnaire de voler. »


André Borschberg : « Lors de mon vol Payerne-Bruxelles, j’ai atterri avec plus d’énergie dans la batterie qu’au décollage. Incroyable ! » 53


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existent déjà. S’il est possible de faire le tour du monde en avion sans une seule goutte de kérosène, renoncer à l’énergie fossile sur route devient envisageable. » Un tour du monde, programmé en 2014, doit se faire en cinq étapes. À Dübendorf, près de Zurich, les ingénieurs de Solar Impulse planchent déjà sur le successeur du HB-SIA, plus sécurisé, mieux adapté aux vols de longue durée et aux conditions climatiques changeantes. Ainsi, l’envergure des ailes a été allongée de huit mètres pour augmenter le nombre de cellules solaires. Le prototype actuel HB-SIA est déjà capable de voler jour et nuit grâce à une ingénieuse technologie d’accumulation : des batteries en LithiumPolymère se chargent durant le vol de jour et fournissent l’énergie nécessaire aux heures de navigation nocturne. Dès la tombée de la nuit, un compte à rebours se déclenche. Le défi du pilote : atteindre le lever du soleil avant que les accumulateurs ne se vident. À lui d’adapter son pilotage en essayant notamment de privilégier le vol plané à l’hélice. L’avion de Solar Impulse ne peut accueillir qu’un seul pilote et plus de 25 jours seront nécessaires au bouclage du tour du monde. La mission est impossible pour un seul homme. Piccard et le Suisse André Borschberg, 59 ans, se relaieront aux commandes de la machine solaire. Borschberg, cheveux courts et regard vif, fait dix ans de moins que son âge. On pourrait l’imaginer instructeur, dans un film comme Top Gun, à enseigner les manœuvres à de jeunes loups. Cet ingénieur de formation a obtenu sa licence de pilotage à l’âge de 17 ans avant même de savoir conduire une voiture. Pendant 20 ans, il a été pilote de chasse dans l’armée suisse avant de devenir créateur d’entreprises dans le secteur technologique. De Borschberg, Piccard dit qu’il est un bourreau de travail. Infatigable. Pour Borschberg, Piccard est un visionnaire. Unique en son genre. Qu’a pu motiver un pilote de chasse habitué à voler à Mach 1 de faire le tour du monde à 70 km/h ? « C’est une façon révolutionnaire de voler, répond Borschberg. Dans un avion de combat, on est en réalité à deux kilomètres derrière l’avion. Le système de pilotage réagit si vite qu’on doit rattraper la distance dans la tête. En revanche, dans le cockpit du Solar Impulse, la patience est de mise. La manœuvre souhaitée s’exécute toujours avec un temps de latence. » Il ajoute que ce tour du monde sans carburant ni émissions polluantes est l’occasion de contribuer au progrès de l’énergie solaire : « Lors de mon vol 54

La ville de Genève survolée par le HB-SIA de Solar Impulse.

Payerne-Bruxelles l’année dernière (le 13 mai 2011, premier vol en dehors des frontières de la Suisse, ndlr), j’ai atterri avec plus d’énergie dans la batterie qu’au décollage. Incroyable ! On peut même en redistribuer. » En 2010, Borschberg a établi, à bord du HB-SIA, trois records mondiaux en avion solaire : le vol le plus long (26 heures et 9 minutes), la plus haute altitude absolue (9 235 mètres) et la plus grande progression en altitude (8 744 mètres). Mais les deux pilotes suisses le savent bien, leur plus grand défi les attend. Un tour du monde et la traversée des océans obligeront Borschberg et Piccard à se maintenir en vol jusqu’à 150 heures sans interruption. Soit 16 Paris-New York d’affilée. Les pilotes de Solar Impulse auront à réaliser cette étape marathonienne aux commandes d’un cockpit minuscule et d’un avion à piloter comme un parapente surdimensionné. En cas urgence, la conception de l’avion ne permet pas un amerrissage.

TOUR DU MONDE BIO ! Solar Impulse est sur les rails depuis près de dix ans. 2003 : Étude de faisabilité à l’École Polytechnique fédérale de Lausanne (Suisse). Piccard et Borschberg dévoilent le projet Solar Impulse. 2007-2009 : Conception et réalisation du prototype HB-SIA. 2010 : Le pilote professionnel allemand Markus Scherdel effectue les premiers vols-tests. 7 juillet 2010 : André Borschberg, à bord de HB-SIA, réalise le vol le plus long et le plus haut de l’aviation solaire. 2011 : Lancement de la construction du deuxième avion, le HB-SIB, à Dübendorf près de Zurich. 2012 : Premier vol-test intercontinental du HB-SIA. 2014 : Tentative de tour du monde en cinq étapes en mettant cap à l’Est.


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Son fuselage léger se briserait au contact de l’eau. « Nous avons des parachutes », rassure Piccard. Si un aléa survient audessus de l’océan, ils devront sauter et attendre les bateaux de sauvetage. Pour Bertrand Piccard, la panique est plus périlleuse que le danger lui-même. « L’excès d’émotions entrave la réflexion et la prise de décisions appropriées. » Mais surmonter la frousse s’apprend. Par exemple, avant de dormir, André Borschberg vit chaque mission dans sa tête et en visualise tous les gestes de pilotage. Le 21 février dernier, à Dübendorf, en Suisse, il a démontré l’étendue de son endurance en effectuant en solo, une simulation de vol de 3 jours et 3 nuits. Seule la radio assurait les communications avec les médecins et techniciens. Le pilote suisse, installé dans une réplique à l’identique du cockpit du deuxième avion en construction, a twitté durant le test : 21 février, 17 h 27 : « Dix heures de vol. Je commence à m’habituer à la solitude. » 22 février, 15 h 08 : « J’utilise pour la première fois les toilettes à bord. Pas évident. » (Il a utilisé des toilettes intégrées à son siège et une bouteille en plastique.) 23 février, 12 h 12 : « Je gère de mieux en mieux les phases de sommeil. » 23 février, 13 h 56 : « Plus d’énergie pour chauffer l’eau. Aujourd’hui, je prendrai un repas froid. » Au terme des 72 heures, Borschberg a quitté le simulateur en chancelant. Mais, les équipes de Solar Impulse ont pu tout

Piccard, après son premier vol-test aux commandes du prototype HB-SIA : « On dirait un immense parapente. »

tester et évaluer la fatigue, l’ergonomie du cockpit, la nutrition, les toilettes, les exercices pour lutter contre les thromboses, la vigilance et l’aptitude à piloter en déficit de sommeil. Pendant ce vol-test, Borschberg a su éviter les thromboses aux jambes grâce à des exercices physiques. Il a effectué précisément 32 sommes de 20 minutes (les pilotes sont autorisés à dormir uniquement au-dessus des océans). Pendant ces courtes phases de sommeil, le pilote automatique prend le relais avant que le réveil sonne 20 minutes plus tard. « Le yoga et des exercices de respiration aident à s’endormir au moment voulu », précise Borschberg. L’autohypnose est privilégiée par Bertrand Piccard. Les deux pilotes lanceront, en 2014, leur tour du monde en mettant le cap à l’Est. L’un à bord de l’engin, l’autre au sol, et une liaison radio entre eux. Quand Borschberg sera seul dans le cockpit, balotté à 8 000 mètres d’altitude par moins 40 degrés, seulement protégé par l’isolation de l’appareil et un coussin chauffant, la voix de Piccard sera son soutien. À son tour, André encouragera Bertrand quand, malgré le vent, il devra maintenir le cap, contrebraquer à la force des bras (le système de pilotage n’a pas de système hydraulique pour des raisons d’économie d’énergie). Le premier vol intercontinental est prévu ce mois-ci. Le Solar Impulse doit décoller de Payerne et atterrir au Maroc en juin. Une distance de 2 500 kilomètres, son plus long périple. Les deux pilotes se relaieront pour mettre 48 heures et atteindre leur destination, en survolant les Pyrénées et la Méditerranée. Sur le terrain d’aviation de Payerne, Bertrand Piccard allume le moteur du HB-SIA. Des dizaines de curieux scrutent la machine volante filiforme. Il est 17 h 30, le soleil se couche. D’habitude, les avions de chasse de l’armée suisse tonnent sur la piste d’envol. Mais le décollage du Solar Impulse aux quatre hélices de 10 chevaux ne produit qu’un bourdonnement. Dès les premiers mètres, Piccard prend vite de la hauteur grâce à la légèreté de l’appareil. Soudain, l’énorme volatile s’immobilise dans l’air. Dans un monde asphyxié par le « toujours plus vite », le Solar Impulse, propulsé à l’énergie solaire apparaît presque comme une provocation. Paisible et silencieux, il se déplace proprement. Dix minutes après son envol, l’avion de Piccard n’est plus qu’un trait de pinceau à l’horizon. Le cockpit de Solar Impulse et le vol au Maroc de 2012 sont à découvrir et à vivre en streaming sur www.solarimpulse.com

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RE S Le quadruple vainqueur du Dakar nous a ouvert les portes de l’école « Fabrizio & Cyril », érigée au Sénégal depuis 2007. Pilote hors pair, le Français démontre ici, dans ce périple haut en couleurs, qu’il a le cœur sur la main. Credit:

Texte : Christophe Couvrat Photos : Philipp Horak

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Bienvenue à Yeumbeul, une des nombreuses ­étendues urbaines de l’agglomération dakaroise. Cyril Despres débarque ici au lendemain de sa victoire lors de l’édition 2005, scellée autour du Lac Rose. Fabrizio Meoni vient de trouver la mort pendant le rallye et n’assistera pas au premier des quatre succès de son coéquipier. L’Italien avait bâti une école à Dakar. Il n’en a jamais parlé. « J’ai rapidement vu que les élèves étaient, eux aussi, profondément émus par la mort de leur parrain, se souvient Despres. Il ne m’a pas fallu longtemps pour décider de continuer son travail, à la fois dans le but d’honorer sa mémoire et d’aider les habitants d’un pays qui m’a tant donné. »

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Dans un pays à majorité musulmane, deux professeurs, Sophie N’Diaye et Yacine Fall, s’adonnent à la traditionnelle prière sous le préau (à gauche) avant de reprendre les cours (double page suivante). Yeumbeul se situe à quelques kilomètres de la zone marécageuse des Niayes (ci-dessus). L’école a aussi son propre jardin, entretenu par les élèves eux-mêmes. Les légumes sont ensuite vendus au marché pour payer une partie des frais de fonctionnement de l’établissement.

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Elle s’appelle Khady Badji (page de gauche). Elle aspire à intégrer, du haut de ses 19 ans, la prestigieuse Université Cheikh Anta Diop de Dakar après avoir été adoubée par l’enseignante de français Sophie N’Diaye (en haut à gauche). 13 professeurs ont été embauchés. Leurs salaires sont financés par le coût de la scolarité. Deux euros par mois et par enfant sont demandés aux familles. À terme, l’objectif est de doubler la capacité d’accueil de l’établissement. 1 500 enfants non scolarisés patientent toujours dans les quartiers voisins. Le livre de Cyril Despres, Dakar x 4, est disponible sur le site www.cyrildespres.com au prix de 29,90 euros. Les bénéfices seront reversés à l’école « Fabrizio & Cyril ».

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CIAN HEALY :

« Un son ? Plutôt doux... » Ses oreilles, Cian Healy les met un peu partout. Dans les mauls les plus chauds ou sous son casque de DJ. Le pilier de l’équipe d’Irlande aime le beat et ça se voit. Texte : Declan Quigley Nous sommes le 11 mars dernier, au lendemain de la victoire de l’Irlande sur l’Écosse, lors du Tournoi des VI Nations (32-14). Cian Healy reçoit chez lui à Killester, banlieue huppée de Dublin. Il prépare deux cafés puis s’installe dans un immense canapé pas assez large pour accueillir sa carcasse d’1,85 mètre et ses 110 kilos. Il a mal partout mais ne moufte pas. Seuls huit points de suture au-dessus de son œil gauche témoignent du rude combat de la veille livré dans l’enceinte de l’Aviva Stadium de Dublin. Healy profite de ce jour de récupération, si précieux après quatre semaines consécutives de compétition. Dans un coin, les Anglais secouent les Français au Stade de France, mais ce pilier, pas gauche pour un sou, ne regarde pas (trop) la télé. Âgé de 24 ans, le joueur du Leinster préfère causer musique. C’est sous le nom de scène de « DJ Church » que Healy a fait deux apparitions au festival Oxegen. Une passion pour la peinture offre aussi à l’enfant de Clontarf un autre moyen d’expression. Rencontre entre BPM et ovalie.    : La plupart des rugbymen pratique le golf pour se détendre. Vous, c’est différent...   : Ah non, le golf, pas pour moi. Je ne crois pas être formaté pour rire franc et massif massif). ça (rire D’où vient cette passion pour la musique ? J’ai toujours aimé ça. Je compile les titres depuis des années et ma bibliothèque musicale ne cesse de s’enrichir. En grandissant, j’ai fini par comprendre qu’il y avait pas mal de possibilités de mix et j’ai demandé à mon 64

Photos : Patrick Bolger ami DJ Gordo comment faire. C’est parti de là. Depuis, tout s’enchaîne. Quel est votre style ? Dancy electro. Ça envoie plutôt bien. Je ne me vois pas jouer du Beyoncé ou des trucs dans le genre. Je fais un peu de R’n’B, juste pour moi, parce que ça ne colle pas avec le son qu’on veut entendre dans un festival ou dans un club. Vous jouez souvent en soirée ? Pas trop ces derniers temps car je me suis consacré au rugby à 99 %. J’attends patiemment l’été pour m’y remettre. Pendant la trêve, je pourrai laisser pousser mes cheveux et jouer en live. Quand avez-vous commencé ? Il y a trois ans. Gordo m’emmène au Krystle, à Dublin. C’est un des DJs résidents. À un moment, il me laisse la place derrière les platines et me dit : « Fonce mec, c’est à toi. » Ça fait partie de son enseignement.

