L’hôtel de région des Pays de la Loire

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L’HÔTEL DE RÉGION DES PAYS DE LA LOIRE EL DE DES

LOIRE
PAYS

L’hôtel de région des Pays de la Loire

Textes

Frédéric Fournis Julien Huon Léo Noyer-Duplaix

Photographies

Pierre-Bernard Fourny Avec la participation d’Yves Guillotin

Cartographie Théo Ben Makhad

SOMMAIRE

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Frédéric Fournis

LE CHOIX D’UN SITE, L’ANCIENNE ÎLE BEAULIEU

À NANTES

Julien Huon

LA CONSTRUCTION D’UN ÉDIFICE PIONNIER

Léo Noyer-Duplaix

UN « PALAIS » POSTMODERNISTE

Léo Noyer-Duplaix

LA FORMATION D’UN CAMPUS RÉGIONAL

Julien Huon SOURCES, LISTE DES ABREVIATIONS, SIGLES ET ACRONYMES GLOSSAIRE

CRÉDITS PHOTOGRAPHIQUES

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UN TÉMOIN DE LA DÉCENTRALISATION
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AVANT-PROPOS

C’est un geste architectural singulier, qui ne laisse pas indiffé rent mais demeure trop méconnu. L’hôtel de la Région est un symbole de la jeune histoire de la décentralisation dans notre pays – un processus qui demande encore à être poursuivi et approfondi. Il est aussi l’incarnation d’un territoire régional et d’une institution qui ont su s’inventer depuis tout juste quarante ans et les premières lois de décentralisation de 1982. Emblématique d’une époque – celle de sa construction, il y a trente-cinq ans –, il est aussi le témoin de la transformation de la pointe de l’Île de Nantes, et plus largement du dynamisme territorial des Pays de la Loire. Son allure de « palais postmoder niste », avec cette silhouette monumentale au bord de la Loire, était une façon d’inscrire l’institution régionale dans le paysage, sur les plans à la fois esthétique et politique. Son périmètre s’est étendu à mesure que les prérogatives régionales prenaient de l’ampleur, et il a gagné de nouveaux bâtiments dans un quartier en pleine métamorphose.

L’ambition que je porte est de faire découvrir et d’ouvrir davan tage ce qui est à l’origine un bâtiment administratif pour qu’il devienne véritablement la « maison des Ligériens ». C’est en ce sens que peu à peu s’est constitué un « campus régional », conçu comme un complexe global mêlant lieux de prise de décision, espaces de travail et de convivialité, de formation, de services. L’enjeu, pour demain, est de poursuivre l’intégration de l’hôtel de la Région dans son environnement et de faire de ce campus un outil d’innovation et d’expérimentation.

Christelle Morançais Présidente de la Région des Pays de la Loire

L’hôtel de région et le campus régional depuis l’est.

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UN TÉMOIN DE LA DÉCENTRA LISATION

« [Les Pays de la Loire sont] une région sans justification géographique ni historique, mais il y a une justification humaine. Il s’agit de gens qui s’entendent entre eux, qui sont du même terroir et ont les mêmes réactions vis-à-vis des événements, et ça c’est une force. »

Olivier Guichard, inauguration de l’hôtel de région, 10 janvier 1987

L’édifice emblématique qui se dresse depuis trente-cinq ans à la pointe de l’île de Nantes symbolise à lui seul un demi-siècle d’évolutions, et même de bouleversements administratifs, politiques et territoriaux du paysage institutionnel de la France. Sur un territoire où, peut-être plus qu’ailleurs, il était impératif de créer du lien, l’hôtel de la Région des Pays de la Loire représente probablement davantage qu’un bâtiment public ou un siège administratif, fût-il celui d’une jeune collectivité territoriale. Par son emplacement comme par sa forme, il cristallise un certain nombre d’enjeux de l’histoire récente, locale et nationale.

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OLIVIER GUICHARD

(1920-2004) : UN HOMME D’ÉTAT, UN PIONNIER DE LA

DÉCENTRALISATION

« Je crois que la tâche politique essentielle de notre génération est la décentralisation. »

Olivier Guichard, discours d’investiture à la présidence du Conseil régional des Pays de la Loire, 11 octobre 1974

Baron du gaullisme, Olivier Guichard a mené, au niveau local comme national, une carrière politique de premier plan qui couvre la seconde moitié du xxe siècle. Témoin de l’essor de l’administration de mission des débuts de la Ve République, homme d’État et élu local bien implanté, il a été l’un des acteurs majeurs de l’aménagement du territoire et de la régionalisation en France.

