FRANCE JUILLET/AOÛT 2020
HORS DU COMMUN
LA PUISSANCE DE
LA VIE 100 INVITÉS SPÉCIAUX P O U R A L L E R D E L’AVA N T
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Avec
CY R I L D E S P R E S NEYMAR JR C H A R L I XCX B B OY J U N I O R MIKE HORN M A X V E R S TA P P E N J . K . R OW L I N G DOMINIC THIEM ROSALIA BRIAN ENO … et 90 autres talents inspirants
ALPHATAURI.COM
Éditorial
CENT TALENTS POUR UN 100 C’est le propre de la nature humaine que de résoudre les problèmes auxquels elle doit faire face. Depuis des milliers d’années, dans les moments difficiles, l’humanité a fait preuve de créativité pour envisager les situations inquiétantes sous un angle nouveau et trouver des contre-mesures inventives. Grâce à notre capacité d’adaptation, nous avons survécu et vaincu des famines, des changements environnementaux et des maladies. En cours de route, de nombreux exemples de ce génie de l’évolution ont émergé des communautés technologiques, sociales, économiques, artistiques et philosophiques. Une capacité de transformation qui est un fondement de notre existence.
OPEN SPACE
Pour ce numéro, nous avons passé beaucoup d’appels, de « calls ». Le plus mémorable fut celui passé par notre éditrice de la photo, Tahira Mirza, avec les astronautes de la Station spatiale internationale. P. 82
Les événements récents nous ont offert un enseignement : chacun de nous a le pouvoir d’ajuster sa pensée et ses actions pour évoluer positivement. C’est bien l’idée derrière ce numéro spécial, pour lequel l’ensemble de nos éditions internationales (en France, en Suisse, en Autriche, e n Allemagne, aux États-Unis ou e n Grande-Bretagne) ont convié cent personnes. Penseurs, athlètes, auteurs, innovateurs, photographes et artistes... cent talents au cœur des processus d’adaptation et de dépassement. À travers des photos, citations, interviews, textes et dessins, ils partagent avec vous leurs e xpériences personnelles sur la façon dont ils ont identifié des opportunités dans des situations de désespoir ou d’incertitude.
FAIRE FACE AU RÉEL
ébastien Thibault, S Canadien de 39 ans et contributeur régulier du TIME, a illustré ce sujet environnementaliste sur le triomphe de la science et du réel. P. 34
LA THÉRAPIE DU DEHORS Florence Williams explore la valeur biologique et émotionnelle du temps que nous passons en extérieur. P. 48
BEN THOUARD (COUVERTURE), LOUIS AREVALO
Ce numéro 100 (!) de notre édition française, aux cent invités, vous est proposé tel un manuel d’initiatives et d’encouragements, pour persévérer, avancer et nous é panouir. Bonne lecture ! Vos Rédactions
THE RED BULLETIN
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CONTENUS juillet / août 2020
Cent invités partagent leur expérience
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Cyril Despres
Dominic Thiem 1 BEN THOUARD 2 CHRIS SAUNDERS 3 NORMAN KONR AD 4 DAN KR AUSS 5 T YRONE BR ADLE Y 6 JIM KR ANTZ 7 JANE STOCKDALE 8 KRYSTLE WRIGHT 9 KONSTANTIN RE YER 10 ALE X DE MOR A 1 1 MICHAEL MULLER 1 2 CAITLIN HUGHES 1 3 PETER RIGAUD 14 TOMASZ GUDZOWAT Y 1 5 PIP HARE 16 RYAN SHECKLER 17 Y VON CHOUINARD 1 8 MAVI PHOENIX 19 THOMAS DRESSEN 20 ADRIAN MAT TERN 21 CRISTAL R AMIRE Z 22 ALISA R AMIRE Z 2 3 K ATIE HENDERSON 24 McKENNA PET T Y 2 5 BILL McKIBBEN 26 CORINNA SCHWIEGERSHAUSEN 2 7 FANNY SMITH 28 J. K . ROWLING 29 DANITSA 30 ADAM YE ARSLE Y 31 ROSALÍA 32 MAT THIAS WALKNER
34– 36
Rachel, Dan & Gee Atherton
86
Charli XCX 4
31
Rosalía
55
BBoy Junior
48
40 JoJo
56 Max Verstappen
ayot 93 DUpamecano
Mike Horn
3 3 ANGEL A EITER 3 4 DAN ATHERTON 3 5 GEE ATHERTON 36 R ACHEL ATHERTON 37 JIMMY CHIN 38 ED O’BRIEN 39 BRIAN ENO 4 0 JOJO 41 STACY BARE 4 2 DOMINIC THIEM 4 3 ED JACKSON 4 4 K ATIE ORMEROD 4 5 JILL KINTNER 4 6 K ATE COURTNE Y 47 CYRIL DESPRES 4 8 MIKE HORN 49 GR ANDPOOBE AR 50 MICHAEL STR ASSER 51 PAROV STEL AR 52 PASQUALE ROTELL A 5 3 WOLGANG Z AC 5 4 CEDAR ANDERSON 5 5 BBOY JUNIOR 56 MA X VERSTAPPEN 57 NE YMAR JR 5 8 SÉBASTIEN BUEMI 59 THOMAS ULRICH 60 MARCO WALTENSPIEL 61 FELIX SEIFERT 62 MARCO FÜRST 6 3 MA X MANOW 6 4 NATASCHA BADMANN 6 5 DANIEL A RYF 66 MARC WALLERT 67 MIKE McCASTLE 6 8 PHILIPP VENETZ
52
Pasquale Rotella
57
Neymar Jr
16
81 Titouan Bernicot
74 Zuna
39
Brian Eno
Ryan Sheckler
28 J. K. Rowling THE RED BULLETIN
PHILIP PLATZER, DAN WILTON, MARCUS COOPER, FLAVIEN DUHAMEL/RED BULL CONTENT POOL, ROGER KISBY/REDUX/LAIF, LITTLE SHAO/RED BULL CONTENT POOL, PHILIPPE JACOB/RED BULL CONTENT POOL, HADRIEN PICARD/RED BULL CONTENT POOL, LOANE BERNICOT, DIESERBOBBY, SHAMIL TANNA, WMG, FORMULA 1, GETTY IMAGES, EASTON SCHIRRA, SEBAS ROMERO/RED BULL CONTENT POOL, GETTY IMAGES
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69 MICHÈLE IMHASLY 70 DOMINIK IMHOF 7 1 STEPHAN DREESEN 7 2 PINE APPLECITI 7 3 GÉR ALDINE FASNACHT 74 ZUNA 75 HIL AREE NELSON 76 ANDREW MORGAN 7 7 JESSICA MEIR 78 CHRIS CASSIDY 7 9 VL ADIK SCHOL Z 80 K ATSUYA EGUCHI 8 1 TITOUAN BERNICOT 82 MARK VAIL 8 3 TOM ÖHLER 8 4 MARCEL HIRSCHER 8 5 JIMMY SPITHILL 86 CHARLI XCX 87 MA X HEINZER 8 8 ANDRE AS BREITFELD 89 PÉTER GUL ÁCSI 90 MARCEL HALSTENBERG 91 NORDI MUKIELE 92 LUK AS KLOSTERMANN 93 DAYOT UPAMECANO 94 MARCEL SABITZER 95 DIEGO DEMME 96 KONR AD L AIMER 97 TIMO WERNER 98 YUSSUF POULSEN 99 EMIL FORSBERG 1 00 FR ANCK SEGUIN
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Photographe, 34 ans, FRA Avec sa vision du surf, il a remporté le Red Bull Illume 2019, plus grand concours de photos d’action et d’aventure au monde.
Ben Thouard
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La lumière au bout du tunnel « Cette photo a été prise dans un tube de Teahupoo, célèbre spot de surf au large de Tahiti, et futur théâtre des olympiades de surf en 2024. D’ici là, tous nos soucis actuels ne seront que de vagues souvenirs. Cette image du surfeur Anthony Walsh est une promesse de beaux jours à venir. » Instagram : @benthouard benthouard.com
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Photographe, 36 ans, RSA Installé à Paris, le natif de Johannesburg documente les scènes culturelles de son pays d’origine et celles du monde entier.
Chris Saunders
Cette femme est source d’inspiration « Elle, c’est Manthe Ribane, musicienne et artiste sud- africaine, dansant ici sur le toit de la station de taxis de Bree Street à J ohannesburg. Nous collaborons depuis des années. Manthe ne se contente pas d’aimanter tous ceux qui croisent son chemin : à travers ses représentations, elle communique aux spectateurs sa liberté et son énergie positive. » Instagram : @chrissaundersphoto chrissaunders.co
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Photographe, 43 ans, GER Berlinois et lauréat de l’European Design Award, il est connu pour son langage visuel alliant surréalisme et humour habile.
Norman Konrad
Bonjour voisin ! « Mes compositions d’images interrogent souvent notre vision de la normalité. Cette photo évoquait au départ la solidarité entre voisins. Depuis, elle a pris un nouveau sens pour moi : quand vous ne pouvez plus rendre visite à vos proches, communiquer avec eux devient encore plus important. » Instagram : @norman.konrad normankonrad.de
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Photographe, 48 ans, USA Il a démarré dans le photojournalisme au Wall Street Journal et propose une vision épique de la photo de paysages.
Dan Krauss
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La madeleine du grimpeur « Moses Potter escalade la voie Once Upon a Time extrêmement difficile, dans les montagnes de San Jacinto, chez lui dans le sud de la Californie. J’ai dû patienter un an avant de trouver un athlète capable de dominer sans corde cet OVNI en forme de bloc de roche. Pour moi, l’image symbolise la force et l’assurance qu’une personne peut développer en elle-même. » Instagram : @dankrauss dankraussphoto.com
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Photographe, 39 ans, RSA Venu d’Afrique du Sud, Tyrone fut pilote de BMX. Il utilise à présent son sens du timing pour créer des images d’action ou de pub.
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Tyrone Bradley
Mon miracle « La naissance de ma fille Lyra le 24 décembre 2019 est ce qui me vient à l’esprit lorsque je pense à la part de lumière chez l’humain. Nous avions à l’époque opté pour un accouchement naturel. Mais la nature en a déci dé autrement. Aujourd’hui, grâce aux progrès a ccomplis par la médecine, ma famille se porte bien. Ma gratitude va parti culièrement à cette équipe de femmes qui a pratiqué la césarienne en urgence. » Instagram : @tyrone_bradley tyronebradley.co.za
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Photographe, 65 ans, USA Connu comme chroniqueur de l’Ouest des États-Unis, il a remporté de nombreux prix, notamment pour ses sujets de The Red Bulletin.
Jim Krantz
La force originelle de la nature « Pour réaliser cette photo, j’ai cueilli une fougère dans mon jardin, je l’ai imbibée de résine d’époxy et l’ai posée sur une photo imprimée du virus. Les fougères sont extrêmement résistantes. Voilà plus de 300 millions d’années qu’elles poussent sur Terre. L’une d’elles s’est enroulée autour d’un tronc d’arbre juste devant ma fenêtre, d’où chaque jour, je vois la vie s’épanouir malgré des conditions très difficiles. » Instagram : @jimkrantzphoto jimkrantz.com
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Photographe, 37 ans, GBR L’Écossaise a couvert nombre d’événements sportifs et documenté les Coupes du monde de football à travers la liesse des supporteurs.
Jane Stockdale
Champions !
« Paris, 15 juillet 2018, 65e minute de la finale de la Coupe du monde de football entre la France et la Croatie. Près de la tour Eiffel, ce jeune supporteur de la France laisse éclater sa joie après le but de Kylian Mbappé qui porte le score à 4-1. Pour moi, c’est un grand moment d’émotion et d’énergie au terme d’un grand tournoi. » Instagram : @janestockdale_ janestockdale.co.uk
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Photographe, 33 ans, AUS Spécialisée dans l’outdoor, ses reportages se font en compagnie d’aventuriers, d’explorateurs et de chasseurs de tornades.
Krystle Wright
Et l’espoir apparaît « Cette photo a été prise lors d’une expédition de base-jump sur l’île de Baffin, à l’extrême nord-est du Canada. Un blizzard nous surprend et nous force au confinement sous la tente plusieurs jours durant. Grande est ma surprise lorsqu’un Inuk avec un attelage de chiens passe près du campement. À peine le temps de faire deux clichés et déjà le blizzard engloutit l’apparition. Je garde de cette expérience notre aptitude à développer d’incroyables capacités lorsque la nature nous impose de rester dans un isolement total. » Instagram : @krystlejwright krystlewright.com
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Photographe, 33 ans, AUT Cet homme est attiré par l’action, et ceux qui lui ont dédié leur vie. Il collabore donc régulièrement avec The Red Bulletin.
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Konstantin Reyer
Une lumière surgit des ténèbres « Peu après mon trentième anniversaire, je me rends avec ma petite amie à Cape Cod, au sud-est de Boston. Ce jour-là, un gros orage sévit lorsque soudain j’aperçois au loin cet arc-en-ciel. “C’est incroyable”, me dis-je tout en immortalisant l’instant. Depuis, j’ai cette photo toujours avec moi en signe d’optimisme et elle trône dans un cadre sur le mur de mon studio. » Instagram : @konstantinreyer konstantinreyer.com
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Photographe, 38 ans, GBR Ce Londonien immortalise l’expressivité des légendes du rock comme celle des artistes underground (encore) inconnus.
Alex de Mora
Chevalier flamboyant « J’ai photographié le musicien britannique Goldie en 2017 pour The Red Bulletin. Goldie est un producteur de drum and bass, membre de l’Ordre de l’Empire britannique, et il apparaît dans la distribution d’un James Bond – Le monde ne suffit pas. C’est un homme qui a toujours su profiter de tout ce que la vie a à offrir, et cela m’inspire. » Instagram : @alexdemora alexdemora.com
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Photographe, 59 ans, USA S’il a plutôt l’habitude de photographier les stars d’Hollywood, Muller s’intéresse aussi à la protection des requins blancs.
Michael Muller
Agir quand il le faut « Au fil des années passées à nager avec les requins, j’ai remarqué de plus en plus d’objets parasites accrochés aux animaux : des crochets dans la mâchoire, des émetteurs sur le ventre… Mais ce que notre expédition a vu ce matin-là dans le Pacifique nous a laissés pantois : un gros requin blanc traînant, accroché à sa nageoire, un lambeau de plastique. L’Homme a, heureusement, aussi une grande qualité : il est capable d’agir quand il le faut. » Instagram : @michaelmuller7 mullerphoto.com
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PDG de l’agence Magnum Photos, 40 ans, GBR Elle nous a adressé les photos de la légende de la boxe Mohammed Ali, pour qui les épreuves ont toujours été source de force.
Caitlin Hughes
Les planchescontacts de Thomas Hoepker, photographe chez Magnum, saisissent, en 1966, le champion du monde de boxe Mohammed Ali.
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Le portrait de Mohammed Ali réalisé par Thomas Hoepker a fait la une de The Red Bulletin en mai 2017, un hommage au 70e anniversaire de l’agence Magnum.
« Utilisons notre génie pour nous réinventer »
THOMAS HOEPKER
Les photoreporters de l’Agence Magnum couvrent des événements à travers le monde entier. Créée en 1947, l’agence est dirigée par Caitlin Hughes depuis 2019 : « En période d’agitation, la photographie est un média clé, explique la Galloise. Elle documente les bouleversements et interpelle les gens où qu’ils soient. Aujourd’hui, le soutien mutuel est primordial. À l’instar des fondateurs de cette agence il y a 70 ans, nous pouvons utiliser notre génie pour nous réinventer. » Instagram : @magnumphotos magnumphotos.com
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Photographe, 52 ans, AUT Il séjourne entre Vienne et Berlin et voit ses portraits publiés dans Vogue, The New Yorker, Vanity Fair ou National Geographic.
Peter Rigaud
Un homme d’exception « Cette photo de 2015 montre Josef Penninger généticien et virologue viennois, qui s’emploie actuellement avec son équipe à développer activement un traitement contre la Covid-19. J’admire l’attitude et le sang-froid de Penninger face à la crise. Les œuvres en arrière-plan s ’intitulent : Et si Dieu avait tort ? Une manière d’interroger la science sur ce qu’elle peut et doit faire. » Instagram : @rigaudpeter peterrigaud.com
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Photographe, 48 ans, POL Doté de neuf prix du World Press Photo, ses voyages l’ont conduit dans plus de cent pays où il shoote essentiellement en noir et blanc.
Tomasz Gudzowaty
Toujours un premier pas « Le titre de cette photo est un vers emprunté au Dao de jing, un recueil d’aphorismes du sage chinois Lao Tseu. Il dit ceci : “Un voyage de mille lieues commence toujours par un premier pas.” Cette image incarne la persévérance et la résilience de l’être humain. » Instagram : @tomaszgudzowaty gudzowaty.com
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Navigatrice, 45 ans, GBR Cette année, elle veut devenir la huitième femme à faire le tour du monde à la voile sans assistance lors du Vendée Globe.
Pip Hare
« Il y a toujours une éclaircie qui vous attend » Alors que sa préparation pour le fameux Vendée Globe est en stand-by, Pip Hare se remémore les moments délicats qui ont fait d’elle une véritable navigatrice. Texte JESSICA HOLLAND
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RICHARD LANGDON/OCEAN IMAGES
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u tout début de ma carrière, alors que je voguais entre les îles Canaries et le Royaume-Uni, je me suis retrouvée la tête en bas dans un bateau qui fonçait, mât en avant, vers une énorme vague. C’était terrifiant. Les vagues dépassaient les 40 pieds (12 mètres), donc elles étaient plus hautes que le mât ! Et la vitesse du vent, supérieure à 70 nœuds (130 km/h), était celle d’un ouragan. Lorsque vous êtes dans le creux d’une vague, le vent est complètement étouffé. Tout est étrangement calme et il règne un silence de mort. Puis, quand le b ateau arrive en haut de la vague, vous entendez un grondement et vous ressentez les vibrations de la vague qui se brise, tel un train de marchandises à l’approche. Lorsque le bateau a frappé la vague, j’ai eu l’impression d’être percutée sur le côté par un troupeau d’éléphants. J’étais ballottée dans tous les sens. Totalement impuissante. Je ne pouvais pas aller sur le pont, au risque de passer par-dessus bord ou de me casser quelque chose. Tout ce que je pouvais faire, c’était me cacher dans la cabine pendant les six heures les plus critiques de la tempête. Et sur un coup de roulis, je me suis retrouvée au plafond. Tout ce qui n’était pas solidement attaché me dégringolait dessus. Des bocaux en verre remplis de sauce chili sont tombés
La Britannique sort de Poole, son port d’attache, et s’engage dans la Manche pour une journée d’entraînement.
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Départ de la Fastnet Race, en Irlande, en juillet de l’année dernière.
« SEULE AU MILIEU DE L’OCÉAN, VOUS NE POUVEZ PAS ESQUIVER. » 28
J’ai découvert que je pouvais compter sur moimême en cas d’urgence. Cela m’a aussi appris que le mauvais temps ne dure pas éternellement. Certaines tempêtes sont dantesques – et les éclairs me filent encore une sacrée frousse – mais vous devez accepter le fait que vous ne pouvez rien y changer. Parfois, tout ce que vous êtes en mesure de faire, c’est de baisser les voiles et patienter. Il y a toujours une éclaircie qui vous attend.
L
un des exploits dont je suis la plus fière, c’est de monter seule au mât. La première fois que j’ai grimpé au mât en pleine mer, je n’étais vraiment pas rassurée. C’était pendant ma première course transatlantique en solitaire, à destination du Brésil, sur ce bateau de 21 pieds (6,4 mètres). Un tel bateau peut facilement dépasser les 20 nœuds (37 km/h). Ce sont de vraies fusées, avec des mâts de 12 mètres environ. Aucune communication satellite, aucun contact. Je naviguais depuis environ deux semaines et j’étais épuisée physiquement. J’avais perdu beaucoup de poids et j’étais à bout de forces. Je me trouvais au beau milieu de l’Atlantique, au point le plus éloigné de toute assistance. La tempête était très violente et un élément s’est détaché en haut de mon mât. Il s’est enroulé autour du mât, et le bateau aurait été en danger si je n’avais pas effectué la réparation nécessaire. J’ai réalisé que je devais grimper tout en haut, sous la voile déployée, et régler le problème. J’avais déjà grimpé au mât en solo quand j’étais à quai, mais jamais en pleine navigation. Mes mains tremblaient, j’entendais mon cœur battre dans mes oreilles, et mon cerveau était en surchauffe. Qui plus est, vous êtes totalement dépendant du pilotage automatique (la machine) qui ne doit pas changer de direction, ni rencontrer de problème quand vous êtes là-haut. Mais c’est le sport que j’ai choisi, et ce sont des situations dans lesquelles je me retrouve délibérément. C’est comme si vous vous saisissiez par le col et vous secouiez un bon coup en hurlant : « C’est ce que je veux être ! »
C
omme j’avais perdu plusieurs kilos et gagné en musculature dans la partie supérieure du corps, il m’a suffi, à mi-chemin, de me hisser en haut du mât à la force des bras. Lorsque je suis arrivée au sommet, je me suis dit : « Waouh, je ne savais pas que j’en étais capable. » C’est impressionnant tout ce que vous pouvez faire quand vous avez peur. J’ai réussi à régler le problème, prendre un selfie de la plus haute importance (sic) et redescendre. Après ce type d’épreuve, vous goûtez à un sentiment exceptionnel de fierté et d’endurance. Seule au milieu de l’océan, vous n’avez pas le choix : vous devez repousser vos limites. Il peut s’agir de quelque chose qui vous terrifie, que vous n’êtes pas sûr de pouvoir gérer physiquement, ou que vous n’avez jamais fait auparavant, mais il n’y a pas d’autre solution. Vous ne pouvez pas esquiver. Vous ne pouvez pas dire non. Lorsque je navigue en solitaire, je suis la meilleure version de moi-même. THE RED BULLETIN
MAXIME HORLAVILLE
du réfrigérateur et ont explosé : il y avait du verre et de la sauce chili partout. Je me souviens encore de cette odeur, vingt ans plus tard. Lorsque la tempête s’est enfin calmée, mon bateau était en piteux état, mais j’étais bien vivante. Cette expérience aurait pu me dégoûter de la navigation à jamais, et cela reste les pires conditions météorologiques que j’aie jamais endurées, mais elle m’a beaucoup appris. Vous ne vous rendez pas vraiment compte de la force qui est en vous jusqu’à ce que vous vous retrouviez dans ce type de situation, et même si j’étais morte de peur, j’ai simplement continué à faire ce que je devais faire.