Healy affiche 30 sélections au compteur du XV du Trèfle.

Oxegen est votre meilleur souvenir ? Oui, c’était juste énorme. On l’a fait deux fois. La première année, on a donné deux concerts et seulement un l’année suivante, mais c’était dans l’Electric Ballroom, devant pas mal de monde. L’ambiance était dingue. Êtiez-vous nerveux ? Un peu, oui, mais c’était gérable. Je ne m’inquiète pas trop, en général. Je n’ai pas peur de grand-chose. En quoi est-ce comparable au rugby ? Ça n’a rien à voir ! En concert, je ne m’attends pas à en prendre plein la gueule ! Malgré leurs différences, ce sont deux bonnes pressions. Un set génère quelque chose de très agréable tandis que le rugby engendre une forte tension et un stress de tout l’organisme. Envoyer un morceau, trouver le bon mix et un son, c’est plutôt doux, au contraire. Dans le vestiaire, les écouteurs sont légion ? Oui, pas mal de joueurs se réfugient dans la musique avant de jouer. Il nous arrive d’entrer dans des vestiaires qui diffusent du son mais, en général, chacun préfère écouter la musique qu’il aime. Vos coéquipiers assistent à vos sets ? Quelques-uns, oui. Tommy Bowe, Jamie Heaslip, d’autres encore, sont venus au festival Oxegen. On a fait une grosse fête. Ils sont même montés sur scène ! Je me souviens aussi de quelques nuits en plus petit comité où je prenais les platines pendant quelques minutes. Qu’en pense Declan Kidney, votre sélectionneur ? Je crois qu’il aime bien le fait que je sois différent. J’ai un bon feeling avec lui. Il me demande souvent si je viens de passer ma nuit à mixer. C’est plus une plaisanterie entre lui et moi. Avez-vous une ambition dans la musique ? J’aurais plutôt tendance à dire non. Je joue, j’aime vraiment ça et, si ça se trouve, je vais progresser suffisamment pour produire ou faire produire mes mix et je les mettrai à l’écoute sur internet, juste pour voir. Mais je ne pense pas être une star un jour. Enfin, vous avez fait le portrait de vos coéquipiers pour une œuvre de charité... J’ai tenté le coup, oui. J’essayais de faire des portraits réalistes en restituant chaque détail. Je ne prenais pas mon pied. La peinture ce n’est pas pour moi. Retrouvez Cian Healy sur notre appli iPad téléchargeable gratuitement.

PHOTO ADDITIONNELLE : ACTION IMAGES

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« Mon sélectionneur me demande souvent si je viens de passer ma nuit à mixer. C’est plus une plaisanterie entre lui et moi... »

À la ville, Cian Healy donne de sa personne derrière les platines et envoie du gros son, sous le nom de DJ Church.


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à l’Américain e ss a ch a L c. lo b 11 st gonflée à upe du monde 20 La concurrence e o C la e d r u e u q in le va professionnel, Aaron Gwin, faci u d e p ty é h rc a t e T de descente à VT Red Bulletin a e h T . d u S u d e u friq e. s’est ouverte en A tzburg. Reportag ri a rm te ie P r u o p embarqué

PHOTO : VICToR LUCAS

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Smith

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e Couvrat et Steve

Textes : Christoph


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À FONd POUR LA GLOIRE

Des mois de préparation et un seul objectif commun : être le plus rapide. Insuffisant toutefois pour l’Italien Lorenzo Suding (ici, à l’image) de l’équipe Pila-Black Arrows-MTB Herin School, au final 12e.

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6 000km de distance, deux sports ­reprennent leurs droits le 18 mars 2012. Sur deux continents, deux hommes se ­préparent à défendre un titre mondial chèrement acquis. Équipé de son casque intégral, chacun prend possession de son engin en fibre de carbone et dirige sur la piste toute son attention. Tous deux sont maîtres de leur discipline, les idoles à ­débouter. Plusieurs mois de préparation arrivent à terme. Pendant le millième de seconde où les feux dégringolent du rouge au vert, les questions trouvent leurs ­réponses, les doutes sont écartés, le poids de la pression maîtrisé. En Australie, Sebastian Vettel fléchit sa cheville droite et extirpe sa RB8 de la ligne de départ du circuit Albert Park de Melbourne. En Afrique du Sud, Aaron Gwin force sur ses deux jambes et arrache son 68

VTT Trek Session 9.9 du portillon de départ et fonce dans la première course de la Coupe du monde de descente, tenue au Cascades MTM Park de Pietermaritzburg. À l’instar de Vettel, cheveux châtains et yeux bleus, Gwin a écrasé la concurrence la ­saison passée. Comme personne auparavant. Sorti de nulle part, l’Américain est apparu telle une comète et a gagné cinq des sept manches de Coupe du monde. Sa performance record a contraint à l’humilité les précédents champions, tous dépassés. Son passé en motocross conjugué à une préparation physique exigeante ont posé de nouveaux jalons dans le monde du VTT. La réaction de ses concurrents était attendue à Pietermaritzburg. L’Américain de 24 ans, attaché à sa foi et à sa famille, est discret et humble. Mais ses yeux brillent d’une lueur d’acier et

r­ eflètent une détermination de fer. Il en est de même pour Steve Peat. Cet Anglais dégingandé, légende du mountain-bike, a tout gagné. Même à 37 ans, il reste capable de descentes tonitruantes. Sa seconde place, l’an dernier à Windham (New York) l’a confirmé. L’étape de Pietermaritzburg sera un marqueur important dans la ­carrière du champion du monde 2009 de descente : une 100e participation à une manche de Coupe du monde. En piste ­depuis dix-neuf saisons, il a été spectateur des changements profonds de son sport. À ses débuts, les cadres de vélos sont faits d’acier, les suspensions limitées à quelques centimètres et les freins invariablement cantilever. Aujourd’hui, sa bécane est une innovation sur roues, le Santa Cruz V-10 : cadre en fibre de carbone, freins à disque hydraulique et double suspension.


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« Chacun doit évaluer son entraînement à l’aune des faits et gestes de Gwinny. »

Vainqueur de la Coupe du monde de descente en 2011, l’Américain Aaron Gwin est l’homme à battre. Il termine second de l’étape inaugurale de la saison, devancé par le régional de l’étape, Greg Minnaar.

S’adapter au dernier cri est chose courante pour Peat et consorts, mais lorsque la nouveauté prend la forme d’un Gwin, le réveil est brutal. L’ Anglais est en alerte : « Chacun doit évaluer son entraînement à l’aune des faits et gestes de “Gwinny” .» Mais pas résigné. « Il faut élever son jeu. Il y a toujours des types qui débarquent et repoussent les limites des compétences et de l’entraînement. Ils font évoluer les méthodes de test et améliorent l’équipement. L’an dernier, Aaron a réussi à monter un très bon vélo. Mais cette année sera plus serrée. » Si Peat est le vétéran grisonnant, Danny Hart, Anglais de 20 piges et dernier à avoir soumis Maître Gwin, ne peut être que « le Kid ». Lors des championnats du monde 2011 de descente de mountain-bike (traditionnelle finale de la saison, hors du circuit de Coupe du monde) disputés en Suisse, à Champéry, Hart a dompté un parcours glissant et gras et remporté la descente avec près de 12 secondes d’avance. Un ­record, loin des standards habituels qui se mesurent en centièmes de seconde. Visionnez sur le net la course victorieuse et le courage du Kid. Il a donné une leçon et ­démontré surtout que Gwin n’était pas ­invincible. De quoi avoir une confiance gros braquet : « Après les championnats du monde, j’ai réalisé que je pouvais remporter des titres. Je veux gagner des courses contre vents et marées. »

photos : Sven Martin

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u vétéran et au Kid, il faut ajouter le héros local : Greg Minnaar. Le Sud-Africain est le plus constant de la décennie en Coupe du monde. Son style fluide et serein n’est pas aussi rapide et enthousiasmant que celui de Gwin, mais il pèse trois Coupes du monde (2001, 2005 et 2008) et un championnat du monde (2003). Battu la saison dernière par Gwin, ici, sur ses terres, Minnaar est le challenger du jour. Il se sent 69


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plus fort que jamais : « Je suis conscient de mes bonnes performances de la saison dernière, je remporte deux courses de Coupe du monde (le seul à gagner, hormis Gwin). La configuration de mon vélo est encore meilleure que l’an passé. Mais je dois encore travailler l’aspect physique. » Le premier Américain lauréat de la Coupe du monde de moutain-bike n’a en rien modifié sa préparation. Gwin : « Ma méthode est la même cette année. Ce que font mes concurrents ne fait pas partie de mes soucis. J’incite les autres à modifier leur approche ? Je n’en sais rien. L’essentiel, c’est que cela permette d’élever le ­niveau de notre sport. Je pense que cette 70

saison sera plus disputée. De nombreux jeunes vont vite, c’est bénéfique pour tous. » La compétition sera d’autant plus féroce que les leaders des marques ­mondiales comme Trek, Giant, Santa Cruz, Specialized et GT s’appuient sur des équipes dévouées en circuit et en usine. Les pièces prototypes comme des jantes en fibre de carbone adoptées notamment par les vélos de Minnaar et Peat sont testées durant les courses de Coupe du monde. Si elles résistent au ­traitement infligé par des pros de la ­descente vététiste, elles sauront endurer toutes les excentricités d’un amateur. Il en va de même en Formule 1.

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n revanche, le paddock de F1 ­respire moins la convivialité que le circuit mondial du mountain-bike. Les pilotes d’une même écurie sont rarement en bons termes, les vététistes et leurs équipes ne se font aucun cadeau chaque dimanche de compétition, mais entre deux courses chronométrées, l’heure est à la camaraderie. La proximité avec les fans est aussi tout autre. La zone des stands est ouverte au public au long de la saison, coureurs et spectateurs échangent. Le costaud Néo-Zélandais Brook MacDonald, 3e la saison dernière à Fort William et à Mont-Saint-Anne, opine : « Tout le monde est amical.


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Tous en selle. Moins raide que les étapes européennes, la descente de Pietermaritzburg est en revanche la plus rapide du circuit.

