NUMÉRO QUARANTE SIX / Piraterie et troisième reich
La Double de bienvenue
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Amiel Kornicki O l l i e u p t o F i v e - O - AT H È N E S © C l é m e n t C h o u l e u r.
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Ours
NUMÉRO QUARANTE SIX décembre 2016 - janvier - février 2017
Ceci n’est pas un message aux gens qui nous permettent d’imprimer ce magazine. Ceci n’est que Steve Mallet et son pop légendaire de passage à Rennes.© Clément Harpillard.
PHOTOGRAPHES
& rédacteurs Directeur de la publication
Fred DEMARD 06 14 24 33 94 fred@somaskate.com
Graphisme
Seb JOLY Publicité
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Photographe familier, limite vulgaire
Loïc « LB » BENOIT
ILLUSTRATEUR : Morgan Navarro Imprimé en France chez : IMPRIMERIE DES DEUX-PONTS
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SOMA est édité par LES ÉDITIONS DU GARAGE SARL 13, rue de L’Isère 38000 GRENOBLE ISNN : 1959-2450 fred@somaskate.com
Fabien Ponsero Olivier Chassignole ! Clément Harpillard Clément Le Gall Clément Chouleur Fred Ferand Keijo Leppälä David Manaud Loïc Benoit Clément Le Gall Clément Chouleur Fred Ferand Guillaume Dalonneau Florent Mirtain
Toute reproduction, même partielle, du contenu de ce magazine est strictement interd… Oh et puis non, allez-y, reproduisez tout ce que vous voulez, comme bon vous semble, photos, textes, logos… Photocopiez, numérisez, détournez, repostez avec le mot-clé #makesomagreatagain, foncez, on s’en tamponne totalement ! Nous n’engagerons aucune poursuite judiciaire envers qui que ce soit, vous pouvez nous faire confiance, on n’est pas très procéduriers chez Soma.
Sommaire
NUMÉRO QUARANTE SIX décembre 2016 - janvier - février 2017
INTRO
SHUT UP AND SKATE
GUILLAUME MOCQUIN !
C’est toujours une bonne idée de commencer un mag en s’accusant d’anti-sémitisme.
Quand tu vas à Séoul avec Vans faire un article pour Free et qu’il te reste plein de bonnes photos.
Guillaume a complètement vrillé, il vit sur un yacht de luxe et il fait du monoski dans le bowl du prado.
P.12
P.34
P.60
ATTAQUE DE BUNKER
DIX CHOSES SUR CLICHÉ
L’MATOS Cliché skateboards : une petite marque qui va cartonner !
P.14
Saviez-vous que « Blockhaus » en allemand c’est juste un mignon chalet en bois ?
P.42
Cliché c’est fini. Vivement la suite.
P.64
CRAYON
MEGALOS STITHOS
XEM SKATERS
Le dessin ridicule de Morgan Navarro : Tout est dans le titre
Le nom de cet article passe nettement mieux en grec qu’en français.
Pas le genre de zine auquel vous êtes habitué(e)s
P.18
P.46
P.68
À LA DÉRIVE
CECI N’EST PAS UNE PIPE
LA LETTRE À CHRISTIAN DIOR
Le plus gros full pipe de France !
La rencontre de Jeremy Klein et d’une brique à la mode.
P.56
P.72
Un Tour de skate en voilier, c’est pas tous les jours…
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P.20
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LE VRAC « C’était mieux avant »… Quand Cliché était toujours là et que Jérémie Daclin faisait la couv’ de l’ancêtre de Soma avec les moyens du board, sans photoshop.© Olivier Chassignole ! (circa 2004).
La réponse de Jérémie Grynblat, coach de l’extrème et les conseils santé de Flo Mirtain.
P.74
L’intro
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L’intro
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SPOTS MALSAINS
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i vous lisez cette intro, il y a fort à parier que vous fassiez partie de ces hurluberlus qui ne se contentent pas de regarder les images et qui lisent effectivement les textes dans les magazines. J’en connais qui lisent tout, même les pages matos, même les pubs, eux, je dois admettre qu’ils me font un peu peur (et j’en fais partie). Il se peut aussi vous ne lisiez QUE l’intro, avant de retourner sur Instagram comme tout le monde, c’est plus probable d’ailleurs, mais on va faire comme si vous étiez un bon lecteur et à ce titre, il se peut que vous remarquiez que dans ce numéro 46, il est fait référence à trois reprises, dans trois articles différents, aux grands travaux entrepris par l’armée Allemande pendant la seconde guerre mondiale. Faire trois fois allusion à la grandeur du troisième Reich dans le même magazine, ça n’est pas banal et j’admets que ça peut amener certains à se poser quelques questions légitimes sur notre compte. Vous remarquerez par ailleurs, qu’il n’y a que très peu de skateurs d’obédience judaïque dans Soma. Alors, sommes-nous réellement de dangereux psychopathes néo-nazis ? Ou sommes nous simplement intéressés par les spots de skate atypiques, quitte à puiser dans le catalogue des constructions nazies ? On va laisser planer le doute pour l’instant, mais restez tout de même vigilants et n’hésitez pas à prévenir directement le CRIF en cas de récidive. FD
L’matos
l’matos « LE SKATE C’EST LA LIBERTÉ, Y’A PAS DE RÈGLES… » HA HA HA, FOUTAISES ! SI T’AS PAS LE T-SHIRT QUI VA BIEN, LA BOARD QU’IL FAUT OU LES CHAUSSURES DU MOMENT, T’ES MORT MON P’TIT GARS ! 1
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# Boards 1 Cliché « Jan Kliewer » (2001) par Fernando Elvira. 2 Cliché « Frères Lumière » (2007) par Mark Gonzales. 3
Cliché « Charles Collet » (2009) par Brabs.
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Cliché « Jenkem » (2015) par Sean Cliver.
5 Element « Zygote » l’origine du monde vue de l’intérieur.
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6 Antiz « Dollin guest board » Je ne sais pas qui est le mec en photo, mais il a pas l’air en forme . 7 Collapse « Summer » supplique pour être enterré à la plage (d’Hossegor). 8 SK8DLX « Disk series » après les VHS New-Yorkaises, voici les disquettes Allemandes.
# Chaussures 9 DC Shoes « Astor S » une semelle en direct des nineties, selon toute logique, ça devrait cartonner en 2017. 10 Etnies « Jameson 2 ECO » matériaux recyclés, un arbre planté par paire achetée, à vous de jouer les babos !
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11 Globe « The Eagle SG Charles Collet colorway » celle-là elle fait drôlement plaisir ! 12 Nike SB « Janoski Hyperfeel XT » il paraît que « Janoski » serait en fait le nom d’un skateboarder, pas sûr, c’est chelou comme nom quand même.
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L’matos
l’matos # Chaussures
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13 Supra « Cuba » Fidel aurait adoré, pour mettre avec son survet’ Adidas. 14 Vans « Salman Agah reissue » pour tenter de se réapproprier un peu le toecap. 16
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# Wear etc 15 Tish « HUF x Peanuts » pour philosopher avec Snoopy et Charlie Brown. 16 Veste Volcom x Anti-Hero pour se prendre pour Daan Van Pfannerinden. 17 RVCA « Skull teller » pour cacher vos bras full-tattoo ! 18 Nixon « Time teller » même pas connectée.
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19 Dakine « Party Bucket » si vous voulez faire plaisir à Covo….
20 Veste Magenta bi-goût équipée d'un dispositif anti-pluie aussi appelé capuche.. 21 Veste « Carhartt wip x Isle skateboards » difficile d’être plus fitté que ça.
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T O U R E N V O I L I E R , C ’ E S T P A S T O U S L E S J O U R S … Par Loïc Benoit.
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l est assez rare qu’on te propose d’embarquer sur un voilier pour aller faire du skate. Peut-être que vous, ça vous arrive tout le temps, mais personnellement, avant que Max, un des deux gérants du shop Nantais « À la bonne planchette », ne m’invite à le rejoindre au large des côtes de Bretagne et de Charente, je n’avais jamais osé imaginer pareille chose. Pourtant, c’est pas pour me vanter, mais j’ai un peu bourlingué dans ma petite vie. Je suis notamment allé skater dans le Sahara à bord d’un gros camion de rallye, je possède une tente Quechua et j’ai même vécu à Grenoble, c’est dire si rien ne m’effraie, mais le coup du skate trip en voilier, c’était vraiment une grande première.
La base sous-marine de Saint-Nazaire est un endroit charmant.
Construite par l’Allemagne nazie en 1941, elle permettait à l’armée du 3ème Reich de mettre à l’abri ses sous-marins (sous un toit en béton armé de 8 mètres d’épaisseur). Aujourd’hui, ce même toit offre un point de vue imprenable sur l'estuaire de la Loire, le pont de Saint-Nazaire et les chantiers de l'Atlantique. Bref, c’est très chouette et c’est là que nous avions rendez-vous, fin septembre, avec les gars de « À la bonne Planchette » pour embarquer à bord des deux monocoques sitôt que le vent soufflera (on repartira tin tin tin…). Nous étions entre onze et treize selon les jours et tout le monde ne se connaissait pas. Il y avait les gars du shop, leurs potes, leurs
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à la dérive
riders, et même un invité « prestigieux ». Tous des caractères bien trempés, soit passionnés de skate, soit de voile, ou encore des deux. Je ne vais pas citer tout le monde, mais les skateurs étaient Max Nicolas, organisateur et capitaine du « Soleolis », Adrien Chatellier, Jo Dezecot, Jeremy Garcia et le guest de luxe, Oscar Candon : un super barreur selon « Tripman », skateur lui aussi, sacré luron, homme à tout faire pour le compte d’une compagnie de location de voiliers, et capitaine du « Jacanah 3 ». Les autres on n’en parle pas, mais ils étaient sympas quand même, du coup on n’a jeté personne aux requins. À la base, je connaissais seulement Oscar et Jérémie, et un petit peu Max, c’était donc une semaine riche en découvertes pour ma part, à tous les niveaux. « J'ai eu si mal au cœur, sur la mer en furie, qu'j'ai vomi mon quatre-heures, et mon minuit aussi… » disait la chanson, et il faut reconnaître qu’un monocoque ça secoue bigrement. Je pensais pourtant avoir le pied marin, j’ai même bossé sur des catamarans dans une autre vie (rapport à que j’suis un baroudeur) mais je dois avouer qu’à plusieurs reprises je me suis dit qu’on allait chavirer. En plein vent, l’inclinaison d’un monocoque est vraiment impressionnante. Bref, j’ai pas trop fait le mariolle. Un peu moins que d’habitude en tout cas…
L E
P É R I P L E
Un voilier au départ de St-Gilles-Croix-De-Vie et du Golfe du Morbihan
pour l’autre, des retrouvailles à Hoëdic et un réel départ au grand complet depuis Saint Nazaire. Ensuite, nous avons pris le large pour L’île D’Yeu, puis Les Sables D’Olonne et enfin La Rochelle. Nous n’avons pratiquement pas utilisé les moteurs des bateaux, tout s’est fait grâce aux voiles et les sessions de skate étaient donc callées sur les prévisions de vent et les marrées. Priorité aux éléments.
