The Red Bulletin Octobre 2013 – FR

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Un magazine hors du commun

octobre 2013

McConkey

Clem Bonzom le kite à fleur

Let the Shane shine

La fille venue du froid Elliphant

décomplexe la swedish pop

magazine sponsorisÉ

d’eau



le monde de Red Bull

Octobre 70

fusées faites maison

Ils sont danois, rêveurs et téméraires. Peter Madsen et Kristian von Bengtson veulent aller dans l’espace.

Photo de Une : miko lim. Photos : thomas pedersen, Miko lim

superficiels

Octobre, déjà ! à la rédaction, sur le quivive, de The Red Bulletin, on sent comme un vent de fraîcheur, sorte de retour aux sources à la Manon. Dans un monde sous perfusion de superficialité, voici, au fil de ces pages, une preuve supplémentaire qu’il est encore temps d’y croire. Allez, on se met au vert, on déroule tranquille, on emboîte le pas de S ­ asha, on swingue avec M ­ atteo, on vibre avec Elliphant et on adopte les tricks de Clem. Le ski-base-jumper Shane McConkey était un génie. L’interview que nous a accordée son épouse Sherry est, elle, une leçon de vie.

« La musique est devenue un besoin après mon voyage en Inde »  Elliphant

Bonne lecture ! Votre Rédaction the red bulletin

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le monde de Red Bull

Octobre d’un coup d’Ailes Bullevard 17 20 21 22 26 28 30 32

78 homme-oiseau

Shane McConkey a donné sa vie à son sport, le base-jump. Un film lui rend hommage pendant que son épouse se confie dans ces pages.

énergisant monde  L’art en folie énergisant France  L’expo du mois Mon corps & moi  Danny MacAskill Hier & aujourd’hui  Mazda dans la tête de...  Chris Hemsworth Sujet  Costa, l’artiste le bon numéro  Coûteux navets formule magique  Surfeur né

reportages 34 Le feu sur la glace Elliphant, un top of the pop.

40 Jordan le ton

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42 Bonzom enfin !

à 30 ans, c’est la reine du kite.

46 Ruhter et son camion Au cœur du parc Yosemite.

42 MacAskill enlève le haut

Quand on pense VTT et mise en scène, Danny MacAskill arrive sur le devant de la rampe. Ici, il joue à corps perdu.

Clem fille d’éole

Clémentine Bonzom est l’atout charme du kitesurf hexagonal. La Montpelliéraine se dévoile ce mois-ci.

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50 Skate toujours Un skatepark unique !

56 Bombes à eau

Ces cigarettes-là ont un prix.

64 D iGiulian vole

Sasha n’est heureuse qu’à la verticale.

70 2 hommes et 5 aéronefs

L’épopée de Copenhagen Suborbitals.

78 McConkey, le film

L’interview-confession de Sherry.

Action !

94 Auckland, la renaissance

Longtemps, la capitale de la Nouvelle-­ Zélande a souffert d’un relatif anonymat. Le cœur d’Auckland bat à nouveau. 4

Digiulian fait le mur

The Red Bulletin a rencontré la nouvelle égérie de l’escalade. Sasha DiGiulian a tout d’une grande. à 20 ans.

90 91 92 93 94 95 96 98

Matos  Surfeur né (bis) Clubbing  Maximus voyages  Laponie Conseils pros  Matteo Manassero ma ville  Auckland Musique  Jack Johnson Focus Dates à retenir dans le rétro  Chicken wings

the red bulletin

Photos : Nathan Gallagher/Red Bull Content Pool, Mathias Fennetaux, Keith Ladzinsky, getty images, adidas

Eddie envoie à la batterie.



contributions Le quatuor du mois THE RED BULLETIN France, ISSN 2225-4722 Publication & édition Red Bull Media House GmbH Directeur de la publication Wolfgang Winter Directeur d’édition Franz Renkin Directeur de la rédaction Robert Sperl

caroline ryder

keith ladzinski C’est un des meilleurs spécialistes de la photo d’aventure. En 2013, il est le lauréat du Maggie Award, distinction récompensant son ­cliché de l’ascension d’une paroi glacée dans le Colorado. Dans ce numéro, le photographe anglais accompagne Sasha DiGiulian dans son expédition sud-africaine. ­Ladzinski dévoile l’émotion de plusieurs « premières » tentées par la jeune américaine sur ces falaises ocres d’une rare beauté. Hard Roc décrypte DiGiulian en page 64.

L’écrivain ­britannique se sent comme un poisson dans l’eau dans les milieux de la mode et de la musique. Elle s’exprime aussi bien dans les colonnes de Village Voice que dans celles de Cosmo. ­Caroline Ryder a le profil idéal pour croiser la route d’Elliphant. La top suédoise, aujourd’hui reine des platines, ne laisse personne indifférent. Sincère, naïve, directe, elle détonne. « C’est la star la plus dévergondée que vous ayez jamais vue », témoigne Ryder. Candy Girl en page 34.

Cet accro du volant de 39 ans s’envole pour DubaÏ en 1997. Il y vit toujours. Aujourd’hui, Ebdon est marié à une compatriote anglaise tout aussi dingue de conduite. « Nous avons une petite fille de 13 mois. J’espère qu’elle deviendra un jour la première femme championne du monde de F1. » Ebdon collabore avec des publications comme Time Out, Intersection, Evo, Esquire et Ferrari Magazine. « L’univers des bateaux de course est le parent pauvre de la F1. » Dompteurs d’écume en page 56.

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Directeurs artistiques Erik Turek & Kasimir Reimann Rédacteur en chef photos Fritz Schuster Responsable de la production Marion Wildmann Rédaction Christophe Couvrat (Rédacteur en chef France), Étienne Bonamy, Ulrich Corazza, Werner Jessner, Florian Obkircher, Arek Piatek, Ioris Queyroi, ­Andreas ­Rottenschlager, Stefan Wagner, Daniel Kudernatsch (Tablette), Christoph Rietner (Tablette) Traductions & relecture Susanne Fortas, Frédéric ­Pelatan, Christine Vitel, Gwendolyn de Vries Maquette Miles English (Directeur), Martina de Carvalho-Hutter, Silvia Druml, Kevin Goll, Carita Najewitz, Esther Straganz Booking photos Susie Forman (Directrice création photos) Ellen Haas, Eva Kerschbaum, Catherine Shaw, Rudi Übelhör Reprographie Clemens Ragotzky (Directeur), Karsten Lehmann, Josef Mühlbacher Fabrication Michael Bergmeister Production Wolfgang Stecher (Directeur), Walter O. Sádaba, Christian Graf-Simpson (Tablette) Impression Prinovis Ltd. & Co. KG, 90471 Nuremberg Service financier Siegmar Hofstetter, Simone Mihalits Marketing & management international Stefan Ebner (Directeur), Stefan Hötschl, Elisabeth Salcher, Lukas Scharmbacher, Sara Varming Marketing & concept graphique Julia Schweikhardt, Peter Knethl Ventes & abonnements Klaus Pleninger, Peter Schiffer

Philipp Schuster noel ebdon

Directeur adjoint de la rédaction Alexander Macheck

Pour cet Autrichien, la quête du skatepark idéal est permanente. En 2006, Schuster est champion d’Europe de skateboard. à 21 ans. Photographe et éditeur du magazine Trottoir, il est une référence dans le milieu. Armé de ses potes et d’une belle brochette d’outils, Schuster ­transforme le sous-sol de votre demeure en une aire de jeu surprise. C’est le cas d’une honnête maison de ville à Vienne, en Autriche. Cave Men en page 50.

« Elliphant est la star la plus dévergondée que vous ayez jamais vue » caroline ryder

Publicité Cathy Martin 07 61 87 31 15 cathy.martin@fr.redbulletin.com Emplacements publicitaires Sabrina Schneider Assistantes de rédaction Manuela Gesslbauer, Kristina Krizmanic, Anna Schober IT Michael Thaler Siège social Red Bull Media House GmbH, Oberst-Lepperdinger-Straße 11–15, 5071 Wals, FN 297115i, Landesgericht Salzburg, ATU63611700 Siège de la rédaction France 12 rue du Mail, 75002 Paris, Téléphone 01 40 13 57 00 Contact redaktion@at.redbulletin.com Web www.redbulletin.com Parution The Red Bulletin est publié simultanément dans les pays ­suivants : Afrique du Sud, Allemagne, Autriche, Brésil, États-Unis, France, Grande-Bretagne, Irlande, Koweit, Mexique, ­Nouvelle-Zélande, Suisse. Les journalistes de la SNC L’Équipe n’ont pas pris part à la réalisation de The Red Bulletin. La SNC L’Équipe n’est pas ­responsable des textes, photos, illustrations et dessins qui engagent la seule responsabilité des auteurs. Dépôt légal/ISSN 2225-4722

the red bulletin




arc h i pel d e s tuam otu, ­P o lyn é s i e fr an ç ai s e

tête de gondole

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Toutes nos excuses à Manu Bouvet mais voici un cliché qui met plus en valeur le tempérament aventurier du photographe que celui du sportif. « Je survole un atoll du ­Pacifique à bord de mon ULM, raconte Ben Thouard. Soudain, je vois arriver une session impressionnante. Manu a senti que c’était l’heure d’y aller car je me rapprochais de lui dangereusement. » Sans échanger le moindre mot, les deux hommes sont devenus complices dans l’instant. « En revanche, je ne lui ai rien dit à propos du requin qui se profilait sous sa planche », glisse Thouard. Brrr !  Plus sur www.benthouard.com  Photo : Red Bull Illume/Ben Thouard

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An n ec y, Fr an c e

tête à l’envers Intéressant de savoir comment Pierre Augier et Tim Alongi ont bricolé pour parvenir à obtenir ce cliché. « J’ai utilisé un protège-tibia de footballeur pour attacher mon appareil photo au mollet de Tim », raconte Augier, photographe français. Alongi, lui, est un des meilleurs tricolores de la voltige en parapente. Il a terminé 3e de la Coupe du monde 2011. Augier sait aussi se rendre disponible pour de basses œuvres. Vous souhaitez vous dire oui en vous envoyant en l’air ? Alors, il est votre homme !  Plus sur www.pierreaugier.com   Photo : Red Bull Illume/Pierre Augier

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B o u ld e r , é tat s - u n i s

tête brûlée « Parfois, raconte Dave Trumpore, le seul moyen d’être au cœur de l’action, c’est de coller votre œil et votre ­appareil dessus. » à son crédit, un peu de boue circule dans ses veines. C’est que l’Américain, avant d’être traqueur d’images, ridait à très haut niveau. Et le fait d’avoir été un pro du VTT lui donne une vision de la discipline totalement différente de celle des autres photographes. C’est donc armé de son regard si précis qu’il a shooté Joey Schusler, sur un chemin particulièrement rocailleux de son Colorado natal. Le résultat est sublime.  Plus sur www.davetrumporephoto.com   Photo : Red Bull Illume/Dave Trumpore


c ali fo r n i e , É tat s - U n i s

tête de pipe Tous les dix ans, au pied des montagnes Tehachapi, le canal qui transporte les troncs d’arbres morts est asséché. La raison ? L’entretien. L’Anglais Geoff Rowley a eu vent de l’info. Il prévient Anthony Acosta, son pote photographe. Deux heures de route plus tard, au nord-est de Los Angeles et à 6 heures du matin, le tube est à eux. Un seul passage suffit. Rowley explore le champ des possibles sur son skate. Acosta l’accompagne, boîtier en mains. Cliché rare. www.instagram.com/aacostaa   Photo : Red Bull Illume/Anthony Acosta


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Vos artistes préférés partagent leurs coups de cœur musicaux : Headphone Highlights sur rbmaradio.com *Morceaux sélectionnés avec soin.

La sélection musicale la plus excitante du web.

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Bullevard Énergisant… à petites doses !

Bande sonore Fous, les casqués de Daft Punk ? Que dire des quatre groupes suivants, certes pas (encore) aussi connus, mais pour le moins surprenants.

Roll and Rock Ezequiel Galasso, un luthier sudaméricain, transforme de vieux skates en guitares électriques.

The Zimmers Ils sont quinze, âgés de 67 à 89 ans, dans ce groupe le plus vieux au monde. Ils reprennent des morceaux des Beastie Boys.

Photos : rex features, picturedesk.com, mr. gif, yael gottlieb, skate guitar

The Vegetable Orchestra À chaque concert, les douze membres sculptent leurs ­instruments dans des légumes qui finissent en soupe.

En général, tout bon skateur use cinq planches par an. Dès lors, que faire de ces skates usés ? En 2011, l’Argentin Ezequiel Galasso a trouvé une réponse. Il fait appel à Gianfranco de Gennaro, un skateur pro, et conçoit des guitares électriques à partir de ses planches. Une guitare complète nécessite deux planches dont la taille et la courbure se prêtent à la structure du manche. Depuis que Mike McCready, le guitariste de Pearl Jam, utilise sur scène une guitare de Galasso, la demande a explosé. Cependant, Galasso n’entend pas passer à la production industrielle, la qualité reste pour lui la priorité. Pour commander une skate-guitare, vendue environ 750 euros l’unité, contactez Gallaso par e-mail.

Avec deux ­skateboards, Ezequiel ­Galasso crée une guitare.

Plus sur www.facebook.com/galassoguitars Anamanaguchi Ces New-Yorkais font du punk rock en utilisant les bips et les sons d’une Game Boy et autres vieilles consoles de jeux.

Caninus Une batterie dure comme du bois, des guitares tordues et un duo de bouledogues au micro. En 2011, le groupe se sépare.

the red bulletin

Instantané

arrêt sur images

Faites-nous partager votre univers trépidant en envoyant vos clichés à  phototicker@redbulletin.com Les meilleures photos seront tirées au sort. Le ou la gagnant(e) repartira avec la gourde suisse SIGG siglée The Red Bulletin.

Whistler

Le rider suédois Martin Söderström au Red Bull Joyride de Whistler ­(Canada). Dale Tidy

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Les trois livres les plus v ­ endus.

Muscle Shoals met en images l’histoire d’un studio d’enregistrement peu ordinaire en Alabama.

LE CONTE DE DEUX CITÉS Chef-d’œuvre de Charles Dickens paru en 1859 : 200 millions d’exemplaires.

Usine à tubes Cerné de champs de blé, Muscle Shoals est un bled paumé en Alabama. Dans les années 70, ce paisible village de red-necks entre dans l’histoire de la musique par la grande porte. Un documentaire raconte cette fabuleuse épopée. Les Rolling Stones, Aretha Franklin, Paul Simon, Bob Dylan, Wilson Pickett ont tous enregistré à Muscle Shoals des morceaux imparables. Dans le film, Keith Richards se lâche et qualifie l’endroit d’« olympe du rock ’n’ roll ». Ce succès est dû au quatuor de musiciens installés en permanence au studio qui, en un temps record, s’est forgé la réputation de meilleure section rythmique au monde. Aujourd’hui septuagénaires, ils reviennent avec bonheur sur toute cette aventure. Des légendes comme Mick Jagger et Jimmy Cliff y vont de leurs anecdotes et la jeune génération, de Bono aux Black Keys, voue une passion intacte au son de Muscle Shoals. Muscle Shoals est actuellement dans les très bonnes salles. Plus sur muscleshoalsmovie.com

LE SEIGNEUR DES ANNEAUX Le roman de Tolkien paru entre 1954 et 1955 : 150 millions d’exemplaires.

le petit prince D’Antoine de SaintExupéry, paru en 1943 et vendu à 140 millions de copies. Plus à la Foire du livre de votre ville

« fascinant ! » Un an après le saut historique de ­Felix Baumgartner, le documentaire Red Bull Stratos dévoile les coulisses de la mission. the red bulletin : En quoi votre vie a-t-elle changé ­depuis votre exploit avec Red Bull Stratos? Felix Baumgartner : Ma vie privée est plus difficile. Dîner avec des amis au restaurant n’est plus si simple. Mais j’ai rencontré pleins de gens intéressants et des célébrités du monde entier. Quant à moi, je suis resté le même. Il est beaucoup question de pression dans le documentaire Mission to the Edge of Space – The Inside Story of Red Bull Stratos… … et d’immense soulagement par la suite. La pression durant la phase de préparation et pendant le saut était à la limite du supportable. Mais je n’ai jamais douté. Je voulais monter dans la stratosphère

et en revenir sain et sauf. Il fallait le faire. Que ressentez-vous en regardant les images? Par moment, des frissons. Je me demande comment j’ai pu gérer tous les aléas rencontrés et je me dis que plus jamais je ne m’embarquerai dans un projet d’une telle envergure. Malgré tout, si un projet aussi fascinant que Red Bull ­Stratos devait croiser à nouveau ma route, je ne pense pas le r­ efuser. Quel message aimeriezvous que les spectateurs emportent avec eux ? Que tout ce que la tête peut imaginer est réalisable. C’est une question de moyens. Film disponible en streaming à partir du 14 octobre sur rdio.com/redbullstratos

14 octobre 2012. Go !

