The Red Bulletin FR 06/23

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LE MONDE EST À LUI

Si le tennisman inspirant STÉFANOS TSITSIPÁS

parcourt la planète, c’est bien plus que pour devenir le numéro 1

HORS DU COMMUN Votre magazine offert chaque mois avec FRANCE JUIN 2023

DIFFÉRENT DU RESTE

The Red Bulletin est le magazine hors du commun et notre daté juin l’affrme particulièrement. Nous y accueillons l’un des boss du tennis mondial, Stéfanos Tsitsipás, pas seulement venu pour nous parler de tennis. C’est tout un aspect de l’homme derrière le joueur que nous vous faisons découvrir, en espérant vous faire voir ce penseur grec autrement.

D’autres persos uniques sont là, comme Gary Hunt, l’as du plongeon de haut vol, et toute son élite avec lui réuni·e·s à Paris à nouveau (les 17 et 18 juin) pour le Red Bull Cliff Diving. Venez halluciner sur leurs sauts de 27 m face à la tour Eiffel.

Il y a aussi Varnish (La Piscine), plus qu’un rappeur, le raconteur sonore et visuel d’une nouvelle scène qui se laisse guider par son imaginaire, même le plus barré.

On vous met également une dose de motorsport, mais du moteur qui passe à l’électrique, en mode Rallycross.

Et en bonus, du Payson McElveen, cet endurant vététiste qui se chauffe pour traverser la Tanzanie même s’il va détester les bestioles qu’il va y croiser en route.

Avec ces talents à bord et vous pour apprécier leurs histoires (si variées soient-elles), pour sûr, le TRB est différent du reste.

Bonne lecture !

Votre Rédaction

CONTRIBUTEURS NOS ÉQUIPIERS

CARLOS BLANCHARD

Le photographe espagnol vit en Autriche, où il documente sa passion pour le snowboard – et tout ce qui pique sa curiosité. Il s’est rendu au Nürburgring pour photographier le Rallycross pour ce numéro. « J’ai été impressionné par l’accélération des voitures et la précision nécessaire pour les contrôler, explique ­t­il. Les équipes se lancent dans l’inconnu avec le passage à l’électrique. »

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ANTOINE TRUCHET

Le photographe français de sport et d’actions aquatiques revient sur son shooting avec Stéfanos Tsitsipás. « Ça s’est déroulé dans un cadre magnifique et chaleureux en Espagne. Stéf s’intéressant à la photographie et à la réalisation de films, il a été encore plus facile de travailler avec lui. Il a collaboré et a apporté des idées sur la façon de shooter, ce que j’ai beaucoup apprécié. »

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Éditorial
IN DA CLUB Un studio pas comme les autres pour Antoine Truchet qui a eu le privilège de photographier Stéfanos Tsitsipás dans l’enceinte du tennis club de Puente Romano (ouvert par Björn Borg en 1979), à Marbella, Espagne, en 2022.
4 THE RED BULLETIN ANTOINE TRUCHET (COUVERTURE)
PEDROC 2.5 POWERTEX JACKET
CONTENUS
8 Galerie : des photos folles 14 Coquilles Saint-Jacques en tête 16 Un moto club hors-normes 18 Pete Kennedy rabat les cartes 20 Macklemore se met bien 22 Teresa Bonvalot : à fond de surf 24 Kiyémis : faire face avec joie 26 Aaron Durogati : monte en l’air 28 Tous en Seine L’élite mondiale du plongeon de haut vol de retour à Paris pour le Red Bull Cliff Diving. 40 Lignes de vie Les perspectives de Stéfanos Tsitsipás au-delà du tennis. 50 Jours de tonnerre Comment le Rallycross (ou RX) entame sa révolution. 64 Regardez le son Pourquoi le rap visuel de Varnish La Piscine excite Pharrell Williams. 68 L’expédition … de Payson McElveen, à travers la Tanzanie, et son propre vécu. 79 Voyage : sensations VTT au Chili 84 Conseils : un sommeil de soldat 86 Matos : bien dans votre rando 88 Fitness × TikTok = FitTok 90 Motos : cherchent propriétaire 98 Image de fin : salut Lilou Ruel ! Varnish
voir sa musique. 64
au filet. 40 6 THE RED BULLETIN MELONIE LEMON, ALEX VOYER, ANTOINE TRUCHET/ RED BULL CONTENT POOL, THRAINN KOLBEINSSON
juin 2023
vous fait
Stéfanos Tsitsipás monte

Ce qui vous attend les 17 et 18 juin.

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68 THE RED BULLETIN 7
Une mission VTT à travers lui-même.

HALEIWA, HAWAÏ, USA

Jour férié

En 2016, le 4 janvier a été déclaré « Carissa Moore Day » à Hawaï pour célébrer la carrière inspirante de la sainte patronne du surf, qui n’avait que 23 ans à l’époque. Son succès dans le Vans Triple Crown de cette année – la voici lors de la première étape, le Hawaiian Pro –lui a permis de remporter sa troisième victoire consécutive, en plus de ses cinq titres en WSL et l’or olympique. Cela vaut bien un week-end entier, non ? redbullcontentpool.com

TREVOR MORAN/RED BULL CONTENT POOL DAVYDD CHONG

SYDNEY, AUSTRALIE Clonée

« Où va-t-on ? » « Je ne sais pas. Suivez-la ! » Okay. L’héliplongée de Rhiannan Iffland dans le port de Sydney en octobre dernier – juste avant que les Red Bull Cliff Diving World Series n’arrivent en ville – a demandé plus d’organisation que cela : des réunions avec le pilote, des recos du port, et autres pour la sextuple championne du monde australienne. Ne manquait plus que la post-production du photographe Andy Green pour obtenir quatorze Rhiannan. redbullcontentpool.com

JO’BURG, AFRIQUE DU SUD

Pneumicide

Ou comment ruiner un max de gomme le plus rapidement possible en mode donuts avec une BMW E30 modifiée. Samkeliso « Sam Sam »

Thubane s’y connaît en destruction de pneus : l’an dernier, il remportait pour la seconde fois le Red Bull Shay’ iMoto (« Hollywood du burn »).

« Plus tôt dans la journée, je ne me sentais pas très bien, a déclaré le Sud-Africain (à droite), mais je pense que l’odeur des pneus brûlés est mon médicament, car une fois dans la voiture, je me suis senti redevenir moi-même. »

redbullcontentpool.com

11 ANDY GREEN/RED BULL CONTENT POOL, TYRONE BRADLEY/RED BULL CONTENT POOL DAVYDD CHONG

QUELQUE PART EN FRANCE

8 millions de minutes

Voilà 15 ans que Matthias Dandois est soutenu par Red Bull : près de 8 millions de minutes durant lesquelles ce rider est devenu 9 fois champion du monde de BMX flatland et a enchaîné les projets toujours plus créatifs. Une histoire commune que vient célébrer une vidéo (Time Machine) où l’on voit le Français exceller dans une montre géante, symbole de sa polyvalence et de sa longévité. Instagram : @matthiasdandois

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NICOLAS JACQUEMIN

favorisent la contamination des sols et des nappes phréatiques dit Usami. C’est ainsi que nous nous sommes posé la question : “Et si nous transformions ces déchets en une nouvelle ressource?” »

Le Shellmet, développé par TBWA\Hakuhodo en collaboration avec Koushi Chemical Industry Co. et Quantum, une start-up basée à Tokyo, en est la réponse. Les coquillages mis au rebut sont stérilisés avant d’être broyés et mélangés à du plastique recyclé pour former un nouveau matériau, appelé Shellstic. Ce matériau peut ensuite être moulé pour fabriquer des casques inspirés des coquilles d’origine.

Casquatique

Comment des coquilles Saint-Jacques peuvent contribuer à réduire les déchets environnementaux grâce à ce concept chic et innovant.

Sur les côtes du village de Sarufutsu, sur l’île d’Hokkaido au Japon, trois pêcheurs se tiennent près de leurs bateaux. De robustes marins, habitués à surmonter les conditions les plus difficiles. Leurs combinaisons en caoutchouc sont usées comme il se doit, contrairement à leurs couvre-chefs : des casques couleur pastel allant du bleu clair au rose tendre. Notre trio a conçu le Shellmet (contraction des termes anglais shell, coquillage, et helmet, casque), une protection pour la tête rigide, élégante et minimaliste, pas seulement inspirée mais aussi fabriquée à partir des coquilles Saint-Jacques qu’ils récoltent tous les jours.

« La noix de Saint-Jacques est le mollusque le plus répandu dans les assiettes au Japon, déclare Masatoshi Usami, directeur créatif de TBWA\Hakuhodo, l’agence de design derrière le Shellmet. C’est aussi le coquillage qui produit le plus de déchets. »

En effet, dans et autour de Sarufutsu – le village le plus septentrional du Japon qui compte seulement 3 000 âmes – environ 40 000 tonnes de coquillages sont générés chaque année. Une source d’inquiétude majeure pour les autochtones. « Dans la plupart des cas, les coquilles sont empilées à l’air libre et forment des monticules qui répandent des odeurs nauséabondes et

« Nous avons voulu aller plus loin que l’upcycling afin de développer des produits qui ont un sens et une histoire à raconter, souligne Shintaro Monden, Vice-président du design chez Quantum. C’est pourquoi nous nous concentrons sur le biomimétisme, qui applique les mécanismes du monde naturel au développement technologique. Dans notre cas, la structure de la coquille Saint-Jacques a inspiré le design du Shellmet, lequel reprend la structure nervurée caractéristique d’un coquillage. »

Et il ne s’agit pas que de style, car la robustesse du casque est renforcée de 33 % comparé aux casques traditionnels à la surface lisse. La raison pour laquelle ses créateurs espèrent que son usage ne sera pas seulement limité à la marine. « Le Japon est connu pour ses catastrophes naturelles, explique Usami. Nous voulions donc étendre l’utilisation du casque,et qu’il soit ainsi porté autant pour la pêche que pour les interventions d’urgence ou le sport. »

Pour l’instant, seuls les pêcheurs de Sarufutsu ont le privilège d’affronter avec style le vent et les vagues au large de la côte nord du Japon.

tbwahakuhodo.co.jp/en/

SHELLMET
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Le Shellmet protège les pêcheurs qui utilisent de gros engins dans des eaux agitées (en haut). Ci-dessus : les matières premières. Photo @Nicolas Jacquemin

ORIGINAL GENTS MC

Sons of fraternity

En tant que transgenre, Dakota Cole ne se sentait pas accepté par les autres motards. Sa solution ? Créer son club.

Lorsque Dakota Cole sort avec son club de motards, il aime conduire sa Honda Shadow 750 à l’arrière du groupe, d’où il peut voir ses frères profiter au maximum de la route.

« J’aime voir des groupes massifs de motocyclistes, dit l’Américain de 31 ans. Avant que nous ayons un leader, je menais le groupe, mais je n’aimais pas trop ça. Dès que nous avons eu un capitaine, je suis passé à l’arrière… Pour moi, être sur une moto, c’est le sentiment ultime de liberté. » Cole est cofondateur d’Original Gents MC à Kansas City, le premier club de moto pour hommes transgenres. Mais

jusqu’à ce que Cole participe à la création du club, la liberté qu’il ressentait sur une moto était en contradiction avec son expérience des milieux motards traditionnels, qu’il trouvait « très moralisateurs, dit-il, et pas adapté aux transgenres. Je déteste dire cela, mais les hommes blancs cis sur les motos sont souvent misogynes et pleins de préjugés. Je savais que si je rejoignais un jour un club, je devrais être discret pour passer pour un homme cisgenre du début à la fin ».

Et c’est ainsi qu’2020, Cole cofonda l’Original Gents MC, lequel repose sur des valeurs morales : « La règle n° 1, c’est de toujours traiter les gens avec respect. » L’étape suivante, choisir un nom, était cruciale. « Nous voulions un nom qui induisait que nous étions transgenres, sans avoir besoin de nous dévoiler complètement. Car ça peut être dangereux, le drapeau arc-enciel fait de vous une cible, surtout aux États-Unis. En fin de compte, Original Gents MC est le nom adéquat parce qu’il joue sur le fait que même si nous

avons été assignés femme à la naissance, nous nous sentons homme depuis toujours ».

8 membres au total, qui, outre le fait d’être des hommes transgenres et des motards, viennent de tous les horizons : Cole est technicien informatique pour le gouvernement, et d’autres travaillent dans les assurances, les hôpitaux ou des concessions automobiles.

Sur la route, l’Original Gents MC ressemble à n’importe quel autre club de motards, mais son existence même est de l’activisme en action. Il offre des espaces sûrs, inclusifs et sans jugement, tels que des randonnées ouvertes aux nonmembres, des soirées moto mensuelles dans une brasserie LGBT de Kansas City et une randonnée commémorative le 20 novembre de chaque année pour la journée du souvenir des transgenres. « L’insigne d’un club de motards comporte son nom, son logo et généralement son territoire, explique Cole. Nous ne revendiquons pas d’autre territoire que celui de la fraternité. »

originalgentsmc.org

16 THE RED BULLETIN EMKE BARRETT
Dakota Cole de l’Original Gents MC ; l’insigne du club qu’il a cofondé célèbre la fraternité.
RACHAEL SIGEE
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Cartes de visites

En créant des cartes en papier de ses sentiers préférés, un féru de rando met ses expériences IRL dans la poche de ses camarades d’exploration.

« Dans ma jeunesse, Internet n’existait pas, alors on passait beaucoup de temps dehors », raconte l’Américain Pete Kennedy, expliquant son affinité avec la nature sauvage de sa région d’origine, la Caroline. À 52 ans, celui qui a pratiqué kayak et VTT toute sa vie a grandi à une époque où les enfants partaient à l’aventure librement munis d’une carte froissée fourrée dans la poche arrière d’un pantalon déchiré.

Une expérience qu’il veut raviver. Depuis la création de sa boîte en 2009, Pisgah Map

Company (nommée d’après la forêt nationale en Caroline du Nord), Kennedy a conçu dix cartes détaillées de sentiers de rando en Caroline du Nord et du Sud, ainsi que dans les États voisins de Géorgie et du Tennessee.

Mais il ne s’agit pas juste d’un voyage en nostalgie ; chaque carte est méticuleusement pensée, réalisée grâce à des données obtenues en ligne et – élément crucial – affinées par une mise en pratique sur le terrain. « Voilà plus de trente ans que nous explorons cette

zone, à pied, à VTT, en kayak ou au pas de course. C’est pourquoi nos cartes sont plus que de jolies lignes tracées sur le papier, dit Kennedy. Elles sont l’aboutissement de décennies de connaissances locales. » L’orientation coule dans les veines de Pete, dont le job consiste à enseigner les systèmes d’information géographique dans une fac communautaire du coin, en s’appuyant sur les compétences acquises durant ses études supérieures. C’est là qu’il a utilisé pour la première fois des outils d’analyse de données pour explorer l’écologie forestière à la fin des années 90.

Aujourd’hui, Kennedy réalise des cartes des sentiers populaires qu’il améliore grâce aux technologies du moment. La première étape consiste à définir l’échelle et le niveau de détail d’une carte. Ensuite, il fouille le web pour récolter des données contenues dans des cartes déjà existantes, des enquêtes gouvernementales, des blogs, et autres applis comme Strava. Ensuite, il va sur le terrain pour faire des ajouts et des modifications sur la base de l’expérience vécue.

« Je peux faire une carte d’à peu près n’importe où. Quand je travaille sur le terrain, je visite tous les endroits, dans les moindres détails. Je me sens très connecté au lieu. » Vient ensuite le choix de la typo et des illustrations : les œuvres de Kennedy trouvent aussi bien leur place sur votre mur que dans une boîte à gants.

Il faut un an à Kennedy pour finaliser une carte. Mais il estime qu’il pourrait réduire le temps de réalisation à trois mois s’il était en mesure de se dédier à ce projet à plein temps. S’il sait qu’une carte ne remplacera pas un GPS, il croit en sa valeur ajoutée : « Avec nos cartes, le petit point bleu de votre écran devient un lac ou une rivière sur le papier. C’est plus réel. » pisgahmapcompany.com

PISGAH MAP COMPANY Kennedy (en haut) et ses cartes en papier amoureusement élaborées.
18 THE RED BULLETIN
GROWL TOM WARD

Le retour du Mack

Le rappeur de Seattle partage quatre sons qui furent pivots dans son éducation musicale.

Ben Haggerty, alias Macklemore, lauréat d’un Grammy Award, s’est fait connaître en 2012 avec Thrift Shop Le titre, enregistré avec son partenaire musical et producteur habituel Ryan Lewis, a été visionné 1,7 milliard de fois à ce jour sur YouTube. Sur Ben, son premier album solo en six ans, ce père de trois enfants originaire de Seattle jette un regard attendri sur ce, ceux et celles qui ont fait de lui l’artiste qu’il est aujourd’hui.

« Il est très important de lancer des fleurs aux gens, pour leur rappeler à quel point on les aime. » Le rappeur de 39 ans sélectionne ici une poignée de titres qui ont influencé sa carrière. macklemore.com

Scannez le code pour écouter la playlist de Macklemore sur Spotify.

