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NUMÉRO QUARANTE DEUX / Bomb Hills Not Countries






NUMÉRO QUARANTE DEUX Décembre 2015

Romain Covolan FS Wallie Air © Loïc BENOIT.

Directeur de la publication

Fred DEMARD 06 14 24 33 94 fred@somaskate.com

PHOTOGRAPHES

& rédacteurs

RÉDACTION SOMA est édité par LES ÉDITIONS DU GARAGE SARL 13, rue de L’Isère 38000 GRENOBLE ISNN : 1959-2450 fred@somaskate.com

Imprimé en France chez : IMPRIMERIE DES DEUX-PONTS

Graphisme

Seb JOLY Publicité

Corinne LASMEZAS 06 07 75 75 61 corinne@somaskate.com

Photographe maison

Loïc « LB » BENOIT

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Vincent Coupeau Nico Rasabro Nohan Ferreira Alex Pires Fabien Ponsero Mike Blabac Sergio « Astur » Alvarez Guillaume Périmony Kévin Metallier Davy Van Laere Mike O’Meally

Joe Brook Mark Owens Daniel Galli Bastien Regeste Vincent Coupeau Kévin Metallier Kiril Korobkov Jérémy Durand Guillaume Dalonneau Lisa Jacob

Toute reproduction, même partielle, du contenu de ce magazine est totalement prohibée, au risque de nous mettre sacrément en rogne. C’est qu’on n’a pas l’air comme ça, mais quand on s’énerve, on est méconnaissables. On n’hésiterait pas, par exemple, à vous faire un email pour vous dire qu’on n’est vraiment pas contents. On ne mettrait même pas de formule de politesse à la fin du message pour bien vous signifier qu’il ne faut pas jouer aux p’tits malins avec nous. Ah ah, vous faites moins les marioles d’un seul coup ! Vous voilà prévenus.



NUMÉRO QUARANTE DEUX Décembre 2015

INTRO Skateboard Jihad ?

P.10 L’MATOS L’important, c’est d’être bien habillé et de posséder tous les accesoires à la mode

Un blanc à dread locks, un michel, un bowl top secret et un boneless de jeune

P.18

LE JEUNE

WES KREMER

Le spot est dingue non ?

Une interview du « putain d’génie of the year »

P.14

P.26

LE VIEUX

SAVATE EN SUISSE

P.16 soma

SHUT UP AND SKATE

P.12

La plus grosse collec’ de tish « Etnies Rebel Sport » au monde !

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Une des figures du skate français, disparu bien trop tôt, Alain « Platoon » Montigné, ici en 1986 (87 ?) à la Roche sur Yon. Photo courtesy of son p’tit frère, le « Le vieux » de ce mois-ci.

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Note pour la prochaine fois : « ne jamais chier dans le potager »

P.32

SKATE-TRIP EN NAMIBIE Un emo-article sur un voyage pas banal

P.52 ABSURDE HANTISE Choco le chien en vacances avec l’amicale Franco-Russe de la planche à roulettes

P.70 EU’TRIPPIN Gérer des vedettes du skateboard à travers l’Europe pendant deux semaines… Le job de rêve ?

P.80 LE VRAC Le meilleur hôtel au monde, le retour d’Orgy Porgy, le plus gros 50-50 de France et Rachid le nouveau SOTY

P.88



NUMÉRO QUARANTE DEUX Décembre 2015

( intro )

Q

UAND EN 2007, ON A EU L’IDÉE LUMINEUSE DE RÉSISTER À INTERNET EN CRÉANT UN MAGAZINE DE SKATEBOARD, IL NOUS A BIEN FALLU COMMENCER PAR LUI TROUVER UN NOM. AUSSI CURIEUX QUE CELA PUISSE PARAÎTRE, « SOMA » S’EST IMPOSÉ ASSEZ RAPIDEMENT. UNE RÉFÉRENCE À

UN MONUMENT DE LA LITTÉRATURE SCI-FI, ÇA NOUS PERMETTAIT DE SUFFISAMMENT NOUS LA RACONTER POUR QU’ON SOIT CONVAINCUS QUE CE NOM ÉTAIT UNE BONNE IDÉE. JE RAPPELLE POUR LES DISTRAITS, QUE LE SOMA EST LA DROGUE UTILISÉE PAR LE GOUVERNEMENT DANS LE BUT DE CONTRÔLER LES POPULATIONS DANS « LE MEILLEUR DES MONDES » D’ALDOUS HUXLEY. L’ASSERVISSEMENT DU PEUPLE À L’AIDE D’UNE SIMPLE PILULE, OU D’UN MAGAZINE DANS NOTRE CAS, IL Y AVAIT LÀ DE QUOI NOUS SÉDUIRE… MAIS AVANT CE TRAIT DE GÉNIE, IL NOUS A BIEN FALLU FAIRE DES LISTES DE NOMS, AVEC LEUR LOT DE NIAISERIES ET D’INEPTIES. DANS LA MIENNE, TOUT EN HAUT, IL Y AVAIT « JIHAD » ET MÊME APRÈS AVOIR JETÉ NOTRE DÉVOLU SUR « SOMA », JE PENSAIS TOUJOURS UTILISER « SKATEBOARD JIHAD » EN BASELINE (À LA PLACE DE « SKATEBOARD MÉDECINE »). JE TROUVAIS JUDICIEUSE L’ANALOGIE ENTRE NOTRE COMBAT POUR DÉFENDRE LE SKATEBOARD QU’ON AIME ET LE CONCEPT DE GUERRE SAINTE. C’ÉTAIT, JE VOUS LE RAPPELLE, IL Y A HUIT ANS. INUTILE DE VOUS DIRE QUE JE SUIS CONTENT QU’ON N’AIT PAS RETENU CE NOM CRÉTIN EN DES TEMPS OÙ LES RÉFÉRENCES À LA SCIENCE-FICTION FONT NETTEMENT MOINS FLIPPER QUE LES RÉFÉRENCES À LA RÉALITÉ…

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L’ MATOS

BOARDS : Une board Element Greyson Fletcher pour faire des fs one foot gigantesques dans des bowls – Une Cliché Andrew Brophy pour battre des records de saut en hauteur – Une Collapse « Bad Toys » tellement d’actualité, qu’ils auraient voulu faire exprès qu’ils n’auraient pas osé Une Antiz Remy Taveira chamois/poisson/pied humain un peu chelou – Une Real avec un petit chat mignon à croquer… ROUES : Des roues Haze « prime cut » qui rappellent de bons souvenirs aux vieux débris que nous sommes.

CHAUSSURES : Une « Nike SB Lunar Janoski Mid Flash » avec un nom à rallonge pour emmerder les vendeurs – Une DC slip-on pour ceux qui sont fâchés avec les lacets – Une Emerica « Leo Romero » simple, efficace et même pas vulcanisée – Une Circa « Essential », une fois n’est pas coutume – Une Globe « Malaho » pour avoir la classe de Mark Appleyard – Une Huf « FTW classic lo » » comme absolument tout le monde en veut en ce moment – La Supra « Quattro » de Lucien Clarke pour mettre avec son plus beau survet' blanc Palace (ou Lacoste) – Une Lakai « Riley Hawk » pour faire des nose grind pull-out en écoutant Kyuss - (Pour une présentation complète des pieds gauches, merci de patienter jusqu’au prochain numéro.)

ACCESSOIRES : Des écouteurs SkullCandy “Grind“ au top l’innovation technologique du futur – Un stabilisateur XSories surmonté d’une GoPro pour filmer comme les pros sans galérer avec un gros sac de 30 kilos sur le dos - Un pantalon de travail Levi’s « Skate Harvest » pour couler du béton sur votre spot DIY de ouf – Un sweatshirt Carhartt WIP pour une Street Cred au top. 12

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LE JEUNE

Wallie Nollie Out à BOIS - DES - FRÈRES. Texte et Photos : Sebastiano Bartoloni.

LILIAN FAURE-VINCENT AKA FALAFEV Lilian est un gamin très actif aussi bien sur la toile qu’en skateboard. Rappeur à ses heures perdues avec ses potes Luni Sacks et Beny le brownie, il fait aussi parti des jeunes de la Cinquième Terrasse. Sur le plan vestimentaire, il est capable de porter un pyjama en lin d’un goût douteux coupé très court au dessus des chevilles, et le lendemain d'avoir un pantalon bien taillé Polo Ralph Lauren ! Pourtant Lilian sait où il va, il a choisit une formation de boulanger-pâtissier dans laquelle il excelle. L'originalité de ses tricks et de son skate font de lui un des skateurs les plus plaisants à voir sur la scène Rhône-Alpine. 14

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18 ans - skate depuis 6 ans Habite à Annecy (Pringy) Moyen de locomotion : Peugeot 103 SP Première board : La Zero noire avec la tête de mort blanche. Une âme de rockeur ! Sponsors : ABS Annecy



LE VIEUX

Frontside Air - Photos : Nico Rasabro - Texte : FD.

YANN MONTIGNÉ

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Il y a quatre ans, on a eu un nouveau skatepark dans notre ville, plutôt pas mal d’ailleurs et équipé d’un petit « kidney pool ». C’est ce dernier détail qui a décidé Yann à ressortir ses affaires de skate du placard. Celles qu’il n’avait pourtant pas touchées depuis plus de vingt ans. Quand on l’a vu débouler avec sa H-Street « David Nielsen », chaussé de ses Etnies « Natas Kaupas » et arborant comme si de rien n’était son T-shirt « Cholet Skate Camps ’89 », on s’est un peu demandé ce qui se passait. Vous avez vu « Hibernatus » ? Et bien voilà… Il nous a expliqué qu’en voyant le park se construire juste en face de son bureau, il a eu envie de voir s’il y arrivait encore… Il a galéré un peu au début, évidemment, mais assez rapidement, il re-faisait des airs au dessus du coping, des inverts, et bref, il skatait mille fois mieux le bordel que nous autres qui n’avions jamais arrêté de skater depuis les années 80. On a ensuite appris qu’il était originaire de Cholet et qu’il était le petit frère du fameux Platoon, que tous les viocs connaissent (c’est lui qui est en photo page 8). Aujourd’hui, Yann a troqué sa « David Nielsen » contre une planche un peu plus dans l’air du temps, il skate à fond et toujours avec un bon Tshirt « Etnies Rebel Sport » de derrière les fagots sur le dos.