PHOTO GAGNANTE

Yamaguchi Le Red Bull Kart Fight se mue en bataille navale après des pluies diluviennes. Jason Halayko 18

Seignosse La surfeuse américaine Brianna Cope, 19 ans, prépare sa planche pour le Swatch Girls Pro de Seignosse. Laurent Masurel

Linz

L’Autrichien Tom Öhler établit au Bunny Hop un nouveau record du monde du 400 haies en 44,62 secondes. Enrique Castro Mendivil the red bulletin

Photos: erwin polanc/red bull content pool, jay nemeth/red bull content pool, Sundance Institute

Best-­ sellers



Bullevard

Dandois, olé ! Triple champion du monde de BMX Flat, Matthias Dandois a profité de son séjour espagnol en août dernier pour rajouter une ligne de choix à un palmarès conséquent. À Vigo, lors de la compétition nommée O’Marisquino, le Français Dandois au sommet n’a pas fait dans la dentelle. Après un séjour américain médiocre, Dandois s’est imposé en Galice. À 24 ans, le Français est plus que jamais en lice pour une quatrième couronne mondiale. Rendez-vous le 26 octobre prochain au Japon. Plus sur www.redbull.fr

Un peu plus près des étoiles

Sanghon Kim à 12Mail

La palette de l’artiste franco-coréen explore toujours l’art. Après les dessins, le court-métrage. Détonnant. Dupont, au clair de lune Légende tricolore du trial, Julien Dupont a traîné ses guêtres sur les spots en bitume les plus improbables de la planète. Après les favelas de Rio de Janeiro ou le château de Bran, résidence de Dracula en Transylvanie, le Français, en quête d’un lieu unique cet été, a jeté son dévolu sur... la lune ! Mais comme il est un peu compliqué de propulser sa moto en orbite, Dupont s’est rabattu sur l’incroyable paysage de l’île grecque de Milos. « Si nous ne pouvons pas aller sur la lune, alors, c’est la lune qui viendra à nous », s’est-il exclamé, ravi à l’idée de montrer l’ensemble de son savoirfaire dans ce décor... lunaire. Vidéo disponible sur www.redbull.fr

Bergen

Les Norvégiens se sont creusé les méninges pour créer des caisses à savon… fumantes. Vegard Breie, Red Bull Olabillop

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Silverstone

Illustrateur et directeur artistique de talent, Sanghon Kim dévoile à 12Mail les travaux préparatoires de son premier court-métrage d’animation. Dessins originaux et collaborations visuelles lèveront le voile sur un univers de science-fiction unique. Kim a notamment réalisé la pochette d’un album de Sébastien Tellier. Il a aussi œuvré dans le football en « dessinant » les pensées de Javier Pastore et Mamadou Sakho. Tous deux ont répondu à des questions sous la forme d’un portrait chinois. L’univers de Kim est infini. Laissezvous porter par cet artiste hors du commun, à la voix suave et au coup de crayon délicat. Le dessin reste son terrain d’expression privilégié. L’exposition transforme 12Mail en un atelier ouvert. Entrez-y comme si vous vous laissiez guider par une main invisible à travers les dédales de la pensée de Kim. Tout un programme à découvrir sur le champ avant le 8 novembre prochain. Plus sur www.12mail.fr

L’Espagnol Jorge Martin, 15 ans, a un bon feeling avant de prendre le départ de la Red Bull Rookies Cup. Gold & Goose

Haarlemmermeer Le festival hollandais Mysteryland a profité de la scène totalement en bois de Red Bull Studio Connect. Arenda De Hoop the red bulletin

Texte : Christophe Couvrat. Photos : olaf pignataro/red bull content pool, samo vidic/red bull content pool, Kim Sanghon

Kim, la tête dans les nuages


Bullevard

tiercé rageant

mon corps et moi

danny macaskill

Le vététiste écossais de 27 ans est mondialement connu grâce aux vidéos de ses multiples exploits effectués sur son vélo de trial. Un succès largement acquis dans la douleur.

1  disque rayé

En 2009, sur un tournage, je me déchire un disque ­vertébral. Sur le coup, je ne ressens rien car le nerf est compressé. Peu à peu, la douleur se propage dans le dos et le genou gauche. Je me suis fait opérer l’an dernier. J’ai mis dix mois à retrouver mon meilleur niveau.

Credit: texte : ruth morgan. photo : chris parsons

2  Histoire à la con Je me plante en vélo lors d’un tournage près de Vancouver. En posant mon pied droit au sol, je glisse sur du caca d’oie (véridique !), ma jambe se tord et je me bousille le ménisque. On l’a réparé grâce à de la ­microchirurgie.

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Trois fois en six mois, je me casse la clavicule gauche. D’abord dans une station-­ service, puis en chutant d’un trottoir. J’ai encore la plaque de métal dans l’épaule ­lorsque, dans une descente, je passe par-dessus le guidon. Un saut de trois mètres.

À tour de bras

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Il y a quelques années, je chute avec un BMX pour enfants. Depuis, j’ai une ­broche dans le poignet droit. Une autre fois, après une grosse gamelle en VTT, il faut m’opérer pour e­ nlever de mon avant-bras de petits cailloux. J’en garde une belle cicatrice.

La loi du talon

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J’ai subi deux fractures au pied droit et trois au gauche, et des déchirures des ligaments de la cheville. C’est fréquent quand tu retombes sur un sol pourri après un saut ­arrière. Mais ça fait moins mal qu’une réception ­violente sur les talons.

Plus sur imaginate.redbull.com/ the red bulletin

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Bullevard

hier et aujourd’hui

TABLEAU DE BORD Au fil du temps, le poste de pilotage d’une voiture est devenu un concentré de technologie. Comme ici, chez Mazda.

Élégance

Avec ces trois rayons métalliques, le volant fin en bois symbolise l’élégance et la grâce des voitures de sport d’antan. La sécurité n’est pas encore une priorité.

résonance

insouciance

Dans les années 70, les fumeurs règnent partout en maîtres. Cela explique la place de choix réservée à l’allume-cigare.

1969

Mazda 110 S Cosmo Sport

Ce coupé deux places avant-gardiste est la voiture rêvée des années 70. Destiné officiellement au marché japonais, d’où la position du volant à droite. Les lignes singulières et futuristes, mues par un moteur Wankel, se reflètent aussi dans l’habitacle. La rondeur des équipements et le volant en bois sont réservés à ces modèles haut de gamme rares, symboles de l’industrie automobile sportive de luxe de la fin des sixties.

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Le poste radio ne fait pas encore partie des équipements de série. Ce poste Sharp est très basique : pas de son ­stéréo ni de FM. Quant aux cassettes ­audio, il faudra encore patienter.

Produite entre 1967 et 1972, la Mazda 110 S Cosmo Sport est la 1re voiture de série équipée d’un moteur Wankel rotatif de 110 chevaux.

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affichage tête haute

Il est réglable et un effet optique le place à 1,5 m du conducteur qui peut ajuster sa vue plus rapidement entre la route et l’affichage.

volant ­intelligent

Photos : kurt keinrath, kurt pinter (1)

Il est multitâche. Avec notamment une prise en main du téléphone par Bluetooth et un régulateur de ­vitesse qui s’adapte au maintien de la distance de sécurité.

2013

écran tactile

Le MZD Connect de ­Mazda est un système de connectivité audio, ­téléphone et GPS. L’interface est intuitive et ­facile d’utilisation, et permet l’accès à Internet via un smartphone.

centre de contrôle

Le HMI Commander (interface homme-machine) permet un contrôle facile – en toute sécurité ­et ­depuis un seul endroit – du système audio, des réglages du véhicule, du kit mains libres ainsi que de la navigation par satellite.

Mazda3

Aujourd’hui, les constructeurs et designers automobiles font face à un défi de taille : ­fournir à l’automobiliste un maximum d’informations, sans pour autant le distraire du ­trafic. Preuve en est l’écran multimédia 7 pouces surélevé de la Mazda3, sa ligne soignée et son affichage tête haute réglable. L’habitacle répond à des critères d’exigence plus ­élevés en termes de confort, de sécurité et d’ergonomie.

the red bulletin

La nouvelle Mazda3 est équipée de la ­technologie Skyactiv qui programme une consommation intelligente. Plus sur www.mazda.fr

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illustration : dietmar kainrath

Bullevard

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LE GOÛT DE LA MYRTILLE. L‘ÉNERGIE DE RED BULL.

RED BULL BLUE EDITION. Pour votre santé, pratiquez une activité physique régulière. Rendez-vous sur www.mangerbouger.fr


Bullevard

dans la tÊte de...

Chris hemsworth

Thor revient sur les écrans et il n’est pas content. Qui est ce beau gosse blond qui interprète le dieu du tonnerre de la mythologie nordique ? Voici quelques éléments de réponse.

Accélérateur

Mère fratrie

Hemsworth est de retour sur grand écran avec Rush qui raconte le duel en 1976 entre les deux légendes de la Formule 1, James Hunt et Niki Lauda (The Red Bulletin Septembre 2013, ndlr). Ce longmétrage sous la houlette de Ron Howard, gourou du cinéma hollywoodien, lui a offert une flopée de rôles à venir.

Christopher Thomas Hemsworth naît à Melbourne, le 11 août 1983. Sa famille s’installe ensuite entre l’Outback – cette région de l’Australie que Hemsworth appelle « le pays des crocodiles » – et l’île de Phillip Island. Avec son frère Luke et son cadet Liam, devenus acteurs, il s’adonne au surf.

Total chaos

Il joue pendant trois ans dans la série Summer Bay. Chris interprète le malheureux Kim Hyde. Son personnage est plaqué devant ­l’autel le jour de son ­mariage, ses parents ­divorcent, sa petite amie – une tueuse – décède dans une explosion de gaz provoquée par les bougies d’un gâteau de mariage...

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à la douzaine

Hemsworth est au générique d’une douzaine de films. Ce n’est pas beaucoup, mais il y a les deux Thor ou des succès comme The Avengers. Il est aussi George Kirk, le père du capt’ain, dans le premier Star Trek de J.J. Abrams, en 2009. Enfin, on l’a vu dans E ­ scapade Fatale.

Thor tue

« Je trouverai un moyen de tous nous sauver », jure le héros de Thor 2 : Le monde des ténèbres toutes cape, cotte de mailles et chevelure dorée dehors. Sortie mondiale le 30 octobre. Son frère Liam était en concurrence avec lui pour décrocher le rôle. ­Qu’importe, ils s’aiment toujours.

Chris vient d’achever le tournage de Cyber, un thriller de pirates informatiques. Sortie prévue l’an prochain alors que The Avengers 2 est ­annoncé pour 2015. Chris peut souffler et passer du temps avec sa femme, Elsa Pataky, Elena dans la saga Fast & Furious, et leur fille ­India Rose, un an.

Plus sur www.marvel.com/thor the red bulletin

texte : Paul Wilson. Illustration : Ryan Inzana

Le hack après la hache


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Bullevard

costa signe la pole L’artiste et l’écurie OAK Racing ont animé les 24 Heures du Mans en juin dernier. Fernando Costa expose à Paris. Afin de célébrer dignement le 90e anniversaire de sa célèbre épreuve, l’Automobile Club de l’Ouest avait offert à l’écurie de course mancelle OAK Racing le prestigieux label « Art Car des 90 ans des 24 heures du Mans » pour la sculpture réalisée par Fernando Costa sur un prototype LM P2. Des artistes comme Calder, Warhol, César ou Koons avaient aussi dessiné la carrosserie d’un véhicule engagé en course. Jacques Nicolet, patron d’OAK Racing, a choisi de reproduire en covering sur la Morgan-Nissan LM P2 n°45 l’œuvre de ­Fernando Costa. L’irruption de l’artiste français, âge de 43 ans, dans le monde de la course automobile ne doit rien au hasard. Dès son plus jeune âge, Costa se passionne pour le sport auto. Son univers est un parti pris manifeste contre le gaspillage. Gamin, dans sa Dordogne natale, il visitait les décharges pour ­récupérer des matériaux afin de fabriquer des jouets. Il en a gardé le goût de travailler les plaques publicitaires, de rue ou de métro. Elles signent son œuvre. Cet autodidacte, fan de César, a quitté en 1988 le monde de l’hôtellerie pour mener en solo sa croisière d’artiste. Sa passion. Son style qui mêle l’abstrait et le figuratif lui ouvre les portes des galeries internationales. Pour concevoir son Art Car – une première – il a directement travaillé sur le châssis d’une LM P2 qui avait déjà participé quatre fois à l’épreuve. Les dernières œuvres de Costa sont exposées à Paris, galerie Art Jingle, jusqu’au 15 novembre. Oeil. Fernando Plus sur www.artjingle.com et www.oak-racing.com

vite fait,bien fait

Sportifs vainqueurs et parcours victorieux aux quatre coins de la planète.

Sebastian Vettel s’impose à Spa. Le triple champion du monde de Formule 1 devance son éternel rival, Fernando Alonso.

L’Italien Tony Cairoli s’octroie son 5e titre consécutif de champion du monde de motocross au MX1-GP ­d’Angleterre.

L’Espagnol Daniel Sordo tout à sa joie en ­Allemagne, fin août. Il c­ élèbre ainsi, à 30 ans, sa première victoire au championnat du monde des rallyes.

Costa a tapé dans le mille.

La vététiste anglaise Rachel Atherton précède Emmeline Ragot lors de la Coupe du monde de descente en Afrique du Sud.

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photos : dppimages, getty images, jm anglÈs/oak racing, Reuters, Ray archer/ktm/Red Bull Content Pool, Mc Klein/Red Bull Content Pool, ASP red bull

Paire d’as. Le patron d’OAK Racing Jacques Nicolet (à gauche) et Fernando Costa encadrent Jean-Claude Boulard, maire du Mans.


Red Bull France SASU, RCS Paris 502 914 658

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Bullevard

chiffres du mois

7e

gros bides

Dans l’industrie du art, les projets ambitieux ne sont pas toujours synonymes de succès commerciaux. Voici notre florilège illustré des flops les plus retentissants de l’histoire du cinéma.

2 000

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18 jours de tournage, 2 millions de dollars de budget et une recette de... 30 dollars. En février 2006, six spectateurs seulement se déplacent au Highland Park Village Theater à Dallas pour voir Zyzzyx Road, thriller américain i­ndépendant avec Katherine Heigl. La vente du DVD dans 23 pays ne rapporte que 368 000 dollars.

Diamants maudits

Katherine Heigl a des regrets

120 000 McConaughey dans Sahara

John Carter est vert

30

1 800 costumes dont une robe de mariée incrustée de 120 000 cristaux Swarovski et 2 000 effets spéciaux différents. Avec un ­budget estimé à 250 millions de dollars, l’épopée futuriste John Carter d ­ evient la quatrième plus grosse production de l’histoire du cinéma.  La recette aux États-Unis est m ­ odeste : 70 millions de dollars.

20,4

7

En 2011, les Studios Disney   font face au plus grand échec commercial de leur histoire avec le film d’animation de science-­ fiction Milo sur Mars. Le premier week-end de projection génère péniblement 7 millions de dollars de recettes pour un budget engagé de 175 millions. Heureusement, Disney est derrière.

Le film d’aventure Sahara (2005) frôle les 240 millions de dollars  de budget pour 120 millions de pertes. La raison ? Une certaine propension au gaspillage.  La scène d’ouverture, un crash dans le désert, a bien été tournée et montée. Mais cette séquence  de 46 secondes, chiffrée à 2 millions de dollars, est finalement coupée au montage.

L’île aux ­Pirates coule à pic

Milo sur Mars ne décollera jamais

Six heures. C’est le temps que dure la bataille opposant 200 Texans à 1 800 Mexicains  à Fort Alamo, au matin du 6 mars 1836. La version cinématographique, Alamo (2004), est tournée sur une superficie de 20,4 hectares, soit le plus grand site  de l’histoire du film américain.  Une production de 100 millions de dollars qui ­réalise aux États-Unis seulement 22,4 millions de r­ ecettes. Belle débâcle. the red bulletin

texte : ulrich corazza. photos : corbis (3), picturedesk.com (3), getty images

Renny Harlin, le réalisateur de   L’île aux Pirates (1995), s’en mord les doigts. Des chevaux d’Autriche, 2 000 costumes, 309 armes à feu et 620 épées sont commandés. Sans oublier le million de dollars nécessaire à la construction   de deux navires du XVIIe siècle.   La note finale est salée :   95 millions pour une perte   sèche de 80 millions.

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Dennis Quaid dans Alamo


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Formule magique

au bout du rouleau

la danse des particules En principe, le mouvement de particules d’onde est soit longitudinal (comme dans une onde sonore), soit transversal (comme avec une corde tendue). En revanche, le mouvement des vagues est circulaire : un bouchon flottant sur l’eau permet d’observer ce phénomène (fig. 1). Dans l’eau, le mouvement des particules est également circulaire, mais avec un rayon qui se réduit à mesure que la profondeur augmente. Les lames de fond doivent à ce mouvement circulaire leur forme cycloïde. Une forme que schématise la trajectoire d’un point fixe, placé sur une roue en mouvement (fig. 2). Sur a, ce point se situe au milieu du rayon, et sur b, à l’extrémité de ce dernier. Une parfaite représentation de la forme des vagues, si ce n’est qu’elle est inversée comme le montre la figure 1. Le sommet de la cycloïde sur b représente le cas extrême, les vagues atteignent là leur hauteur maximale. Nous pouvons dès lors déduire le rapport entre h, la hauteur maximale d’une vague et λ, sa longueur d’onde. Celle-ci correspond à la circonférence d’une roue, soit à la trajectoire d’une rotation, R = λ = 2r π, la hauteur maximale étant h = 2r. Par conséquent, λ = 2r π = h π. Pour qu’une vague de 8 mètres, comme sur cette photo, se forme, son amplitude doit être d’au moins 8 π (≈ 25 m). La vitesse en eaux profondes se d ­ étermine par vprof = √ g ∙ λ/(2 π) ; g étant l’accélération de la p ­ esanteur (9,81 m/s²). Une vague avec une amplitude de 25 m déferle à la ­vitesse de 6,25 m/s, soit environ 23 km/h. Soit la vitesse que le surfeur doit avoir pour prendre la vague. On comprend mieux pourquoi les pros font appel à un jet-ski. Près des côtes, l’eau devient moins profonde et la vague commence à racler le fond. Les particules se déplacent alors sur une ellipse (voir photo). Les vagues « flat » (de petite houle) ont une vitesse de vflat = √ g ∙ p, où p est la profondeur de l’eau. En eaux moins profondes, les particules du fond sont fortement ralenties alors que celles qui évoluent près de la surface gardent la même ­allure. Le fait qu’une vague se brise proche du rivage est dû à son inertie. Pour les surfeurs, il s’agit alors d’éviter la chute pour ne pas être aspiré par la vague. la danse au bord de l’abîme Que ressent-on dans une vague géante ? L’Australien Ross Clarke-Jones (à droite) : « C’est comme sauter d’un avion. On sent l’accélération, la force centrifuge, et on a l’impression que la planche va se désintégrer. » Plus sur www.stormsurfers.com.au * Le professeur Martin Apolin a 48 ans. Il est physicien, agrégé en sciences du sport et enseigne à la faculté de Vienne (Autriche). Apolin est aussi l’auteur de plusieurs ouvrages de référence.

