Paysages culturels du Val de Loire
sommaire p. 07
A vant-propos
p. 11
L’harmonie des paysages culturels
R etour sur l’inscription Unesco : démarche, processus et caractérisation —
p. 19
P aysages culturels du Val de Loire
Bruno Marmiroli, directeur de la Mission Val de Loire
Pour des découvertes itinérantes d’un patrimoine universel
Louis-Marie Coyaud*, géographe, professeur des universités p. 33
L es coulisses de l’inscription Isabelle Longuet*, membre du CA d’Icomos France, directrice de la Mission Val de Loire de 2010 à 2018
p. 39
Au retour d’Italie, un artiste dans le Val de Loire
Prosper Barbot (1798-1877)
Claire Giraud-Labalte*, présidente du Pôle patrimoine en Pays de la Loire et vice-présidente du conseil scientifique et professionnel de la Mission Val de Loire p. 49
Les vertus de l’inscription
V aloriser : acteurs, actions et réalisations —
p. 57
L ’action de l’État dans une démarche de préservation de la VUE
p. 65
Des financements privés pour la beauté des paysages
p. 69
Paroles d’acteurs
Jacques Boislève*, journaliste et écrivain
Franck Lellu, chef de l’unité Val de Loire et paysages - DREAL Centre Val de Loire André Spack, docteur en géographie/économie du tourisme
Entretiens avec Bruno Gabris, Tessa Laroche, Gilles Clément, les êtres Loire, Marie Bellina et Alexandre Fagat Antoine Burbaud, éditeur et journaliste
p. 97
Évaluer le bien-être pour agir sur l’économie
Un défi pour le paysage du quotidien et ses acteurs
Yves Luginbühl*, ingénieur agronome, docteur en géographie, directeur de recherche émérite, CNRS LADYSS p. 105
U n balcon sur la Loire Rémi Deleplancque, chargé de mission ingénierie et médiation culturelles à la Mission Val de Loire
09
2 000-2020 : comparaisons, évolutions et transformations —
p. 113
Le patrimoine, accélérateur de la transition ?
p. 119
Il était plusieurs fois le barrage du lac de Loire à Blois
p. 127
Définir le Val de Loire
Bertrand Folléa, paysagiste et urbaniste
Béatrice Amossé, directrice de l’Observatoire Loire à Blois
Entre dynamiques territoriales et préservation des paysages Lionel Henry, économiste et géographe, et Bruno Marmiroli
p. 137
Le lit du fleuve
Entrée en matières
Virginie Serna*, archéologue, conservateur en chef du patrimoine, présidente du conseil scientifique et professionnel de la Mission Val de Loire p. 147
25 ans de restauration du lit de la Loire
Entre visions hydraulicienne, morphodynamique et écologique
Jean-Pierre Berton*, hydrobiologiste, professeur émérite de l’université de Tours et Stéphane Rodrigues*, professeur des universités, dynamique physique, sédimentaire et écologique des cours d’eau
Et demain ? Défis, devenir, prospective — p. 161
Quels défis pour le Val de Loire face au changement climatique ?
p. 168
Les auditions du parlement de Loire
Yves Luginbühl*
Entretien avec l’écrivain Camille de Toledo Bruno Marmiroli
p. 185
« La nature à la rencontre de la culture »
p. 191
L’école buissonnière
p. 197
R egards de Loire Imola Gebauer, historienne de l’art
Damien Hémeray, conservateur de la réserve naturelle de Saint-Mesmin Lolita Voisin*, directrice de l’École du paysage de Blois
* Membres du conseil scientifique et professionnel de la Mission Val de Loire
Les bords de Loire, un inépuisable terrain d’aventures. © B. Marmiroli / MVL.