Hieroglyphics

You Never Knew (1998)

« Cette chanson est sortie quand j’avais 15 ans. Elle a lancé l’album Third Eye Vision du collectif hip-hop californien d’une manière qui a marqué ma vie à jamais. Je prenais beaucoup d’hallucinogènes et je faisais des promenades que je synchronisais avec la musique. Lorsque les champis faisaient effet, je sortais et je marchais dans Seattle jusqu’à 6 heures du matin. C’était une expérience très spirituelle. »

OutKast SpottieOttieDopaliscious (1998)

« OutKast m’a ouvert les oreilles. Les choses qu’ils faisaient sur le plan sonore, comme les mixages, les panoramiques – la façon dont leurs voix allaient et venaient dans le casque – et cette manière de hacher les mots ont eu une influence considérable sur l’artiste que je suis devenu. Ce disque, c’était la bande-son des vendredi et samedi soirs. À la fois nostalgique et victorieux. »

Method Man feat. Mary J. Blige

I’ll Be There For You/ You’re All I Need To Get By (Puff Daddy Mix) (1995)

« D’une certaine manière, c’est grâce à ce disque que j’ai commencé à rapper. Mon meilleur ami et moi allions à l’école à pied, il faisait du beatbox et je jouais la partie de Method Man. C’est devenu un élément essentiel de mon jeu… C’est à ce moment-là que je me suis dis que je devrais essayer d’écrire et voir ce qui pourrait se passer. »

Rick James Mary Jane (1978)

« J’ai entendu Mary Jane pour la première fois sur la BO de la comédie de 1995 Friday, qui m’a fait découvrir tant de musiques que je n’aurais probablement pas connues en tant que fan de hip-hop qui a grandi sans Internet. C’est la chanson parfaite pour fumer de l’herbe. Je me souviens l’avoir écoutée en jouant à Mario Kart et à GoldenEye. Mais le truc avec l’herbe, c’est qu’en général, ça efface les souvenirs précis. »

MACKLEMORE
20 THE RED BULLETIN JAKE MAGRAW WILL LAVIN

Certains choisissent de se prélasser sur le canapé

SUUNT O VERTICAL

Le surf no limit

La surfeuse portugaise de 23 ans se rêve en Kelly Slater au féminin. Elle nous explique comment elle y met toute sa détermination et sa passion, malgré les coups du sort.

Décembre 2022 : Teresa apparaît en pleurs sur le podium de la compétition du North Shore d’Oahu (Hawaï). Les raisons de sa terrible déception, elle les explique dans un post Instagram quelques jours plus tard. « C’était la meilleure année de ma vie côté compétition, jusqu’à aujourd’hui, où je me suis battue sans rien lâcher sur cette finale. Mais cela n’a pas suffi, je finis troisième… » En position de qualifiée sur le WCT (championnat du monde de surf), la double championne d’Europe junior (2016 et 2017) est cruellement débarquée à un cheveu de rejoindre l’élite mondiale du surf féminin. C’était sans compter un rebondissement de dernière minute, sorte de happy end, ou de seconde chance : suite à des forfaits, Teresa gagne sa place de remplaçante sur le WCT. Nul doute que la jeune femme de Cascais, la niaque chevillée au leash, va saisir sa chance.

the red bulletin : Comment avez-vous digéré cet échec au terme de votre meilleure année ?

teresa bonvalot : J’ai écrit ce post pour montrer qui j’étais et ce dont j’étais capable, et dans les heures qui ont suivi, je me suis remotivée. Tout ce que j’ai investi ces dernières années, ça fait ma force. Et dans ce moment particulièrement dur, ça m’a aidée. On sait que dans le sport de haut niveau on passe beaucoup plus de temps à perdre qu’à gagner, alors il faut savoir vite passer à autre chose, rebondir sans tarder.

Qu’avez-vous appris sur vous ? Que les choses n’arrivent pas forcément quand on les veut le plus, mais en leur temps. À être plus patiente ! Et accepter son sort, même quand on a du mal à analyser ce qui s’est passé. Le circuit chez les filles est très relevé, il y a peu d’épreuves où on peut briller, donc il faut s’accrocher à ses bons résultats passés, continuer à se perfectionner pour saisir sa chance le moment venu…

Yann Martin, votre team manager chez Rip Curl, parle de vous comme d’une compétitrice acharnée. Toutes les pros le sont : qu’est-ce qui vous différencie ? J’ai toujours envie de gagner, quel que soit l’enjeu, et pas que dans le surf. C’est un trait de ma personnalité. Je vais me battre jusqu’au bout, tout donner. Je n’ai de cesse de me pousser, encore et encore et encore, j’en veux toujours plus ! Pour moi, il n’y a aucune limite.

Comment comptez-vous progresser encore et encore ?

Grâce à ce perfectionnisme. Et à ma capacité d’adaptation : avant, j’avais tendance dans les heats de compétition à attendre la meilleure vague, celle qui peut potentiellement me rapporter le plus de points, mais qui a, en réalité, peu de chances de survenir. Je dois composer avec ce que me propose l’océan.

Avez-vous des méthodes d’entraînement spécifiques pour ce faire ? Je travaille trois jours et demi par semaine avec une préparatrice mentale, Ana Ramires, et on se concentre sur le fait d’être plus actives dans l’eau, ne pas attendre la vague, mais

aller la chercher. Cela donne un flow, un meilleur rythme, et m’aide à être plus constante sur chaque vague.

Quelle est votre training type ?

Le matin, je me concentre sur les manœuvres : en travaillant notamment celles qui sont 100 % faisables dans toutes les conditions… L’aprèsmidi, j’applique ce que j’ai fait le matin, en solo, et ensuite, j’ai la partie physique avec un entraînement de mobilité qui consiste à augmenter l’amplitude de mouvement, contrôler les muscles entourant chaque articulation et donc à éviter les blessures.

Votre détermination est sans faille. À quand remonte votre décision de devenir surfeuse professionnelle ?

J’ai commencé le surf et la compétition à 9 ans. J’ai tout de suite accroché, participé à tous les contests amateurs, et j’ai su que si je voulais faire les choses correctement, il fallait que je passe pro. Et lorsque j’ai eu ma première wild card (invitation, ndlr) à 13 ans, lors d’une compétition WCT chez moi à Cascais, ça été le déclic. Je me suis retrouvée face aux meilleures surfeuses au monde, et j’ai su : c’est là où je voulais être toute ma vie.

Ces surfeuses que vous avez affrontées à 13 ans, vous les retrouvez dix ans plus tard sur le circuit… C’est fou ! Elles étaient mes idoles, les championnes du monde, les Stephanie Gilmore, les Carissa Moore. Stephanie que j’admire pour son style, Carissa pour sa puissance. Je rêverais d’être un concentré des deux ! Ces filles sont toujours aussi fortes aujourd’hui, ça me donne de l’espoir pour ma progression et la suite !

Vous vous voyez une longévité de carrière à la Kelly Slater ? Lors de ma première interview, j’avais dit que je voulais être la Kelly Slater féminine. C’est le boss. Un niveau incroyable, et un sourire en permanence sur le visage. J’ai eu la chance de le croiser il y a quelques années. Il est resté humble, passionné, même après 50 ans. Surfer, c’est ce que je préfère faire au monde. Comme lui j’imagine !

Teresa Bonvalot
Texte PATRICIA OUDIT Photo RYAN MILLER
22 THE RED BULLETIN RYAN MILLER/RED BULL CONTENT POOL
THE RED BULLETIN 23
« Je dois composer avec ce que me propose l’océan. »

Face à la haine, soyons joyeux

À

Dans son ouvrage Je suis votre pire cauchemar, Kiyémis analyse la façon dont sexisme, racisme et grossophobie s’imbriquent dans notre société. Mêlant expériences personnelles et références de lecture, ce livre a été pensé par l’autrice comme un déclencheur de conversations, sans leçons de moral, pour toutes les femmes, qu’elles lui ressemblent ou non. Contrairement à ce que pourrait laisser penser le titre, il y est surtout question de joie et d’amour de soi, à l’image de sa couverture lumineuse et de notre discussion. Celle qui a commencé en 2014 à partager ses pensées sur son blog (lesbavardagesdekiyemis) aime échanger en incluant les autres : « Dans ce livre, l’objectif le plus important était de parler de moi pour parler de nous. Je vois mes anecdotes personnelles comme des portes d’entrée. »

Femme noire, grande et grosse, Kiyémis qualifie son corps de « miracle » dans une société où la norme est la minceur et la blancheur. Avec du recul et de l’analyse, elle a créé l’étiquette de « la fille cauchemar » repoussante, l’antagonisme de « la bonnasse » qui attire privilèges et fantasmes. Dès sa jeunesse, Kiyémis a expérimenté la grossophobie et le racisme dans les sphères publiques et privées. Piscine, cour d’école, boutiques de vêtements, restaurants, relations amoureuses, aucun espace ne protège des jugements et des comparaisons. Cacher son corps et en avoir honte étaient donc de mise :

« En Occident, on t’apprend à voir ton corps comme un ennemi qu’il faut coloniser, contrôler, quitte à le

violenter pour essayer d’atteindre un objectif inatteignable. On se punit de ne pas être parfait·e. »

Elle a très tôt conscientisé le fait d’être une femme noire, surtout avec une mère au fait de ces questions : « Ma mère est arrivée à 9 ans du Cameroun et a grandi en France, faisant partie d’une minorité. Elle parlait toujours du manque de représentation des femmes noires à la télé sans le dire tel quel. Elle nous répétait à mes frères et moi qu’il fallait qu’on fasse deux fois plus que les autres, et moi trois fois plus vu que je suis femme et noire. »

Ce n’est que plus tard, lorsque Kiyémis a débuté ses lectures afroféministes avec « une curiosité enragée » – notamment les ouvrages de Bell Hooks (militante américaine, théoricienne du black feminism) qu’elle cite beaucoup – qu’elle apprend que sa mère avait lu Angela Davis (féministe et écrivaine américaine, qui défend les droits humains) à vingt­cinq ans. « Ces textes étaient une légitimation de ce que ma mère m’avait toujours dit. Ce qu’elle avait lu et appris infusait toute notre éducation. Elle avait un discours d’afroféminisme avant ce mot. » Kiyémis a misé sur l’équilibre entre expériences de vie, lectures fondatrices et recommandations maternelles pour s’émanciper des diktats de la société et y trouver sa place.

Vivre et réfléchir à ces phénomènes discriminatoires a poussé Kiyémis à développer un discours sur ces oppressions systémiques subies par beaucoup : « Ce qu’on vit n’est pas normal, le monde n’est pas obligé d’être comme ça, on ne doit pas subir le racisme et le sexisme. » À force d’être en colère et en réaction

constante, la jeune autrice a connu une période difficile entre ses 26 et 29 ans : « Je n’arrivais plus à aller manifester, j’avais trop consommé de violence, j’ai vu trop de corps noirs malmenés. C’était le burn out militant et la dépression. » Même si la colère a contribué à créer une communauté soudée derrière des combats communs, elle consume à petit feu et ne permet pas de construire.

« Je suis en PLS là ! Cette société est violente, elle nous traumatisme et on n’a pas d’outils pour guérir. » Grâce à une thérapie et de nombreux questionnements, Kiyémis a trouvé son remède et a appliqué les conseils de sa mère inquiète : « La joie permet de se projeter, d’espérer et de respirer, elle fait naître plus de choses. »

Surtout, l’autrice relativise en repensant aux esclaves et aux anticolonialistes qui ont réussi à transmettre cette joie malgré leur condition. « Audre Lorde (poètesse, militante féministe engagée dans le mouvement des droits civiques en faveur des Afro-Américains, ndlr) disait qu’on n’était pas censé·e·s survivre mais on a survécu. On a conservé nos chants, nos religions, nos histoires, nos humanités, notre capacité à briller et à être lumineux ensemble. C’est miraculeux ! » Cependant, la dernière partie de son ouvrage portant sur la joie a été plus difficile à écrire : « Heureusement que la poésie m’aide, elle me permet de saisir des choses que je n’ai pas encore. »

Grâce à ce sentiment positif devenu prédominant dans sa vie, Kiyémis a appris à accepter qu’elle ne pouvait pas tout contrôler : « L’amour à mon corps est fluctuant et je l’accepte, ça me libère. Il y a des jours où je ne l’aime pas et c’est okay, et des jours où je le trouve beau, je le respecte, je le chéris. »

Aujourd’hui, Kiyémis distille sa joie de vivre en tant qu’animatrice sur Médiapart. Et cette émission ne pouvait mieux porter son nom : Rends la joie. Celle qui n’est pas habituée aux personnes comme elle à l’écran se plaît à se voir rire, à aimer la couleur et la chaleur de sa peau. Je suis votre pire cauchemar, un livre de Kiyémis, aux éditions Albin Michel.

Kiyémis
Texte OUAFAE MAMECHE Photo ADELINE RAPON
24 THE RED BULLETIN
la rencontre de Kiyémis, poétesse et autrice afroféministe qui, pour dénoncer la grossophobie de la société, prône la joie.
THE RED BULLETIN 25
« La colère ne permet pas de construire. »

Sur la terre comme au ciel

Le 18 juin, 35 athlètes de parapente débuteront la course de hike & fly (marche et vol) la plus difficile au monde : le Red Bull X-Alps. Rencontre au sommet avec l’un des favori·e·s.

Aaron a 6 ans quand il commence à voler avec son père, l’un des tous bons parapentistes de la région, au-dessus du Sud-Tyrol (Italie).

Biberonné aux aires de déco et d’atterro écumées par le paternel, le garçon a l’illumination céleste : « J’ai tout de suite su que je voulais faire ça dans ma vie, dit-il dans un grand sourire avant d’ajouter : de là-haut on voyait les locaux de Salewa, mon sponsor historique depuis dix ans. » Précoce, vol en solo à 15 ans, un an avant l’âge légal en Italie. Le roi du hike& fly et double champion du monde de parapente cross-country (2012 et 2017) de 37 ans compte des dizaines de milliers d’heures de vol. Bien assez pour nous accueillir chez lui, là-haut.

the red bulletin : Vous dites que voler pousse tous les curseurs, bons ou mauvais. C’est à dire ? aaron durogati : Voler amplifie toutes les émotions. Si vous vous sentez mal, vous vous sentirez encore pire, si au contraire, vous êtes heureux, vous nagerez dans le bonheur le plus total. C’est aussi voir les choses d’au-dessus : quand j’étais ado et que je volais au-dessus de mon école, je voyais les gens et les rues avec une perspective différente. C’est quand même super cool d’être un homme qui vole avec les oiseaux.

Vous volez souvent avec eux ?

Quand je gagne de l’altitude grâce aux thermiques, je vais parfois plus vite qu’eux, à part les aigles, plus rapides. Je n’ai jamais eu aucun

problème, sauf une fois : je volais près d’un nid d’aigle et la mère a dû me percevoir comme une menace pour ses petits et elle s’est attaquée à moi, mais je m’en suis sorti. Au Pakistan et au Népal, je vole avec les vautours, il y en a parfois jusqu’à vingt autour de moi.

Parlons compétition entre humains… En juin, vous allez participer pour la sixième fois à la plus redoutable d’entre elles… Le Red Bull X-Alps, une incroyable aventure : 1 200 km à travers les Alpes, c’est très éprouvant physiquement : à la fin, j’aurais marché jusqu’à 500 km, effectué entre 3 000 et 5 000 m de dénivelé par jour, et dans les bons jours, volé 10 heures sur 18 heures de course quotidienne. Heureusement, le matériel est de plus en plus léger au fil des années : mon parapente ne pèse que 6 kilos.

Qu’est-ce qui vous attire dans ce format hike & fly ?

Ce sont des épreuves très joueuses, avec une part de stratégie. Et ça sur des jours entiers ! Lors d’un contest classique, on décolle et on atterrit le même jour, comme un circuit de course de F1. Ici, c’est sans fin ! On est en totale connexion avec la nature, on doit s’y adapter, marcher jusqu’au déco et voler même dans les pires conditions…

Le lien entre ciel et terre, vous le faites de façon encore plus rapprochée via le speedflying…

En 2014, j’ai fait le Red Bull Peaks Trilogy qui consiste à gravir trois sommets (le mont Blanc, le MontRose et le Breithorn, ndlr) en partant de la vallée et à voler depuis le haut

en ouvrant à chaque fois de nouvelles lignes. Ces moments restent gravés à jamais dans ma mémoire.

Vous avez survolé nombre de pays. Quel trip vous a le plus fait planer ? Le Pakistan l’an passé. J’ai combiné le ski et le parapente en haute altitude. Il n’y a qu’en Himalaya que l’on peut faire ça : skier des pentes raides inaccessibles et profiter de fenêtres météo incroyables pour voler de grosses distances près du Nanga Parbat, audessus de glaciers impressionnants. Au passage, j’ai battu le record de distance asiatique en parcourant 315 km d’une traite.

