LE CAR SHARING AU DÉFI DE LA PÉRIPHÉRIE Quand la ville souffre de l’hyper-mobilité automobile
Viroulaud Lélia, Le car sharing au défi de la périphérie, quand la ville souffre de l’hyper-mobilité automobile, Janvier 2017.
Viroulaud Lélia,, Article de master, Parcours IAT, Julie Ambal et Xavier Guillot, Janvier 2017, EnsapBX
Mots clé automobile | mobilité | périphérie | urbains périphériques | share | autopartage | covoiturage | uberisation
Résumé L’automobile est en crise. Responsable de la congestion des centres-villes, de la pollution de notre environnement et victime de son image en lien avec la production capitaliste, on lui demande de changer de direction. Elle est obligée de se renouveler à la fois dans son architecture et son usage. Elle enclenche la première et décide de suivre la voie de la société du share. Basée sur une économie collaborative, elle tente de devenir un espace de partage à l’encontre du caractère individuel qui lui colle à la carrosserie. Mais, ce virage est sinueux, particulièrement en périphérie où le covoiturage comme mobilité quotidienne parait être en panne.
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Viroulaud Lélia, Le car sharing au défi de la périphérie, quand la ville souffre de l’hyper-mobilité automobile, Janvier 2017.
Le Corbusier énonça que « La ville qui dispose de la vitesse, dispose du succès »1 laissant entrevoir l’image d’une ville dessinée par la voiture. Aujourd’hui, la morphologie urbaine héritée du XXème siècle semble assujettie à l’automobilité, et c’est en cela que les voix s’élèvent. On voit émerger des idées autour de la Post Car City basée sur l’anticipation du peak oil obligeant à repenser drastiquement l’usage de l’automobile, ou bien plus radical encore comme le mouvement des Carfree Cities2 s’affranchissant de l’automobile par son rejet total. Elle est donc vue comme la source des maux urbains actuels (défaillances écologiques et sécuritaires, nuisances sonores et privatisation de l’espace public). Toutefois, toucher à l’automobile reste encore impopulaire car elle est ancrée dans l’imaginaire de chacun: une liberté, une preuve de réussite sociale et un moyen de transport individualiste, essence même de l’homme. Elle est devenu le prolongement de leur foyer, passant de plus en plus de temps à l’intérieur. Cette idée a été conceptualisée par Renault dans les années 80 avec le lancement de l’Espace nommée la « voiture à vivre »3. L’automobile a donc encore de beaux jours devant elle de part l’attachement individuel qu’on lui porte, mais aussi par l’accessibilité territoriale encore inégalée qu’elle propose. La ville actuelle croit au delà de ses frontières actant la mise en marche du processus de métropolisation. Il implique l’allongement des distances entre les espaces de résidence, de travail et de loisir, l’explosion du nombre de kilomètres parcourus par les individus et la démultiplication de leur relation et appartenance. Le bon maillage de transport en commun dans les centres urbains permet en partie de répondre à l’accélération de la mobilité. Mais que peut-on en dire dans les territoires du péri? Les urbains périphériques peuvent-ils s’émanciper de la voiture? Cette question se pose particulièrement à Bordeaux depuis l’annonce du désir de la métropole du million d’habitants. L’explosion démographique prévue, malgré les politiques de densification autour des réseaux de transport en commun menée par le projet des 50 000 logements, sera obligatoirement suivie d’une hausse du nombre de déplacements, où la voiture aura encore un rôle à jouer.