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L’harmonie des paysages culturels Bruno Marmiroli
Depuis 1992, les paysages culturels sont reconnus, protégés et potentiellement inscrits sur la liste du patrimoine mondial de l’Unesco, au même titre que les monuments 1. Leur définition n’a, depuis, cessé d’intégrer de nouvelles typologies même si certains cadres ont permis de circonscrire le sujet. En premier lieu, il peut être utile de rappeler que « dès qu’un territoire est vu comme un paysage, il est porteur de valeurs culturelles 2 ». En agrégeant les deux termes, il s’agissait de mettre en évidence la nature des relations entre les communautés humaines et l’environnement naturel. Portées à leur paroxysme, ces relations peuvent être reconnues comme ayant une valeur universelle exceptionnelle. Dans le cas du Val de Loire, les critères culturels retenus 3 sont associés à des catégories spécifiant qu’il s’agit d’un paysage culturel « évolutif et vivant ». Peter Fowler 4 mentionnait le paradoxe apparent des termes, évoquant l’idée qu’un paysage culturel est une forme de « mémorial au travailleur agricole inconnu » dont les vestiges tangibles doivent être suffisamment éloquents pour posséder une valeur universelle exceptionnelle. La vertu de ces paysages résiderait dans la pérennité de formes traditionnelles dessinées par des mains anonymes. Comment comprendre, dès lors, l’intégration d’un territoire étendu qui accueille et reflète des politiques publiques en matière d’aménagement du territoire parfois assez éloignées des « formes traditionnelles » des paysages ? Le choix des critères qui ont prévalu à la reconnaissance du Val de Loire en novembre 2000 peut nous apporter un début de réponse et surtout nous proposer une trajectoire, un cadre commun tel que proposé dès l’origine par celles et ceux qui ont œuvré à la reconnaissance de la valeur des paysages. Il y est question, entre autres, du « développement harmonieux d’interactions entre les hommes et leur environnement » 5. En cela réside probablement la clé de notre socle collectif, qui, vingt ans après l’inscription, reste d’une étonnante modernité. L’image rémanente des paysages traditionnels demeure, à mi-chemin entre les traces tangibles de leur existence et la représentation culturelle qui façonne notre appréhension du Val de Loire. Elle s’accompagne le plus souvent d’actions qui ont su trouver – à l’échelle du Bien 6 - une place, en s’immisçant dans la trame historique du Val sans trop en altérer la lisibilité.
1 _ En 1992, le Comité du patrimoine mondial adopte des directives concernant l’intégration des paysages culturels à la liste du patrimoine mondial. 2 _ Nora Mitchell, Mechtild Rössler et Pierre-Marie Tricaud, « Paysages culturels du patrimoine mondial », Cahiers du patrimoine, no 26, décembre 2011. 3 _ Les critères culturels (i) (ii) et (iv) ont été retenus pour l’inscription du Val de Loire sur la liste du patrimoine mondial de l’Unesco. 4 _ Peter Fowler, « Paysages culturels du patrimoine mondial », Revue du patrimoine mondial, no 44, p. 26. 5 _ Critère (ii) : « Le Val de Loire est un paysage culturel exceptionnel le long d’un grand fleuve. Il porte témoignage sur un échange d’influences, de valeurs humaines et sur le développement harmonieux d’interactions entre les hommes et leur environnement sur plus de deux mille ans d’histoire ». 6 _ La notion de « Bien » qualifie l’entité inscrite sur la liste du patrimoine mondial de l’Unesco. Dans le cas du Val de Loire, il s’agit d’un « Bien étendu ».
Une vue de la Loire exposée au Salon de 1833 à Paris, intitulée Le Pont de Tours. © Musée d’arts de Nantes.
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Au retour d’Italie, un artiste dans le Val de Loire Prosper Barbot (1798-1877) Claire Giraud-Labalte
Un attachement à la vallée de la Loire —
En 2020, le Val de Loire célèbre les vingt ans de son inscription au patrimoine mondial de l’humanité, au titre des paysages culturels. Cet événement suscite de nombreuses réflexions sur l’étude, le partage, l’aménagement et l’avenir des paysages 1 qui font la valeur exceptionnelle de ce vaste territoire. Si l’on considère que le paysage naît d’un regard porté sur un lieu, les voyageurs et les artistes ont, au fil du temps, contribué à forger un bon nombre de représentations textuelles ou figurées. Oublions un instant les œuvres iconiques telles les aquarelles de Turner pour explorer sans idée préconçue la production d’un artiste méconnu 2, Prosper Barbot, né à Nantes en 1798. Son attachement à la région, sa double formation d’architecte puis de peintre, et enfin ses voyages en Italie dans les années 1820 sous-tendent ce choix. Il a été possible de déceler quelques indices parmi ses notes et de dégager un corpus iconographique comprenant plusieurs peintures et une trentaine de dessins ou croquis réalisés sur les rives ligériennes 3, tant en Anjou qu’en Touraine. Ces éléments attestent le passage ou le séjour de l’artiste dans cette région, à plusieurs périodes de sa vie, entre 1820 et 1853.
1 _ Dans la Convention européenne du paysage, Florence, 2000 (art. 1), le paysage « désigne une partie de territoire telle que perçue par les populations, dont le caractère résulte de l’action de facteurs naturels et/ou humains et de leurs interrelations ». 2 _ Parmi les récents travaux sur Prosper Barbot et ses œuvres conservées dans des collections publiques et privées, voir C. Giraud-Labalte, « Décrire l’œuvre d’art en Italie dans les années 1820 : “Le voyage d’architecture” de Prosper Barbot », dans D. Huneau, N. Le Luel, L. Naudeix et A. Vincent (dir.), L’Œuvre d’art dans le discours, Sampzon, Delatour France, 2017, p. 217-233 ; C. Giraud-Labalte, « Figures d’artistes dans le paysage angevin autour de 1830 », dans C. Giraud-Labalte et P. Barbier (dir.), Les Années du romantisme. Musique et culture entre Paris et l’Anjou, Rennes, PUR, 2012, p. 135160 ; P. Le Nouëne, « Le rayonnement des artistes angevins […] », ibid., p. 161-180. 3 _ Pour les besoins du sujet, les limites du Val de Loire - patrimoine mondial sont traitées ici avec quelque liberté.