Récemment, vous êtes revenu à l’acrobatie lors d’un stage en Arizona (parachutisme, saut de ballon et d’hélicoptère). Ça vous manquait ?

L’ensemble des pilotes Red Bull réuni·e·s, c’était génial ! Je me suis bien amusé à refaire des acrobaties, à sauter de l’hélico et du ballon, mais le plus important pour moi était de progresser en skydiving. J’ai pu faire du simulateur et sauter vingt fois en solo.

Dans quoi avez-vous envie de vous engager désormais ?

J’ai créé un nouveau concept de compétition, le hike & fly trophy l’an passé avec un autre pilote de chez Red Bull, Paul Guschlbauer. J’aimerais que d’ici trois ans, cela devienne un circuit avec six étapes donnant la possibilité à des amateurs de participer, de progresser pour ensuite se qualifier sur des épreuves plus élitistes. Salewa est bien sûr partenaire de ce contest qui a l’air de plaire à notre communauté : l’an passé, les inscriptions ont été closes en deux semaines.

Pensez-vous qu’un jour tout le monde pourra voler ?

Il suffit d’avoir la motivation. Une fois que vous avez la technique, le parapente est le plus accessible des engins volants. C’est un gros sac à dos, et quand vous le dépliez, vous êtes libre de voler de n’importe où.

Suivez Aaron sur son Red Bull X-Alps en juin via redbullxalps.com ; IG : @aarondurogati

Aaron Durogati
Texte PATRICIA OUDIT Photo PHILIPP REITER
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« Au Pakistan, et au Népal, je vole avec les vautours. »

Tous en Seine

L’élite du plongeon de haut vol revient à Paris le week-end du 17-18 juin pour le Red Bull Cliff Diving World Series. Retour sur une saison 2022 d’enfer.

ROMINA AMATO/RED BULL CONTENT POOL
Texte NORA O’DONNELL et PH CAMY

Monumental Avec la structure la plus emblématique de l’horizon parisien en arrière-plan, Jessica Macaulay saute dans la Seine en juin dernier. Après une solide saison 2022, la plongeuse canadienne sera de retour cette année.

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Red Bull Cliff Diving

Contre-plongeon

Le Français Gary Hunt effectue un plongeon d’entraînement depuis la plateforme de 27 m lors de la dernière étape de la saison 2022 en Australie. Il a terminé une saison passionnante en remportant son dixième titre des Red Bull Cliff Diving World Series.

30 THE RED BULLETIN ROMINA AMATO/RED BULL CONTENT POOL

Chute libre

L’Ukrainienne Antonina Vyshyvanova tombe calmement en chute libre depuis la plateforme de 21 mètres à Boston, aux USA. Les Red Bull Cliff Diving World Series visiteront six pays au total cette année.

ROMINA AMATO/RED BULL CONTENT POOL

Red Bull Cliff Diving

La reine d’Australie Lors de la dernière étape de la saison 2022 à Sydney, l’Australienne Rhiannan Iffland, 31 ans, a remporté son sixième titre du Red Bull Cliff Diving lors d’un retour triomphal à domicile. « Je voulais donner un bon spectacle devant mon public », a déclaré Iffland, ici en train de faire un saut périlleux arrière dans le port, après la compétition.

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Red Bull Cliff Diving

Le grand frisson

La dramaturgie du Red Bull Cliff Diving à son paroxysme : l’Américaine Eleanor Smart plonge d’une plateforme à flanc de falaise à Polignano a Mare, en Italie. À la fin de la série 2022, elle s’est assuré la troisième marche du podium de la saison.

À l’équilibre

Le plongeur suisse Matthias Appenzeller, l’un des quatre participants wildcard (qui rejoignent les dix plongeurs et plongeuses permanent·e·s de chaque événement), se prépare à plonger vers la surface (si lointaine) du lac des Quatre-Cantons à Sisikon, en Suisse.

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Red Bull Cliff Diving

Le patron Voilà un athlète qui porte bien son nom : le métier du fantastique Gary Hunt, c’est la chasse aux records. Avec ses dix titres aux Red Bull Cliff Diving World Series, le plongeur britannique au passeport français en est définitivement le patron.

37 DEAN TREML/RED BULL CONTENT POOL

Paris est magique

Imaginez-vous en trip touristique ou en simple promenade à Paris, et tomber sur cette scène hors du commun. L’incroyable set-up du Red Bull Cliff Diving, et un plongeur en action, juste en face de la Tour Eiffel. C’est ce qui vous attend le dimanche 18 juin prochain.

Traditionnel

Mostar, en Bosnie-Herzégovine, a une longue histoire en matière de plongeon de falaise, et ce site de Stari Most (traduction : vieux pont) est l’une des étapes les plus étonnantes des World Series. Ici, le plongeur espagnol Carlos Gimeno fait un saut périlleux lors du dernier jour de la compétition.

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Red Bull Cliff Diving

La compétition de plongeon de haut vol Red Bull Cliff Diving revient à Paris le 18 juin (finales) pour la deuxième année consécutive et la première étape de la saison. Un événement gratuit à suivre en live face à la tour Eiffel, au port Debilly, ou sur Red Bull TV dès 16 heures. redbull.com

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ALEX VOYER, ROMINA AMATO/RED BULL CONTENT POOL

Lignes de vie

Nous pensions juste rencontrer le troisième meilleur joueur de tennis de la planète. Avec STÉFANOS TSITSIPÁS, nous découvrons une âme et une personnalité, dont l’envie d’inspirer (et d’être inspiré), les passions et perspectives s’étendent bien au-delà des lignes d’un court.

Le joueur de tennis pro grec Stéfanos Tsitsipás, 24 ans, lors d’une séance photo avec Antoine Truchet à Marbella, Espagne. Texte PH CAMY
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Photos ANTOINE TRUCHET et STÉFANOS TSITSIPÁS
« Mon tennis ne va durer que quelques années, mais ça va être une virée excitante. »
Sur cette photo (et en page 45), Stéfanos est habillé en AlphaTauri.

Un numéro 3 (au jour de notre entretien, début avril) si jeune, 24 ans, mais déjà riche d’expériences, d’envies, de volonté, de réalisme et de positivité. Venu d’un pays où l’on n’attendait pas grand-chose d’un joueur de tennis, et dont le monde du tennis mondial n’attendait pas grand-chose non plus, Stéfanos a tracé sa route jusqu’aux hautes sphères du jeu à l’international, débarquant dans le top 10 en mars 2019, et a connu, depuis, des hauts et des bas, des moments de joie immense (il nous en parle plus bas), et d’autres beaucoup plus difficiles (une finale de Roland Garros perdue face à Novak Djokovic en 2021 et entamée 5 minutes après qu’on lui ait annoncé le décès de sa grand-mère à laquelle il tenait énormément). Basé à Monaco, avec sa famille, au sein de la fameuse Academy de tennis de Patrick Mouratoglou (qui l’a repéré alors qu’il n’avait que 15 ans), Stéfanos connaît les contraintes du tennis game depuis son plus jeune âge (en bref, une succession de tournois, une année à jumper de pays en pays pour affronter les plus gros killers de l’ATP) et a décidé d’en prendre le meilleur. Curieux des autres et du monde, il se plaît à partager ses expériences via son vlog de voyages sur YouTube, et documente ses moments hors les courts et ses trips en photo. Comme il nous l’expliquera, Stéfanos œuvre pour le tennis au sens large, autant qu’il s’épanouit en dehors. Il veut inspirer et s’inspirer. Avec nous, il se souvient d’hier, et de celles et ceux qui l’ont aidé à être qui il est aujourd’hui, et pense à demain. Nous parle du monde qu’il veut découvrir, toujours plus. Alors qu’il se livre sur ses buts de vie, nous découvrons un esprit, un sensible, un photographe, un curieux, qui s’explore autant qu’il explore le monde – quand il le peut. Checkez ses vlogs, ses photos et ses contenus pour le site américain tennischannel.com. Stéfanos est un joueur d’1,93 m dont le talent au plus haut des niveaux n’est plus à prouver, mais dont l’état d’esprit, entier, mérite de rayonner, au-delà du tennis et de ses fans. À l’approche de la 122e édition du prestigieux tournoi de Roland Garros, voici la retranscription d’un échange en visio de 45 minutes, pour vous permettre de connaître différemment, ou de découvrir, Stéfanos Tsitsipás.

Vous l’avez à portée de main ?

Oui, je peux l’attraper… (Rires)

Stéfanos nous montre le fameux carnet, intitulé The Idea Book

Comment l’utilisez-vous ?

Ça me permet d’être créatif, il n’y a pas de limites, je peux écrire ce que je veux. Je suis plutôt ambitieux, et j’aime la découverte, sortir de ma zone de confort, donc si j’écris quelque chose dedans, je sais que je vais l’accomplir en quelques années, ou quand j’aurai pris ma retraite du tennis. Alors, j’aurai tout le temps du monde pour être libre de faire tout cela. Mais je veux rester réaliste, je ne veux pas écrire des idées que je ne pourrai jamais réaliser.

Est-ce que vous êtes okay pour nous lire la dernière chose que vous avez inscrite dans ce carnet ?

(Rires) Voyons… Oui, j’ai une idée ici… ça dit, et c’est vraiment la dernière que j’ai écrite, il y a une semaine environ : « Donner un million d’euros, ou plus, pour le développement du tennis grec. »

Quelle est l’intention derrière ces quelques mots ?

the red bulletin: Stéfanos, le tennis vous fait parcourir la planète chaque année pour le tour ATP, pouvez-vous lister les pays dans lesquels vous vous êtes rendu depuis le 1er janvier ?

stéfanos tsitsipás : L’Australie, les Pays-Bas, la Grèce, l’Italie, Monaco, la France, les États-Unis d’Amérique…

Quel que soit le but du voyage, que faites-vous toujours en déplacement ?

Je reste fixé sur ma routine, car ça me fait me sentir plus proche de la maison, il y a des choses que je fais religieusement. Aussi, je m’assure toujours d’avoir des photos signées avec moi, c’est quelque chose de nouveau dans ma vie…

Pourquoi ?

L’idée m’est venue durant la pandémie : pré-signer des photos, car je sais que je vais rencontrer beaucoup de personnes qui regardent le tennis, des fans, et je m’assure d’avoir toujours des photos dédicacées à leur offrir. Ça me permet

d’en donner plus aux gens, aux gamins, et de gagner du temps.

Que faites-vous de ce temps gagné ?

Le temps est très important pour moi, et pour le tennis en général. Le plus on peut donner au tennis, le plus heureux sont les joueurs, meilleur est le tennis et meilleur est notre environnement de travail. Une autre chose que j’embarque toujours avec moi en déplacement, c’est un sac, avec mes essentiels, comme mon ordinateur portable et aussi un carnet, mon carnet à idées. Il y a tout ce qui me traverse l’esprit dedans, les plus grandes choses que je veux accomplir ou conquérir dans ma vie. Je m’assure toujours de l’emporter et d’y noter mes idées, quand j’en ai.

Je veux apporter quelque chose au tennis grec. Je sais que la fédération ou les associations grecques ne le pourront pas, alors je veux le faire moi-même. En faisant cela, je serai pleinement satisfait, et ça me donne de la motivation pour donner encore plus sur le circuit du tennis, sur le tour. Car si je fais mieux, et que j’arrive à obtenir plus de revenus financiers avec mon tennis, je pourrais donner plus d’argent en retour pour le développement du tennis en Grèce.

À quel moment avez-vous pris conscience que ces voyages pour le tour pouvaient être bénéfiques pour votre vie perso, pour autre chose que juste participer à des tournois ?

En 2017, quand je suis monté d’un cran, j’étais alors encore nouveau dans le tour, et il y a eu un déclic dans ma tête, une voix qui me disait : « Okay, tu vas faire ça pendant de longues années, tu devrais te trouver un truc en parallèle qui te maintienne sain d’esprit, et en bonne santé mentale. » J’avais toujours été un explorateur et un aventurier, mais dans mon cœur. Je voulais visiter et voir de nouveaux endroits, mais j’étais jeune, et totalement inexpérimenté, et sous la super-

Stéfanos Tsitsipás
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« C’est bien audelà du tennis que j’ai ma place. »

Stéfanos Tsitsipás

vision de mes parents. En grandissant et devenant plus libre, je me suis donné plus d’opportunités d’être indépendant, de prendre des décisions pour ma vie.

Vous êtes connu pour être plutôt en mouvement, actif.

Si j’ai un peu de temps entre deux tournois, je vais peut-être sauter dans un avion et me rendre quelque part pour voir des choses, plutôt que de rester à la maison, dans mon canapé, à regarder la télé… ça n’est pas mon truc. Je préfère les trips spontanés et être au contact de nouvelles cultures, de nouvelles idées, de nouvelles personnes.

Vous parvenez à voyager à des moments où vous devriez être au repos à la maison entre deux tournois ?

Je dois être malin, ne pas faire de trucs ridicules entre deux tournois, spécialement quand le temps est réduit. Bien sûr, je vais tenter de savoir comment se sent mon corps, et ce dont il a besoin, et ainsi, je peux privilégier ma remise en forme quand c’est le cas, aidé par une équipe qui m’aide au quotidien à réaliser mes rêves et être flexible, fort, puissant, toutes ces choses. Je dois donc la jouer intelligemment et rester à la maison parfois malgré l’envie irrépressible de me faire un trip. Je dois privilégier mon tennis, car il ne va pas durer longtemps.

Qu’entendez-vous par là ?

Mon tennis va durer seulement quelques années, mais ça va être une virée excitante, et je veux donner le max pour

qu’elle soit la plus passionnante possible, et ça, ça s’organise avec sagesse.

Si j’en crois votre vlog sur YouTube, vous avez visité Oman, l’Islande, ou encore Shanghai...

Je suis en effet allé en Islande deux fois déjà, et j’ai adoré. C’est tellement bien d’être là-bas. Les gens, cette culture viking si forte. Bien sûr, il y fait froid, et les distances sont longues, mais il y a une sensation d’aventure dans ce pays que je n’ai pas perçue ailleurs. C’est une sorte d’utopie arctique.

Dans quel esprit voyagez-vous ? Quel « esprit », très bonne question. Ça commence par une liste de pays que je veux visiter, avec une vibe dont je veux me sentir proche dans ma vie, des pays comme le Brésil ou le Pérou, dont j’adore la nourriture, la cuisine péruvienne est la meilleure au monde selon moi. Il y aussi la Namibie, pour explorer les dunes, et voir comment le désert bascule vers l’océan, ce qui donne une transition magnifique en termes de couleurs. J’ai aussi listé la Corée du Sud. Je n’ai pas l’opportunité de me rendre dans ce genre de pays sur le tour ATP, car c’est très spécifique, puisqu’à mon niveau, on va généralement dans les mêmes pays.

Que ferez-vous quand vous pourrez visiter l’une ou l’autre de ces destinations sur votre liste ?

Je veux me perdre dans ce genre de pays, avec d’autres gens, des potes, la famille. Ce serait satisfaisant, j’aurais l’impression de vivre ma vie au max. Une vie sans regrets, avec des interactions et des aventures permanentes. Voyager est bien mieux que n’importe quel bouquin, ou que n’importe quel film. Tu es le film.

Vous documentez vos déplacements avec votre appareil photo, quand avezvous commencé ?

En 2016, quand j’ai pu me permettre d’acheter mon premier appareil, et je suis accro depuis. Ça m’a apporté un certain équilibre, et j’ai commencé à maîtriser de nouvelles choses en photo en même temps que de nouvelles choses au tennis. C’était une phase de ma vie où je m’améliorais constamment au tennis, mais aussi en photo, dans cette activité parallèle de ma vie où j’apprenais non-stop, tout le temps. J’absorbais toutes ces informations en regardant des vidéos en ligne, afin de devenir meilleur. C’était une très bonne balance qui m’aidait dans mon tennis, ça m’offrait de la sérénité d’esprit, et m’ouvrait à un plan B.

« Avec mon bon pote Matthias Dandois. Il a été l’un des premiers à m’accueillir dans la famille Red Bull. Nous avons tout de suite sympathisé et continuons à nous parler fréquemment. Je lui suis reconnaissant d’avoir joué un petit rôle dans ma vie. »

Est-ce que votre œil de photographe a transformé, ou amélioré, votre œil de tennisman ?

J’y pensais, justement… Ça me donne un œil frais, différent.

Comment cela ?

La composition est au cœur de la photographie, et avec l’aspect très géométrique d’un court de tennis, ça a vraiment du sens. Avec tous ces angles et lignes sur

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« Avec mon père, en route pour notre prochain tournoi. Il a tendance à beaucoup parler, alors le voir dans un moment de silence et de paix comme celui-ci est très rare. »
« Je suis venu et j’ai fait le boulot, ce pourquoi on m’attendait. »
« Mon titre aux Masters en 2019 valait un titre en Grand Chelem. »

un court de tennis, tu as une super composition. C’est comme ça que je peux le décrire. Le cadrage, cette composition, ces lignes, qui se croisent, tout ça. Le court de tennis est un très bon exemple de mon approche de la photographie.