L E S
T R A V E R S É E S
C’est long, très long. Si vous pensiez gagner du temps
avec votre voilier en évitant les bouchons des retours de plage, je peux vous dire que vous vous mettez le
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Jérémy Garcia-Zubialde Kickflip SAINT NAZAIRE
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doigt dans l’œil jusqu’au coude. Prenons l’exemple du trajet les Sables d’Olonne/La Rochelle : en voiture il vous faudra une heure et demie et même si vous mettez trois heures à cause du monde sur la route, vous serez toujours arrivés plus tôt que votre pote marin qui fera le trajet en six heures. Mais on ne parle pas ici de rendement, d’efficacité, mais d’évasion, de sentiment d’être seul au monde et tellement petit face à l’immensité de l’océan. Vous auriez dû entendre les cris de joie sur l’autre voilier quand un banc de dauphins est venu pointer le bout de son nez à leur proue. Ils avaient beau être bien au large, à quelques miles, nous avons tout de suite entendu et compris pourquoi ils étaient comme des dingues !
L E
G I G O T
E T
L A
C H E V I L L E
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M A T H I A S
Mathias est skipper, il a l’air d’être un mec en or, un vrai passionné. Une « belle personne »
comme on dit. Je dis bien « à l’air », car je ne l’ai vu que quelques heures…Après s’être démené comme un « as de la chourave » pour nous sortir un gros gigot du Carrefour Market du coin pour pas un rond, le bougre n’a rien trouvé de mieux que de se casser la cheville en skateboard en nous rejoignant au bowl de Saint Nazaire. Et ce, dès le premier jour. On a vu les pompiers passer à toute allure sans nous douter que c’était pour lui… Il s’est fait opérer dans la foulée et nous ne l’avons jamais revu. Merci Mathias et bon rétablissement.
L E S
C O N T R Ô L E S
D O U A N I E R S
En bon vieux teenager attardé, je me disais que je serais tranquille avec
mon pochon de Marie-Jeanne au milieu de l’océan, loin de Nanard le gendarme et Dédé le douanier. C’est donc à ma grande surprise qu’à peine sorti du port de Saint-Nazaire un des deux voiliers s’est vu contrôlé pour nos amis de la douane. « Marins des douanes » qu’il faut dire. Heureusement, les shitos, et moi-même donc, étions tous sur l’autre monocoque, au large, planqués derrière des jumelles. Deux jours plus tard, alors que nous voulions profiter de la côte sauvage de L’île d’Yeu et nous poser dans une crique tranquille, nous sommes tombés proue à proue avec un bateau de guerre estampillé « DOUANES ». Nous
Adrien Chatellier Smith grind LA ROCHELLE
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Jo Dezecot No Comply LA ROCHELLE
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n’avons pas été contrôlé ce coup-ci, mais la morale de cette histoire est qu’on n’est pas plus tranquilles en mer que sur terre. L’an prochain, on essaye le tour en ULM, pour voir.
T O N N E R R E
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B R E S T
!
Loin de moi l’idée de faire l’éloge de l’alcool, juste vous préciser quelques faits. Max, le grand
responsable de cette aventure a eu l’ingénieuse idée de démarcher des partenaires, comme KR3W et Supra, qui ont équipé tous les membres de l’équipage, mais aussi un partenaire un peu plus surprenant : Jameson ! Une belle cargaison de ce breuvage fut donc embarquée à bord et, à chaque mouillage, la cargaison en prenait pour son grade ! Je ne vais pas rentrer dans les détails, mais le port de l’Ile d’Yeu et le « Loire Princess » énorme bateau-mouche pour touristes retraités et bedonnants, arrimé à Saint Nazaire, s’en souviendront ! À consommer donc avec modération.
J O
L ’ H Y P E R A C T I F
Jo Dezecot, jeune père de famille sachant manier la truelle et la bétonnière
comme personne, se plait à se donner beaucoup de mal pour assouvir sa soif de skateboard. Il n’est pas du style à rester les bras croisés en regardant voler les mouettes. Il nous a rejoint le vendredi aux Sables d’Olonne pour passer deux jours avec nous, sur les bateaux, mais aussi et surtout pour skater, bref, il n’était pas venu pour beurrer des toasts. C’était sans compter sur une météo capricieuse… Un des voiliers avait des surfs dans ses cales, alors comme de toute façon, on ne pouvait pas skater, une équipe est partie surfer sous la pluie. Je peux vous dire que Jo est meilleur avec une truelle dans les mains qu’avec un surf sous ses pieds… Le lendemain, la pluie avait cessé alors il a tout donné pour décrocher sa parution dans Soma, mais il y a des jours comme ça, où rien ne se passe comme prévu… Il s’en sortira quand même avec un no comply sur un street bump après avoir essayé de skater frénétiquement la moindre aspérité dans le bitume…
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Adrien Chatellier Nollie BS flip ÎLE D’YEU
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Max Nicolas Boardslide ÎLE D’YEU
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L E
«
R O C K
FA K I E
C H A L L E N G E
»
V S
L ’ É PA U L E
D E
M A R C
Le dernier soir à La Rochelle, surpris par un orage de fin de journée, nous avons trouvé refuge et
réconfort au skate park local le « Rikrak », un super petit lieu vivant grâce a des passionnés… Encore une fois, je ne suis pas là pour faire la promotion de l’alcool, mais le Jameson aidant, un espèce de « rock fakie challenge » s’est mis en place : Tous les marins (skaters ou pas) se sont vu jetés sur le quarter principal pour y faire un rock fakie, le spectacle était à la hauteur, mais comme bien souvent il s’est clôturé dans un cri de douleur. Après une chute de Marco sur l’épaule, il est vite devenu blanc comme neige. Un coca et un anti-douleur plus tard, il a repris le cours normal de sa vie. Il a même remonté son voilier à St-Gilles-Croix-De-Vie, pas seul je vous rassure, et une fois de retour sur la terre ferme, il est allé se faire confirmer aux urgences qu’il s’était bien fracturé l’épaule ! Boire ou rock fakie, il faut choisir. Bon rétablissement aussi Marco.
On a donc cassé deux skippers en une semaine, vu des dauphins et des douaniers de près, rencontré de « belles personnes », et on s’est surtout bien marré. Le bateau n’est définitivement pas le moyen le plus rapide d’aller de spot en spot, mais voilà un périple qu’on n’est pas prêts d’oublier… Ça va être difficile de faire plus original pour le prochain trip. Merci à tous les participants de cette belle aventure humaine, merci à KR3W, Supra et « merci quand même » à Jameson... À refaire !
Max Nicolas FS Rock’n’Roll SAINT NAZAIRE
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Oscar Candon FS Smith stall ÎLE D’YEU
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O S C A R ,
L E
M A R I N
« Oscar Candon, aventurier » ça sonne plutôt bien vous ne trouvez pas ? Et ça semble bien parti… Alors comme ça tu t’es découvert une passion pour la voile ?
Bah c’est un peu le meilleur moyen de transport possible, tu pollues pas, y’a pas de feux rouges, la vue est magnifique et tu te reconnectes un peu à mère nature... Tu en avais déjà fait ?
Non jamais, je m’étais toujours dit que c’était un milieu réservé aux gens riches ha ha … Et en fait, ça ne l’est pas forcément. Tu y es retourné dernièrement je crois.
Oui, je suis retourné passer quelques jours en Bretagne chez Trip-man, cependant, on a eu des conditions de merde pendant le séjour et on n’a pas pu sortir les voiles. On s’est rattrapé en allant pêcher dans le golfe du Morbihan et en visitant les îles à bateau à moteur... Tu envisagerais de partir à l’aventure sur un bateau quand ta carrière de skateur sera derrière toi ? Je te vois bien finir ta vie aux Marquises, comme Brel…
C’est une possibilité… Je pense que je finirai par acheter un petit bateau un de ces quatre, j’ai d’autres priorités pour l’instant, mais j’y pense assez souvent. Kr3w a financé un peu le trip à ce que j’ai compris, c’était donc toi le chef sur ce tour ?
Exact ! C’était moi le grand chef et j’ai passé l’intégralité du tour dans la cabine du capitaine à manger des huîtres pendant que les autres lavaient le pont ah ah. Le tour de skate en bateau, c’est une vraie bonne idée, ou ça va pour cette fois et il n’y a rien de mieux que le bon vieux Van ?
C’est une vraie bonne idée. À condition de ne pas être pressé... Merci à Max de À La Bonne Planchette d’avoir bien voulu de moi sur ce tour et merci à Trip-man pour sa qualité de formateur et son envie de transmettre son savoir-faire.
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Oscar Candon Axle stall yank-in « Rikrak park » LA ROCHELLE
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# 46 shut up and skate
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FROM SEOUL , WITH LOVE ! Loic BenoiT
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Joseph BIAIS - Anish Kapoor ride.
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Victor PELLEGRIN - FS Nose Grind.
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Val BAUER - FS Panneau Ride.
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Val BAUER - BS 180° Ollie.
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Victor PELLEGRIN - Nollie Flip Drop-in.
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attaque de bunker
ATTAQUE DE BUNKER O U L ’ H I S T O I R E D ’ U N W A L L I E R E N D U P O S S I B L E G R Â C E A U T R O I S I È M E R E I C H
Texte & photos : Clément Le Gall.