Chef de cabinet du général de Gaulle (1951-1958), il fut ensuite plusieurs fois ministre durant les années 1960 et 1970, maire de La Baule et député de Loire-Atlantique. Premier délégué de la Datar (1963-1968), il contribua à la mise en place des métropoles d’équilibre en 1964 et à celle des parcs naturels régionaux (PNR) en 1967. Il fut ministre du Plan et de l’Aménagement du territoire en 1968-1969 et à ce titre commença à préparer le référendum de 1969 sur la réforme du Sénat et la régionalisation. Il retrouva de 1972 à 1974 le ministère de l’Équipement et de l’Aménagement du

Buste d’Olivier Guichard. Bronze, par Jean Cardot, 2017.

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Georges Pompidou, Premier ministre, et Olivier Guichard, délégué à l’Aménagement du territoire et à l’Action régionale, en déplacement à Cherbourg, 1965.

territoire. Il fut également l’un des pères du Conservatoire du littoral, fondé en 1975 et qu’il présida de 1986 à 1989. À la tête de la Commission de développement des responsabilités locales, il remit le 23 octobre 1976 au président de la République un rapport qui fit date, intitulé Vivre ensemble. Président du Conseil régional des Pays de la Loire de 1974 à 1998, il disposait donc d’une solide expérience en matière d’aménagement du territoire et de régionalisation, ainsi que d’une précieuse connaissance des dossiers qui lui a permis d’anticiper, avant même le vote des lois Defferre de 1982 et 1983, l’acquisition de terrains pour la construction du siège de la nouvelle collectivité, projet dans lequel il s’est particulièrement investi. Promoteur de la coopération interrégionale, il a lancé le projet de l’Arc atlantique, une association des régions côtières européennes qu’il a présidée durant six ans, ainsi que des partenariats avec le Schleswig-Holstein (Allemagne), l’Émilie-Romagne (Italie) ou la région du lac Balaton (Hongrie). À la tête d’une région créée de toutes pièces, il se montra un édile visionnaire et entreprenant, dont l’empreinte se lit encore aujourd’hui sur le territoire. F.F.

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LE CHOIX D’UN

SITE, L’ANCIENNE ÎLE BEAULIEU À NANTES

« L’île de Nantes : voici une appellation qui suscite parfois des questions et qui ne fait pas nécessairement l’unanimité. On dit plus volontiers l’île Beaulieu ou l’île Sainte-Anne. Mais parle-t-on alors de la même île ? »

Alexandre Chemetoff, 2002

Cette monographie de l’hôtel de région s’inscrit dans le sillage de plusieurs enquêtes menées par l’Inventaire général des Pays de la Loire sur l’histoire urbaine de Nantes. La dernière a porté sur le patrimoine lié aux rives de la Loire, notamment par l’analyse de l’unification progressive d’un archipel fluvial jusqu’à former l’Île de Nantes, ce territoire insulaire au cœur de la métropole nantaise que nous connaissons aujourd’hui. Ce chapitre propose une restitution partielle de cette étude qui permet de contextualiser le choix du site et le parti architectural du siège régional.

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Nannetum vulgo Nantes. Gravure en taille douce par Cornelis Danckert, 1645.

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Beaulieu Île de Nantes. État des lieux en 1972 et état projeté pour 1980. Documents promotionnels de la SELA, 1972.

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Stand de la Ville de Nantes à la foire commerciale de 1972.

n’avaient pas attiré, notamment, d’investisseurs privés, etc. Par arrêté préfectoral du 18 novembre 1980, le quartier de l’île Beaulieu changea de statut juridique. La Zup fut remplacée par une Zone d’aménagement concerté appelée Zac Beaulieu, qui s’étendait sur quasiment la moitié orientale de l’île de Nantes, soit 120 hectares délimités à l’ouest par la place Victor-Mangin, et à l’est par l’espace naturel qui deviendra le Crapa.