C’est comme une grande famille. Les gars deviennent des potes et on passe du temps ensemble à travers le monde entier. » Ceux qui doivent éviter de parler à la concurrence, ce sont les mécaniciens. Aujourd’hui en charge du GT Fury du champion du monde anglais 2010 Gee Atherton, le Belge Mark Morrison est mécanicien sur le circuit depuis maintenant 15 ans. Il a assisté à la professionnalisation du VTT qui, malgré tout, a su préserver son esprit de communauté pionnier. Il témoigne : « C’est une seule et grande famille. Nous avons différents employeurs, mais si j’ai besoin de quoi que ce soit, par exemple d’une pièce pour les freins, je peux l’obtenir d’un mécano concurrent. L’ambiance est très bonne. C’est l’une des raisons principales pour moi d’être dans ce sport depuis si longtemps. »

FAVORIS 2012

Cette année, l’Anglais Gee Atherton, vainqueur de la Coupe du monde 2010, chevauche le nouveau modèle de GT. Triple vainqueur de la Coupe du monde de descente mais ­orphelin de titres depuis 2008, Greg Minnaar, natif de Pietermaritzburg, a faim de victoires. Le champion du monde en titre, Danny Hart, minot anglais de 20 ans, a éclaboussé de son style spectaculaire les Mondiaux de Champéry l’an dernier. L’Américain Aaron Gwin, ­incontestable et incontesté maître de la ­saison passée est un professionnel accompli. Peu bavard mais conseillé par John Tomac, la première légende du VTT. Suivez le prochain direct de la UCI Mountain Bike World Cup sur www.redbull.com/bike

Gee Atherton

Photos : Sven Martin (5)

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« J’essaie de concrétiser un rêve. Je travaille l’hiver et mets de l’argent de côté pour y arriver. »

ur le parking extérieur, à l’écart des Morrison, Minnaar et Gwin mais aussi des coachs privés et stands d’entreprises, un autre groupe de concurrents affiche sa motivation. Tous préparent leur vélo à l’arrière de voitures louées. Ceux sont les coureurs sans sponsors. Ils ne représentent qu’un tiers des 157 engagés sur le parcours Elite de Pietermaritzburg mais ils sont l’âme du mountain-bike. L’intrus pour eux, c’est le sponsoring. « On a tous un travail à côté, dit l’Anglais Rich Thomas, assis portières ouvertes dans sa Nissan de location. Je suis ingénieur, et bien que je dispose de vélos gratuits, les vols, le logement et l’alimentation sont à ma charge. » Jaloux des avantages des vététistes sous contrat ? Au contraire. « Je ne me soucie guère de la chance qu’ont ceux au sommet de la pyramide. Je ne peux pas m’imaginer une meilleure vie, même si pour ça je dois payer de ma poche. » L’ Américain Curtis « The Dream » Keene se cale dans la roue de Thomas : « J’essaie de concrétiser un rêve. Je travaille l’hiver et mets de l’argent de côté pour y arriver. Dès qu’arrive l’été et la compétition, je monte sur mon vélo et essaie de participer à un maximum de courses. Venir ici depuis ma Californie m’a coûté 2 000 dollars (soit 1 531 euros) mais je peux faire un tour de piste en Afrique du Sud. » Et quelle course ! Vendredi, les épreuves de qualification ont réduit le nombre de concurrents à vingt femmes et à quatre-vingt hommes. Parmi eux, les

Greg Minnaar

Danny Hart

Aaron Gwin

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Le Canadien Steve Smith progresse sans cesse et se rapproche sérieusement des sommets de la discipline. Au top techniquement, il doit encore perfectionner son ­physique. Brook MacDonald est une bombe néo-zélandaise intrépide de 20 ans qui court pour l’équipe autrichienne MS Mondraker. Il dispose enfin d’un VTT qui peut le mener à la victoire. L’Anglais Steve Peat, 37 ans, est le vétéran. Professionnel aguerri, il se ­focalise sur les courses-clés de la saison. Sam Hill, triple champion du monde (2006, 2007 et 2010) dominait le circuit, comme ­Aaron Gwin a pu le faire l’an passé, mais des blessures à répétition ont stoppé la ­suprématie de ­l’Australien. Pour la première fois, il court cette année sur une version ­carbone du ­légendaire Specialized Demo.

Stevie Smith Brook MacDonald

Steve Peat

Sam Hill

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insi, Brook MacDonald a exagéré un tabletop (figure issue du funboard et qui consiste à coucher le vélo à l’horizontale en pointant la roue avant vers le haut) lors des qualifications et chuté lourdement. Peu de cyclistes se remettent d’une gamelle pareille mais MacDonald est un enfant du pays des All Blacks. Robuste. Il est dimanche sur la ligne de départ reconnaissable à sa joue balafrée et aux multiples bandages sur sa jambe droite. Déjà, une performance

« Le trio de tête à Pieter­ maritzburg se tient en moins d’une seconde. » avant le paroxysme final. En fin d’aprèsmidi, l’Australienne Tracey Hannah signe, après quatre ans d’absence par manque de sponsors, un retour retentissant et ­empoche la descente féminine. Chez les hommes, l’issue dépend de deux hommes. Car Steve « The Grizzled Vet » Peat a fini 15e. Danny Hart « The Kid », 41e, a chuté et déçu. « Sick » Mick Hannah, le frère de Tracey, est la surprise du jour en réglant la descente du jour en 3’58’’97. Un chrono exceptionnel et le leadership provisoire avant les passages de Gwin et Minnaar. 3’58’’61 pour l’Américain. C’est mieux. Mais la voie de la revanche s’ouvre au local de l’étape. En jeu, réparer l’affront de l’an passé et prouver que la domination de Gwin se discute. Peu après le départ, Minnaar accuse déjà deux secondes de retard. Un gouffre. La dernière fourchette est proche. La ­fusée sud-africaine décolle. Il refait son retard. Mieux, il prend une demi-seconde d’avance. Le héros local, challenger ­annoncé de Gwin, est impeccable sur les deux ultimes sauts. Il était chez lui, il a gagné. Le champagne coule à flots dans une fête folle. Comme Sebastian Vettel au GP de Melbourne, Aaron Gwin est 2e du premier raout de la saison. Une averse d’été précipite, en fin d’après-midi, le départ de la foule. La boue se forme, les parapluies sont de ­sortie, les stands sont démontés petit à petit et les longues files de voiture s’étirent à la sortie du parking. Chez les concurrents, le voyage retour s’annonce plutôt long depuis ce petit bout d’Afrique. Entre deux DVDs, ils rêveront sans doute à une tactique digne de ce nom en vue de la prochaine étape de Coupe du monde (Val di Sole), à conforter les premiers avantages ou à échafauder les prochaines attaques. Le trio gagnant de Pietermaritzburg se tient en moins d’une seconde. Ça promet pour le reste de la saison. Retrouvez la Coupe du monde 2012 de ­descente à VTT en direct sur www.redbull.tv ainsi que toutes les informations nécessaires.

Photos : Sven Martin (4)

Carré d’as

i­ ndépendants Rich Thomas et Curtis Keene ; à leur tête : Greg Minnaar devant Aaron Gwin. Dimanche, le Sud-Africain partira en dernier. Une situation qui comble les organisateurs, satisfaits de l’imminent mano à mano entre les deux favoris a ­ nnoncés, devant un public qui viendra nombreux pour le grand finish. Au crépuscule des années 90, le VTT jouissait de sponsors comme Grundig et Volvo dont les investissements permettaient aux organisateurs de claquer des sommes rondelettes à sept chiffres pour des retransmissions télévisées en direct. Au terme de ce sponsoring, les chaînes TV ont rayé peu à peu ce sport de leurs programmes en raison de la qualité moindre des images. Toutes les étapes de Coupe du monde sont aujourd’hui retransmises en direct sur le Net depuis l’accord conclu en mars entre Red Bull et l’UCI (l’Union ­Cycliste Internationale). Un nouveau tremplin pour le VTT. Mélanie Leveau, coordinatrice des événements moutainbike à l’UCI, en est convaincue : « La télévision sur Internet va nous emmener vers la prochaine étape. » Dimanche, la foule locale, garnie, s’enthousiasme pour un autre Sud-Africain : Burry Stander, qui termine 2e en cross-country (cette année, quatre de ses sept manches de la Coupe du monde de VTT cross-country sont organisées sur les mêmes étapes que le moutainbike). Sur les collines de Pietermaritzburg, le parcours de descente est long de 3,06 kilomètres pour 435 mètres de dénivelé. Il n’est pas le plus monstrueusement raide du circuit mais son tronçon central, plat et appelé « khatala » (fatigué, en zoulou) nécessite un coup de pédale soutenu. Au contraire des parcours européens raides et techniques, toutes les qualités du vététiste sont ici sollicitées car Pietermaritzburg, où les pointes à 70 km/h (imaginez-vous cette vitesse sur un vélo) sont fréquentes, est aussi un parcours très rapide. Sans oublier un saut maousse de 23 mètres à maîtriser sur le parcours masculin. En somme, difficile et exigeant.


ACTION

RAGOT : « CONSERVER MON MAILLOT ! »

PHOTOS : SVEN MARTIN

Championne du monde l’année dernière, Emmeline Ragot est une référence de la discipline. À l’aube de son 27e anniversaire, The Red Bulletin a rencontré la Poitevine lors de cette première étape du calendrier 2012.

THE RED BULLETIN : Cette saison est vraiment particulière car votre discipline n’est toujours pas olympique… EMMELINE RAGOT : Oui, c’est vrai. Ce n’est pas normal que la descente en VTT ne soit pas un sport olympique. J’aimerais bien que ce soit le cas évidemment. Le BMX l’est mais nous, nous devons encore attendre (le BMX se court sur un parcours dit « course » avec des sauts à huit de front alors que le VTT descente expose le coureur seul face au chrono sur un tracé à fort dénivelé d’environ 4 minutes, ndlr). Lorsqu’il y figurera, il sera sans doute trop tard pour moi. En fait, pour être aux JO, il faudrait retirer une discipline. Comment parvenez-vous à concilier votre vie d’étudiante en kinésithérapie et celle de compétitrice de haut niveau ? J’habite près de Poitiers. Je travaille un mois à l’hôpital et l’autre mois à l’école. Donc, c’est vrai, ce n’est pas facile. Je m’entraîne physiquement tout au long de la saison en pratiquant notamment la natation et la course à pied. Je fais aussi de l’escalade. C’est très bon pour les avant-bras. Je suis en deuxième année et c’est important pour moi. Mais cela peut être un désavantage car certaines vont en Californie ou en NouvelleZélande pour s’entraîner l’hiver. Moi, je ne peux pas. Ressentez-vous une pression particu-

lière en raison du maillot arc-en-ciel ? Non, il n’y a pas de pression particulière malgré mon titre de Championne du monde. C’est étrange d’avoir le maillot arc-en-ciel mais ça ne rajoute pas de pression. Ce titre a été acquis dans des conditions assez difficiles ? Oui, car la course s’est déroulée à Champéry (Suisse, ndlr) sur le circuit le plus pentu et technique qu’on puisse connaître. Au début, le temps était ensoleillé et sec. Mais la veille au soir et le jour de la course, c’était le déluge. La pluie n’a jamais cessé. Le parcours est devenu super glissant et boueux. Ça rajoutait de la difficulté à ce tracé déjà compliqué à la base. J’étais vraiment heureuse d’avoir gagné dans ces conditions. Remporter un deuxième titre mondial en Elite, c’est top ! Quels sont vos objectifs en 2012 ? Conserver mon maillot arc-en-ciel (les Championnats du monde ont lieu fin août en Autriche, ndlr). Je suis sur le tour depuis 2003 déjà… J’avoue que le général de la Coupe du monde me tente bien aussi. Pour cela, il faut gagner certaines étapes. Nous sommes en mai et il n’y a eu qu’une seule étape de Coupe du monde disputée… Oui, la prochaine est début juin en Italie. En plus, ici, en Afrique du Sud, je n’ai pas trop aimé le parcours. Ce n’était pas une

Date et lieu de naissance 27 mai 1986 à Angoulême Résidence Poitiers Taille, poids 1,58 mètre ; 53 kg Équipe / Vélo MS Mondraker / Mondraker Palmarès Quadruple Championne du monde, deux fois chez les juniors, deux fois Elite (2002 - 2003 et 2009 - 2011) et triple Championne de France Elite (2003, 2005, 2008) Surnoms « Méline » puis « Meumeu » puis « Meu »

descente pour moi car trop plate. Mais bon, on doit faire avec… Moi j’aime bien quand c’est plus technique avec des passages dans les bois et des virages serrés. J’y suis quand même allée à fond même si je n’étais pas à 100 % car j’ai toujours envie de faire le meilleur temps. La peur n’évite pas le danger. Quel regard portez-vous sur l’évolution de votre sport ? Le matériel a changé. Mais les filles sont toujours aussi pros. Il faut suivre le rythme. On se connaît très bien entre nous, que ce soit entre françaises ou pas. On est plutôt amies avec des filles comme Sabrina Jonnier, Myriam Nicole ou Céline Gros. Comment avez-vous découvert le VTT ? C’est une histoire assez drôle et atypique. Quand j’étais jeune, j’étais quasiment hyper-active. Du coup, je faisais au moins cinq sports en club par semaine entre la gym, le karaté et le tennis... Mes parents étant amis avec le président du club de VTT de Jarnac. À un moment donné, il dit à mes parents : « Je vais vous la fatiguer, il n’y a pas de problèmes, elle dormira le soir ! » (Rires) Ça a commencé comme ça. Mais ça n’a pas marché ! J’ai donc continué jusqu’à commencer la compétition. Nous étions comme une famille, il y avait un bon groupe. Nous sommes restés amis. Plus d’infos vélo sur www.redbull.fr

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ACTION

La combinaison de Stratos regorge de nombreuses ingéniosités techniques : ici, un miroir fixé au gant. Felix Baugmgartner s’en sert comme d’un rétroviseur pour parer au manque de visibilité dû au port du casque.

4

Taillée pour l’aventure

La David Clark Company est un maître d’œuvre incontesté d’opérations très « spaciales ». L’entreprise américaine met au point depuis plus de 50 ans les combinaisons de vol de générations d’astronautes. aujourd’hui, elle prend part au projet red Bull Stratos. Felix Baumgartner a trouvé la bonne combinaison. textes : Werner Jessner & robert sperl 74


photos : sven hoffmann/red Bull stratos

STRATOSPHÉRIQUE

red Bull Stratos est une mission menée à la frontière de l’espace. À bord d’une capsule pressurisée fixée à un ballon d’hélium de 50 mètres de haut, Felix Baumgartner, 42 ans, s’élèvera à 36 576 mètres avant de plonger en chute libre vers la Terre. objectif ? Quatre nouveaux records du monde :

1) La vitesse du son sans assistance 2) Le saut en parachute le plus haut 3) La plus longue chute libre 4) La plus haute ascension en ballon

The red Bulletin suit la mission au plus près. Nous présentons depuis trois mois les étapes spécifiques de l’expérience, toutes dispo sur l’ipad.