DONNE DES AIIILES.
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Skateur, 30 ans, USA Sa fondation est dédiée aux enfants et aux athlètes souffrant de blessures.
Le skateur Ryan Sheckler a su s’accommoder du confinement et s’adonner à sa passion chez lui, comme ici sur sa table basse.
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« Mon programme d’entraînement varie chaque semaine au gré des consignes liées au confinement.* Au d ébut, je m’entraînais seul au gymnase, en prenant soin de désinfecter le matériel. Puis, j’ai privilégié les séances à la maison, au skatepark, et le surf. Mais depuis la fermeture des plages, mon espace se limite pour l’essentiel à la maison. Quand la pandémie a commencé, j’ai usé ma planche dans nombre de spots locaux normalement interdits, des parkings et bâtiments vides, et j’ai atteint ainsi certains de mes objectifs. À présent, je fais profil bas, je respecte le confinement et éprouve un grand respect pour les personnes qui combattent le virus en première ligne. L’une de mes distractions consiste à transformer
mon intérieur en un mini spot. J’ai même fait du skate sur ma table basse récemment. Après un défi de pompes et un autre de kickflip sur Instagram, je varie les plaisirs et improvise un spot de skate parmi les meubles. Tout compte fait, la table basse s’y prête parfaitement. Une pratique prometteuse dans la situation actuelle. L’an dernier, au terme de la dixième édition de Skate for a Cause, organisée par la Sheckler Foundation, j’avais très envie d’étendre la portée de notre action. Les idées ne font pas défaut et cette pandémie ne manquera pas d’élargir les domaines de notre soutien à celles et ceux qui en auront besoin. » *Propos recueillis en avril 2020 THE RED BULLETIN
SABAS ROMERO/RED BULL CONTENT POOL(2), COURTESY OF RYAN SHECKLER
Table rase
JEN SEE
Ryan Sheckler
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Entrepreneur, 81 ans, USA Ce pionnier de l’escalade a forgé ses premiers pitons en 1957 et fondé la célèbre marque de plein air Patagonia en 1973.
MAŠA STANIC, IMAGO/AURORA FOTOS SEBASTIAN FASTHUBER CITATION D’YVON CHOUINARD TIRÉE DU LIVRE SOME STORIES: LESSONS FROM THE EDGE OF BUSINESS AND SPORT, PATAGONIA PUBLISHING
Yvon Chouinard
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Chanteur, 24 ans, AUT Il s’est fait un nom en tant que rappeuse. Depuis fin 2019, il s’épanouit au masculin.
Mavi Phoenix
« Il n’y a vraiment aucune différence entre le pessimiste qui dit : “C’est sans espoir, il n’y a plus rien à faire” et l’optimiste qui dit : “Il n’y a rien à faire, tout s’arrangera tout seul“. Dans les deux cas, rien ne se passe. Le meilleur remède contre la dépression, c’est l’activité. » Le fondateur de la marque Patagonia, Yvon Chouinard, alors jeune homme, à son marteau-pilon « Little Giant » à Yosemite, Californie. Il vendait ensuite les pitons au cul de sa voiture.
Le premier pas
« J’aurais dû être un homme, je le sais depuis longtemps. Mais il y avait cette idée que je ne pouvais rien faire contre le fait d’être né femme. Ma décision de vivre en tant qu’homme a été prise lors de l’enregistrement de mon album. Tout s’est emballé, et j’ai été très créatif. Les gens autour de moi ne se doutaient de rien. J’ai été aidé par des témoignages d’hommes trans sur YouTube. Le fait qu’ils apparaissent sains et heureux m’a permis de dissiper beaucoup de mes craintes. Je dois réfléchir soigneusement à la façon dont je veux continuer. Un traitement hormonal modifie l’apparence et la voix. Ensuite on passe aux choses sérieuses. Je suis heureux d’avoir fait le premier pas. » Le premier album de Mavi Phoenix, Boys Toys, est sorti sur le label LLT Records.
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Thomas Dressen
« LE SOUTIEN DE MES ADVERSAIRES M’A DONNÉ LA FORCE POUR MON COMEBACK. »
Après son accident de Beaver Creek, dans le Colorado, Dressen a manqué une saison. « Quand j’étais encore à l’hôpital, beaucoup de mes adversaires m’ont écrit, se souvient-il. Lire comment ils avaient géré des situations similaires m’a donné de la force. » La saison suivante, il a terminé deuxième de la Coupe du monde de descente.
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Kayakiste, 24 ans, GER Il a l’habitude de conquérir les eaux les plus sauvages. Mais le vol qu’il a subi en 2018 a été son épreuve la plus difficile.
Adrian Mattern
Le jour où j’ai tout perdu, sauf ce câble... « J’étais au Chili pour une expédition en kayak quand des voleurs ont vidé ma voiture : appareils photo, ordi, téléphone… Tout avait disparu sauf mon câble de chargement. En tant que sportif professionnel, je vis de mes vidéos. Sans équipement, je ne pouvais plus rien produire – une catastrophe ! Je me suis alors dit : “Regarde ce que tu as déjà accompli : tu es sorti de nulle part pour devenir un pro du kayak.” Cela m’a donné du courage. Plus jeune, j’avais travaillé dans le bâtiment et j’avais aussi été videur. J’ai recommencé pour me payer du nouveau matos. Quelques mois plus tard, j’étais de nouveau sur l’eau. »
THE RED BULLETIN
PANTHERMEDIA, DANE JACKSON/RED BULL US ATHLETE, ENNO KAPITZA, GETTY IMAGES (2) MARC BAUMANN, NICLAS SEYDACK
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Skieur, 26 ans, GER Après sa victoire d’enfer à Kitzbühel en 2018, il a fait une grave chute et a reçu une aide inattendue alors qu’il était au plus bas.
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Groupe indie-pop, USA Leur premier LP, When My Heart Felt V olcanic, fut décrit par le magazine musical anglais NME comme « sacrément brillant ».
The Aces
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Cristal Ramirez
Voix/guitare, 24 ans Très précoce, Cristal a monté son premier groupe avec sa sœur Alisa dès l’âge de huit ans.
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Alisa Ramirez
Batterie, 22 ans Aiisa a réalisé le clip de Daydream, le premier single de leur prochain album Under My Influence.
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Katie Henderson
Guitare, 24 ans Dernière à rejoindre le groupe en 2008, elle est la spécialiste de la technique et du studio des Aces.
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« Mon mantra est un refrain » Lorsqu’elle s’est lancée dans le grand bain de la musique, Cristal Ramirez du groupe The Aces a trouvé l’inspiration dans un titre de rock. « J’ai toujours été fan de Paramore et de Hayley Williams (chanteuse de ce groupe de rock US, ndlr), confie-t-elle, et j’écoutais beaucoup l’un de leurs titres, Last Hope, à sa sortie en 2013. Je terminais le lycée, déterminée à poursuivre une carrière musicale, mais évidemment, j’avais des doutes. C’est Last Hope qui m’a incitée à suivre mon rêve. J’aime le refrain: “Gotta let it happen, so let it happen” (trad. il faut laisser aller, donc laisse aller) – c’est
uissant. La fille reconnaît qu’elle p n’est pas dans la meilleure des situations, mais qu’il faut rester calme et laisser les choses advenir. Ça rejoint cette idée de se concentrer sur les choses qu’on peut contrôler et ne pas perdre son énergie pour les choses qui échappent à notre contrôle. Ce refrain, c’est comme un mantra, dans un sens. Il m’a aidée quand j’ai déménagé à L.A. et que je n’avais pas encore signé notre contrat d’enregistrement. Ça me rappelle des moments de joie et de découverte de moi-même. »
Le groupe Paramore et son Last Hope ont positivement inspiré Cristal, des Aces.
The Aces, Under My Influence, dispo sur Red Bull Records ; theacesofficial.com
McKenna Petty
RED BULL RECORDS
FLORIAN OBKIRCHER
Basse, 24 ans Comme tous les membres du groupe, elle a grandi en Utah. Cristal la surnomme son « gourou du yoga, de la cuisine et des réseaux ».
The Aces : (de la gauche) Cristal, Katie, Alisa et McKenna.
THE RED BULLETIN
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Auteur et militant écologiste, 59 ans, USA McKibben a écrit 17 livres et a fondé une organisation internationale luttant contre le réchauffement climatique : 350.org.
Bill McKibben
Courage, soyons réalistes ! Dans cet essai, Bill McKibben nous questionne sur une approche courageuse de la vie, tels des aventuriers ou des athlètes outdoor. En champions du réel. Texte BILL McKIBBEN Illustrations SÉBASTIEN THIBAULT
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e petit microbe hirsute pourrait tout aussi bien être une armée d’envahisseurs extraterrestres : il est apparu soudainement, a frappé la planète entière en l’espace de quelques jours et nous a menacés avec des dégâts bel et bien réels. Pour une fois, nous avions un ennemi commun, et cet ennemi nous a incités à définir ce qui est « humain » de nos jours. Quelques-unes des réponses que nous avons apportées à cette question étaient effrayantes. Des chefs d’État ont essayé de rendre responsables d’autres pays, et certaines personnes se sont servies de la maladie pour masquer leur racisme. Cette méchanceté a vu le jour dès le début : comme pour cet Américain d’origine asiatique, chef du service des urgences d’un hôpital de Manhattan, qui, en allant essayer et acheter des masques de protection pour son équipe, s’est vu assailli par trois voyous sous prétexte que « les Chinois » étaient à l’origine du virus. Mais la plupart du temps les gens ont été remarquables. Ce médecin de l’hôpital de Manhattan, justement : son équipe, tout comme une multitude de médecins du monde entier, ont voulu poursuivre leur travail malgré le manque de protection adéquate. À compter du tout premier docteur à Wuhan, qui s’est exposé non seulement à la maladie mais aussi à l’inquisition des autorités locales, des médecins et infirmières ont surmonté leurs inquiétudes et ont tout donné. Non seulement les médecins, formés pour travailler avec des malades, mais aussi les caissières. Les
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gars qui approvisionnent les rayons de boulangerie dans les supermarchés. Les types qui livrent à moto tous ceux qui n’ont pas le droit de quitter leur appartement. Chacun d’entre eux savait qu’il prenait un risque, et ils savaient également qu’ils assuraient un service essentiel. Ils ont donc pris sur eux et ont fait ce qu’il fallait faire. En agissant ainsi, ils ont tous – par leurs actes, non par leurs mots – exprimé une vérité fondamentale : la science relève de la réalité. Et c’est la réalité qui importe. Cela semble évident, mais ne l’est pas. Depuis des générations, une trop grande partie de notre société s’est comportée comme si la réalité n’était qu’une option. Nous avons regardé le monde à travers nos écrans. Des scientifiques nous disaient que la température était en train de grimper, que c’était grave. Les satellites nous disaient que les calottes polaires étaient en train de fondre et les océanographes annonçaient que l’équilibre chimique de l’eau de mer basculait, avec une acidité croissante. Mais nous n’y avons pas vraiment prêté attention.
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n fait, il semblait parfois que les seules personnes à prendre les changements au sérieux étaient celles (de moins en moins nombreuses) qui passaient le plus clair de leur temps à l’extérieur. Des agriculteurs qui ne pouvaient pas mettre en culture ; des pompiers qui se trouvaient confrontés à des incendies de plus en plus graves. Et des athlètes qui trouvaient la glace trop fragile pour l’escalader, des skieurs qui cherchaient la THE RED BULLETIN
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neige lors d’hivers de plus en plus chauds. Lorsque vous vous trouvez au beau milieu d’une cascade de glace, votre vie suspendue à vos crampons et à votre piolet, vous devez sérieusement tenir compte de la physique : la température de l’air est une question de vie ou de mort. Mais la plupart d’entre nous, la plupart du temps, ne ressentions pas cela. Nous avons commencé à nous convaincre qu’après tout, la science était peut-être négociable, que la physique viendrait peut-être à notre rencontre. Il est tellement simple de se réfugier dans un monde imaginaire lorsqu’on passe la majorité de son temps sur Facebook et Instagram.
« Tout à coup, chacun d’entre nous avait un point commun avec l’aventurier. »
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e coronavirus a mis fin à cela, pour l’instant tout du moins. Tout à coup, nous avons été obligés de voir que la biologie était bien réelle. Il n’y avait pas moyen de faire faire demi-tour à ce virus, pas moyen de le forcer à un compromis. Nous étions dans l’obligation de changer, car lui n’allait pas le faire – et du coup nous avons chamboulé nos vies. Nous nous sommes mis à l’abri, avons gardé nos distances. Tout à coup, chacun d’entre nous avait un point commun avec l’aventurier tirant son traîneau en Antarctique ou chevauchant son VTT sur la ligne de partage des eaux d’Amérique du Nord : c’est la réalité qui décidait. Nous allions devoir obéir à ses lois, pas aux nôtres. Beaucoup de personnes se sont retrouvées désarmées face à ces bouleversements : elles avaient grandi dans des villes ou des banlieues où la nature était masquée par toute une infrastructure. (Savez-vous d’où vient votre eau ? Et où partent vos eaux usées ?) D’un seul coup, la nature dictait les règles : il faut garder une distance de deux mètres. Il faut se laver les mains dix fois par jour. Il faut rester à la maison. Enfreignez les règles et vous pourriez bien mourir. Le temps est l’une des caractéristiques les plus perceptibles de la réalité physique. C’est capital. Si vous avez pour 3 heures d’oxygène dans votre bouteille, mieux vaut être de retour à la surface au bout de 2 h 45. Si la météo prévoit un orage au sommet de la montagne pour 17 heures, mieux vaut planifier votre randonnée de façon à être THE RED BULLETIN
« Il serait bien possible que le courage ultime consiste simplement à faire face à la réalité, à être honnête avec soi-même. »
arrivé au parking avant les premiers éclairs, ou d’être au moins descendu sous la ligne de faîte des arbres. Si vous participez à une course, l’heure tourne. Mais dans le monde abstrait de la politique, le temps est suspendu : vous pouvez littéralement mener les mêmes débats pendant des années, d’une élection à l’autre. C’est une des raisons pour lesquelles les problèmes comme le réchauffement climatique sont tellement difficiles à traiter par les politiques. Car ces perturbations physiques reposent sur une réalité concrète, elles exigent des actions adéquates en temps utile : si vous ne faites rien, elles empirent irrévocablement. La molécule de dioxyde de carbone ne peut être persuadée ou contrainte à trouver un compromis. La physique et la chimie ne se négocient pas ; elles sont. Si vous mettez une quantité x de carbone dans l’atmosphère, la température augmentera de y degrés ; pas la peine d’argumenter qu’il ne faut pas qu’elle le fasse. C’est comme de dire à une avalanche de ne pas glisser : si l’angle et la neige remplissent les conditions, elle va se déclencher. Votre seul choix dans cette histoire est d’être sur son chemin, ou pas.
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insi, imaginons qu’il y a trente ans, nous ayons pris au sérieux les mises en garde des scientifiques, lorsqu’ils nous ont prévenus de l’augmentation anthropogène de la température de la planète et de ses conséquences désastreuses. Nous aurions pu prendre un minimum de mesures et aujourd’hui, nous aurions surmonté le pire de la crise climatique. Une petite taxe sur les émissions de carbone, et cet énorme pétrolier qu’est notre économie mondiale aurait changé sa trajectoire de quelques degrés à tribord – et, comme chaque marin le sait, un changement de cap minimal se répercute considérablement. Pour finir, vous vous retrouvez complètement ailleurs. Mais ce n’est pas ce que nous avons fait – nous avons continué tout
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droit, et maintenant nous sommes vraiment dans le pétrin, face à des changements si importants que même avec un effort considérable, nous ne pouvons plus les empêcher. Il est toujours plus simple pour ceux qui contrôlent le monde de continuer à faire comme ils font ; l’inertie est une force puissante et profitable. Nous avons donc fini par vivre dans ce monde imaginaire parce qu’il était plus simple pour nous tous de ne pas changer. La pandémie du coronavirus a donné un coup de projecteur sur ce problème. Les pays qui ont agi très vite – en faisant des tests, en empêchant les rassemblements de personnes – ont connu des perturbations et leur économie en a pris un coup. Puis le pire est passé. Or les pays qui on tardé – qui ont simplement espéré s’en sortir en attendant que tout passe – se sont retrouvés avec beaucoup plus de victimes, beaucoup plus de dépenses et beaucoup plus de peur.
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e fait est que l’on ne peut échapper à la réalité. Un monde habitué à vivre par le biais de ses écrans oublie cela. Si quelque chose se passe mal dans votre jeu vidéo, vous pouvez le réinitialiser et tout recommencer. Mais si quelque chose tourne mal dans le monde réel, il faut y faire face. Si vous n’affrontez pas le problème immédiatement, ou si vous prenez la mauvaise décision, les difficultés s’amplifient. Si vous oubliez de vous alimenter, vous allez vous déshydrater, avoir des malaises et finalement vous « frappez le mur » ; si vous choisissez la mauvaise descente le long d’un couloir, vous risquez de vous retrouver au-dessus d’un surplomb infranchissable. Dans le monde réel il n’y a pas moyen de tricher. Nous parlons beaucoup de courage lorsqu’il s’agit d’aventure : le courage de surmonter ses peurs, le courage de voguer vers l’inconnu, le courage de risquer sa vie. Mais il serait bien possible que le courage ultime consiste simplement à faire face à la réalité, à être honnête avec soi-même. Il n’y a absolument aucun point positif concernant la pandémie qui a dévoré cette année – qui a consumé tellement de personnes. Mais la majorité d’entre nous a survécu, et ce qui ne nous tue pas devrait nous rendre plus intelligents. Dans ce cas précis, cela veut dire comprendre que la réalité n’est pas une option. Le courage, c’est se confronter au monde dans lequel nous vivons, et non le monde dans lequel nous aimerions vivre. C’est se confronter à la réalité, très concrètement, et très vite.
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Deltaplaniste, 48 ans, GER Pour cette cinq fois championne du monde de deltaplane, la perspective à vol d’oiseau aide aussi lors des crises au sol.
Corinna Schwiegershausen
Changeons de point de vue...
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SAMO VIDIC/RED BULL CONTENT POOL, GETTY IMAGES
MARC BAUMANN
« Quand je me retrouve dans une situation périlleuse en deltaplane, je laisse passer le moins d’émotions possible. Ce qui m’aide : faire face, établir un plan, mettre à exécution. En Jordanie, par exemple, j’ai chuté d’un chameau et me suis fracturé la hanche. Blessée dans le désert, le plan est de demander de l’aide : à une touriste qui était médecin, puis aux gens qui m’accompagnaient. Au deltaplane, je dois les meilleurs moments de ma vie – et le pire : mon fiancé s’est écrasé et a péri dans l’accident juste avant que je ne parte vivre avec lui en Australie. Mais j’ai appris que la vie vous réserve un plan B qui peut vous rendre heureux. Là-haut, je me sens comme un moustique. Ce silence, cette sensation d’être dans l’ici et le maintenant… Beaucoup ont oublié qu’ils pouvaient s’octroyer ce genre d’instants à leur manière, sur terre. »
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Athlète de skicross, 27 ans, SUI Que peut bien faire la championne de ski Fanny Smith en temps de confinement ? Elle affûte les skis de ses amis.
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Fanny Smith
Auteure, 54 ans, GBR La maman de la saga Harry Potter (450 millions de livres vendus) vivait de l’aide sociale et a essuyé douze refus de publication.
J. K. Rowling
« J’AI TRAVERSÉ PENDANT TROIS ANS UNE CRISE D IFFICILE, MAIS C’EST AUSSI SUR ELLE QUE J’AI PU BÂTIR MA NOUVELLE VIE. » Après maints refus, le premier manuscrit de Harry Potter a finalement été accepté par un éditeur, mais uniquement parce qu’il avait plu à sa fille de 8 ans. Une visionnaire.
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COURTESY OF FANNY SMITH, GETTY IMAGES, STELLA KNUCHEL WOLFGANG WIESER CITATION DE J.K. ROWLING TIRÉE DU LIVRE LA MEILLEURE DES VIES, GRASSET & FASQUELLE
Affûtage des carres et fartage des semelles : que du plaisir pour Fanny Smith.