Âge: 46 ans Habite à : Grenoble Skate depuis : Premiers émois 78 / 79 - Reprise en 87 jusqu'en 90 puis rien jusqu'en 2012 ! Première board : Une planche en plastique GEPY (les chaussures !) Objet publicitaire Sponsors : c'est quoi ça ?




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Guillaume GUENÉE BS Hurricane Grind, COVOLAND © Nohan FEREIRRA

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Nicki KATRANAS FS Boneless, LYON / © Loïc BENOIT

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JP “Popi“ DAHMANI FS Ollie, BOURG-LA-REINE / © Alex PIRES # 42

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Michel MAHRINGER Wallie, BARCELONE / © Fabien PONSERO 24

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WES KREMER

PDGOTY W E S K R E M E R É TA I T E N F R A N C E C E T É T É AV E C U N E G R O S S E PA R T I E D U T E A M D C . É TA N T D O N N É Q U ’ I L E S T C E Q U ’ O N APPELLE DANS NOTRE JARGON P R O F E S S I O N N E L « U N P U TA I N D ’ G É N I E » , ON A SAUTÉ SUR L’OCCASION POUR LUI POSER QUELQUES QUESTIONS. L A S C È N E S E D É R O U L E À LY O N , E N D É B U T D ’ A P R È S - M I D I , J U S T E AVA N T D E PA R T I R E N M I S S I O N S U R L E S S P O T S D E LA VILLE…

Portraits : Sergio ALVAREZ Action : Blabac Texte : fredd

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C

’est ta première fois à Lyon n’est-ce pas ?

Oui, première fois pour moi, c’est une très belle ville.

Tu en avais déjà entendu parler ? Tu avais repéré les spots dans les vidéos peut-être ?

Carrément ! Ça fait au moins dix ans que j’entends parler de Lyon. Avec mon pote Marius (Syvanen) on a toujours voulu venir en Europe et surtout à Barcelone et Lyon. Lui,

Ah oui ? Ça a l’air vraiment cool comme spot. J’ai hâte de découvrir tout ça. Je suis vraiment excité de pouvoir skater Lyon aujourd’hui. Je me souviens de ces spots dans la vidéo « Bon Appétit ». Avec Marius on était à bloc de cette vidéo, on la connaissait par cœur. Je me souviens qu’on était vraiment influencés par le skate français à l’époque, avec les vidéos Cliché. C’était cool. C’est dommage d’ailleurs que Jérémie Daclin ne soit pas là aujourd’hui, il fait un bon guide en général.

Oh, il est de Lyon ? Oui, c’est lui qui fait la visite d’habitude…

« ÇA M’EST ARRIVÉ, SANS LE SAVOIR, DE FAIRE UN TRICK SUR UN SPOT ALORS QUE L A PERSONNE QUI L’AVAIT FAIT AVANT MOI ÉTAIT LÀ. C’EST GÊNANT. » vient de Finlande, mais on avait vu tous ces spots en vidéo qui avaient l’air parfaits à Lyon et on s’est toujours dit que ce serait génial d’y aller. Quels spots en particulier tu as à l’esprit ?

Je ne connais pas les noms, mais il y en a plein. Il y cette place où JB a filmé tellement de lines, il y a aussi ces plans inclinés blancs sur lesquels Lucas a pas mal de footage, le petit handrail aussi sur une petite place. Oui, on l’appelle comme ça en bon franglais : « la small place ». C’est juste à côté…

Oh, vraiment ? Ça aurait été tellement cool ! C’était un de nos skaters préférés, c’est vraiment un tueur. On savait qu’il était derrière Cliché, qu’il était en charge de tout, que c’était lui qui organisait tout ça, les vidéos, les tours, la marque… Et c’était quand même un de ceux qui skataient le plus fort, il était vraiment bon. Il est incroyable à voir, il a ce style bien à lui, reconnaissable entre tous. Ça aurait été cool de le voir.

Tu te soucis des ABDs quand tu vas sur un spot ?

Mmmmh, oui, parfois ça m’arrive. J’essaye, tant que possible, de savoir ce qui a été fait. Je ne veux pas « prendre » le trick de quelqu’un. Ça m’est arrivé, sans le savoir, de faire un trick sur un spot alors que la personne qui l’avait fait avant moi était là. C’est gênant. Mais en même temps, on s’en fiche un peu, il y a tellement de trucs qui ont été faits de partout, tu ne peux pas tout savoir... Et puis c’est juste du skate, si tu as envie de faire tel trick, sur tel spot, vas-y ! Pourquoi s’en priver ? C’est toujours un NBD pour toi… Tu es Skater Of The Year cette année, c’est bien ça ? Ou c’était l’an dernier ? J’ai un doute d’un seul coup...

Non, non, c’est bien ça, c’est cette année, je suis le « champion en titre » ha ha ! Ok, excuse…

Ha ha, pas de souci, on s’en fout.

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« CE SERAIT LE RÊVE D’AILLEURS, PASSER MES ÉTÉS ICI EN EUROPE ET MES HIVERS AUX U.S... »

Je pense à ça parce que Madars, qui est juste à côté de toi, est justement le European Skater Of The Year cette année. Tu n’es pas un peu jaloux quand tu te dis que tu ne seras jamais ESOTY, alors que lui pourrait très bien cumuler et devenir SOTY un jour ?

Ah ah ! Exact. Et il le mériterait tellement ! Mais qui sait ? Peut-être que je pourrais rester ici assez longtemps pour obtenir une double nationalité. Ce serait le rêve d’ailleurs, passer mes étés ici en Europe et mes hivers aux U.S... J’adore venir en Europe, c’est ma destination favorite. Et bien on va terminer là-dessus alors !

Cool, merci G (oui, Wes Kremer m’a appelé « G »)(j’ai la cassette).

Environ 4 minutes trente plus tard nous arrivions au spot de la Small Place et avant même qu’on ait eu le temps de voir quoi que ce soit, Wes s’était défoncé la cheville en sautant les marches. C’était une vraie belle entorse, du type qui triple de taille instantanément. Wes s’est couché par terre, la tête sur sa board et il a regardé tranquillement que la session se fasse. Un gars de l’équipe lui a rapidement proposé de l’emmener à l’hôpital, ou au moins à l’hôtel mais il a décliné l’invitation : « vous inquiétez pas pour moi, j’ai l’habitude, j’vais regarder la session… ». Après un Nollie nose slide de Madars sur le rail et quelques autres cabrioles, on est allés à Confluence où on a passé le reste de l’après-midi, jusqu’au soir. Anthony Lopez a fait

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Switch 180 to Wallride. LISBONNE (PT).

une chouette line et on s’est bien marré avec Steeve Rami et mon collègue de « à propos » à passer à fond sous un camion garé, couchés sur nos boards, en mode cercueil… Comme le van était garé loin du spot, et que Wes ne pouvait pas marcher, il n’a rien vu de tout ça. Il est resté sagement dedans à attendre, sans broncher, pendant quatre ou cinq heures. Le lendemain, il était derrière le mégaphone à la démo à ambiancer et répandre ses ondes positives sur tout le skatepark. Et les jours suivants, à Londres, à St Jean de Luz, il a fait de son mieux pour se rendre utile et « faire le job » avec les gamins venus voir le SOTY en visite dans leur ville… « Putain de génie of the year » en ce qui nous concerne !

FS Kickflip PORTO (PT).

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ON PENSAIT AVOIR TOUT VU, ENTRE LES MARQUES DE CALEÇONS, DE VIS ET BOULONS, DE WAX ET AUTRES ACCESSOIRES HYPER UTILES TELS QUE, SOUVENEZ-VOUS, LA GOMME À GRIP, OU LES MINI-ENJOLIVEURS POUR CACHER LES ROULEMENTS AVEC STYLE… C’EST À QUI SERA LE PLUS “ORIGINAL”. POUR AUTANT, EN FRANCE, ON N’AVAIT (À MA CONNAISSANCE) JAMAIS EU DE MARQUE DE CHAUSSETTES DÉDIÉE AU SKATE, JE PEUX ME TROMPER BIEN SÛR. IL FAUT BIEN ADMETTRE QUE C’EST QUAND MÊME VACHEMENT PRATIQUE DES CHAUSSETTES QUAND ON Y PENSE. MOI PAR EXEMPLE, SI JE SKATAIS SANS CHAUSSETTES, JE PERDRAIS IMMÉDIATEMENT MES AMIS, JE POURRAIS JETER MES CHAUSSURES ET MES PIEDS MALADES PAR LA MÊME OCCASION. DONC FINALEMENT, C’EST PAS SI CON UNE MARQUE DE CHAUSSETTES POUR FAIRE DU SKATE.

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SAVATE A l ATTAQUE CHAUSSET TES DE COMPÈTE, VO L À L’ÉTAL AGE, SCATOLOGIE ET ALCOOLISME CANIN

PAR VINCENT COUPEAU TEXTE ET PHOTOS (SAUF INDIQUÉ)

Chloe Bernard Fakie Tucknee LUGANO.