FéVrier : nous avons interviewé Felix Baumgartner et son mentor, l’américain Joe Kittinger, détenteur du précédent record de chute libre. marS : étude de la capsule de vol, du cockpit et des caméras embarquées à bord. aVriL : cap sur le ballon, transporteur de la capsule spatiale de Baumgartner. Ce moiS-Ci : décryptage de la combinaison de vol de Baumgartner et gros plan sur l’évolution historique des tenues spatiales.


À David Clark, maître-tailleur en combinaisons pour pilotes en missions d’espionnage et en essais de vol supersonique. 76

70 km de l’Ouest bostonien, se trouve Worcester, sans doute l’une des villes des États-Unis dont le nom est le plus mal prononcé (il faut dire « Wuss Ter », comme son homonyme anglais, célèbre pour sa sauce avec laquelle cette ville du Massachusetts est jumelée). Son autre originalité ? Bien que la ville ne compte que 200 000 âmes, votre GPS vit une galère terrible dans cette jungle urbaine, jonchée de parkings, de supermarchés, de bâtiments d’usines. Ces dernières sont planquées derrière d’anonymes façades de brique rouge. Celle, discrète, de la David Clark Company Inc. (DCCI) s’annonce sur Franklin Street. Les origines de l’entreprise remontent à 1941 quand son créateur David Clark, fabricant de textiles, confectionne les premières combinaisons de vol (elles seront portées pendant la Seconde Guerre mondiale). Il développera protections phoniques, tenues pressurisées mais également les casques des pilotes de l’US Air Force et des astronautes de la NASA.

En 2012, sa société est à la pointe des produits high-tech. À l’entrée, un vigile affable est la seule marque apparente de sécurité. Un assistant emmène les visiteurs au premier étage par un escalier hors d’âge. Là-haut, on se croirait dans une classe d’école… en pleine vacances. Juste un bruit de pas perce le silence environnant. Mais, assis derrière son bureau, il y a toujours quelqu’un pour un coucou sympathique. Porte après porte, toujours le même décor. La même ambiance. Jusqu’à l’arrivée dans le saint des saints : une pièce moyenne sans fenêtre, couverte de lambris et de lino. On s’attendait à un laboratoire futuriste, le contraste est saisissant. Nous sommes au cœur de la David Clark Inc., maître-tailleur en combinaisons pour pilotes en missions d’espionnage et en essais de vol supersonique. Or, le téléphone mobile de notre guide est l’unique équipement digital de la pièce. Partout du matériel couleur olive, grand comme une armoire, et équipé de compteurs et manomètres aux chromes

PHOTOS : SVEN HOFFMANN/RED BULL STRATOS

DaNS L’épiCeNTre De DaViD CLarK iNC. Les destinations de ces voyageurs-là se situent bien au-delà de notre horizon, vers d’autres planètes. Quelle garde-robe emporter ? Une combinaison spatiale bien entendu, laquelle est testée et passée au peigne fin avant le grand départ selon les méthodes traditionnelles.


ACTION

bien astiqués. Sur ces machines, des récipients gradués notamment. Une poulie pour simuler un saut en parachute pend du plafond, un ensemble de balances de cuisine est à l’équilibre sur un classeur. Dans cet endroit, génie, compétence et expérience semblent cohabiter avec esprit d’aventure. On se croirait dans la boutique d’un horloger, mais le boulot des artisans d’ici n’est pas une question de minutes et de secondes. Seuls les voyages dans l’espace les passionnent. Aux murs, sont affichés les preuves certifiées de l’expertise des techniciens de la DCCI. Deux douzaines de photos, aussi, les habillent. On y voit des pilotes et des équipages d’astronautes qui posent debout à côté de leur cockpit ou devant leur engin spatial. Beaucoup de messages de remerciement pour la qualité du travail du staff de la DCCI sont griffonnés sur les clichés. Au centre de la pièce, un siège de pilote sur une estrade avec ses faux airs d’Old Sparky, la macabre chaise électrique Made in USA. Mais dans cette pièce, les futurs astronautes n’éprouvent que derniers tests et contrôles d’imperméabilité de

miKe moN ami mike Todd est le tailleur officiel de Felix Baumgartner. C’est lui qui vérifie que la combinaison « tombe » parfaitement et que tous les systèmes de sécurité et de communication sont en bon état de fonctionnement. Todd est la dernière personne que Felix voit avant d’intégrer la capsule.

leur nouvelle combinaison. Ce n’est qu’après ces ultimes vérifications que les ingénieurs de la DCCI valident les tenues et leur expédition. (Certaines reviennent une fois la mission terminée. Ces trophées sont emballés dans du nylon et conservés dans une pièce d’archives. Chacune d’elles porte une référence écrite, à l’instar d’une improbable boutique de location de costumes. Les tenues de plongée dont s’équipe la DCCI pour ses expériences sont entreposées ici.) C’est Art Thompson, directeur technique de la mission Red Bull Stratos et bien connu de l’industrie aérospatiale, qui a contacté la DCCI. En janvier 2008, Felix Baumgartner s’est assis pour la première fois dans ce drôle de laboratoire. Reçu pour trois heures de prises de mesures. Ce jour-là, l’ambiance est fraîche, chaque camp attend beaucoup de l’autre. Les entreprises de l’industrie aéronautique et spatiale ont nourri leur succès de projets et contrats impeccablement précis. Ce business ne supporte pas l’à-peu-près. Pas de place pour les sentiments, c’est toujours surprenant pour les non initiés. Baumgartner : « Chez

Ces trophées sont emballés dans du nylon et conservés dans une pièce d’archives. Red Bull, on est dans un autre monde. Les gens font des blagues, tout est plus cool, personne ne porte de cravate. » De l’autre côté de la table, se tient John W. Bassick, alors vice-président exécutif de la DCCI. Il dit les réserves de sa société pour les projets civils. Leur dernier date du milieu des années 60. Nick Piantanida, un chauffeur-routier du New Jersey, a voulu battre le record du monde du saut en altitude établi en 1960 par le capitaine de l’US Air Force Joe Kittinger. Précisément celui que veut faire sien l’Autrichien Baumgartner. À 19 000 mètres d’altitude, un incident s’est produit, Piantanida tomba dans le coma, terrassé par le manque d’oxygène. Il était cliniquement mort quatre mois plus tard. Bassick témoigne : « Je l’ai annoncé ici à David Clark. »


LE CASQUE

Conçu également par David Clark et fait de matériaux composites, il comporte un micro et des écouteurs pour communiquer avec le centre de contrôle de la mission Red Bull Stratos. La visière, dotée d’un ­circuit de chauffage pour chasser buée et givre, se teinte à la lumière du ­soleil. Il alimente ­Baumgartner en oxygène : durant la chute libre, il ­utilisera celle fournie par deux petites ­bonbonnes logées dans le sac de son parachute.

Elle distingue la combinaison de Baumgartner de celles des pilotes et des astronautes à la mobilité moindre. La sangle au niveau de la poitrine sécurise le maintien du casque, poussé vers le haut par la pression exercée sur la combinaison. La sangle influence les mouvements de ­Baumgartner. Elle est courte en position assise mais il l’allonge dès qu’il se lève pour sortir de la capsule.

LA COUPE

4.1

La seconde épaisseur intérieure, tout en maille, est comme un filet ­réalisé au crochet avec un fil spécial. Pour parer toute déformation de la membrane.

La deuxième couche La cotte de maille du XXIe siècle

Le revêtement intérieur de la combinaison, totalement hermétique, est composé d’une membrane caoutchouteuse dont les coutures sont soudées par ultrasons. Une fois ouverte la porte de la capsule, alors ­dépressurisée, sa combinaison se remplit d’air et atteint une pression égale à une altitude de 10 700 mètres. Pour prévenir des dangers de la décompression, et notamment, de l’apparition de bulles d’azote dans le sang. Une valve de contrôle – le cerveau de la combinaison – maintient automatiquement constante la pression intérieure, sans ­tenir compte de l’altitude. Baumgartner, une fois sa combinaison enfilée, se focalise sur sa respiration : deux heures à inspirer de l’oxygène pour mieux chasser l’azote de son sang. Mais, quiconque inhale de l’oxygène pure doit en compenser les effets déshydratants. Par une ­ouverture dans son casque, Baumgartner peut ingurgiter du liquide à l’aide d’un tuyau. Dès lors, comment évacuer ses urines ? Plutôt que le port ­gênant d’une couche, l’Autrichien a opté pour une sorte de ­préservatif, l’urine est évacuée dans un petit récipient qui reste dans la capsule. « Cela ne me servirait pas à grand chose durant la chute libre », rigole-t-il.

La première couche L’ébullisme, sang danger

Une fois arrivé à un plafond prévu à 36 500 mètres, Felix Baumgartner sortira de sa capsule pressurisée pour entamer sa vertigineuse chute libre. Sa combinaison doit résister aux conditions extrêmes de son saut : le natif de Salzbourg va notamment devoir endurer une température de – 60 °C. La pression atmosphérique est telle à une altitude ­supérieure à 19 000 mètres que sans cette tenue pressurisée, son seul équipement de protection, le mal de décompression et l’ébullisme (des bulles d’azote font bouillir le sang) peuvent lui être fatals.

La société David Clark innove, depuis 1941, en matière d’équipement de protection dans l’espace. Trois modèles ont été confectionnés pour Baumgartner.

COMBINAISON AU CRIBLE


Les gants peuvent se détacher de la combinaison pour une meilleure dextérité. Un miroir, posé sur chaque dessus de gant, augmente l’angle de vue très réduit depuis l’intérieur du casque. L’Autrichien porte une paire de bottes, légèrement plus grande que sa pointure, pour pouvoir enfiler les chaussons pressurisés et intégrés à la combinaison. Un tissu ignifuge recouvre les bottes.

DES PIEDS et des mains

À l’instar du casque, les gants, fixés à la combinaison par une bague à visser, sont hermétiques.

OUVERTS, FERMéS

Un petit bocal, sous le siège de l’Autrichien, récupère son urine. Un tuyau le relie à un préservatif placé dans la combinaison. Avant de quitter la capsule, il débranche le raccord et remonte la fermeture éclair de sa tenue.

SOS BESOINS PRESSANTS

L’air chaud peut aider Baumgartner à lutter contre l’engourdissement provoqué par le froid. L’air frais permet de chasser la buée causée par la transpiration.

LE RéGLAGE DE LA VENTILATION

Un coup d’œil sur la doublure : on peut bien voir ici la complexité du crochetage des fibres synthétiques. Les fils sont reliés aux chaussons.

Il maintient automatiquement la pression intérieure de la combinaison à un niveau stable. Peu importe l’altitude où vogue Baumgartner.

LE CONTRÔLE DE LA COMBINAISON

Il dispose de trois combinaisons : un prototype sans cesse amélioré au fil des multiples tests, une deuxième pour toujours plus de vol-tests, et la troisième qui, pour des raisons de sécurité, ne sera utilisée qu’avec parcimonie. Avant la tentative estivale de record du monde.

Le troisième revêtement, au contact de l’extérieur, est un matériau ­textile, ignifuge et isolant, principalement contre le froid extrême. ­Aussi, Felix Baumgartner porte un sous-vêtement thermique, tant dans l’ascension en ballon que dans la chute libre, longue de plus de cinq minutes avant l’ouverture du parachute à 1 500 mètres du sol.

La troisième couche À l’abri du vent et du feu

photos : Balazs Gardi/Red Bull Stratos (2), Sven Hoffmann/Red Bull Stratos


4.2 La saga des

combinaisons

inspirées des tenues de plongée sous-marine, les premières combinaisons spatiales ont été fabriquées dans les années 30. La Seconde Guerre mondiale a accéléré leur développement, avant la rivalité jusqu’à la fin des années 70 entre américains et Soviétiques pour la conquête spatiale. La pionnière et américaine David Clark Company reste à la pointe de leur élaboration.

1965 Cette combinaison a été portée lors du vol expérimental du X-15, l’avion-fusée américain qui a atteint Mach 6,2 (7 274 km/h). C’est la première à faible épaisseur et entièrement composée de Link Net (matériau conçu par David Clark). Depuis, elle a démontré sa fiabilité. Certaines pièces de la combinaison pressurisée de Felix Baumgartner sont en Link Net.

DepUiS 1973 Taillée sur mesure, la combinaison russe Sokol est utilisée à bord des missions de la Station Spatiale Internationale. Au contraire des tenues multi-fonctions de David Clark demandées par la NASA, elle protège d’une dépressurisation de la cabine.