La championne qui choyait vos skis Avril 2020. Fanny Smith affiche sa bonne humeur. Dans son g arage, elle enchaîne les paires de skis, d’abord ceux de sa famille, puis ceux de ses amis. Elle en est déjà à plus de vingt paires. Si la météo le permet, elle travaille dehors, sinon le garage fait très bien l’affaire. Dès qu’une paire est prête, elle la dépose devant la porte de son propriétaire. Première au classement général de la Coupe du monde 2019 et deuxième en 2020, la spécialiste de skicross reste au contact de son métier (bien sûr, le s ervice de la c hampionne est ici gratuit) durant le confinement. Fanny Smith a même pensé à protéger les semelles des skis avec une couche de cire qui se retirera aisément lorsque la saison reprendra : « C’est ma façon de me rassurer et d’affirmer que tout finira par rentrer dans l’ordre. » fanny-smith.com THE RED BULLETIN
Chanteuse, 25 ans, SUI Danitsa répand le funk depuis son domicile, chaque vendredi, en postant un clip vidéo sur Instagram : @danitsa_m
MON EMPLOI DU TEMPS Samedi
Choix du morceau Dimanche
Composer ou re travailler le morceau avec le producteur
Lundi
Ré pé titions + mood boar d pour la réalisation du clip vidéo
Mardi
Enregistrement studio che z mon f rère + mixage
Mercredi
mini-clip vidéo f ilmé sur İphone avec ma sœur
Jeudi
Montage vidéo Vendredi
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Psychologue, 48 ans, AUS/GBR Il a contribué au test Red Bull Wingfinder (wingfinder.com) avec lequel vous pouvez analyser vos qualités professionnelles.
Adam Yearsley Comment bénéficier de la situation
SIGNIFICATION « Je vais tirer une leçon de cette expérience. »
Dans le cas d’un travail à domicile forcé, on retrouve fréquemment les phases suivantes.
HUMEUR
REJET « Cela ne me concerne pas. »
STUPÉFACTION « Qu’est-ce qui se passe ? Je n’y crois pas. »
FRUSTRATION « C’est plus difficile que je ne le pensais. »
RÉSISTANCE « Il va falloir que cela cesse. »
EXPÉRIMENTATION « Je vais essayer quelque chose de nouveau. »
ACCEPTATION « Les choses sont comme elles sont. »
the red bulletin : Quel est le plus grand défi lorsqu’on est contraint au télétravail des semaines durant ? adam yearsley : C’est passionnant, car lorsque nous sommes en télétravail pendant plusieurs mois, nous devons faire face au même genre de problèmes que ceux que rencontrent les astronautes qui se préparent à des voyages prolongés dans l’espace : comment se débrouiller en terrain confiné, tout seul ou en compagnie de peu de personnes ? Vous avez développé un programme de télétravail en dix points, que nous conseillez- vous ? Deux points parmi les plus importants : créer son propre espace de travail bien défini – aussi petit 40
soit-il et même si vous devez diviser une pièce. Autre chose importante : habillez-vous le matin pour travailler. Il faut donc s’habiller comme si on allait au bureau ? Exactement. Et le soir, lorsque
Dans l’ensemble, le télétravail joue un rôle de plus en plus important. Maintenant que nous nous sommes beaucoup entraînés, que peut nous apporter cette période ? Dans le meilleur des cas, la confiance de votre supérieur hiérarchique. En revanche les cadres devraient s’assurer du fait que leurs collaborateurs sont toujours conscients de l’utilité de leurs tâches. Et de manière générale, nous pouvons apprendre à être attentifs les uns aux autres. En vidéoconférence ou une fois retournés au bureau ? Les deux. Je vous conseille de toujours placer la personne avant le sujet à aborder : avant d’entamer la discussion, prenez une minute et demandez à votre collègue comment il ou elle va en ce moment. Dix stratégies de télétravail : redbulletin.com
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ANDREAS ROTTENSCHLAGER
Un psy nous parle du rapport entre le télétravail et les voyages dans l’espace, et comment une crise peut nous aider à mieux considérer nos collègues à l’avenir.
SANDRA SCHARTEL/DIE-PHOTOGRAPHIE
L’espace… de travail
vous avez fini, vous pouvez revêtir une tenue décontractée. Ainsi vous rentrez « mentalement à la maison ».
FARGO CIRCLE STUDIO/TOBY LEIGH
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Chanteuse, 26 ans, ESP Son mix de flamenco et de sons urbains lui a valu une ascension mondiale. Sa v olonté est source d’inspiration pour ses fans.
Rosalía
J’ai rencontré une future star
SONY, ROGER KISBY/REDUX/LAIF
MARCO PAYAN
Le journaliste Marco Payan a interviewé cette artiste alors en devenir, début 2019 : « Lorsque je l’ai quittée, j’étais transformé. Son discours a eu un impact plus important sur moi que ses six Grammys, avec une telle clarté sur ce qu’elle voulait réaliser. Rosalía est restée fidèle à ses propos, que ce soit au travers de sa détermination ou de ses actions, et son succès international n’a rien changé. Ses règles restent les suivantes : travail acharné, intuition, vision. “Il n’y a pas de plan B. J’ai donné ma vie à la musique. Je ne joue pas, je suis sérieuse depuis le début”, me disait-elle alors. La même année, elle devenait une star. »
Instagram : @rosalia.vt
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Pilote moto, 33 ans, AUT Pour Walkner, vainqueur du Rallye Dakar 2018, seules la préparation et la rigueur réduisent la dépendance aux aléas.
Matthias Walkner
Vaincre d’abord les petits détails « Foncer dans les dunes à pleine vitesse peut sembler risqué, à moins d’y être préparé. En revanche, il serait bien plus hasardeux de survoler les instructions du carnet de route, de s’égarer, ou encore de se doucher au bivouac avec la bouche ouverte (et avaler de l’eau potentiellement polluée). Cela reviendrait à se mettre soi-même hors course. L’échec ou le succès dépendent de ces détails qui n’ont l’air de rien, mais qui, au bout du compte, font toute la différence. »
Angela Eiter
« Soyez à l’écoute de votre corps » « Au début de ma carrière, la préparation n’intégrait pas la nutrition. L’idée qui avait alors cours était que plus on est léger, mieux on grimpe. Déterminée à réussir, je mangeais donc peu, d’abord en diminuant mes portions de moitié, puis de plus en plus jusqu’à glisser dans l’anorexie. Mon entraîneur a fini par le découvrir, par me réprimander et même m’interdire de grimper jusqu’à ce que j’ai retrouvé une alimentation normale. C’était l’incompréhension pour moi : on m’avait toujours vanté des modèles de minceur, et voilà qu’on me som-
En 2017, Angela Eiter devient la première femme à escalader la route La Planta de Shiva en Andalousie (9b).
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mait de manger. Le déclic est arrivé lorsque j’ai compris que la faim entravait ma progression. Je n’accumulais plus la masse musculaire nécessaire pour effectuer les mouvements compliqués. Ma force mentale diminuait tout comme la capacité à me concentrer. En reprenant du poids, j’ai senti mes forces revenir et mon estime de moi remonter. Par bonheur, mon entourage a su réagir rapidement à ma perte de poids. La leçon que je retiens de cette expérience est que les signaux que nous envoie notre corps doivent être entendus. Ils sont comme une injonction à laquelle nous devons obtempérer pour ne pas avoir un jour à le regretter. » THE RED BULLETIN
PHILIPP CARL RIEDL/RED BULL CONTENT POOL, KFOTO-KOCO MONCADA/KTM, BERNHARD HÖRTNAGL/ASP/RED BULL CONTENT POOL, LUKA FONDA/RED BULL CONTENT POOL WERNER JESSNER, SIMON SCHREYER
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Grimpeuse, 34 ans, AUT Retirée des compétitions d’escalade en 2013, elle devient, en 2017, la première femme à finaliser une voie 9b sur falaise.
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Dan Atherton
Pilote VTT, 38 ans, GBR Un pionnier du VTT descente et un passionné d’enduro, toujours en quête de nouveaux trails.
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Gee Atherton
Pilote VTT, 35 ans, GBR Double champion du monde et une victoire en Coupe du monde. Il a aussi été pilote de rallye.
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Rachel Atherton
Pilote VTT, 32 ans, GBR Cinq titres de championne du monde, six Coupes du monde : son palmarès est historique.
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RUTH MORGAN
L’union fait la force Ce n’est pas un hasard si les trois Atherton, fratrie la plus célèbre de la course de descente, vivent côte à côte (au Pays de Galles), font partie de la même équipe et ont lancé ensemble leur marque de vélo. Comme le dit Rachel, c’est le fait de savoir qu’ils peuvent compter sur la fratrie qui leur a permis d’atteindre des sommets. THE RED BULLETIN
La famille anglaise la plus couronnée en VTT : Rachel, Dan (dans son dos à gauche) et Gee Atherton.
« La compétition avec mes deux frères nous a toujours poussés à aller plus loin. Quand j’étais gamine, Dan me disait : “Tu peux être la meilleure pilote du monde si tu t’y mets à fond.’’ C’est grâce à cette foi que j’ai pu avoir la carrière que j’ai eue. Savoir que ta famille t’aime comme tu es, ça te donne des ailes. Si tu échoues, cela n’a aucune
i mportance. À l’époque des réseaux sociaux, il est vital de savoir nouer des liens physiques avec les gens. Facebook et Instagram, c’est du vent, alors que ma famille et mon équipe savent qui je suis vraiment, et ils sont là, que je perde ou que je gagne. »
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Alpiniste et cinéaste, 46 ans, USA Le co-réalisateur du film récompensé aux Oscars en 2019, Free Solo, a escaladé (et skié) l’Everest.
Jimmy Chin
Chin a organisé et dirigé des expéditions d’alpinisme et d’escalade en Chine, au Népal, en Argentine, au Groenland, au Pakistan, à Bornéo, en Tanzanie et sur d’autres montagnes aux quatre coins de la planète.
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La vie sous cloche L’alpiniste et vidéaste Jimmy Chin a vu passer bien des tempêtes au-dessus de sa tente. Jimmy Chin, athlète, photographe et cinéaste d’aventure de North Face, a accompagné des équipes dans la réalisation de grandes choses, et il en sait beaucoup sur l’isolement. En effet, l’ascension de sommets de 8 000 mètres implique souvent de passer des journées entières en confinement avec quelques personnes, dans une tente. Lors de cet entretien, en avril, Jimmy Chin était au calme avec sa femme et partenaire de cinéma, Elizabeth Chai Vasarhelyi, ainsi que leurs deux enfants, dans leur maison du Wyoming. Chin nous livre ses réflexions sur les moments de promiscuité entre humains, sous une cloche de toile, quand l’altitude se fait importante, le climat menaçant, et l’espace réduit.
Soyez bien entouré
« Les expéditions d’alpinisme de haut niveau exigent une grande confiance, il est donc essentiel de choisir les bonnes personnes. En général, je m’entoure d’individus qui peuvent non seulement rester calmes dans des situations difficiles, mais qui s’y impliquent, et s’y épanouissent ».
Être bloqué autorise à bouger
« Quand vous êtes confiné pendant longtemps, vous devez rester en mouvement. Sinon, vous vous raidissez. Il y a beaucoup d’exercices que vous pouvez réaliser dans une tente. Je fais des pompes, des abdominaux, des planches, des supermans et beaucoup d’étirements. »
Garder son calme et transporter de la neige : une source de bienfaits
TRACY ROSS
« Rester positif dans une situation que vous ne pouvez pas contrôler constitue un défi mental. Si vous ne voulez pas laisser la peur ou l’anxiété prendre le dessus, évaluez votre situation, réfléchissez aux résultats potentiels, analysez-les, et soyez productif. Prendre soin des autres de manière proactive est aussi étrangement apaisant. Personne ne veut sortir et faire fondre la neige pour trouver de l’eau. Mais si vous vous levez, que vous mettez tout votre équipement, que vous sortez dans la tempête et que vous revenez préparer des boissons chaudes pour tout le monde, vous finirez par vous sentir utile, et bien. »
CHRIS FIGENSHAU, MIKEY SHAEFER
Les bénéfices de l’imprévu
« On parle souvent de la façon dont les tempêtes passent. Mais c’est surtout la façon dont on les surmonte qui compte. J’ai voyagé pratiquement sans arrêt ces dernières années. Alors la situation que je vis actuellement, cette forme particulière de promiscuité, me permet de ralentir, de passer du temps avec ma famille et d’évoluer, dans une certaine limite, dans un endroit que j’aime — j’en suis reconnaissant. »
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Pointure du rock, 52 ans, GBR Avec Radiohead, le guitariste a joué dans des stades partout sur la planète. Mais pour trouver l’inspiration, il tient à s’isoler.
Ed O’Brien
« Les oiseaux ont des talents naturels de chanteurs d’opéra »
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MARCEL ANDERS
« En 1998, je n’étais pas satisfait de ce qui se passait avec le groupe. Nous étions en tournée pour OK Computer (troisième album, multi-platine, ndlr) et c’était tout simplement trop pour moi. J’étais épuisé, déprimé, et je buvais trop. Je n’arrivais pas à gérer ce succès rapide et soudain, ni l’exposition médiatique. Lorsque je suis rentré chez moi, j’ai retrouvé la solitude grâce à de longues balades dans la nature. C’était le meilleur moyen pour me vider la tête et chasser les idées noires. Écouter et observer les oiseaux faisait partie de ce rituel. Mon grand-père adorait observer les oiseaux. Dans mes souvenirs d’enfance les plus anciens, lors de nos vacances en Cornouailles, il portait des jumelles et nous montrait les oiseaux. Ils l’émerveillaient. Je n’appréciais pas tellement cela lorsque j’étais jeune, mais en vieillissant, je suis tombé moi-même de plus en plus sous le charme. Ce que je préfère, c’est être au beau milieu de la nature, parmi les arbres, en compagnie de tous les oiseaux.
Les sons qu’ils sont capables de produire sont fantastiques si l’on considère la taille de leur corps. La gamme vocale de certains en fait l’équivalent de chanteurs d’opéra. J’aime tout particulièrement les écouter à l’heure bleue du petit matin, lorsqu’ils entrent en concurrence pour trouver un partenaire d’accouplement… C’est vraiment magnifique. L’ambiance est tellement joyeuse, vitale et inspirante. Les oiseaux représentent la liberté et l’indépendance, voilà. Le Pays de Galles (où O’Brien a composé la musique pour son premier album solo, Earth, ndlr) est un paradis ornithologique. Les populations d’oiseaux y sont incroyablement variées. J’aime tout particulièrement les phragmites aquatiques. Ils sont extrêmement rares, mais ce sont des créatures merveilleuses et leur chant est spectaculaire. C’est toujours exaltant de les regarder vaquer à leurs petites affaires. » La voix des oiseaux sur Birdsong Radio ; rspb.org.uk
UNIVERSAL MUSIC, NATURE PHOTOGRAPHERS LTD/ALAMY
À chaque fois qu’il se sent vide et épuisé, le guitariste de Radiohead se ressource en écoutant le chant des oiseaux.
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Musicien et producteur, 71 ans, GBR Eno est celui qui a propulsé Roxy Music, inspiré David Bowie, réinventé Coldplay et inventé la musique ambient. Entre autres.
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Chanteuse, 29 ans, USA Numéro un des charts US à 13 ans, elle s’est brouillée avec son label et n’a pas pu sortir de musique pendant dix ans.
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Il y a du changement dans la répétition
SHAMIL TANNA, SOME WONDERFUL OLD THINGS/ALAMY, WARNER MUSIC
FLORIAN OBKIRCHER
En 1975, avec l’artiste Peter Schmidt, il publie une boîte de 113 cartes pour aider les artistes en panne d’inspiration. David Bowie, REM et Coldplay ont utilisé ses Stratégies obliques pour explorer de nouvelles voies dans leur créativité. Sur l’une d’entre elles, on lit « La répétition est une forme de changement », qui invite à l’inspiration même quand la vie semble stagner. « La répétition est une occasion pour votre cerveau de devenir inventif, dit Eno. Il existe un essai écrit en 1959 par le cybernéticien Warren McCulloch intitulé Ce que l’œil de la grenouille transmet au cerveau de la grenouille. On venait de découvrir que l’œil de la grenouille reste immobile. Essayez de fixer quelque chose du regard, et progressivement, tout ce que vous regardiez va disparaître, car les cônes et les bâtonnets dans votre œil saturent et vous ne voyez plus ce que vous observiez. L’œil de la grenouille fonctionne ainsi. Elle est assise, son regard sature, et lorsqu’une mouche passe, c’est la seule chose qu’elle voit. Lorsque vous êtes absorbé dans une boucle, vous vous concentrez sur des détails que vous ignoriez jusque-là. Ainsi ne désespérez pas si la vie semble tourner en boucle. La répétition est un exercice extrêmement utile. »
À la fin des années 70, David Bowie a utilisé les Stratégies obliques pour créer sa légendaire trilogie berlinoise d’albums, dont Heroes.
En 2004, le premier album de Joanna « JoJo » Levesque arrive en tête du Top 40 américain et dans le Top 10 européen.
Où vous mènera le tapis de course ? « Pendant dix longues années de ma vie, je n’étais pas en possession de ma propre voix. C’était horrible. Comment faire face ? Je pense qu’il est important d’avoir une structure de soutien composée de personnes qui croient en vous coûte que coûte, même lorsque vous ne voyez pas encore où vous allez. Je me concentrais sur ce que je pouvais contrôler et avançais pas à pas. C’est comme sur un tapis de course : on court à fond pendant trois minutes, puis on ralentit deux minutes. Pendant ce temps, on reprend ses forces pour les mobiliser lors du sprint suivant. » Good to Know, le nouvel album de la chanteuse JoJo vient de s ortir sous son propre label, Clover Music ; iamjojoofficial.com
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Aventurier et militant, 41 ans, USA Co-fondateur du Great Outdoors Lab, un projet qui étudie l’impact des activités en plein air sur la santé physique et mentale.
Stacy Bare
La plus belle des thérapies au monde
Le temps passé dans la nature est vital à notre bien-être. Mais il nous a manqué ou nous manque peut-être encore actuellement. Pour Stacy Bare, vétéran de l’US Army, les activités d’action en plein air ont d’immenses vertus thérapeutiques. Des chercheurs tentent de mesurer ce phénomène. Texte FLORENCE WILLIAMS 48
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La nouvelle vie de Bare, ancien soldat sauvé par ses aventures outdoor : « L’escalade m’a sauvé la vie et le ski m’a redonné le goût de vivre. »
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orsque Stacy Bare est rentré chez lui après plusieurs années passées à combattre en Irak, il ne savait plus vraiment qui il était. Sa petite amie ne l’avait pas attendu, ses potes d’avant ne l’intéressaient plus, il souffrait d’un léger traumatisme cérébral causé par une attaque à la bombe, et avait perdu la foi dans cette armée américaine qu’il admirait tant jadis. Rentré au pays avec une médaille de l’armée comme cadeau de consolation et le droit de faire des études (en aménagement urbain), Bare s’est retrouvé en proie aux symptômes bien connus des anciens soldats : cauchemars, culpabilité du survivant et stress post-traumatique. Le vétéran se souvient : « J’avais perdu des potes, vu des Irakiens se faire tuer sous nos balles…
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ertaines morts sont plus difficiles à o C ublier que d’autres. Il y a ces images qui me hantent, comme cette petite fille ou ce chien bouffant le cou d’un type mort allongé sous un tas d’ordures. » Pour oublier, il plonge dans l’alcool et la coke. « J’étais devenu un vrai connard. » En 2010, quelques années après son retour, Bare n’a plus goût à la vie. C’est alors qu’un ancien pote de l’armée l’invite à faire de l’escalade dans les montagnes du Colorado – une expérience que les deux amis vont répéter plusieurs fois. Au fil de ces escapades, Bare sent un profond changement s’opérer en lui : les paysages grandioses des Rocky Mountains lui ouvrent de nouveaux horizons, il devient plus concentré, plus sociable aussi, à force de partager les mêmes expériences avec d’autres. Très vite, il se met à multiplier les sorties à ski, en rafting ou avec son sac à dos aux quatre coins de l’Ouest américain. « L’escalade m’a sauvé la vie, le ski m’a redonné le goût de vivre. Quand j’ai découvert ce sport, le sentiment de liberté et la joie que je ressentais dépassaient même ce que l’escalade m’avait procuré. » Il décide de faire profiter d’autres vétérans de son expérience sur les extraordinaires bienfaits de la nature, et devient directeur d’un programme au sein de l’ONG Sierra Club qui s’occupe justement de thérapie verte. Six ans plus tard, le constat est sans appel : nous sommes finalement tous plus ou moins traumatisés, que ce soit en raison de relations conflictuelles ou violentes, de chocs émotionnels ou de situations anxiogènes – une crise sanitaire mondiale, par exemple. En ces temps de pandémie et de récession économique, difficile de ne pas adhérer à son message. Les gens doivent tout à coup gérer des niveaux de stress et d’anxiété rarement observés, le monde tel 49
que nous le connaissions est en train de changer. Quand on est confronté à de tels bouleversements, explique Bare, « on essaie forcément de comprendre qui on est, et ça fait mal ». Cette faculté de résilience, d’apaisement intérieur, et cette force dont nous avons besoin, c’est dans l’espace naturel que nous pouvons les trouver. Si évident que cela puisse paraître en pratique, il manquait pourtant une chose : les preuves scientifiques. Frustré de constater que le corps médical, les psychologues et les compagnies d’assurance ne reconnaissent pas les activités outdoor comme des outils thérapeutiques, il décide en 2014 de participer à la fondation du Great Outdoors Lab, avec le Sierra Club et l’université de Californie à Berkeley. Une des premières expériences menées par les chercheurs a été de faire participer des vétérans de l’US Army et des jeunes défavorisés à deux jours de rafting en eaux vives sur l’American River en Californie, et d’évaluer leur stress, leur moral et
Bare et deux autres guides ont conduit une expédition de ski et de snowboard au Kirghizistan, dans le cadre du projet Silk Road Freeride.