Après des études d’architecture à Paris, Barbot parcourt l’Italie de 1820 à 1822. De retour en France, il entre dans l’atelier de Louis Étienne Watelet 4 pour embrasser une carrière de peintre. De 1826 à 1828, il effectue en Italie un second voyage au cours duquel il se lie d’amitié avec Corot 5 et envoie au Salon des œuvres qui seront primées. Puis, pendant une quinzaine d’années, Barbot expose dans différents salons avant de se retirer en Anjou à partir de 1841. Bien que le journal de Prosper Barbot ait pour objet la relation de ses voyages en Italie et en Suisse dans les années 1820 et que ses dessins et peintures se rapportent majoritairement à ces deux pays, les rives de la Loire et leurs environs y tiennent une place notable. De fait, Barbot séjourne régulièrement en Anjou ; sa famille paternelle est issue de la ville d’Angers, où réside sa tante Rosalie, tandis que sa mère possède une propriété à Chambellay, sur les bords de la Mayenne. D’autre part, il semble compter des parents ou des amis en Touraine. Dans son journal, Barbot manifeste une grande affection à l’égard de sa famille, de ses parents et de son frère Charles surtout, à qui il écrit régulièrement durant ses voyages. Ces liens personnels se doublent d’un attachement à son « berceau familial », l’Anjou. Arrivant en 1825 à Saint-Maurice d’Agaune, il s’exclame : « Il faudrait n’avoir pas de sang angevin dans les veines pour laisser derrière soi l’antique ville d’Augaunium sans avoir payé son tribut d’admiration à l’illustre légion thébaine qui l’a arrosée de son sang, à son valeureux chef qui lui a donné son nom, comme plus tard il l’a donné à l’église métropolitaine d’Angers 6 […]. »
4 _ Louis Étienne Watelet (1780-1866), peintre paysagiste spécialisé dans les paysages d’histoire, professeur reconnu. 5 _ Barbot fit la connaissance de Corot à Rome, dès son retour de Sicile à la minovembre 1826. Angers, bibliothèque municipale [ensuite BMA], ms 2019/10, fol. 17. 6 _ Lettre de P. Barbot à son père, Brig (Suisse), 8 septembre 1825. BMA, ms 2019/8.
Valoriser : Acteurs, actions et réalisations —
Saint-Benoît-sur-Loire, vue depuis la levée. © DREAL Centre.
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L’action de l’État dans une démarche de préservation de la VUE Franck Lellu
Élaboration du plan de gestion —
L’État et les collectivités se sont engagés dans l’élaboration du plan de gestion du Val de Loire patrimoine mondial de l’humanité entre 2008 et 2012. Ce document, signé par le préfet de la région Centre en 2012, a permis de faire émerger un référentiel commun partagé avec l’ensemble des acteurs de ce territoire. Son contenu rappelle ce qui constitue les éléments de la VUE (Valeur Universelle Exceptionnelle), précise les enjeux des dynamiques qui traversent ce territoire parmi les plus attractifs des deux régions, pour enfin définir les orientations de gestion qui permettront de maintenir son développement et la préservation de sa valeur paysagère. Les neuf orientations de gestion retenues s’appuient sur un diagnostic, répondent aux enjeux de préservation de la VUE et permettent d’anticiper la prise en compte de la valeur paysagère dans les projets à venir. Les actions spécifiques de l’État sont précisées dans la quatrième partie du plan de gestion. Il s’engage à mettre en œuvre une politique de protection des sites les plus emblématiques du Val de Loire Unesco, en mobilisant les outils réglementaires existants et qui relèvent de sa compétence.
La protection des sites les plus emblématiques du Val de Loire —
Cette politique de protection des sites les plus emblématiques du Val de Loire Unesco s’appuie sur les préconisations du rapport d’inspection générale du CGEDD de 2005, qui privilégie l’articulation site classé (CE L 341-1 à suivants) et ZPPAUP (SPR) pour les secteurs les plus urbains. Sur ces principes, vingt-cinq sites ont été identifiés par les services en charge de la politique des sites classés (DREAL) pour les deux régions.