VerS 1960 De fabrication soviétique, cette tenue pressurisée et confectionnée pour chien est utilisée au tout début des programmes de voyages dans l’espace. Des tuyaux fournissent la pression d’air intérieure. Une technique mise au point dans les années 40 par Jim Henry, docteur à l’université de Californie du Sud. Sur le même modèle, la David Clark Company a élaboré des tenues pour les pilotes de X-1 (avion expérimental à moteur fusée). En 1960, en pleine guerre froide, l’Union Soviétique récupère la technologie après avoir abattu l’avion espion U-2 piloté par Francis Gary. 1965 Ed White porte une combinaison Gemini G4C lors de la première sortie extravéhiculaire américaine. On distingue le revêtement TMG (un tissu thermique micrométéoride) qui isole et protège des rayons cosmiques. Lors de leur vol record de 14 jours à bord de Gemini VII, Frank Borman et Jim Lovell ont porté une version améliorée de la G4C.

LeS aNNéeS 1950 BF Goodrich, General Electric, US Rubber, Arrowhead, ILC ou encore David Clark... Toutes ces entreprises s’intéressent à la fabrication de combinaisons spatiales. Ce prototype, d’origine inconnue, est typique de l’époque.

À parTir De 1977 Conçues pour les sorties dans l’espace, les tenues de la société américaine Hamilton Standard ressemblent à des armures. Ce type de combinaison permet de sécuriser les manœuvres techniques dans l’espace et d’emporter le paquetage de survie et de contrôle. Bien utile dans certains cas.

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VerS 1959 L’US Air Force, seule décisionnaire des tenues pressurisées (c’est toujours le cas) acte le retour de cette combinaison inspirée d’un modèle de BF Goodrich. Mais une fermeture en U, comme sur les tenues des pilotes de X-15, remplace l’habituelle fermeture éclair verticale. Ce modèle est similaire à celui réalisé par David Clark pour l’US Navy.

DepUiS 1975 Celle-ci remplace la première tenue des pilotes de l’avion espion US, le Lockheed SR-71 Blackbird. La NASA l’utilise pour les essais de vols supersoniques. Une combinaison de bord est aussi réalisée, les micros et émetteurs incorporés éliminent le bruit de la respiration durant les communications.

VerS 1955 Cette toute première combinaison Apollo est l’œuvre de l’Américain International Latex Corporation (ILC). Élaboré par Air-Lock Inc., société fondée par David Clark aujourd’hui dans le giron de la David Clark Company, le casque en polycarbonate est équipé d’un système de communication.

1961 Portée par Alan Shepard (premier astronaute américain), cette combinaison spatiale Mercury s’inspire du modèle Mark IV pensé par BF Goodrich pour l’US Navy.

À parTir De 1960 Les scientifiques planchent, depuis plus d’un demi-siècle, sur des combinaisons plus légères et utilisables sur d’autres planètes. L’idéal : enfiler la tenue à la sortie de l’engin spatial et la retirer facilement dans un sas tout en minimisant le risque de contamination. Actuellement, de nombreux projets sont à l’étude à la NASA.

DèS 1961 Les combinaisons des missions Apollo et leur casque bombé en polycarbonate (ici portée par Owen Garriott, à bord de Skylab, première station spatiale américaine), sont toujours utilisées par la Station Spatiale Internationale pour ses sorties extravéhiculaires.


ACTION

PHOTOS : PICTUREDESK.COM (2), GETTY IMAGES (7), CORBIS (3), FRANÇOIS PORTMANN/RED BULL CONTENT POOL, GIAN PAUL LOZZA

éDiTioN LimiTée Chez David Clark, les combinaisons spatiales sont fabriquées à la main. pour celle de Baumgartner, il faut compter un mois de travail.

Mais Baumgartner et Thompson savent défendre leur projet. La collaboration est scellée. Les décideurs de la DCCI ont été séduits. En collaboration avec les équipes de Red Bull Stratos, ils vont développer un prototype d’une génération nouvelle de combinaisons pleinement pressurisées et plus sûres. Un dîner au Brookline Country Club scelle l’accord. Le port du pantalon de costume est ici de rigueur. Comme d’habitude, Baumgartner est vêtu d’un jean délavé. Thompson vient à sa rescousse et lui en prête un. Leur tour de taille sont éloignés. Baumgartner nage dans le pantalon. Il en rit encore : « Je ressemblais à un vendeur de voitures bulgare. » « Baumgartner a effectué le premier essai de combinaison avec un modèle identique à celui des pilotes d’avions de reconnaissance », précise Mike Todd, ingénieur en charge de la logistique de Red Bull Stratos. Il est responsable de chaque détail de la combinaison et de son fonctionnement en coordination avec le reste du matériel de l’opération. À lui aussi d’aider l’ancien parachutiste de l’armée autrichienne à conserver son énergie avant le saut et de vérifier le bon fonctionnement de l’ensemble des composants techniques. Baumgartner a déjà expérimenté ce genre de tenue notamment lors de sa traversée de la Manche en vol plané de Douvres à Calais avec une aile en carbone sur le dos. Cependant, sa combinaison pour la mission Red Bull Stratos présente davantage d’inconvénients : liberté de mouvements et champ de vision restreints. La claustrophobie n’est pas loin, comme la contrainte pour respirer. « C’est toujours compliqué d’inspirer, reconnaît Baumgartner. Comme si vous courriez à toute

Le temps s’est arrêté. Les machines font le même bruit depuis des décennies. vitesse en mettant un ciré sur la bouche. Bien sûr, vous avez assez d’air mais vous avez toujours l’impression d’en manquer. » Joe Kittinger, qui a rejoint le projet en tant que consultant et mentor de l’Autrichien de 41 ans, ne doute pas de l’union entre Baumgartner et sa combinaison : « Felix doit passer le plus de temps possible à la porter, elle doit devenir comme une deuxième peau. » (Baumgartner a encore besoin d’une assistance psychologique pour l’enfiler. Voir The Red Bulletin n°4, février 2012).

Retour à la visite des lieux. Le même assistant de la DCCI nous mène à l’endroit où douze ouvrières spécialisées bouclent la confection de combinaisons. Là aussi, la tradition est privilégiée. Le temps s’est arrêté, ici les machines font le même bruit depuis un mitan de siècle. Peu importe, la méthode a su faire ses preuves. Les couturières tressent une maille entre la couche interne, étanche à l’air, et celle exposée à l’air atmosphérique. Cette technique, ersatz du macramé pour au final une cotte de maille de samouraï, prévient tout gonflage interne anormal. Le fondateur de la société, David M. Clark, a participé au développement de ces machines, capables de tisser, rang par rang, d’improbables toiles d’araignées. Les matériaux d’une combinaison spatiale, tels des tissus respirants et ignifugés ont des propriétés technologiques d’avant-garde. Mais ils sont manœuvrés et découpés sur des tables en bois usagées. Méthodes d’un autre temps. Le personnel est virtuose du ciseau, du mètre de couture, du crayon de tailleur… Toujours, l’ensemble des pièces est assemblé sur des machines à coudre mécaniques et les coutures vérifiées plusieurs fois point par point. Tout est annoté. La confection d’une combinaison exige un mois de travail. Et si une coupure de courant survient, le travail ne s’arrête pas : les ouvrières allument les bougies et les Singer continuent de cliqueter. Tout savoir sur la mission en cliquant sur www.redbullstratos.com ou en téléchargeant l’appli gratuite de The red Bulletin en français sur votre ipad

5 Le mois prochain :

entraîner le corps et l’esprit pour être au top niveau avant d’atteindre la stratosphère. et aussi : une histoire de science-fiction.

ÊTre eN Forme eT Le reSTer même si l’apesanteur lui facilite la tâche, le saut de Felix Baumgartner depuis la stratosphère exige, bien entendu, une excellente condition physique.

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ON NE MAÎTRiSE PAS LE DESTiN. CELA POURRAiT

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PLUS

DE CORPS D’ESPRIT

Contenu 84 VOYAGE Queenstown, Nouvelle-Zélande 86 CUISINE Les secrets d’un chef ou une recette souvent épicée 88 PRENEZ LE PLI Mariana Pajon déploie son matos 90 ENTRAÎNEMENT Nitsch, philosophe des profondeurs 91 FACES FOR CHARITY Œuvrez pour la bonne cause 92 CLUB & CD Le Bâoli fait son festival 93 EXPRESS Shabazz Palaces

PHOTO : FRITS VAN ELDIK

94 AGENDA Red Bull Racing vous donne l’opportunité de doubler la mise. Comment ? Rendez-vous page 91 et vous saurez tout.

96 FOCUS 97 KAINRATH 98 PLEINE LUCARNE


plus de corps et d’esprit

Adrénaline pure

let’s go le bon plan du mois

Si une ville peut prétendre au label « capitale de l’aventure », c’est bien la néozélandaise Queenstown, nichée dans l’île du Sud. Queenstown.

En 1862, la découverte de l’or dans la rivière Shotover, à Queenstown, provoque un déferlement d’aventuriers, attirés par la fièvre du métal jaune. Mais cette ruée vers l’or fait long feu même si la rivière offre, toujours à l’occasion, une pépite dorée. Aujourd’hui, une attraction de toute autre nature attire près de deux millions de visiteurs annuels : le tourisme d’aventure. Il y a encore 40 ans, Queenstown était un trou perdu. En 2012, elle est une ville animée et vibrante. La région d’Otago qui abrite les Southern Lakes, les villes de Wanaka et de Fiordland figure sur la liste des dix meilleures destinations ­touristiques du guide Lonely Planet 2012. En quoi cette région est-elle si spéciale ? Son paysage d’abord – pensez à demander un siège côté hublot pour vous garantir, en vol, une vue spectaculaire. Le climat aussi – sec mais ensoleillé en été, froid mais clair chaque hiver. Sans oublier sa richesse culinaire, sa vie nocturne et son énergie positive. Mais l’essentiel de l’offre proposée réside dans la pratique du golf, la découverte des vignobles et de fantastiques randonnées. www.queenstownnz.co.nz

Si vous n’avez pas de montées de vertige, le Kea 6-Line Tour permet une descente sensationnelle de la montagne. Joli couloir aérien.

Bon à savoir

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NZ

Wellington Queenstown

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Un vrai paradis pour aventuriers se trouve à Queenstown sur l’île du Sud de la NouvelleZélande.

Terrains, pistes, dénivelés ­flippants, les VTTistes n’ont que l’embarras du choix.

Y aller Queenstown est une destination ­réputée et recherchée pour ses sports d’hiver. Mais la ville est agréable tout au long de l’année comme le démontre l’explosion ­récente de ses visiteurs estivaux. Se loger Le Rees Hotel and Apartments, du nom de William Gilbert Rees, ­premier colon et fondateur en 1860 de Queenstown, offre de luxueuses chambres avec vue sur le lac et la chaîne de montagne des ­Remarkables. Se restaurer Le petit-déjeuner servi au Vudu Cafe & Larder est imbattable. Les meilleures tapas du coin sont à l’Atlas Beer Cafe. Testez le Patagonia Chocolates prisé pour ses fergburgers. Le True South, restaurant primé, complète l’attrait gourmand de l’endroit.


plus de corps et d’esprit

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TEXTE: ROBERT TIGHE. PHOTOS: DEREK MORRISON/SKLYINE, QUEENSTOWN RAFTING, SHOTOVER CANYON SWING, CP IMAGES/ZIPTREK ECOTOURS, MILES HOLDEN/OFFROAD ADVENTURES

Bons PLAns

Les sept merveilles de Queenstown Une offre riche et variée sur terre, dans l’eau ou en l’air, attend les aventuriers de tous niveaux. Queenstown.