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photo : storm surfers 3d/red bull content pool. Illustration : Mandy Fischer

Comment une énorme déferlante se formet-elle ? Notre spécialiste répond*.


Alien. Ross 颅Clarke-Jones, 37 ans, dompte Shipstern Bluff, spot de la c么te sud-est de la Tasmanie.


Si pour vous, la Suède se résume à ABBA, Ikea ou Volvo, alors une mise à jour s’impose. ­Elliphant ne trompe pas énormément sur la marchandise. à 27 ans, sa musique déménage et sa plastique interpelle. Texte : Caroline Ryder Photos : Miko Lim Styliste : Holly Copeland

Y D CAN

GIRL

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« C’était très dur en Suède. Quand j’ai quitté le pays, je suis enfin devenue un être humain »

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E

lliphant traîne une mauvaise grippe. « Comme souvent lorsque je suis à Los Angeles », explique-t-elle d’une voix éraillée dans cette loge ­exiguë, où elle se déplace à ­moitié nue. Sans complexe. Tour à tour mannequin, globe-trotteuse et musicienne, ­Ellinor Olovsdotter appartient à cette nouvelle génération bouillonnante de divas dance-pop scandinaves. Comme Icona Pop, Robyn, Lykke Li ou encore MO avant elle. Portrait d’une étoile qui brille de mille feux. 37


Sa musique se nourrit de dancehall jamaĂŻcain, de dirty dubstep, de rock et de techno des annĂŠes 90

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Tout au long de l’interview, on devine un charisme indéniable, mais en partie dissimulé. En revanche, pendant le shooting, il éclate, comme une aveuglante révélation. Ellinor Olovsdotter devient Elliphant, son alter ego. Naturelle, enjouée, exubérante, elle vampirise ­l’objectif. Cette énergie intérieure influence une musique nourrie au dancehall jamaïcain, au dirty dubstep, au rock et à la techno des années 90. Un son qui résonne comme celui de M.I.A. ou de Santigold. Avec son look éthéré à la Jane Birkin, mélange de beauté et de franc-parler ­désarmant, Elliphant ringardise, en cette fin d’année 2013, n’importe quelle jeune pop star. Pourtant, la vie ne lui a pas fait de cadeau. Elle a grandi dans l’un des quartiers les plus durs de Stockholm. Sa mère, célibataire, a deux enfants de pères différents. Son père, quatre, avec trois compagnes. Ambiance. « Ma mère est une junkie, commencet-elle. Elle a connu plein de problèmes. Ça a été dur en Suède pour elle, comme pour moi. Le système m’a détruite. Quand j’ai quitté le pays, je suis devenue un être humain. Si je ne m’étais pas tirée, ­Elliphant n’aurait jamais existé. Et aujourd’hui, je serais probablement aigrie, bourrée de médicaments, avec deux mômes. » Or, la musique a été l’un des rares luxes que cette drôle de famille recomposée a pu s’offrir. « Ma mère aime toutes sortes de sons. Elle connaît tout des années 90, raconte Elliphant. J’ai grandi avec la musique. Quand j’étais gamine, on l’attendait souvent pendant des heures, alors qu’elle écumait les magasins de disques. Elle achetait peut-être dix ­albums par semaine. Tout y passait, de David Bowie aux B-52s, des premiers

­ lbums de techno à Frank Sinatra. a ­Vraiment tout.  » Souffrant d’hyperactivité et de ­dyslexie, la petite Ellinor Olovsdotter ­s’accroche à l’école sans trop croire à un ­avenir rose, jusqu’au moment où sa grand-mère l’emmène en Inde. Elle a quinze ans. Un choc. La découverte du pays, sa population, les rues multicolores la transforment et l’apaisent. Dans ce décor, elle se perd pour mieux se trouver. Quand elle rentre en Suède un an plus tard, elle quitte définitivement l’école à 16 ans. Une part d’elle est restée en Inde, où elle multiplie les allers-retours pendant plusieurs années. À chaque atterrissage en Suède, elle enchaîne les petits boulots (serveuse, cuisinière, etc.) tout en développant ses propres sons. Elle voyage à Berlin, Londres et Paris où elle découvre le bouillonnement des différentes scènes musicales. Et c’est en France, au cœur de la capitale, qu’un jeune producteur suédois va miser sur son talent. Elle rembobine : « J’ai fait la connaissance de Tim De Neve, l’un de mes producteurs, en 2011 à Paris, juste avant de repartir en Angleterre. Quand je l’ai rencontré, on s’est grave entendus question musique. Il m’a dit qu’il voulait essayer de

Elle puise une sorte de paix intérieure dans le vacarme des rues indiennes. Se perdant pour mieux se trouver

composer pour d’autres artistes, avec Ted Krotkiewski, son binôme dans la prod. Je devais repartir pour Londres, et ensuite, Stockholm. Mais je me suis retrouvée bloquée par la fermeture de l’espace aérien à cause de l’éruption du volcan en Islande. » Un imprévu qui a d’heureuses conséquences. Ellinor ne part pas et le tandem De Neve-Krotkiewski va encourager la jeune Suédoise à persévérer. Ellinor se transforme en Elliphant, composant textes et musiques de ses chansons tandis que le duo soigne la production. « La musique et moi, c’est une histoire qui a démarré quand je me suis rendue en Inde, où j’ai pu participer à des jam-sessions, dit-elle. Je ressens la musique, c’est un ­besoin. Je me suis mise à enregistrer tout ce que j’entendais. Je voulais créer la plus grande banque de sons au monde. J’avais plein de projets en tête autour de la musique, mais sans imaginer ce que ça allait ­donner. Et certainement pas ça. » C’est exactement ce dont tout artiste rêve pour lancer sa carrière. La rencontre avec un aiguilleur en bons conseils, ce producteur réglo qui vous repère et vous met le pied à l’étrier. Après avoir fait le buzz à Stockholm, Elliphant rejoint l’équipe de Ten, la compagnie suédoise qui s’occupe d’Icona Pop et de Niki & The Dove. Puis, l’an dernier, elle se fait un nom avec des titres mélangeant dubstep et dancehall. Comme Ciant Hear It, Tekkno Scene et surtout Down On Life, dont le superbe clip, tourné en ­Islande, est salué par Katy Perry herself. La star américaine n’est pas la seule à remarquer la Suédoise. Dr. Luke, le producteur dont les titres trustent les charts, sait repérer les futurs talents féminins de la pop. Après Perry, Ke$ha, Kelly Clarkson, Britney Spears et Rihanna, il signe ­Elliphant chez Kemosabe, son label chez Sony. « Ça m’a surpris qu’il s’intéresse à moi, glisse cette dernière. Il est venu me chercher dans mon petit coin. Je ne comprends pas ce qui m’arrive, je n’ai rien ­demandé. J’imagine qu’avec le succès d’Icona Pop, beaucoup de gens de majors sont d’un coup venus voir ce qui se passait en Suède. » Une telle reconnaissance ça se fête, jure-t-elle, en enfilant une chemise avant d’annoncer que ce soir, grippe ou pas, elle sort boire un verre. « La musique exige beaucoup de temps et d’efforts si tu veux obtenir quelque chose en retour. C’est la vie que je voulais, ce n’est pas seulement une distraction. Et puis, je sors Down On Life, et là je me dis : “Putain, vas-y, fonce !” Ma vie, c’est d’être une artiste. » Plus de beat princess sur @ElliphantMusic

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eddie jordan

Papy n’a pas le blues L’ex-patron d’écurie de Formule 1 apprécie sa nouvelle vie. à 65 ans, Eddie Jordan est un jeune retraité très actif. Il se maintient en forme grâce au vélo, à la pratique du yoga et au... rock’n’roll. Le virus de la course auto a bel et bien disparu.

the red bulletin : En 2005, vous vendez votre écurie. Comment occupezvous votre temps depuis ? eddie jordan : J’ai quatre enfants. Je suis grand-père et marié depuis 35 ans à la même femme. Tous les deux, nous tenons encore la forme et nous parcourons le monde en bateau à voile. Canal de ­Panama, les mers du Sud, les îles Galapagos, la Polynésie... Des lieux dont on avait jusque-là seulement entendu parler. Vous semblez avoir la grande forme… Quand je suis à Monaco, je fais du vélo plusieurs fois par semaine avec Jenson Button, David Coulthard, Paul di Resta et d’autres. Je joue au golf et j’entretiens ma souplesse grâce au stretching et au yoga. C’est plus dur que tout ce que j’ai fait jusque-là. Avez-vous des problèmes de poids? Je fais attention à mon alimentation. Viandes, poissons et peu de féculents bien que j’adore les pâtes et la pizza. Quand on est petit comme moi, on a vite fait de devenir grassouillet si on se laisse aller. J’évite les desserts. D’ailleurs, à l’hôtel, la salle de sport est ma meilleure amie. Bien sûr, une halte au bar après une bonne virée est tentante mais je sais par expérience que si on s’y arrête, c’est un traquenard... D’où vient ce changement ? De l’envie de finir ma vie en restant très actif et de ne pas devenir un enquiquineur. C’est une question d’équilibre. Plutôt inhabituel, un rocker qui donne des conseils de fitness… Prenez Mick Jagger ou Alice Cooper ! Tous ceux qui ont survécu aux drogues ont aujourd’hui une alimentation équilibrée et évitent toutes substances illicites. Que reste-t-il du rock’n’roll ? Les Rolling Stones jouent aujourd’hui mieux que jamais. Rock et perfectionnisme sont-ils ­compatibles  ? Les spectateurs ne veulent pas sur scène de types titubants et hurlant sur des play40

Photo : Marco Rossi

backs. Les Rolling Stones sont fidèles à eux-mêmes et jouent chaque note comme il se doit. S’ils avaient gardé la même ­hygiène de vie, ils seraient aujourd’hui morts ou en piteux état. Les rockers sexagénaires sont les plus épanouis. Parmi eux, beaucoup ont croisé votre chemin… Un jour chez Jordan GP, une maison de disques nous sollicite pour faire visiter l’entreprise à un artiste. Une limousine pénètre dans la cour. C’était Johnny ­Rotten (chanteur des Sex Pistols, ndlr). Et le plus marrant, c’est que sa mère, celle de George Harrison et ma femme sont toutes originaires du même village en Irlande.

Patron. Eddie Jordan donne le tempo des Robbers.

Autre exemple, Chris Thomas a été le premier à intégrer mon groupe (Eddie Jordan assure la ­batterie dans le quatuor spécialisé en reprises The Robbers, ndlr). Il était claviste sur Lady Madonna des Beatles. Puis il est devenu producteur et a contribué à la carrière d’Elton John, Lion King, INXS et à celle d’une bande de déjantés, les Sex Pistols. Personne n’avait jamais entendu parler d’eux mais j’étais là pour l’enregistrement de Never Mind the Bollocks dans le studio d’Oxford Street. À l’époque, le punk était assimilé à du bruit. Depuis, la complexité et le génie du genre sont reconnus. Le rock doit sa survie au punk. C’est une théorie osée. La controverse autour du punk a poussé

les gens vers la country, le blues et le folk permettant au rock’n’roll de devenir ce qu’il est aujourd’hui. En Europe, peu ont compris le punk, et le rock’n’roll, encore moins. Le rock et le punk ont toujours été d’essence britannique et américaine. Hormis Scorpions, quel autre groupe de cette envergure existe-t-il en Allemagne ? Il y en a peu, en effet. Beaucoup de mes amis adorent les voitures de course, moi, j’adore leur musique. Une complémentarité naturelle. J’ai quasiment grandi avec Bono et The Edge de U2. Le patron d’Universal Music m’a invité à jouer à son mariage où nous avons fait la connaissance de Rihanna. Dans un petit club, j’ai joué avec George Harrison. J’étais sur scène avec Ron Wood et Rod Stewart, avec Roger Taylor de Queen et Nick ­Mason de Pink Floyd. Et Mike ­Rutherford de Genesis est mon ami. Quel serait le groupe de vos rêves ? Le choix du batteur est le plus difficile... je dirais Roger Taylor de Queen pour ses talents de choriste. Comme bassiste, le regretté Phil Lynott de Thin Lizzy, un rocker dans l’âme. À la guitare, The Edge, Eric Clapton ou Mark Knopfler. Non, les deux ­derniers sont trop lents. Au clavier, Guy Fletcher. Et comme chanteur, j’adore Springsteen et Tom Petty, mais j’opterais pour… Bryan Adams. J’ai joué avec The Robbers pour l’anniversaire de sa fille. Je le vois souvent aux matches de Chelsea, tout comme Mark Knopfler et Bob Geldof. Chelsea comme symbole du rock’n’roll ? Oui, nous sommes de grands supporters. Nous habitons le quartier. Il y a vingt ans, on y était déjà quand l’équipe était au fond du trou. Aujourd’hui, elle brille à nouveau, et on est toujours là. Il y a des fans qui ne sont là que pour les bons moments, et il y a aussi des gars comme nous. La F1 est-elle rock’n’roll ? Absolument pas ! Plus sur www.eddiejordan.com the red bulletin

photo additionnelle : Imago

Texte : Werner Jessner


Date et lieu de ­naissance 30 mars 1948, à Dublin (Irlande)

« Le punk était assimilé à du bruit. Mais le rock lui doit sa survie »

Carrière automobile Champion de kart et de Formule Atlantic en Irlande, pilote d’essai McLaren, un départ au Mans Patron d’une écurie F1 Entre 1991 et 2005, 250 départs sous la bannière Jordan GP. 4 victoires en GP. Cédée en 2005 à Force India. Commentateur F1 Pour la BBC : « Je souhaite exceller dans un domaine qu’a priori, je ne maîtrise pas.» Autobiographie An Independent Man



À kite et double

Clémentine Bonzom s’impose, sur le tard, comme la nouvelle ­égérie du ­kitesurf féminin français. À 30 ans, la Montpelliéraine, n° 1 française en freestyle l’an ­passé sur le circuit mondial, ­assume ce joli buzz. Cette année, elle veut bisser. The Red Bulletin a ridé au côté d’une fille à la tête bien faite. Texte : Christophe Couvrat et Frédéric Pelatan Photos : Mathias Fennetaux

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mbitieuse et énorme bosseuse, l’étoile blonde du kitesurf tricolore est une stakhanoviste, mais elle s’est trouvé un terrain autrement plus accueillant que le Donbass, le gigantesque bassin houiller situé entre l’Ukraine et la Russie, où est née la conceptualisation du travail à la chaîne. Sa mine est à ciel ouvert, mouvante, salée, teintée de bleus. Ses coups de grisou à elle viennent de l’intrépide tramontane qui souffle en permanence sur la côte de Palavasles-Flots. Ses parents y ont élu domicile lorsqu’elle avait onze ans. « C’est là que tout a commencé, ­raconte Clémentine Bonzom. Je me suis soudain mise à rêver de surf, que j’allais devenir championne du monde. » La gamine a du mal à quitter les jupons de sa mère. Elle puise au fond d’elle ce qu’il faut de courage pour aller questionner un pro du spot local. Qui lui donne un exercice physique à reproduire, encore et encore, jusqu’à ce qu’il devienne un réflexe. « Cela consistait à s’allonger sur le sol et à se redresser le plus vite possible, comme pour un take off. Pendant quatre ans, j’ai répété inlassablement dans ma chambre. À partir de là, j’ai passé ma vie dans l’eau. Qu’il vente, qu’il pleuve, qu’il fasse 10 °C, je me jetais à l’eau seule après l’école, jusqu’à la nuit, souffle-t-elle. Rien d’autre ne suscitait en moi une telle ­détermination. » 43


Mais, pour devenir surfeur pro, mieux vaut naître Igor d’Hossegor que Clem de la Med. Le rêve a mué, le support a changé. Le sport et la mer, deux constantes dans sa vie, sont restés. « On dit souvent que les bébés sont à l’aise dans l’eau car ça leur rappelle les neuf mois qu’ils ont passés à baigner dans le liquide amniotique du ventre de leur mère. Alors qu’à terre je peux paraître timorée, dans l’eau je me sens à l’aise, en pleine confiance. » De ses parents, un peu sportifs, un peu artistes et définitivement touche-à-tout, Bonzom a hérité d’une approche intellectualisée de la vie et du sens de l’expression par le mouvement. « La principale qualité de mes parents, c’est leur ouverture d’esprit, souligne l’avant-dernière d’une fratrie de sept. Même dans les périodes de gros doute, ils m’ont fait confiance et m’ont assuré que je finirai par trouver mon créneau. Grâce à eux, j’ai compris que la chose la plus importante, c’était de trouver ma voie et de bosser dur pour me donner les moyens de vivre la vie qui me ferait rêver. »

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Volonté. Clem Bonzom est une référence en freestyle. Au même titre que l’Espagnole Gisela Pulido.