Pour la Ville de Nantes, il s’agissait alors de proposer un urba nisme plus adapté en apportant une attention particulière à la définition du caractère urbain et à l’aménagement de la pointe de Beaulieu, ce secteur de l’ancienne Zup niché dans la courbe du boulevard de ceinture et encore libre de toute construction. Comme une critique de l’architecture et de l’urbanisme issus

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LA CONSTRUCTION D’UN ÉDIFICE PIONNIER

« La décentralisation permettra ainsi aux régions, aux départements, de pratiquer une forme de liberté, de diversité dans les choix, qu’il s’agisse des matériaux, des techniques utilisées, des partis esthétiques retenus. » Discours du Président François Mitterrand prononcé en Sorbonne le 23 avril 1985

L’Établissement public régional des Pays de la Loire engagea, avant même le vote des lois de décentralisation, la construction de son siège à Nantes, sur la pointe amont de l’île Beaulieu. Après un concours architectural mettant en concurrence de nombreux maîtres d’œuvre ligériens qui proposèrent une multitude de partis, la Région désigna l’agence Ménard-Durant-Thibault 3A. Cette dernière proposa un édifice postmoderniste où les références à l’architecture savante locale sont prépondérantes. Il s’agissait, pour les architectes, d’inscrire l’édifice dans un continuum historique, et de lui conférer ainsi une symbolique propre à incarner et représenter le pouvoir régional.

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Un site, un programme, une sémantique

Un projet anticipateur

Au début des années 1980, les espaces affectés à l’Établisse ment public régional des Pays de la Loire étaient dispersés dans Nantes, notamment au sein de la tour Bretagne. Devançant la loi Defferre du 2 mars 1982, l’institution ligérienne acta le 2 février la construction d’un immeuble régional. Le même jour, la maî trise d’ouvrage fut déléguée à la Société centrale immobilière de la Caisse des dépôts (SCIC), et un groupe de travail fut constitué afin d’évaluer les besoins et les coûts, ainsi que d’élaborer un planning prévisionnel. Si l’acte I de la décentralisation était encore en débat au Parlement, les grands contours des futures régions se dessinaient. Olivier Guichard, convaincu de l’avenir de l’échelon régional, anticipa la loi qui transforma les établissements publics en collectivités territoriales de plein exercice, mais aussi l’évolution des régions au long cours, prévoyant des compétences accrues et le rôle prépondérant qu’elles allaient jouer dans une République à l’organisation décentralisée. L’hôtel de région des Pays de la Loire fut ainsi l’un des tout premiers programmés et construits en France, après notamment celui de Bourgogne, inauguré en 1982, ainsi que celui de Midi-Pyrénées, livré en 1985. Mais dans les Pays de la Loire, territoire dont l’exis tence même était et reste sujette à controverses, l’édification de l’immeuble régional était une gageure d’un édifice administratif pionnier. Le nouveau siège se devait d’incarner une région mais aussi la totalité et la cohérence de son territoire. L’immeuble de la Région devait s’implanter à Nantes, sur la pointe orientale de l’île Beaulieu. Pourtant, la presse ne manqua pas de rapporter la rivalité entre les deux plus grandes villes de la région, Nantes et Angers. Le maire de cette dernière, Jean Monnier, proposa gratuitement à l’Établissement public régional un terrain pour l’édification de son siège. La situation géogra phique de la capitale de l’Anjou, au cœur de la région, constituait son principal argument. Mais Alain Chenard, maire de Nantes baissa le prix du terrain de l’île Beaulieu et consentit à accorder une modique subvention aux travaux. Olivier Guichard choisit finalement Nantes, plus grande ville de la région et pôle d’at tractivité principal de l’Ouest de la France.

Le quartier Malakoff et la pointe occidentale de l’île Beaulieu, début des années 1980.