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D’une branche à l’autre

Ziptrek Eco Tours est un bon point de départ pour vos aventures, idéal pour familles et ados. Le Kea 6-Line Tour démarre du haut du téléphérique Skyline Gondola pour se terminer, grâce à six tyroliennes – dont la plus raide au monde – au pied de la montagne. Les plateformes de lancement et de réception sont conçues pour favoriser les sensations fortes. En toute sécurité. www.ziptrek.com

1 Laissez-vous griser par une virée en quad. 1 Plein gaz « Nos bolides sont accessibles à tous », précise Lachie Columb, guide à Off Road Adventures. Fondée il y a plus de 20 ans par Columb père, cette entreprise familiale qui, outre Lachie, emploie Scott, le frère, pilote professionnel de moto-cross, propose randonnées en quad et motocross. Off Road Adventures offre aussi bien trois heures en montagne sur circuits balisés que plusieurs jours dans le district de Central Otago. Dans les deux cas, prévoyez des vêtements de rechange. www.offroad.co.nz 2 Trail-tastic Surnommé le « Whistler de l’hémisphère sud », le Queenstown Bike Park a la réputation d’être le meilleur plan pour les mordus de VTT. La télécabine 3

Descente en trombe sur la rivière Shotover

Skyline Gondola vous emmène au sommet de la montagne, à près de 800 m d’altitude, où vous attendent 30 km de pistes, comme la Hammy’s Track, idéale pour débutants et riche en surprises. Les bleues sont plus escarpées et plus rapides. Si vous voulez vous frotter aux pros, sept pistes noires vous attendent. www.skyline.co.nz/queenstown/MTB 3 Sensation top Une des plus anciennes activités de Queenstown mais aussi une des meilleures : le jetboat. Inventé en 1954 par un agriculteur local, il se pratique depuis 1970 sur la rivière Shotover, renommée « shotover jet ». Plus de trois millions de passagers ont risqué cette expérience à grande vitesse qui frôle, de quelques centimètres, les chutes du canyon. www.shotoverjet.com 4 En roulis sur la rivière Expérimenter le rafting à Queenstown commence par un trajet effrayant pour rallier le Skippers Canyon. Mais après, vous profitez d’un panorama splendide et de la jubilation d’avoir vaincu des rapides piégeux aux noms évocateurs... « Rock Garden », « After Shock », « Toilet », « Pinball » et « Jaws ». Passer sous le tunnel d’Oxenbridge, long de 170 m, est un autre challenge du parcours le long de la rivière Shotover. La meilleure période pour les rafteurs aguerris va de septembre à novembre. Le niveau d’eau est au plus haut et forme de puissants rapides. www.queenstownrafting.co.nz

6 Saut de l’ange « Non ! Attendez ! », crie le moniteur, faussement inquiet sur la plateforme, à 109 mètres au-dessus la rivière Shotover. La chute libre de 60 mètres ne dure que quelques secondes. Queenstown est la Mecque du saut à l’élastique. Pour les adeptes de grands sauts, le Shotover Canyon Swing et ses 70 sauts différents dont les « Gimp Boy Goes to Hollywood » et « Elvis Cutaway » ont de quoi satisfaire leurs besoins en adrenaline. www.canyonswing.co.nz 7 En joue, prêt, feu Le ball-trap est une des activités les plus appréciées à Queenstown. Il se pratique notamment dans le stand de tir Break One, basé dans l’enclos d’une ferme d’élevage de chevreuils, à dix minutes du centre-ville. Un moniteur vous montre comment tenir le fusil (un Beretta 12 calibres). Une activité idéale pour se détendre quelques heures avant de repartir à la chasse aux sensations fortes. www.breakone.co.nz 6

70 sauts possibles. À chacun le sien

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CUISINE GLOBALE LAISSEZ LE MONDE DÉCORER VOTRE ASSIETTE

Ce plat national à base de poissons et de crevettes affiche un demi-millénaire d’existence. MOQUECA BAIANA, BRÉSIL.

Si on vous dit Salvador de Bahia, vous pensez instantanément douceur de vivre et embruns. C’est qu’ils vous enivrent dans cette charmante ville de l’état fédéral du même nom (Bahia, nord-est du Brésil) aussi grand que la France. La Moqueca Baiana a été conçue dans les ruelles de Salvador. Au fil des siècles, ce plat national, cuisiné dans un pot en terre cuite, a bien changé. Moqueca vient de Moquém, autrement dit le gril fabriqué par les Brésiliens au XVIe siècle. Il se « nourrit » de feuilles et de bois afin de faire cuire les aliments sous la braise. En 1554, époque coloniale, un prêtre portugais découvre avec horreur que les peuples indigènes y font cuire de la chair humaine. La pratique cesse dans la foulée. C’est ainsi que la Moqueca devient un plat de poisson dont les ingrédients, l’huile de palme et le lait de coco, sont acheminés d’Afrique en Amérique du Sud via le Portugal et leurs célèbres navigateurs. 86

Pour 4 personnes : 1 kg de poisson (Sébaste ou Tilapia) 8 à 12 crevettes 2 poivrons (un rouge, un vert) 1 oignon 4 tomates 1 citron vert 2 gousses d’ail finement coupées 1 botte de coriandre 1 c. à c. de paprika moulu 1 feuille de laurier 50 ml d’huile de palme

100 ml de lait de coco Sel 2 c. à s. de Molho : un demi oignon finement haché, un poivron vert et 50 g de piment. Faire revenir dans 1/8 de litre d’huile d’olive, accommoder de 5 clous de girofle, 1 bâton de cannelle, ¼ de c. à c. de noix de muscade moulue et 1 feuille de laurier. Laisser revenir 45 min, retirer les épices et passer le tout au mixeur. Peut se garder au frais pendant des semaines.

Couper le poisson en filets ou en darnes. Laisser mariner quelques minutes avec les crevettes, le jus de citron vert, le paprika moulu, la feuille de laurier, l’ail et deux cuillerées à soupe de coriandre. Couper les poivrons, l’oignon et les tomates en tranches et étaler la moitié dans un grand plat en terre cuite. Déposer le poisson et les crevettes au-dessus, saler et recouvrir avec le reste des légumes. Mélanger le lait de coco avec le Molho. Verser l’ensemble (avec l’huile de palme) sur les légumes et le poisson. Secouer le plat un court instant pour bien mélanger l’assaisonnement. Couvrir et laisser mijoter 45 minutes. Ajouter la coriandre et servir très chaud avec du riz.

TEXTE : KLAUS KAMOLZ. PHOTO : FOTOSTUDIO EISENHUT & MAYER

Samba do Brasil !

LA RECETTE


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Pajon, l’insatiable

PRENEZ LE PLI L’INDISPENSABLE POUR LES PROS

MARIANA PAJON. Depuis 2000 et un premier sacre mondial (à 9 ans !), cette fille a presque tout raflé. Aujourd’hui, la Colombienne survole toujours autant le BMX du haut de ses 20 ans. À Londres, l’or olympique lui tend les bras.

2 Leatt Brace Assure une protection des cervicales et peut sauver des vies dans le cas de chutes extrêmes. Aujourd’hui, se passer de protection cervicale est irresponsable. 3 Oakley MX O-Frame Goggle J’en possède une panoplie entière. Elles sont top. 4 Casque Fly F2 carbone Procure un vrai sentiment de sécurité. 5 Chaussons Shimano DX SPD Conviennent aux pédales de BMX pour un départ éclair. Le Holeshot évite de se retrouver englué dans le peloton. 6 Pneus Maxxis Petit échantillon de mon stock de pneus. Selon le parcours et les conditions, les pneumatiques varient en fonction de la largeur et de la densité de la gomme. 7 Roue de secours Alienation Pas vraiment la partie la plus sollicitée du vélo mais partir sans roue de secours est imprudent. 8 Outils et pompe à air Indispensables pour garder mon vélo en état de marche tous les week-ends. 88

9 Pantalon Fly F-16 Obligatoire en BMX. 10 Râtelier à bicyclette Il résiste et s’adapte à tous les vélos. En plus, son design est plaisant. 11 Poignées Shimano PRO Une bonne maîtrise du vélo commence par d’excellentes poignées.

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12 Numéro UCI Le choix de mon numéro de dossard résume ma devise : me donner à 100 % dans chaque course !

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13 Gants Oakley Factory Pilot J’ai toujours deux gants de couleurs différentes. Cela me donne la sensation d’une course contre moimême et crée une motivation supplémentaire. 14 Maillot de Championne du monde En général, je suis la plus petite sur la ligne de départ mais grâce au maillot à arc-en-ciel, je reste la plus grande aux yeux des autres. Je suis très fière de ces couleurs, elles représentent beaucoup pour moi. 15 Cadre GW Pro XS Les cadres adultes sont trop grands pour moi et ceux pour enfants trop petits. Le mien a été conçu sur mesure par mon père en collaboration avec GW. Grâce à leurs talents conjugués, ce cadre me sied à merveille ! www.marianapajon.com.co

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TEXTE : WERNER JESSNER. PHOTO : MAURICIO GRANADOS

1 Genouillères et coudières Les tracés de BMX Supercross sont périlleux. Le fait d’être bien protégée augmente ma confiance.

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2 Mariana Pajon n’a pas d’adversaire à sa portée. Elle cumule 23 titres et avoue porter des gants de différentes couleurs pour avoir « la sensation d’une course contre moi-même… »


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L’air de rien

Un bon sofa, ergomètre et eau, voici la recette pour battre un record du monde. Herbert Nitsch nous détaille ici son entraînement quotidien. Semaines 1 à 3 / jour :

Semaines 3 à 6 / jour :

Résistance CO² (canapé) S’installer confortablement dans un canapé, stressé, devant une série télé. Enchaîner avec des inspirations-expirations. Ne pas respirer pendant 50 sec (après expiration).

Résistance à la pression (dans l’eau) Une plongée à 200 mètres (après inspiration) suivie de 8 à 10 plongées à 20 mètres (après expiration pour simuler de grandes profondeurs).

Résistance CO² (canapé) Canapé, série télé. 1 essai maximal : ne pas respirer pendant 4 min 30 environ (après expiration). 60 sec de récupération. 1 essai maximal. 30 sec de récupération. 1 essai maximal. 15 sec de récupération.

AU BOULOT

Résistance CO² (ergomètre) Résistance ergomètre : 80 W Pouls : 100 45 min d’exercices (après expiration) puis une inspiration et une expiration toutes les 20 sec.

Gestion du stress Éliminer tout facteur de risque. Répéter au sec, les yeux fermés, les gestes clés sous l’eau. Je dois les maîtriser quand le CO² me grise. Des essais avec mon sled font aussi partie intégrante du programme. Ne laisser aucune place au hasard. Avoir une solution de secours pour tous les systèmes. En cas de problème majeur comme la défaillance du propulseur à air, je dois être en mesure de le déclencher manuellement. J’ai toujours un plan B. C’est le garant de mon calme intérieur et de la réussite de la plongée en apnée.

S’ENTRAÎNER COMME UN PRO

Grand bleu HERBERT NITSCH. L’apnéiste autrichien a prévu de porter son propre record du monde à 244 mètres dans les prochaines semaines en Grèce.

www.herbertnitsch.com

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Nitsch, forçat de l’entraînement

Juste milieu

Nitsch utilisera, pour sa tentative, un sled, véritable prototype robuste, rapide et intelligent. La catégorie No Limit permet aux plongeurs d’utiliser tout type d’équipement. Le sled high-tech de Nitsch est ainsi spécialement conçu pour son record du monde. Il se compose de deux parties. Le plongeur se positionne au milieu. La partie supérieure contient de l’eau, la partie inférieure deux bouteilles à air comprimé. Le sled de Nitsch progresse à la vitesse de 2 m/s. À 244 mètres, il s’arrête brusquement, déclenchant l’ouverture des bouteilles à air comprimé. L’air libéré est dirigé dans la partie supérieure du sled où il y évacue l’eau, propulsant ainsi le sled vers la surface tel un moteur. Sa longueur totale est de 7 mètres. Les matériaux utilisés sont, entre autres, la fibre de verre et le carbone alliés à de la résine époxy. « En cas de collision avec un autre plongeur ou un requin, le sled ne doit pas se percer, précise Nitsch. Un trou et c’est une mauvaise nouvelle. »

TEXTE : ARKADIUSZ PIĄTEK. PHOTOS : BREITLING

Avec 32 records du monde de plongée en apnée à son actif, Nitsch est un phénomène. Personne n’a fait mieux. L’Autrichien ambitionne dans les prochaines semaines d’améliorer son propre record, catégorie No Limit, soit la plus difficile. Afin de porter cette marque de 214 à 244 mètres, Nitsch, 42 ans, doit rester 4 min 30 sous l’eau. À cette profondeur, son corps subit surtout une pression de 22 bar (la pression d’un pneu de voiture est de 3 bar). « Il faut dépenser le moins d’énergie possible, explique Nitsch. Votre corps doit s’habituer à la pression. Être serein est également important, le stress étant un élément consommateur d’oxygène. Toutes ces qualités s’acquièrent grâce à un entraînement contraignant (voir cicontre). Le mien commence six semaines avant une tentative de record... sur mon sofa devant une bonne série télé. » Comme quoi...


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Votre photo sur la RB8 !

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FACES FOR CHARITY. La campagne Faces for Charity s’affiche à nouveau cette année sur les monoplaces de l’écurie Red Bull. Faites un don de 15 euros et participez au GP de Grande-Bretagne à Silverstone avec les RB8 de Sebastian Vettel et Mark Webber.

Prenez-vous en photo

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PHOTOS : DAVID CLERIHEW/RED BULL CONTENT POOL, SUTTON IMAGES, GETTY IMAGES, SHUTTERSTOCK

TÉLÉCHARGEZ VOTRE PORTRAIT, CLIQUEZ SUR www.facesforcharity.com ET VOTRE VISAGE FIGURERA SUR LA RB8

Wings of Life chasse un million d’euros

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EN PISTE !