C’EST AINSI QUE LES CHELLOIS, QUI ONT PLUS D’UN TOUR DANS LEUR SAC, ET QUI ONT UN FLAIR IMPARABLE POUR CES CHOSES-LÀ, SE SONT RUÉS SUR L’AFFAIRE COMME UN JEUNE SUR UN SWEAT PALACE, C’ÉTAIT TROP BEAU, FALLAIT PAS HÉSITER. ET DONC, SAVATE EST NÉ. SI VOUS N’ÊTES PAS ENCORE AU COURANT, FAITES UN PETIT EFFORT ET METTEZ-VOUS À LA PAGE, BORDEL ! VOUS SAVEZ, LES THRASHOS EN SHORT AVEC DES GRANDES CHAUSSETTES… ÇA COMMENCE À FAIRE UN MOMENT QU’ON SE TRIMBALLE CE LOOK DÉFIANT TOUT BON SENS. PAR CONTRE, AUSSI CURIEUX QUE ÇA PUISSE PARAÎTRE, MEA CULPA, ON N’AVAIT PAS ENCORE PENSÉ À FAIRE UNE TOURNÉE… JUSQU’À CET ÉTÉ, OÙ, COMME LE VEUT LA TRADITION, ON S’EST ENFIN DÉCIDÉ À S’ENTASSER DANS UN VAN, DIRECTION LA SUISSE. NON PAS QU’ON AIT DÉJÀ VENDU TELLEMENT DE CHAUSSETTES QU’ON DOIVE ALLER CACHER LE MAGOT CHEZ LES HELVÈTES, MAIS JUSTE PARCE QU’ON A PEUR DE RIEN ET QU’ON AVAIT DEUX TROIS BOUTEILLES DE CHAMPAGNE DANS LE COFFRE QUI RESTAIT DU MARIAGE DE LA VEILLE.

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ALORS ON S’EST DIT QU’IL FALLAIT Y ALLER À FOND SUR L’IMAGE “LUXE”, POUR IMPRESSIONNER, POUR BRILLER, ET PUIS POURQUOI PAS, VENDRE 2-3 PAIRES DE SOCQUETTES EN PLUS ! NOUS DISPOSIONS D’UNE ÉQUIPE DE CHOC TRIÉE SUR LE VOLET. ON A MIS UN PEU DE TOUT, DES ENFANTS, DES VIEUX, DES MOYENS VIEUX, DES MECS QUI DÉCIDENT, D’AUTRES QUI SAVENT PLUS COMMENT ILS S’APPELLENT, ET MÊME UNE FEMME ! OUAIS UNE FEMME ! MAIS ATTENTION, PAS CELLE QUI SE FAIT LES ONGLES ET QUI CHOUINE POUR UN PETIT BOBO. AH NON, LA NÔTRE ELLE VIENT DE MARSEILLE, ET SI TU LUI MANQUES DE RESPECT, TU EN PRENDS POUR TON GRADE ET TU T’EN SOUVIENS TOUTE TA VIE…

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crois que c’est un peu comme le Tati de Barbès, même fauché tu peux y aller, tu te fais plaisir !

Selon notre guide Suisse, Igor Fardin, qui lui aussi han s’est mis en route par un bille ses pieds chez Savate, la destination la plus intéresbeau matin parisien comme sante pour poursuivre notre périple était Zurich. Je les autres, sous la pluie, en m’étais renseigné avant de partir et j’étais pas trop pour. direction de Bâle (ou Basel Il faut savoir que Zurich est championne d’Europe des pour les locaux), histoire villes les plus chères (devant Londres). C’était donc pas d’aller skater ce monde l’endroit rêvé pour nous autres, jeunes voleurs de Tatimerveilleux qu’est Port- Barbès. Enfin, apparemment ça regorgeait de spots alors Land, manger deux trois flamme- on a mis en garde les enfants, on les a installés dans les küches et rendre visite au saint sièges bébé et on s’est mis en route. patron, Oli Bürgin. Je me permets de vous rappeler qu’Oli cumule à lui Le concept était de dormir au « Beast », ce bowl DIY seul le titre d’homme le plus classe super sympa construit par les locaux en 2011 et récemdu monde, et celui d’homme le plus ment agrandi. Ce qu’il faut savoir, c’est que ce petit bijou gentil au monde. D’ailleurs, si vous de béton est situé juste à côté d’un genre de jardin BIO n’avez jamais équitable été à Port-Land m i - ro o t s , skater avec lui, « ... PUIS APRÈS, COMME ON m i - h i p p y, c’est comme la dans lequel Rolex à 50 AVAIT FAIM, ON A FILÉ EN ALLEsont ameberges, je ne nées à sais pas ce que MAGNE DÉVALISER UN LIDL. ET venir des vous foutez, classes mais vous êtes OUAIS FAUT PAS DÉCONNER, C’EST d’école prien train de pasmaire et ser complète- PAS PARCE QU’ON A DU CHAMP’ ET autres cars ment à côté. de touArrivés sur DES CHAUSSET TES PROPRES, ristes chiplace, évidemnois, en ment, on a dé- QU’ON EST FORCÉMENT RICHES général bouché le très tôt le champagne, his- À MILLIONS. » matin. toire de faire Étant le bonne figure et seul à ne se la raconter un minimum. Puis pas avoir monté de tentes pour passer la nuit, parce que après, comme on avait faim, on a filé moi aussi à mes heures perdues je suis un peu mi-roots en Allemagne dévaliser un Lidl. Et mi-hippy, et que, sous l’effet de la drogue, j’étais persuadé ouais faut pas déconner, c’est pas que les étoiles “c’est super”… J’ai un peu regretté le parce qu’on a du Champ’ et des matin face aux 38 mini-enfants qui couraient autour de chaussettes propres, qu’on est forcé- moi en cercle pour faire joujou… ment riches à millions. Pour tout vous dire, dans l’équipe, on était M’enfin, si j’avais su ce qui venait ensuite, j’aurais relad’ailleurs tellement fauchés, que tivisé, parce que finalement c’était pas si grave. Je m’exmême au Lidl en Allemagne on a plique : la veille en arrivant tard au bowl, sous la nuit trouvé le moyen de voler des trucs… Pourtant le Lidl en Allemagne, je

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Robin Bolian FS Wall Bash GERMANY.


Gaetan Ducellier No Comply Crailslide PORT-LAND, BASEL.

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Georges Poole BS Smith Grind ZURICH.

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On avait prévu de rester une nuit de plus à Zurich, mais on a lu dans le regard du jardinier que c’était aussi une bonne idée de prendre la route directement pour Lugano. Après avoir dérobé un peu tout ce qu’on pouvait dans les magasins du coin, et une fois que George Poole a eu fini de sauter sur tous les rails que la ville pouvait offrir, on a chargé le van et on s’en est allé.

noire et les étoiles, une grande majorité de l’équipe et notamment les enfants, ont jugé qu’il serait vraiment fun d’aller faire caca tous ensemble, côte à côte, dans les Lugano est une belle ville, touristique l’été, peu chère buissons. Sauf que ce qu’ils n’avaient parce que proche de l’Italie, et d’apparence paisible. C’est pas réalisé à ce moment-là, dans un peu St-Tropesque quand même donc là encore on s’est l’obscurité, c’est que les buissons en demandé ce qu’on foutait là, mais ça ne nous a pas déplu question n’était autres que les de faire tache dans le décors, de toute façon on commenplantes chéries de notre ami jardi- çait à s’y faire. nier mi-hippy, mi-Suisse-Allemand de type costaud et pas commode... Au programme de cette halte proche de la frontière itaVous n’imaginez pas le froid glacial lienne : baignades, vols à l’étalage, capuccinos par milqui nous a transpercés au beau liers et une session dans ce nouveau DIY italien dans la ville de Cantu. Alors eux, c’est des champions ! Pour matin, alors commencer, qu’on prenait le spot s’aptranquillement « DE PLUS, LE LOGO N’IMPLIQUE pelle “La Bonotre petit café hème” et ça NI BIÈRE, NI TRUELLE OU ALLUdans le bowl, et c’est quand que notre pote même la jardinier est ar- SION AU BÉTON ET À THRASHER, classe. De rivé en hurlant plus, le logo en mi-allemand, CE QUI FAIT PL AISIR. NON EUX, n’implique ni mi-anglais qu’on ni avait chié dans ILS ONT MIS DES NIBARDS DIRECT bière, truelle ou alses plantes, et lusion au que c’était “not SUR LEUR LOGO, ÇA C’EST FORT, béton et à gut !”. “Das ist Thrasher, ce human scheiss” C’EST DE L A COMMUNICATION qui fait plaiqu’il a crié en sir. Non eux, nous balançant EFFICACE. » ils ont mis au milieu de des nibards notre table de petit dej’ un sac plastique rempli de toutes nos merdes direct sur leur logo, ça c’est fort, c’est de la communicaqu’il avait fraîchement collecté avec tion efficace. En bref, si vous passez par là-bas (ce qui ses mains… On n’a pas tout compris n’arrivera sûrement jamais parce que c’est bien paumé, de ce qu’il disait, mais on a facile- mais bon dans le lectorat de Soma j’ose espérer qu’il y’a ment tout traduit par “fermez vos au moins deux/trois motivés) n’hésitez pas à vous arrêter, gueules ou vous allez mourir”... Fi- ça vaut le coup ! nalement, on s’est excusé, parce qu’on est élégants et qu’on ne veut De plus, pour l’anecdote, était présent sur place un chien pas mourir, et tout est rentré dans alcoolique qui nous a bien fait marrer. Je ne sais pas si l’ordre, enfin pour nous, parce que pour lui, la pilule a été dure à avaler…

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Gaetan Ducellier BS Boneless ZURICH.

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Robin Bolian Kickflip ZURICH.

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Vincent Coupeau Feeble pull out to fakie PORT-LAND, BASEL. © Guillaume.PÉRIMONY

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Robin Bolian FS Corner Air PORT LAND, BASEL.

« ... POUR CEUX QUI PENSENT QUE GEORGE POOLE NE SAIT FAIRE QUE DES BACK NOSEBLUNT EN COURBE (...) IL EST AUSSI CHAMPION POUR FAIRE DU RAIL (...) »

Georges Poole Boardslide BASEL.