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out commence par une banale session au nouveau skatepark de Saint Martin De Seignanx, dans les Landes, en compagnie de mon collègue Jérémie Plisson. Comme à mon habitude, je m’occupe de la partie marteau alors que Jerem, lui, s’entraîne en vue d’une future sélection pour les JO. Le spot est sympa, mais les manganes* et trottinettes qui squattent sur le park nous donnent un peu l’impression d’être en campagne profonde alors que l’on est à quinze minutes à peine de la civilisation. Il faut savoir que le taux d’hipsterisation au mètre carré chez nous, à Biarritz, fait qu’on a tendance à croire qu’on vit dans une grande ville. Malgré cette ambiance chaleureuse, nous décidons de mettre les voiles pour tenter de faire une photo dans un bowl situé à quelques kilomètres.
On s’installe à bord du Kangoo quand soudain c’est l’illumination ! Jerem me parle d’un bump to barre repéré il y a quelque temps, et qui d’après lui serait un spot «à la New Yorkaise ». Sur le papier ça à l’air alléchant mais pour ceux qui connaissent les Landes et le charmant village de Tarnos, il faut quand même beaucoup d’imagination pour faire le rapprochement avec New York… Quelques minutes plus tard nous arrivons devant le spot en question et là, c’est la douche froide. On est en présence d’un bump en goudron bien dégueu qui ne bumpe pas (du verbe « bumper »), une barre qui aurait éventuellement pu être accessible si elle n’avait pas été recouverte par un buisson, et pour couronner le tout, il s’agit de la devanture d’une maison qui doit certainement appartenir à un couple de petits vieux. Étant donné qu’on n’est pas à New York, mais bel et bien dans les Landes on
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* Expression populaire utilisée dans le Sud-Ouest pour définir toute personne qui habite en campagne, dont la passion est le tuning, qui arbore fièrement le mulet et se chausse en Air Max.
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Vidi
“Veni
attaque de bunker
C’est pas grave, la plage est à deux minutes
et si mes souvenirs sont bons, on y trouvera un curb qui tourne situé à proximité des sanitaires. Même si on s’éloigne encore un peu plus du style new-yorkais, on trouvera au moins le moyen d’y faire une photo pour « insta ». Une fois arrivé, je me rends compte finalement
que l’on n’est pas au bon endroit mais tant pis, on peut toujours aller checker l’océan histoire de voir si y’a du swell, maaaan ! Les vagues sont bien au rendezvous, mais ce qui attire le plus
notre attention c’est ce Blockhaus à moitié enfoui dans le sable. De loin, on a l’impression qu’il y a moyen de faire un wallie
sur un truc qui ressemble à une cheminée. On décide alors d’aller jeter un coup d’oeil et une fois devant, l’excitation retombe d’un cran. La dalle est pleine de cracks et l’élan pour le wallie ne fait pas plus de 50cm de large, accompagné d’un vide de plus de deux mètres sur le côté… Je crois d’abord à une blague lorsque Jerem me dit qu'il va chercher sa board, mais il a vraiment l’air sûr de lui. Apparemment avec ses nouvelles Bones en 55 les trous n’ont pas l’air de le gêner plus que ça et dès les premiers essais, je dois bien me rendre à l’évidence, il peut le faire ! Mis à part une belle frayeur sur un hang up qui aurait pu le propulser dans le vide, le wallie est replaqué et roulé jusque dans le sable. Jerem accourt pour inspecter la photo et l’espace d’un instant je le sens un peu déçu. C’est vrai qu’on ne voit rien, que c’est « arti 3000 » mais on s’en fout, de toute façon y’aura la légende pour expliquer ce qu’il se passe sur la photo… S’en suit un retour à la base, chez les Hips-
ters, après ce bel après-midi Landais, qui se terminera en apothéose dans le Kangoo, coincés dans les bouchons. Finalement on se croirait presque en Californie !
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Vici
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décide de tracer histoire de pas se prendre une balle perdue, on ne sait jamais, pour un peu que le papy soit chasseur…
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Megalos Stithos
Amiel Kornicki FS Boardslide.
MEGALOS STITHOS Texte & photos: Clément CHOULEUR.
A
près un coup d’essai à Madrid qui leur avait déjà valu un article dans Soma il y a quelques mois, c’est à Athènes que les gars de Tealer ont décidé d’aller claquer le reste du budget marketing. Plus que vingt-six étapes et ils auront enfin bouclé leur tour de l’Union Européenne par les capitales. À raison de deux articles par an, vous pourrez donc voir les photos du point final de cette épopée dans le Soma de novembre 2019. Clément Chouleur, grand reporter au grand cœur, doté d’une résistance à l’alcool hors norme, a documenté les frasques de cette bande de sauvageons au pays des Cyclades. Son récit est évidemment accablant et fait froid dans le dos. Jugez vous-même :
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Cette idée lumineuse de partir à Athènes, comme tout le monde, a éclos lors d’une soirée un poil trop arrosée dans un salon professionnel
à Berlin, le Bright. Pour ceux qui ne connaissent pas encore, c’est comme le Mondial de l’Auto, mais en totalement différent. Au détour d’une conversation avec Gorka De France, team manager chez Tealer de son état, il me confia qu’un dernier petit trip avant l’hiver serait de bon augure et il évoqua d’emblée la Grèce. Sur le moment je me suis dit que c’était une idée de génie, l’Acropole, le ouzo, les gyros, le syrtaki, la crise… Autant de nouveautés à découvrir et puis de toute façon, j’allais pas faire semblant d’hésiter, dès qu’il y a un billet d’avion à gratter, je réponds toujours présent ! Oui mais voilà, la Grèce et Athènes en particulier, c’est du vu et revu. Toutes les grandes écuries du skate-game y sont déjà allées pour vendre leur camelote et surtout, les spots ont déjà été salement amochés, et par des meilleurs que nous... Autant vous dire que pour vendre un article à un magazine, c’était pas gagné. À moins que la marque en question leur prenne
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en trouver ! ». On se serait cru à Paris tellement les gars avaient envie de nous aider… À force de tourner, on a fini par trouver LA chill plaza avec ses ledges parfaits, une légère pente histoire d’aller aussi vite que dans les vidéos, les locaux qui tirent la gueule, bref, tout y était. Mais elle s’est vite transformée en place maudite pour Gorka, car même en y revenant pluL’équipe d’athlètes dépêchée sur place compresieurs fois, quand une ligne ne veut pas passer, nait Amiel Kornicki, Max Renaud, Samuel elle ne veut pas ! Dans ces cas-là, il nous restait Vroman et Gorka De France pour la partie casle Kebab en bas de cade, ainsi que ce la maison, idéal drôle d’énergumène de Kamel « F A S H I O N F A U X - P A S P O U R pour guérir nos frustrations. Nous Gondry à la vidéo et moi-même ici L E S A N C I E N S , S U M M U M D U avions aussi ce petit rituel qui consistait présent à la photoF I T T I N G À L A P O I N T E P O U R à mettre la chanson graphie. de David Zowie Je n’avais jamais eu l’occasion de L E S J E U N E S , J E N E M E R I S - « House every weekend » à fond. voyager avec ces lascars, mi-cham- Q U E R A I S P A S À P O R T E R U N Ça commençait le matin pour réveilpions, mi-voyous, mais je n’ai pas mis J U G E M E N T I C I , M A I S S A C H E Z ler tout le monde, puis dès qu’il fallait longtemps à me motiver les troupes, sentir à l’aise avec EN TOUT CAS QU’IL EN jusqu’au soir. Une eux. Déjà dans l’avion, les vannes P R E N A I T P O U R S O N G R A D E sorte d’hymne, indispensable lors fusaient et tout le d’un tour, mais j’y monde y a eu droit, T O U S L E S M AT I N S ! » reviendrai plus ce qui est plutôt tard… bon signe. Un trajet en train fraudé allègrement et une petite escroquerie au propriétaire du Airbnb plus tard Une autre tradition pendant ce tour fut de et nous étions installés dans notre penthouse. commenter les tenues du petit Amiel qui avait Tout excités que nous étions de nous envoler pris toute sa collection de pantalons de pyjamas pour une destination exotique, nous en avions d’extérieur… Il en avait prévu un différent pour oublié le plus important, à savoir la connexion chaque jour de la semaine ! Avec toujours le avec un skater du cru pour nous guider sur les même motif de la marque des joueurs de polo, spots. Un peu naïfs je vous l’accorde, mais il n’y avait que la couleur qui changeait… qu’importe, nous irions au culot. Sauf que ça Fashion faux-pas pour les anciens, summum du n’a pas vraiment payé… Allez trouver des skafitting à la pointe pour les jeunes, je ne me risters partants pour faire le guide ! Nous avons querais pas à porter un jugement ici, mais bien essayé les skateshops, mais il semblerait sachez en tout cas qu’il en prenait pour son qu’ils nous ont pris pour une bande d’enfoirés grade tous les matins ! de touristes. « Allez les gars, z’avez pas un spot à dépanner ? Bah y’en a plein, c’est dur à Après avoir sondé l’interweb, nous avons finaexpliquer, baladez vous, vous finirez bien par lement réussi à établir une liste des endroits
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Max Renaud Ollie.
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de la pub ? Mouais, ça peut aider, mais c’est même pas sûr… Enfin ça, c’était sans compter sur mes talents de persuasions auprès du mec de Soma qui n’a aucune personnalité et à qui je pourrais faire faire n’importe quoi… Il a rien vu venir le mec !
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Gorka De France FS Noseslide from hell
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Sam Vroman Ollie.
Megalos Stithos
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Max Renaud FS Nosegrind.