La faute à l’auto? Tout porte à croire que l’étalement urbain actuel n’est qu’une résultante de l’explosion de la motorisation des ménages. Comme énoncé plus haut, la ville dans laquelle on évolue est celle de la dispersion, connue sous le terme de ville diffuse4 . La ville diffuse est l’image du pavillon individuelle et de la « péri-urbanisation » qui grignotent et rendent floues les limites entre ville et campagne. Il est vrai qu’une corrélation existe entre l’étalement urbain et les déplacements automobile puisque dès lors qu’un déplacement dépasse le kilomètre, une part importante des individus préfèrent prendre la voiture. L’organisation territoriale diffuse et complexe de la métropole bordelaise n’échappe pas à cette règle puisque sa surface urbanisée a été multipliée par 3 entre 1978 et 2010 alors que la population a seulement été multipliée par 1,3 sur cette même période
Pour Le Corbusier, la vitesse était la source de la modernité par excellence. LE CORBUSIER, Urbanisme, Paris: Flammarion, 1994, p.182 1
Terme employé par Joel H. Crawford dans son livre « Carfree Cities » pour parler da la ville sans voiture, modèle nécessaire du XXIème siècle, loin d’être une utopie. Pour en finir avec la société de l’automobile 2
La « voiture à vivre » fut conçue dans l’optique de répondre entièrement aux besoins de l’individu. L’Espace est un volume unique, communément appelée «monospace». Renault met en place un habitacle librement aménageable à l’aide d’un plancher plat et indépendant de la plateforme technique. C’est l’apologie de la modularité interne, offrant à l’usager la possibilité de créer de vrais espaces de vie en retournant, allongeant ou baissant les sièges. 3
La ville diffuse est un concept publiée pour la première fois dans La Città Diffusa de Francesco Indovina (1990). Il doit sa renommé à Bernardo Secchi qui l’employa pour décrire le péri-urbain dans les années 2000. CHARMES, Eric, « La ville diffuse », Citego, octobre 2015. URL: http://www.citego.org/bdf_fiche-document-23_fr.html 4
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(A’URBA, grenelles des mobilités, 2013). La poursuite de l’extension urbaine entraine donc un accroissement des distances et temps de déplacements des individus. Pour preuve, les individus des communes hors de l’agglomération bordelaise font 10,6 kilomètres en moyenne pour le déplacements quotidiens par jour contre 6 kilomètres pour ceux de l’agglomération (A’URBA, grenelles des mobilités, 2013). Cependant, même si les théoriciens estiment que l’étalement urbain ne résulte d’aucune sorte de planification, les différentes politiques d’équipements du territoire en matière d’infrastructure ont favorisé l’évolution de la tache urbaine des métropoles. La rocade bordelaise, équipement de contournement du XXième siècle permettant une circulation efficace, est aujourd’hui l’espace le plus engorgé de la métropole avec un trafic estimé à 105 000 véhicules par jour en moyenne5 (A’URBA, grenelles des mobilités, 2013). Les divers acteurs de la mobilité au sein de la métropole bordelaise ont opté pour l’élargissement de la rocade en passant d’une 2x2 voies à une 2x3 voies sur un large tronçon de celle-ci. Pourtant, on sait, selon la relation entre l’offre et la demande, que si l’offre en terme de voies de circulation augmente, la demande quant à elle ne diminuera pas, ne stagnera pas non plus mais risque de croître à son tour, anéantissant tout espoir de décongestion. L’automobile est donc consommatrice d’espace. Elle entretient un lien particulier avec la ville dans sa composition urbaine. La ville est l’assemblage de ces infrastructures complexes de voirie automobile, des places de stationnement, des services et des codes liés à son usage. La ville régit par l’automobile n’est pas seulement une image. L’exemple de la rocade bordelaise précédemment énoncé, de part son élargissement, en est la preuve. Aller plus vite pour être plus compétitif tout en grignotant l’espace public, en devenant nuisible pour les riverains, privatisant l’espace pourtant qualifié comme bien commun universel. Ainsi, la voiture en plus d’être énergivore, dévore l’espace pour certains individus, ce qui ne fait que noircir son portrait. Elle devient la figure de proue de nos sociétés capitalistes qui ne se soucient guère des impacts environnementaux
Automobilité choisie ou subie? A l’heure où l’automobile fête ses 128 ans, les métropoles cherchent à reconquérir leurs espaces centraux: politique autour des modes doux, des villes sans voitures, des zones limitées à 30km/h ou des zones de rencontre. Cette requalification des centres urbains en marge avec l’autourbanité se base sur un changement de l’image de l’automobile chez une partie des individus. L’hypothèse que l’on avance est la suivante: il existe une relation entre l’image que les individus ont de la voiture et leur proximité géographique au centre urbain. En effet, les bordelais jouissent d’une bonne déserte en matière de transport collectif, leur permettant d’accéder à un panel différencié important: bus, tramway, Batcub, Vcub ou bien même Bluecub. Ils ont, ce que l’on appelle: le choix. Et c’est ce choix qui entraine une mise à distance de l’automobile dans leur opinion puisque 41% des habitants de l’hypercentre ont une opinion négative de la voiture particulière contre seulement environ 25% dans les communes de la métropole6 (A’URBA, 2014, p. 13). Ainsi, le nombre de personnes convaincues par l’usage de l’automobile croit avec l’éloignement de l’hypercentre. Mais, les individus pro-automobiles des périphéries choisissent-ils réellement l’automobile car elle est pratique ou plutôt parce qu’elle leur est indispensable?