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« ... UN CLEBS QUI RENVERSE LES BIÈRES POUR LES B OIRE EN LÉCHANT LE SOL, ÇA VAUT LE DÉTOUR, SÉRIEUSEMENT. À L A FIN DE L A SESSION, IL TITUBAIT COMME MOI AU NOUVEL AN, INCROYABLE ! »

vous avez déjà vu un clebs qui renverse les bières pour les boire en léchant le sol, ça vaut le détour, sérieusement. À la fin de la session, il titubait comme moi au nouvel an, incroyable ! Il a même fini par littéralement tomber d’un module, ce qui en soit est quand même triste (je ne veux pas avoir d’emmerdes avec 30 millions d’amis). Oh dites donc, je réalise tout à coup que nous sommes dans un magazine de skate et que je n’ai pas encore parlé de tricks… Bon alors, séance de rattrapage : • Pour ceux qui pensent qu’Oli Buergin se fait vieux, vous pouvez aller brûler en enfer, il est toujours au top ! • Pour ceux qui pensent que Sam Partaix ne fait plus de skate et se lance complètement dans le show-business ou le surf, euhhh vous avez peut-être raison… Mais attendez quand même de voir sa part dans la prochaine Antiz parce qu’il skate toujours à fond et il m’a encore fait rêver comme quand j’avais 14 ans… • Pour ceux qui pensent que George Poole ne sait faire que des back noseblunt en courbe, bon c’est pas complètement faux, il a dû en faire 830 dans la semaine, mais par contre, ce que je ne savais pas et que vous ne savez sûrement pas non plus, c’est qu’il est aussi champion pour faire du rail, du curb, du flat et en fait un peu de tout. Efficace jusqu’à la blagounette le George, bravo.

Chloé Bernard Indy Slash Grind PORT LAND, BASEL.

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« ... POUR CEUX QUI NE CONNAISSAIENT PAS IGOR FARDIN, ALLEZ CHECKER SES INCROYABLES AVENTURES AVEC SES COPAINS LES WARRIORS, VOUS NE SEREZ PAS DÉÇUS !

»

Sam Partaix FS Corner Air ZURICH.

Igor Fardin Wallie Up BS Flip BASEL.

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Sam Partaix Ceiling Bash GERMANY.


Maceo Moreau Kickflip Drop In BASEL.

• Pour ceux qui pensaient que Robin Bolian ne savait faire que du contest, sachez qu’il est aussi à l’aise en street quand dans une Vert’, et qu’à 17 ans c’est quand même relativement agréable à voir, d’autant plus qu’il mérite bien sa petite place en flow chez Antiz, une vraie graine de hobo le Robin ! • Pour ceux qui ont un jour dit que les filles n’avaient rien à faire dans le skate, cachez-vous, Chloé va venir vous casser la figure comme ils savent si bien le faire à Marseille, ça va pas traîner ! • Pour ceux qui pensaient que Gaétan Ducellier ressemblait à Matt Damon, oh punaise, c’est vrai qu’il lui ressemble ! Quelle classe ! • Pour ceux qui pensent que Macéo Moreau est encore un enfant tout gentil tout calme, bravo, vous êtes vous aussi tombés dans le panneau !

• Pour ceux qui ne connaissaient pas Igor Fardin, allez checker ses incroyables aventures avec ses copains les Warriors, vous ne serez pas déçus ! • Pour celles et ceux qui ne connaissent pas Guillaume Perimony, faites attention, ce mec est très gentil mais il est un peu bizarre parfois, si j’étais vous je me méfierais. Il ne mange pas de légumes. • Enfin, pour ceux qui pensaient que j’étais un mec intelligent, moi aussi pendant longtemps j’y ai cru, bein c’était faux, j’aurais jamais écrit ce texte sinon. D’ailleurs j’ai toujours pas vraiment parlé de skate…

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À L A RECHERCHE DU DIAMANT DU DÉSERT U

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Anthony Lopez Switch FS Kickflip – NONIDAS.

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WINDHOEK, LE POINT DE DÉPART. C’EST LÀ, AU CŒUR DE L’ATYPIQUE CAPITALE NAMIBIENNE QUE NOTRE ÉQUIPE SE RETROUVE ET PASSE SES PREMIÈRES 48 HEURES EN TERRE AFRICAINE. ESSEULÉE AU BEAU MILIEU D’ÉTENDUES DÉSERTIQUES, L’ANCIENNE CITÉ COLONIALE ALLEMANDE S’AGITE ET TENTE DE SURVIVRE. AUX PREMIERS ABORDS, CETTE DESTINATION APPARAÎT POUR LE MOINS INATTENDUE ET INADAPTÉE POUR DES AFICIONADOS DU SKATEBOARD. POURTANT, EN ERRANT À TRAVERS LES ARTÈRES QUI DÉCOUPENT MÉTHODIQUEMENT L’ESPACE URBAIN, NOUS NE TARDONS PAS À DÉCOUVRIR PLUSIEURS ÉDIFICES ET AUTRES CURIOSITÉS ARCHITECTURALES TOUT À FAIT PROPICES À LA PRATIQUE DU SKATEBOARD. NOUS EN PROFITONS POUR RAPIDEMENT EMMAGASINER LES PREMIÈRES IMAGES D’ACTION DE NOTRE PÉRIPLE. LE HASARD NOUS FERA MÊME CROISER LA ROUTE D’UN CERTAIN MORNE, UN JEUNE SKATEUR NAMIBIEN, FRAÎCHEMENT RENTRÉ D’UNE ESCAPADE SUD-AFRICAINE, QUI S’AVÈRERA D’UNE PRÉCIEUSE AIDE ET QUI N’HÉSITERA PAS À NOUS DÉVOILER QUELQUES-UNS DES MEILLEURS SPOTS DE SA CITÉ. WINDHOEK, QUI SIGNIFIE « LE COIN DU VENT » EN AFRIKAANS, EST PERCHÉ SUR DES COLLINES SEMI DÉSERTIQUES À 1700 M D’ALTITUDE ET OFFRE UN MÉLANGE ARCHITECTURAL IMPROBABLE, PRINCIPALEMENT DÛ À L’INFLUENCE GERMANIQUE HÉRITÉE DE LA PÉRIODE COLONIALE DU DÉBUT DU XXE SIÈCLE. AINSI, UNE MONUMENTALE ÉGLISE LUTHÉRIENNE DATANT DE 1910 DOMINE FIÈREMENT LA CAPITALE, DE NOMBREUSES VILLAS COLONIALES AUX IMPOSANTES FAÇADES SE SUCCÈDENT DANS LES RUES DU CENTRE-VILLE TANDIS QUE QUELQUES TOURS DE VERRE, SYMBOLE DE MODERNITÉ, À L’IMAGE DU LUXUEUX HILTON, TENTENT DE CREVER LE CIEL.

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Philipp Schuster Ollie – WINDHOEK.

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Thierry Gormit BS Kickflip – WINDHOEK.

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EN PÉRIPHÉRIE DE L’AGGLOMÉRATION, L’ÉNORME TOWNSHIP DE KATATURA REGROUPE LA TRÈS GRANDE MAJORITÉ DE LA POPULATION NOIRE DÉFAVORISÉE. COMME CHEZ SON VOISIN, L’AFRIQUE DU SUD, DONT ELLE FUT LE PROTECTORAT JUSQU’À SON INDÉPENDANCE EN 1990, LA NAMIBIE CONSERVE DE NOMBREUX STIGMATES DE L’APARTHEID, TOUJOURS BIEN PALPABLES, QUI NOUS RENVOIENT AUX SOMBRES HEURES DE SON HISTOIRE.

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AU BOUT DE DEUX JOURS PASSÉS À SILLONNER LA VILLE, NOTRE GROUPE DÉCIDE DE CHANGER DE DÉCOR EN FAISANT ROUTE VERS LE SUD. L’EXCITATION EST PALPABLE ALORS QUE NOUS PARTONS À LA DÉCOUVERTE DE CE MYSTÉRIEUX PAYS, L’UN DES MOINS DENSÉMENT PEUPLÉS DE LA PLANÈTE (LA NAMIBIE FIGURE AU 2ÈME RANG MONDIAL). TANDIS QUE NOUS NOUS ENGOUFFRONS SUR LE RUBAN NOIR QUI SERPENTE À PERTE DE VUE, CISAILLANT LES ÉTENDUES DE SABLE ET DE ROCAILLE, UN TOUT AUTRE MONDE SE DÉVOILE PROGRESSIVEMENT SOUS NOS YEUX. LE DÉSERT, IMMENSE INCONNUE, AUSSI FASCINANT QU’EFFRAYANT. À MESURE QUE NOUS NOUS ENFONÇONS PAR-DELÀ LES COLLINES ARIDES, NOUS PERDONS NOS REPÈRES. SEUL L’HORIZON SEMBLE DÉSORMAIS GUIDER NOTRE ROUTE, INCARNANT UNE DESTINATION ILLUSOIRE. INUTILE DE VOULOIR ACCÉLÉRER POUR GAGNER DU TEMPS, LE DÉSERT NE SE PREND PAS DE VITESSE. L’ASPHALTE RUGUEUX SE CHARGERA DE NOUS LE RAPPELER EN AYANT RAISON DE LA ROUE ARRIÈRE GAUCHE DE NOTRE MINIBUS. L’ISOLEMENT ET LA VULNÉRABILITÉ PRENNENT ICI UN TOUT AUTRE SENS. ALORS QUE LA LUMIÈRE ORANGÉE DU CRÉPUSCULE VIENT FLIRTER AVEC LE SOMMET DES DUNES, UN VILLAGE COMME UN MIRAGE SE DESSINE AU LOIN. NOUS SOMMES À KEETMANSHOOP, UNE PETITE PARENTHÈSE HUMAINE OÙ NOUS NOUS RÉFUGIERONS POUR LA NUIT.

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Philipp S ch Flip BS Ta uster ilslide – M ARIENTA L.

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Anthony Lopez FS Noseslide – LUDERITZ.