« Parfois, je me dis : Mon Dieu, je sens que je vais me tuer » Soufflet, un préparateur physique, Romaric Linarès, et une structure. « Le fait d’être entourée par des personnes dont c’est le métier aide à envisager cette discipline d’une manière vraiment sérieuse, reconnaîtelle. Les riders commencent à prendre conscience que ce sport va tendre vers la professionnalisation dans les prochaines années. » Clémentine Bonzom prépare déjà le moment où les jambes feront un peu trop mal. Sous contrat avec les marques North ­Kiteboarding et Ion, elle est aussi rédactrice pour la revue spécialisée Stance Magazine. Cet hiver, elle partira enseigner dans des kite camps au Brésil, qu’elle adore, puis prolongera sa période d’entraînement au cours de laquelle elle prendra soin de se filmer. « Ce qui intéresse les gens, ce n’est pas un classement sur le circuit mondial ou européen, mais un support ­visuel très éloigné de leur quotidien qui les fait voyager par procuration ». Rien de mieux pour contrecarrer le machisme qui règne sur le petit monde du ­kitesurf qu’une bonne thérapie par l’image. Plus sur www.clembonzom.com

photo additionnelle : kitetravel4all

ans le sport, la jeune et jolie trentenaire a trouvé de quoi dissiper ses nuages intimes. « Sous mes airs de fille détachée, j’ai énormément de mal à ne pas cogiter sur mes angoisses ou sur des choses plus futiles, glisse-t-elle. Le sport est une super thérapie pour tous les hyperactifs de la pensée ! » Quand Clémentine Bonzom a son cocktail ­préféré, fait d’eau de mer, de vent et d’engagement, elle renoue avec l’ivresse. Et le kitesurf est devenu son flacon, comme une suite logique de ses premiers pas de surfeuse. Entre l’apprentissage des rudiments du kite avec son meilleur ami et son accession au statut de star hexagonale de la discipline, six ans seulement se sont écoulés. Elle a fait du freestyle son art parce que c’est, pour elle, « la discipline la plus impressionnante, la plus engagée, la plus stylée, celle qui [la] fait vibrer. C’est à la fois technique, physique, tout en permettant à chacun d’y ajouter sa touche. » Elle a aussi, « par hasard » dit-elle, pris un départ lors d’une étape des Championnats du monde, le PKRA (Professional Kiteboard Riders Association, le circuit mondial de kitesurf), au Brésil en septembre 2011, où elle a terminé sur la troisième marche du podium. Malgré une « beigne » phénoménale en Grèce la même année (elle est retombée tête la première sur sa planche), la Montpelliéraine s’acharne, insiste, progresse. Même si, depuis, une pointe de trouille accompagne chacune de ses sorties. « Maintenant, et avec l’âge, les choses se corsent, avoue-t-elle. Parfois, je me dis “Mon Dieu, je sens que je vais me tuer”, et puis je chasse cette idée de mon esprit le plus vite possible parce que, sinon, tu n’es plus bon à rien. » Cette année, Clémentine Bonzom a indéniablement passé un nouveau cap. Troisième des Championnats de France l’an passé, 7e du classement général PKRA 2012 en freestyle et première Française, elle a entamé 2013 sur des bases encore plus élevées, avec un joli mois de mai qui l’a vue finir 2e du Slider Party, à Port-Barcarès, et 1re du Air Wake Content au Canet-en-Roussillon. En mars dernier, elle a rejoint le pôle France qui lui apporte un entraîneur, Loïc



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Magicien en boîte à bord de son singulier camion, l’Américain Ian Ruhter est un photographe à l’Œil rare. ce magicien dose. Texte : Caroline Ryder  Photos : Shaun Roberts

Génie. Ian Ruhter à bord de son camion de livraison devenu une sorte d’appareil photo géant.

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Nous sommes en 1860. Le photographe américain Carleton Watkins entreprend de réaliser des photos du parc Yosemite sur d’immenses négatifs (46 × 56 cm). Ce travail achève de convaincre Abraham Lincoln. Le président des jeunes ÉtatsUnis signe dans la foulée, en 1864, le projet de loi conférant au Yosemite un statut de parc national. Une première. Un siècle plus tard, quasiment au même endroit, Ansel Adams fait de la photographie environnementale un art en bluffant le monde avec ses clichés désormais mythiques du Half Dome, le fameux sommet rocheux à l’est du parc californien. Ian Ruhter marche sur les traces de ces deux pionniers. Il arpente le massif granitique armé d’un appareil photo d’un tout nouveau genre, grand comme un camion. D’ailleurs, c’est un camion. « Je suis sûr que c’est le plus gros appareil photo jamais aperçu dans le Yosemite », s’amuse Steve... Yosemite. ça ne s’invente pas. Yosemite est un vidéaste et photographe, passionné par le travail de Ruhter et par son curieux engin, qui utilise une lentille de la taille d’un ballon de plage pour capter des images plaquées sur des grandes feuilles d’aluminium humidifié. Ce procédé entraîne une irisation et des impressions couleur argent très finement ciselées. L’appareil de Ruhter est une ­extrapolation de celui dont se servait Watkins. Il utilise la même technique ­ancienne et très exigeante du collodion 47



humide. « À ceci près que Watkins produisait des négatifs et Ruhter fait des positifs », précise Steve. « Je veux obtenir des choses qui ont le caractère de l’exceptionnel, souligne Ruhter, surtout dans un monde sans personnalité où tout est produit en série. » Ian Ruhter peut dérouter son interlocuteur. Lorsqu’on lui demande à quelle heure il compte faire ses premiers clichés le lendemain matin, il répond : « Entre midi, et midi et quart. Ou deux heures, deux heures et demie. Ou cinq et six. Vous pouvez vous pointer à l’heure que vous voulez, je ne suis pas certain d’être là. » Un gloussement, à sa gauche. C’est son protégé, l’Américain Will Eichelberger, 23 ans. Il a rencontré Ruhter il y a deux ans, peu après la mort de son père. Il s’est assis dans le camion en s’écriant qu’il voulait prendre la route avec lui pour embrasser le fameux American Dream Project, sorte de voyage initiatique. Depuis, Eichelberger s’est fait tatouer le camion sur le bras gauche. Le clan compte aussi Lane Power, la vingtaine également, à la fois photographe et soudeur. Il a donné un bon coup de main au patron lorsqu’il a fallu changer la vocation du camion de livraison, racheté deux ans auparavant à Los Angeles. Des trois larrons, Lane est le plus simple à comprendre. Il fait même office de traducteur de la pensée des deux autres. Originaire de la ville californienne de South Lake Tahoe, non loin des sommets de la Sierra Nevada, Ruhter était snow-

photos additionnelles : Ian Ruther (2)

« Je veux obtenir des choses qui ont le caractère de l’exceptionnel. Surtout dans un monde où tout est produit en série »

Filiation. Dans la lignée de Carleton Watkins et d’Ansel Adams, Ruhter crée des photos du parc national de Yosemite, en Californie.

boardeur pro avant de prendre sa retraite à 26 ans et de se mettre à la photo. Il possédait déjà un vieux Nikon 35 mm, un reflex argentique, cadeau de sa tante. Au collège, il se familiarise avec la pratique de la photo tout en prenant un boulot à temps partiel dans un casino local pour se payer un nouvel appareil. Il déménage ensuite à Los Angeles et entame une carrière prometteuse de photographe de presse et de pub. Mais il n’aime pas travailler en numérique et déteste la retouche. Il abhorre déjà son métier. Il plaque alors Los Angeles, direction le lac Tahoe où il investit ses menues économies dans l’achat d’un camion bleu pâle. Depuis, il est heureux. « J’ai entendu parler d’un mec qui était en train de construire un appareil photo géant près du lac Tahoe, raconte Power. Pour moi, Ian est un peu le magicien d’Oz, l’homme qui fait des tours derrière le rideau. Je n’arrêtais pas de lui demander de me laisser l’aider. Il a fini par céder. »

En septembre 2011, Lane Power part pour la première fois à l’aventure avec Ruhter. Le photographe s’attaque à une ancienne carrière de bronze du Nevada et, pour la première fois, il va réussir à capturer une image à sa façon. « Je n’avais jamais vu de plaque humide jusqu’alors, se souvient Power. J’étais subjugué par ces reflets argentés et la technique de ­travail. » Le but de tout ça ? « Faire ce que nous voulons, quand nous le voulons », ajoute-t-il en haussant les épaules. Peu après, Power, Ruhter et Eichelberger entament leur périple. Power tourne des images pour une série de documentaires, dont le remarquable Silver & Light qui a largement contribué à façonner la notoriété de Ruhter, devenu « l’homme à l’appareil photo dingue », une sorte de Henry David Thoreau – le célèbre naturaliste-­essayiste américain – des temps modernes. Sa notoriété commence à gonfler aux États-Unis. Le rejet du ­numérique par Ruhter est discutable. Il a un compte Instagram, un iPhone, un profil Facebook... « Viens par là ! » La journée a commencé, Ruhter invite à pénétrer dans le camion, puis il tire la bâche sur lui. À l’intérieur, il fait nuit noire, à l’exception d’un rai de lumière qui vient se poser sur une plaque. L’image est inversée, fantomatique. On devine les chutes du Yosemite dont Cook’s Meadow, la plus célèbre, qui coule à l’envers en temps réel. L’image en noir et blanc est incroyablement précise. La scène est hypnotique, plus belle encore que la réalité. Comment est-ce possible, d’ailleurs ? « Parce que nous créons », assène Ruhter. Pour ce presque quadragénaire, gravement dyslexique, la photo est le seul moyen de s’exprimer clairement et en confiance. « Mes photos sont ma voix. C’est ainsi que je montre aux gens ce que je pense, ce que je ressens. » Ruhter décale la plaque, vers l’avant, vers l’arrière, cherche la bonne focale. « Nous sommes l’appareil photo, nous sommes les engrenages de l’appareil. C’est cool, non ? » Lorsqu’il se sent prêt à faire un cliché – il préfère le verbe faire à prendre –, il verse du nitrate d’argent sur la plaque. C’est ce procédé qui rend la plaque photosensible et lui confère cette impression étrange. Plus tard, pour fêter l’acte accompli, il s’installe sur un surplomb rocheux, tend son iPhone à l’un de ses assistants à qui il demande de faire une photo de lui, debout sur le rocher. Quelques instants plus tard, le cliché ­numérique est partagé sur Instagram. « C’est bien comme ça que ça se passe ­aujourd’hui, non ? » Plus sur @ianruhter

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Cave men Cinq fous de skate ont troqué leurs planches contre une bétonnière et ont élu domicile dans une cave. Le temps de créer de leurs propres mains un s­ katepark sans précédent. Revue de chantier à Vienne, en Autriche.

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ne zone résidentielle, calme et coquette, comme il en existe tant à la périphérie des grandes villes européennes. Sauf qu’ici, le cœur de Vienne bat son plein. La capitale autrichienne sort de la torpeur de l’hiver 2011. Les Viennois affûtent leur ligne dans les nombreux parcs de la ville. Le printemps approche. Certains n’ont rien trouvé de mieux qu’une cave pour ressentir un semblant de fraîcheur. L’hiver semble déjà leur manquer. Il n’est pas question ici d’un 50

Texte : Mike Mandl

Photos : Philipp Schuster

Beaux restes. Johannes Wahl en plein backside.


Sous-sol. Ils étaient cinq, dont Elias ­Assmuth, à ­transformer cet ancien entrepôt de ­charbon, situé en plein centreville de Vienne, en skatepark.


Forçats. 800 mètres d’acier à béton ont été ­utilisés. La découpe, ­l’ajustement et la fixation ont pris plusieurs jours et coûté un bras. La mise en forme a requis une ­précision extrême pour gommer la moindre ­aspérité. Assmuth est à la truelle (ci-dessus). Concave. Six mois ont ­espacé les travaux de gros œuvre de la première ligne. L’Autrichien Frido Fiebinger en action lors d’un fingerflip to tail (en bas, à droite). Depuis, cette cave unique est déjà légendaire dans le ­petit monde du skateboard (ci-contre).


Des tonnes de ciment et de gravier, des barres d’armature, de l’acier à béton, du fil métallique, du bois, une bétonnière, des outils... ­ anal vide-greniers ou de ce genre d’émisb sions de déco qui sévit à tort et à travers sur le petit écran. Non, place aux fondus de la rampe, ces dingues de la glisse sur quatre roues reliées entre elles par une planche en bois propice aux rêves d’ados. Le skate, c’est comme le handball. Sauf qu’ici, le préau fait place à une cave. L’immeuble est quelconque. En face, une école maternelle et des cris de joie se propagent. Des pots de fleurs et des ­vélos ­garés dans la cour intérieure ornent un jardin. Un étroit passage mène à l’ancienne cave voûtée. Une odeur de moisissure se fait sentir peu à peu. La ­lumière est rare. Soudain, une hallucinante pool de ­béton montre ses dents, au milieu d’un ­espace unique dessiné pour le skateboard. Comme par magie. Philipp Schuster, un fan de cette discipline, a grandi à deux pas d’ici. Il exauce son rêve. La réalisation d’une pool enfouie, secrète. Impressionnante. Les hivers peuvent être longs en Europe centrale. C’est bon pour le grand cirque blanc, mais mauvais pour le skate. Tout le monde ne peut pas partir à l’étranger détendre ses muscles au ­soleil. Philipp Schuster, lui, vit du skate. Rien n’est plus important à ses yeux qu’un confortable pied-à-terre où « glander avec ses potes, faire du skate et se nourrir l’âme est la base ».

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ohannes Wahl a 25 ans de skate derrière lui. Ici, ­l’Autrichien est sur les lieux du crime. C’est à lui que Schuster doit la découverte de cet ancien entrepôt de charbon aujourd’hui métamorphosé en rampe de lancement. Passé dans l’ombre, Wahl filmera les exploits de ses acolytes. L’Autrichien est désormais un réalisateur respecté dans le milieu : « Ce que je préfère filmer demeure le skate ! »

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« Il faut un maximum de vitesse pour passer au-dessus du trou qui sert à la fois d’entrée et de sortie » Cinq mètres de large, dix de long et sept de haut sont nécessaires pour se ­forger un quartier d’hiver. Au final, une seule solution à adopter : Do It Yourself. La maxime DIY a toujours été la culture de l’amateur. Ou comment créer et développer par ses propres moyens un endroit à soi en faisant preuve d’imagination. Le résultat n’est peut-être pas meilleur qu’une infrastructure achetée, livrée et installée, prête à l’emploi, mais il est bien plus personnalisé. Schuster : « DIY est l’âme du skate, c’était comme ça au début et ça sera toujours le cas. » Flash-back. DIY a ­débuté sur l’eau. Un jour, des surfeurs ont eu l’idée, au cas où l’océan ferait une pause, de dompter les grandes vagues d’asphalte de la houle urbaine avec des roues de patins à roulettes vissées sur une planche en bois. Aussi, les premiers skates ont été fabriqués à la main, bricolés dans des garages de surf. Il n’était alors question que de créativité et de système D. C’est ainsi que les premiers skateparks et halfpipes sont nés après nombre d’étranges dérapages, de grandes envolées ratées et de chutes douloureuses. « Le skate s’est toujours retapé tout seul dans tous les sens du terme, explique Schuster. Cela fait d’ailleurs partie de sa culture.

Tout comme l’urgente envie de se relever après un trick raté et de recommencer sur-le-champ. » Tout l’hiver, le groupe d’amis rassemble ses premières idées pour la mise au point d’une cave à skate sensationnelle. « Quitte à investir, il faut que ça en vaille vraiment le coup. On ne va pas faire les choses à moitié, ce n’est pas notre style. Mais c’est sûr, ça reste une terre inconnue », précise Philipp Schuster. Pourquoi ne pas construire une pool de skate en béton ? Ou une pool démentielle, polyvalente, en dur ? Les possibilités d’agencer un rectangle avec créativité sont innombrables, surtout lorsqu’un

Quintette. Elias Assmuth, Johannes Wahl, Philipp Schuster, Matthew Collins et Frido Fiebinger (de haut en bas et de gauche à droite). Les cinq skateurs ­mondialement connus ont pris la tangente. Ils ont bâti une œuvre de choix avec une sacrée imagination.

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concentré d’experts en skateboard venus des quatre coins du monde se penche sur la ­question. Rapidement, Schuster et ses amis arrêtent leurs choix. Des plans sont échafaudés, les dessins prennent forme, il n’y a plus qu’à !

Piscine. Frido ­Fiebinger achève son boulot de ­maçon (à gauche). De prime abord, tête la p ­ remière, ça passe. Mais ­attention à la réception !