Lors d’un trip organisé par le Great Outdoors Lab, des vétérans ont descendu en rafting l’American River dans les montagnes de la Sierra Nevada.
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leur bien-être avant et après l’expérience. Le résultat : une baisse de 29 % des symptômes de stress post-traumatique. J’ai pu m’en rendre compte lors d’un voyage sur la Green River du Lodore Canyon, que Bare organisait pour des vétérans de l’armée, dans le cadre d’un projet avec l’université de l’Utah : les chercheurs voulaient mesurer les ondes cérébrales des participants durant les quatre jours que durait l’excursion. Plus précisément : les ondes thêta produites dans le cortex préfrontal médial et les ondes alpha de la région occipitale. Pour une raison toute simple, m’a alors expliqué Rachel Hopman, l’une des doctorantes qui participait au projet : ce sont ces ondes qui renseignent sur l’état de sérénité et de concentration d’un individu lorsqu’il vit un moment particulièrement intense. Pendant les quatre jours, on a constaté une chute progressive des ondes thêta et une augmentation des ondes alpha : un très bon signe, puisque « les participants sont plus en phase avec leur environnement, le flot de pensées négatives ou anxiogènes diminue ». Rachel Hopman, aujourd’hui post-doctorante à l’université de Boston, revient sur les conclusions du projet : « Le niveau de stress avait clairement baissé chez la plupart des participants. » L’un d’entre eux, Aaron Wolf, m’avait confié, alors que nous discutions devant le feu de camp : « Dans la nature, je me sens en sécurité, reconnecté à notre profonde nature commune en tant qu’êtres humains. J’ai l’impression que mon cerveau est en ébullition, que cette reconnexion aiguise mes sens et mes capacités intellectuelles. » Ancien Marine, Wolf souffrait de crises THE RED BULLETIN
KENNY CHURCH, COURTESY OF STACY BARE (2)
Stacy Bare, ici avec un groupe de grimpeurs dans l’Utah, veut apporter les preuves scientifiques des vertus thérapeutiques du sport extrême en pleine nature : « On est tous plus ou moins traumatisés. »
d’angoisse à son retour de service : aujourd’hui, fort de ses expériences avec Bare, il a fondé sa propre agence de guides d’aventure et travaille lui aussi avec des adultes et des enfants en difficulté. Se perdre dans les éléments pour se retrouver, retrouver le calme intérieur et le sens de la vie dans le cycle immuable de la nature : c’est, finalement, ce que les Hommes font depuis des millénaires. Pensons à George Mallory, qui s’est lancé dans l’ascension de l’Everest pour guérir ses blessures de l’âme, ou encore à la quête intérieure (certes, semée d’embûches) qu’Ulysse accomplit d’un bout à l’autre de la mer Égée. Stacy Bare : « Après tant de batailles, Ulysse veut se confronter à lui-même pour savoir qui il est. Se sortir d’une s ituation pour en vivre une nouvelle afin d’en apprendre davantage sur lui-même : c’est exactement ce que nous proposons avec nos projets. » Aujourd’hui, alors que nous sommes confrontés à un stress à la fois collectif et individuel, il est rassurant de savoir que les nouvelles recherches sur la thérapie verte se concentrent davantage sur les zones vertes péri-urbaines que sur les espaces sauvages. Des études internationales montrent que les gens qui y passent régulièrement du temps ont une meilleure forme physique et mentale. Une étude britannique réalisée sur 40 000 individus a ainsi révélé un taux de mortalité plus faible, pendant qu’une autre, menée aux Pays-Bas sur la base de 340 000 données, a relevé une plus faible occurrence de quinze maladies liées au stress, comme l’infarctus, l’AVC, l’anxiété, la dépression ou certains cancers. Une baisse du niveau de stress améliorerait donc notre état de santé et notre système immunitaire. La bonne nouvelle pour les habitants des villes (soit plus de la moitié de la popula-
De plus en plus de médecins commencent à prescrire des heures de thérapie verte. tion mondiale), c’est qu’il ne faut pas forcément résider à la campagne : après avoir étudié le mode de vie et la santé de 19 000 personnes, des chercheurs de la Exeter Medical School en Angleterre ont constaté que ceux qui se mettaient au vert deux heures par semaine, même près de chez eux, augmentaient de 59 % leurs chances d’avoir une bonne santé et un bien-être général. Preuves scientifiques à l’appui, de plus en plus de médecins et de psychologues, partout dans le monde, commencent à prescrire des heures de thérapie verte à leurs patients. « C’est comme une soupape de décompression », explique David Sabgir, directeur médical d’un centre de réadaptation cardiaque à Colombus (Ohio) et fondateur du programme THE RED BULLETIN
Bare, ancien soldat médaillé de l’US Army, a servi pendant six ans lors de différentes missions, dont une pendant la guerre en Irak en 2006-2007.
international Walk with a Doc. « On constate une baisse de trois facteurs essentiels pour le cœur : l’anxiété, l’adrénaline et la tension artérielle. » Pourquoi la nature a-t-elle cet effet magique sur nous ? Bare et le psychologue Dacher Keltner, de l’université de Californie à Berkeley, pensent que la nature nous permet d’éprouver des sentiments positifs, comme l’émerveillement que nous éprouvons devant un paysage naturel. Des études ont prouvé que dans un tel état, nous nous sentons davantage connectés à notre environnement et aux autres. La nature ne serait donc pas simplement essentielle à notre civilisation, elle serait surtout la base de toute communication civilisée. Aujourd’hui, Stacy Bare poursuit sa mission dans d’autres secteurs, comme le cinéma et le ski professionnel. Et parce qu’il sait qu’il ne faut pas forcément aller loin pour chercher l’aventure, il a créé Adventure United, un programme qui permet aux gens de retrouver leurs capacités d’émerveillement, même dans leur univers quotidien. « Nous sommes tous plus ou moins traumatisés, dit-il. Et ça craint. Mais je pense que le contact avec la nature est la seule solution qui existe. »
Florence Williams, journaliste américaine, est l’auteure de Ma dose de nature : pourquoi la nature nous rend plus heureux, plus sains et plus créatifs, ainsi que du livre audio The 3 Day Effect, qui revient sur l’expérience d’un trip dans le Lodore Canyon et les effets sur la santé mentale d’un séjour en nature.
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Tennisman, 26 ans, AUT Vingt années sur les courts à encaisser les bons comme les mauvais coups : Thiem est troisième au classement ATP.
Dominic Thiem
Maîtriser la courbe Comment un champion gère-t-il la pression ? Le joueur autrichien revient sur sa finale de l’Open d’Australie 2020 contre Djokovic.
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Une poignée de main après 3 h 59 heures de combat. Vainqueur de justesse : Novak Djokovic (à droite).
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« Perdre le premier set, ça fait toujours mal. Surtout contre d’excellents joueurs comme Djokovic. Alors pendant la pause, je respire un bon coup et je fais le point. C’était chaud, mais mon tour va venir. Et là, je sens un petit vent dans le dos : on ne peut pas influencer les éléments extérieurs, mais on peut s’y accrocher, s’en servir pour remonter. »
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2e set
« Djoko est maintenant exactement là où je veux l’avoir : son jeu est moins bon, hésitant. Mais il faut que je reste calme et concentré pour le maintenir dans cette situation aussi longtemps que possible. Ses fautes, plus nombreuses que les miennes, ne doivent pas me faire perdre mon calme, car il s’agit de ne pas l’énerver. »
3e set
4e set
3 « Je suis dans un bon flow : finis les moments de doute, on est passé au vrai tennis. Si je joue mal ou que je rate deux ou trois points, ça ne me fait rien, car je connais mes points forts, ceux qui m’ont amené à ce stade de ma carrière. Les erreurs sont vite oubliées, je me concentre sur la prochaine occasion, le prochain point à marquer. »
5e set
4 « Trois heures que je suis sur le court : on peut s’y sentir très seul. Dans ces moments-là, je me tourne vers mon box, où sont assis mon coach et ma famille. Je vois ces visages familiers qui me soutiennent, et leur énergie me booste énormément. Plus ça va mal, plus je les regarde : l’effet positif est immédiat. »
après le tournoi
5 « J’ai perdu. Et maintenant : le grand vide ! Les félicitations au vainqueur, la presse, les obligations. Pas cool. Pendant cinq jours, j’en bave. Mais ensuite, j’arrive à voir les choses autrement : contre celui qui a remporté huit fois le tournoi, j’ai quand même assuré. Et il y aura certainement une revanche à prendre… »
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PHILIPP PLATZER/RED BULL CONTENT POOL, GETTY IMAGES
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CHRISTIAN EBERLE-ABASOLO
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Ex-rugbyman, 31 ans, GBR Paralysé suite à un mauvais plongeon, il épate les médecins par la détermination avec laquelle il retrouve sa mobilité.
Ed Jackson
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Snowboardeuse, 22 ans, GBR En 2018, elle se brise l’os du talon droit en s’entraînant pour les JO. Après un an et demi de lutte, c’est le titre mondial.
Katie Ormerod
Rire et se reconstruire Depuis son accident qui l’a rendu quadriplégique en 2017, Jackson écrit dans un journal les hauts et les bas de son incroyable aventure. Presque totalement paralysé, il a travaillé sans relâche à la poursuite de son objectif. Aujourd’hui, il peut marcher, et il a même gravi plusieurs sommets, comme le mont Snowdon (au Pays de Galles) ou le pic Mera (au Népal), au profit de son association caritative, M2M Presents. Extrait du 289e jour de son journal…
SYO VAN VLIET/RED BULL CONTENT POOL, MATT KELLY
RUTH MORGAN
« J’ai vite compris que l’humour serait une super manière d’apporter de la légèreté dans mes périodes les plus sombres. La plupart des rugbymen me comprendront si je dis qu’il y a quelque chose d’incroyablement réconfortant à se faire emmerder par ses potes.
Ed s’est fracturé les vertèbres C6 et C7 et brisé un disque après un plongeon dans une piscine lors d’un barbecue familial en 2017. THE RED BULLETIN
Il n’ont pas mis bien longtemps avant de commencer à me mettre en boîte. Le premier cadeau auquel j’ai eu droit à l’hôpital de la part d’un de mes amis – qui savait parfaitement que je ne pouvais pas bouger du cou jusqu’aux orteils –, c’était des balles de jonglage. Il me les a fait tomber sur la poitrine en me disant : “Voilà, mon gars. Comme tu vas rester ici un moment, je me suis dit, autant que tu apprennes quelque chose de nouveau.” Certains trouveront ça dégueulasse, moi, ça m’a bien fait marrer. J’ai alors réalisé à quel point il était important de continuer à rire malgré toute cette merde – et je n’ai pas arrêté depuis. J’ai encore les balles : elles m’ont aidé à améliorer ma force de préhension, donc rira bien qui rira le dernier. »
Katie a été sacrée championne du monde de slopestyle – elle est la première snowboardeuse britannique à remporter ce titre.
« Katie, tu referas du snowboard un jour »
« Me remettre de cette blessure, ça a été la chose la plus difficile que j’aie eu à vivre (Katie s’est blessée en sortant trop tôt d’un rail, à peine trois jours avant le début des Jeux olympiques d’hiver à PyeongChang, ndlr). Je m’en souviens comme si c’était hier. Je n’ai pas pu me lever de mon canapé pendant trois mois. Je ne savais pas si je pourrais refaire du snowboard un jour. Je ne pouvais pas marcher, j’avais tout le temps mal et j’ai dû me faire opérer sept fois. Même si ça me semblait impossible, il fallait que je me le répète : “Katie, tu referas du snowboard un jour.” Je n’y aurais pas cru à l’époque, mais le fait d’avoir traversé ces
oments difficiles, ça a m fait de moi une meilleure athlète aujourd’hui. J’ai complètement changé d’état d’esprit. Avant ma blessure, il n’y avait que les résultats qui comptaient pour moi. Maintenant, je suis simplement satisfaite de pouvoir faire du snow et d’avoir la possibilité d’aller dans les montagnes. Je sais maintenant que si je me donne à fond, les résultats suivront d’eux-mêmes. C’est cet état d’esprit qui m’a aidée à gagner le titre de championne du monde cette année. Et cette saison a été de loin la meilleure de toute ma carrière. En sachant ce par quoi je suis passée, ça la rend encore plus spéciale. » 53
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Pilote VTT, 38 ans, USA Trois fois championne du monde de 4-cross et médaillée olympique en BMX, elle brille par sa polyvalence.
Jill Kintner
Suivez-la à la trace 46
Pilote VTT, 24 ans, USA En quelques années parmi l’élite du VTT cross-country, elle accumule déjà les titres en nationaux et mondiaux.
Kate Courtney
Talentueuse sur deux roues, Jill Kintner l’est aussi en illustration, sa formation initiale. Les récents événements à travers le monde l’ont poussée à partager des posters à imprimer et à colorier comme ici à droite. Un échantillon de son dernier projet, Bandit Hill, un court-métrage où des créatures imaginaires peuplent une forêt où l’on voit Jill passer à toute allure. À vos crayons de couleur pour un moment créatif. Sans déborder ! jillkintner.com
Son seul horizon
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NORA O’DONNELL
avons évoqué nos craintes, nos efforts pour rester motivés et notre envie résolue de pédaler pour p réserver un sentiment de normalité. Au dîner, j’ai beaucoup ri avec mes parents sur FaceTime. J’échange des séances d’entraînement sur les réseaux sociaux et partage des sorties virtuelles sur internet. La générosité des gens est partout à l’œuvre. Tous ces moments de grâce me rappellent que nous sommes tous dans le même bateau. Les Jeux olympiques célèbrent cet esprit humain. Ils symbolisent la lutte contre l’incertitude, une concurrence acharnée dans l’union de tous. Un test de résilience, une perspective de progrès et de transformation par l’accomplissement de tâches exigeantes, épiques. Pour l’heure, l’introspection est mon seul horizon, je fais le dos rond et me concentre sur la prochaine étape à franchir. Je dois continuer à croire qu’au bout du tunnel, je rejoindrai la ligne de départ des Jeux, là où l’espoir côtoie la déception… »
DARREN CARROLL/RED BULL CONTENT POOL, JESSE DEYOUNG/RED BULL CONTENT POOL
« Il y a les moments où je suis submergée par le sentiment d’amour, de lien et de gratitude pour l’occasion qui nous est donnée d’apprendre et de créer alors que le monde ralentit et reprend son souffle. Puis il y a ceux où dominent la peine et le découragement liés à l’incertitude persistante et la peur croissante du tout. Ma tête raisonne, mon cœur me souffle de petits messages d’espoir. La vérité adviendra sans nul doute. Cette période aussi passera. En attendant, le mieux que nous pouvons faire est d’être bienveillants les uns envers les autres et indulgents envers nous-mêmes. Malgré l’isolement, les points positifs sont nombreux. Je ne me suis jamais sentie a ussi connectée aux autres. J’échange avec des gens touchés par cette crise dans le monde entier. La communauté cycliste reste forte et unie. Récemment, j’ai fait du vélo à la rencontre d’un ami et partenaire d’entraînement, histoire de se croiser et se saluer. Chacun arrêté sur le bas côté opposé de la route, nous
JILL KINTNER
Dans une tribune pour le Wall Street Journal, la vététiste revient sur le report des Jeux olympiques. Extraits.
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Pilote d’exception, 46 ans, FRA Quintuple vainqueur du Dakar à moto, puis passé pilote auto, cette légende du rallyeraid connaît Mike Horn depuis douze ans.
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Cyril Despres
Aventurier, 53 ans, RSA Son nom est connu partout : Mike a fait des dizaines de fois le tour de la Terre, mais n’avait jamais pris part au Dakar.
Mike Horn
« Mike m’a fait me surpasser ! »
Extirpé d’une mission en Arctique, Mike Horn rejoint le Dakar pour y épauler Cyril Despres. Boosté par l’aventurier, le pilote se souvient. « Fin octobre 2019, je n’ai pas de co-pilote pour le rallye Dakar. Je pense de suite que Mike est la seule personne capable de faire ça au pied levé. Je parviens à le contacter début décembre. Il est dans le dur, dans une expédition en Arctique (qu’il terminera le 29 décembre, ndlr), à reculer sur la glace, à passer au travers. Mais il dit oui de suite : il est super motivé par le désert, car il veut toujours apprendre. 56
Le 3 janvier, à 6 heures du matin, je le récupère à Djeddah (Arabie saoudite) et à 11 heures, il est à ma droite dans le buggy où l’on va passer 12 heures par jour d’ici deux jours. Physiquement, Mike vient de vivre l’une de ses plus dures expéditions, il n’a pas du tout récupéré, pas vu le soleil depuis quatre mois, il est très amaigri, boursouflé. Malgré son état de fatigue, il est passé de − 30 °C à + 30 °C, il ingurgite deux mois de données en 48 heures. Dans la voiture, il me fait me surpasser en allant plus vite, il donne une telle énergie… Quand on doit abandonner ce Dakar 2020 pour donner notre moteur à un des deux jeunes du Red Bull Off Road Junior Team, il réagit vite et bien. Je me souviens d’un moment fort en émotion, où l’un des jeunes qui avait perdu tout espoir de bien figurer au classement était limite en larmes. Mike lui explique alors que le plus important est la rapidité avec laquelle il va rebondir. Il est toujours à l’écoute, avec des messages percutants. Dès qu’il sentait que les gens du team étaient fatigués, il faisait un speech. “Si on tient deux minutes de plus, si on fait une b êtise de moins, on sera plus forts.” De ce Dakar à ses côtés, j’ai retenu une chose : Mike n’est pas un surhomme, il est juste super humain. » @cyril_despres ; @mikehornexplorer
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SEBASTIAN DEVENISH, FLAVIEN DUHAMEL/RED BULL CONTENT POOL, PHILIPPE JACOB/RED BULL MEDIA HOUSE PATRICIA OUDIT
Familier des missions glaciales (photo à gauche), Horn est passé de l’Arctique à l’Arabie saoudite en juste un mois pour le Dakar.
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Gamer-streamer, 35 ans, USA Il s’est constitué une fanbase en devenant l’un des speedrunners les plus éblouissants du monde.
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David Hunt
Cycliste d’endurance, 37 ans, AUT En 2018, il traverse le continent américain en un temps record. Il anime des entraînements en ligne sur la musique de Parov Stelar.
Michael Strasser
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DJ et producteur, 45 ans, AUT Le co-fondateur du genre électro swing a fait un carton en 2018 avec son titre The Sun, en tête des charts électro US.
Parov Stelar
Sur le bon tempo Parties communes
CAMERON BAIRD, JAN KOHLRUSCH, CRAIG KOLESKY, SAMUEL RENNER
JEN SEE, CHRISTIAN EBERLE-ABASOLO
David « GrandPOOBear » Hunt a fondé sa communauté en ligne suite à une galère. Voici sa vision pour vous lancer. Un grave accident de snowboard oblige le streamer David « GrandPOOBear » Hunt à changer de passion. Condamné à rester chez lui, sa longue convalescence lui pèse. Un jour, un ami l’invite à le regarder jouer à Halo en ligne. À sa grande surprise, Hunt est immédia tement conquis.
Amis instantanés « Streamer, c’est comme avoir plein de nouveaux potes d’un coup. Quelle que soit votre passion, les jeux vidéo ou dire du mal d’Harry Potter, votre cercle d’amis s’élargit instantanément. Et même si seules cinquante personnes partagent vos goûts à travers le monde, vous les rencontrerez sur internet. C’est génial. » Trouvez vos semblables « Imaginons que vous êtes passionné de Fortnite. Vous allez sur Twitch à la page Fortnite et sélectionnez les utilisateurs qui semblent vous correspondre ; le genre de THE RED BULLETIN
ersonne avec qui vous p traîneriez volontiers. Puis intéressez-vous aux amis de ces derniers. Mes streamers préférés sont souvent les streamers favoris de mes amis streamers. »
Créez votre stream « Un débutant expert ça n’existe pas. Et jouer tout en dialoguant avec 2 000 personnes est très difficile. Le gaming c’est une histoire de communautés et quand vous débutez, votre communauté reste à construire. Le plus dur est d’attirer les dix premiers spectateurs. Aussi, lancez-vous avec l’idée de vous amuser. » Soyez vous-même « N’imitez personne. Être original sera plus payant. Mais sachez que vous ne ferez pas l’unanimité : si vous connaissez Internet vous savez que c’est loin d’être un endroit bienveillant et rationnel. Trouvez votre voie, imposez-vous, en y prenant du plaisir. Et pensez à le partager ! »
Michael Strasser a parcouru 22 642 km à vélo en 84 jours, 11 h et 50 min, de l’Alaska à la Patagonie, en résistant à des rafales de 100 km/h au Pérou. Une performance qu’il doit en partie à la musique et aux encouragements d’une même personne, un artiste qu’il ne connaissait pas en se lançant.