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SORTES DE POINTS-VIRGULES QUI VIENNENT PONCTUER NOTRE LONG PÉRIPLE, LES RARES BOURGADES QUE NOUS CROISONS SUR NOTRE CHEMIN SONT DES ÉTAPES SALVATRICES. ON Y MANGE, ON Y DORT ET ON Y SKATE TANT QUE POSSIBLE. ELLES SE NOMMENT MARIENTAL, LÜDERITZ, SWAKOPMUND… DES SONORITÉS À L’ÉTRANGE RÉSONANCE LORSQU’ON SE TROUVE AU FIN FOND DU DÉSERT NAMIBIEN. LEURS POINTS COMMUNS ? CE SONT TOUTES D’ANCIENNES CITÉES COLONIALES ALLEMANDES. LA VIE NE LES A PAS ENCORE COMPLÈTEMENT QUITTÉES MÊME SI L’ABSENCE SEMBLE AVOIR ÉLU DOMICILE DANS LA PLUPART DE CES ENDROITS. LES DÉCORS QU’ELLES NOUS OFFRENT SONT LE PLUS SOUVENT IMPROBABLES, PRESQUE IRRÉELS, À L’IMAGE DE LA VILLE FANTÔME DE KOLMANSKOP, ANCIENNE CITÉ DIAMANTAIRE DÉSERTÉE PAR SES CHERCHEURS EN MANQUE DE TROUVAILLES DEPUIS LES ANNÉES 50. ICI COMME AILLEURS, LE SABLE REPREND PEU À PEU SES DROITS RECOUVRANT PROGRESSIVEMENT CHAQUE MÈTRE CARRÉ DE BITUME. MALGRÉ TOUT, NOUS PARVENONS QUASISYSTÉMATIQUEMENT À DÉCELER DES SPOTS. UNE STATIONSERVICE, UN REBORD DE FENÊTRE, UNE MAIN COURANTE DONT L’USAGE N’EST LUI, PLUS VRAIMENT COURANT… CHACUN Y VA DE SA PETITE CONTRIBUTION MÊME SI LA PRATIQUE DU SKATEBOARD DEVIENT PRESQUE ANECDOTIQUE DANS CETTE RÉGION D’AFRIQUE AUSTRALE À LA SAVEUR SI PARTICULIÈRE.

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Olli Illmonen BS Tailslide – LUDERITZ.

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L’OCÉAN ATLANTIQUE N’EST PLUS TRÈS LOIN. COMME PLISSÉES PAR LE VENT, LES DUNES DE SABLE ENVAHISSENT PEU À PEU LE PAYSAGE. À MESURE QUE LES MINUTES PASSENT, LES RAYONS DU SOLEIL SE FONT DE PLUS EN PLUS PESANTS. LA TEMPÉRATURE GRIMPE BRUSQUEMENT, MAIS L’AIR SEC REND CETTE CHALEUR SUPPORTABLE. LE DÉSERT CONTINUE DE DÉROULER SOUS NOS ROUES UNE DIVERSITÉ INSOUPÇONNÉE DE PAYSAGES. ENTRE SPLENDEUR ET PURETÉ. MÊMES LES STUDIOS D’HOLLYWOOD SONT VENUS TIRER PROFIT DE CE SPLENDIDE DÉCOR, POUR LE TOURNAGE DE MAD MAX, QUELQUES MOIS PLUS TÔT. AU BORD DE LA PISTE, DES NOMADES SE RÉFUGIENT À L’OMBRE D’UN FIGUIER. UN PEU PLUS LOIN UN TROUPEAU D’ORYX, CES GAZELLES AUX LONGUES CORNES ET À LA TÊTE ZÉBRÉE, BROUTE PAISIBLEMENT LES HERBAGES ÉPARS BRÛLÉS PAR LE SOLEIL. NOUS LES ADMIRONS QUELQUES INSTANTS AVANT DE POURSUIVRE NOTRE ROUTE, LAISSANT DERRIÈRE NOUS UN NUAGE DE POUSSIÈRE, SORTE DE SIGNATURE ÉPHÉMÈRE DE NOTRE BREF PASSAGE. COMME HAPPÉS PAR CE DÉSERT HYPNOTISANT, NOUS TENTERONS, PENDANT PLUS DE 3500 KMS, DE DÉCOUVRIR LES JOYAUX SECRETS QU’IL VOUDRA BIEN NOUS OFFRIR. AU BOUT DE LA PISTE, DES LAMBEAUX DE BRUME VIENNENT CARESSER LES PIEDS DES COLLINES DONNANT À LA SCÈNE UN CARACTÈRE ENCORE PLUS MYSTIQUE…

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Tjark Thielker Gap To Krooked Grind – WINDHOEK.

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Boris Proust FS 50-50 – WINDHOEK.

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ÉPILOGUE… AU CŒUR DE L’IMMENSITÉ DÉSERTIQUE, L’IMAGINAIRE EMBRASSE LE RÉEL SI BIEN QUE LE VISITEUR NE PARVIENT PLUS À DISTINGUER L’UN DE L’AUTRE. AVEC LE RECUL, JE COMPRENDS MIEUX LES MOTS QU’ÉCRIVAIT ST EXUPÉRY À SON SUJET : « J’AI TOUJOURS AIMÉ LE DÉSERT. ON S’ASSOIT SUR UNE DUNE DE SABLE. ON NE VOIT RIEN. ON N’ENTEND RIEN. ET CEPENDANT QUELQUE CHOSE RAYONNE EN SILENCE ».

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HANTISE

ABSURDE

Cela fait déjà quelques années que les gars d’Antiz et nous autres chez Absurd essayons de créer une véritable connexion entre nos deux scènes, eux en Europe et nous en Russie. Ce qui a tout banalement commencé autour de quelques bières s’est progressivement transformé en amitié sincère pour finir en partenariat entre nos deux marques. Ils étaient passés nous voir l’an dernier à Moscou, alors cet été nous leur avons rendu la pareille. Vous le savez aussi bien que moi, peu importe d’où nous venons, le skateboard reste un langage universel… TEXTE

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PHOTOS

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KOROBKOV

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VAN

DAVY

LAERE

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Hirschi Wallie ANVERS, BELGIQUE.

out le monde était excité de démarrer ce trip en France, à Clisson, en plein

Hellfest. La bonne idée ! En effet, le plus grand festival européen de Heavy Metal, aussi génial soit-il, est très certainement le plus mauvais point de départ pour un skate-trip… Imaginez cent mille métalleux déchainés et assoiffés, trois jours de fête d’affilée, des torrents de bière déferlants au milieu des tentes, des concerts inimagina-

« IMAGINEZ CENT MILLE

d’autres avaient peut-être trop donné de leur personne au Hellfest… Passons les détails et concentrons nous sur ce qui s’est passé au cours de ces deux semaines. Il est intéressant de voir ce voyage sous deux points de vue différents. Pour les gars d’Antiz, c’était probable-

ment un trip comme un autre à travers des pays et des villes qu'ils connaissent depuis bien longtemps. Bien sûr, il est toujours bon d'être sur la route, où que l’on soit, mais l’excitation n’est pas la même dans un environnement familier ou dans un pays et une culture totalement nouMÉTALLEUX veaux.

DÉCHAINÉS ET ASSOIFFÉS, TROIS JOURS DE FÊTE D’AFFILÉE ... »

bles, des nuits absolument folles… On a fait l’impasse sur rien ! Ce fut une expérience unique, des moments inoubliables. En revanche, il nous a fallu une bonne semaine pour nous en remettre, pouvoir skater à nouveau… « Faux départ » donc, mais peut-être avions nous besoin de cela pour apprendre à nous connaître, ou tout du moins pour se rappeler des noms de tout le monde… Nous étions, en effet, une bonne quinzaine au départ, répartis dans deux vans, même si beaucoup n’ont pas atteint la destination finale, Amsterdam, quinze jours plus tard. Certains avaient des obligations familiales, professionnelles ou autres, mais

Sur le plan architectural, l’Europe de l'Ouest et la Russie n’ont pas grand chose en commun. Les vieilles villes

médiévales françaises avec leurs rues étroites et sinueuses, leurs cathédrales gothiques qui semblent tout droit sorties de peintures de musées ou de livres d'histoire, n’ont rien à voir avec ce que nous connaissons chez nous. En Russie, les maisons de cette époque ont pratiquement toutes disparues, parce que construites en bois, elles ont fini brûlées lors de guerres ou de grands incendies. Alors qu’en Europe, l’utilisation de la pierre a préservé ce patrimoine. J’ai aussi remarqué que si les villes européennes ont l’air bien plus vieilles, elles sont également très modernes. Une chose m’a particulièrement frappé : ce style de vie européen qui semble beaucoup plus décontracté qu’en Russie. Chez vous, on prend le temps de profiter de la vie. Il n’est pas rare de voir les gens boire tranquillement leur café le matin tout en lisant le journal dans les bars. Puis en fin de journée, le café devient une bière ou un verre de vin. Chez nous, les gens sont constamment pressés et affairés : si l’on n’est pas au bureau ou chez soi, on est en train d’y aller. Et l’on semble incapable de profiter des moments entre les deux… L’information semble avoir un mal fou à circuler entre nos pays. Comme si nous étions toujours séparés par une

sorte de mur invisible. La grande majorité des gens que

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Julien Bachelier Sugarcane HOOFDDORP, PAYS-BAS.

nous avons rencontrés se sont montrés très chaleureux et accueillants avec nous, mais force est de constater qu’ils savaient à peine ce qui se passe en Russie actuellement. Dans ces moments là, même sur ce genre de voyage où le skate est au centre de tout, on devient un ambassadeur, non seulement de la scène skate de notre pays, mais aussi de notre culture. Je pense d’ailleurs que la vision que nous pouvons offrir de notre pays est bien plus fiable et proche de la réalité que ce que vous pouvez voir dans les media. Je suis également convaincu qu’un tour de skate, pour peu qu’on soit guidé par les bonnes personnes, est un excellent moyen de découvrir un pays. Si nous n’avions pas été avec les gars d’Antiz, l’expérience n’aurait pas été la même. Nous n’aurions pas connu toutes ces personnes et tous ces endroits. Squatter à droite et à gauche avec les familles des locaux vaut tous les hôtels de luxe du monde. Je me souviendrai toujours de ces repas qu’on partageait, ces barbecues, ces discussions qui se prolongent jusque tard dans la nuit et même de toutes nos difficultés à nous comprendre. Être sur la

Russie, il y a des agents de sécurité presque partout, même les petites boulangeries en ont. C’était incompréhensible pour nous de voir un endroit aussi développé et industrialisé que le port laissé sans protection. C’était cool de pouvoir skater tous ces spots sans avoir à se soucier de se faire virer. Une chose que notre équipe slave a particulièrement appréciée en Belgique, c’est la Kriek. Je sais que, pour les connaisseurs, cette bière à la cerise est synonyme de mauvais goût et considérée communément comme une « boisson de fille ». Mais pour nous, c’était nouveau et, en dépit de toutes les moqueries que « SQUAT TER À DROITE ET À GAUCHE cela nous a coûtées, nous y sommes restés fidèles AVEC LES FAMILLES DES LOCAUX VAUT jusqu’au dernier jour.

