Analyse esthétique comparative de trois clips

Page 1

L’espace domestique dans le vidéoclip contemporain International Music Video Festival 2014 Matthieu SAMADET

Semestre 1 - Master Cinema - V7S102 Approche d’un objet médiatique contemporain : le vidéoclip Antoine GAUDIN


Maison n.f. 1.Bâtiment construit pour servir d’habitation aux personnes. 2. Local où l’on habite ; son aménagement. 3. Membre d’une même famille vivant ensemble. 4. Centre, bâtiment servant à un usage déterminé. 5.Entreprise commerciale ou industrielle. 6.Famille noble. 7.Chacune des douze divisions du ciel qui en astrologie, concernent les conjonctures formant la trame de l’existence. 8. Ensemble des personnels civils et militaires attachés au service d’un grand personnage (roi, reine, empereur, prince, etc.)

Dans son manifeste « Vers une architecture », l’architecte suisse Le Corbusier s’amusait à comparer un espace à une bulle de savon1, comme pourrait l’être l’image raccourcie de notre planète. C’est l’air à l’intérieur de la bulle qui soutient et qui structure la parfaite forme sphérique de l’édifice devenu espace, univers, planète, maison. Pour Le Corbusier le contenu représente plus que la simple structure, il incarne l’idée même de la vie — essentielle à la tenue réelle de la construction, ici de la bulle. La question posée sera donc simple : En quoi l’espace domestique génère-t-il une dynamique de vie et de création à l’intérieur du format temporel du vidéoclip ? Comme le veut la règle, j’ai sélectionné trois clips musicaux issus de la sélection officielle de l’international music film festival 2014, soit « Describe » du groupe Blue Fondation réalisé par Cecile Evert and Simon Lundsgaard, « Two on Two » du groupe Jamaica réalisé par Emile Sornin (Division) et « Turn down for What » de DJ Snake & Lil Jon réalisé par Daniels. Ces trois clips regroupent des caractéristiques esthétiques et thématiques très diverses, résonnant tout de même ensemble, à savoir ce qui les rapprochent plus concrètement serait leur volonté partagée de montrer des lieux de vie, des bulles corbuséenne, éprouvées par des pulsions émotionnelles. La maison est ici primitive, vernaculaire, enfantine, cabane ou immeuble répondant en miroir aux visages des personnages qui les traversent. 1. LE CORBUSIER, Vers une architecture, Flammarion, page 46

2


Dans le monde des objets inertes Il est à la fois amusant et intéressant de relier ces objets musicaux-visuels et l’ouvrage de Gaston Bachelard, «La poétique de l’espace». Tout d’abord parce que rien dans le champ universitaire ne les pousse les un vers l’autre. Mais aussi parce que plus généralement dans la discipline de l’analyse d’image la notion d’espace est très (trop ?) vite associée à celle du décor. On pourrait même aller jusqu’à exclure la notion de décor de cette analyse, l’espace de la maison serait plus à voir ici comme un modèle, une maquette, une image de la réalité qu’un simple décor de carton-pâte. Comme on peut le voir dans « Turn down for What » les murs ont une épaisseur, une matérialité bien qu’étrangement friables. Bachelard parle de « nid »2 pour qualifier des espaces domestiques rassurants, chauds et rattachés à un certain instinct. Dans le clip de « Describe » de Blue Fondation on retrouve cette idée du nid protecteur, incroyablement sécurisant. Le protagoniste masculin, coupe du bois à l’extérieur de la maison, mais décide rapidement de rentrer, il pose les armes - sa hache - en entrant. Il retrouve l’idée absolue du confort à l’intérieur de sa bulle. Dans ce clip de facture somme toute assez classique, le noir et blanc donne du relief à ces deux phrases de Bachelard : « Déjà, dans le monde des objets inertes, le nid reçoit une valorisation extraordinaire. On veut qu’il soit parfait, qu’il porte la marque d’un instinct très sûr. »3 On retrouve des plans de détails sur des objets esseulés, propres mais portant malgré tout sur eux (en eux) une poussière routinière, une poussière présente dans l’air. Comme si, en revenant une fois de plus à la bulle de Le Corbusier, l’air de cette bulle était à moitié composé de poussière menant par cette impression les deux amoureux présents dans le clip à l’intérieur d’une rêverie à laquelle la musique planante y fait certainement écho. Ce que l’on peut appeler l’inertie Bachelardienne est aussi présente au début du clip « Two on Two » de Jamaica où la tension morne de l’ennui est palpable, l’arrivée du colis tant attendu vient dynamiter le tout en un cri libérateur. En revanche dans « Turn down for What » on retrouve une autre idée de Bachelard, retournée, torturée et distordue celle du « sens de la hutte » donnant un sens de lecture à la maison primitive jusqu’à la maison contemporaine - « de la cave au grenier » on pourrait dire que le clip de « Turn down for What » sans clairement s’en inspirer en reprend inconsciemment une idée qui structure la définition bachelardienne : ce fameux sens de lecture vertical. Le personnage/détonateur explose sur le toit et entraine tous les habitants de l’immeuble-maison dans sa chute folle. De manière plus analytique, pourquoi avoir utilisé l’association de mots : immeuble-maison ? L’immeuble est par définition un ensemble d’appartements qui se distinguent par leurs occupants et par leur typologie (T1,T2,T3,T4,T5, et plus). À savoir que le mot 2. BACHELARD Gaston, la poétique de l’espace, PUF, page 92 3. Ibid 3