Cher Michael, je m’appelle Marcus, alias Parov Stelar, nom qui te parlera sans doute plus. Si je comprends bien, tu t’apprêtes à vivre des moments exceptionnels. Avant tout, sache que tu as tout mon respect. C’est formidable de voir des êtres qui repoussent les limites du possible.
Ton expédition me rappelle beaucoup mes débuts en musique. À ce moment-là, nombreux dans mon entourage ne me parlaient que de ce qui n’était pas réalisable. Mais tu es un battant toi aussi. Comme on dit, « qui veut, peut ». Je te souhaite la réussite dans ton projet, dans ton aventure ! Et si ma musique peut contribuer à te porter sur un ou deux kilomètres, j’en serais d’autant plus ravi. Bonne route.
Merci Marcus ! Ces mots m’ont porté déjà à travers onze pays. Salutations du Pérou !
Et oui, le Mambo Rap que j’écoute en boucle m’a poussé à lui seul sur 2 000 km.
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Promoteur de spectacles, 45 ans, USA Depuis 2007, son entreprise Insomniac est à l’origine des plus grands événements de musique électronique aux États-Unis.
Pasquale Rotella
Rien ne peut arrêter la fête Un monde en confinement, un roi de la culture festive qui ne perd pas le nord, et l’histoire d’un moment d’autoisolement qui fut le point de départ d’une party à l’échelle planétaire. Texte LOU BOYD Photos WOLFGANG ZAC
Quinze jours après la fête Beyond Wonderland, le photographe Wolfgang Zac a pris ces clichés lors du HARD Summer Staycation Virtual-A-Thon, du promoteur Insomniac, dirigeant ses modèles depuis son ordi. En bas à droite, Disinfecto assainit le DJ booth des bureaux d’Insomniac, entre deux sets d’artistes.
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Pour documenter les mega teufs virtuelles d’Insomniac, Wolfgang Zac est devenu photographe de fête à distance : « Je ne me rappelle plus qui est la fille sur la photo, mais plus de 50 000 personnes la suivent sur I nsta. Je l’ai appelée sur FaceTime et me suis r etrouvé dans son salon. J’ai eu du mal à la prendre en photo, car elle tenait toujours à prendre la pose. Lorsque je lui ai demandé si elle avait à boire, elle a pris son verre de vin. J’avais ma photo. »
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e vendredi 20 mars 2020 devait être le coup d’envoi du festival tant attendu Beyond Wonderland, en Californie du Sud. Mais alors qu’une crise mondiale s’apprêtait à tout arrêter, les fans d’EDM commencèrent à s’inquiéter. Le 19 mars, la Californie imposa un confinement dans tout l’état : le festival était mort. Mais pas pour le fondateur de Beyond Wonderland, Pasquale Rotella, qui y vit une occasion de faire quelque chose d’exceptionnel, et transforma ce week-end en premier rave virtuel du monde. La fête dura deux jours, et 3,5 millions de fêtards se sont retrouvés pour ce qui pourrait bien être le plus grand rassemblement musical de tous les temps – sauf que personne n’était présent physiquement. En tant que boss d’une boîte de promotion d’événements et festivals, Insomniac, Rotella est notamment en charge du plus grand festival d’EDM d’Amérique du Nord, l’Electric Daisy Carnival. Mais cette fois, un nouveau défi l’attendait lui et son équipe. « Ce n’est pas une idée particulièrement géniale ni folle que nous avons eue là, mais nous sommes les premiers à l’avoir réalisée à cette échelle, dit-il depuis sa maison de Los Angeles. Ça s’est passé de manière très naturelle : “Il va falloir tout repousser et organiser un rave-a-thon virtuel.” Je ne sais même pas comment le mot rave-a-thon
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« Casey (en haut à gauche) est apparue dans l’appartement de son copain qui dansait à l’écran, puis elle a disparu. » En bas, Ducky prend la pose après son DJ set du HARD Summer Staycation.
m’est venu, mais l’équipe n’a pas hésité un instant. Ils étaient tous d’accord : “Bien sûr, on va faire un rave virtuel.” » Le rave-a-thon virtuel de Beyond Wonderland fut diffusé en direct sur Twitch et YouTube, les artistes prévus pour le festival jouaient leurs sets dans un espace prévu à cet effet. Tandis que les participants publiaient des photos et des vidéos live les montrant en train de danser « à la soirée », le hashtag #virtualbeyond afficha une montée en flèche et le trafic internet explosa. L’Electric Daisy Carnival compte 400 000 participants ; le rave-a-thon en avait neuf fois plus. Si les gens s’étaient déplacés comme pour les précédentes éditions, cela aurait été un événement sur place, la foule aurait rempli une quarantaine de fois le Stade de France. « Je ne pensais pas que cela prendrait une telle ampleur, dit Rotella. Il s’agissait d’abord de satisfaire notre communauté, ceux qui avaient acheté des tickets, mais c’est allé bien plus loin. Nous avons toujours été un événement très californien, donc pour le coup, avoir des participants qui nous ont rejoint depuis la Chine, la Corée, l’Australie et partout sur terre, c’était exceptionnel. » Des scènes classiques de festival sont apparues sur les écrans. « Les gens brandissaient des bâtonnets luminescents, étaient sur leur trente-et-un, THE RED BULLETIN
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Photographe, 52 ans, AUT Un « créateur d’instantanés » basé à L.A. : « J’utilise peu de matos : pas de lumières ni de réflecteurs, juste un flash sur l’appareil. »
Wolfgang Zac
« J’ai adoré Devault (le DJ à gauche, ndlr), dit Zac. Son style de musique est underground, sombre, différent. Je voulais que sa musique soit visible dans ma photo. Je l’ai fait marcher dans les bureaux d’Insomniac. Cette lumière sur son front est un pur hasard, elle provient d’une e nseigne de sortie de s ecours. Pour moi, cela décrit sa musique. »
Quand une fête bat son plein… loin. Comment notre photographe a documenté une fête en ligne à travers un écran d’ordi. Wolfgang Zac et sa femme Claudia, qui est également sa partenaire créative, étaient dans l’impossibilité de rentrer à Los Angeles lors du confinement. Elle a élaboré le screen shoot utilisé pour immortaliser la fête pendant qu’elle battait son plein (voir ci-dessous). « Nous nous sommes dit : “Comment pouvons-nous vaincre l’isolement et rester créatifs ?”, explique Zac. À force de faire des images à travers mon objectif et celui du téléphone de quelqu’un d’autre, tout en passant par l’écran de mon ordinateur, j’en ai eu le tournis. Je suis fasciné par l’intimité que dégagent ces clichés, même par écrans interposés. »
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« Gerhard et Uschi sont des Autrichiens établis à Londres, se souvient Zac. J’ai pris ces photos sur leur terrasse. J’ai été surpris par leurs tenues légères, car c’était déjà le petit matin, et dans leur fuseau horaire il faisait froid. Ce sont des ravers inconditionnels. »
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« Ce cliché de @_sriacha (en bas) est l’un de mes préférés. Elle était avec son chien, encerclée de canettes de bière – un peu comme une fille dans les étoiles qui boit de la bière. J’ai pris P asquale Rotella (à gauche) tout à la fin. Il cherchait l’afterparty. »
dansaient avec des totems – c’était dingue », rit Rotella. Les fêtards faisaient tourner des cerceaux de LED et se mettaient sur les épaules de leurs amis, les bras en l’air. Le plus curieux, c’était de voir les lasers illuminant des murs de salons, des bébés ébahis observant leurs parents qui dansaient, et des chiens faisant la sieste sur des canapés derrière trois personnes qui dansaient le pogo – la liberté des festivals saisie dans des millions de foyers individuels. Un message circulait en bas de l’écran : “Stay home. Stay safe. Stay positive.” (trad. Restez chez vous. Restez en bonne santé. Restez positifs.)» Pour l’équipe de Rotella, l’expérience était également unique. « Nous avons organisé toute la partie artistique de l’événement dans nos bureaux, chaque membre de l’équipe était doté de masques et de gants. » Une équipe de sept personnes s’est occupée de transformer la zone d’accueil des bureaux d’Insomniac en une scène pour DJ d’un niveau costaud avec lasers, animations et effets digitaux. « Notre hall d’entrée classique avec ses flyers sur une table et une télé diffusant les vidéos de nos fêtes s’est transformé en un monde fantastique. Nous ne pourrons plus jamais revenir à notre hall d’entrée d’avant. » Le Jour J, Rotella s’est installé en sécurité à deux mètres des platines, trônant dans un fauteuil THE RED BULLETIN
tel un roi fou savourant son spectacle privé. Chaque personne sur scène avait deux mètres d’espace libre, tous les DJs portaient des masques, et entre les sets, un personnage mystérieux en combinaison Hazmat nettoyait les tables de mixage. « Ce n’est pas n’importe qui ; c’est Disinfecto, explique Rotella. Il a fait un carton. Les artistes n’avaient pas le droit d’accéder à la scène avant qu’il n’ait tout passé au désinfectant. » « Des panneaux encourageaient les ravers à L evez vos mains aseptisées et les samples de la v edette Kill the Noise criaient Restez dans votre p utain de maison ! » Rotella explique que « nous ne voulions surtout pas passer pour des inconscients qui ne prennent pas au sérieux la situation actuelle. Notre communauté de danseurs est bâtie sur l’idée d’être la meilleure version de nous-mêmes, capable de faire les bons choix. Il y a assez de distractions négatives par ailleurs ; nous prônons la positivité ». Après l’immense succès du premier rave-athon virtuel, Rotella a fait de cette fête en ligne un événement hebdomadaire, accumulant des millions de personnes par-delà toutes les frontières. « Désormais les membres de notre communauté sont plus interconnectés que jamais, s’émerveille Rotella. Nous allons continuer ! » socal.beyondwonderland.com/livestream 63
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Inventeur, 40 ans, AUS Cet as de l’autonomie inventive devenu apiculteur développe des prototypes dans son jardin.
Cedar Anderson
Le miel a du pot
FLOW
RACHAEL SIGEE
Comment le bricolage de jardin d’un inventeur australien obstiné a révolutionné l’apiculture moderne.
Cedar Anderson a pour habitude de trouver lui-même des solutions à ses problèmes depuis qu’il s’est fabriqué son propre kart pour aller à l’école, à huit ans. Aujourd’hui, sa voiture est adaptée pour fonctionner à l’huile végétale usagée, et il vole au travail à l’aide d’un paramoteur électrique qu’il a construit lui-même. « Quand j’étais gosse, nous n’avions pas la télé, alors nous allions bricoler dans l’atelier, raconte Anderson, qui a été élevé au sein d’une communauté de la Nouvelle- Galles du Sud orientée vers la nature et le développement durable. Nous étions pauvres, nous devions être inventifs. On nous encourageait à tout expérimenter. Lorsque j’ai réalisé que la récolte de miel était un travail difficile et pas très propre, et qu’un certain nombre d’abeilles se fait écraser lors de la procédure, je me suis dit qu’on pouvait faire mieux. » Au bout de dix ans de recherche avec son père Stuart, apiculteur, il a trouvé une solution : la ruche à écoulement (flow hive en anglais). Les alvéoles dans chaque cadre sont séparées verticalement et non horizontalement, afin que le miel puisse être extrait à l’aide d’un robinet, ne causant aucun stress aux abeilles. « C’était fou, explique Anderson, nous développions nos inventions et vivions dans une cabane, et un jour nous avons lancé une campagne de crowdfunding qui déboucha sur des commandes de l’ordre d’un million de dollars en deux heures ! » Aujourd’hui, plus de 75 000 ruches Flow Hive sont utilisées dans 130 pays. Cette invention a fait des dizaines de milliers de nouveaux apiculteurs, mais malgré son succès, Anderson reste un authentique inventeur bricoleur. « Je pense que beaucoup d’entre nous ont des idées géniales, déclare-t-il, or peu d’entre nous les réalisent. Un trait de caractère essentiel est l’obstination. Je ne lâche pas le morceau. » honeyflow.com
La ruche Flow Hive est taillée au laser dans du bois issu d’une gestion forestière d urable, ici du thuya occidental (en haut). L’homme au miel, Cedar Anderson (ci-contre).
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Breakdancer, 39 ans, FRA Enfant, Junior Bosila Banya pouvait à peine courir. Depuis, le Franco-Congolais a percé dans l’élite mondiale du break.
TYRONE BRADLEY/RED BULL CONTENT POOL, LITTLE SHAO/RED BULL CONTENT POOL
FLORIAN OBKIRCHER
BBoy Junior
« Je me focalise sur ce que j’ai et veux »
BBoy Junior a vécu une enfance difficile, mais grâce à son mental, il a transformé ses désavantages en une force formidable. « J’ai attrapé la polio à l’âge de trois ans. J’ai découvert ma différence en constatant que je ne courais pas aussi vite que les autres enfants. Je n’ai pas baissé les bras pour autant et me suis orienté vers des sports tels que le tennis de table et la boxe ; au football, je gardais les buts. Quand les gens font allusion à mes limites, je redouble d’efforts et leur prouve a insi qu’ils ont tort. J’essaie toujours de faire de mon handicap une force. THE RED BULLETIN
La danse est le meilleur exemple de ma f açon de voir les choses. Petit, j’imitais Michael Jackson en regardant ses vidéos. Les pas que je n’arrivais pas à reproduire, je les compensais en inventant des mouvements inspirés de la gymnastique et des arts martiaux et que j’exécutais sur les mains. À 12 ans, j’ai découvert des danseurs de rue à la télévision et à ma grande surprise, leurs mouvements ressemblaient aux miens. Je dansais le break sans le savoir. Dès cet instant, j’ai mis les bouchées doubles, ma passion était toute trouvée. Très vite, les autres enfants ne voyaient plus en moi le petit handicapé, mais le gars aux mouvements incroyables. Puis deux coachs de breakdance m’ont remarqué et pris sous leur aile. Face à l’adversité, j’adopte la même attitude. Plutôt que de m’attarder sur ce que je n’ai pas ou sur ce qui me fait défaut, je me focalise sur ce que j’ai et ce que je veux. »
Instagram : @bboyjuniorofficiel
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Pilote de Formule 1, 22 ans, NED Le pilote Aston Martin de Red Bull Racing est aussi un grand fan de sim racing et de compétitions esport.
Max Verstappen
Un très Grand Prix
Comment Max Verstappen a fait de l’annulation du GP d’Australie la compétition esport en direct la plus suivie de l’histoire. Texte TOM GUISE
Verstappen était bien sûr d’attaque pour piloter cette année, mais lorsque le premier Grand Prix de la saison 2020 de F1 – prévu à Melbourne – a été annulé un jour avant les qualifications, c’était mal barré. De l’autre côté de la planète, dans un bureau près de Silverstone, en Angleterre, Darren Cox trouvait tout cela palpitant. L’organisateur d’événements esport y vit un défi, car il avait déjà transformé des joueurs ordinaires en pilotes réels comme avec GT Academy sur Playstastion. Une idée germe dans son esprit : mettre sur pied une compétition esport de très haut niveau... en seulement trois jours. Max Verstappen était LE pilote en or pour y participer. « J’ai toujours possédé un simulateur, mais lorsque j’ai commencé la F1, je n’y ai plus joué, dit le pilote Red Bull. Je m’y suis remis il y a un an. » C’est cette course qu’il attendait. Voici comment ces 72 heures se sont déroulées...
11 h 30 UTC, mardi 12 mars
L’idée darren cox : Je me suis réveillé, ai lu le journal et me suis dit qu’il n’y aurait pas de course dimanche. max verstappen : McLaren s’était retirée, et dans l’après-midi, les écuries ont toutes décidé de ne pas participer à la course. dc : J’ai eu une conversation avec mon équipe, et nous avons concocté un plan. Nous n’avions encore de confirmation d’aucun commentateur, studio ou pilote de course. Nous ne savions pas quelles voitures ni quels circuits nous allions utiliser, mais d’ici 72 heures, nous serions en direct. mv : J’ai commencé à planifier mon temps libre. Entre mon planning de F1, j’ai des séances en simulateur chez Red Bull, mais une fois chez moi je suis sur mon propre simulateur. Il n’est pas aussi sophistiqué que celui de Red Bull, mais assez pour jouer.
13 heures UTC, vendredi 13 mars
La course est annoncée dc : Il nous fallait au moins dix pilotes. Nous avions déjà António 66
Félix da Costa, qui est sur les podiums de championnat de Formule E, et Rudy van Buren (qui a remporté la première saison de World’s Fastest Gamer en 2017, ndlr). Il s’est très vite investi et s’est enquis si nous avions de la place pour Max. mv : Un ami m’a demandé si je pouvais participer à cette course. Tout s’est décidé à la dernière minute. dc : Il n’y a pas eu de négociations tendues avec son management. Il s’est proposé de lui-même. Le seul problème était de savoir s’il arriverait à rentrer d’Australie à temps.
14 h 50 UTC, samedi 14 mars
Verstappen est confirmé dc : Nous avons discuté du meilleur logiciel de simulation : iRacing ou rFactor. Nous avons opté pour le second. Il y a cinq ans, des équipes de F1 se sont servies d’une version comme outil de simulation pour leur écurie. Il est très avancé. mv : Je participe surtout à des événements iRacing, et ce n’est pas idéal de changer si l’on veut être à la hauteur. Il faut du temps pour s’adapter. J’aurais aimé avoir plus de temps pour me préparer. dc : Nous avons opté pour des manches de 15 minutes, l’approche dynamique du rallycross, avec une finale de 20 minutes. mv : Ils voulaient plus de pilotes de F1 réels que de coureurs sim afin d’attirer les spectateurs. J’en avais affronté quelques-uns en F3, en karting ou en F1 – dont un certain nombre de grands noms. dc : Nous avions des pilotes en Grande-Bretagne, en Europe, aux USA, dont certains n’avaient jamais utilisé rFactor. Il est impossible de juste se connecter et se lancer ; donc sept gars se sont occupés du centre d’assistance afin de les aider. L’un d’eux a fait 48 heures d’une traite. mv : Les huit meilleurs pilotes des trois manches passaient en finale. Le combat entre les coureurs de sim était rude. dc: En mettant pilotes réels et sim dans les mêmes manches, les pilotes réels ne se qualifieraient pas. THE RED BULLETIN
dc : Nous avons réglé les dommages de collision en les diminuant de 50 %. Nous ne voulions pas que tout le monde réintègre son stand après le premier tour, mais pas non plus que tout le monde se rentre dedans au premier virage.
13 h 03 UTC, dimanche 15 mars
La course commence dc : 72 heures après avoir planifié notre course, le départ est donné. mv : J’ai remporté ma qualification, en grande partie contre d’autres pilotes de course de la vie réelle. Mais la vraie course a eu lieu dans un autre groupe. dc : Au bout de dix minutes, nous avions 52 000 spectateurs – le stream le plus suivi toutes plateformes confondues à ce moment. En tout, plus de 500 000 personnes ont regardé l’événement en ligne.
14 h 47 UTC, dimanche 15 mars
La finale
Verstappen dans un simulateur : « C’est un bon moment pour le gaming. Les gens sont nombreux à nous regarder. »
VERSTAPPEN.NL, RED BULL RACING/GETTY IMAGES
11 heures UTC, dimanche 15 mars
Max arrive deux heures avant le début de la course dc : Le circuit était celui du Nürburgring et la voiture inspirée d’un modèle de F1 de 2012, que certains pilotes F1 trouvaient trop nerveuse. mv : C’est la première fois que je la conduisais. Même si tu es bon dans la vraie vie, dans le simulateur, tu ne peux pas aller vite tout de suite. Les coureurs de sim avaient plus l’habitude de la conduire. THE RED BULLETIN
« Dans le simulateur, tu ne peux pas aller vite tout de suite. » Max Verstappen
mv : J’ai été éjecté au premier tour et me suis retrouvé dernier. Ma course était terminée, mais je n’ai pas abandonné. J’ai essayé de dépasser le plus de personnes possible (Max a terminé onzième ; Van Buren troisième, ndlr). dc : Contre d’autres pilotes de course, en simulateur, Max est probablement le meilleur. Mais il ne passe pas douze heures par jour dans le simulateur. S’il s’y mettait, il serait parmi les premiers d’ici peu. mv : J’aime la course en simulateur, mais je préfère nettement la vraie. Peut-être qu’un jour je combinerai les deux, mais je ne lâcherai jamais la Formule 1. dc : En 72 heures seulement, nous avons trouvé des gens aux Pays-Bas pour gérer le jeu, à Londres pour la retransmission chez eux, et 46 pilotes du monde entier prêts à se connecter. Si trois jours plus tôt vous m’aviez dit qu’un jeu de course ferait partie des vingt canaux les plus visionnés sur YouTube ou Twitch, je vous aurais ri au nez. 67
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Footballeur, 28 ans, BRA L’attaquant du PSG, et international brésilien, compte parmi les meilleurs joueurs de football au monde, et les plus suivis sur les réseaux.