TOUS LES HÔTELS DE LUXE DU MONDE. » route, dans des lieux totalement inconnus et s’arrêter dans des villes dont on n’a jamais entendu parler est la meilleure chose qui soit. La première partie du voyage, en France, était une tournée « marketing » avec des sessions dans les skateparks et des visites aux skateshops. Puis Davy Van Laere a rejoint notre caravane en Belgique et c’est à partir de ce moment qu’on a commencé à faire des photos et donc à faire du street toute la journée. Une chose qui m’a surpris c’est quand Davy nous a emmenés skater au port d'Anvers avec Jarne Verbruggen et quelques locaux. Une vaste zone avec des quais, des entrepôts, d'immenses parkings, des dispositifs de chargement, des chariots élévateurs, etc. C’était le week-end et il n'y avait absolument personne. Pas même un seul vigil. D’accord, c’était un jour de congé mais c’était vraiment très curieux de voir une telle surface avec tant d’équipements sans aucune surveillance. Nous y sommes entrés, avons skaté là pendant un bon moment sans avoir rencontré âme qui vive. En

La Hollande est dépeinte par la propagande Russe comme un symbole de perversion et de décadence. Les média nous di-

sent que le pays se meurt à cause des mariages homosexuels, de la légalisation de la drogue, des migrations incontrôlées et ce fameux skatepark dans une église est la preuve que les gens ont perdu espoir en Dieu et en un avenir radieux… Bien sûr, tout ceci est grotesque et nous l’avions compris avant même de partir, mais notre séjour en Hollande nous a fait très bonne impression. Laissons de côté Amsterdam et ses célèbres attractions touristiques. La ville de La Haye, par exemple, nous est apparue comme la ville du futur, son architecture est en avance sur tout ce que nous connaissons. Les espaces publics sont pensés et organisés de façon très intelligente afin de satisfaire les intérêts de divers groupes sociaux allant de personnes âgées

Teemu Pirenen FS Wallride ANVERS, BELGIQUE.

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Gosha Konyshev FS Five-o Flip out ANVERS, BELGIQUE.

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« J’AI EU L A CHANCE DE VOYAGER DANS PLUS DE CINQUANTE PAYS MAIS JE N’AVAIS ENCORE JAMAIS VU UNE TELLE SYMBIOSE ENTRE LES SKATEPARKS QU’ILS CONSTRUISENT EN HOLL ANDE ET L’ESPACE URBAIN : LES OBSTACLES SKATABLES S’INTÈGRENT PARFAITEMENT DANS LE PAYSAGE. » Pasha Kuznetsov Switch Bluntslide to Fakie GAND, BELGIQUE.

Remy Taveira FS Bluntslide Transfert GAND, BELGIQUE.

Dima_Rodionov BS Noseblunt LA HAYE, PAYS-BAS.

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Léo Lukin No Comply LA HAYE, PAYS-BAS.

Jérôme Chevallier Five-o Grind To Fakie SCHEVENINGEN, PAYS-BAS.

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aux skateboarders. J’ai eu la chance de voyager dans plus de cinquante pays mais je n’avais encore jamais vu une telle symbiose entre les skateparks qu’ils construisent en Hollande et l’espace urbain : les obstacles skatables s’intègrent parfaitement dans le paysage. Ils ont inventé un nouveau type d’architecture, utilisable par tous, y compris les skateurs. KOTR… Jérôme Chevalier (qui skate pour l’écurie Rekiem skateboards) était venu en tant que sur tous les plans ! Julien Bachelier particulièrement, il deuxième pilote (et deuxième proa été une véritable inspiration pour moi au cours de ces prio de van), mais il s’est surtout deux semaines. Juju était le dernier dans le bar la veille avéré être l’indiscutable MVP du et le premier à se lever le matin. Alors que chacun es- trip. Il a skaté chaque spot avec la sayait encore de se réveiller, il était déjà rentré du super- fougue et la passion d'un adolescent, a filmé plus de « C’ÉTAIT BEAU, C’ÉTAIT LA FIN DES VACANCES, tricks que tout le monde, n’a pas arrêté de sourire ENVOYEZ LE GÉNÉRIQUE DE FIN… » pendant les deux semaines et son marché et préparait le petit déjeuner pour tout le monde. chien Choco était la mascotte du Après quoi, il bossait sur son ordinateur portable pendant trip. qu’on mangeait, prenait ensuite le volant du van et, une fois sur le spot, s’il était à son goût, bataillait jusqu’à ce Les gars d’Antiz avaient leur célèque le trick soit rentré puis motivait les troupes pour le bre Blue Van tandis que nous étions spot suivant. C’est lui aussi qui allait chercher à boire, dans celui de Choco et Jérôme. On qui s’occupait du logement pour la nuit, de la nourriture s’est bien tirés la bourre sur la route, et, lorsque tout était réglé, il était encore partant pour c’était assez marrant d’ailleurs, mais aller boire un coup avant de se coucher. Samu Karvonen sommes arrivés ex-aequo au bord de était le plus sage. Il savait toujours ce qu’il avait à faire, la mer du Nord. Les Russes et les ce qu'il voulait skater, quels tricks essayer, quand il était Finlandais ont directement sauté temps de s’amuser et quand il était temps d’assurer. Tou- dans l’eau tandis que l’équipe francojours en contrôle de la situation, quelle qu’elle soit. allemande s’est contentée d’admirer Teemu était le plus calme de la bande, c’était le techni- le coucher du soleil. C’était beau, cien en charge des montages vidéos sur son téléphone. c’était la fin des vacances, envoyez le Rémy a tout skaté, avec style et vitesse, et il répondait générique de fin… toujours présent quand il s’agissait de faire la fête. La fête de fin d’année scolaire au milieu de laquelle nous La morale de cette histoire c’est nous sommes retrouvés à Gand était folle ! Roland Hirsch qu’il ne faut toujours pas se fier à ce s’est fait mal au début du trip, donc il n'était pas en mode que l’on vous raconte à la télévision pleine puissance, mais il s’est avéré très utile dans le rôle et aller découvrir le monde par soi de dénicheur de spots. -même. Nous avions aussi un invité mystère, comme dans les Post Scriptum : Merci beaucoup pour leur hospitalité à tous les skateshops et les personnes qui nous ont accueillis et aidés pendant le voyage. Je me rends soudain compte que je ne parle que de nos impressions de petits Russes en Europe, et pas assez des collègues d’Antiz. Ces gars-là ont vraiment assuré

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Ryan Decenzo Switch FS Flip – SOUTHBANK. 82

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GLOBE

EU TRIPPIN COMMENT ÇA MARCHE UNE VRAIE GROSSE TOURNÉE ?

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MIKE

O ’ M E A L LY

L’été dernier, Globe a convoqué toute la cavalerie pour sillonner l’Europe. Des démos en veux-tu en voilà, des posters et des poitrines signés comme s’il en pleuvait, des tsunamis de high-fives. Des cris de joie, des larmes de bonheur… Ce n’est pas vraiment le genre de Tours auquel nous sommes habitués dans les pages ce magazine. D’habitude, on a affaire à des gars qui s’entassent dans le van du patron, ou loué par le patron, et qui sont à l’affût du meilleur plan pour bouffer et dormir pas cher tout en essayant de filmer des tricks pour la prochaine vidéo de leur nouvelle marque de la mort qui tue… Non, ici, il est question de vraies vedettes du skateboard, certifiés 100% purs SOTY pour certains et les déplacements d’une étape à l’autre se font en avion. Et pour que les choses soient très claires, il y a peu de chance qu’ils viennent vous demander s’ils peuvent squatter chez vous pour la nuit après la démo… Ce genre de Tour, vous vous en doutez, requiers un minimum d’organisation pour que tout ne vous pète pas à la gueule à la première anicroche… On a retrouvé le gars qui a géré tout ce joyeux bordel, Josh Barrow qu’il s’appelle, très sympa, plutôt beau garçon, et on lui a demandé comment il avait survécu à tout cela :

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Paul Hart Gap to FS Noseslide BARCELONE (SP).

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Combien de temps a duré le tour, combien de villes visitées, combien de skateurs, combien de gens au total sur cette tournée ?

Le tour a duré deux semaines à travers cinq pays. Dans l’ordre, nous sommes allés à Londres, Oxford, Berlin, Bruxelles, Wevelgem, Lyon et Bar-

GLOBE EU TRIPPIN celone. On avait, sur toute la durée du tour, Rodney Mullen, Mark Appleyard, David Gonzalez, Louie Barletta, Ryan Decenzo, Chris Haslam, Paul Hart, Charles Collet, Anton Myrhvold, Fries Tailleu et Philipp Schuster. Et les riders européens nous ont rejoint

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sur certaines étapes, à Berlin : Yura Renov et Dannie Carlsen, à Wevelgem : Simon Deprez, à Lyon : Vincent Milou et à Barcelone : Danny Leon et Diego Cano. On était donc 15 en permanence (11 team riders, moi, Steve Black le TM international, Mike O’Meally le photographe et Aaron Brown à la caméra). Qu’est-ce que ça représente en terme de budget une tournée pareille ? J’imagine qu’il est compliqué de donner un chiffre, mais ça doit représenter une grosse partie de votre budget marketing ?

Je ne vais pas te donner de chiffre en effet, mais disons que c’est un des plus gros tours que Globe ait jamais organisés et c’était notre principale action marketing sur 2015… On a pensé que c’était important de réunir tout le team en Europe étant donné qu’on ne l’avait pas fait depuis un bon moment. Le dernier tour européen c’était en 2011. C’est un bon calcul d’investir autant de temps et d’argent dans une tournée de quelques jours ? Qu’est ce que ça apporte à une marque comme Globe ce genre d’événement ?