même d’immeuble vient du latin « Immobilis » signifiant « qui ne bouge pas » dans son sens le plus littéral. Or ici c’est ce double retournement qui est agréable à appréhender c’est-à-dire que la définition de l’immeuble est détournée par la pièce unique que l’on croise dans chaque appartement lors de cette descente (aux enfers), la pièce est une maison en soit et retournement de la définition de Bachelard prise dans le sens inverse donc du toit à la cave. Ce sens de lecture peut même se retrouver dans une analyse plus générale de ces trois clips constituants mis ensemble un triptyque vertical appuyant sur la figure de la gradation. « Describe » insistant sur le calme, la sécurité, l’indifférence, l’amour et surtout l’élévation. A contrario « Turn down for what » s’oppose en terrifiante chute très loin de tous les thèmes narratifs traités dans « Describe ». Vient « Two on Two », coupé en trois dans sa structure se positionnant comme un trait d’union entre les deux précédents clips cités, mêlant le réel immobile de la maison familiale, où les parents vieillissants n’intéressent plus (ou ne s’intéressent plus), la chambre de l’adolescent fan délirant et dansant ainsi que le garage-laboratoire totalement fantaisiste - lieu du génie robotique où des objets inertes et hétérogènes deviennent vivants le temps d’un morceau de Jamaica. Dead leaves and the dirty ground Le personnage androgyne - rien n’indique au départ s’il est une fille où un garçon - de « Two on Two » vit dans l’attente de nouveaux objets. Il dépérit, il n’aime pas le silence ni l’ennui et il n’a trouvé de solution à ce problème qu’une réponse matérielle, de l’ordre de la robotique. Il n’est pas arrivé au stade de professionnalisme du personnage « principal » du clip « Turn down for what » pour déclencher la bombe festive détruisant tout sur son passage. Le personnage de « Two on Two » reste un matérialiste forcené, il crée, il conçoit, il commande, il se sert d’objets uniques certes, rouges certes, mais d’objets quand même. Dans « Turn down for what » c’est encore une fois joyeusement tout l’inverse. Le personnage joue de son corps et uniquement de son corps. Il détruit tout le domaine du construit autour de lui, la seule utilisation qu’il va faire de l’immeuble est comme lieu de fête, de danse, de délire ainsi que de lâché prise évident - tout comme l’androgyne dans sa chambre dansant à l’image des Amérindiens transcendés autour de leurs totems, lui aussi entre en transe. Lors de cette mise en parallèle les Amoureux atteints de trisomie de « Describe » sont à mettre de côté, ils sont à comparer à deux anges empreints de naïveté, ni tout à fait matérialistes, ni tout à fait libérés corporellement. Ils sont aussi dans un état de transition, tout comme l’androgyne. Ils restent matérialistes au sens grec du terme - qui enseigne les vanités -, leur maison refermant plusieurs tableaux, des objets comme des natures mortes, des vanités. Mais à l’image des personnages de « Turn down for What » ils ne se retrouvent à l’intérieur que pour être dans l’intimité la plus totale. À la différence que les deux amoureux ne surjouent pas une bestialité, il n’y a ici qu’une douceur de noir et de blanc. Ce qui retient ensemble les personnages de ces trois clips c’est leur utilisation - leur expérience ? - commune de l’espace domestique. Seuls les parents de l’androgyne de « Two on Two » et le chien de « Describe » se tiennent hors du système, eux aussi nature morte et immobile, ils ne