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es préparatifs sont douloureux. C’est la plus longue phase de travail. Il faut réfléchir, savoir par où commencer et réduire la marge d’erreur. Car, ensuite, il sera trop tard et ça ne pardonne pas. « D’un trou difficile d’accès, nous devons déblayer des dizaines de mètres cubes de gravats. C’est un sacré boulot », rembobine Schuster. Il leur faut dix jours pour vider la cave. Ce n’est qu’un début. Après un été en plein air, le groupe reprend ses travaux souterrains à l’automne 2012. Des tonnes de ciment et de gravier, des barres d’armature et de l’acier à béton, du fil métallique, du bois, une bétonnière et des outils sont ­nécessaires. Mais, surtout, de la motivation et de l’huile de coude. « Sinon, tu ne peux pas descendre la bétonnière deux étages sous terre », se rappelle Schuster à l’évocation de ces heures sombres. Avant d’ajouter : « Tous nous ont dit qu’il s’agissait d’un projet de folie. » Les cinq comparses travaillent des journées entières, quatorze heures durant. Souvent, en se relayant. Ils doivent penser à tout : du drainage de la pool aux temps de durcissement plus longs du béton, comme la cave est froide et humide. Tout ce travail est usant. Schuster rouvre les portes du chantier : « Après des jours sans voir les rayons du soleil et dans un état de fatigue très avancé, on a brutalement découvert nos propres limites. Surtout que la tolérance aux erreurs est très faible avec le béton. à vrai dire, on rigolait beaucoup moins. » Il faut rogner sur la perfection. Les premiers skateurs ne s’exerçaient-ils pas dans des piscines abandonnées ? « Tu prenais ce qu’il y avait. » Faire du skate, c’est aussi s’adapter, rester ouvert aux ­possibilités. C’est de la création pure et du DIY dans la pratique. Comme pour créer un doorway très raide, suivi par une ­verticale de 70 centimètres, avec un fin surplomb au bout. Schuster : « Il faut un maximum de vitesse pour ­passer au-­ dessus du trou qui sert à la fois d’entrée et de sortie. Mais il y a un coude dans la verticale à l’entrée qui est très ­difficile à prendre et qui fait perdre tout contrôle. » Il est pourtant hors de question d’y retoucher. Où serait alors le challenge ? Plus de skate sur www.redbull.fr

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PHOTO : Simon Palfrader

Cigarette. Fendi Racing participe au Championnat du monde ­Offshore. Ici, à Istanbul. ça bosse fort !


dompteurs

d’Écume À Istanbul, en juin dernier, les meilleurs pilotes offshore n’ont pas fait de vagues. L’Union Internationale Motonautique promeut de toutes pièces un championnat du monde pour milliardaires. The Red Bulletin a enfilé ses gants et sorti son périscope. Texte : Noel Ebdon

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Décor. Les hors-bords tracent en ligne droite juste après le départ. Belle gifle à la ­surface de l’eau. Vitesse maxi ? 237 km/h !

quatre étapes, huit courses, neuf équipes de six pays différents


PHOTOs : Raffaello Bastiani, Philipp Horak

a nuit tombe sur cette première journée de compétition. Les stands sont encore très actifs. Mécaniciens et équipiers s’affairent, les uns portant des pièces de rechange auprès de ces furieux monstres, les autres ramenant celles qui, pour avoir trop servies, ont besoin d’être nettoyées du sel de mer qui les souille. Les plus usées jonchent le sol. Leur dernier refuge avant la poubelle. Un homme surgit pour nettoyer la zone technique. Ici, tout ressemble à s’y méprendre au monde de la Formule 1. On cause là de hors-bords qui glissent sur le bleu des mers à des vitesses à trois chiffres. Moins de 12 heures avant la deuxième course de l’Offshore Powerboat Grand Prix IUM disputé dans les eaux d’Istanbul, les deux moteurs du bateau Victory 3 n’ont pas ­encore été repositionnés. Plus tôt dans la journée, ils ont été endommagés lors des tours enchaînés par Arif Saif Al Zaffain et Mohammed Al Marri, le tandem de ­pilotes de cette équipe de Dubaï. « Ce sont des choses qui arrivent, concède Al Zaffain. Tout va bien, tout roule, même si Mohammed a pris un coup sur la tête. Nous serons de retour pour la deuxième course, s’ils parviennent à fixer les moteurs ! » C’est bien dans la zone technique qu’on bosse le plus. Surtout en Class 1, la plus élevée des divisions du Powerboat, où l’on retrouve des équipes très organisées, qui s’animent autour des camions de livraison et s’agitent aux couleurs de leur uniforme respectif. Aucune loge ne donne

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Gâchis. Abu Dhabi n’est pas au mieux. Un membre d’équipage ­ressre le harnais de sécurité de ­Giovanni Carpitella, pilote de ­Fendi 10 (en haut à gauche). Un V12 8,2 l de Fendi Racing (ci-contre à gauche). Contrôle technique ­réussi pour ­Victory 3 (en bas).

Soit le bateau dérape et décroche de sa trajectoire, sur les stands. Le seul à disposer d’une vue plongeante sur l’activité qui grouille sous ses pieds est le grutier, haut perché sur son engin. Il se serait bien vu chez lui, à cette heure, plutôt que planté là au milieu de la nuit. La coque de Victory 3 a bien résisté au choc à grande vitesse avec la surface de l’eau. Il y a un peu de tôle froissée malgré tout. Aussi, les deux moteurs sont à reconstruire. Alors que tout ce qui a survécu au retournement doit subir un bon coup de lifting. Surtout que l’eau de mer, corrosive pour les mécaniques, s’y est infiltrée. De l’autre côté, chez Fendi Racing, tout va bien. Un mécano vient de se poser sur une chaise de camping, une bière fraîche à la main. Le bijou sur lequel il veille est fin prêt pour le lendemain. Réglé, nettoyé, rangé et astiqué comme il se doit. Toujours pimpant. Pas de triomphalisme pour autant. L’homme sait que, quand la mer décide de secouer un bateau et choisit de faire des victimes, elle frappe au hasard. À pleine vitesse, l’eau est dure comme du béton et, une fois l’embarcation détruite, elle ten60

tera de noyer les survivants. Le ­second bateau de Fendi Racing a pris la 3e place de la course inaugurale. Ses équipes s’offrent une petite mousse réconfortante en jetant un œil sur la ruche Victory. Sous les lampes posées à la hâte, des nuées de papillons de nuit bruissent et crépitent, les mécaniciens s’agitent. Un ingénieur se laisse tomber dans le cockpit pour tester l’électronique embarquée. « Nous pouvons télécharger toutes les données du moteur sur un portable, pour savoir où nous avons été lents et ce qu’ont fait les moteurs, raconte Stephen Phillips, l’ingénieur électronicien de l’équipe Victory. Nous pouvons le faire seulement

Un sport confidentiel dont le seul sésame est l’argent

avant ou après les courses, car ils ont interdit la télémétrie instantanée il y a quelques années, pour réduire les coûts. » À l’intérieur de l’habitacle, l’humidité et la sueur règnent en maîtresses de cérémonie. Les sièges sont très rapprochés, seule une barre centrale structurelle les sépare. Celui du pilote est à droite. Dans la coque, à l’avant et à côté de chaque siège, s’étire une fenêtre étroite comme une fente. D’où l’impression persistante d’être dans un char d’assaut, plus que dans un bateau de course. Les outils de contrôle sont deux écrans pour les informations GPS, quelques commutateurs, un volant typique de voiture de course et deux manettes à main. Rien d’inutile. C’est le genre d’engin à bord duquel on n’a pas envie de s’éterniser. Le Powerboat bénéficie d’une image glamour, celle d’un sport sexy dans lequel des pilotes téméraires défient l’extrême dangerosité de la mer à des vitesses hallucinantes. La prise de risques est énorme. Ce qui est sûr, c’est que les courses offshore ne sont pas un jeu d’enfants. La plupart des concurrents ont au moins the red bulletin


PHOTOs : Philipp Horak (3), Raffaello Bastiani

soit il se laisse embarquer par une vague et se retourne

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quarante ans. Tous sont galvanisés par le plaisir de jouer avec le feu. La renommée d’un champion reste confidentielle et les récompenses plutôt chiches. Certaines équipes sont la danseuse d’hommes fortunés, d’autres sont soutenues par des ­offices de tourisme nationaux. Les horsbords affichent une vitesse maximale de 128 nœuds (237 km/h) pendant que la coque reste hors de l’eau la majeure partie de la course. L’équation à résoudre ? Trop peu d’énergie et le bolide reste scotché à la surface, ou trop de chevaux et il se cabre puis bascule en arrière avec les conséquences parfois dramatiques que cela peut engendrer. « Garder le bateau sur sa quille est un exercice de haute voltige, assure Ragesh Elayadeth, le manager de l’équipe Victory. Trouver le dosage parfait est synonyme de victoire. » La puissance est contrôlée par le throttleman (littéralement, l’homme qui a le pied sur l’accélérateur). Il se sert des deux manettes. Ces dernières sont connectées à des câbles qui serpentent sous le cockpit et qui, à leur tour, sont reliés aux deux énormes 61


Le Powerboat est un u­ nivers marin codifié, très risqué et t­ otalement élitiste


Swell. Disputée au plus près des côtes, cette discipline offre un point de vue unique au spectateur. Victory 3 rugit en vainqueur (ci-dessous).

PHOTOs : Simon Palfrader, Philipp Horak, Raffaello Bastiani

Le Powerboat est l’un des sports mécaniques les plus dangereux au monde. ­Depuis 1972, vingt-cinq pilotes en sont morts. Dans le même temps, la Formule 1 a tué seize pilotes.

moteurs V12 cachés sous le pont arrière du hors-bord. Chacun est capable de ­générer 850 chevaux. L’autre équipier ­pilote. Il est chargé d’amorcer le virage ­serré, et, en jouant avec les moteurs, le throttleman achève la manœuvre. Si les deux experts ne sont pas parfaitement synchro, le bateau peut se faire secouer et sortir brutalement de sa trajectoire. Ou se laisser embarquer par une vague et se retourner. Dimanche. Pour la deuxième course du Grand Prix IUM d’Istanbul, le ciel est dégagé. Il fait chaud. Dix minutes avant le départ, les pilotes endossent leur gilet de sauvetage et s’introduisent dans le cockpit. Les trappes sont verrouillées. Les démarreurs rugissent, les moteurs se mettent en route. Le hors-bord est ainsi fait que, en cas d’accident, l’habitacle reste intact et protège ses occupants. Mais, il y a toujours un décalage entre le scénario mis en place par les tacticiens de chaque équipe et la réalité de la course. the red bulletin

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n file indienne derrière le bateau de sécurité, les ­embarcations prennent position face au port de plaisance, à bas régime. Il n’y a pas, ici, d’explosion typique, sur la grille de ­départ, comme en F1. Le ­rugissement des bateaux à moteur est plus proche du feulement d’une turbine. Quand le drapeau s’abaisse, le vrombissement se fait plus puissant. La fente qui tient lieu de pare-brise donne aux bateaux un air antipathique. Aux premiers instants, dans le clapotis, les hors-bords semblent bondir de vague en vague. ­Victory 3 pète la forme, contrairement à ses mécanos qui scrutent fébriles le premier élan. Après quelques tours, le bateau de l’équipe dubaïote se retourne spectaculairement et repose déjà cul par-dessus tête, au milieu du bleu du Bosphore. Plus de peur que de mal. L’équipage est indemne. Le binôme s’extirpe péniblement de l’engin par la trappe de secours. Les drapeaux rouges sont de sortie. La course est arrêtée. « Ça va, on n’a rien. » Ce sera le seul commentaire lâché par Faleh Al Man-

souri à son retour au village de course. Se retourner est une façon comme une autre de disperser un million de dollars au fond de l’océan. Il y a aussi l’enfournement, quand le bateau plante son étrave dans une vague et disparaît sous les eaux. Parfois, le roof peut être brutalement séparé de la coque et le bateau s’ouvre comme une boîte de sardines. Un nouveau départ est donné. Victory 3 prend les commandes et ne les lâchera plus, pour s’emparer au final du classement général du championnat. Vainqueur de la course n°1, Fendi Team prend la 2e place et Hub Team Australia complète le podium. Le Powerboat est un événement majeur, mais inconscient et élitiste. L’argent en est le sésame, et c’est sans doute pour cela qu’il restera à jamais un sport confidentiel. C’est aussi ce qui le rend intéressant. Par rapport à la Formule 1, il est plus centré sur la course que sur ce qui gravite autour. Il y a émeute dans le stand de l’équipe dubaïote. On a enlevé le capuchon d’un des moteurs, un mécanicien s’affaire avec une manivelle pour que se déverse une fontaine d’eau salée hors de la chambre de combustion. Un de ses collègues extirpe de la zone de travail un élément de carrosserie, définitivement hors d’usage. « Encore une longue nuit à venir », soupire-t-il. L’ultime manche du championnat se courra à Abu Dhabi les 5 et 6 décembre prochains. Dans l’anonymat. Plus sur www.class-1.com

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Vertical. DiGiulian à l’assaut de Jack of all Trades, voie sudafricaine du massif de Watervall Boven.


étudiante en lettres, Sasha DiGiulian est la nouvelle figure de proue de l’escalade. À 20 ans, la belle Américaine est une formidable bouffée d’air frais pour cette discipline. Portrait sur la corde Red Bulletin.

Hard Roc texte : Ian Macleod p h o t o s   : K e i t h Lad z i n ski

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uste au pied de la falaise de grès qui s’étire depuis la limite de la forêt jusqu’au berceau du soleil dans ce matin d’hiver sud-africain, Sasha DiGiulian claque des mains pour se réchauffer. Le terme « claquer » est un affront à la grâce de la grimpeuse. Elle frotte vivement ses paumes l’une contre l’autre. Aérienne, la championne d’escalade est déjà en mouvement. C’est sa nature et son art de ne jamais rester bien longtemps au même endroit. La réputation de monstre indomptable de Rodan, une voie qui n’a jamais été conquise par une femme, ne la fait pas déroger pas à sa règle. Avancer. Progresser. Le torse en pivot, un repositionnement judicieux du pied droit et une traction tout en maîtrise sur les bras l’aident à se diriger vers le soleil naissant. Elle trouve de nouvelles prises pour ses doigts parfaitement manucurés de rose côté pile, impeccablement hachurés par la roche côté face. Plus jeune, DiGiulian est pratiquement imbattable. Adulte, elle fait preuve de la même autorité depuis son titre de championne du monde 2011 conquis à Arco, en Italie, à l’âge de 18 ans. Elle est également détentrice de trois titres de championne des états-Unis et est considérée comme chef de file des grimpeuses outdoor. Mais, là où la jeune fille se révèle éblouissante, c’est loin des compétitions, dans la pureté des blocs en plein air. Libre. La native de Virginie a apprivoisé la voie Pure Imagination, dans les gorges de la Red River, dans le Kentucky, en octobre 2011. Sasha DiGiulian devient ainsi la troisième femme au monde – la première Américaine et aussi la plus jeune – à escalader une voie de niveau 9a. 66

« Je ne sais pas vraiment de quoi je suis capable, sourit-elle malicieusement. Je vais tout faire pour le découvrir un jour. » à la même époque, l’an dernier, l’étudiante programme de belles vacances estivales. Elle entend parler d’un massif rocheux fort réputé, à 330 kilomètres à l’est de Johannesburg, près de la ville de Waterwal Boven (« au-dessus de la cascade » en afrikaans). « On y trouve beaucoup de falaises particulièrement larges et des failles. Le jeu de jambes est très technique. Et je n’ai jamais utilisé autant de pincettes que là-bas, ces minuscules aspérités qu’on travaille du bout des doigts.» Encore quelques instants d’efforts sur la voie brun-orangé lui permettent de poser le pied sur une plate-forme intermédiaire. Après treize années d’entraînement et de compétitions, cette attaque de voie dans Rodan tient presque de la routine. Son petit gabarit (1,57 m) s’est hissé jusque-là avec agilité. Comme nombre d’enfants élevés à Alexandria, en Virginie, DiGiulian était une touche-àtout sportive : natation, tennis et football, le soccer aux US, très à la mode chez les filles. Mais c’est une de ses autres activités qui l’a poussée vers sa discipline de

Vertige. Parmi les nombreuses voies où DiGiulian a réalisé une première mondiale féminine, on note Bellavista, interminable falaise dans les Dolomites italiennes, où certains passages sont frappés d’un 8c. Le site de Pure Imagination, dans les gorges de la Red River, affiche un 9a (à droite).


«Je ne sais pas vraiment ce dont je suis capable. Je vais tout faire pour le découvrir un jour »


Accro. Pendant ses vacances, DiGiulian se rend en Afrique du Sud pour tenter plusieurs premières.

prédilection. « Au moment où j’ai pris mes premiers cours d’escalade, je faisais aussi du patinage artistique à un bon niveau. Pour répéter certains sauts hautement périlleux, on portait un baudrier, se souvient-elle. Et, à chaque fois que je le mettais sur la glace, je pensais escalade. C’était déjà devenu une idée fixe. » Alors que le soleil sud-africain se décide à chauffer le palier où elle vient de se poser, DiGiulian s’accorde encore quelques instants de repos, à peine de quoi détendre ses muscles. Elle profite de la vue. Non loin d’elle, Arjan de Kock, un grimpeur sud-africain de classe internationale, est à la fois son hôte et son partenaire d’entraînement. Ils se rencontrent en Espagne, alors qu’elle vient de fêter son seizième anniversaire. C’était en 2009. « Je l’ai vue réussir des ascensions vraiment difficiles. Mais, surtout, Sasha est une personne pondérée, sérieuse et réfléchie qui aborde la vie de manière intuitive et spirituelle. Elle a cette confiance chevillée au corps qui l’encourage à toujours repousser ses limites en escalade. Et son côté passionné 68

lui permet de partager son art avec un tout nouveau public. » De Kock ne tarit pas d’éloges sur sa protégée. Après une année sabbatique consacrée aux voyages et à l’escalade, DiGiulian est admise à l’université de Columbia, à New York, où elle suit un cursus de création littéraire en parallèle à son entraînement. « Je me vois bien pratiquer l’escalade toute ma vie, mais le marketing sportif m’intéresse beaucoup aussi. Je suis certaine qu’un jour, je finirai par exercer une activité lucrative dans ce domaine. » Pour l’instant, privilège de son jeune âge, l’Américaine jongle en permanence entre ses multiples activités. À la ville, DiGiulian fait du vélo et de la course à pied pour entretenir le foncier. Cinq jours par semaine, elle se rend au mur indoor du Chelsea Pier, à Manhattan. Lorsque son programme d’études le lui permet, elle participe également à des compétitions. Son inclination pour l’escalade ne semble pas avoir encore vampirisé sa vie. Sa colocatrice, Ariana Dickey, confirme : « Sasha trouve autant de temps que n’importe quelle autre

Boulimique. à New York, DiGiulian s’entraîne sur le mur indoor du Chelsea Pier. Elle fait aussi du vélo et de la course à pied. the red bulletin


« On défie la gravité et la peur. C’est une forme nouvelle de rébellion »

