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PRÉFACE La galerie de portraits a ses lettres historiques de noblesse dans l’art et la littérature. Mais, comme l’ouvrage d’Agnès Forbat l’illustre avec éclat, elle peut aussi s’appliquer très bien aux médecins. Par le biais apparemment détourné du récit d’intérêts privés, de passions et d’engagements personnels affichés par les quatre-vingts médecins ici réunis ( mais bien d’autres auraient pu tout aussi bien y figurer ), c’est certes l’histoire d’autant d’individualités qui aiment à cultiver leur diversité irréductible qui se révèle, mais aussi celle d’un ensemble étonnamment cohérent d’acteurs de la santé dans le canton de Vaud. Cette galerie, en réalité, acquiert une valeur de généralité qui porte au-delà des frontières régionales. Elle éclaire combien la profession médicale moderne, depuis qu’elle existe comme telle dès le XIXe siècle, s’est construite sur ce paradoxe, qu’elle a parfaitement réussi jusqu’à nos jours à entretenir : défendre une action foncièrement singulière, où la rencontre entre deux figures uniques, le médecin et le malade, est au centre, et tous ensemble dessiner une histoire collective, celle d’un groupe qui ( en dépit de, ou mieux : en plus de ce culte de la singularité ) partage la conscience d’un destin et d’une identité commune, au-delà des spécialités de chacun, des opinions politiques concurrentes, des croyances et idéologies personnelles, la conscience d’une profession à qui la société dans son ensemble a confié un bien précieux entre tous : la santé des individus et de la population.