4


sont que des carcasses vides. Sinon tout le monde effectue cette danse sexuelle et gigotante dans « Turn down for what », les amoureux sont amoureux à potentiels égaux dans « Describe » et l’androgyne et ses Robots fêtent la même musique dans le garage de « Two on Two ». Ce qui peut être judicieux de mettre en lien avec une phrase de Victor Hugo dans « Le Bossu de Notre-Dame » : Pour Quasimodo dit-il, la cathédrale avait été successivement « l’œuf, le nid, la maison, la patrie, l’univers »4. L’espace qu’ils utilisent tour à tour les reflète, renvoie à leur passé, leur histoire, leurs habitudes de vie. C’est d’ailleurs le seul moyen d’explorer et de donner un peu substances aux personnages de ces clips, le fait de dompter l’espace domestique fabrique de la matière à personnage. À la manière des projections d’instants du passé sur les murs de la maison de Jack White dans le clip réalisé par Michel Gondry pour « Dead Leave and the Dirty Ground » des White Stripes, le mur devient support de fantasmes et d’images, structurant des « figures de la normalité » passées sous spectre de la pulsation rythmique. L’espace domestique y est vu comme un pur miroir déformant des moments ordinaires. « L’architecture doit être pensée avec les mains »5, l’architecte Alberto Campo Baeza revendique le pouvoir tactile que l’architecte possède. Ici mis à part l’extrême limite de « Turn Down for What », rien n’est de l’ordre du toucher, de la manipulation. La maison de «Describe » n’est jamais remise en question, pareil pour la chambre rouge du personnage de « Two on Two », rien ne bouge, l’espace se fige. Ce que l’on touche c’est le corps ou le substitut au corps. C’est le rapport charnel dans « Describe » et les boulons des robots de « Two on Two ». On peut se demander ici qu’est-ce qu’il demeure de la belle punchline de Campo Baeza. Juste une réflexion sur la notion de réalité et son double. Car finalement même si ici on est loin du décor de théâtre en carton-pâte, les maisons ne sont pour autant pas complètement des maisons. Elles sont à l’image de la maison, comme nous avons pu l’esquisser en introduction, plus proche de la maquette que de la réalité. Bien qu’elles possèdent un peu de réalité en elle. L’habitat-maison-immeuble reste théorique car isolé du reste de la diégèse. Pour y revenir brièvement, seuls les habitants de l’immeuble de « Turn down for What » semblent trouver un rapport tactile à l’espace autour. On pourrait même risquer d’être poussif et dire qu’ils y a chez eux comme une volonté désespéré de faire partie de la matière inerte, construite et solide. Ils sont directement reliable aux projections de « Dead Leaves.. » la finesse et la mélancolie en moins (entre autres) ils sont agités, déformés et temporaires.

Pulsation Le ciment est musical, l’explosif aussi. Dans deux de ces trois clips il est question d’une explosion des personnages dans la musique. Cette question est plus que claire dans « Turn down for what ». Elle l’est un peu moins, bien que présente, dans 4. HUGO Victor, Le Bossu de Notre-Dame, Gallimard, Paris,1985, page 49 5. CAMPO BAEZA Alberto, la idea construida, Penser l’architecture,page 15 5