Chaque procédure de classement s’appuie sur un travail préalable très précis, en concertation avec les collectivités concernées. Ce travail doit conduire à décrire les qualités du site, démontrer sur quels critères la protection peut se fonder (pittoresque, légendaire, scientifique, artistique ou historique), à définir un périmètre cohérent qui englobe les enjeux de ce dernier répondant aussi bien aux critères retenus qu’à sa gestion. Les sites retenus, s’ils répondent à un ou plusieurs critères attendus au titre de la protection des sites, expriment le plus souvent également un bon niveau d’intégrité d’un ou plusieurs éléments constitutifs de la Valeur Universelle Exceptionnelle. Le critère pittoresque est le plus souvent rencontré : cela confirme la grande finesse de ces paysages particulièrement aboutis. Le critère historique vient en deuxième place, rappelant que le Val de Loire s’inscrit dans une grande épaisseur historique qui mêle souvent histoire locale et histoire nationale. Enfin, le critère artistique est lui aussi représenté, signant l’importance de ce territoire dans le développement des arts à plusieurs époques pour l’Occi dent, particulièrement à la Renaissance. Le niveau de protection élevé, décret pris en Conseil d’État, impose une procédure rigoureuse soumise à la consultation des conseils municipaux, une enquête publique, un passage en commission départementale de la nature des paysages et des sites et en commission supérieure des sites et des paysages. Ces procédures sont longues (cinq ans en moyenne). Aujourd’hui, huit sites ont été classés et six sont en cours de classement. Les derniers sites classés l’ont été en région Centre Val de Loire : les Madères Olivier Debré ; le château, les varennes, le coteau, la Loire et l’aqueduc à Luynes ; l’abbaye de Saint-Benoît-sur-Loire. Le site des Madères a été classé sur les critères pittoresque et artistique ; il permet ainsi de confirmer la grande valeur paysagère du transect plateau/coteau/
La pêche dans la Loire. © Pêcheurs de Loire.
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Le pêcheur à la recherche d’équilibre Le Loirétain Bruno Gabris a fait de la pêche professionnelle son métier et de la Loire son terrain de jeu. Un espace sensible, dont il tient à prendre le plus grand soin tout en pérennisant son activité.
Des étangs de Sologne, où le jeune Bruno Gabris a découvert la pêche avec des amis de ses parents, à la Loire, sur laquelle il navigue au quotidien depuis une quinzaine d’années, il n’y a qu’un pas. Enfin non, pas tout à fait : il y a eu surtout beaucoup de sueur et de sacrifices pour arriver, aujourd’hui, à vivre de cette passion. « C’est mon treizième permis professionnel cette année », souligne-t-il. Après un BTS agricole Gestion et protection de la nature, il rencontre Jean-Philippe Vanlauwe, un autre Ligérien. Ils s’associent et créent Passeurs de Loire, proposant depuis 2006 des promenades sur le fleuve. « Ce qui m’a, entre autres, permis de rencontrer les pêcheurs professionnels du coin, qui m’ont finalement donné envie. »
« Ce n’est pas mon idéal, mais c’est mon équilibre. » —
En 2009, Bruno Gabris souhaite diversifier son activité. La pêche professionnelle devient alors un complément. « Il m’a fallu plusieurs années pour me familiariser avec les espèces, les saisons, observer comment la Loire vit. J’ai appris à travailler avec le fleuve. Mais vivre uniquement de la pêche brute s’est vite révélé une utopie. Ce qui me fait vivre, c’est mon atelier de transformation et de conserves de poissons. Ce n’est pas mon idéal, mais c’est mon équilibre. » Le pêcheur s’est donc équipé en conséquence : il a par exemple été l’un des premiers à faire l’acquisition d’un stérilisateur. Il travaille également avec un traiteur pour des produits fumés et de l’épicerie fine. En ce qui concerne la restauration, il a changé son regard au fil du temps. « Je peux comprendre les contraintes financières de chacun, mais il m’est impossible de fournir à la demande, au jour le jour. Moi, je ne change pas la Loire. L’été, c’est presque une hérésie de pêcher : il n’y a pas beaucoup d’eau, le fleuve est partagé dans ses usages… Et puis avec une eau à 25 °C, cela nécessite de gros moyens pour bien conserver. » Bruno Gabris compte sur une nouvelle génération de restaurateurs – « un chef comme Christophe Hay peut le faire dans le Loir-et-Cher » – et de clients davantage soucieux de la préservation du fleuve et des espèces, pour que le poisson de Loire puisse perdurer dans les assiettes, de manière raisonnée et raisonnable. « Nous ne détruisons pas le milieu. Je ne vais naturellement pas pêcher des espèces qui se raréfient, d’autant plus que j’y perdrais mon temps, et donc mon argent… »
Panneau à l’entrée d’une maison le long du Cher, 2019. © Margot Pivot. Prix Mark Grosset 2019.