Vous pensez photo quand vous jouez durant un tournoi ?

Je me concentre sur le jeu… (Rires)

La photo est aussi synonyme de souvenirs, quel est votre souvenir le plus mémorable, en tant que tennisman, et dans votre vie perso ?

Côté tennis, c’est quand j’ai gagné les ATP Finals à Londres en 2019 (les Masters, qui voient s’affronter les huit meilleurs joueurs de la planète, ndlr). C’était un moment vraiment joyeux, car je finissais l’année de la plus belle façon possible, en gagnant un titre, et en achevant cette année-là sur une note positive. Depuis, rien de meilleur ne m’est arrivé. Certes, il y a eu d’autres titres qui m’ont fait me sentir extatique, comme sur une autre planète, mais ce titre aux Masters à Londres, ça valait un titre en Grand Chelem.

Pour quelles raisons ?

Parce que j’ai battu des joueurs au top, tous dans le top 8, et que j’ai joué l’un de mes meilleurs tennis. J’étais extrêmement focus sur le court, rien ne pouvait m’arrêter. Et cette joie à la fin, c’était immense. Ça restera en moi toute ma vie. C’était un énorme aboutissement, spécialement pour un joueur de tennis comme moi… Le tennis n’était pas du tout connu en Grèce, il était vu comme un sport de riches, on le comparait au golf, un truc que tu fais au country club si tu as les moyens, et du temps. Peu de personnes pensaient pouvoir y jouer. Je pense que ce titre a été un message fort.

Lequel ?

J’ai l’impression que cela a unifié les gens de la Grèce, et permis une compréhension claire de ma vision du tennis. Le premier ministre grec était présent, il y a eu une belle célébration, beaucoup d’intensité, beaucoup de frissons. J’ai vraiment apprécié cette semaine à Londres, toute mon équipe était là, ma famille, mes cousins. Gagner devant eux, en étant si solide, et si féroce sur le court… J’ai fait le taf, et c’était la plus belle chose. Je suis venu, et j’ai fait le boulot, ce pourquoi on m’attendait.

Et côté perso, quel souvenir perdure ? Si je joue au tennis aujourd’hui, c’est grâce à une personne en particulier qui m’a soutenu, sponsorisé, quand j’étais plus jeune. Je ne mentionnerai pas son nom, mais quand j’ai commencé à tourner en tant que junior, mon pays a été confronté à une crise économique majeure, c’était très difficile pour la Grèce, et de vivre dans mon pays à ce moment-là. Mon père m’a pris en charge, et nous avons bougé, pour jouer au tennis. Nous ne rentrions pas au pays très souvent, nous voyagions beaucoup pour les tournois, et quand je revenais en Grèce, c’était très déprimant, les gens souffraient, c’était un quasi-désastre, et il n’était pas simple pour ma famille de me soutenir financièrement pour mes voyages. Mais mon père voyait du potentiel en moi, du talent, et il voulait vraiment que je puisse le faire. Et puis, il y a eu ce gentleman qui est apparu, via ma mère, et qui a offert son soutien. Je pense qu’il m’a sauvé, qu’il m’a donné la chance de prouver ce que je valais, de

prouver de quoi j’étais capable avec mon tennis. Sans lui, je ne sais pas où j’en serais maintenant.

C’est-à-dire ?

Il m’a donné l’opportunité de rêver, de sortir, d’y aller, et de montrer qui est Stéfanos Tsitsipás sur un court de tennis. C’est une période que j’apprécie désormais, car j’ai l’impression grâce à lui de construire un empire chaque jour. C’est ça, mon histoire. Je tiens à ajouter que ce gentleman a donné sans jamais demander quoi que ce soit en retour. Et je pense que peu de gens se seraient comportés ainsi. Il était généreux au point de le faire pour le simple plaisir de le faire.

Ces souvenirs nous transportent dans votre passé, mais quel sera votre futur ? Quels sont vos rêves, vos buts ? (Stéfanos parcourt son carnet à idées.) Je veux vraiment suivre une formation universitaire et obtenir un Master, dans une spécialité particulière. Maîtriser un autre talent, devenir un expert, dans autre chose. C’est mon idée.

Dans quelle spécialité ?

La communication, ou la géopolitique. J’aime connaître les relations entre les pays, la géopolitique, la géographie, ça m’intéresse vraiment. Et j’ai été de plus

Stéfanos Tsitsipás
« Voyager, c’est mieux qu’un film. Tu es le film. »
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« En Islande, le froid et le vent peuvent parfois être atroces, et il faut être vêtu le plus chaudement possible. Cette photo me rappelle les longs voyages en voiture que nous faisions chaque jour avec ma famille pour visiter différents endroits du pays. Et aussi que je suis tombé amoureux de la photographie encore plus pendant ce voyage, gravé dans ma mémoire pour longtemps.
»
TSITSIPÁS

en plus curieux à propos de ces sujets en découvrant des vidéos en ligne. Comment le monde opère, les relations entre les pays et les États. Si j’ai le temps dans le futur, j’adorerais apprendre plus.

Vous vous fixez des challenges au tennis, et aussi dans le perso. Est-ce que le tennis reste votre priorité ?

La famille passe en premier, toujours, c’est mon principe de vie numéro un. Ça passe devant mon tennis. Le tennis sera second, mais il est ma vie, ce pourquoi je respire chaque jour. Tout le reste vient

derrière, parce que cette carrière durera quoi ? 20, 25 ans ? Je l’espère, ce serait fantastique. Peut-être moins, nous verrons. Si je ne me réinvente pas chaque semaine, au lieu de m’élever, je risque de reculer, et c’est là la chose la plus critique de mon métier. Ce sont des discussions permanentes avec mon entourage et mon équipe : comment devenir meilleur ?

Se maintenir dans le top 3 de l’ATP ne doit pas être aisé… Parfois, ça peut être très difficile, décevant, et attristant. Mon job est comme

une montagne russe d’émotions. C’est ce qui rend les choses difficiles. J’ai des jours où je peux perdre ou ne pas bien jouer, et où c’est difficile de dormir, et je me demande : « Est-ce que je peux juste avoir une vie de base, où je peux me sentir normal ? » Ne pas avoir à être super excité et super heureux, ou super triste et super déçu. Juste une balance saine. Je bosse là-dessus en ce moment. Avoir confiance en moi, croire en ce dont je suis capable, afin d’atteindre cette balance. Bien sûr, ça se fait en se pointant sur un court tous les jours, pas en restant dans son canapé. Les résultats arrivent en étant dans une position inconfortable, pour trouver ce qui marche le mieux pour toi. Le plus important, c’est de rester ouvert d’esprit.

Dans l’une de vos récentes vidéos, vous disiez vouloir que l’on se souvienne de vous pas seulement pour le tennis. Que voulez-vous accomplir en dehors des courts et des tournois ?

« Être exposé à toute cette beauté naturelle guérit l’âme. Si je peux me souvenir de quelques moments dans ma vie où je me suis senti vraiment heureux, cette photo en Islande en est l’illustration. Cela me fait réaliser que je n’ai pas besoin de beaucoup de choses pour me sentir heureux et épanoui dans ma vie. »

Je veux par exemple transformer de bonnes idées en une entreprise, dans le caritatif, créer une fondation que je pourrai soutenir, peut-être pour les enfants, ou pour mon pays en termes de développement et de durabilité, je suis très intéressé par cela. Quoi que ce soit qui puisse rendre la planète Terre un meilleur endroit, plus hospitalier. C’est bien au-delà du tennis que j’ai ma place, et que je veux être, être plus vu, à travers mes réussites, qui me donneront l’opportunité de connecter avec plus de gens. J’ai tant d’idées.

Dans quels domaines ?

« J’ai songé plusieurs fois à m’installer en Islande. Construire une maison et utiliser l’île comme un espace sacré où je pourrais explorer, me connecter spirituellement avec moimême, et avoir un vrai moment de paix et de sérénité, en me reconnectant avec toutes mes valeurs et la curiosité de l’enfant qui est en moi. C’est mon pays spirituel, et qui sait, peutêtre qu’un jour, ce sera plus que cela. »

J’adore la technologie et je veux être plus impliqué dans ce genre de choses, même si je ne sais pas vraiment quel impact je pourrais avoir. Tout ce qui touche à l’innovation, qui implique de la durabilité et une planète plus propre et saine. J’aimerais avoir de l’impact, peut-être via une entreprise que je fonderai un jour, dans laquelle des gens avec la même idéologie que la mienne, la même approche de la vie, toujours créatifs et innovants, pourraient contribuer autant que moi.

Vous parlez de technologie et j’ai pu voir dans les comptes Instagram que vous suivez celui du magazine de référence, Wired, mais aussi celui d’un autre athlète, performant et globe-trotteur, le rider BMX pro français Matthias Dandois. Vous partagez

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pas mal de choses en commun il me semble ?

On partage beaucoup de choses, je suis très inspiré par son talent. J’aime son authenticité, et à quel point il est facile de discuter avec lui. On a une super connexion tous les deux. C’est un gars qui a du cœur. Je pense qu’il y a des choses à apprendre des deux côtés, je sais qu’il adore jouer au tennis, et je respecte ce qu’il fait, car sa spécialité, le BMX Flatland est très difficile. Les gens ne se rendent pas compte du boulot derrière ça. Il est vraiment très talentueux, il est neuf fois champion du monde… C’est incroyable. Les gens parlent de Rafael Nadal qui a gagné Roland Garros une douzaine de fois, je crois...

Quatorze fois…

Je ne compte même plus. (Rires) Ils devraient porter plus d’attention à Matthias pour ce qu’il a réussi jusqu’à présent. Il parvient à motiver des jeunes à suivre ses traces, et c’est ce que doit être le sport : inspirer et attirer de nouvelles personnes. Leur donner une vision de leur propre accomplissement. Avoir

un exemple est la meilleure chose dans la vie, quelqu’un que l’on peut admirer, parfois comme une idole, que tu peux copier, et transformer, améliorer son sport en y étant impliqué toi-même.

Vous suivez aussi le basketteur Tony Parker, qui va être intronisé au NBA Hall of Fame… Si vous pouviez nommer quelqu’un pour rejoindre votre Hall of Fame, un proche, athlète ou artiste, qu’importe, de qui s’agirait-il ? (Stéfanos se concentre, et réfléchit longuement.) Tu pourrais t’attendre à ce que je désigne mon père ou ma mère, car ce sont les premières personnes qui me viennent à l’esprit, ou mes frères et sœurs. Le tennis est ma vie. Si je suis là aujourd’hui, c’est grâce au tennis ; si je vis aujourd’hui à Monaco, c’est grâce au tennis ; si je connais les gens que je connais aujourd’hui, c’est grâce au tennis. Pour moi, le tennis est tout, littéralement. Alors, je veux donner ce titre à mon tout premier entraîneur, celui qui m’a appris à jouer.

Qui est-ce ?

Son nom est Giorgos Spiliopoulos. Je me souviens très bien de lui qui se mettait à genoux, à notre niveau, quand nous étions des gamins, pour nous parler. Il nous parlait comme à des adultes, alors que nous n’avions que six ans, nous étions vraiment « petits » (en français dans le texte, ndlr). Avec lui, il y avait beaucoup de discipline mais il était aussi très sympa. Et j’ai encore cette discipline en moi, être costaud, et ne laisser aucune connerie rentrer dans ma tête tout en étant poli, attentionné et respectueux.

Que vous a-t-il apporté ?

Il a spirituellement développé ma personnalité et qui je suis aujourd’hui. Je n’ai peut-être passé que trois ou quatre ans avec lui, mais ce fut assez pour que je devienne celui que je suis. Je me considère comme quelqu’un d’aimable, ce qui n’est pas forcément un avantage sur le court, mais je le suis en dehors, et aussi comme quelqu’un de généreux, poli, authentique, et je pense que c’est aussi grâce à lui. Je sais qu’il va pleurer s’il lit ça. (Sourire) Je veux lui donner ce titre, un gros gros trophée, du plus empathique, génial, généreux et bienveillant coach au monde. Qui est le meilleur coach, je m’en fiche, mais ça, ça compte.

Instagram : @stefanostsitsipas98

Stéfanos Tsitsipás
« Les résultats arrivent en étant dans une position inconfortable. »
THE RED BULLETIN 49 STÉFANOS TSITSIPÁS
Pause énergisante pour Stéfanos, le natif d’Athènes, sous le soleil de la Costa del Sol. Il fêtera ses 25 ans en août.

JOURS DE TONNERRE

Texte ALEX KING Photos CARLOS BLANCHARD

Le championnat du monde de RALLYCROSS avait déjà fondu sur le sport automobile tel une boule de feu.

En passant désormais à l’électrique pour préparer l’avenir, il bouscule tout sur son passage, y compris la Formule 1..

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Guerrier électrique : Ole Christian Veiby, pilote pour Kristoffersson Motorsport (n° 52, au centre) résiste aux assauts de Timmy Hansen, de Hansen Motorsport.

Championnat du monde de rallycross

Garage de l’équipe Hansen Motorsport. Sous les riffs furieux d’AC/DC, les mécanos peaufinent à toute allure les derniers réglages des voitures de Timmy et Kevin Hansen, les deux pilotes de l’équipe suédoise qui se préparent à entrer en piste. Kevin pratique ses réflexes en tapant sur des BlazePods (petits appareils conçus pour booster son temps de réaction) disséminés sur une table.

Même coiffure, au laser, même visage d’ange, on sait tout de suite que ces deux-là sont frères. Kevin, 24 ans, se distingue grâce à ses lunettes et sa barbe naissante. Il a six ans de moins que Timmy, mais c’est le plus posé des deux.

Quatrième du championnat du monde de rallycross, il rêve d’égaler le succès de son aîné, champion 2019 et classé numéro deux cette saison. Timmy, quant à lui, analyse les données de course sur un portable avec son père Kenneth Hansen, directeur de l’équipe et ancien champion d’Europe de rallycross.

Comme son nom l’indique, le rallycross vient du rallye, un sport qui, dans les années 60, n’emballe pas vraiment le public : regarder des voitures faire du contre-la-montre individuel sur de longs parcours pendant plusieurs jours à une époque sans drones ni caméras embarquées ne se prête pas vraiment au petit écran. Mais en 1967, Robert Reed, producteur de World of Sport, une toute nouvelle émission lancée par la chaîne de télé britannique ITV, lance un super concept : plusieurs voitures s’affrontant sur un circuit d’asphalte et de terre. Simple à filmer, passionnant à regarder avec des courses rapides sur cinq tours, du sur mesure pour la télé. La première retransmission télévisée d’une course de rallycross a lieu le matin du samedi 4 février 1967. Un an plus tard, l’événement attire près de dix millions de téléspectateurs et téléspectatrices.

La discipline connait également un immense engouement international auprès des pilotes de rallye : premières épreuves de rallycross néerlandaises et australiennes en 1969 puis naissance du championnat européen en 1973. En 2010, les États-Unis lancent leur propre championnat de rallycross, le Rally Car. Quatre ans plus tard, la Fédération internationale de l’automobile (FIA), principal organe directeur du sport automobile, lance le Championnat du monde de rallycross (World RX). Mais cette évolution spectaculaire ne s’arrête pas là. À la fin de la saison 2021, on annonce que le World RX sera 100 % électrique. Novembre 2022, circuit automobile du Nürburgring dans le quartier allemand d’Ahrweiler. Massés autour d’un

“I was caught in the middle of a railroad track . Thunder!
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I looked ’round and I knew there was no turning back. Thunder!”

Place à la concentration : Timmy Hansen se prépare au départ de la course ; (ci-contre) duel entre Johan Kristoffersson et son coéquipier Ole Christian Veiby.

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segment fermé de la piste légendaire, la Müllenbachschleife, le public assiste à la dernière manche de cette première saison électrique. Les virages en terre succèdent aux lignes droites en asphalte. Le passage d’une surface à l’autre fait vibrer les cœurs, sections d’asphalte propices aux accélérations, passages en terre, sources d’imprévu et surtout de chaos. Les dérapages produisent d’immenses nuages de poussière qui réduisent la visibilité des poursuivants. Chaque course dure moins de trois minutes au cours desquelles, comme le montrent les caméras embarquées, la plupart des pilotes ne clignent pas une seule fois des yeux.

Dans les starting-blocks, cinq voitures attendent le feu vert. Leur départ chasse tout doute quant à la capacité de leurs moteurs électriques. L’accélération est fulgurante. Ces bolides peuvent passer de 0 à 100 km/h en moins de deux secondes, soit plus vite qu’une voiture de F1. Leur son ne ressemble à rien de connu : un concert totalement surréaliste de sons aigus, métalliques, comme un Transformer articulant ses bras robotiques.

Le premier virage offre un véritable festival sonore en HD : montée et descente des moteurs électriques sur quatre roues motrices qui décélèrent puis réaccélèrent ; carrosseries en fibre de verre qui s’écrasent les unes contre les autres ; pneus qui déchirent la terre tandis qu’ils dérapent furieusement pour sortir du virage, impact du gravier s’écrasant sur les autres voitures et les barrières de sécurité. Le seul son qui manque est le rugissement des moteurs à combustion.