« Two on Two » et enfin très difficile à repérer dans le calme de « Describe ». Ce qui est visible (et audible) sur ce point dans les trois réalisations, c’est la modification de l’état émotionnel et physique des personnages. Dans « Turn down for what » la musique a un effet transcendantal et libérateur, mais à quel prix ? Au fur et à mesure que le groupe de danseurs-gigoteurs s’agrandit, détruisant l’immeuble, l’humanité présente en chacun diminue. L’individu en vient presque disparaitre ainsi que les conventions et hiérarchies sociales. Plus de couple, plus de police, plus de voisin, plus qu’une masse de corps fatigués et devenus inertes — à l’inverse de « Two on two » qui finit en un concert où les musiciens sont des machines et s’humanisent grâce à la fête et à la musique. Ici, les conventions sociales se rétablissent en entier grâce à la musique, le personnage au départ androgyne — de mon point de vue — affirme sa masculinité nouvelle, le robot vomissant des boulons dans la dernière image fête quant à lui le délire de la vie humaine et la décadence musicale. On peut aussi trouver dans ces clips une idée à relier à la musique directement une résonance avec l’acte de création, l’acte sexuel et de celui de transformation à court terme. Le couple d’amoureux de « Describe » décide de faire l’amour, à l’inverse les personnages fous de l’immeuble de « Turn down for what » miment l’acte sexuel pour en faire ressortir l’animalité uniquement. Devenant des machines ils ne se contrôlent plus. L’androgyne crée quant à lui le groupe de ses rêves en acier et en boulons, à la manière du docteur Frankenstein créant son monstre. Par ailleurs, la musique est synchrone avec l’image. Le coup de hache de « Describe », le cri de « Two on Two » et la destruction du toit dans « Turn Down for What » illustrent cet effet de montage par ailleurs très expressif dans le dernier clip cité et au contraire assez en retrait dans les deux premiers. Le potentiel narratif des personnages s’exploite largement à travers leur environnement, à travers l’espace domestique et domestiqué. Dans ces trois clips l’espace y est sous contrôle, commandité, créé ou détruit par les protagonistes. L’homme coupe du bois dans « Describe », du bois pour son intérieur sans aucun doute. Et cet espace prend forme justement grâce a cet acte de création ou de destruction présent dans ces clips. Le cri, le plongeon, le regard amoureux. Avec ces instants, l’espace-temps du clip bascule dans une poétique entière, d’unité et d’équilibre assez plaisante à regarder-écouter. Pulsion On peut alors noter une sorte de dialectique de la pulsion. Le mot pulsion est a prendre dans son sens le plus total. À la fois pulsion animale, pulsion amoureuse et enfin pulsion créatrice. Mais aussi a mettre en lien avec la pulsation rythmique. Le rythme dans tous cas donne un sens aux actions plus ou moins ordonnées des personnages croisés dans ces clips. Le calme amoureux, donnant lieu a une pulsion faite de draps et de pudeur pour « Describe », l’excitation pop engrenant l’adolescent de « Two on Two » a fabriquer des robots humanoïdes - pulsion créatrice. La transe rythmique et syncopée de « Turn down for what » fait sombrer pour aucune autre

6


raison que celle d’exister les habitants de l’immeuble dans une chute gratuite et terrifiante d’animalité - pulsion animale, pulsion de mort (explosion du crâne au téléphone). Cette notion de pulsion n’est pas anodine elle figure un rapport psychanalytique bien présent dans ces trois œuvres dont je vais essayer d’en faire l’état. Une pulsion est une poussée de l’inconscient vers une action concrète et consciente. Restons un moment sur le dernier clip cité, on pourrait croire que la transe qui les anime est le résultat d’une fièvre terrible ou d’une maladie, en tout elle se propage très rapidement, par le regard caméra et s’exprime dans le gigotement animal. Or on peut voir que le premier personnage secondaire a être touché par cette épidémie montre des signes de résistance, elle regarde la caméra, fait « non » de la tête, elle se refuse à la pulsion jusqu’au moment de laisser-aller total dans lequel elle traverse son sol et par analogie le plafond des voisins du dessous et ainsi de suite. On ne résiste pas « mentalement » à une épidémie mais plutôt à une pulsion intérieure et cachée. On peut revenir aussi par jeu psychanalytique a la définition de la maison par Bachelard encore une fois « La maison est un corps d’images qui donnent à l’homme des raisons ou des illusions de stabilité »6. Il fait aussi le lien entre espace, psychologie et psychanalyse. Selon Bachelard il y a deux manières distinctes d’imaginer une maison : 1. La maison comme un être vertical. Elle s’élève. Elle se différencie dans le sens de sa verticalité. Elle est un des appels à notre conscience de verticalité. 2. La maison comme un être concentré. Elle nous appelle à une conscience de centralité. On pourrait dire que dans « Turn down for what » la descente de la maison verticale se termine dans la cave, vers l’inconscient total. Et on assiste à un retour à l’état d’objet inerte des personnages. Bachelard précise que « la verticalité est assurée par la polarité de la cave au grenier. Les marques de cette polarité sont si profondes qu’elles ouvrent, en quelque manière, deux axes très différents pour une phénoménologie de l’imagination. »7. La notion de pulsion est, comme nous l’avons dit, présente de manière différente dans le clip « Describe » elle y est aussi en lien direct avec l’architecture de type totalement différent de l’habitat montré. On est face à une maison presque ronde, une cabane primitive et vernaculaire pourquoi pas même au fond de la forêt et dans un temps tout à fait abstrait. Autrement dit, une bulle corbuséenne hors du temps. C’est ici l’illustration du deuxième type de maison bachelardienne, celle qui rassure et entoure l’occupant. Ainsi la pulsion amoureuse y est beaucoup plus contrôlée et lente, c’est une pulsion qui donne cette fameuse illusion de stabilité que ne possède pas l’immeuble de « Turn down for what ». Il semble aussi que la maison des deux amoureux correspond à leur « coin du monde »8, un lieu bien à eux et étrangement onirique. C’est finalement dans « Two on Two » que le motif de la pulsion va s’avérer le plus productif pour le 6. BACHELARD Gaston, la poétique de l’espace, PUF, page 34 7. Ibid page 35 8. Ibidem, page 24 7