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Évaluer le bien-être pour agir sur l’économie Un défi pour le paysage du quotidien et ses acteurs Yves Luginbühl
L’évaluation socio-économique des aménités, c’est-àdire des biens non marchands, a commencé à préoccuper la communauté scientifique à partir du moment où la crise écologique s’est fait ressentir avec acuité et que le constat de l’érosion de la biodiversité et du réchauffement climatique a alarmé les spécialistes et peu à peu le monde politique puis l’opinion publique. L’intérêt des chercheurs et en particulier des économistes s’est manifesté surtout à l’égard des écosystèmes et de la forêt, ou de l’élévation du niveau des océans 1. Un débat parfois polémique a eu lieu entre économistes orthodoxes et hétérodoxes à propos des méthodes d’évaluation ; en effet, celles-ci cherchent à évaluer un bien non marchand en lui donnant un prix, comme la méthode du consentement à payer, ou méthode hédoniste, ou la méthode des coûts de déplacement. Par exemple, on constatait que le prix d’une espèce animale à protéger était le même que celui d’un site ou d’un paysage. La méthode du consentement à payer consiste en effet à demander à un échantillon d’individus quelle somme ils seraient prêts à payer pour protéger l’espèce ou le paysage ; dans presque tous les cas, le résultat est le même – environ 20 euros –, ce qui ne signifie rien, une baleine à protéger ayant le même prix qu’un paysage. Les méthodes d’évaluation économique ont commencé à changer devant les critiques relativement nombreuses des évaluations selon le consentement à payer ou les coûts de déplacement. À cet égard, un exemple mérite d’être cité, celui de l’évaluation du prix du paysage estimé
selon les coûts de l’immobilier 2. Le reproche le plus souvent formulé consistait à critiquer l’usage de critères quantitatifs. Les économistes hétérodoxes ont alors proposé d’utiliser des critères qualitatifs, comme le bienêtre subjectif, proposé par le rapport de la Commission sur la mesure des performances économiques et du progrès social, réalisé en 2008 à la demande du président de la République française, Nicolas Sarkozy, par le Professeur Joseph E. Stiglitz, président de la Commission, Columbia University, le Professeur Amartya Sen, conseiller de la Commission, Harvard University, et le Professeur Jean-Paul Fitoussi, coordinateur de la Commission, IEP 3. Ce long rapport, très détaillé, fait de nombreuses propositions et recommandations : « Un autre message clef, en même temps qu’un thème unificateur du rapport, est qu’il est temps que notre système statistique mette davantage l’accent sur la mesure du bien-être de la population que sur celle de la production économique, et qu’il convient de surcroît que ces mesures du bien-être soient resituées dans un contexte de soutenabilité. En dépit des déficiences de nos outils de mesure de la production, nous en savons davantage sur la production que sur le bien-être. Déplacer l’accent ne signifie pas désavouer les mesures du PIB et de la production. Issues de préoccupations sur la production marchande et l’emploi, elles continuent d’apporter des réponses à nombre de questions importantes comme celle de la gestion de l’activité économique. Il importe cependant de mettre l’accent sur le bien-être car il existe
1 _ Une étude fut notamment réalisée sur le littoral américain pour observer et évaluer le paysage des plages en lien avec la montée du niveau de l’océan Atlantique.
2 _ Thierry Brossard, Jean Cavailhes, Mohamed Hilal, Daniel Joly, François-Pierre Tourneux, Céline Tritz et Pierre Wavresky, « Le marché de l’immobilier, révélateur du prix du paysage », dans Thierry Brossard et Jean-Claude Wieber (dir.), Paysage et information géographique, Paris, Hermès, Lavoisier, 2008, p. 207-231. 3 _ Joseph E. Stiglitz, Amartya Sen et Jean-Paul Fitoussi, Rapport de la Commission sur la mesure des performances économiques et du progrès social, Paris, 2008.
Au château d’Azay-le-Rideau, 2019. © Margot Pivot. Prix Mark Grosset 2019.
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Le patrimoine, accélérateur de la transition ? Bertrand Folléa
Le patrimoine, par définition, nous place comme trait d’union entre le passé (l’héritage du père) et le futur (la transmission à ses enfants). La responsabilité de chaque génération est de le reconnaître, de l’entretenir, de le faire fructifier et de le renouveler. Quel sens prennent ces actions à l’heure de la transition écologique et solidaire, qui appelle à un complet renouvellement de nos modes de vie et cadres de vie pour faire face aux défis du changement climatique et de l’érosion de la biodiversité ? Le patrimoine constitue-t-il un frein, voire un obstacle, à cette métamorphose nécessaire et urgente ? On peut le penser lorsque l’on observe, par exemple, la réticence, pour ne pas dire la franche opposition, à toute forme d’énergie renouvelable, à commencer par les éoliennes dans le paysage – et même en mer –, le photovoltaïque dans les champs comme sur les toitures, et désormais les méthaniseurs producteurs de biogaz. On peut encore le penser en constatant la résistance à l’adaptation du bâti patrimonial en faveur de la transition : transformation des formes urbaines et architecturales pour une densité mieux acceptée, isolation contre le froid et le chaud. Notre rapport à l’énergie est décisif pour la transition, même si d’autres facteurs entrent en jeu. Les révolutions industrielles successives (vapeur et charbon, électricité, pétrole et gaz) ont conduit à une explosion de nos consommations, à une puissance d’action démultipliée et inédite et, de là, au fur et à mesure de leur extension mondiale, à une cascade d’effets secondaires de plus en plus problématiques : tensions et conflits internationaux ; gaz à effet de serre et dérèglement climatique ; pollution de l’air, de l’eau, des mers et des sols ; disparition du vivant ; artificialisation des terres par l’urbanisation, la déforestation et l’agro-industrie ; montée des individualismes et délitement des liens sociaux ; standardisation et appauvrissement des cultures.