Neymar Jr Inbox: THE POWER OF LIFE ISSUE Re
Thoughts in these times
To
The Red Bulletin
From Neymar da Silva Santos Júnior <neymar@xxxxxxxxxx>
Message d’un ami au Brésil À l’heure où le monde vivait une expérience commune, nous avons reçu cet email inhabituel…
Friday, 10 April, 2020 at 09:57
Olá Se eu pensar só em mim e na minha equipe, o PSG, pergunto a você: Tinha momento mais inadequado para os campeonatos pararem ?? Mas acho que agora é hora da gente cuidar do planeta, de salvar vidas. É hora dos especialistas e governantes tomarem as decisões mais corretas possíveis para salvar o maior número de vidas. Os dirigentes de clubes e federações terão as respostas adequadas para esta questão. Eu vou continuar treinando, todos os dias, esperando o retorno aos gramados porque eu sei que o esporte voltará. O esporte é muito importante na vida de cada ser humano e voltará ainda mais forte, tenho certeza. Eu passei um bom tempo em reclusão, isolamento em razão das lesões que sofri em 2018 e 2019. Foram momentos muito difíceis mas que me deram um aprendizado muito grande relacionado a manter foco, me recompor e recuperar a autoconfiança. Então este momento, individualmente, eu conheço bem e sei exatamente o que fazer para pra manter a cabeça boa. A grande diferença é que agora não e uma questão individual. Essa pandemia parou o mundo e não sabemos quando nem como as coisas ficarão depois que isso tudo passar. Não é só uma questão de “manter o foco”, mas de preocupação com as nossas famílias, com as pessoas que amamos e com o planeta. Vamos ficar em casa, cuidando uns dos outros e esperar esse momento passer São três cães, o Poker, o Flush e o Truco. São meus zagueiros neste período. Hahahahaha Eles moram no Brasil e é muito bom passar esse período com eles, sempre gostei muito de cachorros. E não tem muita técnica pra treinar com eles não, é só jogar à bola e correr q eles vêm todos juntos pra me desarmar... E vou te falar, eles dão trabalho pra mim… hahahahaha Eu que tenho que melhorar pra enfrentá-los. Hahahahahahaha
TRADUCTION
Valeu, um abraço, Neymar Jr
Salut,
En 2018-19, mes blessures m’ont imposé de longues périodes d’isolement, des périodes difficiles, mais où j’ai beaucoup appris, notamment à rester concentré, à guérir et à retrouver la confiance en moi. De ce fait, le moment que nous vivons me parle, et je sais comment agir pour garder la tête froide. La nouveauté tient au fait que je ne suis pas le seul à vivre cette situation. La pandémie a figé le monde et nous ignorons ce qu’il adviendra lorsqu’elle s’arrêtera. Nous ne savons même pas quand elle finira. Nous devons garder la tête froide, mais nous préoccuper aussi de nos proches, de ceux qui nous sont chers en ce monde. Soyons patients, respectons le confinement et prenons soin les uns des autres. Mes trois chiens, Poker, Flush et Truco sont mes adversaires ces temps-ci. Hahahahaha Ils ne quittent jamais le Brésil, et c’est super de passer du temps avec eux. J’ai toujours aimé les chiens. L’entraînement avec eux reste techniquement limité. Je me contente de courir avec le ballon en les empêchant de me le chiper… Et croyez-moi, ce n’est pas une mince affaire… Hahahahaha
Neymar Jr, chez lui, au Brésil, près de Rio de J aneiro avec ses « partenaires » du moment.
Je dois m’améliorer pour les battre ! Hahahahahahaha Courage et prenez soin de vous, Neymar Jr 68
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HADRIEN PICARD/RED BULL CONTENT POOL
TOM GUISE
Si je ne pensais qu’à moi et à mon équipe, le PSG, je me dirais : est-ce vraiment le moment le plus opportun pour que les championnats s’arrêtent. Mais je pense que l’heure est à la sauvegarde de la planète et des vies humaines. Les experts et les autorités étatiques doivent à présent prendre les décisions adéquates pour sauver le plus grand nombre de vies. Les responsables des clubs et des fédérations sauront faire face à la situation. Je m’entraîne tous les jours, en attendant de retrouver le terrain. Le sport sera bientôt de retour, j’en suis sûr. Il tient dans la vie de chacun une place importante, qui ne manquera pas de se développer à l’avenir.
« Le sport sera bientôt de retour, j’en suis sûr. » Neymar Jr et son tee-shirt du tournoi de football à cinq qui porte son nom.
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Pilote, 31 ans, SUI Il est double vainqueur des 24 heures du Mans et a deux fils avec lesquels il construit des voitures de course LEGO.
Sébastien Buemi
« Quand on ne peut sortir d’entre ses quatre murs, le LEGO offre une super occasion de créer quelque chose de ses mains, en famille ou en solo. Au début, c’est un amoncellement de pièces et à la fin, vous obtenez un morceau de technologie qui fonctionne, avec lequel les adultes peuvent aussi s’amuser. Jules, l’aîné de mes deux fils, a quatre ans. Avec lui, j’ai l’impression de construire 70
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WERNER JESSNER
des véhicules Lego 24 heures sur 24. En ce moment, nous travaillons sur une moto de cascadeur avec un camion, ensuite nous ferons une Porsche du Mans qu’il a choisie. Trois conseils de ma part : soyez organisé et ne mélangez pas les kits. Deuxièmement : assurez-vous d’avoir suffisamment d’espace pour assembler les kits. Troisièmement : faites participer les enfants à la r echerche de pièces. Leurs petits yeux de lynx trouvent parfois ce que nous, les adultes, avons manqué dix fois ! »
THOMAS STÖCKLI/RED BULL CONTENT POOL, THE LEGO GROUP
Quand le pilote auto passe en catégorie LEGO
Une Porsche 911 RSR, avec ses 1 580 pièces : un jouet cool à l’échelle 1:8.
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Aventurier/photographe, 52 ans, SUI Basé dans le canton de Berne, il dirige des expéditions exclusives pour des petits groupes – par exemple au pôle Nord.
Thomas Ulrich
Survivre sur un terrain mouvant Coincé quatre jours sur un morceau de banquise, il en tire une leçon : la force réside dans le sang froid.
En haut : les adieux avec l’alpiniste Christine Kopp, au cap Arctique, sur l’île Komsomolets, à exactement 990,7 kilomètres du pôle Nord. Ci-dessus : la tente de Thomas Ulrich, son seul refuge pendant quatre jours, avant qu’il ne soit sauvé. La banquise est encore intacte ; plus tard, elle se brisera en morceaux.
anique, puis, bercé par le va et vient de l’océan p Arctique, il r etrouve un calme presque méditatif. Il reconnaît que « la vie est incertaine – mais les changements ne sont pas une catastrophe ». Lorsque un hélico arrive à sa rescousse, il a appris à manœuvrer en terrain mouvant. « Depuis, je sais comment garder mon sang-froid en cas de crise. Les bouleversements ne me font plus paniquer. » thomasulrich.com
THOMAS ULRICH, ULI WIESMEIER
WOLFGANG WIESER
L’homme qui se débat dans l’océan Arctique avec sa combinaison étanche orange sur la photo du bas s’appelle Thomas Ulrich. C’est un habitué des aventures du grand Nord qui sait pourquoi la force ne peut découler que du calme. C’est la raison pour laquelle il est encore en vie. En 2006, Ulrich veut traverser l’Arctique en solitaire, de la Russie jusqu’au Canada. Lorsqu’il prend la route, il vient de passer une semaine au cap Arctique, sur l’île Komsomolets, un lieu peu hospitalier. « J’ai perdu patience, c’était une grave erreur. » De plus, la banquise était très mince cette année-là – 15 cm seulement à certains endroits. Au bout de quelques kilomètres seulement, l’expédition tourne au désastre. Une tempête pousse la banquise contre la terre ferme. La glace se brise. « Une brèche s’est ouverte à un mètre de ma tente, puis une autre de l’autre côté, puis une troisième, une quatrième », se souvient-il. Thomas Ulrich est bloqué sur son morceau de banquise pendant quatre jours. Il
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Goût de la liberté, indépendance et décision spontanée, voilà ce qui unit les quatre athlètes de l’équipe Red Bull Skydive. Mais alors, comment vivent-ils une inactivité imposée ?
L’équipe Red Bull Skydive
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Quelques minutes
Quelques heures
Quelques jours
« Briquer la cuisine pour pouvoir à nouveau la nettoyer après avoir essayé une nouvelle recette. »
« Passer l’équipement en revue, me promener et trouver de nouveaux spots de BASE jump. »
« Tester la durée de vie d’une PlayStation. »
Felix Seifert
Max Manow
« Observer les abeilles et rempoter les plantes en souffrance. »
« Développer et mettre en place de nouvelles approches pédagogiques pour former les jeunes parachutistes. »
« Regarder la machine à laver tourner afin de m’assurer qu’elle est bien branchée. »
Marco Fürst
« Je médite. » Max Manow
Marco Fürst
29 ans, AUT
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27 ans, AUT
63 Max Manow
31 ans, GER
Felix Seifert
« Me faire une boule à zéro et regarder mes cheveux pousser. » Marco Waltenspiel
« Penser à de nouvelles chorégraphies. » tous en chœur
redbullskydiveteam.com Les gars, il faut que vous alliez prendre l’air. Il y a urgence !
WOLFGANG LIENBACHER, MICHAEL GROESSINGER/RED BULL CONTENT POOL
WERNER JESSNER
Marco Waltenspiel
Marco Waltenspiel 35 ans, AUT
Optimiser son temps...
Marco Fürst
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Triathlète, 53 ans, SUI Elle a remporté six fois l’Ironman à Hawaï. Avec un peu d’ingéniosité, elle poursuit les entraînements sur la Grande Canarie.
Natascha Badmann
Une chambre à air autour des chevilles, un mousqueton...
… un élastique à fixer dans le bassin de 8 mètres et...
… c’est parti pour enchaîner les longueurs. Malin.
COURTESY OF NATASCHA BADMANN, DAN VOJTECH/RED BULLCONTENT POOL, IGNAZ KOENIG/RED BULL CONTENT POOL, @DANIELARYF WOLFGANG WIESER
Natascha s’attache Le monde de Natascha s’est rétréci d’un coup : finies les longues courses au grand air, les embardées à vélo et les vagues de l’Atlantique à parcourir à la nage. Au lieu de ça, une petite piste de 500 mètres, un vélo d’appartement, un tout petit bassin de 8 mètres de long… et un séjour sur la Grande Canarie qui se prolonge, involontairement, les vols vers la Suisse étant tous annulés. Des conditions qui auraient pu devenir étouffantes, si Natascha Badmann n’avait pu compter sur les bonnes idées de son compagnon : « Toni est à la fois coach, cuisinier, mécano, etc. » Après avoir adapté le circuit et le vélo d’appartement aux entraînements de Natascha, il a eu l’idée de l’attacher par les pieds dans le petit bassin, la chambre à air de son vélo faisant office de fixation. Un pis-aller qui lui permet, finalement, de découvrir « chaque jour de nouveaux avantages ». nataschabadmann.ch
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Triathlète, 33 ans, SUI Daniela Ryf garde espoir pour le triathlon d’Hawaï en octobre. Elle ne perd pas le sourire en s’entraînant dans sa baignoire.
Daniela Ryf
« UN MOIS SANS NAGER ? IMPOSSIBLE POUR MOI. J’AI DONC CHERCHÉ UNE SOLUTION DÈS LE PREMIER JOUR DE CONFINEMENT. LA CRÉATIVITÉ FAIT UN BIEN FOU. » Daniela Ryf est confinée chez elle à Feld brunnen, dans le canton de Soleure. Toutes les piscines étant fermées, la triathlète effectue donc ses longueurs dans sa bai gnoire. Plus sérieusement, la multiple cham pionne du monde applique les consignes du Conseil fédéral. Elle reste chez elle et s’en traîne à l’intérieur avec la roue abdominale et le tapis roulant. Daniela focalise ses ef forts sur son objectif de la saison, l’Ironman d’Hawaï prévu au mois d’octobre.
L’humour est de mise : Daniela Ryf reste dans le bain.
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Coach en résilience, 47 ans, GER Pris en otage par un groupe terroriste il y a vingt ans, il est aujourd’hui spécialiste des situations de crise.
Marc Wallert
L Comment sa captivité peut vous aider
Otage durant 140 jours : face au défi de sa vie, il découvre en lui des ressources insoupçonnées. Aujourd’hui, il vous aide à s urmonter les crises. Texte PETER PRASCHL
e dimanche de Pâques de l’année 2000, Marc Wallert (27 ans à l’époque) et ses parents se trouvent sur l’île de Sipadan en Malaisie, quand ils sont enlevés, avec 18 autres touristes et employés de leur hôtel, par un groupe de terroristes islamistes. Emmenés au fin fond de la jungle sur une petite île des Philippines, ils y resteront quatre mois et demi, à subir le manque de nourriture, les menaces de mort, les attaques régulières de l’armée philippine, tout ceci dans des conditions sanitaires déplorables. Marc Wallert, qui travaillait avant cet événement tragique comme conseiller et manager pour des entreprises internationales, est aujourd’hui expert et coach en résilience auprès de personnes et d’organisations. Comment a-t-il fait pour surmonter la plus dure épreuve de sa vie ? Réponse en neuf points.
1 Accepter la situation
Lorsque mes parents et moi avons été pris en otages, notre première pensée a été : « Ah, si seulement nous n’avions pas annulé cette plongée de nuit, nous serions certainement libres à l’heure qu’il est. » S’il est normal et compréhensible d’avoir une telle réaction, c’est aussi terriblement contreproductif. Parce que lorsqu’on est pris dans une situation difficile, la première des choses à faire est de l’accepter, et non de lui tourner le dos : c’est comme ça, on ne peut pas revenir en arrière, on ne peut plus changer le passé. Mais ce que l’on peut faire, c’est y faire face et l’affronter du mieux possible. Et parce que cela va nous demander toute notre énergie, autant ne pas la gaspiller.
2 Rester réaliste
Cela veut dire ne pas céder à la panique, sans basculer non plus dans un optimisme irréaliste. Il y a un équilibre à trouver entre trop de stress et pas assez. Si la peur paralyse, il est tout aussi dangereux de se voiler la face, car on risque de s’effondrer si la situation empire. Nos kidnappeurs nous avait dit (au d ébut) que nous serions libérés
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Marc et d’autres otages (en haut à g.), auprès de sa mère malade (en haut à dr.), dans le camp (en bas à g.) et lors de sa libération .
au bout de deux, trois jours… et au final, nous sommes restés prisonniers pendant 140 jours. Il est donc primordial de rester réaliste quant aux risques que l’on court, de se préparer mentalement et physiquement à un très long scénario, d’apprendre à g érer ses sentiments et son alimentation… Sans cela, chaque coup dur supplémentaire peut nous entraîner un peu plus vers le bas.
STEPHANIE WOLFF, REUTERS
3 Imaginer une fin heureuse
Avant de participer à une compétition importante, les sportifs de haut niveau se préparent aussi mentalement, ils font un travail de visualisation : certains se projettent des images dans la tête, par exemple en s’imaginant sur le podium, ou en train de battre leur propre record. Cette technique, je l’ai aussi utilisée en captivité, en visualisant une fin heureuse à ce qui m’arrivait. Je me suis ainsi imaginé après ma libération, assis à la terrasse d’un café au Luxembourg (où je travaillais à l’époque) en train de commander un cappuccino. Cela m’aidait à renforcer mon état émotionnel.
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« Nos ravisseurs on dit vouloir couper nos têtes… J’ai lâché aux autres : “Là, il s’agit de garder la tête sur les épaules !“ »
4 Se retirer dans sa bulle
À trop se laisser ronger par les difficultés, on devient fou. D’où l’importance de savoir aussi déconnecter de temps en temps : en lisant, en méditant, en s’adonnant à une pratique spirituelle. Pendant notre captivité sur l’île, nous avions pris l’habitude de nous raconter, le soir, toutes les choses positives de la journée. Nous imaginions des plats délicieux, nous nous racontions des histoires. Le fait de sortir la tête de mes problèmes me donne ainsi plus de force pour pouvoir les affronter.
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5 Se bouger
C’est justement dans ces situations où l’on est contraint à la passivité et à l’attente qu’il convient de ne pas y céder et de rester actif, tant qu’on peut. Quand nous étions dans la jungle, nous avons construit des toits pour nous protéger de la pluie, nous avons écrit ce qui nous arrivait. Subir entièrement une situation affaiblit encore davantage, alors que rester actif crée une dynamique de renforcement.
6 Aider les autres
7 Garder le sens de l’humour
Lorsque plus rien ne marche, la dernière des armes pour venir à bout d’une situation, c’est de savoir en rire. Certes, l’humour n’apporte aucune solution, mais il permet, au moins pour un instant, de libérer la tension. Lorsque nos ravisseurs nous ont dit qu’ils allaient nous couper la tête, j’ai lâché aux autres : « Là, il s’agit de garder la tête sur les épaules ! » Évidemment, l’humour ne doit pas se faire aux dépens des autres, chacun ayant sa propre sensibilité, surtout en situation de crise.
« Quelles sont les choses que je veux encore faire avant de mourir et celles dont je peux me passer ? »
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Marc Wallert avec les otages libérés (deuxième à gauche) ; retrouvailles avec sa mère, libérée avant lui (en bas).
8 Prendre soin de soi
Faire du sport, se bouger, faire attention à son alimentation et à son hygiène corporelle : toutes ces choses qui sont déjà importantes en temps normal deviennent absolument vitales lorsqu’on est face à soi-même. Pour plusieurs raisons : parce que c’est important pour l’estime de soi, parce que ça nous occupe l’esprit, mais aussi (et surtout) parce que ça nous permet de tenir physiquement face aux difficultés. Si nous n’avions pas accordé un soin méticuleux à notre hygiène corporelle lorsque nous étions prisonniers au fin fond de la jungle, les conséquences auraient pu être fatales, tout simplement.
9 Tirer des leçons
Même si ça peut paraître étrange, il faut voir chaque crise comme une opportunité pour avancer et faire évoluer sa vie. Reprendre exactement la même vie qu’avant, comme un robot, c’est laisser passer cette chance. Au contraire, il est important d’utiliser le temps qui nous est offert pour réfléchir aux questions auxquelles on n’a pas le temps de penser : qui suis-je ? Quelles sont les choses que je veux encore faire avant de mourir, quelles sont celles dont je peux complètement me passer ? De telles situations nous apprennent à mieux apprécier la vie. REUTERS, PICTUREDESK.COM
Surmonter une situation de crise est beaucoup plus facile à plusieurs que lorsqu’on est tout seul, c’est évident. Il est donc essentiel de garder le contact avec les gens, tant qu’on a accès à un téléphone ou à Internet. Pouvoir échanger des conseils ou des expériences, apporter du réconfort, s’aider mutuellement ou tout simplement rire avec quelqu’un de temps en temps : tout ça permet de mieux supporter la situation. Sans oublier le fait que se sentir utile, investi d’une mission, peut être incroyablement salvateur lorsqu’on est contraint à la passivité. Durant ces 140 jours, je me suis surtout occupé de ma mère, qui supportait très mal les conditions de détention. Voir que l’on avait besoin de moi m’a donné encore plus de force pour tenir.
Crises : les surmonter, les utiliser, chez Econ Verlag. En allemand.
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BECAUSE WE CARE... *
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MOTUL FRANCE
DEUX-ROUES
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MOTUL
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Athlète d’endurance, 32 ans, USA Parmi les hommes les plus forts du monde, il détient le record mondial de tractions sur une journée (5 804) réalisées avec un sac à dos de 15 kilos.
Mike McCastle
Et si on se musclait là tout de suite ?
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Flexion de l’avant-bras
Extension du dos
Le matos Drap, cadre de porte Comment faire Faites un nœud au bout du drap, calez-le dans la porte. Prenez le drap au-dessus de votre tête. Mettez-vous sur la pointe des pieds, vos talons touchant le battant de la porte. Maintenant, pliez les deux bras derrière votre tête et étirez-vous. Le dos doit rester droit. Les bénéfices Exerce les triceps, la ceinture scapulaire et la tension corporelle. Répétitions De 15 à 20, en plusieurs séries.
Le matos Serviette, valise avec un poids (de 15 à 25 kg) Comment faire Enfilez une serviette dans la poignée de la valise, attrapez ses extrémités par en-dessous. Le dos droit, levez les deux bras jusqu’à la hauteur de la poitrine et abaissez-les à nouveau complètement. Les bénéfices Renforce la ceinture scapulaire et les bras, façonne les biceps. Répétitions De 15 à 20, par séries. Vous pouvez augmenter le poids de chaque série.
Le matos Fauteuil, oreiller Comment faire Mettez l’oreiller sur le dossier de la chaise. Posez vos hanches sur le bord, appuyez vos pieds contre le mur. Croisez vos bras sur votre poitrine. Penchez-vous lentement vers l’avant jusqu’à ce que le haut du corps soit incliné à 45 °, redressez-vous en serrant les fesses. Respirez lentement ! Ce que cela apporte Renforce le bas du dos. Répétitions Au moins 15, par deux ou trois séries.
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CAMERON BAIRD, GETTY PREMIUM
« QUAND LES CHOSES DEVIENNENT DIFFICILES, JE PENSE À UNE PERSONNE DE QUI JE PRENDS LE FARDEAU. »
Extension du triceps
WERNER JESSNER
Le fitness maison vous botte ? Le costaud McCastle explique comment transformer votre salon ou votre chambre d’hôtel en salle de muscu. Côté mental, il fait chaque exercice au nom d’une personne précise.
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Air Zermatt a été fondée en 1968. À ce jour, ces spécialistes du secours en montagne ont assuré plus de 50 000 sauvetages par hélicoptère.