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incontournables de la ville. C’est le truc qu’on aurait dû faire avant de partir, cependant, après réflexion, on a fini par suivre les conseils du vendeur du skateshop en cherchant les spots au flair. Une technique à l’ancienne certes, mais qui fonctionne à merveille, surtout si vous êtes prêts à pousser à travers la ville, par monts et par vaux, du matin au soir. Mes cuisses s’en rappellent encore, mais ça valait le coup.
irions enflammer le dancefloor. Après nous être fait refuser l’entrée de cinq clubs différents pour cause d’excès de testostérone (et peut-être aussi pour cause de pyjamas Ralph Lauren) nous avons fini par accéder aux joies des établissements de nuit (c’est le moment de googler « megalos stithos »). Sur le retour, en cherchant le métro nous
avons enfin aperçu l’Acropole, de loin et un peu flou mais qu’importe. Alors que la plupart des gens allaient travailler, nous allions gentiment cions à être satisfaits de la tournure que predécuver, broucouilles et heureux. Dans le naient les évènements. Malheureusement pour métro, nous Max, c’est à ce sommes tombés sur moment-là qu’il a dû nous quitter « P A S É V I D E N T L E R Ô L E D E notre maître kebabier favori. Le paupour cause d’exavre ! On s’est sentis men blanc… SéTEAM MANAGER PARFOIS, obligés de le remerquence émotion, cier en chanson high five, câlins et M A I S A U F I N A L , O N É TA I T pour ce qui a le voilà parti en diconstitué 80% de rection de l’aéroTOUS CONTENTS DE LE notre alimentation port. Nous finirions ce tour V O I R R E V E N I R P O U R F I N I R avec le seul mot que nous avions apsans lui… Vous aupris sur place « efriez dû voir la tête C E T O U R AV E C N O U S , S E S kharîsto » (merci). de Gorka quand Il a subi dix mideux heures plus PARENTS UN PEU nutes de voyage tard, il a reçu le avec un remix doucoup de fil du MOINS… » teux du fameux jeune lui annon« House every çant qu’il avait raté weekend » composé de cet unique mot. Un son avion, qui partait… la veille ! Pas évident régal pour les oreilles et un pas-de-géant dans le rôle de team manager parfois, mais au final, les relations diplomatiques franco-grècques. on était tous contents de le voir revenir pour finir ce tour avec nous, ses parents un peu moins… Pour se remettre de cette rude soirée, un day off paraissait adapté, mais finalement, sans même nous en rendre compte, nous sommes Alors que ça sentait la fin et que l’envie de repartis en mission. Ce jour de repos s’est avéré faire la fête à la Grecque devenait pressante, être l’un des plus productif de la semaine, Kamel, notre expert en relations humaines, a prends ça la gueule de bois ! Ils sont comme ça réussi à nous faire croire que c’était son annichez Tealer, efficaces jusqu’au bout. Parfait versaire et qu’il fallait à tout prix fêter ça. Il pour terminer cette belle semaine loin du froid s’était rencardé avec une petite patineuse à rouparisien, merci les gars, on repart quand vous lettes locale qui lui avait indiqué LE spot pour voulez ! sortir. C’était décidé, après la session nous
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Sam Vroman FS flip.
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Au bout de cinq jours sur place, nous commen-
ceci n’est pas un pipe
CECI N’EST
PAS UN
PIPE
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ans ma liste des trucs à faire avant de mourir, il y a le full pipe du « Mont Baldy » et celui qu’on appelle délicatement le « Glory Hole ». Malheureusement, ni l’un, ni l’autre ne se situant dans mon quartier et l’horloge tournant inlassablement, je commence à me dire qu’il est peu probable que j’arrive un jour à carver ces deux monstres.
Alors que j’évoquais justement cette frustration de n’avoir jamais roulé ces spots californiens avec mon pote Steven Monteau (talentueux photographe / designer / vidéaste / skater), voilà qu’il me parle d’un vestige Nazi
p a s trop loin de chez moi, en France, qui me permettrait de me rapprocher de mon doux rêve : Un immense cylindre de béton, construit pendant la seconde guerre mondiale par les Allemands. Ces dimensions n’auraient, selon Steven, rien à envier aux deux autres cités plus tôt et il se pourrait bien qu’il soit skatable... La perspective d’aller y jeter un œil immédiatement est alléchante, mais l’accès au bestiau nécessite un minimum d’organisation et d’après ce que me raconte mon pote, ça n’a pas l’air d’être une partie de plaisir. Bien planqué dans l’enceinte d’un haut lieu historique et interdit au public, il ne faut pas avoir peur de ramper, aimer
© Steven Monteau.
Texte par Fred « le chat noir » Ferand.
défier l’autorité, ne pas être claustrophobe, être courageux... et savoir manier la pelle. Ça tombe bien, je ne dispose d’aucune de ces caractéristiques ! On a alors, d’un commun accord, attendu de
laisser mûrir ce projet avant de nous décider à y faire un tour. Bref, on s’est dégonflé, mais au bout d’un an à en parler, un beau jour, on est enfin allé voir de quoi il en retournait. Ce premier repérage nous a permis d’entrevoir les énormes possibilités qu’offrait le spot, mais il nous a aussi vite fait prendre conscience de la quantité de boulot qui nous attendait avant de pouvoir espérer y faire quelques kickturns. Le pipe est dans l’obscurité totale, il est humide, le béton est dans un piteux état et une bonne cinquantaine de centimètres de fientes de pigeons couvre le sol sur toute la longueur. Pour pelleter cette couche de fientes, nous devons porter des masques car la poussière soulevée est incroyable ! Il nous aura fallu deux sessions de nettoyage pour nous débarrasser en partie de ce tapis moelleux… Lors de notre troisième visite, alors qu’on s’apprêtait à enfin rouler le spot (avec Melvin Abdou Salam qui avait fait le voyage dans le coffre, les yeux bandés), on réalise que les joints sont trop profonds pour rouler dessus et vu la pourriture qui persiste en surface, je préfère ne pas imaginer me prendre une boîte avec le cuir qui frotte sur le sol... La décision est prise de refaire le béton des joints et de boucher quelques trous lors d’une quatrième visite… Passer inaperçus avec tout le matos que nous transportons est de plus en plus difficile. Sac de béton, pelles, lampes, spatules, etc. Mais la mission est un succès. Nous avons réussi à reboucher les trous sur l’une des sections en moins mauvais état. Nous décidons de laisser sécher, en nous disant que la prochaine fois serait la bonne ! À ce momentlà, nous n’avons toujours pas skaté le spot…
content des photos et le soir même, je les envoie au mec de Soma qui me dit que « ouais c’est pas mal, mais je ne suis pas super emballé non plus, vous ne voulez pas y retourner pour être sûr d’avoir la bonne photo ? ». J’hésite donc entre faire bouffer mes flashs à ce Fredd et retourner shooter une nouvelle photo dans ce pipe qui nous donne définitivement bien du fil à retordre… Une énième mission se profile donc à l’horizon. Grâce à David Manaud qui m’a généreusement prêté ses flashs de professionnel, plus rien ne peut plus nous arrêter ! Sauf que ce coup-ci, ce sont nos lumières de chantier qui ne résistent pas à un dégât des eaux chez Steven… On est vraiment poissards ! Petit détour donc chez Kiloutou, et ce coup-ci, c’est absolument sûr : c’est la bonne ! J’ai les pieds dans je ne sais combien de cen-
timètres de plumes de pigeons, Steven filme avec une caméra soviétique, Melvin va vraiment super haut et finalement, ça valait carrément le coup d’y retourner. On se régale dans ce lieu qui est notre Mt Baldy à nous… Baldy-surGaronne. Merci à Steven et Melvin. Putain les souvenirs !
Nouvelle mission, nous rampons à nouveau
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© Steven Monteau.
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sous des grillages avec des tonnes de matos. Ce coup-ci on le skate ! La courbe est vraiment hyper grande, le sol est rugueux, la réparation tient à peu près et skater avec un masque n’est pas chose aisée, mais Melvin au moins, est à la hauteur. Le temps de faire quelques photos, mes flashs décident que ça suffit comme ça et mes deux générateurs pètent coup sur coup ! La malédiction du chat noir… Mais je suis
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Melvvin Abdou Salam FS Air © Fred Ferand.
ceci n’est pas un pipe
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guillaume mocquin vire de bord
GUILLAUME MOCQUIN VIRE DE BORD Texte & photos: Clément CHOULEUR.
e folklore autour de Guillaume Mocquin voudrait nous faire croire qu’après son passage, il ne reste que carnage et désolation… Et… Il faut reconnaître que c’est un peu vrai. Mais c’est plus compliqué que ça. Ce qui est sûr, c’est que son passage dans le monde du skate sponsorisé aura laissé une trace indélébile. On ne va pas l’oublier de sitôt l’animal... Son talent brut sur un skateboard, son caractère tout aussi brut, son approche sans concession de la vie, lui ont permis de se construire au fil des ans une réputation sulfureuse et de défrayer la chronique plus d’une fois. Une vraie rock star le Gui-gui ! Mais, il y a derrière ce masque d’autres facettes à sa personnalité qui ont rarement été mises en avant dans les médias, ou simplement dans les conversations. Guillaume n’est pas qu’un sauvage fou dangereux. C’est aussi quelqu’un de tout à fait fréquentable, sensible même, intelligent, fidèle en amitié et le meilleur moniteur de skate pour enfant qu’il m’ait été donné de voir. Sa « carrière de skateur pro » n’aura pas décollé comme il l’espérait, et comme tout le
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monde autour de lui l’espérait également. Parce qu’il le méritait, mais d’une certaine manière, il mérite aussi d’être passé à côté de son rêve. Il en a usé des team managers et des « mecs du marketing ». Disons, sans rentrer dans les détails, qu’il a tout fait pour se fermer les bonnes portes… Peut-être, sûrement même, que s’il avait su prendre sa place dans le rang, su fermer sa gueule parfois et su mettre de l’eau dans son vin surtout, il aurait pu obtenir ce qu’il désirait, de gagner sa vie confortablement en skatant. Mais il y a deux ans de cela, il s’est finalement retrouvé sans sponsor et au lieu de s’accrocher, il a décidé de passer à tout autre chose. Se trouver un vrai travail, changer de vie. Après s’être essayé à la grande cuisine, il a fini par se dégoter un job de pirate qui lui va à merveille, et quand il remet les pieds sur terre et donc sur son skateboard, entre deux missions en mer, ça fait toujours aussi mal ! Clément Chouleur l’a croisé récemment au bowl de Marseille, ils ont shooté cette séquence improbable et ils ont pris le temps de discuter. FD
guillaume mocquin vire de bord
Monoski spine Tr a n s f e r t
« M A I S R E G A R D E M A I N T E N A N T, J E S U I S H E U R E U X COMME
JAMAIS,
J’AI
UNE
FEMME
EN
OR,
UN
BOULOT PASSIONNANT OU JE PEUX ÉVOLUER TRÈS HAUT ET JE SUIS MON PROPRE SPONSOR ! »
Comment ça va Gui ? Comment se passe ta nouvelle vie en mer ?