La campagne Faces for Charity s’est fixé un objectif élevé en 2012. Récolter un million d’euros pour l’association Wings for Life qui soutient la recherche mondiale sur le traitement des lésions accidentelles du cerveau et de la moelle épinière. Cette campagne s’inscrit dans la droite ligne de celle menée en 2007. Mais, cette fois, les portraits des donateurs figureront sur la carrosserie des deux RB8 engagées en compétition, ce qui double votre chance de figurer sur une F1 gagnante. Pour être l’un de ces 25 000 visages « embarqués » en course, il suffit d’aller sur le site www.facesforcharity.com et de télécharger votre photo. De son côté, l’écurie Red Bull apportera son aide financière à hauteur des fonds récoltés par l’achat de portraits, ce qui devrait permettre de dépasser la somme totale d’un million d’euros. L’association Wings for Life a été fondée en 2004 après l’accident de motocross d’Hannes Kinigadner, fils de Heinz, double Champion du monde de motocross, qui l’a rendu tétraplégique. Toutes les infos sur ce programme en tapant www.wingsforlife.com et www.facesforcharity.com

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« Lady Gaga crée un personnage » RUFUS WAINWRIGHT. Aiguillé par l’ancien producteur d’Amy Winehouse, le phénomène de la pop est de retour avec un album dance très perso.

AU CŒUR DE LA BOULE À FACETTES

Petit coin de paradis LE BÂOLI, CANNES. L’endroit est devenu incontournable pour faire la fête sur les bords de la Croisette.

Le nom Bâoli provient… … d’une source du Rajasthan, en Inde. Elle est connue pour sa pureté. Le club est à Cannes car… … avec tous les salons et son festival du film, cette ville est une fenêtre sur le monde. Nous voulions créer un nouveau lieu branché ayant un air d’Asie. L’endroit a ouvert ses portes en 2000. La première chose que voient les clients du Bâoli est… … l’arc en bois de trois mètres de haut situé à l’entrée. Pour être admis… … une tenue correcte est exigée. Il faut aussi être en agréable compagnie. Et, accessoirement, un joli sourire ne fait pas de mal.

Le Bâoli peut accueillir… … 1 000 personnes. La fête s’accompagne de… … Champagne et de Red Bull. La nuit la plus folle… … est, pour l’instant, celle de 2006 lorsque Bono donne un concert spontané pour le plus grand plaisir des clients présents. Une expérience inoubliable. Au départ, il n’est là que pour dîner. Les platines sont généralement confiées à… … des DJs de renommée internationale. On fait un break… … à la belle étoile sur un lit à baldaquin. Une soirée au Bâoli devient mémorable quand… … elle se termine par un bain dans la mer toute proche.

DANS LES BACS NOUVEAUTÉ

Interview : Marjorie Mondon, Responsable de la Communication du club Le Bâoli Port Canto Bld de La Croisette 06400 Cannes www.lebaoli.com

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Rufus Wainwright (38) fühlt sich in Operhäusern wie auf Konzertbühnen daheim

TEXTE : FLORIAN OBKIRCHER. PHOTOS : BAOLI (3), TINA TYRELL (1)

TOP CLUBS

Il y a là un faux air « Rufus Wainwright des années 70... est le plus grand comC’est la meilleure positeur au monde. » période. Sans disCelui qui avance ces cussion possible. Du quelques mots n’est disco à la country, autre qu’Elton John. Wainwright jamais auparavant Le Canadien est le est produit par les musiciens et les dernier dandy de Mark Ronson, le genres ne s’étaient l’industrie de la mufaiseur de stars. autant mélangés. sique, un génie qui Je trouve ça fascinant. navigue avec élégance entre Le morceau phare évoque tubes et savantes sonorités. l’enfant qui sommeille en Il alterne ballades sentimenvous. Vous sentez-vous tales pour pianos et opéras plus adulte depuis votre comme Prima Donna dont récente paternité ? la première représentation a Pas vraiment. Ma fille Viva eu lieu en 2009 à Manchesn’a qu’un an et ne parle pas ter. Out of the Game, son encore. Plusieurs morceaux nouvel opus, le septième, évoquent le décès de ma est le plus pop et le plus mère. Deux années sont personnel. passées mais la douleur est    : toujours aussi présente. D’où vient cette soudaine Traiter de sujets personlégèreté ? nels, cela va de soi pour   : vous ? Comparé à un opéra, la Il ne peut en être autrement. réalisation de cet album Des interprètes comme Lady s’apparentait pour moi à Gaga ou Leonard Cohen des vacances. En studio, créent un personnage. J’en Mark (Ronson, ndlr) et moisuis incapable. même, prenions un énorme plaisir. J’adore la musique classique mais le travail doit Nouvel album : obéir à des règles strictes. Out of the Game www.rufuswainwright.com Là, je savoure ma liberté.


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EXPRESS LE SON ÉCOUTÉ PAR LES MUSICIENS

« Parliament ? Mon élixir de jouvence »

Parliament – Mothership Connection J’adore le funk et James Brown bien sûr. Mais la musique de Parliament me parle encore plus. C’est le moteur de toute ma jeunesse, mon carburant, mon élixir de jouvence. À l’époque, j’écoute tous leurs albums en boucle mais surtout celui-ci. Il m’a rendu dingue pendant des mois. C’est probablement de là que vient l’influence funk de nos morceaux. Parler du funk de Shabazz Palaces est vain, leur musique en parle bien mieux, idem pour nous, ces groupes sont nos mères nourricières. Ils font partie de notre patrimoine génétique musical. Ce ne sont pas des phrases en l’air, loin de là.

TEXTE : FLORIAN OBKIRCHER. PHOTO : LEIF PODHAJSKY/ORIGINAL BAND PHOTO BY DAVID BELISLE

SHABAZZ PALACES. Avec son nouveau groupe, le rappeur américain Ishmael Butler est un ovni dans le monde du hip-hop. Miles Davis, Parliament et Coleman Hawkins sont, à ses yeux, des modèles d’intégrité musicale.

Voix distordue, roulement de basses et percussions africaines... Il y a vingt ans, un groupe comme Shabazz Palaces était inimaginable. Le son du duo de Seattle est bien trop fringant et hors norme. Le rappeur Ishmael Butler et le multiinstrumentaliste Tendai Maraire puisent leur musique aux sources de la pop. Un son inclassable que l’on peut comparer à un message d’extraterrestres à destination de l’Égypte ancienne, le secret codé des constructions de pyramides, un message aux rythmes atomisés, des mantras mystiques, des chants africains et un texte insolite. En un mot, une musique à l’intensité hypnotisante. Les principaux magazines et blogs influents sont unanimes : le premier album Black Up est un des meilleurs de l’année. Des critiques avertis parlent même d’une nouvelle expérience auditive. Sub Pop, le célèbre label indie-rock qui révèle Nirvana et actuel label de Shabazz Palaces – son premier groupe hiphop sous contrat – ne dit pas autre chose. Le duo est le précurseur d’un nouveau genre musical situé entre guitare indie et hip-hop, genre dont le nom reste encore à déterminer. Du rap avant-gardiste disent certains. « Cela m’est bien égal comment les gens l’appellent, lance le leader du groupe Ishmael Butler récompensé d’un Grammy en 1993 avec son ancien groupe jazz rap Digable Planets. Pour moi, c’est toujours du hip-hop. Du hip-hop dans la tradition des musiciens afroaméricains de demain. » Les albums fétiches de Butler le confirment. De George Clinton et son groupe funk Parliament à Sun Ra, le dieu du space jazz, en passant par Miles Davis ou encore Michael Jackson.

Sun Ra – Atlantis Mon lien avec Sun Ra est très ancien. Mon père est comme lui, originaire de Philadelphie et il est pote avec John Gilmore, son saxophoniste. Le groupe s’engage aussi pour les quartiers défavorisés de la ville. Ce n’est pas un combat facile. J’ai huit ou neuf ans quand j’écoute cet album pour la première fois. Je suis immédiatement emballé, sans être capable de l’expliquer. Aujourd’hui, je sais. Enfin. Sa folie et son courage, alliés à une grande compétence, m’ont emballé. Sun Ra prouve qu’il n’y a pas de limites dans la création. Il a eu l’effet d’un frère spirituel, d’où une influence importante. J’aime aussi délirer et voir où cela me mène.

Miles Davis – Live-Evil J’aime cet album pour sa musicalité et le son qui en ressort. Son esthétisme est tout simplement magique. Il respire la richesse et la chaleur. Rien à voir avec la daube digitale qu’on nous sert de nos jours à la radio du matin au soir.

Michael Jackson – Off The Wall Le travail de Quincy Jones sur Off The Wall et Thriller est, pour moi, inégalable. On frôle la perfection. L’esthétisme du son est ici tout simplement incroyable. Ses arrangements et ses mixages sont aux petits oignons. Chaque élément trouve la place qui doit être la sienne tout en étant en parfaite harmonie avec le reste. Avec, pour cerise sur le gâteau, un Michael Jackson au top de sa forme. Quel talent vraiment stupéfiant !

Coleman Hawkins – Night Hawk À un moment donné, tout musicien doit devenir hermétique à toute influence externe afin de trouver son propre son, son originalité. Le saxophoniste Coleman Hawkins y parvient ici. Ses albums ont, à l’instar de Miles ou de Quincy, cet esthétisme si particulier.

Black Up (Sub Pop) et dates de concerts sur www.shabazzpalaces.com

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Agenda Mai-Juin 2012

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Sports 4–20 MAI, HELSINKI ET STOCKHOLM

Championnats du monde de hockey sur glace

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Pour la première fois depuis 1930, ces Mondiaux sont organisés par deux pays. Conséquence, il y aura deux poules éliminatoires de huit équipes chacune. Pays hôte, la Finlande peut compter sur le soutien de ses supporters, même si elle n’en a pas vraiment besoin. Elle est Championne du monde en titre.

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Billabong Rio Pro troisième étape de l’ASP World Tour ramène 3 La les surfeurs sur le rivage de la métropole brésilienne, précisément à Barra da Tijuca, un des sites des JO de 2016. Au-delà du pur plaisir de rider des vagues de rêve, la dotation de 500 000 dollars – la plus élevée du circuit cette saison – est très motivante. Le champion local, Adriano de Souza, s’apprête à défendre son titre sur des rouleaux qu’il connaît comme le fond de sa poche. Michel Bourez aura aussi son mot à dire. 3

24–27 MAI, MONTE-CARLO

Grand Prix de F1 de Monaco Avec les 500 miles d’Indianapolis et les 24 heures du Mans, le GP de Monaco compose la Sainte Trinité du sport automobile. Nelson Piquet, triple Champion du monde, déclarait à l’époque que cette course revenait à « piloter un hélicoptère dans son salon ». S'il est entré l’an dernier dans le cercle très restreint des vainqueurs sur le Rocher, Sebastian Vettel est encore loin du record de six victoires d’Ayrton Senna. Nombreux sont les VIP qui séjournent d'ailleurs au Vista Palace Hotel de Roquebrune Cap-Martin ce week-end-là, histoire de profiter du panorama.

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Ivan Basso vers la passe de trois sur le Giro. 27 MAI–10 JUIN, PARIS

5–27 MAI, DANEMARK ET ITALIE

Tournoi de Roland Garros

Tour d’Italie

Bien sûr, d’un strict point de vue logistique, le départ a lieu au Danemark. Le Tour de France a donc fait des émules. Mais le Giro est avant tout une épreuve de référence de l’autre côté des Alpes. Souvent considéré comme une répétition générale avant le Tour, il traversera le pays en partant de Vérone pour descendre vers le Sud et Lago Laceno avant de remonter toute la Botte pour la grande bagarre finale dans les étapes de montagne. L’Italien Ivan Basso, vainqueur en 2006 et 2010, est une fois de plus considéré comme le grandissime favori.

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Le seul tournoi du Grand Chelem disputé sur terre battue se déroule pour la 111e fois sur les courts de la Porte d’Auteuil. Une question est sur toutes les lèvres. Qui peut inquiéter Rafael Nadal ? En 2011, le Majorquin remportait une finale haletante contre Roger Federer en quatre manches (7-5, 7-6, 5-7, 6-1), son éternel rival, égalant ainsi le record de six victoires de Björn Borg. Dans le tableau féminin, la Chinoise Li Na scellait le tout premier succès asiatique dans un tournoi du Grand Chelem.

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Adriano de Souza joue à domicile.


PLUS DE CORPS ET D’ESPRIT

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3 Alison Krauss en concert à Yosemite 18–20 MAI, LA NOUVELLE-ORLÉANS

Mid City Bayou Boogaloo Festival Venez faire la fête avec 20 000 personnes sur les rives du bayou Saint-John, juste pour le plaisir. Ce festival gratuit a été créé après l’ouragan Katrina et les recettes sont versées à la fondation Mothership qui œuvre à préserver la culture à la Nouvelle-Orléans. Anders Osbourne, The Revealers et The Soul Rebels Brass Band ont été à l’affiche de l’événement ces dernières années.

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24–28 MAI, YOSEMITE NATIONAL PARK, CALIFORNIE

25–27 MAI, EZULWINI VALLEY, SWAZILAND

Bushfire Festival

Ce festival met en exergue la scène artistique locale et de nombreux projets sociaux. Les musiciens africains les plus en vue se produisent ici, dont la chanteuse nigériane Ayo, connue dans le monde entier. Théâtre, cirque, stages de danse sont aussi au programme des réjouissances qui attirent 20 000 visiteurs venus du monde entier. Le Bushfire Festival est un vrai moteur économique pour le tourisme d’un pays comme le Swaziland.