Mais sans cette couche qui noie habituellement tout le reste, les oreilles reçoivent plus d’infos. Vitesse, accélération, contact viscéral, autant d’aspects qui se trouvent amplifiés. Une véritable expérience sensorielle à tous les niveaux.

Un peu plus tard, à l’extérieur des stands, une autre compétition attend les pilotes. Volvo Construction Equipment, sponsor de la course et fournisseur des véhicules de dépannage électriques qui sortent sans cérémonie les voitures en panne de la piste, a installé une pelleteuse compacte alimentée par batterie avec une tige métallique suspendue à son bras hydraulique. Le défi consiste à la plonger le plus vite possible et dans l’ordre dans cinq colonnes de pneus empilés. Johan

saute dans la cabine. Mais devant la dernière pile, il fait osciller la tige, ce qui l’empêche de s’enfoncer dans l’orifice.

« C’est quoi, mon temps ?, hurle-t-il. Nan, ça va pas. Je recommence. » Il boucle son troisième essai en 33 secondes. Le score semble le satisfaire puisqu’il s’extrait enfin de la cabine, un grand sourire aux lèvres. Kristoffersson n’est pas du genre à se contenter d’une deuxième place, comme le prouvent ses cinq titres de champion du monde RX remportés en neuf ans d’existence de la compétition. Après son couronnement en 2021, le Suédois a survolé la nouvelle saison au volant de sa Volkswagen Polo RX1e,

remportant sept des neuf rencontres avant d’arriver au Nürburgring ce weekend. Sa victoire lors de la manche précédente au Circuit de Barcelone a déjà scellé le championnat de cette année, faisant de lui le premier champion du monde électrique. Il est pourtant décidé à marquer la dernière rencontre de la saison de son empreinte.

« Autant que je me souvienne, j’ai toujours adoré la compétition, explique le Suédois. Pour moi, le plus important c’est de gagner. » Une attitude qui jure un peu avec son goût prononcé pour l’autodérision : grand, cheveux blonds et courts, le trentenaire ressemble plus à un génie de l’informatique qu’à un adversaire impitoyable. Mais les apparences sont trompeuses : « Si je consacre autant de temps à devenir un pilote complet, c’est par goût de la victoire. Quand ça ne sera plus le cas, je passerai à autre chose, car je n’aurai plus la motivation nécessaire pour réaliser de bons résultats. »

« On voit vraiment la puissance de l’électrique en rallycross. »
Kevin Hansen
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Fier : Kristoffersson donne une interview d’après-course, stats en main ; (ci-contre) la Müllenbachschleife, un segment de 1,5 km du Nürburgring.

Championnat du monde de rallycross

Cet esprit de compétition se manifeste chez lui dès l’âge de sept ans en pratiquant le ski de fond (son père Tommy lui sert alors d’entraîneur), puis en tant que pilote pour Kristoffersson Motorsport, l’écurie familiale détenue et gérée par Tommy, lui-même triple champion suédois de rallycross entre 1989 et 1991. Tout juste âgé de six mois, Johan accompagne son père dans le bus de l’équipe, traversant l’Europe de course en course. « Après toutes ces années, on a l’habitude de se laisser mutuellement le temps de respirer, explique Kristoffersson. Mais quand les temps sont durs, on est là l’un pour l’autre. On sait quand il faut parler et quand il faut la fermer. »

Après avoir fait joujou avec la pelleteuse (Tommy a lui aussi fait trois essais avant d’abandonner, frustré par son meilleur temps de 48 secondes) les voilà de retour dans le garage de Kristoffersson Motorsport, analysant les données des capteurs de la voiture et de la caméra embarquée pour repérer tout ce qui pourrait être amélioré. Instants de tension et d’intense concentration.

Les comptes à rebours numériques s’égrènent à côté des véhicules, les mécaniciens s’empressent d’effectuer les réparations et ajustements nécessaires avant la prochaine course. Mais on sent également une certaine ambiance chargée de satisfaction. Si Timmy Hansen a réalisé le tour le plus rapide lors des essais, Kristoffersson a lui aussi tiré son épingle du jeu en s’imposant dans la SuperPole, un tour unique et chronométré qui détermine les positions sur la grille de départ de la première manche, prouesse qu’il a d’ailleurs réalisée à chaque manche de la saison.

« C’était l’une de mes priorités d’être le plus rapide sur ce tour, et ça fait 10 sur 10, jubile-t-il. Ça fait toujours plaisir d’être le plus rapide sur un tour où tout se joue sur la cadence. »

Si vous ne l’avez pas encore compris, le rallycross est une histoire de famille, et les Kristoffersson et les Hansen en sont les deux plus grandes dynasties. Johan Kristoffersson et Timmy Hansen s’affrontent depuis une bonne dizaine d’années et se partagent le titre du World RX depuis six ans. Un héritage qui remonte à plusieurs générations en arrière : Kenneth, le père de Hansen, a remporté quatorze titres européens de rallycross entre 1989 et 2008, record qui ne sera probablement jamais égalé. Lorsqu’il monte sa propre écurie, il se tourne tout naturellement vers la meilleure coéquipière qu’il connaisse : sa femme.

Véritable superstar du rallycross, Susann Hansen a remporté le rallycross européen Super 1400 en 1994 et reste à ce jour la seule femme championne d’Europe de rallycross de la FIA. Elle était enceinte de Timmy lorsqu’elle courait, et celui-ci, après sa naissance, demandait toujours aux autres enfants : « Où est ton mécano ? », convaincu que le schéma familial classique se composait de maman, papa et mécano. Aujourd’hui, Susann est une présence indispensable au sein de Hansen Motorsport, dévouée aux tâches quotidiennes tout en gardant l’œil tourné vers l’avenir du sport. « La technologie électrique coûte cher. C’est le plus gros investissement jamais réalisé par Hansen Motorsport depuis sa création en 1990, explique-t-elle. Mais il est indispensable d’évoluer et de se tourner vers la prochaine génération. »

Et puis il y a Svend Hansen, le grandpère de Timmy et Kevin. Aujourd’hui décédé, il a inventé en 2002 un élément clé du sport moderne qui fait que celui qui sort en tête du premier virage n’est pas sûr de gagner. Petite torture supplémentaire, le tour joker est un détour obligatoire : chaque pilote doit l’effectuer une fois par course. Son choix offre des avantages tactiques (faut-il s’en débarrasser au plus vite ou tenter de prendre de l’avance et le faire plus tard ?), et chaque pilote dispose de son propre assistant radio qui lui indiquera le moment idéal pour le réaliser. Un système qui rajoute encore plus d’imprévisibilité à chaque course et entretient le suspense jusqu’au bout, les pilotes risquant souvent la collision pour être les premiers au point de bifurcation.

Après son meilleur temps dans la SuperPole, Kristoffersson s’impose également dans la première manche, toujours talonné de près par Timmy Hansen.

Les Kristoffersson et les Hansen, deux des plus grandes dynasties du rallycross.
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Refaire le plein : Kevin Hansen se ressource un instant loin des drames de la piste ; (ci-contre) un mécano de l’équipe du concessionnaire CE en action. Championnat du monde de rallycross
Ses courses courtes et rapides font du RX le banc d’essai idéal pour la technologie électrique.
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Un mur d’écrans dans le camion-régie diffuse des images en direct de la course du Championnat du monde de rallycross et des pilotes sous tous les angles.

Championnat du monde de rallycross

Pour ses efforts, Hansen obtient la pole position dans la première course de la seconde manche. Alors que les voitures sont dans les starting-blocks pour le départ, Tommy, Kenneth et Susann sont déjà dans la cabine d’observation surplombant la piste avec les autres directeurs d’équipe.

Mais la position de départ d’Hansen n’offre pas que des avantages. Un manque d’adhérence sur le revêtement usé permet à son frère Kevin et au pilote finlandais Niclas Grönholm de sortir du second virage en tête. Souverain, Kevin Hansen prend son joker dans le dernier tour puis rejoint la piste à toute allure avec une bonne avance sur Timmy pour franchir la ligne d’arrivée en vainqueur. Même dénouement pour Kristoffersson : en pole pour la seconde course, il se retrouve coincé derrière son coéquipier, le Norvégien Ole Christian Veiby. Aveuglé par un nuage de poussière sur son pare-brise, il termine juste derrière Veiby alors que Klara Andersson, la coéquipière de Grönholm, s’empare de la troisième place. Si elle n’a pas fini en tête,

Andersson reste une figure incontournable de ce sport. Pilote de kart dès l’âge de sept ans, la Suédoise de 23 ans fait ses débuts en rallycross en 2018 et remporte la catégorie cc 2150 du championnat suédois en 2021. L’association d’Andersson et de Grönholm cette saison a fait la une des journaux car c’est la première équipe paritaire de l’histoire du World RX, même s’il s’agit toujours d’un sport à dominance masculine. Seule femme pilote de la compétition pendant toute la saison, Andersson est aussi la seule femme dans tous les championnats du monde de la FIA en 2022.

Pour remporter le titre suédois de rallycross en 2021, Andersson a dû vaincre 55 de ses homologues masculins. Deux mois avant d’arriver sur le circuit Nürburgring, elle est entrée dans l’histoire du sport en devenant la première femme à monter sur un podium de World RX au Portugal.

« Beaucoup doutaient de ma capacité à participer au championnat. C’était une sacrée étape à franchir, explique-t-elle. Oui, je manque d’expérience par rapport

« Je suis fière d’avoir prouvé que j’avais ma place à ce niveau. »
Klara Andersson
Montée en puissance : l’une des Peugeot d’Hansen Motorsport est en tête dans un virage de la Müllenbachschleife ; (ci-dessous) la pilote suédoise Klara Andersson ; (ci-contre) les Hansen en pleine séance d’autographes pour les fans.
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aux autres, mais je suis fière d’avoir prouvé que j’avais ma place à ce niveau de la compète. J’ai pas mal évolué et maintenant, je veux commencer à battre tous ces mecs. »

Dans le garage Kristoffersson, on passe la voiture au peigne fin, espérant collecter de précieuses infos sur sa tenue de route quand elle était coincée derrière celle de Veiby, l’occasion de jeter un coup d’œil sous le capot de ces monstres électriques.

Les moteurs quatre cylindres turbocompressés de deux litres des voitures RX1 de 2021 ont fait place aux deux moteurs électriques de la nouvelle RX1e (un pour les roues arrière et un pour les roues avant), pour une puissance combinée de 500 kW (l’équivalent de 680 ch) et un couple de 880 Nm. Cette dernière caractéristique permet une accélération record de moins de deux secondes à partir de l’arrêt (une F1 actuelle atteint le 0 à 100 km/h en 2,6 secondes environ). Une batterie de 500 kW montée côté conducteur favorise une répartition uniforme du poids dans le bolide également

doté d’une double combo radiateur­réservoir, l’un pour le fluide diélectrique (un liquide de refroidissement non conducteur pour la batterie) et l’autre pour le glycol, qui assure le refroidissement des moteurs électriques. La fuite vient de là.

Pour bien comprendre toute la puissance électrique dont sont capables ces bolides, rien ne vaut la piste. Lors du World RX en Norvège en août 2022, le vainqueur de l’épreuve, Kristoffersson, a réalisé un meilleur temps au tour de 38,058 secondes au volant de sa RX1e. Le même week­end, sur le même circuit, le vainqueur de l’Euro RX1, Andreas Bakkerud, a réalisé au volant d’une voiture à essence un meilleur temps de 38,069 secondes, soit une fraction de seconde en plus. Si l’on considère que

les RX1 à essence ont bénéficié de plus de trente années de développement et ont atteint le sommet de leur évolution et que les nouvelles voitures électriques participaient au premier week­end de course de leur première saison, le potentiel est indéniable.

« On voit bien la puissance de l’électrique sur une piste de rallycross. Elle est plus rapide en ligne droite et ses pointes de vitesses ne font qu’augmenter », précise Kevin Hansen. Avec ses courses courtes et rapides, le rallycross est le banc d’essai idéal pour cette technologie. Sans avoir à se soucier de l’autonomie ou de la durée de vie des batteries, les pilotes peuvent se concentrer sur la performance pure, en poussant chaque kilowatt sur le circuit.

Les sponsors ont eux aussi l’air convaincu : les voitures de Hansen Motorsport arborent les logos des campagnes onusiennes Race to Zero et Global Goals et c’est la première équipe de rallycross à adhérer à l’initiative Sports for Climate Action des Nations unies.

« Nous avons estimé qu’il était de notre responsabilité, en tant qu’écurie, d’utiliser la plateforme dont nous disposons pour présenter les voitures électriques et mettre en avant les questions environnementales », explique Kevin.

Pilote, il est aussi responsable marketing de l’équipe et développe des projets pour un avenir plus durable : réduction des déplacements, entretien des voitures directement sur le paddock après une course, voyages en classe éco et recyclage autant que possible. Des mesures qui ont permis à Hansen Motorsport d’obtenir l’accréditation environnementale trois étoiles de la FIA, le plus haut niveau de reconnaissance accordé. « On ne veut pas simplement se contenter d’adopter l’électrique sur le plan technique ; on a entrepris une transition plus large vers un sport avec moins d’émissions pour prouver qu’un petit groupe d’individus peut créer une équipe gagnante en mettant l’accent sur la durabilité, sans oublier l’aspect spectaculaire de la discipline », explique toujours Kevin Hansen.

Alors qu’il tient ces propos, la chanson Thunderstruck, d’AC/DC, hymne officieux de la saison, retentit à nouveau dans le garage : “I need a pick-me-up. A rollin’ thunder truck… Yeah, electric sparks. A shot in the dark.” « J’ai besoin d’un remontant. Un camion de tonnerre … Ouais, des étincelles électriques. Un coup dans la nuit. »

« Si le sport reste non-durable, alors il n’a aucun avenir. »
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Arrêt au stand pour une Lancia Delta Evo-e RX, voiture de course électrique basée sur l’emblématique Lancia Delta Integrale.

Deuxième jour sur le Nürburgring.

Johan Kristoffersson est okay : retapée, sa Polo a remporté la troisième manche hier et la première demifinale aujourd’hui. Il est en pole pour la finale. Timmy Hansen a remporté la deuxième demi-finale, obtenant ainsi la deuxième place au départ devant Kevin Hansen et Veiby.

La cinquième place aurait dû revenir à Andersson, mais son équipe a pris une décision controversée en la remplaçant par Grönholm. Comme il comptabilise plus de points au championnat, il a une chance de terminer la saison dans les trois premiers.

Kristoffersson s’élance et prend la tête, mais Grönholm le percute par l’arrière dans le second virage. Les deux hommes restent collés l’un à l’autre jusqu’à ce qu’ils prennent tous les deux

Championnat du monde de rallycross

le joker dans le dernier tour. Kristoffersson sort le premier de la déviation, mais soudain, Kevin Hansen déboule de nulle part et se glisse devant Grönholm pour arracher la deuxième place. Le jeune Hansen marque ainsi suffisamment de points pour ravir la troisième place du championnat au Finlandais. La stratégie de mettre Andersson en touche ne semble pas avoir été vraiment payante pour l’équipe de Grönholm.

Timmy Hansen termine quatrième, assurant à Hansen Motorsport une phénoménale deuxième et troisième place pour l’ensemble de la saison. Mais le grand gagnant du week-end est Kristoffersson, qui consolide sa couronne de champion avec huit victoires sur dix. Plus tard, alors que les équipes se rassemblent dans un garage pour la célébration de fin de saison, les Hansen sont absents.

Le garage de l’équipe est vide, les voitures et tout l’équipement déjà rangés dans les camions. Seuls Kevin et Susann sont encore là, mais leurs sourires ont eux aussi disparu.

Le contrôle technique effectué après la course par les officiels a mis en évidence un bras de suspension non-réglementaire

monté par erreur sur la voiture de Kevin. Disqualifié, il rétrograde à la cinquième place du championnat, offrant ainsi à Grönholm sa troisième place tant convoitée. Mère et fils se consolent mutuellement. « C’est frustrant qu’une simple petite erreur puisse avoir un impact aussi important, mais c’est la course », lâche Kevin avec philosophie.

Il était clair que la première saison électrique du World RX allait imposer une courbe d’apprentissage difficile aux équipes, mais jusqu’au tout dernier moment, tout semblait aller pour le mieux pour les Hansen. « L’objectif de cette saison était de se familiariser avec cette nouvelle technologie, d’en apprendre le plus possible et de se préparer pour la suite, ajoute-t-il. Tout ce que nous faisons en tant qu’équipe et en tant que famille est tourné vers l’avenir. »

Comme le chantait le grand sage Brian Johnson, hurleur d’AC/DC : “Yeah, it’s alright. We’re doin’ fine, fine, fine. Thunderstruck.”