Le mot d’ordre de Descartes de se faire « comme maîtres et possesseurs de la nature » a été appliqué à la lettre. Nous ne sommes plus en dialogue avec elle, vivants parmi le vivant. Nous nous sommes projetés hors de la nature pour l’asservir, la chosifier, en faire notre jouet. Philippe Descola parle de naturalisation du monde pour évoquer cette séparation nature-culture. Nous pourrions, en miroir, parler d’une humanité dénaturée. Tous ces faits sont connus, mis en évidence par des scientifiques, des philosophes, des anthropologues, depuis des décennies. Comment dès lors être contre les énergies renouvelables, qui utilisent des ressources naturelles, inépuisables et locales, la force de l’eau, du vent, du soleil, de la biomasse ? Remarquons que personne ne se dit contre les énergies renouvelables, mais que le phénomène nimby (not in my backyard) s’exprime dans les arrière-cours des sites patrimoniaux plus qu’ailleurs. Faut-il s’en offusquer ? Ce n’est pas sûr, si l’on considère qu’en France seule une petite fraction du territoire est protégée, de l’ordre de 20 % – et encore, en comptant des superficies comme les parcs naturels régionaux (15 % du territoire national) qui ne sont pas protégées à proprement parler. Cela laisse 80 à 95 % du territoire disponibles en théorie 1. Faut-il alors considérer les aires protégées comme des îlots échappant au temps et au processus contemporain de la transition et à ses artefacts énergétiques considérés comme non compatibles ? Ce serait un énorme contresens historique. Tout à l’inverse, nous pensons que les aires protégées peuvent servir d’îlots précurseurs et novateurs de la transition. Les dispositions de préservation et de protection dont elles ont bénéficié ont évité ou réduit les effets destructeurs du xxe siècle aménagiste, qui a ouvert à fond les vannes de l’énergie fossile et fissile pas chère. Les aires protégées, à un titre ou à un autre, sont restées 1 _ En réalité, 47 % du territoire sont interdits d’éoliennes, en raison notamment de la présence de radars pour l’armée, la météo ou l’aviation civile.
Site archéologique du naufrage de l’épave de Langeais (1795). © J.-P. Corbellini, Maison des Sciences humaines Val de Loire - USR 3501.
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Le lit du fleuve Entrée en matières Virginie Serna
Parmi les paysages culturels évolutifs et vivants, il en est un qui, enfoui et caché, liquide et changeant, courant et stagnant, ne se donne pas à voir facilement. C’est la Loire, dans son lit et sa masse, de bas en haut et de haut en bas. C’est à ce paysage pris à la verticale que nous consacrons cet article, à son histoire, ses mots, ses représentations, « des plus hautes grèves aux endroits les plus creux1 ».
Paysage subaquatique 1 —
À la différence des fonds marins, les fonds fluviaux ont peu séduit les photographes subaquatiques. La surface du dessous n’est pas une donnée paysagère comme les autres, elle ne s’embrasse pas d’un coup d’œil, elle ne se donne pas à voir. Même si le fond du fleuve est une magnifique archive sédimentaire, conservatoire de sites archéologiques, un écosystème reconnu, il n’a pas encore acquis sa propre valeur patrimoniale. Le paysage de Loire connu et reconnu est celui des coteaux et des châteaux, des bancs de sable et des oiseaux. Bref un paysage de surface, sorti de l’eau, où l’humide se goûte au sec. Corseté par les turcies et les levées, ponctué d’îles et navigué par les chalands, ce paysage époustouflant fait image, l’eau oscillant entre masse opaque et insondable et paroi de verre à la transparence vertigineuse. Dans cet espace clos, plein et creux, horizontal et vertical, l’archéologue subaquatique déploie une pratique professionnelle originale. Il se déplace face au courant, échafaudant des repères, se fabriquant des chemins, avenues de sable, larges espaces crissants, s’efforçant de mémoriser ce qu’au-dessus on nomme des séquences paysagères. L’intervention archéologique en milieu immergé commence par la mise en place d’un carroyage, large cadre métallique permettant à chacun de se repérer sur le site. Cette apposition d’un espace géométrique, organisant le périmètre des recherches sur le fond de la rivière, est à la fois rassurante et nécessaire pour une compréhension fine de l’organisation des artefacts. L’archéologue, bien lesté, se pose sur le fond ou travaille en légère suspension face au courant. L’eau est en mouvement, le sable bouge, les grains se déplacent, des particules en 1 _ R. Dion, Histoire des levées de la Loire, Paris, 1961, p. 13.