Air Zermatt
Pour la survie d’une fillette
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Philipp Venetz
Michèle Imhasly
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Dominik Imhof
Stephan Dreesen
Soins, 44 ans, SUI Il est le directeur médical d’Air Zermatt depuis 2020 : « La fillette s’en est sortie pratiquement indemne. »
Paramédical, 28 ans, SUI Le secouriste n’est pas prêt d’oublier l’intervention : « J’en avais des sueurs froides. »
Transport, 40 ans, SUI L’ambulancière de 40 ans, à la tête du centre de formation d’Air Zermatt, a relaté l’intervention dans les détails.
Pilotage, 47 ans, SUI Arrivé illico sur place avec son équipage : « Nous avons tout tenté pour la sauver. »
TERO REPO, PASCAL GERTSCHEN, CHRISTIAN PFAMMATTER
WOLFGANG WIESER
Une intervention hors du commun des Suisses d’Air Zermatt : le sauvetage d’une petite fille après 13 heures de lutte acharnée. Située dans le canton du Valais, en Suisse, cette crevasse rocheuse mesure à peine 20 centimètres de large. Mais en ce jour d’octobre 2017, une fillette de 2 ans y tombe en jouant. Elle en ressortira près de 13 heures plus tard, pratiquement indemne : « Cette expérience nous a tous marqués », dit le directeur médical d’Air Zermatt, Philipp. En effet, pendant ces 13 heures, les secouristes ont tout tenté pour sortir la fillette de cette crevasse de six à sept mètres de profondeur. « Toute idée était bonne à prendre », raconte le pilote, Stephan Dreesen. Michèle Imhasly, secouriste, avait notamment proposé de faire descendre un enfant assuré dans la crevasse pour récupérer la fillette. Cette idée s’est avérée irréalisable de par la forme de la crevasse, de plus en plus étroite. Finalement, les sauveteurs se sont armés de pelles, de pioches et d’une excavatrice pour creuser une issue. Et enfin, des spécialistes ont fendu le dernier rocher qui les séparait de la f illette. À deux heures du matin, elle était transférée en hélicoptère à l’hôpital de Berne.
THE RED BULLETIN
Air Zermatt lors d’une de leurs interventions avec le Cervin en toile de fond.
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Rappeuse et auteure, 28 ans, USA Brittany Dickinson se distingue par son style énergique et son message positif.
PineappleCITI
À quelque chose malheur est bon i mposée. Je compose donc un de mes premiers morceaux pour la chanteuse Kelly Rowland. Je préfère le rap, mais le prends comme un défi. J’écris la chanson, et alors que je l’interprète en studio, Kelly débarque et me lance : “Ça a l’air génial. Tu devrais chanter plus souvent.” Ses paroles modifient ma perspective, et m’incitent à travailler le chant. Mon nouveau single, Recognize, illustre la confiance que Kelly m’a insufflée. À quelque chose malheur est bon. Le provisoire a fini par perdurer et aider ma carrière. »
redbullrecords.com
THOMAS FALCONE/RED BULL RECORDS
FLORIAN OBKIRCHER
« En 2016, je renonce à mon travail d’enseignante pour me consacrer entièrement à la musique, rembobine PinneappleCITI. Je sors mon premier album et mon single devient viral, c’est l’emballement. Un jour, ma voiture percute un arbre. Je me réveille à l’hôpital et je comprends aussitôt que ma vie a basculé : je ne peux plus marcher (pendant deux ans, ndlr), et je suis donc privée de scène. Je suis dévastée. Mon label me propose d’écrire pour d’autres artistes, j’y vois une régression. Mais je finis par me dire que c’est un moyen de canaliser ma créativité durant cette suspension de carrière
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Snowboardeuse (et plus), 39 ans, SUI Cette pro du snow freeride, du base-jump et du wingsuit a dû, avant de réaliser des exploits, apprendre la patience.
Géraldine Fasnacht
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Rappeur, 26 ans, GER Star du rap allemand, il a puisé dans ce son la force de supporter son périple le plus difficile.
Zuna
En attendant Verbier
@DIESERBOBBY, UNIVERSAL MUSIC, SÉBASTIEN BARITUSSIO, GETTY PREMIUM WOLFGANG WIESER, DAVID MAYER, SIMON SCHREYER
Aucune pente n’était trop raide ou trop rapide pour elle. Dès ses quinze ans, Géraldine Fasnacht trépigne, elle n’a qu’une obsession : participer à l’Xtreme de Verbier, la compétition de ski freeride la plus dingue des années 90. Refus des organisateurs : trop jeune ! L’intrépide ado ravale sa déception… et patiente : « Je m’entraînais énormément et participais souvent à des courses, que je remportais, la plupart du temps. » En 2001, six années après le premier refus, un coup de fil : elle est admise à Verbier. Géraldine remporte la compétition. Le début de sa carrière pro dans le freeride.
Un modèle : le rappeur 50 Cent a inspiré sa propre carrière.
« LE RAP DE 50 CENT M’A AIDÉ DANS L’EXIL » Ghassan Ramlawi, aka. Zuna, a 15 ans lorsque lui et sa famille fuient le Liban. Trimballés de pays en pays, de frontière en frontière, ils entament une longue errance qui les fera traverser la Méditerranée, puis la France, la Belgique, la Suisse pour atterrir enfin à Dresde, en Allemagne, où on les autorise à s’installer. Ce qui l’aide à tenir le coup pendant tout ce temps ? « Dès que je pouvais, j’écoutais le rappeur 50 Cent. Qu’un type comme lui, venu de rien, puisse
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connaître un tel succès, ça m’a vraiment donné du courage. J’avais hâte de grandir pour prendre ma vie en main, comme lui. » Peu après son arrivée à Dresde, il rencontre Granit Musa et Ali Rihilati, puis plus tard Yassine Baybah. Les quatre forment aujourd’hui l’un des crew les plus connus du rap allemand : le KMN Gang. Trois morceaux qui ont aidé le jeune Zuna sur la route : 21 Questions – 50 Cent (2003) Hate It or Love It – The Game feat. 50 Cent (2005) Changes – 2pac (2007)
Skieuse, 47 ans, USA Celle qui est aussi skieuse-alpiniste et la capitaine de l’équipe des athlètes North Face est… sujette au vertige.
Hilaree Nelson « Comment je gère mon vertige dans les situations que mon sport impose ? Quand je me déplace sur un versant particulièrement abrupt et que je sens monter en moi la peur du vide, j’ai un truc pour y remédier : ne pas regarder en bas et me concentrer uniquement sur les 150 cm devant moi. Comme si je me mettais des œillères invisibles. » Géraldine Fasnacht s’éclate à Verbier. Suivez-la sur Insta : @geraldinefasnacht THE RED BULLETIN
Hilaree Nelson s’est lancée en 2017 du Peak of Evil dans l’Himalaya indien et en 2018 dans le terrible couloir (un ravin de neige et de glace très encaissé) du Lhotse, 4e sommet du monde avec 8 516 mètres.
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Satellite habitable en orbite terrestre basse, la Station spatiale internationale (ISS) héberge de trois à six humains qui se relaient tous les six mois environ.
L’équipage de l’ISS
-0:45
J’avais un call, avec l’espace... Le chat vidéo est devenu normal. Banal. Dans la conversation en direct à laquelle nous dédions cet article, une seule des deux personnes était sur Terre. Original. Texte TOM GUISE
A
lors que Jessica Meir préparait son vol de retour sur Terre depuis la Station spatiale internationale en avril dernier, elle allait retourner dans un monde différent de celui qu’elle avait quitté le 25 septembre 2019, lorsque sa fusée avait décollé du cosmodrome de Baïkonour au Kazakhstan. Mais en tant qu’astronaute, Meir a une vision du monde différente de celle de la plupart d’entre nous. Il y a même une expression pour cela : overview effect (l’effet de surplomb). Lorsque vous contemplez la Terre pour la première fois depuis l’espace, vous vivez une e xpérience absolument unique car vous la voyez telle qu’elle est vraiment : une petite boule
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de vie fragile, sans frontières nationales ni conflits humains, suspendue dans le vide, protégée par la simple enveloppe de l’atmosphère. C’est dans cette atmosphère que le 10 avril, l’un des habitants de cette planète s’est préparé avec enthousiasme à parler à Jessica Meir. Tahira Mirza, éditrice photo pour The Red Bulletin basée à Londres, est une fan de l’espace depuis qu’elle a vu les images de l’alunissage quand elle était enfant. Ayant organisé une séance photo avec l’ancien astronaute de la NASA, Mike Massimino, il y a quelques années, Mirza pouvait être considérée comme notre correspondante la plus au fait des choses de l’espace. Et elle n’allait pas laisser passer cette occasion. « Peu de gens ont la chance de parler aux astronautes, surtout lorsqu’ils sont à bord de l’ISS. Je me suis sentie si privilégiée et si humble », dit-elle à propos de l’invitation à parler à Meir qu’elle a reçue lors de la conférence de presse finale de l’équipage avant son départ de la station spatiale. Alors que les trois astronautes – Meir, Morgan et Cassidy – se serraient devant l’écran à bord de l’ISS, à 350 km au-dessus de la Terre, Tahira Mirza attendait son tour, regardant le live stream chez elle. « Le voyage a été incroyable, a déclaré Chris Cassidy, arrivé dans la station spatiale la veille. Peu importe le nombre de fois où l’on va dans l’espace à bord d’une fusée, comment s’en lasser ? » THE RED BULLETIN
NASA
Flanquée de Morgan (à gauche) et de Cassidy, Jessica Meir discutait avec The Red Bulletin depuis l’ISS le 10 avril.
76 Andrew Morgan
Ingénieur de vol de la NASA, 44 ans, USA. L’ancien médecin de l’équipe de parachutistes de l’armée américaine est devenu astronaute en 2013. Sa dernière mission à bord de l’ISS a duré neuf mois.
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Jessica Meir
Chris Cassidy
Ingénieure de vol de la NASA, 42 ans, USA. Le 18 octobre 2019, Jessica Meir a effectué la première sortie dans l’espace entièrement féminine avec son homologue américaine Christina Koch.
Ingénieur de vol de la NASA, 50 ans, USA. Ancien membre de l’armée américaine et des Navy SEALs, Cassidy a entrepris sa formation d’astronaute en 2004. Actuellement à bord de l’ISS pour la seconde fois.
Meir (photographiée par sa collègue Christina Koch) lors d’une sortie de maintenance dans l’espace au cours de sa récente expédition. Sous elle, l’océan Pacifique au large de la Nouvelle-Zélande.
« L’une de nos réalités qui peut s’appliquer sur Terre est de penser à l’impact de nos gestes sur les autres. » Andrew Morgan 16 levers et couchers de soleil par jour, 109 m de largeur et 73 m de long : l’ISS orbite autour de la Terre à une altitude maintenue entre 350 et 400 km toutes les 90 minutes, à plus de 27 500 km/h. THE RED BULLETIN
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En mode ISS : Cassidy rêve à travers la coupole de l’ISS (module d’observation) ; Morgan se colle un running, attaché à un tapis roulant à résistance externe ; Meir coupe des feuilles de moutarde pour une étude d’agriculture spatiale.
À
15 h 27 UTC ce jour-là, Mirza reçoit le feu vert du Centre de contrôle des missions de Houston, au Texas. « Tahira, c’est maintenant votre tour. » Mirza : « Bonjour. Merci de répondre à ma question. Comment pouvons-nous [sur Terre] tirer quelque chose de positif des défis que nous appréhendons actuellement ? » Meir : « Pour nous, s’adapter aux changements et aux obstacles imprévus fait partie de notre travail quotidien. C’est l’une des choses auxquelles les astronautes sont préparés. Il y a beaucoup d’aspects terribles à ce qui se passe maintenant [sur Terre], mais j’espère que tout cela aura des résultats positifs. Ce que nous pouvons faire, c’est essayer d’en voir les bons côtés. L’un d’eux est de privilégier les liens avec nos êtres chers. Les gens correspondent davantage qu’avant cette pandémie et contactent
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« Il peut y avoir de bons côtés. Comme entretenir des liens avec nos proches. » Jessica Meir les membres de leur famille plus régulièrement. Faire ressortir un peu plus cette dimension humaine innée, rappeler aux gens ce qui est vraiment important… avec un peu de chance, nous allons y accorder plus d’importance. » Puis l’ISS a poursuivi sa trajectoire. La question de Tahira Mirza avait atteint l’espace et la réponse qu’elle avait reçue encourageait la création de liens. Deux personnes – l’une tournant autour du soleil en 365 jours, l’autre autour de la Terre toutes les 90 minutes, toutes deux isolées pour des raisons différentes – se connectaient par-delà le gouffre de l’espace.
Visionnez dans son entièreté la conférence spatiale sur la chaîne YouTube du site de la NASA ; youtube.com THE RED BULLETIN
NASA
« La vie en isolement est une chose pour laquelle nous avons été formés et tout le monde sur Terre en fait maintenant l’expérience d’une manière nouvelle, développe de son côté Andrew Morgan, qui en était lui à son neuvième mois continu à bord du satellite en orbite. L’une des choses les plus importantes est de vivre selon une routine. Nous avons un programme et nous le suivons à la lettre. Nos exercices, notre hygiène personnelle, notre sommeil… Tout est programmé. Une autre de nos réalités qui s’applique très bien à la situation sur Terre en ce moment est d’être un bon équipier, de penser à l’impact de nos gestes sur les autres. »
HORS DU COMMUN Retrouvez votre prochain numéro le 3 septembre avec et le 10 septembre avec dans une sélection de points de vente et en abonnement. RICARDO NASCIMENTO / RED BULL CONTENT POOL
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Skateur, 31 ans, GER Connu pour ses vidéos, ce natif d’Allemagne de l’Ouest a dû surmonter les conséquences d’une erreur médicale avant de percer.
Un revenant : grâce à son style élégant, Vladik Scholz s’est imposé dans le street, mais il revient de loin.
« Dans mon quotidien je ne voyais que des choses positives. Même marcher avec des béquilles » Maintenir sa tête hors de l’eau quand les kickflip ne sont plus possibles. Vladik raconte sa rude épreuve. 86
« À 23 ans, je subis une rupture du ligament au pied gauche dont on se remet normalement en quelques mois. Mais le médecin omet de constater une lésion du cartilage. L’articulation s’enflamme et ma guérison est remise à on ne sait quand. Mon sponsor me lâche et je dois vivre avec 300 € par mois. Une résistance à la frustration grandit en moi. Je décide de ne voir dans les gestes du quotidien que l’aspect positif. Ainsi, prendre l’escalier avec les béquilles est avant tout un excellent exercice ! Je m’inscris à l’université et lis abondamment. Un an et trois opérations plus tard, je suis sur pieds. Je décroche un partenariat avec Red Bull grâce à des vidéos réalisées avant la blessure. Voyages et vidéos s’enchaînent à nouveau. La vie r eprend son cours. » Instagram : @vladikscholz THE RED BULLETIN
LORENZ HOLDER/RED BULL CONTENT POOL, JONATHAN MEHRING/RED BULL CONTENT POOL
MARC DECKERT
Vladik Scholz
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Développeur de jeux, 55 ans, JPN Il a rejoint Nintendo en 1986, a travaillé sur Super Mario World, Star Fox et Wii Sports. Son jeu le plus célèbre : Animal Crossing.
Katsuya Eguchi
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Plongeur et surfeur, 21 ans, FRA Basé à Moorea, où 2019 fut une année noire pour les coraux, le Polynésien a fondé Coral Gardeners.
Titouan Bernicot
Quand la console… console jeu original en 2001, Eguchi s’est inspiré de sa propre expérience de déménagement. À 21 ans, il s’est d éplacé de près de 500 km pour aller travailler au bureau de Nintendo à Kyoto. « J’avais laissé ma famille et mes amis derrière moi. Il était important de pouvoir parler et jouer avec eux. » Il a donc conçu un jeu qui, plus tard, lorsqu’il fut père, permettait à ses enfants de savoir qu’il leur rendait v isite pendant leur dodo : « Mes enfants pouvaient y jouer après l’école, et moi je m’y adonnais quand je rentrais à la maison, le soir. C’était une façon de participer à leurs activités, même en étant absent. » Très personnelle, sa création a, depuis, t ouché des millions de personnes.
animal-crossing.com
NINTENDO, BEN ONO
TOM GUISE, PATRICIA OUDIT
Nous sommes le 27 mars, un vent de panique souffle sur la planète gaming : la Nintendo Switch n’est plus disponible. Une semaine plus tôt, le nouveau jeu d’Animal Crossing pour Switch, New Horizons, arrivait sur le marché, lancé en même temps qu’une édition limitée de la console. La popularité du jeu, exacerbée par des adeptes cherchant à se distraire pendant le confinement, s’est également manifestée à un niveau plus profond. Votre personnage vit sur une île où il peut cueillir des fruits, pêcher, d écorer sa maison et, surtout, découvrir les îles des autres joueurs, dont les fuseaux horaires et les saisons correspondent à leur emplacement réel. Une consolation pour ceux qui ne peuvent plus rendre visite à leurs amis ou aux membres de leur famille. Pour sortir son
Captures d’écran d’Animal Crossing: New Horizons : « Il y est question de la famille et d’amitié », dit Eguchi. THE RED BULLETIN
Régénérer les récifs coralliens, c’est continuer à respirer.
L’espoir est permis 40 % des coraux sont morts, mais Titouan Bernicot se bat pour sauver les 60 % restants, et envisager leur régénération. C’est essentiel. « Une bouffée d’oxygène sur deux que vous prenez vient des océans, et leurs poumons sont les coraux, explique le surfeur et plongeur. Pour continuer à respirer, il nous est impératif de les préserver. La mission première de mon projet Coral Gardeners est d’y sensibiliser le grand public via des actions dans les écoles et des campagnes en ligne. Nous avons donc mis au point un programme original en proposant aux gens, où qu’ils soient, d’adopter un corail. J’ai planté mon premier spécimen à 16 ans : en quelques mois, il avait triplé de volume, et fourmillait de crabes ! Si l’on y parvient à grande échelle, nos lagons renaîtront. Retrouver les récifs coralliens d’antan peu sembler utopique, et pour certains, le corail actuel est foutu… Moi, j’ai envie d’imaginer des alternatives ! Il existe des coraux super résistants, comme ceux de la mer Rouge, capables de supporter une chaleur extrême. Les coraux profonds sont aussi une source d’optimisme : les scientifiques cherchent à savoir s’ils peuvent se reproduire, et éventuellement produire des larves capables de ré-ensemencer des récifs de surface, plus fragiles face au réchauffement. Si le monde de demain r éduit drastiquement son empreinte carbone, l’espoir est donc permis. » coralgardeners.org 87
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Partisan de l’auto-subsistance, 62 ans, USA Depuis 1987, Vail vit de la terre, tout seul, dans un coin de l’Alaska : le plus grand parc naturel des États-Unis.
Mark Vail
Depuis 33 ans, il vit seul dans une cabane qu’il a construite sur un terrain de 4 hectares dans la brousse de l’Alaska, en bordure du parc national Wrangell-Saint-Élie. Vail vit à presque 500 km du prochain grand supermarché et a adopté un mode de vie qui lui permet d’assurer la quasi-totalité de sa subsistance – l’année dernière il n’est allé en ville que deux fois, à pied, pour se procurer certaines denrées comme du café. En été, lorsque McCarthy – une ancienne ville minière devenue un spot touristique – passe de 33 habitants à 150, Vail rencontre des humains une fois par semaine. Lorsque l’hiver revient, il est heureux de se retrouver seul. Ses conseils pour une belle vie en solo.
Se rapprocher de la nature
« Depuis huit ans, le même pic vient me rendre visite tous les jours. J’ai aussi appris que le meilleur 88
Créer votre propre routine
« Mon emploi du temps varie selon les saisons, mais c’est toujours moi qui le détermine. En ce moment, je me lève avec le jour, prends un café, vais sur Internet, puis je sors chercher de l’eau et ramasser du bois. Ensuite je fais du sport – avec mon fatbike, mes skis ou en partant en rando. »
Manger est déjà valorisant en soi
« Je mange ce que j’ai cultivé, cueilli et stocké moimême. Je mange du saumon pêché dans la rivière Copper, et lorsque je le mets en bouche, je ne fais plus qu’un avec l’endroit où je vis. J’éprouve un sentiment de réussite à défier l’économie. »
Rester (partiellement) connecté
« J’ai Internet, et je déteste ça – c’est l’une des pires choses qui soient survenues dans ma vie. J’y passe bien trop de temps, et c’est pour l’essentiel du temps perdu. Mais cela m’a aussi permis de rester connecté à distance avec des gens. Et à présent, les commandes par correspondance sont super simples à effectuer. »
THE RED BULLETIN
TRACY ROSS
Habitant de la nature sauvage de l’Alaska depuis des lustres, Mark Vail a fait de l’isolement social un mode de vie assumé.
NATHANIEL WILDER
Vail… que Vail
moment pour observer les loups qui redescendent des montagnes était lorsque les grenouilles se mettent à croasser en avril. »
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Pilote de VTT, 36 ans, AUT Multiple champion du monde de trial au style engagé, il a fait du mal à plus d’un vélo, tout en sachant vite les réparer.
CHAMBRE À AIR
Extraction à l’aide de cuillères Changer le boyau exige de batailler avec un pneu récalcitrant. Voici comment y parvenir sans peine.
Tom Öhler
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Réparer son vélo comme un chef
Couchez la roue à terre. Insérez deux cuillères à soupe, entre la jante et le pneu, à une largeur de main de distance de l’une de l’autre.