étudiante pour s’accorder des plages de repos et se faire faire plaisir. » Pour l’heure, en équilibre sur cet éperon rocheux, perchée sur un massif proche des frontières mozambicaine et swazie, DiGiulian semble bien loin de la frénésie new-yorkaise. Elle a une tout autre préoccupation en tête. Si Rodan n’a jamais été conquis par une femme, il y a sans doute une bonne explication. Un petit gabarit, comme le sien, c’est idéal pour maîtriser une grande quantité de mouvements. Mais c’est un handicap certain sur les voies qui se grimpent en force. Même ce costaud d’Arjan de Kock en a bavé un peu plus tôt dans la journée. Après plusieurs essais, la grimpeuse se casse les dents sur la difficulté. Et la voilà suspendue dans les airs, dix mètres audessus d’un chemin rocailleux. Aux troisquarts assise dans son baudrier, maintenue par la corde, elle pendule audessus du vide. Une araignée au bout du fil. Gracieuse. Cette fois, Rodan ne s’est pas laissé dompter, mais DiGiulian a déjà en tête une autre paroi repérée plus tôt non loin d’ici. Pas question de renoncer. Au cours de la randonnée matinale, elle avait aperçu le site. Intimidant. « Il n’y avait pas

de marque de craie. La roche saillante ne demandait qu’à être escaladée », glisse-telle avec une délectation évidente. Elle se renseigne auprès des locaux. De son côté, de Kock apprend qu’une équipe s’est déjà lancée à l’assaut de cette voie en 2008. Un tracé baptisé Overlord. La tentative échoue. « C’était tellement esthétique que je me suis dit : Pourquoi ne pas essayer ? »

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rois jours plus tard, au bout d’efforts acharnés, de progrès laborieux et de chutes rageantes, la voie s’ouvre enfin. « Je l’ai matée ! », poste DiGiulian sur les réseaux sociaux pour célébrer son succès. Peu après, Arjan de Kock l’imite, devenant le deuxième à dompter Overlord. Les deux amis ont évalué a posteriori sa difficulté à 8c, à peine moins dur que le 9a qui a fait la réputation de DiGiulian dans le Kentucky, mais avec la complexité de la « première » en prime. La tradition de l’escalade veut que le premier qui ouvre une voie bénéficie du privilège de la nommer, à tout jamais. L’Américaine en a profité pour rendre hommage au vieux père de la nation sud-africaine, Nelson Mandela. « J’ai baptisé cette voie Rolihlahla, soit le deuxième prénom de Mandela. C’est un des plus grands hommes de l’Histoire et on arrive à un nouveau moment crucial dans l’histoire de ce pays. » Pour le coup, c’est bien trouvé. Rolihlahla se traduit dans la langue de l’ethnie sud-africain xhosa par « fauteur de troubles ». « J’aime vraiment ce clin d’œil, prolonge DiGiulian. On est là, à subir de grosses et dangereuses chutes. On est aussi des fauteurs de troubles ! Puis on y retourne, on provoque du chahut sur la paroi, on défie la gravité et la peur. C’est une forme nouvelle de rébellion. » Lorsqu’elle quitte la zone, DiGiulian s’arrête, le temps de poser un nouveau regard sur les passages délicats de Rodan, cette voie voisine qu’elle n’a pas réussi à vaincre totalement. « Je ne suis pas sûre d’avoir le temps d’y revenir cette fois-ci. Je le ferai lors d’un prochain voyage. » Un de plus. Quelques jours plus tard, DiGiulian rejoint avec plaisir un autre univers familier de parois, celles d’acier et de verre des gratte-ciel de Manhattan. à des milliers de kilomètres, la montagne attend. DiGiulian a tout son temps. Elle a la vie devant elle. Plus sur www.sasha-digiulian.com

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Peter Madsen et Kristian von Bengtson préparent un ­p rogramme de voyages privés dans l’espace. Le binôme danois vise un premier vol en 2018. Décollage.

Te x t e   : B e r n d H a u s e r 70

Photos : Uffe Weng

photo additionnelle : Bo Tornvig

Sp ce Cowboys


Supersoniques. Peter Madsen (cicontre, à g.) et Kristian von Bengtson. Départ de la fusée HEAT 1X dans la mer Baltique.


« J’ai plus peur de mourir dans une maison de retraite qu’à bord d’une ­f usée que j’aurai fabriquée » Peter Madsen


D

evant lui, sur le ­t ableau de bord, ­P eter Madsen accroche une photo de sa femme Sirid. Un assistant ferme la l­u carne. Madsen fait un ­d ernier signe. ­D écompte. « Trois, deux, un, zéro ! » Les quatre ­m oteurs de la ­f usée se mettent à vrombir.

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Deux cents mille chevaux repoussent Madsen à 4G dans son fauteuil. Quatre fois sa masse corporelle. « Le meilleur moment », lâche-t-il, en plein survol de l’univers, à bord de la fusée qu’il a fabriquée, la HEAT 1 600. Peter Madsen, 42 ans, s’accroche à ces rêveries lorsqu’il passe la nuit sur un matelas posé sous sa table de travail. Après quelques heures de sommeil, il retourne travailler au HAB, le Horizontal Assembly Building, l’ultime projet de l’entreprise Copenhagen Suborbitals, que Madsen a créée en 2008 avec ­Kristian von Bengtson. Quand le rêve deviendra-t-il réalité ? Dans cinq ans ? Probablement. Le centre spatial HAB est un hangar sans fioriture aux abords d’un chantier naval désaffecté, dans la ­périphérie de Copenhague. Ici, Peter Madsen fraise, martèle, perce et cogne pour mettre sur pied son rêve. Pourquoi à cet endroit et pas à la NASA ? « Je ne serais qu’une minuscule roue dentée dans un énorme moteur. Chez Copenhagen Suborbitals, c’est moi qui décide. Je peux construire une fusée de A à Z. Je peux concevoir et développer une idée abstraite puis retourner aux travaux de soudure. C’est ce que j’aime ! » Kristian von Bengtson, 39 ans, architecte aérospatial, ­travaillait pour la NASA et a fini par claquer la porte, i­ rrité que ses projets finissent à la poubelle. C’est lui qui a conçu l’aménagement intérieur d’engins spatiaux de Constellation, un programme de voyages sur la Lune. Depuis abandonné par Barack Obama. Au moment même où von Bengtson en a marre des ­présentations PowerPoint et des projets purement théoriques, il lit dans un journal que Peter Madsen a fabriqué le plus grand sous-marin privé du Têtus. monde, et ­projette « d’envoyer En 2008, ­ Madsen et une fusée dans l­ ’espace avec ­von B ­ engtson lui comme co­baye à bord ». créent la firme Von Bengtson est intéressé. ­Copenhagen Il rencontre Madsen dans son ­Suborbitals. appartement de l’époque : Croquis de la le Nautilus, le sous-marin ­conception des sièges (ci-contre). de 34 tonnes de Madsen. 73


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« Nous faisons tous les jours ce que nous avons réellement envie de faire » Peter Madsen

Credit:

Von Bengtson est sûr de lui. S’il veut réaliser son rêve spatial, ce sera avec Madsen. Ils discutent, dessinent les plans. ­Madsen devra créer une fusée ­capable de se projeter à cent kilomètres d’altitude alors que von Bengtson sera chargé de la survie de Madsen. Comme ils planifient un vol suborbital, un voyage p ­ arabolique de quinze minutes dans l’univers, leur programme spatial s’intitule Copenhagen ­Suborbitals. Les premières tâches sont clairement ­réparties. Madsen est responsable de la construction


de la ­fusée, et von Bengtson est en charge de la capsule et des parachutes. Ils commencent par se rendre au ­négoce de matériaux de construction pour se procurer de la tôle et des plaques de liège. Car « le liège est fantastique pour se protéger de la chaleur, explique von ­Bengtson. Il résiste à plus de 1 000 °C. » En juin 2010, le sous-marin Nautilus transporte sur la mer Baltique une première plateforme de lancement, nommée Spoutnik. Celle-ci abrite la HEAT 1X, la p ­ remière fusée de Copenhagen Suborbitals, neuf mètres de long pour deux tonnes. Elle doit atteindre une altitude de seize kilomètres. À ­ icro-vaisseau spatial, le mannequin l’extrémité du m Rescue Randy regarde, les yeux grands ouverts à travers la bulle en plexiglas. Une fois la fusée éteinte, ce dernier doit a ­ tterrir en parachute à la surface de l’eau. Sain et sauf. L’unité de propulsion se compose de 500 litres d’oxygène liquide, introduits dans un réservoir de 500 kilos en caoutchouc spécial, où ils seront mis à feu. Les caméras de la presse nationale et internationale sont prêtes à bord des deux bateaux accompagnateurs. « ... Trois, deux, un, zéro ! » Il ne se passe rien. La fusée ne bouge pas. L’oxygène liquide congelé à − 183 °C a gelé une valve. Le sèche-­cheveux, acheté dix euros au supermarché qui devait maintenir la valve ouverte, s’est détaché de la batterie. Les deux hommes de l’espace ne sont pas seulement confrontés aux moqueries des vols tests ratés. Des fonds leur sont versés par quelques particuliers. Les entreprises leur fournissent de l’acier, des outils et du carburant pour d’autres tentatives. Une associaRéflexion. Dans un hangar en tôle, situé dans le port de Copenhague (cicontre et à droite), Madsen travaille son rêve : voler en 2018 dans l’espace. D’ici là, le mannequin Rescue Randy se charge des tests (en bas).

tion de soutien compte 300 membres, chacun paie une cotisation mensuelle de treize euros. Madsen met en ligne les avancements de son projet sur le site ­d’Ingeniøren, un hebdomadaire technique danois. Les lecteurs donnent des recommandations. De plus en plus de spécialistes, prêts à collaborer gratuitement, rejoignent le HAB.

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été suivant, en 2011, la rampe de lancement assemblée et soudée à partir de rails jette à nouveau l’ancre dans la mer Baltique. Deuxième tentative avec la HEAT 1X. 25 000 lecteurs d’Ingeniøren suivent l’événement sur la page d’accueil. La chaîne télévisée danoise TV2 a envoyé un hélicoptère pour couvrir l’événement en direct. Au second ­essai, le moteur se lance, les spectateurs voient la flamme, la fusée est propulsée vers le ciel. « We go supersonic », lance l­ aconiquement Madsen, posé sur la mer Baltique. Au même moment, c’est la présentation publique au planétarium de ­Copenhague. Les assistants ne tiennent plus en place. Cris de joie, applaudissements, poings levés. Puis soudain, l’objet volant s’embrase comme un feu d’artifice, ­n’atteint que 2,8 kilomètres de hauteur au lieu des seize prévus. Les parachutes du micro-vaisseau spatial ne s’ouvrent pas correctement, le Rescue Randy amerrit dans sa micro-capsule spatiale, à ­vitesse maximale. Lorsque l’équipe remonte le tube d’acier, il est plein de bosses. Un cosmonaute n’aurait pas survécu à un tel choc. Ce jour-là, il n’y a a ­ ucune moquerie. D’ailleurs, la confiance grimpe, l’association de soutien compte 450 membres. Mais pourquoi la fusée n’a-telle pas fonctionné lors du premier décompte ? « Il s’agit probablement d’un contact électrique qui s’est détaché », selon von Bengtson. Au cours de l’été 2012, von Bengtson et Madsen testent un siège éjectable pour une nouvelle capsule spatiale, en forme de cône tronqué. Un an plus tard, en juin dernier, ils font une nouvelle découverte, décisive. La fusée roulante HEAT 1X a montré que les fusées ont besoin d’un pilotage actif. Sapphire, la nouvelle fusée de 75


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oute sa vie durant, Madsen n’a ­jamais eu peur du ­ridicule. Fonder un théâtre, parcourir le monde. Il s’est lancé beaucoup de défis. Il est la preuve vivante que la peur de l’échec n’empêche pas d’agir. « Nous ne f­ aisons rien qui serait risqué, que ce soit économiquement ou personnellement. » Pourtant, Madsen met sa vie en jeu avec ce projet de fusée : « À 40 ans, nombre de personnes se rendent compte qu’elles ont un travail ennuyeux, une maison ennuyeuse, un conjoint ennuyeux. J’essaie de ne pas m’ennuyer. J’ai plus peur de mourir seul et abandonné dans une maison de retraite qu’à bord d’une fusée que j’aurai fabriquée. » Les biens personnels de Madsen tiennent dans deux sacs en plastique. Il a abandonné ses études en machinerie et diverses autres formations. Avant d’épouser Sirid et de s’installer chez elle, une fois une capsule spatiale tatouée sur son avant-bras. Madsen n’a jamais été carriériste. Il a toujours voulu construire des sous-marins, et, avant tout, des fusées « car elles sont mythiques et belles avec leur force ­titanesque ». Lorsqu’il finit le premier de ses trois

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sous-marins et qu’il veut le manœuvrer, beaucoup de gens sont présents sur le quai. Dont des techniciens et ingénieurs. L’un d’eux lui crie : « T’as suivi des cours de soudure ? » Madsen avait répondu : « Oui ! » L’homme, à nouveau : « T’as échoué ? » « Il veut me décourager, me faire mal », déclare Madsen. Depuis, le moqué compte mille plongées en sous-marin à son actif. Madsen et von Bengtson ne vivent pas leur rêve seuls. Bien au contraire. Copenhagen ­Suborbitals compte aujourd’hui quarante assistants et 800 soutiens. Nombreux sont des techniciens et des ingénieurs, qui tous font des compromis pour jongler avec leur boulot au quotidien. « Ce qui nous fait vibrer, c’est la poésie autour de cette mission absurde », glisse Madsen, dans un sourire. Parfois, il ne supporte pas le bruit des travaux et les gens dans le HAB. Alors, il va se promener le long du chantier ­naval. Des fleurs poussent au milieu de l’asphalte éclaté et du béton fissuré. Des insectes volent. Ils bourdonnent comme des machines. Ces abeilles-là ont un gros corps et de petites ailes. Étonnant qu’elles puissent ­voler. Et pourtant… De quoi s’abandonner à un ­heureux présage.

Assemblage. Les ­techniciens hissent les éléments de la ­fusée Sapphire à bord du dispositif de lancement (en haut). Peter Madsen : « Ce qui nous fait vibrer, c’est la ­poésie autour de cette mission absurde. »

Plus sur www.copenhagensuborbitals.com

photo additionnelle : Copenhagen Suborbital

4,5 mètres de long est donc dotée de quatre gouvernails en cuivre sous son propulseur. Pendant de longs mois, un programmateur bénévole du groupe d’aide travaille à la conception d’un logiciel qui ­vérifie la trajectoire de la fusée 500 fois par seconde et la ­corrige en permanence sur les gouvernails. L’équipe réembarque sur la mer Baltique, assistée désormais d’une ancienne vedette de sauvetage allemande transformée en centre de contrôle. ­Madsen écrit sur son blog que l’achat d’un bateau serait ­primordial. En quelques jours seulement, les dons permettent de récolter les 40 000 euros nécessaires. La fusée Sapphire s’envole vers le ciel, parfaitement droite. À peine le temps de dévier que les gouvernails la remettent dans le droit chemin en quelques millièmes de seconde. Elle atteint 8,3 kilomètres de hauteur, à 1 239 km/heure. « Un énorme succès », ­jubile Ingeniøren. À nouveau, les parachutes ne fonctionnent pas et la fusée sombre dans la mer ­Baltique. Et alors ? L’équipe travaillera sur un nouveau dispositif de détachement. Prochain objectif : l’intégration du pilotage actif dans HEAT 2X, une nouvelle fusée de neuf mètres de long, déjà en cours d’ébauche au HAB. D’ici à l’été prochain, elle sera prête au lancement avec son moteur de 200 000 chevaux. La fusée HEAT 2X n’a plus de moteur hybride en caoutchouc spécial. C’est une fusée propulsée par de l’alcool et de l’oxygène liquide. La fusée est un ­modèle 1:3 de la HEAT 1 600 finale, une copie de la V2 de l’Américain Wernher von Braun, le pionnier dans le développement des fusées. Ce monstre que Peter Madsen veut envoyer dans l’espace devrait être propulsé pour la première fois au cours de l’été 2015. D’abord avec le mannequin Rescue Randy à son bord, avant que Madsen lui-même ne prenne place dans la ­capsule en 2018.


« À 40 ans, ­n ombre de ­p ersonnes se rendent compte qu'elles ont un travail, une maison et un conjoint ennuyeux » Kristian von Bengtson

Ignition. Le chemin est long pour Sapphire. La conquête spatiale ne s’est pas faite en un jour.


Mort en plein vol

Quatre ans après son accident, un film rend hommage au C ­ anadien Shane McConkey, figure du ski-basejump. The Red Bulletin a rencontré Sherry, son épouse. Confessions.

Photo : www.carroux.com

Texte : Ann Donahue

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Ailes. à Whistler, entre deux pics canadiens, Shane McConkey et son pote de toujours Miles Daisher s’élancent d’un téléphérique. McConkey a succombé à sa passion. Il avait 39 ans.