Écoute, je vais bien, merci. Ma nouvelle vie en mer ? La vie de pirate quoi, n'ayant pas vu la terre ferme depuis maintenant quelques mois, je pille et je viole tout ce qui ce présente devant ma bite et mon couteau. Non plus sérieusement, j'ai trouvé ma voie. J’ai un emploi du temps chargé l'été, mais je rentre assez souvent chez moi et c'est du luxe pour un marin. Tu peux nous expliquer ce que tu fais exactement ?
Je suis matelot sur des yachts de luxe et, selon les bateaux, j'occupe une place avec plus ou moins de responsabilités. Récemment j’étais sur un Arcadia de 116 pieds, mais j'ai démissionné... Je vais faire du freelance pour l'hiver, plus d'argent et moins d'heures. Mon taff consiste à prendre soin le plus possible du bateau, l’entretien au quotidien, le nettoyage, l’aménagement, les réparations et la manœuvre à la radio car je suis les yeux du capitaine, l’amarrage, faire le service à table, le portier, les « watch » de nuit quand on est à l'ancre et plus encore. Vu comme ça, ça à l’air beaucoup mais c'est l'école de la vie ce job ! Tu avais un projet de restau il parait, qu'en est-il aujourd'hui ?
Non je n’ai jamais eu de projet de restau, mais comme tu le sais, j'avais ouvert un bordel à Cannes, mais vu que c'est moi qui faisais la pute, j’ai décidé de faire mon truc maintenant. (Ndlr : Guillaume fait ici référence, avec ses mots, à un skateshop qu’il avait ouvert avec un associé).
six jours par semaine, deux nuits de « watch » (surveillance). Du coup j'ai trouvé de meilleurs bateaux en freelance pour pouvoir combiner ma chérie, le skate et le snow. Je skate dès que je peux, mais c'est trop peu. Est-ce que tu prends plus de plaisir maintenant, sans pression des sponsors notamment ?
Honnêtement oui, je suis beaucoup plus heureux sans les sponsors ! Ne plus avoir à attendre des salaires médiocres qui tombent parfois des mois après, ne plus avoir à raguasser je ne sais quel team manager pour un morceau de bois ou de caoutchouc, ne plus se faire tailler par je ne sais quel branleur pour qui tu n'es qu'un numéro… Enfin bref, c’est mieux ainsi. Tu es nostalgique de l'époque Element ou tu es content d'être passé à autre chose ?
Nostalgique ? Pourquoi je le serais ? Quand Element m’a viré, j’ai tout perdu, j'étais devenu une loque dépressive à deux doigts de me foutre en l’air ! Mais regarde maintenant, je suis heureux comme jamais, j’ai une femme en or, un boulot passionnant ou je peux évoluer très haut et je suis mon propre sponsor ! Il y'a tellement plus à regarder en allant de l’avant qu’en ressassant le passé ! J’ai cru comprendre que tu avais tout de même un projet en rapport avec le skateboard, est-ce que tu peux nous en parler un petit peu ?
C’est vrai, mais tout ce que je peux te dire pour l’instant c'est que ça va chier !
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Qu’est ce qu'on peut te souhaiter pour la suite ? Ton nouveau job te prend pas mal de temps, est-ce que tu arrives quand même à skater régulièrement ?
De devenir un bon capitaine d'une belle unité et d’être heureux sur ma Méditerranée que j'aime tant.
C’est vrai que nouveau job me prend beaucoup de temps et c'est pour ça que j'ai démissionné de mon bateau d'hiver, c'était un mauvais plan :
Alors on va dire ça, merci Gui !
Merci et que du bonheur à vous aussi.
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10 choses que vous ne saviez pas sur Cliché
10 CHOSES QUE VOUS NE SAVIEZ PAS SUR CLICHÉ Texte : Fredd.
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uand Cliché a pointé le bout de son nez en 1997, ce n’était pas simplement une nouvelle marque sur le marché, c’était un vrai événement. À l’époque, en Europe, on ne créait pas sa marque de boards sur un coup de tête comme aujourd’hui, où alors, ça restait vraiment très confidentiel. Mais là, Cliché se posait dès le départ en vraie marque de skateboard avec des ambitions internationales. L’idée saugrenue de Jérémie Daclin était de donner la possibilité aux skateurs européens de vivre du skateboard sans forcément aller s’installer de l’autre côté de l’Atlantique. C’était totalement nouveau comme façon de voir les choses et surtout très audacieux. Il n’y avait pas d’équivalent. Il y avait bien Deathbox/ Flip en Angleterre, mais ils sont allés s’installer en Californie pour se fondre dans le moule et donc l’enjeu n’était pas le même que de créer quelque chose de 100%
Européen. L’ambition de Cliché était de devenir une réponse européenne à l’industrie complètement Californienne du skateboard. C’était clairement une autre époque et même si on avait envie de prendre Jérémie au sérieux, personne n’imaginait que l’aventure irait si loin. Qui en 1997 aurait imaginé que moins de dix ans plus tard, Cliché serait une des marques les plus influentes du marché et que Transworld leur décernerait même un titre de meilleur team de l’année (en 2005) ? Et qui aurait imaginé que presque vingt ans plus tard le monde du skate serait abasourdi d’apprendre que la marque s’arrête ? Parce que c’est ce qui est en train de se passer, comme pour bien enfoncer le couteau dans une année déjà affreusement merdique, Cliché n’est plus. Pourquoi ? Comment ? Toutes les réponses se trouvent dans cette liste des « 10 choses que vous ne saviez pas sur Cliché » :
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Jérémie Daclin et Roland Gueissaz, deux tiers du team (manque Seb Daurel) en 1997, sur le premier stand Cliché à "Glissexpo" (le salon professionnel dont ils avaient fini par se faire virer comme des malpropres)... On s'était bien marrés ! © Alexis Zavialoff.
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Quand Al Boglio s'y met, ça fait toujours mal... Japan to fakie sur la deuxième mini Cliché, en 2005. © Olivier Chassignole.
Meilleure vente devant les Daewon, Mullen, les gars d’Enjoi, Zero, Blind, Darkstar… Ce qui est dingue, c’est que c’est avec la collab Adidas/Cliché (remake d’une board Alfonzo Rawls dans les années 90) qu’il a eu autant de succès. Trois pauvres bandes blanches sur fond uni… J’aurai pas parié un Kopeck sur cette planche… Evan Smith a failli être dans le team…
… à la place de Daniel Espinoza. Ils avaient le choix entre les deux. Évidemment, chez Cliché, ils aimaient tous la façon dont skatait Evan Smith, parce que bon, c’est Evan Smith… Mais Daniel Espinoza était déjà pote avec Joey Brezinski et d’autres gars du team, donc le choix s’est naturellement porté sur lui. Et puis il skatait incroyablement bien aussi. Mais Evan Smith quand même, ça aurait été dingue… Zered Basset a failli être dans le team…
… à la place de Pete Eldridge. Il leur fallait un skater de la côte Est et les deux étaient dispo. Zered était plus qu’intéressant, mais il était un peu trop gourmand et puis Pete était déjà venu à Lyon, lors d’un trip avec Transworld, il avait déjà rencontré Jérémie, Al (Boglio) et Éric (Frenay), ils s’étaient bien entendu… Cliché, meilleur vendeur chez Nike SB
En 2007, la Nike SB en collaboration avec Cliché a été leur meilleure vente depuis leur introduction dans le skate. C’étaient les débuts de la grande mode des collab’ et ils avaient poussé la promo à fond chacun de leur côté. Et… ça a marché du feu de dieu ! Aujourd’hui, s’il vous reste une paire de « Euro Classic » avec le logo « Europe/tête de mort », il y a moyen que vous fassiez un carton sur eBay ! Billy Rohan, Tom Penny, Arto Saari… Gypsy Queens !
Ils étaient tous chauds-patates de partir en Gypsy tour, et puis quand ça commençait à se préciser, y’avait plus personne. Billy Rohan en premier, puis Tom Penny, puis Arto Saari… Tous avaient finalement un truc de prévu. Au final, les gars de Cliché ont récupéré Fred Gall de justesse et ils n’ont pas été déçus ! Il était à Barça, ils lui ont proposé de venir et c’était parti… Aussi simple que ça. Les premiers jeans Cliché étaient « made in Marseille »
… et ce, bien avant qu’Arnaud Montebourg ne se mette
Jah bless
En presque vingt ans de tour Cliché et des dizaines de frontières passées, jamais la Police ou la Douane n’a trouvé la moindre boulette de shit dans le van. Et pourtant… Jérémie, qui a toujours été aux commandes du van, ne fume pas, mais il a toujours laissé faire les riders parce que la fumée de cannabis ne le dérange pas, au contraire même, il trouve l’odeur plutôt agréable. Jérémie D. employé modèle aux services techniques de la ville.