C’est important pour nous de réunir tout le monde de temps en temps. On a essayé de faire le maximum de séances d’autographe dans les shops. Le signing chez Wall-Street à Lyon s’est super bien passé… Ces gars sont des légendes ! Ce genre de Tour a, je pense, un gros impact sur le plan international et cela nous permet d’amasser un maximum de matière photo et vidéo. Globe fête ses 21 ans et va sortir l’an prochain un livre sur son histoire dans lequel il y aura aussi des photos du tour.

Quel est le truc le plus difficile à gérer sur un tour comme celui-là ?

Le plus difficile est sans doute de réussir à ce que tout le monde soit prêt à temps le matin pour ne pas louper l’avion… Surtout si quelques verres ont été descendus la veille. La clé c’est que tout soit parfaitement organisé en amont, parce qu’une fois que tu es sur la route avec autant de monde, ça peut vite devenir un cauchemar ! Des petits détails comme s’assurer que tout le monde est bien enregistré sur les différents vols et que tous les transferts sont bien planifiés, peuvent te sauver la mise.


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Est-ce qu’il y a eu des coups durs ? De gros imprévus ? Ou tout s’est passé comme sur des roulettes ?

Rodney Mullen et Chris Haslam.

Je sais que tu aurais préféré qu’il y ait eu de grosses galères pour l’article, mais tout s’est déroulé plus ou moins comme prévu. On n’a loupé aucun avion, on n’a oublié personne et personne ne s’est vraiment fait mal. Ceci dit, Charles s’est quand même cassé le coude à Lyon mais il est resté dans le tour pour continuer de diffuser ses bonnes vibrations… Même la météo était de notre côté. C’est toujours autant la folie quand les gens voient Rodney Mullen ?

GLOBE EU TRIPPIN

Oui, Rodney Mullen attire toujours les foules… C’était dingue de voir comme des gens de tous âges avaient besoin de se confier pour lui signifier à quel point il avait été une inspiration pour eux. On plaisantait toujours sur le fait qu’il était le cœur de la démo à lui tout seul. Il était constamment entouré d’une masse de gens. Beaucoup venaient voir David Gonzalez aussi, c’est une vraie machine à démo ! Mais les gens avaient envie de voir tout le monde. Ce n’est pas un peu difficile pour des gars comme Anton Myrhvold ou Charles Collet de se faire une place au milieu de « superstars » comme David Gonzalez, Chris Haslam, Mark Appleyard ?

Anton et Charles ont assuré à mort... Ils étaient totalement à leur place au milieu de tous ces gars. Charles a l’habitude de côtoyer des skateurs très connus sur les tours Cliché, et autres, et Anton a passé un bon moment aux U.S. avec les gars de SML wheels donc ils n’étaient pas plus impressionnés que ça.

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David Gonzalez Crail Tweak – OXFORD (UK).

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Louis Barletta Sal Flip – LYON.

Charles Collet FS Crail – BELGIQUE.

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Quelle a été la démo la plus mémorable ?

Southbank ou Oxford peut-être ? La démo à Southbank a été vraiment épique… Il y avait tellement de monde, l’ambiance était inimaginable. On était avec Chris Johnson, le photographe de Sidewalk qui a vu passer son lot de démos là-bas depuis plus de vingt ans. Il a dit que celle-ci était certainement la plus mouvementée qu’il y ait vu, ce qui était bon à entendre. La démo à Oxford a aussi déplacé beaucoup de monde. Le park est un peu au milieu de nulle part, donc je pense que les locaux étaient contents que le team ait fait le déplacement. Une anecdote de soirée racontable pour finir ? Mark Appleyard Kickflip to Fakie BARCELONE (SP).

Ha ha, il y a eu quelques soirées animées… Je n’oublierai jamais David Gonzalez se faisant virer de l’hôtel alors que le tour n’avait commencé que depuis une heure ! Je n’en dirai pas plus…

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B LU E N I G M A HÔTEL Par Jérémy Durand J'ai supplié le gars qui fait ce magazine de me laisser faire cet article sur mes vacances en couple sur une île Grecque récemment. Pourquoi ? Je ne sais pas trop... Pour compenser le fait de n’avoir jamais été capable de faire quoi que ce soit en skateboard ? Pour me consoler de n’avoir jamais réussi à travailler pour un magazine de planches à roulettes ? Sûrement un peu des deux... Quoi qu'il en soit, il a accepté (probablement parce qu'il a eu un peu pitié). Il faut bien dire que, depuis le temps qu'il essaye de m'apprendre à faire des rock'n'roll "à la Neil Blender" et qu'il me voit échouer lamentablement à chaque fois, ça a dû lui faire mal au coeur... Je l’ai eu par les sentiments quoi.

Bref, revenons-en à ma p'tite semaine de vacances romantiques à Andros, au Bluenigma hôtel, sinon il ne va plus jamais me donner la possibilité d'écrire quoi que ce soit pour Soma et je devrais retourner écrire dans mon propre fanzine, plus ou moins confidentiel, très populaire chez mes potes, un peu moins dans le reste du monde… Donc oui, je suis bel et bien parti mi-octobre, sur cette charmante petite île grecque, quasiment inconnue des touristes, voir si "l'Enigma bowl" et les "Gratitude Trails" étaient réellement skatables. Les photos que j’avais vues me laissaient imaginer quelque chose de vraiment, totalement, dingue. Je savais qu'une partie des gars d'Antiz était déjà venue, alors pourquoi pas moi ? Ceci dit, même en photo, le bowl avait vraiment l’air costaud et ce champ de bosse géant avait l’air bien trop beau pour être vrai. Puis j'me suis dit que dans le pire des cas, si tout cela était vraiment trop inskatable, je pourrais toujours me faire bronzer sur les nombreuses plages désertes, me baigner dans les rivières qui parcourent l'île, ou bien me goinfrer pour trois fois rien dans les p'tits restos locaux... En tous les cas, c'est comme ça que j'ai vendu la chose à ma copine, pour qu'elle aussi soit convaincue que cette destination était une très bonne idée et surtout pas un délire d’adulescent obnubilé par son skateboard. Et bien au final, ni moi, ni elle n’avons été déçus. Que du bonheur ! Nikos, le gérant de l’hôtel, pas le présentateur télé, même s'il s'est trompé de sport (il fait du BMX) est vraiment un bon gars. Il a construit tout seul ou presque

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ce bowl totalement ahurissant qui ne ressemble à aucun autre et il a également bétonné son champ de dirt pour que les skateurs puissent s’en servir… Alors bien sûr, le bowl n’est vraiment pas évident à dompter et le champ de bosse, les « gratitude trails », sont un peu abrasives… Mais cet hôtel reste une expérience à part entière, totalement hors du commun et pour le reste, les plages, les restos, les rivières et tout le tintouin romantico-touristique, ça frôle la note maximale sur le guide du roublard (je dis ça par rapport au mec qui emmène sa copine en vacances dans un « skatepark »...). Cerise sur le gâteau? Le dernier

jour, Brad McClain, Alex Hallford, Chris Haslam & Co. sont arrivés, et j'ai donc pu constater, que ce bowl, était, vraiment, mais alors, vraiment skatable ! Bref, j'ai hâte que Nikos finisse la mini-rampe sur la terrasse de l'hôtel, que je puisse replaquer autre chose qu'un (faux) rock'n'roll l'année prochaine... Et pourquoi pas, cette foisci, faire un article pour Thrasher France !

Pour plus d'infos: bluenigma.com Ou... dans le prochain Versus, fanzine & plus !

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Gabriel Engelke FS Feeble / Fabien PONSERO.


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SCOTT BOURNE À p ro p o s d ’ O rg y Po rg y

Certains d’entre vous se souviennent peutêtre de « Orgy Porgy », la rubrique dont Scott Bourne avait les clefs dans les premiers numéros de Soma. De courtes nouvelles en anglais et traduites en fin de mag, dans lesquelles Scott exposait son quotidien avec son franc-parler et son style très personnel. C’était parfois franchement drôle, parfois un peu trop romantique pour nous, mais c’était toujours profondément honnête et sans concession, comme son skate, brut de décoffrage, sans compromis et fleurtant toujours avec le danger. Les éditions 19/80 viennent de publier un recueil de ces nouvelles, ainsi que quelques autres publiées dans d’autres magazines comme Jpeople, Juxtapoz et Ala Champfest. C’était donc l’occasion de poser quelques questions à Scott, de parler de ce 50-50 à Bastille, de son rapport avec le skate aujourd’hui et de La France ! C’est en sortant d’un ballet à l’Opéra Bastille que tu as eu l’idée de grinder le ledge ?

Non, comme beaucoup de monde, j’ai d’abord vu l’extérieur avant de voir l’intérieur ! Je n’avais aucune idée de ce qu’était ce bâtiment quand je l’ai vu la première fois. Tout ce que je savais, c’est que le ledge était skatable et que je voulais le grinder. Je l’avais vu la première fois que je suis venu à Paris, mais j’étais en Tour et je n’ai pas eu l’occasion de le skater. On est allé en Espagne et quand je suis retourné à Paris, j’ai décidé d’aller à Bastille et de le faire.

Il t’a fallu beaucoup d’essais ? Tu as dû y retourner plusieurs fois ?

Pas vraiment, j’ai fait quelques aller-retour jusqu’au ledge et puis j’ai commencé à me jeter. Le problème c’est qu’il n’y avait pas vraiment d’élan donc je ne pouvais pas y aller avec de la vitesse pour me poser loin sur le ledge. À cause de cet élan, j’étais obligé d’arriver lentement et de faire un gros ollie pour monter dessus, mais après je n’avais pas assez de vitesse pour tout grinder. Est-ce que tu as eu des problèmes avec les passants ou les gens qui bossent à l’Opéra ?

On est resté un bon moment et pour être honnête, quand les gens ont vu ce que j’es-

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sayais de faire, une petite foule a commencé à s’amasser en bas du ledge et sur les marches, pour regarder. Il y avait même un agent de sécurité qui a ouvert des barrières pour que je puisse prendre plus de vitesse, ça m’avait bluffé. Il avait autant envie de me voir le faire que moi d’y arriver. Quand j’ai replaqué, il y a des centaines de gens qui ont applaudi et crié. C’est Bastille, il y a tout le temps des tonnes de touristes à cet endroit. Est ce que tu t’es pris des grosses boîtes ou pas du tout ?