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à l’instar de la société vendéenne Ouest Alu pour les menuiseries extérieures, les murs-rideaux et les plafonds de verre, ou de l’an gevine Duchemin SA pour la préfabrication du béton. L’ensemble de ces prestataires fut valorisé dans l’élégante plaquette de pré sentation de l’édifice éditée pour son inauguration. En décembre 1984, la première pierre de l’hôtel de région fut posée, marquant le début du chantier dont la maîtrise fut assurée par le bureau d’ordonnancement et de coordination BUROC. En 1985, les entreprises faisaient preuve d’une grande efficacité, le calendrier prévisionnel était respecté, avec une moyenne de 150 personnes sur le chantier. Le 17 février 1986, un accident endeuilla la construction. Un ouvrier de l’entreprise rezéenne Bouin & Cie – qui s’occupait de la miroiterie – fit une chute mor telle depuis les verrières du grand hall. Après 284 000 heures de travail, le procès-verbal de réception tous corps d’état fut dressé le 30 septembre 1986. À quelques semaines près – en raison d’intempéries –, l’hôtel de région fut livré dans les délais contractuels. L’édifice réceptionné, 180 personnes y emménagèrent, dont 50 des services de l’État et 120 de l’exécutif et de l’administration régionaux. Ces dernières quittèrent la tour Bretagne pour l’île Beaulieu le 15 décembre 1986. Un mois plus tard, le 10 janvier 1987, l’édifice fut officiellement inauguré par Jacques ChabanDelmas, président de l’Assemblée nationale, et Olivier Guichard, président du conseil régional des Pays de la Loire. Étaient pré sents Philippe de Villiers, secrétaire d’État à la Culture, et Jean Arthuis, secrétaire d’État du ministre des Affaires sociales et de l’Emploi, Jacques Monestier, commissaire de la République de la région, ainsi que quatorze présidents des vingt-deux régions françaises – Jacques Chaban-Delmas compris, qui présidait alors la Région Aquitaine. L’hôtel de région occupe une surface hors œuvre nette de 21 628 mètres carrés, répartie en 8 200 mètres carrés pour la partie administration, 13 400 mètres carrés pour la partie parlementaire, 1 046 mètres carrés de locaux techniques et 3 723 mètres carrés de parkings couverts. Le coût total de l’opé ration hors taxes s’est chiffré à 125 millions de francs, ce qui correspond environ à 33 600 000 euros (valeur 2020).

Couverture du dôme en zinc, 1985.

Discours d’Olivier Guichard sur le palier de l’escalier du grand hall lors de l’inauguration de l’hôtel de région, 10 janvier 1987 ; à sa droite, Jacques Chaban-Delmas, président de l’Assemblée nationale et président de la Région Aquitaine, Michel Giraud, président de la Région Îlede-France, et Micheline Chaban-Delmas.

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UN « PALAIS » POST MODERNISTE

« Nous l’avons voulu à la pointe de cette île Beaulieu où Nantes se développe, enserré entre deux bras de cette Loire qui porte vers l’Atlantique beaucoup de nos ambitions, regardant vers l’est où s’étendent les départements qui nous composent, et dominé par cette coupole qui abritera désormais notre assemblée régionale et lui rappellera la dimension de ses responsabilités. »

10 janvier 1987

L’hôtel de région des Pays de la Loire prend place sur la proue orientale de l’île de Nantes, en bord de Loire. L’édifice se compose de deux volumes attenants : le bâtiment administratif, puis le bâtiment de l’assemblée, des élus et de l’exécutif, qui s’ouvre sur le fleuve et les jardins. La monumentalité n’est pas ici conférée par l’échelle – l’édifice est bas en raison des contraintes d’urbanisme – mais par tout un ensemble de signes : parvis protocolaire, portique-péristyle, dôme, etc.

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LE POSTE D’APPONTAGE

Durant l’été 1989, le ministère des Finances s’installa à Bercy, en bord de Seine, au sein de bâtiments imaginés par Paul Chemetov et Borja Huidobro. Une des piles du volume principal s’ancre dans le lit de fleuve, si bien qu’un petit port privé fut aménagé avec deux bateaux. Ils permettent depuis aux ministres de gagner l’Assemblée nationale en vedette. Le 17 février 1987, dans un courrier au maire de Nantes, Olivier Guichard souligna que la construction d’un poste d’accostage à l’hôtel de région devait permettre « d’accueillir les personnalités lors des grandes cérémonies ». Le président exposa par la suite l’apport d’un tel ouvrage au tourisme fluvial et que sa construction avait déjà été évoquée durant le chantier de l’édifice. La Région décida ainsi de construire un appontement – accessible à toute heure de la marée –dans la perspective de l’entrée d’honneur et de son parvis. La maîtrise d’œuvre fut assurée par le port autonome de Nantes - Saint-Nazaire et deux appels d’offres furent ouverts, l’un pour l’ouvrage terrestre, l’autre pour l’ouvrage nautique. L’entreprise Devin-Lemarchand fut en charge des travaux, qui furent réceptionnés le 23 octobre 1989. L.N.D.

Façade septentrionale, parvis et poste d’appontage.

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Nettoyage du dôme en 2019.