C’est un secret pour personne que le fameux rail de la Small Place à Lyon, celui qu’on a vu et revu dans les vidéos Cliché, Flip, et des dizaines d’autres, est une création originale des gars de Cliché (et surtout de Jérémie). Il est resté 7 ans avant que la municipalité se rende compte que ce rail n’avait rien à faire là et le retire. Il y a trois ans, Jérémie y est retourné pour fixer un nouveau rail, un peu plus haut, qui rencontre toujours un franc succès. Ce qu’on sait moins, c’est qu’il a aussi essayé de placer un rail sur les quatre marches de HDV, mais sa perceuse et ses bras de rugbyman n’ont jamais réussi à percer le marbre, bien trop dur… On peut toujours voir les débuts des trous en haut des marches. En 2002, Jérémie a posé une plaque à HDV en souvenir d’Hamid Bahri, pilier de la scène skate lyonnaise décédé la même année et qui était un des plus fidèles locaux de la place. Elle est restée 3 ou 4 ans. La renaissance
En octobre dernier, Dwindle distribution s’est retrouvé contraint de se séparer de ses deux dernières acquisitions, Cliché et Zero, qui étaient moins rentables que d’autres marques, moins « pointues », comme Blind ou Darkstar, qui coûtent moins cher en riders et en trips. Et oui, payer les gens et être sans arrêt sur la route coûte cher... Jamie Thomas a donc récupéré Zero et Dwindle a aussi proposé à Al, Jérémie et Éric de racheter la marque pour poursuivre l’aventure de leur côté. Mais les trois ont décliné l’offre. Selon Jérémie, ils ont estimé « qu’au bout de presque vingt ans, Cliché arrivait au terme d’un cycle, qu’il y avait une érosion naturelle du nom et qu’il était temps de partir sur quelque chose de nouveau plutôt que de s’acharner à garder en vie une marque vieillissante. » Il est vrai que le skateboard est entré dans une nouvelle ère, que les « petites » marques prennent le pas sur les « vieux mastodontes » de l’industrie comme Girl/Choco qui malgré tous leurs efforts n’arriveront plus à être aussi « cool » qu’un Quasi ou un Hockey… Aussi, avec Internet, les règles du commerce, du marketing, ont changé et soit tu t’adaptes, soit tu rames… Al Boglio, Jérémie Daclin et Éric Frenay n’ont donc pas dit leur dernier mot et c’est chouette de les voir toujours motivés pour faire bouger les choses. Une nouvelle phase commence pour eux et on a hâte de voir ce que ça donne. Pour citer Jérémie encore : « Quitte à se faire chier, on voulait partir sur un truc neuf, indépendant, qui fonctionne sur le principe du collectif. On veut impliquer les riders, qu’ils aient des parts dans la boîte ». Si vous voulez notre avis, ça part plutôt bien leur bordel…
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Lucas Puig a été le plus gros vendeur de boards chez Dwindle en 2014
à la marinière… Jérémie descendait avec son vieux 4x4 et il allait à l’usine aider à découper la toile, coudre les étiquettes, etc. L’usine appartenait à un vieil Arménien chez qui Jérémie dormait parfois, quand il ne dormait pas dans son 4x4 ou chez un skateur local… En une semaine, c’était bouclé et il remontait avec tout le stock de jeans dans le coffre.
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Son shop, « 50-50 » à Bristol, distribuait déjà Cliché en Angleterre et ça aurait été une bonne recrue pour « Bon Appétit ». Il devait aller en Grèce avec le reste du team, c’était le premier trip pour le filming de la vidéo. Cliché lui avait envoyé ses billets d’avion, c’était plié, tout le monde l’attendait, mais… Il n’est jamais venu et n’a jamais donné d’explication non plus… C’était certainement plus confortable de rester pépère chez Powell plutôt que de filmer une part pour Cliché. Jérémie n’a pas jugé utile de le rappeler après ça.
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Danny Wainwright a failli être dans le team
le zine non-binaire
LE ZINE NON-BINAIRE Texte : Fredd. Photos : Keijo LEPPÄLÄ.
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EM skaters est le zine de Marie Dabbadie. Un zine de skateboard qui respecte à peu près tous les codes du genre à savoir l’utilisation d’une paire de ciseaux, d’un batonnet de colle, d’un besoin de s’exprimer et d’un rapport passionnel à son sujet. Pourtant, Xem skaters n’est pas qu’un simple fanzine de skateboard, mais Marie va vous l’expliquer bien mieux que moi :
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Salut Marie, explique-nous un peu ton parcours depuis la fois où je t’avais croisé à Marseille, ça devait être il y a quatre ou cinq ans. À l'époque tu vivais encore sagement à Bordeaux si je me souviens bien, et tu skatais à bloc…
Salut Fred ! On s’est croisé pendant l’une des étapes de mon voyage en 2013. Je suis parti.e sur la route pendant 6 mois pour shooter des événements de skate incluant les femmes avec pour but de regrouper des photos et des écrits à propos du skate féminin en Europe. Je suis
allé.e à chaque endroit sans billet de retour et je suis resté.e comme bon me semblait. C’était chouette ! Quand je suis arrivé.e à Copenhague pour shooter le CPH Girl Skatecamp, je ne savais même pas où j’étais sur la carte mais je suis tombé.e amoureux.se et j’ai décidé de rester. Depuis, j’ai tenté de me débrouiller comme je pouvais. Je suis devenu.e guide touristique, traductreur.ice freelance, chef dans un restaurant français puis finalement rédacteur.rice web/traductreur.ice à plein temps. En parallèle de ces boulots, j’ai continué à skater, voyager, écrire, créer et
ou de l’art. On n’a pas le temps de s’ennuyer mais ce n’est jamais trop. Au niveau du skate, il y a des événements toute l’année et des skateparks qui poussent aux alentours tous les mois. C’est assez dingue. Et la ville est vraiment agréable à skater. Malmö est une ville ouverte et respectueuse portée par une culture alternative et progressiste. Parlons de ton fanzine, explique-nous le nom « XEM skaters », son concept et ce qui t’as motivé à le faire. “Xem” est un pronom de genre neutre utilisé
Marie Dabbadie - Layback Grind - CPH
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La vie à Malmö est plutôt tranquille. Il se passe plein de choses tout le temps que ce soit au niveau de la musique, de l’activisme, du skate
J’ai créé ce zine dans un contexte d’urgence. J’étais invité.e à exposer à Londres à Parlour Skateshop pour l’exposition Fellowship avec des photographes féminines sur le sujet de la communauté. J’aurais pu sortir des photos qui dormaient dans mon disque dur et les exposer mais j’ai décidé de parler d’un nouveau sujet et plus précisément un sujet qui me touche : les
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Comment se passe la vie à Malmö, cette ville où le skate est devenu presque institutionnel ?
en amérique. En français ça pourrait donner “yel” comme alternative de “il” ou “elle”. J’ai choisi le nom au dernier moment, je n’en suis pas satisfait.e à 100% mais au final ce n’est pas vraiment le nom qui compte mais bien le contenu du zine.
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prendre des photos. Cette année j’ai été représenté.e dans trois expositions (Australie, Royaume-Uni et Suède), je prépare d’autres expositions et projets et je travaille en continu sur Xem Skaters. Je déménage à Berlin pour trois mois à partir de Novembre pour changer un peu d’air et travailler sur différents sujets.
le zine non-binaire
skaters non-binaires et queer (explications dans la prochaine question). J’ai commencé par photographier deux des mes ami.es, Leio et Em. Les photos sont déjà percutantes en ellesmêmes mais je voulais en dire plus. C’est comme ça que j’ai décidé de passer à un format plus explicatif et qui me ressemble: le zine. Ensuite, j’ai écris un appel à candidatures clair et précis que j’ai transféré au réseaux de skateurs.ses. activistes pertinents puis j’ai commencé à recevoir des photos, des histoires, etc. J’ai aussi directement contacté des gens pour des interviews et puis les reste s’est fait sur le tas. Le zine est né un mois plus tard, une semaine avant l’exposition à Londres. À ce jour, j’ai imprimé 250 copies et il ne m’en reste plus qu’une dizaine. Tu penses qu’il y a un tabou dans le skate autour des « genderqueers » ? (comment on dit « genderqueer » en français ?)
Je ne pense pas qu’il y ait de réel tabou, juste un manque d’information et de visibilité. Genderqueer pourrait être traduit par ‘nonbinaire’. Une personne non-binaire est une personne qui se considère ni exclusivement homme, ni exclusivement femme et qui vit donc le genre en dehors des schémas traditionnels. Tu peux trouver une liste de définitions variées sur mon tumblr ou dans mon zine. J’aimerais que le skateboard attire plus de personnes non-binaires, transexuelles et queers. J’espère briser certains clichés et à prioris tout en offrant un espace de construction individuelle plus libre dans le skateboard en donnant de l’espace à ces personnes. Le lexique qu’il y a dans le fanzine est ce qui m’a le plus interloqué. Je ne soupçonnais pas une telle profusion de termes (« Situational Genderfluid », « Pangender », « Boi », « Demiboy », « Agender »…). Rassure-moi, toi non plus tu ne connaissais pas toutes ces subtilités avant de faire ce fanzine, si ?
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J’en ai découvert beaucoup on rédigeant le zine mais j’en connaissais déjà pas mal. Je me considère moi-même comme ‘genderfluid’ et
non-binaire et c’est un sujet sur lequel je me suis penché.e de plus en plus ces deux dernières années. Tu as évoqué une anecdote l’autre jour, si je me souviens bien, un site avait utilisé une photo de toi avec une légende qui disait je crois « this girl rips » et tu leur as demandé de changer le « this girl » par « this skater », ou quelque chose comme ça. Re-raconte nous ça s’il te plait…
Un magazine a publié une photo de moi sur instagram avec la légende “this girl rips”. J’ai simplement demandé au magazine de supprimer “this girl” en leur expliquant pourquoi cela me dérangeait. Je n’ai pas envie que les gens identifient ma façon de skater ou mon style à une fille. S’ils aiment la photo, le trick et la personne, un nom suffit, il n’y pas besoin de rajouter le genre, cela n’a rien à voir avec mon identité en tant que skateur.se. Le magazine a édité la légende, l’histoire s’est bien terminée.
Quand sort le prochain numéro de XEM skaters ? Comment peut-on se le procurer ?
J’ai lancé un appel à candidature le 9 septembre et j’ai plusieurs interviews sympas en cours. Je pense avoir terminé de tout rassembler et imprimé le zine vers la fin de l’année 2016 !
Pour se le procurer, il suffit de m’écrire à xemskaters@gmail.com ou de visiter xemskaters.tumblr.com pour voir si j’ai des ‘ambassadeurs’ dans le coin. Le zine est gratuit mais j’invite chaque personne à faire des donations s’ils veulent/peuvent pour couvrir les coûts d’impression et d’envoi.
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M a r i e D a b b a d i e - Te x a s P l a n t - C P H
La Lettre
LA LETTRE . . . À
C H R I S T I A N
D I O R - J A D O R E
Cher Christian, s’il te plaît, laisse-nous tranquille.