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Strawberry Music Festival

Difficile d’imaginer endroit plus idyllique pour l’événement. Le Strawberry Music Festival se déroule au Mather Camp, à l’entrée ouest du Yosemite National Park, en Californie. 21 concerts sont programmés dont ceux d’Alison Krauss et de Union Station avec Jerry Douglas, Trampled by Turtles ou Robert Earl Keen.

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PHOTOS : IMAGO (2), GETTY IMAGES (2), CORBIS, INTERTOPICS

Rafael Nadal très terre-à-terre à Paris

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Culture

Le diable s’habille en Adidas… 10 JUIN, CASTRILLO DE MURCIE, ESPAGNE

16–27 MAI, CANNES

El Colacho

À Monaco, les moteurs de F1 rugissent. À Cannes, toute proche, ce sont les projecteurs qui chauffent quand les stars d’Hollywood arpentent la Croisette pour présenter leurs nouveaux films dans le festival le plus célèbre au monde. L’affiche du Festival met en scène Marilyn Monroe à l’occasion du 50e anniversaire de sa mort. À noter que Bruce Willis, Edward Norton et Bill Murray sont à l’affiche de Moonrise Kingdom, projeté en ouverture.

Grosse journée pour les bébés à Castrillo de Murcia, près de Burgos. La tradition veut que la foule poursuive le diable, « El Colacho », à travers les rues de la ville le jour de la Fête-Dieu. Le point d’orgue de la manifestation consiste à obliger ce Belzébuth humain, habillé de jaune et rouge, à sauter au-dessus de rangées de nouveaux-nés posés au sol. Un rituel pour les protéger de la maladie et du malheur. Créée par la fraternité catholique de Santisimo Sacramento de Minerva, la manifestation remonte à 1620. Attention, âmes sensibles s’abstenir.

La palme à Marilyn

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Edward Norton en scout dans Moonrise Kingdom

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Samir Nasri évitera-t-il les obstacles à l’Euro ?

Focus Mai 2012 4-20 MAI, MONDIAUX HOCKEY SUR GLACE

Les Bleus en outsider Présente dans le groupe A en compagnie des ÉtatsUnis, du Canada, de la Suisse, de la Finlande (pays coorganisateur avec la Suède), du Kazakhstan, de la Slovaquie et du Bélarus, l’équipe de France aura fort à faire. 14e nation mondiale, les Bleus doivent à tout prix éviter de terminer au dernier rang du groupe, synonyme de relégation en Division 1. www.iihf.com 27 MAI, FRANCE-ISLANDE À VALENCIENNES

Dernières marches

L’équipe de France de football dispute dans le Nord le premier de ses trois derniers matches de préparation à l’Euro 2012. Si les joueurs de Laurent Blanc restent sur une prestation de choix à Brême en février face à l’Allemagne (1-2), les choses sérieuses commencent réellement au stade du Hainaut (25 000 places). Les Bleus affrontent l’Islande sur la pelouse du VAFC avant de se frotter à la Serbie à Reims et à l’Estonie au Mans. www.fff.fr 27 MAI-10 JUIN, ROLAND GARROS

19 MAI, FINALE DE LA LIGUE DES CHAMPIONS

Hymne à la joie Si l’absence de clubs français devient une malheureuse habitude depuis 2004 et la finale perdue de l’AS Monaco face au FC Porto de Jose Mourinho (0-3 sur des réalisations de Carlos Alberto, Deco et Alenichev), cette édition 2012 devrait, une fois de plus, offrir un spectacle de grande qualité. L’écrin choisi par l’UEFA n’est autre que l’Allianz Arena de Munich, l’antre du Bayern, le tombeur de l’OM. À noter que le Barça a remporté trois des six dernières éditions ! www.uefa.com

Nadal dans son jardin

Nadal, toujours focus

27 MAI, F1 GP MONACO

Un français sur le podium ? Depuis Olivier Panis en 1996, la France attend toujours de sacrer un de ses pilotes au pied du Rocher. Cette année sera peut-être la bonne avec trois Bleus au départ (Jean-Éric Vergne, Charles Pic et Romain Grosjean). Sebastian Vettel signait la pole en 2011 et s’imposait dans la foulée. Comme d’habitude, le spectacle sera aussi en tribunes et sur les hauteurs du circuit dans ces innombrables terrasses hors de prix qui surplombent le port. www.fia.com

Red Bull Racing veut sa place au soleil.

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PHOTOS : ACTION IMAGES, DDPI, ACTION IMAGES

Vainqueur de six des sept dernières éditions des Internationaux de France, Rafael Nadal a élu domicile sur le court Philippe-Chatrier, le central de Roland Garros. Le Majorquin s’y sent comme chez lui. Le trio Djokovic-Ferrer-Federer tentera de renverser cette tendance. Rappelons que les derniers français victorieux Porte d’Auteuil sont toujours Yannick Noah en 1983 et Mary Pierce en 2000. www.rolandgarros.com


ILLUSTRATION : dietmar kainrath

K a i n r at h

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J

oseph Kessel disait : « On peut toujours plus que ce que l’on croit pouvoir. » Leçon à méditer en ces temps présidentiels, où le plus beau verbe de la langue française, ­ « pouvoir », devient un simple nom : « LE pouvoir ». Un simple nom, certes, mais pour dire le plus désirable des biens pour ces candidats qui mettent toute leur ­énergie dans sa conquête, au lieu d’aller tranquillement pêcher à la mouche, ­percer les derniers secrets de la physique quantique, apprendre à faire un risotto correct, ou encore essayer de séduire Lady Gaga via twitter... Le pouvoir, donc, mais le pouvoir de quoi ? Chez les Anciens, au moins, c’était clair. Dans la mythologie, par exemple, il y a un bonhomme que j’adore. Ni un dieu, ni un homme, mais un Titan. Il s’appelle Prométhée et dérobe le feu aux dieux pour l’offrir aux hommes. Avec le feu, il donne aux hommes le pouvoir. Concrètement, c’est le pouvoir de faire. De faire cuire, de faire fondre, de faire la guerre, ou de faire l’amour au coin du feu. Quelque chose de concret. Pas pour rien que « pragmatisme » vient du grec. Les dieux, d’ailleurs, n’ont pas pardonné. Ils ont condamné Prométhée à être enchaîné nu sur le Caucase et à se faire, chaque matin, dévorer le foie par un aigle. Le foie repoussait pendant la nuit pour que le supplice puisse continuer éternellement. Belle image du sacrifice politique : c’est ce qu’on appelle donner ses tripes pour le bien du peuple… Mais voilà, depuis qu’on a tourné la page antique, on se déchire pour le pouvoir sans savoir ce qu’il recouvre, concrètement. À tel point que les hommes qui pensent avoir le pouvoir ont dû inventer des objets pour faire savoir aux autres qu’ils ont le pouvoir. Sceptres, couronnes, trônes... Autant de symboles, autant d’accessoires, autant de « hochets » pour faire savoir le pouvoir. Même en démocratie. L’Elysée, après tout, est un palais, n’est-ce

Pleine lucarne

Élection libre Mais pourquoi dépensent-ils tant d’énergie pour le conquérir ? Il est temps de se pencher sur la question... pas ? Et ne compare-t-on pas très souvent nos présidents à des monarques ? Le charme supplémentaire de la ­démocratie, par rapport à la monarchie, c’est que le pouvoir s’obtient par la ­séduction. On n’en hérite pas, il faut se faire élire. C’est-à-dire se faire choisir, c’est-à-dire se faire aimer plus que les autres. Les gens ne veulent pas être égaux : ils veulent être préférés. Avezvous suivi une présidentielle ? Je l’ai fait en 2007. C’est romanesque comme tout. En hélicoptère au-dessus de l’océan émeraude de la forêt amazonienne, à pied dans le décor de la dalle d’Argenteuil, en voiture avec sirènes hurlantes à New

York, en train corail au Havre, à cheval en tenue de cow-boy en Camargue, et même en pirogue sur les eaux molles du fleuve Maroni, les candidats ne ménagent ni leurs effets ni leurs efforts. Un seul ­objectif : susciter l’amour chez le peuple. En électrisant sa circulation sanguine par des phrases bien senties pendant les meetings scénarisés comme une longue drague, c’est-à-dire en le touchant par des mots, mais surtout en le touchant physiquement. J’ai connu un candidat qui, lorsqu’il traversait une ville, en pleine campagne présidentielle, se ruait dans les boutiques, une par une, et empoignait, sans qu’ils n’aient le temps de s’en rendre compte, la main des commerçants. Il la gardait ensuite très longtemps dans la sienne, à tel point que le commerçant, s’il voulait la récupérer, sa main, était obligé d’être très gentil avec le candidat et de dire à la caméra qu’il allait forcément gagner. C’était presque un braquage. Un braquage épidermique. On rapproche souvent les vertiges du pouvoir de ceux du sexe. « Le pouvoir est l’aphrodisiaque suprême », disait déjà Henry Kissinger, tandis que le grand timonier Mao Zedong répliquait à son médecin, quand celui-ci lui conseillait de se laver les parties génitales pour éviter les maladies : « Je me nettoie dans le corps des femmes. » On souligne aussi très souvent l’addiction sexuelle de nos leaders politiques : il ne faut pas les excuser, loin de moi cette idée, mais il faut tenter de les comprendre. Quand vous savez que votre destin dépend de l’amour que vous aller susciter chez l’électeur, il faut constamment le vérifier, cet amour. Et quelle meilleure preuve, pour le vérifier, que de le faire ? Pouvoir, n’est-ce pas d’abord un verbe ? Agrégé de lettres, Christophe Ono-dit-Biot est l’auteur de quatre romans, dont Birmane, prix Interallié 2007.

The Red Bulletin France numéro 7 / Mai 2012 : The Red Bulletin est publié et édité par Red Bulletin GmbH Directeur de la publication Alexander Koppel Directeurs Généraux Alexander Koppel, Rudolf Theierl Directeur de la rédaction Robert Sperl Directeur adjoint de la rédaction Alexander Macheck Rédacteur en chef France Christophe Couvrat Ont participé à ce numéro Susanne Fortas, Christine Vitel, Étienne Bonamy, Frédéric Pelatan, Ioris Queyroi Responsable de la production Marion Wildmann Rédaction en chef photos Fritz Schuster, Susie Forman Booking Ellen Haas, Valerie Rosenburg, Catherine Shaw, Rudi Übelhör Maquette Erik Turek (DA), Patrick Anthofer, Martina de Carvalho-Hutter, Miles English, Kevin Goll, Kasimir Reimann, Esther Straganz Publication coroporate Boro Petric (directeur), Christoph Rietner, Nadja Zele (rédacteurs en chef) ; Dominik Uhl (DA) ; Markus Kucera (directeur photos) ; Lisa Blazek (rédactrice) ; Christian Graf-Simpson, Daniel Kudernatsch (iPad) Chefs de la Production Michael Bergmeister, Wolfgang Stecher, Walter Omar Sádaba Reprographie Clemens Ragotzky (chef), Claudia Heis, Nenad Isailovic, Karsten Lehmann, Josef Mühlbacher, Thomas Posvanc Service financier Siegmar Hofstetter, Simone Mihalits Marketing et management international Barbara Kaiser (directrice), Stefan Ebner, Elisabeth Salcher, Lukas Scharmbacher, Johanna Troger ; Peter Knehtl, Martina Ripper (design) ; Klaus Pleninger (ventes) ; Peter Schiffer (abonnements) ; Nicole Glaser (abonnements et ventes marketing) The Red Bulletin est publié Un produit de simultanément en Autriche, Allemagne, France, Irlande, Koweït, Nouvelle-Zélande, Afrique du Sud, Suisse, Mexique, Grande-Bretagne et aux États-Unis, www.redbulletin.com Siège social Autriche Red Bulletin GmbH, Am Brunnen 1, A-5330 Fuschl am See, FN 287869m, ATU63087028. Siège social France Red Bull SASU, 12 rue du Mail, F-75002 Paris, +33 1 40 13 57 00 Siège Rédaction Heinrich-Collin-Strasse 1, A-1140 Vienna, +43 (1) 90221 28800 Imprimé par Prinovis Ltd & Co. KG, D-90471 Nuremberg Responsable publicité Cathy Martin, +33 7 61 87 31 15 ou cathy.martin@fr.redbulletin.com Dépôt légal/ISSN 2225-4722 Nous écrire letters@redbulletin.com ; Les journalistes de la SNC L’Équipe n’ont pas pris part à la réalisation de The Red Bulletin. La SNC L’Équipe n’est pas responsable des textes, photos, illustrations et dessins qui engagent la seule responsabilité des auteurs.

the red bulletin numéro 8 disponible le 13 juin 2012

illustration : roland vorlaufer

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