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L’édifice se compose, sur un soubassement devant lui conférer « une certaine noblesse », de deux volumes contigus. Le premier, qui accueille l’administration, est un parallélépipède organisé autour d’un patio et dont la façade occidentale est alignée sur la rue de Loire. Le second, à la forme plus complexe, est implanté entre le parvis, les jardins et la rue de la Fleur-de-Sel. Ces deux bâtiments sont attenants d’ouest en est mais, selon les archi tectes, l’axe de composition majeur est nord-sud, « à partir du grand axe officiel sur lequel se trouvent placés le péristyle d’en trée des élus, le grand hall de l’immeuble, la grande salle de réunion et l’hôtel particulier du président. »

Les jardins de l’hôtel de région depuis le nord, dans la perspective du couvent de carmes Notre-Damede-Lumières.

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Cet axe majeur – qui ne concerne que le volume abritant l’as semblée et l’exécutif – se traduit dans la composition des façades et des extérieurs. Ainsi, la façade septentrionale, lieu de l’en trée protocolaire, manifeste en volume cet axe : « La façade sur Loire est donc très importante qui doit affirmer la fonction publique du bâtiment et le faire reconnaître comme l’immeuble du nouvel Établissement public régional ; plus que la façade, c’est la découpe volumétrique qui doit s’installer comme un signe facilement mémorisable dans le paysage, la façade nord appa raissant à contre-jour un temps assez long de la journée. » L’axe débute, sur les berges de la Loire, par un escalier aux montées

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L’ART DANS L’ARCHITECTURE. LES COMMANDES DU « 1 % ARTISTIQUE »

Projet architectural d’envergure, le chantier de l’hôtel de région laissa aussi une place de choix à deux projets artistiques qui y prirent tout leur sens. Si l’acte I de la décentralisation n’imposa pas aux Régions de consacrer 1 % du budget de la construction de leur siège à la commande d’œuvres d’art, la Région des Pays de la Loire décida dès septembre 1984, par analogie avec la procédure nationale, de commander deux œuvres destinées spécifiquement au nouvel édifice.

François Morellet, Portail 0°-90°, Portail 8°-98° .

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François Morellet (1926-2016), artiste choletais, fut l’une des figures majeures de l’abstraction géométrique de l’aprèsguerre en France. Dans les années 1970, il investit aussi largement le domaine de l’espace public. Avec Portail 0°-90°, Portail 8°-98°, commandé en 1985, il ouvre une porte monumentale sur la rampe du parvis, tout en jouant avec la trame géométrique de l’édifice. Deux portails en acier laqué s’entremêlent, « une grille-arc de triomphe, bien droite, bleu éclatant […] mais accompagnée, plutôt traversée par sa sœur jumelle, avec son penchant ironiquement tragique et sa couleur d’ombre et de vase ». La seconde évoque la Loire et les façades désordonnées des quais de Nantes qui la bordent.

Éric Fonteneau (1954- ), jeune plasticien choletais, décline principalement dans ses travaux le thème géographique. Ses collections de photographies, cartes ou documents topographiques et paysagers forment un répertoire d’images dans lequel il puise pour réaliser ses œuvres graphiques de grand format. Dans les cinq niches du mur de l’escalier du hall, une œuvre gravée sur verre de 1986, Cartographie, compose, sur un quadrillage régulier rappelant la trame structurante de l’édifice, une carte de la région légèrement pivotée vers la droite pour donner à la Loire un axe vertical central, comme l’épine dorsale du territoire. « Une esquisse avec son système quadrillé, sa géométrie secrète, sa géographie même… juste avant l’image. » F.F.

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Éric Fonteneau, Cartographie (détail).

Antichambre du bureau de la présidence, lambrissé d’érable, conçu par Louis Soullard. Sur les parois, trois tableaux d’Emmanuel Pereire (1930-1992), Vanitas, acrylique sur toile, 1990 (dépôt du Fonds régional d’art contemporain- Frac des Pays de la Loire, 2019).

Porte de la salle à manger flanquée de deux pilastres cannelés, près d’un pilier revêtu de stuc.

Doubles pages suivantes Salle d’assemblée.