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Ne fais pas l’innocent, tu vois très bien de quoi je veux parler : ta vidéo là, pour présenter la collection spring 2017, créée par Larry Clark avec de jeunes mannequins arrogants qui se promènent au Dôme en mocassins en peau d’éléphant albinos, entourés de skateurs. Déjà, j’ai jamais trop aimé les springs, je trouve ça trop vulgaire. On ne veut pas non plus de tes chemises à 500€, on a déjà du mal à se payer des briques SUPREME à 30€. Et puis entre nous, quel nom à la con t’as pris pour ta marque ! Prends exemple sur les autres : Ralph Lauren, Tommy Hilfiger, Golden Grahams, M et M’s… Ça c’est des noms qui sentent bon la rue et le petit-déjeuner ! D’autant plus que tu fais parti de la holding LVMH détenue par Bernard Arnault. Sache que je me suis toujours méfié des gens qui ont un prénom comme nom de famille. C’est une solution de facilité, regarde Mireille Mathieu, Patrick Sébastien, Loïc Benoit…. Qui peut faire confiance à ces gens-là ? Ce n’est pas en embauchant Larry Clark que tu auras notre estime mais en habillant gratuitement les SDF, les migrants et les chanteuses du Hellfest. Les seules fois où on a toléré la haute couture dans le skate, c’ est la part de Heath Kirchart et Jeremy Klein dans la The End et le jour où on a offert une cravache Louis Vuitton pour l’ anniversaire de Loïc. Laisse-nous tranquille Christian, on a déjà assez de soucis avec les marques de sportswear qui nous envahissent, la préparation des J.O., on doit apprendre à Justin Bieber à ne pas sauter pieds joints sur sa board dans une courbe, on doit fêter la victoire de Trump et préparer celle de Nabilla en France. On ne va pas pouvoir tout gérer ! Et puis, avec tes conneries, tu risques encore de donner des idées à Alex Olson ! J’ai lu que tu aimais beaucoup les roses, et bien inspiretoi de la vidéo Rosebud avec comme mannequins Charles Collet (coiffé par Julien Doré), Joseph Biais (coiffé par Jackie Sardou) et Vincent Coupeau (coiffé par Francis Lalanne). Le tout produit par Ludo Azemar (coiffé par on
sait pas c’est qui mais wallah si on l’attrape on lui fait bouffer son sèche-cheveux) sur une musique à faire chialer Karl Lagerfeld. Inspire-toi de cette tranche de vie, de skate. Pas question de mode ici, juste du skate avec des pantalons troués et des t-shirts sales. Fais vider les bassins de la Tour Eiffel plutôt que d’ organiser des défilés au Tennis Club de Paris avec des modules de skate en décor. On n’ a pas besoin de pub, on n’ a pas besoin de mode, on a juste besoin de s’inspirer de personnes classes et élégantes que ce soit Brian Anderson ou Léonard Cohen. P.S.: Je viens juste de me rendre compte que tu n’es plus de ce monde et que tu n’y es pour rien dans tout ça ! Alors, oublie cette lettre et amuse-toi bien de l’autre côté, avec Lemmy, Bowie et Prince, tu ne devrais pas t’ennuyer avec eux niveau costumes. Nous on va essayer de vivre avec tous ces crétins élus et bien décidés à vivre le plus longtemps le plus possible…
GUIllaume D.
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LE DROIT DE RÉPONSE Av e c J é r é m i e G r y n b l a t , m a n a g e r d e s t a r.
Il y a quelques mois, l’émission d’information politique de glisse de France O « Riding Zone » nous a bien fait marrer en diffusant un reportage fort en émotions sur Aurélien Giraud, jeune espoir du skate français, médaillable potentiel aux nœuds Olympiques et grand collectionneur de maillots de foot en tissu respirant. À part finir de le faire passer pour un demeuré (ce qu’il n’est sûrement pas), on n’a pas appris grand chose sur le jeune sportif prometteur. Par contre, la France du fun a découvert avec effroi son agent/manager. Celui qui gère sa carrière, qui lui dit quand boire de l’eau et quel trick faire pour marquer le plus de points. Pour le coup, lui, il passe vraiment pour quelqu’un de totalement insupportable. C’est même assez effrayant. Pourtant, dans la vraie vie, ce Jeremie Grynblat n’est pas l’abruti que l’émission de l’extrême a bien voulu nous faire croire qu’il était. Il est même carrément sympa. Sa vision du skate de haut niveau est à mille million d’années-lumière de la nôtre, mais il n’en reste pas moins quelqu’un de tout à fait fréquentable. C’est pourquoi, après avoir bien ri, nous avons voulu lui poser quelques questions et lui permettre, si possible, de se rattraper un peu. Parce qu’on ne va pas se mentir, et comme il le dit lui-même dans le reportage « ça a buzzé, comme on dit : il a tué le game ! »… Mais vous verrez que ce qu’il raconte est loin d’être inintéressant, et même si on n’est pas obligé d’être d’accord avec lui, il faut reconnaître que son discours tient la route :
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Tu as digéré le reportage de Riding Zone ou tu l’as encore mauvaise ?
Pour être honnête, je ne me suis fort heureusement pas arrêté à ça... On apprend juste de ses erreurs et ma plus grande a été de ne pas avoir eu de droit de regard sur le reportage terminé. C’est sorti du montage samedi soir pour une diffusion le dimanche matin… Là où je l’ai eu mauvaise c’est plutôt par rapport à tout ce qui en a découlé dans le milieu. J’ai eu droit à des insultes de types que je n’ai jamais eu l’occasion de croiser en quinze ans sur les parks, qui se prennent tous pour le nouveau MDV et qui connaissent, selon eux, ce qu’est le « Skateboard ».
Te connaissant un peu, je sais que tu n’es pas le bouffon qu’on voit dans le reportage et je sais très bien qu’il est facile de « piéger » quelqu’un et de faire dire ce qu’on veut aux images, mais tu reconnais quand même que tu y es allé un peu fort non ?
Ce reportage était vraiment destiné à un public « mainstream » et du coup, orienté de telle sorte qu’il soit « compris » de tous. Il ne faut pas oublier que la cible de cette émission c’est le passionné d’« action sport » en général (12 à 35 ans) mais qui ne s’y connaît pas plus que ça. Tu sais, le genre de type d’une trentaine d’années passionné de kite surf ou le kid de 12 ans qui se cherche entre skate, trottinette et BMX… Bref, ces gens-là mêmes qui
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la Street League, ils ont coupé le moment où il vient de lui-même me demander ce que je pensais de tel ou tel trick et c’est ce qu’on a déjà tous fait entre potes durant les contests, sans vraiment s’en rendre compte, "qu’estce que t’en penses de ça…" Sauf que là, ça a été poussé à l’extrême. C’est vrai aussi qu’il est plus facile pour un kid de demander des conseils à un mec qui a un peu plus d’expérience que lui et qui connaît mieux les rouages du truc. Aussi, Aurélien est plutôt timide quand il s’agit de parler de lui, alors c’est vrai qu’ils ont beaucoup entrecoupé de plans où je parle à son sujet. C’est aussi une erreur de ma part. J’ai fait de longues interviews dans lesquelles ils ont pioché les bouts qui les intéressaient sans prendre tous les tenants et aboutissants de la phrase. Mais que veux-tu, ce sont les joies de la télé !
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font vivre les shops et une bonne partie de l’industrie au sens large du terme. J’ai eu une discussion avec certains Team Managers de marques "core skate" dernièrement et on est tous d’accord sur le fait que ce n’est pas le skater qui achète et fait vivre l’industrie mais plutôt le fameux « fan de » que nous adorons mépriser. Alors il faut adapter son axe de communication pour pouvoir aussi bien toucher le « core » que le « mainstream » et ça passe aussi par des canaux de diffusion différents de ce que nous connaissions avant. Voilà aussi pourquoi nous avions accepté de faire ce reportage. Mais, dans notre microcosme « skateboardistique », qui avait déjà regardé cette émission avant ça ? Après, il est évident qu’on peut faire dire ce qu’on veut aux images en mettant l’accent sur certains points plus que sur d’autres… Lorsqu’on me voit donner des «conseils» à Aurélien à
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Av e c J é r é m i e G r y n b l a t , m a n a g e r d e s t a r.
La notion d’agent de skateur me dépasse un peu, peux-tu tenter de me convaincre que le skate a besoin de mecs comme toi ?
ment chier que des types qui ne sont jamais montés sur une board, gèrent « notre » business.
En toute transparence, en France, il n’existe pas d’« agent » de skateurs au sens propre du terme. Le statut d’agent est donné par une licence que te délivre la fédération du sport concerné et pour info, ce statut est très encadré juridiquement par le « code du sport ». Or, pour le skateboard, cela n’existe pas encore, mais on risque d’y arriver un jour avec les JO (le tabou). Par contre, me concernant, il s’agit d’un diplôme de management que j’ai passé et qui me donne du coup un statut de «manager». Mon boulot consiste donc à gérer la carrière des riders avec qui je travaille. C’est exactement ce que fait un Team Manager sauf qu’au lieu de travailler pour une marque, tu bosses pour tes riders. Pour être honnête, on arrive dans une période où de plus en plus d’argent est injecté dans le skateboard et ce serait vraiment stupide que les skateurs n’en profitent pas. Aux US, le business est énorme et tous les gros riders ont un ou plusieurs agents qui gèrent leurs contrats ou leur image. Ryan Clements et ses potes qui bossaient autrefois pour Skatepark of Tampa ont monté TheBoardr depuis quelques années et ils font aussi du management de riders en plus de leur activité d’organisation d’évènement (Vans Park series, Damn AM…). Ils gèrent beaucoup de riders ricains dit « core » mais ça, pas grand monde le sait. Il a toujours été difficile de s’auto évaluer en tant que skateur et quand tu as des marques qui sont prêtes à travailler avec toi il faut savoir ne pas dire oui à tout, tout de suite. C’est pour ça qu’il est intéressant d’avoir un oeil extérieur sur ce que tu vaux vraiment. Aujourd’hui il est plus facile pour un kid de se concentrer sur son skate quand il sait que tout le « back office » (planning, billets d’avions, réactivité avec les TM des différents sponsors, gestion de l’image, paiements…) va être géré correctement dans son dos. Le skate est en train de devenir un business à part entière, qu’on le veuille ou non, maintenant, soit on laisse le train passer et des gens de « l’extérieur » se remplir les poches, soit on décide de prendre les choses en main et que les skateurs puissent avoir ce qu’ils méritent. Attention, je ne dis pas que c’est la meilleure chose, mais c’est comme ça, le skate change alors soit on s’adapte, soit on (les skateurs) ramasse(nt) les miettes. Pour ma part, ça me fait vrai-
Tu es conscient que l’image de sportif de haut niveau d’Aurélien Giraud ne passe pas très bien auprès de certaines personnes (auxquelles nous faisons partie chez Soma d'ailleurs). Tu n'essayes pas de "travailler" là-dessus avec lui ? Dans le reportage, tu as l'air d'en avoir conscience, tu parles d'une "street part"…
Il est vrai que l’image de « sportif de haut niveau » d’Aurélien ne passe pas auprès de nombreuses personnes, notamment chez lui, dans sa propre ville. Ce qu’on revendique le plus dans le skate c’est la notion de liberté, or ce n’est pas du tout le cas car tout est implicitement codifié. (à méditer) Il ne faut pas oublier qu’on a tous commencé le skate pour y trouver du plaisir. Maintenant, lui, il trouve son plaisir dans ce style de skate qu’on lui connaît. Il se régale à skater dans des parks et répéter vingt fois les mêmes tricks. Il ne faut pas croire qu'il s’impose ça comme une sorte d’entraînement. Il kiffe ! Chacun vit son skate à sa manière et chacun a des rêves différents. Pour nous Fred, ce serait sûrement faire une session de pool avec Salba, Mocquin et Benoliel à Salba Land. Celui d’Aurélien est de rentrer un jour sur le tour SLS pro ; alors pourquoi pas ! De mon côté, je ferai tout mon possible pour qu’il y arrive, car c'est un super kid avec un potentiel incroyable et qui, surtout, respire le skate à fond. Malheureusement, pas tout le monde le ressent. Aussi, quand je parle de « code » à respecter, celui d’avoir une vraie street part pour être reconnu de ses pairs est un passage obligatoire dans la carrière d’un skater. Alors oui, Aurélien bosse actuellement sur une street part. Je pense que niveau contest il n’a plus grand chose à prouver et il va maintenant se focaliser sur sa part qui touchera, je l’espère, la scène « core ». Je pense qu’il va en calmer plus d’un quand il montrera qu’il est capable de faire en street tout ce qu’il sait faire en park. Et bien on attend de voir ça alors. C’est pour quand cette part ?