Oui, c’est possible. Chaîne rouillée, roues voilées ou crevées… Ses astuces permettent de réparer son vélo dans sa cuisine, avec des ustensiles qui se transforment en outils LA CHAÎNE
La bougie élimine la rouille La paraffine est efficace contre le grincement de la chaîne et lubrifie les engrenages.
2 Appuyez sur les deux cuillères simultanément pour extraire le pneu de la jante. En cas d’échec, augmentez la distance entre les cuillères.
3 Redressez la roue et tirez le pneu vers le bas. Vous pouvez à présent retirer le boyau défectueux.
DÉVOILER UNE ROUE
1 Nettoyez la chaîne avec un chiffon pour éliminer saleté et huile.
À l’aide d’un couteau à beurre Le centrage d’une roue voilée s’avère moins fastidieux qu’on pourrait l’imaginer.
1 Retirez le pneu et le fond de jante. (La tâche ne nécessite pas d’outil normalement.)
ARMIN WALCHER/RED BULL CONTENT POOL
WERNER JESSNER
SASCHA BIERL
2 La roue arrière doit être démontée. Pour ce faire, retournez le vélo et rabattez les attaches rapides vers l’arrière.
2 Coincez un stylo sur le cadre avec la pointe alignée sur le bord de la jante. Puis faites tourner celle-ci, pour repérer les parties à recentrer.
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Augmentez la tension des rayons dans les zones non marquées en serrant les vis avec le couteau.
Les bougies sont à base de paraffine, composant de nombreux lubrifiants. Faites défiler plusieurs fois la chaîne dans un récipient contenant la cire préalablement fondue dans une casserole.
4 Remettez la roue en place et supprimez l’excès de cire à l’aide d’un chiffon. Le tour est joué !
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« EN CAS DE NÉCESSITÉ, VOTRE CUISINE VOUS FOURNIT TOUT CE DONT VOUS AVEZ BESOIN POUR REDEVENIR MOBILE. » 89
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Légende du ski alpin, 31 ans, AUT 8 victoires en Coupe du monde, 2 fois l’or aux JO et 7 titres de champion du monde… et jeune retraité.
Épuisante pour qui ? En première ligne, pour les gens qui bossent avec moi. Les prestataires, artisans ou ouvriers auxquels je peux faire appel. En les côtoyant, j’ai vite remarqué que ce ne sont pas eux qui sont bizarres, comme je pouvais le penser, c’est moi. Ils ont un rythme de travail qu’ils vont devoir tenir durant toute leur carrière, alors que je n’ai eu à tenir le mien qu’une dizaine d’années maximum. Personne ne supporte une vie professionnelle à un tel rythme. J’ai dû comprendre que ça ne me servait plus à rien, dans ce nouveau quotidien, de réfléchir en sportif pro. Sauf si l’on veut à tout prix être le meilleur dans n’importe quel domaine.
Marcel Hirscher
« Réfléchir en sportif pro ne me sert plus à rien » Déjà un an de retraite pour celui dont le nom aura marqué à jamais l’histoire du ski alpin : comment Marcel Hirscher a dû apprivoiser sa nouvelle vie. Entretien DANIEL WINKLER Photos FELIX KRÜGER
the red bulletin : Par les temps qui courent (l’interview a eu lieu en avril 2020, ndlr), on va commencer sans originalité avec une question que l’on vous posait tout le temps quand vous étiez un sportif professionel et que vous détestiez : comment allez-vous ? marcel hirscher : Bien, aucun problème de santé à signaler, donc tout va bien. On vit une époque où les gens aiment tout planifier et organiser. Êtes-vous aussi un adepte des to-do-lists ? Plus vraiment. Mais avant, oui, j’étais une to-do-list à moi tout
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seul, il était inévitable d’être hyper méthodique si je voulais arriver au résultat souhaité. Aujourd’hui, je suis tellement content de ne plus être dans ce schéma-là. Pendant dix ans, ça a très bien fonctionné, mais maintenant, je ne suis plus obligé de le faire. Au contraire, il s’agit pour moi d’en faire moins. Et ça marche ? Au début, c’était horrible, extrêmement difficile, parce qu’on croit, en tant que sportif de haut niveau, que chaque jour doit être mis à profit à 100 % : c’est une approche qui n’a plus aucun sens maintenant, car elle peut être épuisante à la longue.
Depuis que vous avez pris votre retraite sportive en 2019, vous souhaitez donc vous détacher du « système Hirscher » dans votre vie de tous les jours ? Oui, je suis en plein dans cette phase, voire uniquement au tout début. Toutes les habitudes que j’ai acquises dans ma vie passée, il va me falloir du temps pour les déconstruire. C’est un autre type d’entraînement, sauf que là, je ne suis pas pressé. Il est midi, j’ai bossé dans mon jardin depuis sept heures et demie, et je remarque que c’est une magnifique journée. Alors pourquoi terminer aujourd’hui ce que j’ai commencé ? Avant, il ne fallait jamais remettre au lendemain ce que je pouvais faire le jour-même : allez, je me fais encore deux descentes, on ne sait jamais. Et puis on va essayer ces chaussures aujourd’hui, on ne sait jamais. Ce qui marchait pour le sport n’est pas tenable au quotidien. Mais ça, je dois encore apprendre à le faire. Votre vie de sportif vous a aussi infligé de sacrées leçons, comme lors de votre fracture à la cheville en août 2017. À l’époque, vous disiez que ça vous permettait de souffler un peu. Cette blessure a été une véritable aubaine. Enfin une pause – si douloureuse, pénible et amère fut-elle d’un point de vue purement sportif. Évidemment, la rééducation n’a
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pas été une partie de plaisir, mais au bout du compte, j’ai vécu cette période comme un cadeau, car elle m’a permis de me maintenir encore deux années à ce niveau. Sans ça, j’aurais dû arrêter plus tôt. Cette période spéciale de votre carrière ressemble plus à un nouveau départ revigorant qu’à une véritable pause. Pendant six semaines, j’ai enfin pu lâcher la pression. Ça ne veut pas dire que je n’ai plus rien fait, mais l’intensité a changé, je n’aurais pas pu continuer à ce rythme. Et puis, au bout d’un moment, l’horloge interne reprend : tic-tac, tic-tac… Aucune patience ! Avoir six globes en poche, c’est un bonheur, mais aussi une malédiction : à chaque nouvelle victoire, la pression augmente, on se dit que l’année suivante sera encore plus difficile. Même si je savais que je pouvais le faire, ça commençait à devenir de plus en plus lourd. Avec cette fracture de la cheville, la pression a disparu d’un coup. Jusqu’à ce que mon horloge interne recommence et que les JO se pointent à l’horizon. Durant votre carrière, est-ce que vous perceviez cette admiration que les gens vous portent toujours aujourd’hui, quels que soient vos résultats ? Chaque victoire ne dure qu’une journée et je me disais toujours que je pouvais faire mieux. Alors, je n’avais aucunement conscience de ce rapport qu’avaient les gens
« Chaque jour doit servir à évoluer. Stagner, c’est ennuyant. » THE RED BULLETIN
avec moi. Je m’en rends compte maintenant, mieux que jamais. Ce n’est pas que l’estime des gens à mon égard ait changé, mais j’y prête maintenant plus attention et surtout je l’accepte enfin, ce qui n’était pas évident avant. Faut-il vraiment se jeter à fond, voire à l’extrême, dans ses projets pour réussir ? C’est en tout cas comme ça que je le vivais. Mieux valait être premier pendant deux ou trois ans que de rester dans la moyenne. Lors de ma troisième ou quatrième Coupe du monde, sur les 21 jours qui ont précédé la finale, j’en ai passé 18 sur la piste, les trois autres sur la route. Et tant pis si je devais m’écrouler complètement le lendemain de la finale. Vous avez donc décidé de raccrocher en 2019. Ressentez-vous encore le choc du passage à la retraite ? (Il rit.) Je comprends le désarroi de ces retraités qui se retrouvent tout à coup dans un quotidien flou et presque vide. Mais une fois qu’on y remédie, ça devient un pur bonheur. Je suis ravi d’avoir découvert le ski de randonnée, l’hiver dernier. Je prépare tout mon matos pour le lendemain, et au moment de partir en montagne, je suis super excité. Ce que je préfère dans le ski de rando, c’est que tu peux vraiment aller où tu veux, davantage qu’en été. J’ai eu un vrai déclic quand j’ai senti que j’avais une passion, une fascination pour ce sport. Ça sonne comme un retour à l’enfance, que vous avez passée dans un refuge alpin dans les montagnes autrichiennes, juché à 1 500 mètres d’altitude... C’est la sérénité de mon enfance, le silence, que j’aime retrouver grâce à ça. Pouvoir profiter de la nature est un véritable privilège. Un jour où je traversais une période particulièrement stressante, j’ai calculé que j’avais donné plus d’une centaine de coups de fil en une seule journée. La plupart concernaient des détails, des questions logistiques du genre qui amène quoi, qui s’occupe de quoi… Aujourd’hui, il y a des jours où mon portable ne sonne pas et je mesure la chance que c’est. Au début, ça te manque peut-être, mais
« En une journée, j’avais donné plus d’une centaine de coups de fil. » très vite, tu te mets à aimer ça. Ce fut le changement le plus significatif dans ma première année de retraite. En devenant papa en octobre 2018, vous avez accueilli un mini- prof dans votre vie. Que vous enseigne votre fils ? La patience, ce qui, quand on a des enfants, devient le projet de toute une vie. J’avais dit après sa naissance que l’aventure commençait pour moi, et c’est vrai. Avant, c’était sympa, mais c’est maintenant que les choses sérieuses commencent, celles qui comptent ! Et qu’est-ce qui compte ? De comprendre que chaque jour doit servir à évoluer. Stagner, c’est ennuyant. Qu’espérez-vous aujourd’hui ? J’espère que les gens sauront tirer de la situation actuelle les leçons nécessaires pour faire enfin bouger les lignes. Que diriez-vous au Marcel Hirscher d’avant la retraite, celui qui vivait tout à fond, si vous le rencontriez aujourd’hui ? (Il réfléchit longuement.) Qu’est-ce qu’on veut ? Le succès tout de suite, ou peut-on se satisfaire de quelques globes de cristal en moins ? J’ai souvent senti que j’avais besoin de faire des pauses, mais si je m’étais écouté, aurais-je fini ma carrière avec huit globes chez moi ?
Instagram : @marcel__hirscher
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Skipper, 40 ans, AUS Il rêvait de gagner la Coupe de l’America depuis qu’il avait quatre ans. À 30 ans, il fut le plus jeune skipper à obtenir ce trophée.
Jimmy Spithill
Seule la victoire compte pour ce double vainqueur de la Coupe de l’America. Mais c’est bien la difficulté et l’échec qui l’ont élevé. « Pour moi, la Coupe de l’America a été le terrain d’entraînement le plus dur mais aussi le plus honnête. Il n’y a pas de seconde place, vous êtes premier ou rien. Même frôler la victoire est un échec. Le sport est épanouissant et gratifiant de nombreuses manières. On y apprend comment se relever après une défaite. Cette pression pousse la technologie, le design et la construction à leurs limites extrêmes, jusqu’au point de rupture. Le fait est que si vous n’avez pas quelques avaries en chemin, c’est que vous ne repoussez probablement pas assez vos limites. 92
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BRETT HEMMINGS/RED BULL CONTENT POOL, LUNA ROSSA/CARLO BORLENGHI
« Lorsque les temps sont durs, on voit ce qui nous anime »
Dans ces conditions extrêmes, ce n’est pas en gagnant que l’on apprend à se connaître mutuellement ; c’est lorsque les temps sont durs que l’on voit ce qui nous anime. Qui est capable d’être sincère ? Et d’apprendre ? Et surtout, de ressortir plus fort de cette situation. C’est là que naissent les meneurs : ils saisissent cette occasion d’apprendre, et de devenir de meilleures personnes. Un meilleur co-équipier. J’ai vécu cela lors de chaque compétition, l’épisode le plus célèbre étant probablement celui de la Coupe de l’America dans la baie de San Francisco (en 2013, lorsque l’équipe de Spithill, Oracle Team USA, pénalisée avant même le début de la compétition, a fait un comeback extraordinaire en enchaînant huit régates victorieuses, ndlr). Aussi lors de la Coupe de l’America qui se déroule actuellement, lorsque des erreurs techniques ont provoqué le démâtage du bateau par mon équipe, Luna Rossa, dans les deux cas, nos erreurs ne nous ont ni affaiblis, ni coûté la victoire ; elles nous ont rapprochés et forcés à progresser. Aujourd’hui, la planète entière a un gros défi à relever. Nous pouvons profiter de ce que nous a appris le sport pour être francs, honnêtes et en ressortir plus forts et plus intelligents pour le futur. » lunarossachallenge.com
RUTH MORGAN
Le grand monocoque volant AC75 de Luna Rossa, l’équipe de Spithill, a démâté dans les eaux agitées au large de Marina di Capitana, en Sardaigne, pendant l’entraînement pour les AC World Series de Cagliari. Le mât ne s’est pas brisé et aucun équipier n’a été blessé.
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Chanteuse, 27 ans, GBR Découverte avec ses titres sur MySpace en 2008, la star née à Cambridge a écrit, chanté et produit des succès mondiaux.
Charli XCX
Le 6 avril dernier, Charli XCX annonçait à mille fans via Zoom qu’elle reportait son album pour en créer un nouveau « de zéro, en utilisant des choses chez moi, des gens que je peux joindre en ligne ». Et avec des commentaires de ses fans à propos des paroles et des productions, jusqu’à la pochette de l’album : How I’m Feeling Now, paru le 15 mai. twitter.com/charli_xcx
MARCUS COOPER/WARNER MUSIC, RDB/BLICKSPORT/BENJAMIN SOLAND
WOLFGANG WIESER, TOM GUISE
« JE CONÇOIS CET ALBUM AVEC LES OUTILS QUE J’AI À PORTÉE DE MAIN, EN PHASE AVEC LA PÉRIODE QUE NOUS TRAVERSONS. ÇA PEUT DECHIRER. »
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Escrimeur, 32 ans, SUI Lors des championnats du monde 2018, ce spécialiste de l’épée, dans le top 10 depuis 2009, a remporté l’or avec l’équipe suisse.
Max Heinzer
Face au mur : Max Heinzer s’entraîne chez lui.
L’adversaire sympa qui vous attend à la maison Chaque fois que Max Heinzer commence son entraînement privé dans sa maison de Küssnacht, son partenaire l’attend déjà depuis longtemps. Pour une raison simple : il est toujours prêt. L’adversaire du champion suisse est en effet un bras articulé fixé au mur, avec une épée. « Je me le suis fabriqué en 2011, après une blessure, pour pouvoir continuer à m’entraîner directement chez moi. » Avec une ossature en acier chromé et une coque faite en matériaux d’isolation, de mousse et de film plastique, l’engin est fixé sur une armature de douche, ce qui permet de régler la hauteur. Dans les circonstances actuelles, une chose est sûre, Max Heinzer est ravi d’avoir ce compagnon chez lui, toujours prêt à croiser le fer : « Il est mon plus féroce adversaire. »
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Biohacker, 46 ans, GER Cet homme sait comment « hacker » son organisme pour améliorer sa santé et ses performances.
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Tenir un journal personnel le soir
Ce truc marche à tous les coups, car il nous oblige à « pré-digérer » les expériences et émotions de la journée, permettant au cerveau de mieux tirer profit des phases de sommeil profond.
Couper le wifi la nuit !
Le sommeil est vital pour notre système immunitaire, lutter contre le stress, nous régénérer et intégrer les informations reçues dans la journée. Mais pour un vrai sommeil réparateur, trois choses essentielles : obscurité totale, température fraîche et, surtout, n’oubliez pas d’éteindre le wifi, nom de nom ! La pollution des ondes est un véritable facteur de stress.
Le matin : pas de téléphone
Les premières trente minutes de ma journée sont sans écran. Ni téléphone, ni PC, ni radio, rien que la lumière, l’air, la fraîcheur du petit matin, un grand verre d’eau filtrée, regarder le ciel, sentir les éléments. En laissant votre cerveau reptilien faire une bonne grasse matinée, vous abaissez votre niveau de stress pour toute la journée.
La câlinothérapie
Les situations difficiles peuvent faire reculer notre cerveau de 500 millions d’années, selon ce biohacker allemand réputé. Ses astuces quotidiennes peuvent le maintenir au présent. « C’est dingue : le stress a pour conséquence de nous replonger 500 millions d’années en arrière, tout au fond de la partie la plus primitive – sur l’échelle de l’évolution – de notre cerveau : le cerveau reptilien. C’est cette zone qui gère toutes les fonctions nécessaires à la seule survie, la respiration, le cœur, la digestion, la faim, la reproduction… et la peur – court-circuitant automatiquement la créativité et la réflexion. Bien sûr, c’est parfois très utile, mais en ces temps particulièrement anxiogènes, il est important de ne pas laisser le petit crocodile dicter ses lois dans notre tête afin de conserver une bonne qualité de vie : un sommeil réparateur, un système immunitaire au top et une bonne humeur à toute épreuve. Pour cela, il suffit d’aller bio hacker son jardin intérieur. Mode d’emploi. » 94
Méditation et lumière rouge
Pour remettre de l’ordre dans mes idées, je n’ai pas trouvé mieux que la méditation quotidienne. Chaque jour, je médite face à un appareil diffusant de la lumière rouge, ça booste le renouvellement cellulaire et l’énergie. J’utilise un matos sophistiqué trouvé sur theflexbeam.com, mais une simple lampe infrarouge fait l’affaire.
De l’eau filtrée et enrichie, toujours
30 dl pour 10 kg de masse corporelle, voilà la quantité d’eau (évidemment filtrée) qu’il faut boire tous les jours. Le matin, l’eau que je bois est enrichie en oxygène, ce qui aide à inhiber les inflammations internes. Mon générateur d’oxygène est un Aquacentrum, une marque allemande.
Sortir prendre l’air
Cela peut paraître une banalité, mais l’air frais et la lumière naturelle valent toujours mieux que l’air confiné sous lumière artificielle.
Respirer par le nez
La bouche est faite pour parler, manger et embrasser. Pour la respiration, il y a le nez. Respirer par le nez, c’est essentiel. Faites-y attention. Instagram : @breitfeld_biohacking THE RED BULLETIN
STEFAN WAGNER
Comment se passer du stress
ANDREAS BREITFELD
Rouge de bonheur : Breitfeld se laisse irradier tous les jours.
Autre possibilité pour commencer une belle journée sans stress : prendre un bain d’ocytocine en faisant le plein de câlins. L’ocytocine est cette hormone dite « de l’attachement » qui agit comme un inhibiteur de stress. Personne à serrer dans vos bras ? Peut-être avez-vous un chat ? Sinon, une Echobell, ce dispositif qui émet des sons et des vibrations, marche vraiment bien.
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Équipe de football, GER Quel est le secret de leurs romontadas ? L’énergie que ce groupe puise dans les émotions, comme lors de son match à Dortmund.
RB Leipzig
89 Péter Gulácsi
30 ans, HUN, gardien
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Impossibles à stopper « Cette saison, nous avons été menés sérieusement au score à Dortmund et à Mönchengladbach, des situations mal engagées que nous avons su renverser. Bien sûr, être menés à la pause met un coup au moral, mais dans ces moments, l’émotion peut faire la différence. Comme celle que peut susciter un discours enflammé de notre entraîneur. Grâce à lui, nous abordons la seconde période avec une énergie renouvelée. Les cadres comme Marcel Sabitzer ou Konrad Laimer sont alors particulièrement sollicités. Leurs petites actions, gestes ou duels remportés signalent la r évolte de l’équipe, preuve que l’équipe vit toujours. Et une fois que nous inscrivons le premier but, nous devenons impossibles à stopper. Nous sommes re venus contre ces deux équipes grâce à cette dynamique. »
Nordi Mukiele
22 ans, FRA, arrière droit
93 Dayot Upamecano 21 ans, FRA, arrière central
95 Diego Demme
28 ans, GER, milieu relayeur
97 Timo Werner
24 ans, GER, attaquant
90 Marcel Halstenberg 28 ans, GER, arrière gauche
92 Lukas Klostermann 23 ans, GER, latéral droit
94 Marcel Sabitzer
26 ans, AUT, milieu offensif
96 Konrad Laimer
22 ans, AUT, milieu relayeur
98 Yussuf Poulsen
25 ans, DEN, attaquant
99 Emil Forsberg
28 ans, SWE, attaquant
IMAGO IMAGES, RB LEIPZIG (11)
JOHANNES MITTERER
Duels décisifs : l’attaquant du RB Leipzig Yussuf Poulsen saute plus haut que Dan-Axel Zagadou de Dortmund.
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MENTIONS LÉGALES Rédacteur en chef Alexander Macheck Rédacteur en chef adjoints Andreas Rottenschlager Directeur créatif Erik Turek Directeurs artistiques Kasimir Reimann (DC adjoint), Miles English, Tara Thompson
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« Nous avons tous la responsabilité de préserver la Création dont nous avons hérité, estime l’auteur de cette photographie qui met en scène l’apnéiste renommé Guillaume Néry, évoluant auprès de cachalots dans les eaux de l’île Maurice. Ce n’est pas notre propriété, nous devrons la transmettre aux futures générations. En tant que personne et photographe, j’essaie modestement de rendre compte de la beauté de la planète, pour encourager le monde à la protéger. Prenez soin de vous et de la planète. »
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