Moyenne faite à partir du nombre de véhicules circulant par jour sur la rocade rive droite et la rocade de Bordeaux nord. 5
Etude menée par l’A’Urba visant à comprendre les pratiques des usagers des transports dans l’aire urbaine en y intégrant des facteurs humains, économiques, ou bien de localisation. 6
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Le décalage des visions entre urbains périphériques et centraux relève de la notion de choix énoncée précédemment. Si aujourd’hui, le mobilité est un « droit générique »7 (ASCHER, 2005), l’accès à la mobilité et la diversification de celle-ci est encore trop inégale. De plus, la société hyper texte dans laquelle on vit, en est la cause. Actuellement, les liens sociaux entretenus entre les individus sont plus diversifiés favorisant la multi-appartenance; alors que ceux de la société industrielle étaient restreint car on appartenait seulement à un seul groupe social(un voisin était souvent un collègue, un ami ou bien quelqu’un de sa famille). La multi-appartenance oblige l’individu à avoir une maitrise totale de son temps pour pouvoir optimiser la fréquentation des divers lieux de travail, de vie familiale et de loisirs. Cette pratique multi-territoriale de l’espace induit un nombre de déplacements importants rendu possible par l’usage de la voiture. Mais cela ne relève pas d’un choix de l’individu mais plutôt d’une contrainte. C’est le cas pour les urbains périphériques de la métropole bordelaise, majoritairement des automobilistes exclusifs8 (A’URBA, 2014, p.26) pouvant parcourir 33 à 36 kilomètres par jour en moyenne, ils résident à l’extérieur de Bordeaux, mais y travaillent et ont des activités dans les communes alentours. Cela se traduit par la part des déplacements journaliers en voiture qui est de 63% contre seulement 9% en transport en commun sur l’aire de l’agglomération bordelaise9 (LA CUB, 2009). Ainsi, réduire la place de la voiture dans les territoires discontinus pourraient avoir pour effet de réduire l’accès aux services, ce qui ne ferait qu’accroitre les disparités sociales.
Le car-sharing, nouvelle réponse utopique? Il est impossible d’offrir l’égalité de l’accessibilité à la ville centre face à la pluralité des polarités actuelles et leur éloignement. L’enjeu est la mobilité des personnes qui habitent les centralités éloignées, ils ne doivent pas devenir les nantis soit d’un surcout du carburant, soit d’un refus d’accès au ville centre face au mouvement du cleantech10 (PARPINELLI, 2008) en cours. Il faut prendre en compte la difficulté structurelle et économique de la mise en place d’un réseau de transport en commun fortement maillé dans les territoires de la ville périphérique. Les franges de la première couronne de Bordeaux entre les boulevards et la rocade peuvent s’appuyer sur un bon réseau en élargissant le coeur d’agglomération souvent limité au centre ville. Toutefois, les territoires périphériques extra-rocade, peu dense, ne favorisent pas la mise en place d’une offre maillée et attractive en transport en commun pouvant concurrencé la voiture. Cette réalité du territoire n’est pas une catastrophe en soi si on y propose une pratique raisonnée de l’automobile limitant les phénomènes de congestion à l’approche de la rocade. On est amené à se demander dans quelle mesure l’auto-mobilité doit se réinventer dans les espaces périphériques pour répondre aux exigences de la métropole durable de demain? Pour se faire elle se doit de travailler sur son usage. La voiture partagée semble être la réponse la plus viable à l’heure actuelle puisqu’un véhicule partagé permet de remplacer 10 véhicules individuels en moyenne (MASBOUNGI, 2015, p.47). En effet, malgré la hausse de l’autonomie des véhicules électriques, leur performance sur le point de vues des normes écologiques, ou bien leur démocratisation ces dix dernières années, ils restent encore inaccessibles en particulier pour les périurbains. Nous avons pu voir plus haut que les personnes résidants dans les territoires éloignés de la métropole s’y sont installés face à la pression financière des centres urbains. Dès lors, leur revenus par ménage ne leur permet pas l’achat d’un Terme emprunté à François Ascher, le droit à la mobilité est devenu un droit générique dans nos sociétés hypermobiles puisque ce droit conditionne l’accès à l’emploi, à la culture, à la consommation, à la santé, à l’éducation et au logement. 7
Les automobilistes exclusifs n’utilisent que l’automobile dans la vie quotidienne ; leurs programmes d’activités se structurent autour de l’accessibilité offerte par ce moyen de transport. 8
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Part des déplacements journaliers selon le mode dans l’aire de l’agglomération bordelaise.