La première manche du Championnat du monde de rallycross 2023 se déroulera à Hell, en Norvège, les 17 et 18 juin prochains ; fiaworldrallycross.com

« Tout ce qu’on fait en tant qu’équipe est tourné vers l’avenir. »
Kevin Hansen
THE RED BULLETIN 63
Susann Hansen, ancienne superstar du rallycross et seule femme à avoir remporté le titre de championne d’Europe de rallycross de la FIA, embrasse Kevin, son petit dernier, deuxième mais disqualifié suite à une infraction au règlement.

Quand la musique se voıt

Rappeur polyvalent à la folie créatrice qui se nourrit de tout ce qui l’entoure et qui s’abreuve des musicalités de son idole Pharrell Williams, VARNISH LA PISCINE réussit à développer une esthétique originale dont lui seul détient les clefs du succès. Le Suisse de 28 ans envoie valser l’opinion publique pour s’inscrire dans un rap à contre-courant. Son kiff ? Transmettre sa frénésie en embarquant le public dans son univers insolite.

« Quand tu écoutes de la musique, tu as une image. » Aperçu en 2019 au Red Bull Secret Gig Di-Meh & Friends, Varnish La Piscine, de son vrai nom Jephté Mbisi, est un créatif animé par le concept de la narration cinématographique et musicale, qui puise son essence dans le funk, la trap et bossa nova pour construire son rap. Sa particularité ? Il n’écrit pas des morceaux à l’image de sa vie, ni de ses envies, mais fait de la fiction musicale, car c’est sa réalité.

C’est lors d’un voyage en Belgique avec ses parents que le rappeur d’origine congolaise à l’univers fantastique tombe amoureux de la musique, en entendant Tape You des N.E.R.D (groupe de funk et de hip-hop américain des 90 fondé par Shay Haley, Chad Hugo et Pharrell Williams). « J’avais moins de dix ans. C’était l’époque où on prenait encore la voiture pour aller en Belgique au lieu de l’avion, il n’y avait pas de clim’, mes parents mettaient la musique fort, et quand j’ai entendu ce morceau, il s’est passé un truc incroyable. » C’est aussi le moment où lorsqu’une chanson passe à la radio, « on a la sensation qu’on ne l’entendra plus jamais de sa vie », me dit-il. Jusqu’au moment où, quelques années plus tard, Internet s’invite dans son foyer : « J’ai écrit dans la barre de recherche “la musique du monsieur qui chante aigu” et je n’ai rien trouvé (pour retrouver le titre entendu dans la voiture, ndlr). Mais, peu de temps après ma sœur m’a fait écouter I Still Love You de The Neptunes (duo Pharrell Williams et Chad Hugo, ndlr), sur son Samsung, j’avais douze ans, et même réaction qu’avec les N.E.R.D., mais là, je peux enfin checker

Texte MARIE-MAXIME DRICOT
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Avez-vous déjà vu un rappeur-réalisateur ? Maintenant, oui. L’univers de Varnish c’est un peu comme le no limit de la créativité.

« Quand tu écoutes de la musique, tu as une image. »
THE RED BULLETIN 65

sur Internet. Et là, je tombe sur Pharrell Williams. » Un artiste qui marquera le rap des années 2000 à aujourd’hui (il est actuellement directeur créatif homme pour Louis Vuitton), et particulièrement l’esprit de Varnish La Piscine. Si la ressemblance entre les productions des deux ovnis, Jephté, qui tire son nom d’artiste d’un scénario qu’il avait imaginé au sujet d’une femme qui se met du vernis devant une piscine, et Pharrell se fait sentir, c’est bien par généalogie. « Pharrell Williams vient de Stevie Wonder, Stevie Wonder vient de Quincy Jones… Quincy lui-même vient de Miles Davis et James Brown. Et moi je viens de Tyler, The Creator qui vient de Pharrell. » Makes sense.

Tout cela se retrouve dans son nouvel EP This Lake Is Successful écrit de 2021 à 2022 après avoir signé sur le légendaire label Ed Banger. Composé de deux objets artistiques qui allient image et musique : sept morceaux et quatre courts-métrages tournés au bord du lac Léman.

D’après l’amoureux des accords et des bridges dont la spontanéité claque nos tympans à coup de textures organiques, l’EP aborde la question de l’amour avec les titres Ring Island et Ceviche, les courts-métrages racontent l’histoire de deux pêcheurs. Le premier, Mr Amaury Lefèvre assassiné au moment où il découvre de nouveaux poissons aux propriétés extraordinaires et le second, Abraham, un novice dans la profession – interprété par Varnish – qui rejoint un gang de marins « très soin ».

C’est bien la première fois que des mecs en salopette et en coupe-vent sont aussi classes à l’écran. « Le hip-hop, la mode et la musique, ce sont des choses avec lesquelles on ne blague pas, explique Varnish. Il faut être présentable, il faut être bien habillé. Mais il ne faut pas en abuser à défaut d’être naturel. » L’homme aux basses groovy qui a séduit Pedro Winter (producteur français de musique électronique connu

pour avoir été le manager des Daft Punk pendant plus de dix ans, boss du label Ed Banger qui avait signé le défunt Dj Mehdi) et Pharrell Williams façonne son esthétique musicale qui se veut polie à l’écran. L’ancien rappeur de The Neptunes a même été aperçu en compagnie de Varnish La Piscine, au studio d’enregistrement Motorbass, à Paris, qui a vu passer les plus grands : Serge Gainsbourg, Étienne Daho, Kanye West, etc.

Si un jour on lui avait annoncé qu’il rencontrerait celui qu’il admire le plus, Jephté Mbisi ne nous aurait pas cru. Et quand je lui ai demandé ce qu’il a ressenti pendant ces quelques heures dans le studio à ses côtés, il a répondu : « Ça m’a perturbé quand je l’ai rencontré. Je ne suis pas encore prêt à en parler, c’est tellement fort, mais ce que je peux te dire c’est que ça s’est très bien passé. C’était très bienveillant et j’aime beaucoup l’avenir. Tu te rends compte que tout est possible si tu te donnes les moyens et que tu y crois et que tu ne fais pas semblant. »

C’est avec cette ligne de conduite, que Varnish La Piscine construit son identité artistique et musicale depuis 2016. Son premier projet, Escape (F+R Prelude) avait déjà une dimension cinématographique, de même que le « film auditif » Le Regard qui tue (2019), et Les Contes du Cockatoo, un moyen métrage de 45 minutes dont la bande originale est tirée de son album Metronome Pole Dance Twist Amazone (2020) qui retiendra l’attention de l’industrie et du public. Avec The Lake Is Successful, le Genevois qui n’en est pas à son premier court-métrage, frappe encore une fois et compte bien marquer nos esprits.

Ce goût pour les histoires et l’écran existe depuis toujours chez Varnish, un grand fan de Marvel et de super pouvoirs. « Quand j’étais plus jeune à l’école primaire, on nous mettait sur le banc les lundis pour lire des histoires et j’étais à fond. Si j’avais un enfant, je serais le genre de parent qui se pose dans le lit pour raconter une histoire avec la voix bien grave. »

C’est dans son imaginaire que l’artiste se sent le plus à l’aise. On confondrait même sa réalité ou plutôt ses fictions musicales avec la nôtre, tellement on s’y sent bien. Il me dira même : « Si aujourd’hui je décide que je me sens mieux en t’imaginant la tête à l’envers quand je te regarde, ça devient ma vérité, car pour moi la réalité est trop

sérieuse, à l’inverse de la fiction. » Pas certaine de passer mes 45 minutes d’interview restantes dans une position si peu confortable, mais il y a de l’idée.

C’est probablement, une des raisons pour lesquelles il n’hésite pas à utiliser le comique de situation en poussant les actions de ses personnages à l’exagération, avec une pointe de sarcasme, dans ses quatre épisodes de This Lake Is Successful, en reprenant les codes des sitcoms.

À l’écran, le monde de Varnish La Piscine, c’est beaucoup de couleurs pimpantes sur des tons pastel, une symétrie

« La réalité est trop sérieuse, à l’inverse de la fiction. »
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et un certain kitsch à l’élégance assumée qui n’est pas sans nous rappeler le cinéma de Wes Anderson. La preuve en est lorsqu’on observe la structure de la maison du défunt Mr Amaury Lefèvre dont les fenêtres et le toit matchent à la perfection avec celui de l’hôtel en couverture du livre Accidentally Wes Anderson

Par ailleurs, si l’on transpose la maison de Varnish qui s’inscrit dans une narration façon Wisteria Lane de Desperate Housewives, où les pêcheurs évoluent, on ne peut s’empêcher de se remémorer le lac dans le film Moonrise Kingdom. Les quatre épisodes de This Lake Is Successful,

sont l’œuvre de Rémi Danino à la réalisation et Dissidence à la production qui sont parvenus à comprendre l’âme de Varnish : « Ce sont des personnes qui m’ont mis dans le rôle de réalisateur, celui que je voulais avoir. J’avais une liberté artistique infinie et ils étaient là pour cadrer le truc. Quand je leur ai dit que je voulais que les poissons donnent des capacités hors normes aux personnages, on entrait dans un débat pour construire une narration qui fasse sens. Ils m’ont formé. »

Cependant, lorsqu’on s’intéresse aux noms attribués aux poissons dans les épisodes : les Franks Combattants qui combattent la fatigue chronique, les Stomias Cicatrum qui permettent de cicatriser de manière instantanée, l’Absentia qui rend invisible, ou encore l’élixir sur lequel est inscrit Nubien, on se demande où Varnish La Piscine va piocher ses références. La réponse est plus simple qu’on pourrait le penser pour cet esprit complexe qu’est le rappeur suisse qui s’imprègne des éléments qui l’entourent.

« Ce sont simplement des délires que j’ai dans ma tête. Je parle beaucoup tout seul, donc je donne des prénoms aux personnages. Abraham, c’est pour la beauté du nom et Nubien, parce qu’il y a deux ans je suis allé en Égypte dans un village nubien (les premiers habitants de la vallée du Nil considérée comme un des premiers berceaux de la civilisation, ndlr), et ça m’a marqué. Tu retournes dans le temps quelques instants, tu te prends une vague d’Histoire dans la tête. »

Le rappeur genevois serait-il un éternel rêveur, en quête de voyage dans le temps ? Quoiqu’il en soit, Varnish La Piscine est résolument ancré dans son présent et dessine son futur très prometteur de rappeur international. « Je fais du son qui pourrait être écouté en Angleterre, aux États-Unis ou au Japon. » Et, même s’il peut parfois douter de sa proposition musicale, l’essentiel est de s’aimer soi-même, me dit-il en souriant avant d’ajouter : « Ce qu’on propose en tant qu’artiste peut ne pas être au goût de tout le monde, cependant, lorsque le public nous voit prendre du plaisir, ça change la donne, et on finit par se faire accepter par les autres. »

Varnish La Piscine - This Lake is Successful (Ed Banger Records/ Because Music). Disponible sur toutes les plateformes.

Varnish La Piscine
« Ce qu’on propose en tant qu’artiste peut ne pas plaire à tout le monde. »
THE RED BULLETIN 67
Varnish photographié par Rémi Danino pour son album.

Faisable ? Traverser la Tasmanie, cet État insulaire au sud de l’Australie, en solo et à VTT, tel était l’objectif de Payson McElveen.

La traversée de lui-même

PAYSON MCELVEEN a parcouru la Tasmanie en solitaire de part en part en 32 heures non-stop. Un voyage physique et émotionnel.

Texte NEAL ROGERS Photos THRAINN KOLBEINSSON

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Finalement, ce qui a vraiment failli faire craquer Payson McElveen dans les moments les plus difficiles de sa traversée de la Tasmanie en solo en novembre dernier n’est pas la distance, ni l’âpreté du terrain ni même les crampes atroces mais la traversée nocturne d’une rivière avec une menace bien réelle constituée par des serpents venimeux.

Quelques semaines plus tôt, des précipitations exceptionnelles avaient fait déborder les rivières longeant le parcours de 580 km tracé avec l’aide d’Emma Flukes, une légende du vélo d’endurance locale. Un pont situé à 15 mètres au-dessus de la rivière Leven avait été emporté par les eaux, obligeant McElveen à porter son vélo sur les épaules. Au moins faisait-il jour. La même nuit, à mi-chemin de son épopée de 32 heures, il lui a fallu traverser la rivière Mersey,

bien plus large et marécageuse. Si McElveen s’inquiétait pour tous les appareils électroniques en sa possession (lampes, chargeurs, powerbanks, batteries de rechange et autre traceur satellite et iPhone ), les mouiller ne représentait pas une menace mortelle, contrairement aux serpents-tigres dont il avait déjà noté la présence tout au long du parcours. « Ils sont bien plus venimeux que nos serpents américains, explique-t-il. Un ou deux mètres de long d’un noir éclatant, ils ressemblent au diable en personne. De vraies machines à tuer. Ils m’ont rendu parano. Comme beaucoup de gens, j’ai une peur viscérale des serpents. »

Même avec ses puissantes lampes, McElveen n’arrivait pas à distinguer l’autre bord de la rivière. Tout au plus quelques centaines de mètres, mais cela paraissait bien plus. Enfoncé jusqu’à la taille dans ces eaux furieuses brun foncé, son vélo à bout de bras, il s’est faufilé entre les débris provoqués par l’inondation pour atteindre enfin l’autre rive juste avant que ses bras ne lâchent. Il a encore fallu se frayer un chemin à travers d’épais enchevêtrements de troncs déracinés par l’inondation, cachette idéale pour les serpents-tigres.

Une traversée terrifiante qui aurait pu faire l’objet d’une scène mémorable : le projet était en effet partiellement encadré par une équipe de tournage et un groupe logistique dont faisait partie sa fiancée, Nichole Baker. Mais comme la plus grande partie de cette aventure, Mc Elveen l’a vécu tout seul. (Provisoirement intitulé Crossing Tasmania, le film devait être présenté en avril dernier de la Sea Otter Classic, un festival de sport outdoor et de vélo, sous forme d’un documentaire de 20 minutes).

McElveen n’en est pas à son premier tour de force : en septembre 2021, il a traversé l’Islande de part en part sur 410 km en un peu moins de 20 heures, un exploit jamais encore réalisé. Et il est détenteur du FKT (Fastest Known Time, chrono le plus rapide) sur le White Rim Trail, un sentier d’Utah situé à cinq heures de route de Durango (Colorado), sa nouvelle

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Payson McElveen

Prêt à affronter des conditions difficiles et changeantes, McElveen a choisi un VTT avec une plage de braquet très large et un guidon aérodynamique pour son confort.

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Il n’y avait que trois ravitaillements tout au long des 580 km de son parcours.

Payson McElveen a donc passé la quasi-totalité de son périple dans la solitude.

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Voies

ville d’adoption. Ces expéditions en solo autofinancées s’inscrivent dans la continuité du parcours personnel de cet ex-professionnel du VTT de 30 ans qui s’est lancé dans les courses de gravier, le podcasting et les raids cyclistes épiques.

« C’est une énorme masse de travail, mais l’avantage, c’est que quand ça coince dans un domaine, je peux me rabattre sur un autre et y revenir plus tard, explique-t-il. Cette aventure en Tasmanie, c’est une réponse directe aux exigences des courses classiques. Je ne serais pas capable de poursuivre ma carrière de cycliste sans certaines de ces activités qui me permettent d’oublier un peu la compète pour vivre une grande aventure. Et ce côté compétitif me permet de traverser la Tasmanie d’une traite, d’avaler 580 km à une puissance moyenne assez élevée et de découvrir toute une partie du monde d’un coup. »

À peine sa traversée de l’Islande terminée, Payson McElveen en redemandait, commençant à consulter

des cartes, traçant des itinéraires pour préparer son prochain défi. Il aimait cette idée que la terre meuble disparaisse soudain, qu’il lui faille passer d’une côte à l’autre, même si par de nombreux aspects, la Tasmanie est l’exacte opposée de l’Islande avec sa géologie qu’il décrit comme abritant « les animaux et les plantes les plus exotiques au monde ».

Il a fini par décider d’un itinéraire allant d’Ouest en Est histoire de profiter des vents d’ouest, ces fameux Quarantièmes rugissants typiques de l’hémisphère sud entre 40 et 50 degrés de latitude. McElveen s’est mis en route le 7 novembre à 6 h 21, les vagues de l’océan du « bout du monde » léchant ses roues, au bord de cette station balnéaire d’Arthur River, où l’air est le plus pur du monde grâce à une étendue ininterrompue d’océan qui s’étend jusqu’à l’Argentine.

Son expédition l’a conduit de chemins de graviers en voies ferrées abandonnées en passant par une forêt tropicale, des rivières marécageuses, 160 km de

ferrées abandonnées, épaisse forêt tropicale, pentes très raides et rivières marécageuses, McElveen a tout traversé, ou presque.
L’aventure de McElveen a commencé au « bout du monde » à Arthur River, petite station balnéaire de l’ouest de la Tasmanie au bord de l’océan Indien, l’une des plus vastes étendues d’eau de la planète.
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Payson McElveen

pavés pour finir par une terrible montée de 360 m de dénivelé à quelques km de son terminus, la Bay of Fires au bord de la mer de Tasmanie. Mais avant de terminer, il a fait un détour à travers les immenses fougères et rochers des singletracks du Blue Derby, un réseau de sentiers élu plusieurs fois « Trail de l’année » par les vététistes de l’Enduro World Series.