« Personne n’osera dire que cet homme n’était pas un père et un mari aimant »

En mars 2009, Shane McConkey se tue accidentellement à 39 ans lors d’un saut en wingsuit dans les Dolomites italiennes. Aujourd’hui, Sherry, son épouse, élève seule Ayla, leur fille âgée de 7 ans. Elle ­réside en Californie, à Squaw Valley, la station de sports d’hiver située sur les rives du lac Tahoe. Professeur de yoga, elle est, à 41 ans, spécialisée dans la rééducation de sportifs victimes d’accidents de ski. Son vrai prénom, Shéhérazade, est un clin d’œil à ses racines perses et à la conteuse des Mille et Une Nuits. À son cou, un collier avec plusieurs pendentifs, dont l’alliance de Shane. L’un d’eux est parcouru par une citation de Léonard De Vinci : « Dès lors que vous aurez goûté au vol, vous marcherez à jamais sur Terre les yeux levés vers le ciel. » Aujourd’hui, après une longue période de deuil, Sherry va mieux. 80

Forcée de se ressaisir pour la petite Ayla et déterminée à témoigner de l’amour de Shane pour sa famille. Comme le montre le film McConkey, émouvant hommage à son mari, champion hors-norme et pionnier du ski-base-jump, qui n’a eu de cesse de repousser ses limites. Jusqu’à l’accident fatal. the red bulletin : Appréhendez-vous la sortie du film dans plusieurs pays ? sherry mcconkey : Ces dernières années ont été difficiles, mais je sais au fond de moi que c’est ce que je désire et ce que Shane aurait souhaité. Je voulais aussi qu’Ayla voie quelque chose d’extraordinaire. Je savais que cela prendrait du temps, que ce serait éprouvant et dur ­moralement. Je n’arrive pas à tourner la page, à avancer. C’est comme un rappel constant. Je le porte sur mon visage. Mais ce n’est pas une mauvaise chose. Je ne l’oublierai jamais, que je le veuille ou non. À la mort de Shane, les réseaux sociaux n’ont pas été tendres avec moi, avec des messages du genre : « Comment peut-il être un bon père ? Comment peut-il prétendre t’aimer et faire ce qu’il fait ? » J’étais impuissante et j’enrageais. Mais lorsque ces gens verront le film, plus ­personne ne pourra dire que cet homme n’était pas un père aimant et un mari merveilleux. Ayla a-t-elle vu le film ? Elle a vu les passages où elle est filmée et ceux de notre mariage. Son nez se contractait de joie pendant que moi ­derrière, je… (elle mime les sanglots). Ce fut difficile pour elle, et laisser couler mes larmes devant Ayla est atroce pour moi. Notre relation est fusionnelle. Quand un enfant voit ses parents pleurer, cela reste gravé. Les parents ne sont pas censés se laisser aller comme ça. Mais l’un de mes amis pense que, parfois, il est bon que Ayla réalise à quel point j’aimais Shane. Alors, avant de voir le film avec elle, je lui ai dit : « Je te préviens, je vais certainement pleurer parce que c’est très douloureux pour moi. Papa me manque. » Je voyais bien que ça la perturbait mais elle a compris. Et après la scène où on la voit, on arrive en Italie. Elle m’a dit : « Est-ce qu’ils montrent comment papa est mort ? » Ce n’est pas le cas, bien sûr, mais regarder défiler sa vie the red bulletin

Photo : Brigitte Sire, Ulrich Grill/Red Bull Content Pool

S

herry McConkey se laisse aller à la confidence. Elle se souvient d’une vieille discussion avec son mari. « En quoi voudrais-tu être réincarné après ta mort ? », lui avaitelle demandé. La réponse avait fusé. « En aigle. » Leur rapace préféré. Il y a déjà plus de quatre ans, Shane s’est envolé pour toujours. Cet automne sort un film qui retrace la vie et la carrière du célèbre ski-base-jumper. Aujourd’hui, Sherry, seule avec leur fille Ayla, tente d’effacer sa peine. Elle sait que Shane a vécu sa passion jusqu’à en mourir. Au-dessus de Squaw Valley, chez elle, plane un aigle. Pour l’éternité.


Hommage. Le film McConkey retrace la vie du ski-base-jumper ­canadien. La première française a eu lieu à ­Annecy le 29 septembre dernier dans le cadre du festival iF3. à gauche, son épouse Sherry.


«  Une spectatrice s’est levée après

jusqu’au moment fatal reste violent. Sur ce point, la discussion avec les réalisateurs a été longue. J’étais angoissée à l’idée qu’ils incluent la scène dans le film, je n’en voyais pas la nécessité. Mais tout a été parfaitement géré. Si ça n’avait tenu qu’à moi, je n’aurais même pas inclus les images du début du saut. Ce sont les derniers moments de sa vie, et voir Shane ainsi me fait mal. Je suis sa femme, je ne peux que détester. Cela dit, c’est beau, le paysage, ce qu’il fait. Son ultime geste est un double flip. Les réalisateurs avaient ma confiance et ils ont gardé ce passage parce qu’ils l’ont jugé nécessaire, mais ils l’ont coupé là où je le voulais. Ils ont respecté ma volonté. Comment s’est passée la première, en avril dernier, au festival du film de Tribeca ? En me rendant à New York j’étais anxieuse. C’était comme aller à un mariage et à un enterrement en même temps. J’avais hâte d’y être pour tourner la page, mais en même temps, je redoutais la fin de ce chapitre. Je craignais aussi que les gens ne voient pas Shane tel que nous le connaissions. J’ai vu le film plusieurs fois, toujours entourée d’amis mais jamais en présence du public, et cela m’effrayait. à chaque fois, j’ai quitté la pièce. C’était 82

trop dur. à Tribeca, j’avais une porte de sortie pas loin, mes amis m’entouraient, et ç’a juste été... géant. Un moment, j’ai regardé autour de moi, probablement en larmes, et j’ai vu que tous les gens pleuraient. Je me suis dit : « Mon Dieu ! Personne ne pourra retenir ses larmes à ce moment du film parce que c’est poignant et majestueux. » Le film sera projeté aux quatre coins de la planète. Assisterez-vous à certaines de ces projections ? Je ne sais pas combien de fois je pourrai voir le film. La projection à Squaw me réjouit car ma famille vit ici et tous ont hâte de le voir. Leur soutien, au long de ces quatre dernières années, a été indéfectible. J’aimerais ne pas seulement le voir ici où tout est dédié au sport. À New York, une spectatrice s’est levée et a dit : « Maintenant, je vais vivre ma vie pleinement. » L’objectif est atteint. Shane était un homme incroyable, plein d’humour et dingue. L’opinion des gens ne l’atteignait jamais. Le fait qu’il était un incroyable athlète importe peu, sa personnalité rayonnait. Comment l’avez-vous connu ? On se croisait en ville, mais je ne le connaissais pas. Il était skieur, moi snow-

Photos : Brigitte Sire, Christian Pondella/Red Bull Content Pool

la projection et a dit : “Maintenant, je vais vivre pleinement ma vie.” L’objectif est atteint »


Défi. Shane McConkey prend son envol en base-jump depuis le toit de l’hôtel du ­casino Atlantis, à Las Vegas.


Photos : Red Bull Content Pool


Passion. Les images du film donnent le frisson. Elles restituent l’ardeur qui animait Shane. Le ­Canadien a disparu. Sa légende reste vivante. à jamais.

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Shane sur grand écran Pour les athlètes qui ont côtoyé Shane McConkey, ce biopic est un r­ egard ­subtil sur son choix de vie, malgré les risques encourus.

Charles Bryan PARACHUTISTE, BASE-JUMPER « Le film est un grand moment.  Je ne connaissais pas bien Shane  le skieur alors que nous étions partenaires en parachute et en basejump. Je n’ai réalisé son influence sur le ski freestyle que bien plus tard. Le danger ­inhérent aux sports aériens est une triste réalité, elle n’épargne d’ailleurs aucun sport. »

Miles Daisher PARACHUTISTE, BASE-JUMPER « Le film a provoqué chez moi ­beaucoup d’émotions différentes. L’humour débridé de Shane m’a fait un bien fou, tout comme les souvenirs que j’ai en commun avec lui.   La fin est brutale. Le film le laisse présager dès les premières images. Même sans connaître Shane, on ­devine ­l’issue inéluctable. »

boardeuse. Deux mondes bien distincts. Nous avons commencé à faire du VTT ­ensemble, et puis est arrivé ce qui devait arriver. On s’amusait énormément l’un avec l’autre, il était très marrant. Un fou furieux qui me faisait beaucoup rire. Sa célébrité ne compliquait pas votre relation ? Pour moi, il n’était pas célèbre. Quand je le voyais dans ses films ou sur les pistes, j’étais impressionnée par ce qu’il faisait, mais à aucun moment sa popularité ne me venait à l’esprit. Il était humble. C’était sa raison de vivre, il ne s’en vantait pas. Je pense qu’il est encore plus connu maintenant. L’un de mes passages préférés du film est celui où vous effectuez votre premier saut en base-jump… J’avais une peur bleue, mais ça a été grandiose. J’y ai pris goût et j’ai fait d’autres sauts. C’est le genre de sport qui vous pousse à devenir un bon parachutiste et un athlète capable d’analyser en un éclair diverses situations. Je pense qu’il faut débuter le base-jump quand on est jeune et plus courageux. Je m’y suis mise à 35 ans, c’est tard. Puis, je me suis tournée vers le parachutisme classique où j’étais plus à l’aise, jusqu’au jour où je suis tombée enceinte. Aujourd’hui, c’est fini, il n’en est plus question. Pourquoi avoir créé la fondation Shane McConkey après son décès ? Au départ, c’était pour commémorer l’anniversaire de sa mort. J’avais une forte pression. Tous s’attendaient à ce que je fasse quelque chose. Et puis, ce fut l’occasion de récolter des fonds et de sensibiliser les gens. On s’est lancés dans un truc de fou, comme il aimait, en se moquant des snowblades (les miniskis, ndlr). Histoire de ne pas se prendre au sérieux. Une compétition de descente en snowblades, une chose ridicule en soi, mais où tout le monde se déguise en danseuse du ventre

«  Personne ne pourra retenir ses larmes car le film est vraiment beau » 86

Vie. Sherry McConkey, en ­compagnie de   son chien Pedro, chez elle à Squaw Valley, en Californie.

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JT Holmes SKIEUR, BASE-JUMPER « C’est un super hommage et une sacrée performance, étant donné la difficulté de rendre justice à la vie et à l’héritage de Shane. Bien sûr, son histoire ne manque pas de faits marquants mais l’attente de ceux qui le connaissaient était immense. En le découvrant, on ne peut qu’être fier de ce film. »

Chris Davenport HÉLISKIEUR « Raconter une vie aussi remplie que celle de Shane, si courte soit-elle, n’est pas chose aisée. Le film fonctionne parce que, ­malgré cette histoire qui s’achève de façon aussi triste, il rappelle à chaque spectateur que dans ­l’existence, la notion de plaisir revêt une importance cruciale. »

Q & R : Scott Gaffney Le codirecteur de Matchstick Films, une société de production dédiée au ski freestyle, et vieil ami de Shane McConkey, est l’un des réalisateurs du film. the red bulletin : Est-ce que

Photos : Brigitte Sire (1), Red Bull Content POol (3), Reuters (1)

ce fut un défi de visionner toutes les images de la carrière de Shane McConkey ? scott gaffney : À MSP Films, mes collègues se paient ma tête parce que je suis un geek de ces images. Il se trouve que dans 80 % des cas, j’en suis l’auteur. Je sais ce qui s’est passé, où et quand, et quelles étaient les émotions de Shane à ce moment-là. Tout base-jumper est fan de vidéo. Ce travail a demandé du temps mais je connais les images qui comptaient le plus pour Shane. Comment avez-vous travaillé avec sa compagne, Sherry ? Nous voulions que Sherry ait le dernier mot quant au résultat final. Ses interviews sont magnifiques et constituent un élément ­essentiel du film. Nous tirons une grande fierté du fait que le documentaire l’ait enchantée. La première de McConkey a eu lieu au célèbre festival de Tribeca. C’est un gage de reconnaissance... Que le documentaire soit accepté à Tribeca prouve que l’aura de Shane s’étend au-delà de notre monde des sports extrêmes. On nous prend souvent pour des « junkies d’adrénaline », mais Shane a toujours refusé cette étiquette. Ce qu’il a réalisé avait pour lui une signification bien plus grande.

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ou en prostituée ou les deux à la fois (rires). On avait organisé un gala, un gros délire. Avec les bénéfices, nous avons mené des actions de prévention écologique dans les écoles et je compte à ­l’avenir organiser plus d’événements en rapport avec le respect de l’environnement. Vous avez du pain sur la planche… Un job bénévole et à plein temps (rires). Une manière pour moi de prolonger ­l’histoire, de ne pas tourner la page. Je crois que je ne la tournerai jamais. Je l’aimais. C’était mon âme sœur. Ayla doit réaliser que son père et sa mère aimaient ce monde avec ferveur, je ferai tout ce que je peux en ce sens. D’une certaine manière, c’est à travers Shane que je le fais. Il m’a beaucoup offert, et pas seulement de l’amour ou sa présence. Il m’a donné la force de faire des choses que je n’aurais jamais osé entreprendre sinon. Quelle leçon tirez-vous de cette épreuve ? Si j’ai surmonté le chagrin, c’est avant tout grâce à Ayla. Je veux être une mère forte et lui montrer que je dois à son père le courage d’avoir accompli des choses pour moi essentielles. L’entraînement m’a aussi aidée. Je ne sais pas ce que je ferais sans mon VTT. Là, je peux me ressourcer et extérioriser ma rage, ou passer seule des heures à admirer les beautés de ce monde. Je ne peux plus me défouler sur Shane (rires). C’est le VTT qui dérouille. Vous allez souvent au mémorial de Shane qui surplombe Squaw Valley ? La station lui a dédié Eagle’s Nest (le nid d’aigle, descente très difficile rebaptisée de son nom, ndlr). L’endroit lui correspond bien. Les aigles et nous, c’est toute une histoire. On disait tous les deux : « Les aigles, c’est chanmé ! Tu t’élèves dans les airs, tu voles. » C’est le plus bel hommage que Shane pouvait recevoir. Une vue imprenable sur l’une de ses montagnes préférées. J’ai des photos d’un aigle royal, perché là-haut tout près de l’Eagle’s Nest. J’y suis montée pour l’anniversaire de Shane, il y en avait un qui tournoyait. J’y suis retournée pour la commémoration de sa mort, et, à nouveau, des aigles royaux volaient dans le ciel. Je ne les avais jamais vus avant. Maintenant, je les aperçois à chaque fois que je m’y rends. Plus sur www.mcconkeymovie.com

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DES PHOTOS À UFFLE COUPER LE SO

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ANGE LE MONDE CH GRÂCE À EUX

EXTRÊME

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Touches. Un clavier musicalement vôtre. musique, page 95

Quoi de neuf en octobre ?

action ! m at o s   /   c l u b b i n g   /   v o ya g e s   /   c o n s e i l s d e p r o   /   m a v i l l e   /   MUSI q u e   /   f o c u s

Tour de chauffe

Un bolide, un lac gelé, une forêt vierge et vous au volant. Votre nom est-il Bond ?

photo : ARNAUD TAQUET

voyages, page 92

Glace. En Laponie, les voitures marchent sur l’eau.

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Marcher à l’éco-nomie

surf Pour ses 40 ans, patagonia lance une ligne de combinaisons éco-conçues.

Fabriquées à partir de matériaux ­recyclables, les ­Earthkeepers GT offrent le maintien ­nécessaire pour parcourir le monde.

Pour réduire la quantité de néoprène, une ­matière nuisible pour l’environnement et très présente dans les combinaisons classiques, ­Patagonia a travaillé pendant quatre ans avec Yulex, une entreprise basée dans l’Arizona qui exploite le caoutchouc naturel produit par le guayule, une petite plante venue du Mexique. Ensemble, ils ont fabriqué un habit constitué à 60 % de matériaux biodégradables, délaissant les caoutchoucs synthétiques. « J’ai envoyé à nos internautes la nouvelle “peau”, sans rien leur dire, ­raconte Jason McCaffrey. Selon eux, aucune différence, la combinaison colle pareil. » Le boss du surf chez Patagonia ne pouvait pas recevoir meilleur compliment.

timberland.com

apprécier l’éco-design Tout en bois, ces skis n’ont qu’une très faible teneur en carbone. À la fois respectueux de l’environnement et parfaits pour les pistes.

Photos : Jeff Johnson/PAtagonia, Kanoa Zimmerman/Patagonia

grownskis.com

Cuir vert Après le succès ­rencontré par la populaire combinaison R2 à zip frontal, la marque américaine pousse ­l’innovation encore plus loin afin d’en finir avec le néoprène. Le prochain objectif est la fabrication de combinaisons 100 % recyclables. ­Patagonia n’a pas de ­limites. À suivre, donc… Plus sur www.patagonia.com

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Le guayule pousse dans les zones arides, comme le sud-ouest des états-Unis.

Le biocaoutchouc est idéal pour ceux qui se plaignent ­régulièrement d’allergies au latex.

La laine est déposée dans la doublure i­ntérieure pour vous garder bien au chaud.

the red bulletin


Action !

clubbing Maximum. Un max de plaisir au Maximus, club de Kotor. Cette bourgade du Monténégro a plusieurs atouts.

Sea, sex and fun

texte : florian obkircher. Photos : radoje Milic (4)

KOTOR est le dernier spot à la mode en Méditerranée. On vient s’amuser derrière les remparts de la citadelle. Rythmes effrénés, shows laser, danseuses envoûtantes et piste de danse envahie par une horde de mannequins. Le club Maximus ­promet d’exciter le mâle. Il est le repère nocturne des milliardaires postés sur les quais de cette cité enclavée du Monténégro. D’ailleurs, le port de plaisance pourra bientôt accueillir plus de yachts géants que celui de Monaco, soit cinquante. Mais le Maximus ne brille pas seulement par sa clientèle huppée. L’établissement a été construit dans les remparts médiévaux de la ville, classés par l’UNESCO. Jadis, ces murailles larges de deux mètres protégeaient Kotor des invasions ottomanes. Aujourd’hui, elles garantissent une cohabitation ­silencieuse entre voisins. MAXIMUS Stari Grad 433, Kotor, Monténégro Plus sur www.discomaximus.com

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M o nténégro action ! Le cinéma a profité de paysages uniques

The Dark Side of the Sun Tourné au Monténégro avant la guerre, Brad Pitt y tient son premier rôle principal. Un drame sentimental insipide mais avec de magnifiques couchers de soleil.

Courbettes. Bonsoir, vous habitez chez vos parents ?

Fli rt, M o d e d’em ploi Trois phrases en Monténégrin et la nuit est à vous ! C’est bien connu, le ridicule ne tue pas.

1 Tes yeux sont de la même couleur que ma Porsche.

James Bond 007 – Casino Royale Le film le plus connu tourné au Monténégro. Mais les scènes d’action de Daniel Craig à travers Kotor ont, en fait, été réalisées en République Tchèque et aux Bahamas.