suspension voguent vers l’aval. Le paysage est serré, on y voit peu, les couleurs changent avec la lumière. Jaune, vert, beige, pas de bleu. En prospection archéologique subaquatique, le déplacement du corps est différent. Il se fait en suivant une ligne de vie ou en remontant le cours d’eau. Ce face-à-face avec le courant est le seul point de repère pour distinguer l’amont de l’aval, la rive gauche de la rive droite. La perte des sens est, sous le fleuve, déconcertante mais le cheminement pris à chaque palanquée sous l’eau aide l’archéologue à faire son paysage. Sous la surface, c’est le monde de l’eau et du sable, celui des particules en suspension, des poissons, des éponges et de tout ce que je ne sais nommer. L’occupation de la dimension verticale est très sensible tant pour les hommes que pour les poissons, et le corps, sous la combinaison humide, discerne plusieurs étages différents dans cette masse liquide. Plaquée au sol, le courant est moins violent et le froid plus palpable ; à mi-eau, les particules se déplacent, la force du courant se fait sentir. J’exploite, comme les poissons, toutes les possi bilités que m’offre la dimension de cet hydrosystème, les rives-refuges, le déplacement rapide en milieu de chenal, le miroitement de la surface de l’eau.
Là, sur l’épave du grand chaland de Langeais, avec bouteille et détendeur, je descends à la bouée, passe le tronc couché, tourne vers les trois boulets, retrouve l’épave, me fixe sur le fond de la Loire et peux commencer à travailler. La faible profondeur me permet de rester longtemps sous l’eau, 1 h à 1 h 40 ; le froid me fera sortir.
Cours d’écologie et de botanique, île de la Folie. © C. Le Toquin.
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L’école buissonnière Lolita Voisin
Au début des années 1990, sous l’impulsion visionnaire de son maire de l’époque, Jack Lang, la ville de Blois accueille une nouvelle formation, l’École nationale supérieure de la nature et du paysage. Son projet pédagogique est inédit : allier la connaissance à la liberté d’inventer.
À l’École nationale supérieure de la nature et du paysage de Blois, l’enseignement unit la connaissance fine des territoires, des lieux et des milieux habités, à une pédagogie de la créativité. Dès ses plus jeunes années, la formation trouve dans le Val de Loire ses premiers terrains d’exploration. Tandis que la classe de botanique inventoriait les friches du coteau, les élèves cartographiaient le paysage sonore ligérien en cours d’acoustique, l’atelier de projet de paysage imaginait la transformation de l’ancien site industriel Poulain, les expérimentations constructives s’organisaient dans le lit majeur de la Loire… Les enseignants, qui venaient pour la plupart de Paris pour une journée, traversaient le fleuve depuis la gare pour rejoindre ce début d’école, admirant au passage les lumières changeantes du ciel. Que venait faire une telle école dans le Val de Loire ? À l’époque, l’école est installée dans des préfabriqués, entre une station d’épuration et une déchetterie ; elle est dissimulée dans les coulisses de la ville, en zone inondable. Née d’une ambition politique et fruit de l’imagination de son fondateur, l’architecte Chilpéric de Boiscuillé, l’École nationale supérieure de la nature et du paysage proposait à ses futurs ingénieurs paysagistes d’envisager la transformation des territoires de manière décalée. L’esprit d’anticipation, la réflexion sur différentes échelles d’espace et de temps, ne prenaient sens que sur le fond d’une affirmation de l’expression et de la créativité personnelles. Il ne s’agissait pas de reproduire des gestes techniques acquis et transposés depuis de lointains bureaux administratifs, mais de prendre la mesure des capacités de changement et des conditions toujours particulières d’un lieu singulier. Cette formation interdisciplinaire en cinq ans est orientée vers la pratique, l’expérience et la confrontation à des situations spécifiques. Les étudiants suivent des cours d’écologie, de pédologie, de botanique, de sciences sociales, mais aussi d’arts visuels et de représentation de l’espace. L’enseignement trouve sa synthèse dans l’exercice du projet de paysage : les élèves travaillent sur la transformation de lieux habités, partagés et
utilisés – le plus souvent des lieux publics –, à partir d’une rencontre approfondie avec ces « sites » de projet. Ils entrent en dialogue avec des situations réelles et des personnes impliquées dans les lieux à transformer. Dans des contextes urbains, périurbains ou ruraux, ils scrutent la logique vivante et l’histoire d’un lieu afin d’en organiser et anticiper les usages futurs, en répondant aux besoins formulés par leurs habitants et usagers. Les promotions d’élèves se sont succédé, à une échelle toujours propice aux expériences collectives, sans jamais perdre de vue le fleuve tout proche. Certes, les ateliers de projet de l’école ont honoré des conventions avec des collectivités locales situées dans de nombreuses régions et avec des sujets très divers : la rénovation urbaine du quartier de Lille-Sud, le village montagnard de Lapoutroie, l’évolution urbaine de Richelieu, la culture des simples dans le massif des Bauges, la transition énergétique à l’échelle de l’agglomération de Rochefort, par exemple… Mais vingt-cinq ans plus tard, le Val de Loire n’en continue pas moins d’accueillir le quotidien de nos situations pédagogiques. Sans être un sujet en soi, ce paysage est celui qu’enseignants et élèves ont sous les yeux tous les jours. Ces derniers y vivent leurs années d’apprentissage, de découvertes, d’indépendance, de collectivité ; ils y vivent leurs vingt ans. Ils y scellent leurs premières représentations, au cours de sorties boueuses dans les zones humides de la Cisse, de charrettes de projet dans l’école ouverte toute la nuit, des installations éphémères dans des jardins partagés, des présentations de projets devant des élus, des ateliers de dessin dans les vieilles pierres de la ville, des explorations de sites abandonnés – friches, délaissés, fossés –, des panoramas dessinés à plusieurs mains, des visites aux archives, des jardins historiques, des bords de Loire.