Au total, l’itinéraire incluait plus de 10 000 m de dénivelé positif, la plus grande partie concentrée dans les 150 derniers km. Si McElveen s’était fixé pour objectif de traverser l’Islande en moins de 24 heures, il savait que ce serait cette fois-ci impossible. L’objectif était d’aller tout simplement jusqu’au bout et d’éviter les bêtes sauvages. Il ne compte plus le nombre de wallabies et de wombats aperçus (et même un diable de Tasmanie), ses doigts constamment prêts à serrer les freins pour ne pas heurter un animal errant. Cette odyssée lui a permis de faire le point sur une saison décevante : s’il avait accepté que

l’année 2022 serait celle du changement et de la transition (abandon de son équipe Orange Seal et de Trek, son sponsor de longue date, pour se lancer comme cycliste indépendant pour Allied Cycle Works), sa campagne a débuté par un séjour à l’hôpital avec plusieurs côtes cassées, conséquence d’une lourde chute en défendant son titre en Oklahoma. À peine remis de ces blessures, il contracte la Covid juste avant l’Unbound Gravel du Kansas, subit divers problèmes mécaniques lors des grandes courses d’été, puis tombe gravement malade, ce qui l’empêche de prendre le départ du Big Sugar Gravel d’Arkansas en octobre et perturbe sa préparation pour la Tasmanie.

On ne peut pourtant pas qualifier son année 2022 de désastreuse : malgré ces revers, McElveen a réalisé quelques-uns des meilleurs résultats de toute sa carrière en termes de kilowatts. La forme physique était au rendez-vous, la chance un peu moins. Et puis, l’année a commencé par ses fiançailles avec Baker :

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McElveen a traversé d’épais brouillards et d’interminables chemins sans croiser âme qui vive, à l’exception de serpents-tigres, de wallabies, de wombats, et même d’un diable de Tasmanie.
Payson McElveen

La Tasmanie abrite selon lui

L’une des perles du parcours : le singletrack de Blue Derby, un réseau de sentiers aménagés qui traversent une forêt de fougères.

« les plantes et les animaux les plus exotiques au monde ».
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Une longue nuit attendait Payson McElveen, évidemment très nerveux à l’idée de croiser de venimeux serpents-tigres lors de ses traversées de rivières dans la nuit.

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étudiante en épidémiologie et sportive d’aventure sponsorisée, elle a également pris en charge une grande partie de la logistique pour McElveen. Les deux prévoient de se marier en automne.

Des hauts et des bas qui ont façonné la toile de fond du décor mental de McElveen tandis qu’il roulait seul au bout de la nuit sur cette île dangereuse et isolée puis qu’il observait le lever du soleil depuis le mont Maurice, spectacle magique et surréel, jeux de lumières au ralenti sur les montagnes au loin, ultime récompense pour avoir poursuivi sa route au cœur des ténèbres. Peu à peu, un profond sentiment de soulagement et de gratitude est apparu. « J’ai pleuré plusieurs fois sur la route. Pas par désespoir, mais parce que cette expérience était tellement… enrichissante, confie McElveen. À un niveau très personnel, j’étais la meilleure version de moi-même. »

Dans Adventure Stache, podcast retraçant son périple tasmanien, McElveen a fini par répondre

à une question qui revenait sans cesse : qu’a-t-il tiré de cette expérience ? Il s’est mis à parler de son rapport au temps, du fait qu’une grande partie des courses et de l’entraînement tourne autour du chronomètre, souvent au détriment d’autres expériences que le vélo peut apporter. Au fur et à mesure de son discours, l’insoutenable poids de ce voyage émotionnel a commencé à peser sur sa voix.

« Au cours de mon périple, j’ai fini par réaliser que j’avais de plus en plus perdu le fil du temps. Au moment où je commençais à m’effondrer physiquement, j’ai débloqué quelque chose de nouveau pour moi mentalement : l’acceptation, ou plus précisément l’abandon du contrôle. J’avais enfin atteint cette véritable intemporalité. Et c’était totalement sain. Je ne dis pas que tout le monde devrait faire ce genre d’expérience extrême, mais c’était vraiment très fort et très spécial. »

Instagram : @paysonmcelveen

« Si j’ai pleuré plusieurs fois en route, c’est parce que l’expérience était tellement enrichissante. »
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Par moments, McElveen se demandait si ses souffrances allaient prendre fin. Lorsqu’il est arrivé sur la plage de Bay of Fires, sur la côte est de Tasmanie, il s’est senti submergé par une vague d’émotion libératrice.
Payson McElveen

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PERSPECTIVES

Expériences et équipements pour une vie améliorée

LE FEU

Du top du Chili au Pacifique avec un VTT

79 AARON ROLPH AARON ROLPH

Je me penche pour soulever mon VTT. Mes chaussures à crampons font crisser la neige sous chacun de mes pas qu’accompagne un effort douloureux pour trouver de l’oxygène dans l’air rare et glacial. Un instant, je me demande ce que je fais ici seul, dans le noir total, mon vélo sur les épaules, à plus de 6 000 m d’altitude. Mais je chasse ces doutes et poursuis ma lente et régulière ascension des 6 893 m de l’Ojos del Salado, le plus haut volcan au monde.

Atteindre le pic du deuxième plus haut sommet d’Amérique du Sud, géant assoupi à califourchon entre le Chili et l’Argentine, n’est que le début de mon audacieux périple. Objectif : descendre en VTT jusqu’à l’océan Pacifique situé à plus de 370 km en passant par le désert d’Atacama à l’ouest pour établir un nouveau record du monde de la plus grande descente verticale à vélo sur sept jours.

Il y a longtemps que je rêvais de remettre les « hautes montagnes » au goût du jour en VTT et Ojos del Salado est l’un des plus hauts pics du monde, donc idéal pour ce genre d’exercice. Niveau aptitudes, l’aventure s’accordait elle aussi tout à fait à mon diagramme de Venn : alpinisme en haute altitude, descente technique en VTT et ultra-

endurance. J’arrive à Santiago, la capitale du Chili, à l’équivalent de la fin de l’été dans l’hémisphère sud. Philipp Geisler, un guide local, se charge de conduire mon vélo, mon eau, mes vivres et moi-même à 1 000 km au nord jusqu’au Laguna Verde, un lac salé de montagne situé à 4 328 m d’altitude. Au cœur d’un paysage lunaire parsemé de pics et de vallées, la lagune me sert de camp de base pour m’acclimater à l’altitude et pratiquer le hike and bike: descendre de vélo, le pousser et le transporter sur des terrains techniques et escarpés.

Ma préparation est de courte durée : de grosses tempêtes de neige s’annoncent, me forçant à avancer la date de mon départ. Conscient des redoutables effets secondaires causés par une mauvaise acclimatation, au pire gonflement du cerveau, au mieux maux de tête et autres vomissements, je vais devoir y aller en douceur et écouter mon corps.

En quittant le camp de base à la nuit tombée, je n’ai plus d’autre choix que de porter ma bécane sur le dos. Chaque mètre supplémentaire semble faire peser un peu plus l’engin sur mes épaules. Le versant est si raide et la neige si épaisse qu’arrivé à 6 327 m, l’idée de poursuivre mon ascension me semble totalement futile. Mais une petite voix me murmure

La ville la plus proche de Ojos del Salado est Copiapó, à neuf heures de route de la capitale, Santiago.

PERSPECTIVES
voyage
« Il restait un truc à régler : la traversée du désert d’Atacama, le désert non polaire le plus aride au monde… »
Aaron Rolph, aventurier
80 THE RED BULLETIN

qu’il serait dommage de ne pas voir le sommet après tant d’efforts.

J’abandonne mon vélo pour continuer à pied, étonné de me sentir encore si frais une fois cet immense poids ôté de mes épaules, au propre comme au figuré. L’ascension me prend quelques heures, et après avoir escaladé la dernière arête rocheuse, je peux enfin m’imprégner pleinement de la vue panoramique à 360° sur les nombreux autres géants volcaniques de la région d’Atacama, qui me semblent minuscules depuis mon piédestal. Allez, il faut se remettre au boulot.

Je galope plus que je ne descends jusqu’à l’endroit où m’attend mon vélo. Dominant ce monde qui n’en finit pas de plonger sous mes pieds, je m’élance dans les blanches ténèbres, essayant tant bien que mal de doser ma vitesse malgré les roues qui adhèrent mal à la neige fondue du milieu d’après-midi. Mon cœur s’emballe sous l’effet de l’adrénaline qui tente d’oxygéner mes muscles. Même si les descentes en altitude sont censées être moins pénibles, je suis pourtant obligé de m’arrêter pour aspirer de l’air. Douleur ! Physiquement, j’ai rarement fait quelque chose d’aussi

brutal. Après ce sentier qui semble durer une éternité, j’atteins enfin les pentes inférieures. La neige se fait bien plus rare, je peux désormais me consacrer pleinement à la descente technique. Après 4 h 30 et 25 km d’un magnifique rodéo à travers la roche, le sable et la glace, je rejoins le Refugio Claudio Lucero, un refuge de montagne rudimentaire frugalement aménagé. Ce sera mon foyer pour la nuit. Mais il me reste encore un petit détail à régler : la traversée du désert d’Atacama, le désert non polaire le plus sec de la planète. À mon réveil, nul signe de civilisation : ni commerces,

PERSPECTIVES voyage
Rolph parcourt le désert d’Atacama avec Ojos del Salado en arrière-plan ; (ci-contre) un tronçon d’asphalte lisse offre un bref répit par rapport aux pistes poussiéreuses ; (page d’ouverture) Rolph à 6 327 m d’ altitude, d’où il a entamé sa descente.
THE RED BULLETIN 81 AARON ROLPH AARON ROLPH

ni humains, ni sources d’eau. Je dois donc emporter tout le nécessaire pour les 250 km à venir. J’installe mes sacoches et mes pédales sans clips sur le vélo et entasse toutes les provisions que je peux sur dans mon sac à dos et dans les musettes. Voilà à peine un jour que j’ai quitté le refuge, mes réserves d’eau et de nourriture s’amenuisent plus vite que prévu et je n’ai pas rencontré âme qui vive. Le village le plus proche se trouve à 120 km, mais plus je passerai de temps dans le désert, plus ce voyage sera dangereux. Je décide finalement de poursuivre ma route jusqu’au bout de la nuit.

Ce qui me motive, c’est la cerveza (la bière) qui m’attend à Copiapó, la ville voisine. Le ciel se transforme en un tapis d’étoiles. Après 16 heures de route, les scintillantes lumières de la ville m’enveloppent, je m’y repose jusqu’au matin. Mes jambes pèsent

État de flow

Le volcan dormant d’Ojos del Salado (Andes) est le plus haut volcan au monde et le plus haut sommet du Chili, situé dans le désert d’Atacama, région sauvage de haute altitude, à huit heures de route au nord de Santiago, capitale du Chili. Pour une rando moins éprouvante au sommet, optez pour une visite privée. toursbylocals.com

une tonne, mais la ligne d’arrivée est proche, alors je me déleste d’une partie de mes bagages dans un hôtel du coin et remonte en selle. La route goudronnée serpente autour d’innombrables dunes hérissant le paysage aussi spectaculaire qu’impitoyable. Puis, soudain, cette fraîche odeur d’iode caractéristique de l’air de la mer vient chatouiller mes narines.

À 373,4 km du sommet du plus haut volcan au monde, je franchis la ligne d’arrivée. Au rythme des vagues s’échouant sur la plage, je me débarrasse de mes vêtements pour plonger dans l’eau froide, ferme les yeux et me laisse couler quelques instants au fond de l’océan. Ma conclusion de la plus grande descente à VTT au monde. Aventurier britannique, Aaron Rolph est photographe et fondateur du British Adventure Collective ; britishadventurecollective.com

PERSPECTIVES voyage
Dans le sens des aiguilles d’une montre : camp de base au lac salé de Laguna Verde ; Rolph dans la neige à plus de 6 000 m d’altitude ; pas de signal, alors on appelle les bulletins météo par satellite Garmin inReach ; orages en vue.
82 THE RED BULLETIN AARON ROLPH, ADOBE STOCK AARON ROLPH

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APPRENDRE

Organiser votre sommeil

Vous avez du mal à dormir la nuit ? Voici une astuce militaire qui ne fait pas appel aux moutons.

Trop beau pour être vrai : une méthode pour s’endormir instantanément. L’entraîneur d’athlétisme américain Lloyd « Bud » Winter décrit cette technique qu’il qualifie de « méthode militaire » car elle aurait été mise au point par l’armée américaine pour aider les soldats à dormir n’importe où et n’importe quand. L’année dernière, le coach sportif canadien Justin Agustin a redécouvert la technique et l’a partagée avec ses 1,9 million d’adeptes sur TikTok. Justin Agustin prétend qu’après six semaines de pratique, 96 % des personnes ont réussi à s’endormir moins de deux minutes après avoir fermé les yeux.

La méthode ? En commençant par le front, détendez progressivement vos muscles de la tête aux pieds tout en ralentissant votre respiration et en faisant le vide dans votre esprit en pensant à une image relaxante. Si cette dernière ne

fonctionne pas, répétez la phrase « ne pense pas » pendant 10 secondes.

Bien que l’on manque de données scientifiques, cette technique présente quelques mérites, concède Lindsay Browning, experte du sommeil. « Elle est similaire à d’autres méthodes que j’enseigne aussi, comme la relaxation musculaire progressive et la respiration lente et profonde. »

Pourquoi cela fonctionne ? Et que se passe-t-il si vous faites partie des 4 % de personnes qui restent éveillées longtemps après que les 120 secondes se sont écoulées ? Voici quelques conseils qui vous ouvriront les yeux...

Se détendre

« Si nous ne dormons pas, c’est parce que nous sommes en proie à l’anxiété, explique Lindsay Browning. Notre corps nous maintient en alerte face à une menace. »

Un instinct de survie primitif qui a permis à nos ancêtres préhistoriques de survivre, et qui est toujours ancré chez l’humain. Le stress de la vie moderne provoque la même réaction biologique. Pour contrer ce phénomène, il faut changer d’objectif, comme « simuler le calme jusqu’à ce que nous soyons réellement calmes ».

Remplir son esprit

Répéter la phrase « ne pense pas » peut se substituer à vos

pensées, mais Browning pense que cela n’est pas suffisant : « Si vous êtes vraiment très stressé·e, vous avez besoin de quelque chose de plus important pour distraire votre cerveau. » Elle recommande de se visualiser dans un environnement relaxant et de surcharger son esprit en imaginant toutes les différentes expériences sensorielles que l’on pourrait ressentir. « La puissance de traitement nécessaire pour maintenir cette image complexe est énorme. Il n’y a pas de place pour penser à l’examen de demain. » Mais cette technique doit être pratiquée tout au long de la journée.

Attaquer le bloc

Les cycles de sommeil sont la clé d’une bonne nuit de repos. Chacun dure environ 90 minutes – nous en avons de quatre à six par nuit – pendant lesquels nous passons d’un sommeil léger à un sommeil profond. Le sommeil diphasique, au cours duquel nous nous réveillons aux premières heures, est un autre mode de sommeil hérité de nos ancêtres. « À l’époque préhistorique, il était dangereux d’être inconscient huit heures d’affilée. Aujourd’hui, nous nous nous couchons plus tard et nous nous réveillons plus tôt, ce qui exerce une pression sur le sommeil pour le contraindre à se concentrer en un seul bloc. »

Se mettre au diapason

Les voyages internationaux sont un moyen infaillible de perturber notre cycle veillesommeil de 24 heures connu sous le nom de rythme circadien. Pour minimiser le décalage horaire, Lindsay Browning conseille, outre le port d’un masque pour les yeux et de bouchons d’oreille, de s’hydrater et « d’accepter qu’on ne dorme pas très bien dans un avion ; un peu suffit ». Lindsay est neuroscientifque et spécialiste du sommeil ; troublesleeping.co.uk

« Réduire l’anxiété et prétendre qu’on est calme. »
Lindsay Browning, spécialiste du sommeil
PERSPECTIVES comment…
84 THE RED BULLETIN GETTY IMAGES CHARLIE ALLENBY

HORS DU COMMUN

Retrouvez votre prochain numéro en juin en abonnement avec et avec , dans une sélection de points de distribution et sur abonnement.

RICARDO NASCIMENTO / RED BULL CONTENT POOL

Musts du mois

Il est question de sortir de chez soi, pour des virées intenses ou prolongées, et de toujours s’assurer de le faire avec style et sous très bonne protection.