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Le clean tech est un terme utilisé pour parler des éco-activités, innovations et technologies. Viroulaud Lélia, Le car sharing au défi de la périphérie, quand la ville souffre de l’hyper-mobilité automobile, Janvier 2017.
nouveau véhicule, l’installation d’un dispositif de recharge à domicile, la location des batteries malgré les aides gouvernementales existantes. La voiture partagée signifie le changement de la vision de l’automobile de la voiture familiale à la voiture service. Face à la monté de la société du share portée par l’accélération de la consommation et l’explosion du système locatif, deux nouveaux usages automobiles émergent et semblent correspondre à un futur pour les grands territoires. Tout d’abord, le covoiturage est une typologie de transport automobile « qui consiste à partager tout ou partie de son trajet en voiture avec d’autres personnes » (MASBOUNGI, 2015, p.46). Il repose sur des pratiques spontanées de particuliers ou bien d’entreprise comme Blablacar, tentant de palier les défaillances du maillage des transports en commun. Développer le covoiturage domicile travail, étant l’un des flux majeurs périphéries/centre de la métropole bordelaise, peut être une alternative à l’autosolisme dominant. La voiture est indispensable pour les habitants de ce territoire : 80 % d’entre eux l’utilisent régulièrement alors qu’ils ne sont que 17 % d’usagers réguliers des TC. Ensuite, l’autopartage « offrant un service régulier et diffus sur un territoire, à destination d’utilisateurs qui n’ont souvent plus de véhicule à temps plein » (MASBOUNGI, 2015, p.46-47). Dans l’agglomération bordelaise, l’autopartage est présent à la fois sur des modèles électriques (BlueCub) et aussi sur modèles thermiques (Citiz). Ce principe de car-sharing met en lumière la possibilité d’un transfert modal car il favorise la multimodalité, c’est-à-dire qu’il permettrait de réduire la part des ménages motorisés au profit des transports collectifs puisque les stations d’auto-partage comme les BlueCub se trouvent aux abords des pôles d’échanges. Néanmoins, ce report modal reste et restera limité en périphérie de par la quasi inexistence des autres mobilités. Le covoiturage parait donc être la solution pour les déplacements du territoire métropolitain puisqu’au-delà de 20 km de trajet quotidien, il serait concurrentiel avec l’ensemble des mode de mobilités (MASBOUNGI, 2015, p. 46). Le covoiturage semble être aujourd’hui la solution universelle pour sauver la mobilité automobile, mais il se heurte à des limites d’ordre sociale. La Métropole Bordelaise s’est emparée du sujet en le hissant au premier rang des plans coordonnés des autorités publiques (A’URBA, Grenelles des mobilités, 2013, p.167), afin de réduire le nombre de véhicule circulant sur ses routes. Certes, faire du covoiturage un mode de déplacement à part entière est intéressant, mais quand est-il vraiment à l’usage? Bien que certains sites de covoiturage continuent leur chevaleresque épopée, à l’instar de Blablacar, ils ne fonctionnent en majorité que pour des déplacements de grande à grande ville, sur des plages horaires de loisir (week-end) ou bien des déplacements exceptionnels. L’usage quotidien du covoiturage est bien loin d’être majoritaire. Prenons l’exemple de deux étudiants de l’Ensap Bordeaux11 , ils habitent sur la rive droite bordelaise à plus de 25 kilomètres de l’école. Ils possèdent tous deux un véhicule, se rendent à l’école à la même heure car ils font partis d’un groupe commun. Le choix du covoiturage serait donc adapté à ce cas de figure, économie à la clé, mais non. Ils conduisent chaque jour leur voiture, non pas par manque de conscience de la crise environnementale en cours, mais par ce qui les constitue comme individu social. En effet, comme nous avions pu l’expliquer dans le chapitre précédent, aujourd’hui les individus sont multi-appartenant, l’un aime aller boire un verre en centre-ville après les cours, l’autre aller faire du sport près d’Artigues mais chacun avec des amis différents. La variété de leur choix, entraine une pratique territoriale différente, des trajectoires de déplacements qui ne convergent pas aux mêmes horaires, ne permettant pas l’adoption du covoiturage au quotidien dans cette vie hyper-nomade.