protagoniste. Au-delà du simple fait qu’il construise quelque chose dans l’instant, il contrôle sa sortie de piste. Le colis du facteur le fait sortir de lui-même, il hurle de joie, comme je l’ai dit un cri « libérateur » , déchaînant le personnage et la guitare en off suivie bientôt par les autres instruments. Le protagoniste par la suite s’enferme dans sa chambre alternant danse et création 3D, ce cri lui a donné confiance et le pousse (sens premier du mot pulsion) à donner plus, à créer plus. Ainsi on retrouve là un pulsion plus classique, plus efficace. Cette pulsion-là résulte sans doute de la frustration induite par l’inertie parentale, et à la froideur du logis familial, le protagoniste utilise ces énergies négatives pour colorer son « coin du monde » et pour le peupler d’humanoïdes créatifs eux aussi (à l’image du solo de guitare du robot guitariste).

Le triptyque est clos, au revoir Bachelard pour un temps. Le temps, lui, redevient classique. Le contexte de publication de ces clips ne change pas, avant le festival et après le festival, ou du moins la tendance et le degré d’attention apporté à chacun de ces clips ne vont pas changer. « Turn Down For What » cumule à cette heure des centaines de millions de vues sur Youtube, « Describe » et « Two on two » quelques centaines de milliers. Pourtant la passerelle entre ces clips n’est pas si large, le chemin n’est pas si long. J’ai essayé de procéder au-delà de la notion de beau et celle du goût et de voir ces trois clips vus à travers la loupe de quelques principes bases de l’architecture me permettant de réfléchir un espace et ce que l’on en fait, ces œuvres le poussant à l’extrême ou respectant scrupuleusement les règles. Ils restent narratifs, strictement, même si des bribes de concepts et d’autres bribes de performances émergent ça et là, je les ai analysés comme je l’aurai fait pour des textes en musique, l’espace domestique étant un fil conducteur, un témoin inerte désirant avoir une âme. Témoin aussi d’un changement émotionnel des personnages peuplant ces trois clips. Déjà petit ou en tout cas limité par définition, l’espace domestique, espace-bulle, se compresse avec le temps resserré du clip, comme sous l’effet d’un piston, il répond par l’espace à une problématique temporelle permettant de ce fait de traiter du possible et de l’impossible dans le cadre tangent de la réalité construite.

Bibliographie BACHELARD Gaston, La poétique de l’espace, PUF, Paris, 2011 CAMPO BAEZA Alberto, la idea construida, Penser l’architecture, éditions de l’esperou, Montpellier, 2010 LE CORBUSIER, Vers une architecture, Flammarion, Paris, 2005 HUGO Victor, Le Bossu de Notre-Dame, Gallimard, Paris,1985 8


Turn static files into dynamic content formats.

Create a flipbook
Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.