SUUNTO VERTICAL

LA montre d’aventure, pour les expéditions et trainings outdoor. Avec jusqu’à +700h d’auto nomie en activité, elle embarque cartes hors ligne gratuites, boussole, altimètre barométrique, mé téo, alertes orages et plus de 90 modes sportifs, de l’alpinisme à la course sur route. et 799€ (titanium solaire)

DOCKERS UTILITY SHIRT

Cette veste chemise décontractée, avec ses grandes poches poitrine à rabat, ses surpiqûres style western et ses poignets boutonnés, associe confort et style utilitaire. Grâce aux techniques WaterLess® de Dockers, l’approche écoresponsable de ce vêtement permet de réduire la consommation d’eau en phase de production. 99€; fr.dockers.com

SALEWA PEDROC PRO MID PTX

Polyvalente et résistante, elle s’adapte à un large éventail de reliefs, de la montagne jusqu’à la ville. Sa semelle Speed Hiker Pro et son système de protection de cheville (APS) en font un modèle flexible et technique, conçu pour offrir sécurité et stabilité au pied. La tige montante en TPU et la membrane Powertex sans PFC per mettent de garder les pieds au sec et la technologie Powertex, par Salewa, assure une grande respirabilité. 200 €; salewa.com

PERSPECTIVES matos
86 THE RED BULLETIN

PERSPECTIVES matos

SAUCONY XODUS ULTRA 2

Elle a été pensée pour les longues distances, avec un design offrant davantage d’espace et de confort à vos pieds. L’amorti ultra-léger/moelleux

PWRRUN PB est associé à un renfort durable PWRRUN, pour vous aider à redynamiser votre foulée. La semelle extérieure PWRTRAC offre une adhérence inégalée sur les terrains inconnus, pour une foulée plus fluide. 165€; saucony.com

SALEWA PEDROC PRO POLARTEC

Cette veste isolante et légère (160 g) a été conçue pour le speed hiking intensif. Respirante, elle protège du vent, tout en offrant une grande liberté de mouvement grâce à l’élasticité de sa matière.

L’isolant Polartec® Alpha®, fabriqué à partir de bouteilles en PET recyclées, régule la température du haut du corps lors d’une activité physique prolongée. 240€; salewa.com

DEUTER DURASCENT 30

Matériau résistant, coutures étanches et soudées, fermetures à glissière plates revêtues de TPU et rabat roulé garantissent l’étanchéité de ce sac à dos d’alpinisme. Les boucles d’attache et les stabilisateurs de hanche qui se rangent sur les côtés contribuent à l’excellent rapport confort/ poids, mais permettent également de le porter avec un harnais d’escalade. 210€; deuter.com

THE RED BULLETIN 87 CHRIS MÜLLER PHOTODESIGN FOR DEUTER SPORT

ENTRAÎNEMENT

L’habit ne fait pas le coach

Dans le triangle des Bermudes du fitness qu’est FitTok, scrollez vers le succès.

Biceps saillants. Abdos tablette de chocolat. Fessiers galbés. Vous voulez connaître les secrets de tout cela en seulement 30 secondes ? C’est le principe du TikTok du fitness –aka FitTok – où un flot continu de sportifs et sportives propose des conseils d’entraînement qui auraient autrefois coûté une fortune et des mois de sueur. Le hashtag #FitTok compte plus de trois millions de messages et 49 milliards de vues. L’engouement est dû en partie à l’apparition régulière de nouvelles tendances en fitness, souvent boostée par les célébrités.

Mais vous croiserez également des « influenceurs » aux qualifications douteuses, montrant des exercices discutables comme « l’entraînement ultime des triceps » et « le secret pour avoir des fesses rebondies ». Alice Liveing, coach personnel et auteure d’ouvrages sur le fitness, explique ici comment faire preuve de prudence pour

déterminer quels sont les exercices miracles qui vous conviennent...

Des choix positifs

Vous avez entendu parler de la tendance TikTok treadmill strut? Voici comment cela fonctionne : vous marchez sur un tapis roulant tout en écoutant une playlist et à chaque nouvelle chanson, vous augmentez la vitesse de 0,1 km. « Du point de vue professionnel, je pourrais me dire : “Est-ce que ça va vraiment aider ?” » Mais si quelqu’un se décide à bouger après avoir vu une vidéo sur TikTok, c’est très bien. La faisabilité est également un plus : « La plupart d’entre nous peut marcher, il est facile de s’y mettre. »

Drapeaux rouges

Si FitTok peut être une excellente source d’inspiration, Alice nous met en garde contre « quiconque dans l’excès, promettant trop de choses ou donnant des

ultimatums », comme perdre « X kilos en X semaines » ou quelqu’un qui prétend que sa méthode est « la meilleure ». Et si quelqu’un prétend que ses abdos durs comme fer ne sont dus qu’aux exercices, « c’est un mensonge, malheureusement, dit-elle. Les abdominaux visibles sont le résul-

tat d’un faible pourcentage de graisse corporelle sur le ventre. » Vous pouvez certainement vous entraîner pour avoir des abdominaux plus définis, mais pour qu’ils se voient, il faut que la graisse corporelle fonde à cette endroit. « Avec les médias sociaux, nous devons remettre en question tout ce qui nous semble anormal. »

Utiliser un miroir

« Comprenez le contexte dans lequel se trouve la personne sur votre écran et dans lequel vous vous trouvez, et restez réaliste, déclare Alice. Ce n’est pas parce que quelqu’un fait une planche complète avec les genoux décollés du sol que c’est nécessairement à votre niveau. » Elle recommande d’utiliser une caméra ou un miroir pour voir si vos mouvements sont différents de ce qu’ils devraient être, ou de trouver une version plus facile de l’exercice. Mais surtout, si vous ressentez une certaine gêne à la lecture d’une vidéo, « ce n’est probablement pas ce qu’il vous faut ».

Briser le moule

« Ce qui est difficile à dépasser est que les algorithmes (de TikTok) jouent en faveur de la minceur », explique la coach. Mais il faut se rappeler que « la génétique joue un rôle énorme dans notre apparence » et que les stars ont « des équipes de nutritionnistes, de diététiciens, de chirurgiens et de massothérapeutes » pour les aider à atteindre cet objectif : « Dire que l’exercice est la (seule) clé du succès est complètement faux. » Elle suit un grand nombre de personnes pour ne pas voir uniquement celles et ceux qui entrent dans le « moule du fitness ».

« Le fitness peut revêtir des aspects très divers, expliquet-elle. Trouvez des personnes qui vous font vous sentir bien dans vos mouvements. »

alice-liveing.co.uk

PERSPECTIVES fitness
« Soyez lucides et restez réalistes. »
Alice Liveing, coach sportive
88 THE RED BULLETIN ISABELLE ARON

Recherche investisseur

Nouveaux modèles, retours en force, classiques modernes, un œil sur ces sorties qui donnent envie.

PERSPECTIVES motos
90 THE RED BULLETIN

PERSPECTIVES motos

MOTO GUZZI V100 GIRO D’ITALIA

La marque de Mandello del Lario entre dans une nouvelle ère : jusqu’alors intouchable, le nouvel enduro V100 n’a gardé que l’indétrônable moteur V2 en ligne, même s’il a été entièrement revu. Ajoutez un système aérodynamique adaptatif exclusif, un écran numérique, un quickshifter, une position de conduite améliorée et de nombreux accessoires et avanti pour une arsouille à l’italienne ! 1042 cc, 115 ch / 85 kW, à partir de 16999 €; motoguzzi.com

BMW M 1000 R LA MASSUE BAVAROISE

Pour fêter son centième anniversaire, BMW Motorrad nous offre le roadster le plus puissant au monde avec ses 210 ch. Une seule question reste encore sur toutes les lèvres : comment cette moto parvient-elle à réaliser des performances qui n’existaient jusqu’ici que dans la catégorie de Moto GP ? La réponse est triple : ailerons aérodynamiques inspirés du modèle Moto GP, réglage de châssis électronique et antipatinage dernière génération. 999 cc, 210 ch / 154 kW, à partir de 34196 €; bmw-motorrad.fr

THE RED BULLETIN 91

VESPA GTS UN VENT DE FRAÎCHEUR

Personne, excepté peut-être Porsche et sa 911, n’est aussi fidèle au design original que Piaggio et sa Vespa. Mais cela ne l’empêche pas d’évoluer. Quatre variations de la série GTS sont proposées cette année en 125 et 300 cc. Nouvelle fourche avant monobras pour plus de stabilité, système Keyless Go, « cravate » de la face avant modernisée, clignotants LED améliorés, position de conduite adaptée et nouveaux coloris. 125 ou 300 cc, 14 ou 24 ch, à partir de 5999 ou 6999 €; vespa.com

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HARLEY-DAVIDSON PAN AMERICA 1250 SPECIAL UNIQUE EN SON GENRE

Harley ne fait pas que dans le classique et le touring mais aussi dans l’enduro d’aventure. La Special se veut une version haut de gamme de la Pan Am avec tous les superlatifs de rigueur : suspension réactive au poids embarqué, amortisseurs de direction ou phares adaptatifs avec LED auxiliaires. Et en exclusivité mondiale : système d’abaissement automatique pour s’asseoir sur la moto. 1252 cc, 152 ch / 112 kW, à partir de 26595 €; harley-davidson.com

HONDA XL750 TRANSALP TOUS LES CHEMINS MÈNENT À ELLE

Célébrons le retour d’une légende : dans les années 1980, déjà, « Transalp » était synonyme de moto simple, universelle et polyvalente, pour un mode urbain ou enduro, sentier ou autoroute. C’est exactement ce que promet ce nouveau modèle avec un moteur twin vertical. À son bord : antipatinage, tableau de bord couleur, éclairage LED et clignotants à réinitialisation automatique. 755 cc, 92 ch / 68 kW, à partir de 11590 €; moto.honda.fr

ROYAL ENFIELD SUPER METEOR 650 SAVEURS ÉPICÉES

Loin de s’arrêter, la plus ancienne marque encore en production est en plein boom. Grâce à la Super Meteor, le moteur twin vertical propre à la marque indienne et décliné sur les classiques Interceptor et GT est remis au goût du jour dans ce cruiser compact agrémenté d’un réservoir à écusson, une fourche inversée, des jantes en alliage d’aluminium, éclairage LED et un écran analogique/numérique combiné. 648 cc, 47 ch / 35 kW, 9090 €; royalenfield.com

PERSPECTIVES motos
Ah, si Peter Fonda pouvait voir ça ! Sur la nouvelle Harley, on peut abaisser le châssis au moment de s’asseoir...
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United Colors

HONDA CB750 HORNET HARO SUR LES PRIX !

Cette légendaire guerrière de l’asphalte signe un retour en force avec, certes, deux fois moins de cylindres mais un nouveau bloc moteur décuplé. Le modèle n’a rien perdu en puissance, et son châssis ne pèse que 16,6 kg ce qui lui donne encore plus de maniabilité et le meilleur rapport poids/puissance de sa catégorie. Le prix imbattable du CB750 Hornet en fait également un futur bestseller. 755 cc, 92 ch / 68 kW, à partir de 8690 €; moto.honda.fr

KTM 1290 SUPER DUKE R EVO ON SE CALME, DERRIÈRE !

Les concurrents feraient mieux de laisser tomber : surnommé

« The Beast », le roadster le plus radical de l’histoire de KTM joue sur tous les registres de la performance, jusqu’à son mode Track où les 180 ch et les 140 Nm de couple feront rugir la bête sans aucune retenue. Si « The Beast » ne termine pas en tête sur un circuit, c’est que son maître n’a pas su la dompter. 1 301 cc, 180 ch/132 kW, à partir de 25499 €; ktm.com

BRIXTON CROMWELL 1200 LA CITOYENNE DU MONDE

Look so british, concept made in Austria, le tout fabriqué en Chine : Brixton propose des roadsters résolument modernes et techniques à des prix très raisonnables. La Cromwell et son généreux moteur de 1200 cc s’adresse aux mordu·e·s de Triumph et s’impose seule en tête niveau données techniques. Le petit plus de cette moto : l’arrière vissé évite une découpe en cas de customisation. 1222 cc, 83 ch / 61 kW, 11999 €; brixton-motorcycles.com

PERSPECTIVES motos
of Brixton : un look british pour cette moto made in China tellement autrichienne dans l’âme…
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SHOEI EX-ZERO STAR 80

Le vrai style est intemporel, comme le montre le Shoei Ex-Zero, la réinterprétation d’un casque tout-terrain des années 1980. La coque extérieure est en Advanced Integrated Matrix et offre, en combinaison avec le système de noyau en polystyrène, une protection optimale contre les chocs. La visière intégrée est ajustable sur 3 niveaux et protège efficacement les yeux. 423 €; shoei-europe.com

PERSPECTIVES matos

FIVE SCRAMBLER ET LES GANTS

De nos jours, « scrambler » qualifie une moto (ancienne ou moderne) au style vintage dépouillé, capable d’évoluer sur et hors asphalte. C’est désormais un gant de la collection custom de Five Gloves dédiée aux amateurs de ce type de machines, ou simplement du style qui va avec, qui fait son arrivée. TouchScreenTM , ce gant opte pour un look dépouillé et personnalisable, avec ses badges velcro interchangeables si distinctifs. 59,90€; five-gloves.com

PHARAO TRETON HYBRID OVER ARMURE

Le rêve de tous ceux qui enchaînent les bornes : une protection efficace et stylée, pour parer à toutes les conditions météorologiques. La veste textile hybride Pharao Treton combine des vestes de pluie, thermiques, softshell et de protection individuelles. Tous les hauts peuvent en outre être portés individuellement ou combinés – que ce soit en roulant ou en se retrouvant tranquillement après une virée riche en émotions. 499,99 €; polo-motorrad.com

DAINESE TORQUE 3 OUT PIED BEAU

La Dainese Torque 3 Out est une botte de course en microfibre et en tissu D-Stone. Les semelles sont dotées d’inserts en TPU qui assurent une bonne adhérence. Les sliders interchangeables en magnésium, le nylon protecteur sur la tige, le talon et la pointe ainsi que le système D-Axial en TPU pour la protection contre la torsion des pieds garantissent le confort. Sécurité et assurance pour s’exprimer au max sur n’importe quel circuit. 399,95 €; dainese.com

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THE RED BULLETIN

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Spider-woman

Rien n’arrête Lilou Ruel. La Toulousaine de 20 ans, championne du monde de freerunning en 2021, enchaîne les moves pour l’objectif de Little Shao. « Lilou est une athlète qui porte beaucoup d’importance à l’esthétique dans le mouvement, elle est force de proposition et répond toujours présente aux idées qu’on lui propose, explique le photographe, qui a trouvé dans cette icône du parkour un sujet de choix. Que les mouvements soient basiques ou complexes, elle offre de la grâce et de la légèreté dans sa gestuelle, et donc de la créativité. » Suivez Lilou, si vous le pouvez...

Le prochain THE RED BULLETIN sortira le 22 juin 2023.

Pour finir en beauté
98 THE RED BULLETIN LITTLE SHAO/RED BULL CONTENT POOL

INSPIRED BY HELMET TECHNOLOGY *

INSPIRÉ DE LA TECHNOLOGIE DES CASQUES

ÉLÉMENT INTERNE SOUPLE

FIVE a innové avec le STUNT originel : un modèle iconique combinant la sécurité d’un gant route et la souplesse d’un gant offroad. STUNT EVO 2 amène le concept à un niveau supérieur, avec sa paume tout cuir et ses nouvelles coques AirGoPROTECHTM À l’image de l’ensemble coque + calotin d’un casque, elles sont constituées d’une coque externe dure associée à un élément interne ergonomique souple afn d’absorber l’énergie en cas d’impact, et alvéolé pour canaliser le flux d’air. Comme pour les casques, nous avons dû créer trois tailles de coques pour couvrir l’ensemble des tailles. Le futur est entre vos mains.

© FIVE GLOVES 2023 * NOUVEAU STUNT EVO 2 Inspiré de la technologie des casques
FIVE-GLOVES.COM
Sébastien CHARPENTIER Ex-champion du monde Supersport et vainqueur des 24H du Mans
ERGONOMIQUE ALVÉOLÉ POUR ABSORBER L’IMPACT ET CANALISER LE FLUX D’AIR COQUE EXTERNE DURE POUR PROTÉGER DES CHOCS
NEW STUNT
EVO 2
samsung.com
DAS Galaxy S23 Ultra tête : 0,963 W/kg, DAS tronc : 1,398 W/kg, DAS membres : 2,95 W/kg. DAS Galaxy Watch5 4G 44 mm membres : 2,664 W/Kg. DAS Galaxy Watch5 Pro 4G 45 mm membres : 1,510 W/Kg. La disponibilité des couleurs, tailles, modèles et bracelets peut varier selon les pays et revendeurs. Mesures visant uniquement l’amélioration du bien-être et de la forme physique, non destinées à des fns médicales. Samsung Electronics France - CS20003 - 6 rue Fructidor - 93484 Saint-Ouen Cedex. RCS Bobigny 334 367 497. SAS au capital de 27 000 000 €.
HORS DU COMMUN THE RED BULLETIN N° 129–06/2023

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