Les étudiants scrutent la logique vivante et l’histoire d’un lieu afin d’en organiser et anticiper les usages futurs.
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Regards de Loire Exposition photographique organisée par la Mission Val de Loire 23 octobre 2020 - 17 janvier 2021
Imola Gebauer
Tant de regards se sont posés sur la Loire et ses paysages. Tant d’objectifs, comme autant de découvertes, de réalités et de visions. Parmi les topoï hérités d’autres genres, les regards se renouvellent d’une époque à l’autre sur ce territoire en transformation perpétuelle. Un sujet de prédilection pour les artistes, et parmi eux, depuis plus de cent cinquante ans, pour les photographes. Comme sur le modèle pictural, les grands paysages panoramiques du fleuve et ses monuments alternent avec les détails les plus intimistes, jusqu’aux gros plans d’une étude botanique. Mais avant tout dominent le sentiment de l’infini et un goût de l’éternel, mais aussi celui de l’instant capturé. Le fleuve coule, aujourd’hui tranquille et élégant, autrefois dynamique et puissant, mais toujours vivifiant. Nous y sommes attachés, plus ou moins ancrés, par des liens personnels ou même professionnels, par des liens qui s’entremêlent. L’Unesco a reconnu le Val de Loire comme un paysage culturel évolutif et vivant, une œuvre élaborée conjointement par l’homme et la nature. À la Mission Val de Loire, nous tenons à l’étudier jour après jour. Architectes, urbanistes, paysagistes, scientifiques, historiens et artistes viennent pour en parler, le comprendre ou l’exprimer. La photographie offre une infinité d’approches pour le saisir : par sa faune ou sa flore, par son architecture en lien avec sa géomorphologie, par ses métiers et même par ses bruits, ses couleurs ou ses ambiances. C’est par une interprétation des critères retenus au moment de l’inscription que nous présentons le plus souvent ce territoire. Il s’agit de l’eau, des jardins, de la vigne et de la pierre. Quatre éléments dont l’histoire s’entremêle depuis toujours avec celle des hommes et des femmes qui y ont habité. Ils offrent ainsi un fil conducteur pour l’exposition qui marque les vingt ans de l’inscription. Pour la Mission Val de Loire, la photographie a toujours été un outil de connaissance du territoire. Mais aussi un vecteur de communication. Au château de Tours, les regards des photo graphes se croisent. Devant l’objectif, les éléments humains et non humains se répondent naturellement. Aux travaux « libres », sans contrainte, des artistes, répondent ceux effectués selon un protocole prédéfini, comme les campagnes de l’Observatoire photographique des paysages. Ceux, réalisés à des fins scientifiques, ou ceux des jeunes photographes, lauréats du Prix Mark Grosset et artistes en résidence à La Colombière, qui ont exprimé leurs perceptions du territoire, de ses monuments et de ses habitants. Tous ces regards interrogent, directement ou non, les quatre thèmes proposés. Par leur approche pratique ou artistique, les œuvres invitent à graviter constamment autour de l’analyse, du mystère ou de l’imaginaire. Le regard alterne de clichés dus au hasard à d’autres relevant d’une contemplation réfléchie, entre temporel et intemporel, réel ou abstrait, personnel et universel.
Imola Gebauer est historienne de l’art. Depuis 2014 elle travaille avec la Mission Val de Loire en tant que chercheuse, notamment autour de la Renaissance, pour les actions de valorisation du patrimoine et récemment en tant qu’iconographe.