À l’heure où plus de 18 millions de français utilisent leur voiture chaque jour pour se rendre au travail, engendrant pour un ménage un coût moyen estimé à 2500 euros par an, annoncer la mort de l’automobile parait être présomptueux. Si certaines villes ont choisi de mettre à l’écart
Les deux étudiants choisis sont Audrey S. et Simon G., étudiants à l’Ecole Nationale Supérieure d’Architecture et du Paysage de Bordeaux en Master 1. Cet exemple est un exemple personnel, permettent d’étayer mes hypothèses autour de la mise en échec du covoiturage en périphérie. 11
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l’automobile comme Londres ou bien Milan12 , la réinvention de l’automobile dans son architecture et son usage parait être son unique chance de survie. L’interdiction de l’automobile en centre ville peut avoir des effets stigmatisants puisque cela pourrait impacter directement les habitants des couronnes périphériques. Les nouvelles mobilités ne doivent pas seulement profiter à une élite et exclure les autres couches de la population du centre urbain. Le droit à la mobilité est un combat pour l’égalité sociale, qui pour certain sans l’automobile, relève du stigmate. Il semble donc d’un point de vu de l’équité sociale de travailler sur l’identité de la voiture, passant d’un espace personnel à celui de partage. Mais les nouveaux usages de la voiture buttent face à l’économie affaiblie et l’identité de nos sociétés. Par exemple l’auto-partage électrique dresse déjà un bilan négatif seulement 6 ans après son lancement. Malgré la révolution apportée par le groupe Bolloré en 201113, le principe ne prend pas car trop coûteux (de 6 à 7 euros la demi-heure d’utilisation). Le covoiturage quant à lui reste impuissant face à certaines situations, puisqu’aujourd’hui, guider ce que certains appellent « l’après-voiture » apparait bien plus comme l’enjeu des des périphéries que celui des centres urbains. En continuant à construire de plus en plus loin, en investissant dans des politiques d’infrastructures routières performantes, on continue à accentuer les maux périphériques. Bien que des sites comme Sharette ou Carjob, alternatifs à Blablacar, proposent des trajets répondant aux besoins quotidiens, le principe a du mal à prendre. Il est légitime de se demander si l’on peut réellement étendre ce système à la périphérie? L’uberisation14 de la société pousse à consommer l’automobile comme un service. Ce système économique entraine une remise en cause de monopoles détenus par les opérateurs de mobilité. À l’image de la SNCF, basé sur un système de rendement où le chiffre d’affaire sur un déplacement est environ 15 fois plus élevé que celui d’entreprise comme Blablacar, qui se voit perdre des parts de marché. La SNCF investit dors et déjà dans des plateformes comme Ouicar15 afin de répondre à la demande. Cependant, il semble important de souligner le fait qu’actuellement, l’Etat se trouve entre deux eaux, perdu entre son rôle d’aménageur du territoire et ses besoins économiques. En répondant aux besoins des utilisateurs de l’auto-partage par la création d’aires de covoiturage ou de tierslieux facilitant l’accès à la location de véhicules, l’Etat se met en difficulté financière. Il participe à l’économie uberisée, portant dangereusement atteinte à ses recettes fiscales. Cela pose donc la question de la pérennité de ce système face au financement de l’Etat providence: quelles perspectives d’avenir existe-t-il pour cette économie du share? Le débat reste ouvert et mérite d’être creusé, d’autant plus en regard de l’uberisation de la société qui s’accélère.
Londres a mis en place un relation tarifée entre elle et l’automobile en 2003 sur une surface de 40 km2. Pour circuler dans l’enceinte de ce périmètre, le conducteur doit s’acquitter d’un droit d’environ 12€ chaque jour. Milan quant à elle a opté pour des mesures plus drastiques à l’encontre de l’automobile avec en 2008 la création d’un Ecopass, autorisant l’accès aux véhicules polluants de 7h30 à 19h30 la semaine contre une somme allant de 2 à 10€, sanctionné par une amende pouvant atteindre 275€. Dissuasif non? 12
Date du lancement du service parisien de location de voitures électriques de courte durée, ensuite étendue à plusieurs villes comme Bordeaux avec le système de location BlueCub. 13
L’uberisation est un terme employé la première fois par Maurice Lévy (PDG de Publicis) en 2014 pour qualifier la transformation de notre économie au regard des nouvelles technologies numériques et de la mise en réseau de notre société et de notre consommation. 14
La SCNF détient depuis 2015 75% du capital de la start-up pionnière en terme de location de voiture entre particuliers, fondée en 2011 sous le nom de Zilok. 15
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Théories et utopies auto-urbaine
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