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Versailles quand même !” » Le président de la Région répondit dans La Nouvelle République du Centre-Ouest aux critiques portant sur le caractère jugé grandiloquent de l’édifice. Il soutenait qu’à la différence « d’immeubles de bureaux plus classiques », « les collectivités territoriales ont une responsabilité particulière envers les citoyens et l’histoire lorsqu’elles construisent ». Ainsi avait-il « tenté le pari de nous distinguer par la qualité architec turale de notre construction tout en restant dans des prix tout à fait raisonnables ».

Le week-end suivant celui de l’inauguration, l’hôtel de région fut ouvert au public. Le déroulement de la journée, qui attira 6 500 visiteurs, fut relaté dans Ouest-France . Les quali ficatifs du public étaient élo gieux : « beau », « splendide », « prestigieux », « superbe », « remarquable », « monumen tal », etc. Quelques voix disso nantes émergèrent toutefois : « C’est froid ! » et même « C’est une architecture de vieux ! » –impression donnée sans doute par l’architecture postmoder niste. Le journaliste souligna ainsi que « manifestement et même si, inévitablement, on a soulevé le problème des coûts, le “bon peuple” semble donc avoir adopté la construction à laquelle il confère le nom de “Palais” qui ne fait pas très plai sir, on le sait, aux promoteurs et aux élus ». Dehors, alors que le public visitait le « palais », des militants du CUAB (Comité pour l’unité administrative de la Bretagne) étaient réu nis et distribuaient un tract intitulé « Palais régional : une provocation ».

Discours de Jacques Chaban-Delmas, président de l’Assemblée nationale, devant la foule massée dans le grand hall lors de l’inauguration de l’hôtel de région, 10 janvier 1987.

LA FORMATION D’UN CAMPUS RÉGIONAL

« Pour les prochaines années, le campus régional restera entièrement localisé sur l’Île de Nantes, afin d’offrir un espace de travail adapté et attractif pour les agents, mais aussi de faciliter les échanges et les synergies entre les équipes. »

Au tournant des années 1980 et 1990, la nécessité de disposer de locaux supplémentaires pour les besoins de la collectivité était déjà d’actualité. Pourtant, l’idée initiale des architectes d’un doublement de l’immeuble régional autour d’un second patio ne fut pas retenue. Dix ans plus tard, l’heure n’était sans doute plus à la tentation monumentale qui avait guidé le projet de l’immeuble régional. La collecti vité s’engagea alors dans le choix de construire de nouveaux immeubles indépendants et organisés autour de l’hôtel de région.

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Penser l’extension de l’hôtel de région

Au début des années 1990, l’imposant bâtiment de l’hôtel de région demeurait isolé à la pointe de l’île Beaulieu et semblait relativement détaché du tissu urbain, encore en projet, de la Zac. À cette époque, seul l’îlot 2, situé à l’est de la rue de la Loire et faisant face à l’entrée du bâtiment régional, était occupé par un immeuble appelé Beaulieu Bureaux. C’est d’ailleurs dans cet immeuble que la collectivité loua, à partir de 1990, des locaux aux 3e et 4e étages afin d’y héberger des organismes partenaires, puis des services internes à la Région.

La première construction en maîtrise d’ouvrage régionale dans le cadre du projet d’extension des bureaux de l’admi nistration régionale fut celle du bâtiment Océan – appelé à l’époque « l’extension». Livré en janvier 1996, ce nouveau bâtiment régional fut conçu pour y installer la direction de

Le campus régional autour de l’hôtel de région (en haut, à droite) : bâtiments Bizet et Beaulieu Bureaux (en haut, au centre), Océan (en bas, au centre), Littoral et Horizons (à droite), répartis autour de la place GastonDefferre et de la rue de la Loire.

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l’Éducation, chargée des constructions scolaires, compétence nouvellement transférée aux pouvoirs exécutifs régionaux. Ce projet fut confié à nouveau à l’agence Durand-MénardThibault, lauréate quelques années auparavant du projet d’hôtel de région. Le bâtiment fut construit sur la parcelle étroite de l’îlot 8, délimitée au sud par une large voie plantée d’arbres ; il répondait à la commande régionale de disposer de bureaux et de parkings. Sur son flanc sud, le bâtiment développe de grandes parois vitrées sur quatre niveaux. Au nord, les volumes accueillant les différents niveaux de par king sont habillés de panneaux de béton dont la couleur rose évoque sans détour les façades voisines de l’hôtel de région. Comme pour le projet de ce dernier, les architectes conçurent le bâtiment de manière à permettre une extension le long du mail, finalement jamais réalisée.

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