Tvoje ocˇi imaju istu boju kao moj Porše.

2 J’ai perdu mon numéro de téléphone. Pourrais-je avoir le tien ? Izgubio sam svoj broj. Mogu li da dobijem tvoj?

3 Mais je te connais ! Tu ressembles à ma ­prochaine copine. Da li se znamo, jer puno licˇiš na moju budu´cu djevojku?

Smash and Grab Un documentaire sur les Pink Panthers, braqueurs de bijouteries originaires de Serbie et du Monténégro. 500 cambriolages à leur actif pour un butin estimé à 400 millions ¤.

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Action !

voyages

Noël. Idée de cadeau ? En Finlande, votre enfant a le droit de piloter une Lamborghini.

finish line pour le plaisir

Exaltation Vous en redemandez ? Grimpez sur une motoneige et traversez la forêt jusqu’aux lumières du Grand Nord. experience-isosyote.fi

Pilotage sur glace La dextérité des pilotes finlandais de rallye n’est plus à démontrer. Quel est leur secret ? De la glace encore et toujours. Démonstration. Alors que les enfants rêvent d’un voyage en Laponie pour rencontrer le Père Noël, les parents préfèrent, eux, tenir les rênes d’un traîneau motorisé à plus de 160 km/h. Mais les gamins n’y échappent pas non plus. « L’an dernier, un môme de 11 ans est venu conduire une Lamborghini », se souvient Daniel Eden, patron de D1 Ultimate-GT. Cette société organise des voyages dédiés au sport auto. « Il n’y a aucune réglementation pour la conduite sur lac gelé. N’importe qui peut donc prendre le volant. » Ce n’est pas une raison pour faire n’importe quoi avec votre enfant. « J’ai conduit des tas de voitures de sport, raconte Frank Scheelen, chef d’entreprise allemand venu tout droit de Francfort. Mais c’est sur lac gelé qu’on apprend à pousser une voiture dans ses ultimes retranchements. Il n’y a pas de barrière de sécurité sur un lac. Le quadruple champion du monde de rallye, Juha Kankkunen était à côté de moi. C’était mon prof d’un jour. Un truc de dingue ! La Porsche 911 était parfaite, on dérapait en permanence. C’est ­marrant de prendre les virages en les attaquant latéralement. Le mieux, c’était avec Tarifs : la Lamborghini Gallardo. Elle est à partir de 3 569 € si puissante ! Il faut être extrêmepour un forfait tout ment vigilant quand on fonce à compris de 3 jours 150 km/h, l’adrénaline est à son et 2 nuits. comble et on vit les meilleures Plus sur www.ultimate-gt.com sensations ! » 92

À toutes les sauces Glisse. Chéri(e), je ­t’emmène faire un tour. ­Attache ta ceinture !

un bon tuyau Ça caille !

« Prenez en compte les conditions météo, souligne Daniel Eden. Dès que vous posez le pied en Laponie, le froid vous saisit. La température peut descendre jusqu’à − 40 °C. On voit parfois arriver des clients en tee-shirt alors que nous sommes habillés comme des Esquimaux. »

La meilleure école

« Toute personne devrait ­essayer, as-

Mangez finnois, ça tient au corps ! Et c’est bon. Raviolis, nouilles sautées, steak de… renne ! www.monterosa.fi

Nom d’un chien Faites confiance aux chiens de ­traîneaux pour ­explorer le monde sauvage. www.visitrovaniemi.fi

sure Frank Scheelen. Sur la glace, vous pouvez pousser la voiture en toute sécurité afin de mieux connaître vos limites. Ça vous servira. Vous serez un meilleur conducteur au ­quotidien. »

the red bulletin

Texte : Ruth Morgan. Photos : arnaud taquet, juha kankkunen driving academy, Shutterstock (3)

Ice Ice Baby


Action !

conseils de pro

De la sueur et du swing Une heure avec un joueur pro MATTEO M­ ANASSERO est déjà une star. à tout juste 20 ans. L’Italien MISE SUR LES SQUATS POUR L’EXPLOSIVITé ET SUR LE PILATES.

Texte : Ulrich corazza. Photos : getty images, chris garrison/red bull content pool. illustration : Heri Irawan

Avec son sourire ravageur, il devient en 2010 le plus jeune vainqueur d’un tournoi du circuit européen de golf. Forza Matteo !

L’hiver, Matteo Manassero achève sa ­préparation physique en vue d’une saison souvent éprouvante. « L’entraînement doit favoriser l’endurance et le renforcement musculaire, recommande-t-il. Le golf exige une musculature puissante, surtout au niveau de la ceinture lombaire et des jambes. Pour ça, dans le travail je limite la répétition des mouvements (huit) mais ils sont plus explosifs. » Pour améliorer la stabilité et la souplesse du torse, ­ Manassero ajoute des séances de Pilates et du stretching. L’apport en énergie est aussi capital pour tenir les cinq heures d’un parcours. « Je mange un peu de ­bresaola (viande de bœuf séchée, ndlr) avec du riz blanc. »

Talent. Manassero a les dents longues. En 2014, l’Italien ­devrait scorer bas.

Leç o n d ’a b d o s tr a n sa lp i n e « Deux choses sont particulièrement importantes dans le golf : un torse puissant et des jambes ­dynamiques. J’effectue régulièrement des squats explosifs et différents exercices de Pilates. »

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Plus sur twitter.com/ManasseroMatteo

Entraînement Ses conseils pour le putting

Debout, jambes écartées (pieds à 30°), la barre ­posée sur les trapèzes. Inspirer en descendant sans pencher les hanches vers l’avant.

Enchaîner immédiatement le mouvement vers le haut tout en expirant. Le dos doit toujours rester légèrement cambré et les genoux légèrement fléchis.

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Cent fois sur le green…

Quel est son secret ? « En partie une question de technique, dit Manassero. En partie seulement car rentrer un putt est avant tout une question de confiance. ça vient avec beaucoup de pratique. Une séance ce sont 15 minutes d’exercices techniques, 20 minutes de putts à 1,20 mètre et ­ensuite à 6 mètres. »

the red bulletin

Soulever les jambes et plier les genoux à environ 90°. Redresser légèrement le buste et ramener le menton vers la poitrine, les mains touchent les mollets.

Allonger les jambes en ramenant simultanément les mains derrière la tête en dessinant un demi-cercle, contracter les abdominaux, effectuer 15 fois.

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Action !

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La région d’Auckland compte 48 volcans. Celui de l’île de Rangitoto, haut de 260 m, est le plus célèbre. Un ferry permet de s’y rendre. L’ascension est autorisée, mais en cas de ­fumées noires, il vaut mieux redescendre fissa.

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5 maj eu r Le top à Auckland

1 CONCH RECORDS & CAFE 115a Ponsonby Road Un excellent disquaire avec un large choix d’albums d’artistes indé locaux. Dans l’arrière-cour, se cache même un bon restaurant proposant des spécialités sud-américaines.

­ evenu aujourd’hui le meilleur d café de la ville. Les patrons cultivent et torréfient leur propre café bio. C’est le seul endroit où je prends du plaisir à déjeuner végétarien.

4 GOLDEN DAWN orner of Richmond C & Ponsonby Road ça me rappelle l’ambiance des Biergarten berlinois. En été, on peut y manger du rôti de viande hachée en buvant une bière et en écoutant des groupes locaux.

l’eau

Un autre ferry vous amène vers Devonport, paisible petite ville côtière. Sur le flanc de la montagne North Head, on peut aller visiter les fortifications datant des deux guerres mondiales. Leur système complexe de tunnels et de bunkers vaut le ­détour.

le bois

2 EL SIZZLING CHORIZO 136-138 Ponsonby Road Avant, Corra, la chef argentine de ce grill, tenait un snack sur l’île Waiheke, face à Auckland. Les Kiwis sont fiers de leurs ­grillades mais les Argentins restent les maîtres du barbecue. 3 KOKAKO CAFe & ROASTERY 537 Great North Road L’ancien bureau de poste est

5 FLOTSAM AvéritableND JETSAM 86 Ponsonby Road Ce dépôt-vente est une mine d’or pour chineurs. Livres, tableaux, bibelots, voilà quelquesuns des trésors enfouis dans cet incroyable bric-à-brac. Café et donuts sont même offerts.

One Tree Hill, titre de U2 en référence à un petit volcan d’Auckland, rendait hommage à Greg Carroll, leur roadie néo-zélandais ­décédé en 1986. En 2000, le site est rebaptisé No Tree Hill. Le seul arbre présent au sommet est abattu au XIXe siècle.

the red bulletin

Photos : Richard Edghill, graeme Murray

« Il y a encore quelques années, Auckland était d’un ennui mortel, flingue Nick Dwyer, DJ, producteur d’émissions de télé et musicien néo-zélandais. J’en avais même honte quand des amis étrangers me rendaient visite. Pas un endroit où sortir. » Les choses ont bien changé. Pour ce jeune artiste de 28 ans qui se produit partout dans le monde, la capitale de la Nouvelle-Zélande est devenue un endroit de choix. « Beaucoup de choses ont évolué ces derniers temps. Dans le centre-ville, des restaurants plus originaux ont ouvert et le célèbre quartier de Ponsonby, repère de la scène alternative, est plus effervescent que jamais. D’ailleurs, de nombreux artistes et musiciens locaux se feront un plaisir de vous renseigner sur les lieux qui bougent. » Les Néo-Zélandais savent accueillir.

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AUCKLAND Nick Dwyer, artiste globe-trotter, sait où déguster le meilleur café et écouter du gros son dans sa ville. elle bouillonne après de longues années de sommeil. Mieux vaut tard...

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« Auckland se ­réveille, avis aux amateurs ! »

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Nick D est un DJ néo-zélandais, véritable star dans son pays.

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Action !

musique

pop s ta r s Trouvez le ­musicien auteur de chaque tableau

Jack Johnson, 38 ans, musicien, surfeur et réalisateur. Jolie palette.

La musique et la mer. Jack Johnson baigne dans son élément. Surfeur surdoué, à 17 ans il participe au Billabong Pipe Masters, chez lui à Hawaii, et y devient le plus jeune finaliste de tous les temps. Sa carrière professionnelle est toute tracée mais il choisit peu après de partir en ­Californie suivre des études de cinéma et faire de la musique. Choix gagnant. à ce jour, ses cinq albums aux morceaux folks acoustiques et aériens se sont vendus à 15 millions d’exemplaires. à 38 ans, Johnson sort un nouvel opus, From Here to Now to You. Il évoque les morceaux qui l’ont inspiré tout au long de sa carrière.

« Hendrix m’a donné envie » Playlist Gueule de l’emploi, jACK JOHNSON a tout pour plaire. le surdoué Américain détaille SES influences au fil du temps.

2 Fugazi

3 Michael Kiwanuka

Adolescent, je partais ­souvent camper avec mon père. Dans mon baladeur, j’avais toujours la ­cassette d’Electric Ladyland de Jimi Hendrix. Toutes les nuits, je l’écoutais en m’endormant. Ce morceau est incroyable. La magie des sons singuliers qu’Hendrix faisait jaillir de son instrument m’a ­donné e­ nvie de jouer de la guitare.

À Hawaii, quand j’étais jeune, il n’y avait qu’une seule bonne station de radio. On l’écoutait non stop. Un jour, je tombe sur ce morceau et j’hallucine. Un truc dingue et d’une simplicité déconcertante. Je me suis dit qu’en poussant mon ampli à fond, je pouvais en faire autant. C’est grâce à ce morceau que j’ai monté mon premier groupe.

J’adore la voix de Michael. Elle me rappelle celles de Bill Withers et Otis Redding tout en restant unique. Elle est particulièrement mise en valeur dans cette chanson. J’ai croisé Michael pour la ­première fois en Australie. Après un concert incroyable, j’ai voulu faire sa connaissance et j’ai découvert un gars super sympa.

4 Tame Impala

5 Violent Femmes

Il y a quatre ans en Australie, un gars me refile un CD, l’album de Tame Impala. Pendant le reste de notre tournée, on l’a écouté en boucle dans le bus. Ces musiciens australiens ont vraiment un talent inouï. Ils renouvellent avec brio le son des Beatles. Leur deuxième album, ­Lonerism, est meilleur que le premier. Il n’y a rien à jeter.

J’avais douze ans quand mon frère m’a compilé une cassette avec, entre autres, ce morceau plutôt cool des Violent Femmes. Je l’écoute encore aujourd’hui pendant les balances son. À l’époque, ce groupe m’a influencé comme aucun autre car il prouvait que l’énergie de la musique punk pouvait aussi s’exprimer avec une guitare acoustique.

Texte : florian obkricher. Photos : universal music, rex features (4), picturedesk.com (3), reuters, getty images

1983... (A Merman I Should Turn to Be)

Feels Like We Only Go Backwards

Waiting Room

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Rest

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d

Patti Smith

Good Feeling

Marilyn Manson Paul McCartney

C lavi er m ag i q u e THE gadget du mois

Miselu C.24 Avec cette appli, l’iPad devient plus pratique pour les musicos amenés à se déplacer. C.24 est un clavier Bluetooth de deux octaves conçu spécifiquement pour cette tablette. Du coup, plus de doigts sur l’écran. Plus sur www.miselu.com

the red bulletin

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Kim Gordon Bob ­ Dylan Réponses : A - Patti Smith, B - Bob Dylan, C - Paul McCartney, D - Marilyn Manson

1 Jimy Hendrix

Plus sur www.jackjohnsonmusic.com

Bob Dylan expose ses tableaux à la National Gallery de Londres. à quels autres chanteurs correspondent les tableaux ci-dessous ?

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Action !

focus

en bref notre sélection, en bonne ­compagnie

13 Dimanche

AU REVOIR

20 dimanche

AU JARDIN Le 22e festival international des jardins a proposé le thème « Jardins des sensations » à la vingtaine de concepteurs internationaux venus mêler saveurs et odeurs en bord de Loire. Jusqu’au 20.10. www.domainechaumont.fr

Combat. Face aux Blacks, le XV de France sait à quoi s’attendre.

09.11, Saint-Denis

Opération rachat

à la fin d’une saison internationale calamiteuse (dernière place du Tournoi et trois défaites en Nouvelle-Zélande), le XV français entame sa tournée d’automne face aux All Blacks, avant de digérer le Tonga (le 16) puis l’Afrique du Sud (le 23). Trois « petits » rendez-vous pour sauver l’honneur ou définitivement broyer du noir. Philippe Saint-André joue une partie de son avenir.

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www.ffr.fr

Samedi

16.10-19.01, Paris

Par Toutatis ! Peu avant la sortie du 25e album du petit gaulois, la bibliothèque FrançoisMitterrand rend hommage à l’irréductible héros. www.bnf.fr

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15.10, Saint-Denis

Jusqu’au 05.01.2014, Paris

Barrage en vue

L’univers Bilal

France-Finlande marque la fin des éliminatoires du Mondial 2014. Derrière l’Espagne intouchable, l’objectif des Bleus est de terminer parmi les meilleurs deuxièmes de la zone européenne. À la clé, une place en barrage, en novembre, pour chiper un ticket pour le Brésil. Autant dire qu’il faut soigner cette dernière sortie. www.fff.fr

La rencontre entre l’univers fantastique d’Enki Bilal et le patrimoine scientifique et technique du musée des arts et métiers offre Mecanhumanimal aux visiteurs. Avec des œuvres inédites, l’auteur apporte une dimension futuriste à l’exposition dans un lieu empreint de la mémoire industrielle. Une expo de Bilal, ça ne se loupe pas. C’est suffisamment rare et mystérieux. www.arts-et-metiers.net

AU FILET Le Masters 1000 de Paris-Bercy, le dernier de l’année, est un rendez-vous incontournable de l’automne parisien. Depuis 2008 et le succès de Jo-Wilfried Tsonga, aucun Français n’a pu s’y imposer. 26.10-03.11 www.fft.fr

the red bulletin

Texte : Etienne Bonamy. Photos : Phil Walter/Getty Images, AFP/Getty Images, Les Éditions Albert René/Goscinny-Uderzo, Enki Bilal/Casterman/Gilles Jacob

La classique Paris-Tours clôt la saison cycliste. Si le cœur en dit aux sprinters, il faudra patienter 240 km avant la bagarre en vue de l’arrivée. www.letour.fr


ON NE MAÎTRiSE PAS LE DESTiN. CELA POURRAiT

Publicité gratuite.

ÊTRE MOi. OU VOUS. David Coulthard.

LES LéSIONS DE LA mOËLLE éPINIèRE DOIVENT POUVOIR ÊTRE GUéRIES.

Les lésions de la moëlle épinière peuvent toucher tout le monde. En soutenant les meilleurs projets de recherche spécialisés dans la guérison des lésions de la moëlle épinière à travers le monde, la fondation Wings for Life encourage les plus grands progrès scientifiques et médicaux. Nous garantissons que cent pour cent de tous les dons sont investis dans la recherche sur la moëlle épinière.

Votre contribution fait toute la différence. Vos dons sur www.wingsforlife.com

Red Bull France SASU, RCS Paris 502 914 658.

13 fois vainqueur de Grand Prix de Formule 1 et Ambassadeur Wings for Life.


dans le rétro Chicken wings

photo : imagno/getty images

Cette photo a été prise en 1893. Soit une éternité. Otto Lilienthal a des ailes géantes. Il tente de décoller. Ce pionnier allemand de l’aéronautique veut s’envoler vers d’autres cieux, planer à la verticale de sa propre destinée. à l’époque, un vaste bac à sable fait l’affaire en guise de piste d’atterrissage. Chute à l’arrière garantie. Aujourd’hui, Red Bull Flugtag entraîne ses participants au-dessus d’un plan d’eau. Avec une bonne dose de dérision.

the red bulletin numÉro 25 sera disponible le 13 novembre 98

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© Jörg Mitter

LI K E WHAT YOU LI K E

TON MOMENT.

HORS DU COMMUN



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