LA CREUSE : VERS UN NOUVEAU RÉCIT TERRITORIAL LOCAL Quentin BARTHE De nos jours, il apparaît d’une importance capitale de retrouver une cohésion territoriale, entre inter-territorialités et alliances, afin de lutter contre la fragmentation des territoires. Cela viserait la réduction des inégalités, renforcerait les synergies entre les territoires et aurait comme valeur fondamentale la solidarité entre les individus. Tout cela viendrait se regrouper dans ce que l’on appellerait « Le Moment Territorial » (Godier, Oblet, Tapie, 2018). Les deux grandes dynamiques qui structurent nos territoires, métropolisation et périurbanisation, ne sont-elles pas devenues à terme celles qui les divisent ? En ce qui concerne la métropolisation, il y a un contraste entre les modèles de vie ( SmartCities, villes créatives, … ) et la mythologie du CAME1 qui ne produit pas les effets attendus et provoque des effets indésirables comme le renforcement de la concurrence entre les territoires (Bouba Olga, 2019). Cette mythologie irrigue l’ensemble des territoires comme certains, hors métropole, l’ont également intégré et s’interrogent sur la façon de bénéficier du ruissellement de celles-ci … La périurbanisation, elle, est le fruit d’une utopie, celle de la ville à la campagne. Elle provoque un émiettement spatial, paysager et social (Charmes, 2011) avec notamment une dissociation croissante entre lieu de travail et lieu de résidence. De plus, l’impersonnalité des métropoles tend à rendre les périphéries et la campagne beaucoup plus attractives (Offner, 2018). Il apparait aussi une image une France «coupée en deux» entre villes riches et dynamiques d’une part, et campagnes pauvres et délaissées de l’autre (Charmes, 2019). Dans son ouvrage «La revanche des villages», l’auteur interroge les liens entre ville et campagne. Il développe des propositions visant à résoudre les problèmes dus à l’extension du périurbain, l’un d’entre-eux étant la distribution territoriale des pouvoirs. L’auteur propose à ce titre de redonner toute sa place à l’échelon des départements et d’organiser la répartition des ressources au niveau local. Cette proposition fait suite au constat que cette distribution est à la fois trop importante en termes d’urbanisation et trop peu importante sur le plan administratif et financier. Tous ces constats nous invitent à nous interroger sur plusieurs notions, remettre en cause certains concepts qui sont à l’origine même de la constitution des territoires comme la notion de « modèle » et celle de « récit ».
Des récits pour remplacer les modèles en place ? On peut dégager de l’analyse des mutations des territoires le constat suivant : un modèle transforme le précédent sans pour autant le faire disparaître. On retrouve avec abondance cette notion de « modèle » dans les réflexions à l’échelle territoriale, l’un d’entre eux étant notamment au cœur des débats actuels : le modèle métropolitain. Celui-ci tend à nous montrer que la répétition d’un modèle conduit à terme à le rendre impersonnel et très souvent accentue la concurrence entre les territoires, nuisant ainsi à leur cohésion. On peut ainsi remettre en cause la légitimité de l’emploi de ces modèles dans nos stratégies territoriales. Chaque territoire est différent, les réponses doivent donc l’être aussi. En opposition au récit métropolitain, Olivier Bouba Olga propose un récit territorial plus souple en étant attentif aux diversités et en prenant en compte les interdépendances. Cette notion de récit est primordiale dans tout projet architectural ou urbain. Les acteurs vont créer des récits pour parler et faire parler de leurs projets. Faire la ville, c’est raconter des histoires. Sans récit, l’espace n’est rien. L’action territoriale est ainsi présentée comme une manière de rassembler différents acteurs locaux autour d’un projet, mais elle devient aussi une mise en scène pour diffuser largement certaines innovations. On parle notamment beaucoup de storytelling de nos jours : cette méthode est employée dans tous les domaines comme levier pour dramatiser un contenu dans le but de marquer les esprits et influencer.
1 : Compétitivité, Attractivité, Métropolisation, Excellence