Il n’y a pas vraiment de dead line mais disons que courant 2017 serait un bon moment. Malheureusement, Aurélien a quelques problèmes avec son genou en ce moment alors difficile d’aller se balarguer. Mais ne vous inquitez pas, vous la verrez passer.
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« LA REQUINQUANCE » Par Flo Mirtain, traumatologue/chilleur agréé.
Le skate m’a apporté quasiment toutes les émotions que l’on peut imaginer… De la plus agréable à la plus
pénible, du bonheur le plus intense à la dépression la plus ultime. C’est un peu comme une boucle qui se répète, en un sens, c’est un peu comme la vie tout simplement. Il y a plusieurs étapes, plusieurs phases qui se succèdent, et il est impossible de faire un tour complet
de ces émotions sans encombre. Si vous lisez Soma, j’imagine que cette sensation de plaisir procuré par ce petit bout de bois a déjà volé en éclats à la suite d’une sale chute. Les slams, j’en connais un rayon, je n’ai pas le palmarès de Charles Collet, mais je me débrouille pas trop mal quand même. Récemment, je me suis de nouveau retrouvé hors service, une nouvelle fracture à rajouter à la fiche de mon l’ostéopathe. J’ai l’habitude maintenant, donc quand le rédac’ chef du mag m’a demandé de confectionner un petit texte sur le sujet, il n’a pas fallut longtemps pour savoir ce que j’allais y mettre… Généralement une slam ça ne prévient pas, c’est
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même souvent au moment où tu ne t’y attends pas du tout, un excès de confiance et boum, t’es par terre, cafard… À partir de là, c’est plus ou moins toujours la même routine : - Au début, juste après le drame, la première émotion qui te vient, c’est la colère. D’autant plus, qu’étant assez lucide sur le fait que tout le monde vieillit, et même si tu ne te considères pas encore comme un vieux, une cheville qui craque à 27 ans, ce n’est pas la même qu’à 17. C’est probablement la dixième fois qu’elle tord celle-là, donc instantanément, et ce avant que la douleur ne monte, ce sentiment de rage t’envahit, car dans ta tête défile les prochains mois. Ces mois antiproductifs à l’infini, où console/bédo/ rééducation rythme
tes journées. Avec un peu de malchance, tu réalises qu’on est mi-juin et que le trip à Barcelone, prévu le mois prochain avec tes potes, va être beaucoup moins fun avec des béquilles… Sans parler des remords que tu ressens à l’idée de ce dernier essai que tu n’aurais pas dû tenter… - Ensuite, la douleur va prendre le dessus sur cette petite crise et l’agressivité va faire place à l’appréhension. En somme, tu ne connais pas encore le diagnostique officiel, et tu te dis qu’il faut peut-être aller checker aux Urgences. Y aller directement t’évitera de psychoter inutilement pendant quelques jours à te demander pourquoi ton pied ne dégonfle pas malgré les sacs de petits pois surgelés quotidiens. Au moins là c’est net, t’es fixé, le verdict tombe et t’es bon pour trois mois sans skater… Ce n’est pas trop grave, mais quand même, toutes ces années à matraquer ton corps l’ont rendu plus fragile et la récupération se fait de plus en plus longue… Maintenant que tu sais à quoi t’en tenir, les émotions se suivent. C’est maintenant l’ennui qu’il faut combattre.
Mater des vidéos ou tes potes skater toute la journée n’est pas forcément la meilleure idée. Même si, en effet, cela peut momentanément diminuer ton ennui, il peut également accentuer la frustration de ne pouvoir faire de même. Dans un premier temps, repose ton corps et ton esprit
(pas trop l’esprit non plus hein). Prends le temps de chiller un peu. Ensuite, il faut s’occuper de la rééducation. Avant, ça revenait tout seul, mais maintenant, ça reste un peu raide sans un petit séjour chez le kiné. Et si tu fais ça aussi bien que Lucas Puig, il y a peut-être même moyen que tu reviennes plus fort qu’avant ! Bon ça, il ne faut pas trop compter dessus non plus. Petit à petit, l’optimisme à l’idée de pouvoir skater à nouveau apparaît. La vigilance précédente a permis de retrouver un peu de sérénité. Bon, faut pas non plus se balarguer sur cinq blocs d’entrée de jeu. Mais au moins, t’as pas tout perdu, et ça revient rapidement. Petit à petit, tu retrouves confiance. Et enfin, après avoir subit toutes ces émotions « badantes », tu en reviens à celle qui t’a amené ici en premier lieu… T’es reparti pour un petit moment de fun… Jusqu’au prochain drame. Mais t’es paré maintenant, tu sais à quoi t’attendre.
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À PROPOS DE CETTE COUV’
Mais qu’est ce que c’est que ce truc ? Ça ne saute pas aux yeux, mais cette espèce de masse difforme, ce drôle de plan incliné à bourrelets géants, est le virage relevé d’un vélodrome grecque. Il semblerait que les lattes de bois aient réagi de façon assez inattendue aux assauts du soleil et si les cyclistes n’ont pas dû apprécier de voir leur piste se transformer en champ de bosses, les gars d’Antiz, qui passent décidément beaucoup de temps en Grèce, ont trouvé cette anomalie plutôt à leur goût… Pour fêter son changement d’écurie, de Blaze à Antiz, Victor Pellegrin s’offre donc sa deuxième couv’ de Soma avec un bs tailslide sur un spot absolument génial. Et si vous vous posiez la question ; oui, c’est vraiment ultra balèze d’aller slider là-haut.
CONCOURS DE DESSIN
Pour la petite histoire, Gabriel Engelke a lui aussi fait bs tailslide et sa photo est tout aussi bien que celle de Victor, mais on a fait jouer la préférence nationale… C’est dégueulasse, mais c’est la vie, et puis lui aussi avait déjà fait la couv’ de Soma, celle du tout premier numéro, en 2007.
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© Fabien Ponsero
Comme vous le saviez sûrement, nous avons récemment produit les meilleures chaussettes au monde. Petits bijoux de technologie, développées et tricotées en France dans les ateliers de « Savate skateboard socks », elles ont remporté la plus haute distinction aux mondiaux de la chaussette de luxe, à Chelles en 2016. Ces chaussettes en tout point exceptionnelles, agrémentées d’une magnifique tête de blaireau, symbole du bon goût made in Soma et créée par l’illustrateur réactionnaire Morgan Navarro, sont désormais disponibles en boutique, partout en France et sur l’internet (www.savateskatesocks.com). Vous pouvez aussi en gagner une paire en nous envoyant votre meilleur dessin de blaireau à notre adresse : (Soma – 13 rue de l’Isère – 38000 Grenoble)(sans oublier d’indiquer votre adresse). Les cinq meilleurs dessins seront récompensés, ne passez pas à côté de cette occasion exceptionnelle !
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de blaireaux
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LE LIVRE D’ART Fred Mortagne « Attraper au vol » (2000 – 2015)
P u b l i é p a r U m Ye a h A r t s / I S B N : 9 7 8 - 1 - 9 4 2 8 8 4 - 0 8 - 8 / P r é f a c e p a r A n t o n C o r b i j n / P o s t f a c e p a r G e o f f R o w l e y
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Qu’on le veuille ou non, nous allons bientôt êtres
confrontés au spectacle désolant d’équipes nationales de skateboard s’affrontant au nom des « nobles valeurs » de l’Olympisme. D’un seul coup, le discours du skateboard qui n’est pas un sport mais une forme d’art, va être difficile à tenir devant vos parents. Les écrans de télévisions vont inonder les foyers d’images de sportifs de haut niveau réalisant des prouesses acrobatiques dans leurs équipements à triples bandes ou à virgule. C’est là qu’il sera important de posséder « Attraper
au vol », le livre de Fred Mortagne, un skateboarder qui photographie le skateboard comme un peintre compose sa toile. Qui pense ses photos comme des œuvres d’art et non comme la simple capture d’un exploit sportif. « Regarde papa, c’est ça le skateboard, une forme d’art, plus proche du Jazz et de la peinture que de l’Athlétisme et des commentaires de Nelson Montfort. » Vous n’arriverez à convaincre personne avec ces arguments minables, mais au moins, votre conscience sera soulagée et surtout, vous aurez un magnifique bouquin dans votre collec’.
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Victor « Doobie » PELLEGRIN BS Tailslide LARISSA GRÈCE © Fabien PONSERO
« La mer c’est dégueulasse, les poissons baisent dedans ! »
RENAUD « Dès que le vent soufflera »