Bien sûr… J’ai bloqué au milieu du ledge plusieurs fois et je me suis fait éjecter jusqu’en bas des marches,

comme un sac de viande ! Le genre de boîte qui te coupe la respiration, mais je voulais le faire et je ne pouvais pas abandonner alors que j’étais si près de le faire. Le problème c’est que ça ne grindait pas assez et que je ne pouvais pas prendre plus d’élan. Kenny Reed a accouru et il a waxé le ledge jusqu’à la moelle. L’essai d’après, je me suis calé et c’est allé tout seul, j’ai volé jusqu’en bas… C’était fait, game over. Je ne pouvais absolument plus skater les jours suivants. Mon corps ne répondait plus après toutes ces boîtes ! Tu ne skates plus aujourd’hui n’estce pas ?

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© Joe Brook

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Pourquoi ? Qu’est-ce qui t’as fait arrêter le skate professionnel ? Estce que ce sont juste les blessures ou c’est quelque chose d’autre également ?

L’industrie était en train de changer et quelque chose en moi changeait également. Je m’étais fait plusieurs blessures sérieuses et je commençais à perdre le goût de me mettre en scène et de devoir le faire pour gagner ma vie !

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vois ça comme un lieu et une époque qui seraient restés derrière moi et les sensations que cela me procurait sont passées elles aussi. C’est presque comme une ex-copine dont tu as désormais du mal à croire que tu aies été avec elle pendant si longtemps ou comme une ex que tu n’aurais jamais même imaginé qu’elle puisse sortir avec toi. Elle était géniale, mais je suis passé à autre

Est-ce que tu essayes de rester informé de ce qui se passe dans le skate aujourd’hui ? Est-ce qu’il t’arrive de regarder des vidéos, des mags ?

ces sensations ailleurs. Est-ce que tu penses que le fait d’avoir été ce skater hors du commun t’empêche aujourd’hui d’être simplement un skater normal ? Estce que tu ressens ce type de pression ?

Tu connais cette citation : « Il n'y a que deux tragédies dans la vie : l'une est de ne pas avoir ce que l'on désire ; l'autre est de l'obtenir. » C’est d’Oscar Wilde je crois, et c’est le meilleur moyen de résumer ce que je ne pourrai jamais expliquer à quiconque. Quels sont tes plans pour le futur ? Continuer à écrire, publier des bouquins ?

Non, pas du tout. De temps en temps, quelqu’un m’apprend que quelqu’un que je connais a fait quelque chose et je fais l’effort d’aller voir de quoi il s’agit, mais en général… Non. J’ai un mal fou à imaginer que quelqu’un qui a été impliqué dans le skate à ton niveau, pendant tant d’années, arrive à balayer tout ça d’un revers de la main. Je comprends bien que tu as de nouveaux centres d’intérêt, ce qui est une très bonne chose, mais je n’imagine pas que tu n’aies jamais eu envie de prendre un skateboard pour aller cruiser dans la rue, ou aller faire un tour au skatepark, tôt le matin pour voir ce que ça fait de rouler à nouveau et de faire quelques tricks…

J’y pense, bien évidemment, mais pas de la même manière que toi. Je

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Des livres, des films, écrire… Ouais, c’est ça qui m’intéresse en ce moment. Tu vis en France depuis un bon paquet d’années maintenant. Tu te plais toujours ici ou tu as envie de t’installer ailleurs ou même de retourner vivre aux U.S. ?

Je n’ai absolument aucune envie de retourner vivre aux U.S. à ce stade de ma vie et je n’ai aucune idée de ce que l’avenir me réserve, mais pour l’instant je suis vraiment heureux de faire ma vie chose, à une autre femme. Parfois je ne peux m’empêcher de repenser à elle et je me demande ce que ça ferait de me la taper à nouveau, mais le truc c’est qu’il n’y a plus de passion entre nous deux. Mais je n’ai pas oublié les sensations qu’elle me procurait… Maintenant je retrouve

en France. "Orgy Porgy" de Scott Bourne est disponible chez 19/80 éditions dans une collection comprenant également "Eating Glass" de Jocko Weyland et "A Royal Sport" de Jack London

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ANTI-HÉRO ( Ra c h i d S y s t e m m ) Par Guillaume Dalonneau

Il avait dans les 40 ans, Il était beau comme un enfant, Sur sa planche à roulettes. J’ai mis de l’ordre à mes cheveux, Un peu plus de noir sur mes yeux, Paroles, paroles, paroles…. C’est sur cette splendide introduction composée par Dalida, notre nouvelle directrice marketing, que je vais vous parler de Rachid. Rachid est chauffeur de bus dans l’agglomération Grenobloise (une petite ville dans les Alpes avec une vie culturelle très riche ayant inspiré des artistes comme Calogero ou les jamaïquains de Sinsémilia). Il vit en couple et a 4 enfants et forment à eux tous, la famille Systemm (il semblerait que ce soit un nom d’emprunt). Rien à voir avec les Magic System, on a assez de chanteurs de qualité à Grenoble, pas besoin d’en prendre d’autres. Rachid s’est mis au skateboard il y a seulement quelques années, à l’âge

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ou beaucoup d’entre nous arrêtent pour faire des enfants, des photos de chats et entretenir les tissus adipeux de l’abdomen. Rachid a très vite compris que le skate, malgré sa difficulté, était un excellent moyen de s’amuser avec ses potes. Il ne se soucie d’aucune mode, ne connaît pas les tricks interdits et se fiche de savoir si porter du Supreme en septembre 2015 est super hype ou trop tard dans la saison. Forcément, apprendre le skate à son âge n’est pas très facile, mais il skatait dès qu’il pouvait, faisait les mêmes lignes dans le bowl encore et encore jusqu’à ce que se soit parfait. Résultat, il carve mieux que la moitié d’entre-nous. Il prend tellement de plaisir sur sa board que même la session la plus pourrie se transforme en un bon moment de skate. La première fois qu’il a fait un ollie, on pouvait lire sur son visage à quel point il était heureux et toutes les perspectives qui s’ou-

vraient à lui en matière de tricks et d’amusement (mais aussi de sponsors, grosses voitures et boissons énergisantes). L’intérêt dans tout ça, c’est de voir a quel point le plaisir que l’on peut avoir à skater et les souvenirs de nos premiers tricks sont les mêmes que ceux d’un skateur quarantenaire qui claque son premier ollie. Il a convertit l’intégralité de sa famille et les voir débouler à 6 au park vaut le coup d’ oeil. Un jour, alors qu’on skatait ensemble et qu’un gars en roller essayait 2-3 tricks dans la courbe, il vient vers moi et me dit “c’est quand même super moche hein ? On a de la chance d’avoir choisit le skate quand même.” T’as tout compris Rachid, change rien.

J’ai mis de l’ordre à mes cheveux, Un peu plus de noir sur mes yeux Par habitude J’avais oublié simplement Que j’avais deux fois 18 ans.

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SONAR Wheels

On était habitué à voir Bastien MARLIN se construire des spots en béton totalement improbables, le voilà qui se met à faire des roues. Sonar que ça s’appelle, et à priori, ce sera des roues encore plus rondes que les autres, pour rouler plus vite.

Salut Bastien, tu fais Sonar tout seul ou tu as tout un tas d'associés et de riches financiers ?

Non je ne fais pas ça tout seul. On est deux, avec David de Dirtyfrench skateboards.Par contre on n'a pas prévu d'être côtés en bourse pour le moment.

SKATE THE WORLD De Jonathan Mehring

Si on nous avait dit qu’un jour, National Geographic sortirait un bouquin sur le skateboard, on n’y aurait pas cru. C’est limite gênant d’ailleurs. Bien sûr, c’est génial qu’une telle institution s’intéresse au skateboard au point de publier un livre sur le sujet, mais en même temps, on n’en demandait pas tant. Le beau Jonathan Mehring aurait tapé dans l’œil d’une directrice artistique de Nat-Geo qui aurait subitement eu très envie de publier ses photos et plus si affinités, que cela ne m’étonnerait pas des masses. Là où ils ont été bons, par contre, c’est que si Mehring signe la majorité des photos, il y a aussi une bonne vingtaine de photographes qui ont contribué à apporter encore plus de diversité à ce bouquin. Mehring est très bon hein, n’allez pas me faire dire ce que je n’ai pas dit. Ses photos sont absolument folles, mais il a eu l’intelligence de faire appel à d’autres photographes pour que ce livre soit encore plus complet. Alors bien sûr, ils se sont sentis obligés d’avoir une préface de Tony Hawk pour pouvoir mettre son nom en grosses lettres sur la couverture et on se retrouve pour le coup avec un texte tout pourri de propagande pour les Jeux Olympiques… Notons aussi que les photos sont pratiquement toutes recadrées à cause du format du bouquin qui n’est pas homothétique au format 24x36. C’est un peu dommage donc, mais ça a toujours de la gueule. Et puis merde, c’est un bouquin National Geographic sur le skateboard ! C’est dingue quand même !

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© Bastien Regeste Qu'est-ce qui t'as décidé à te lancer dans ce type de business ?

J'ai toujours eu envie de faire un truc dans le skate, me lancer seul me faisait un peu peur, à deux ça rassure davantage et c'est plus facile. Pourquoi une marque de roues plutôt que des boards ?

J’accorde beaucoup d’importance au choix de mes propres roues, j'ai souvent du mal à trouver ce que je veux. Maintenant le problème est résolu. Est-ce que tu as volontairement choisi un nom qui ressemble à Soma pour mettre toutes les chances de ton côté ?

Ah ah, ton analyse est bonne, mais si tu regardes bien, il y a le début de Soma et la fin de Sugar, comme ça on double la mise !

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Sam PARTAIX Fs Invert ZARAUTZ, PAYS-BASQUE

© Vincent COUPEAU

« Le sexe, la violence et le terrorisme devraient être interdits »

Vladimir POUTINE


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