Eco des Pays de Savoie - Spécial transmission d'entreprise by Sopreda 2

Supplément dE L’HEBDOMADAIRE ECO DES PAYS DE SAVOIE N°45 du 11 novembre 2011

Transmission d’entreprise

Anticipation la clé du succès

Avis d’experts

La rentabilité est le critère n°1

Pratique

Le casse-tête du prix

Témoignages

Faire évoluer la société, pas la révolutionner

S’engager pour ses clients, agir pour les régions, garder les pieds sur terre. www.lebonsensadelavenir.fr

09/2011 – Édité par Crédit Agricole S.A. – 91-93, bd Pasteur, 75015 Paris – Capital social : 7 493 916 453 e – 784 608 416 RCS Paris.

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ÉDITORIAL

Plus que jamais, transmettre… Transmettre. Voilà un mot qui était passé de mode. Aux yeux de beaucoup, il sentait bon le conservatisme, la frilosité patrimoniale, en des temps de progrès, de nouveauté, depuis que les années 70 avaient célébré l’innovation et la rupture avec les générations précédentes. Qu’avait-on à transmettre puisqu’il convenait de rompre avec le passé et la tradition ? La création d’entreprise était plus noble que la reprise d’une entreprise ! Le créateur était dans la lumière, et le repreneur dans son ombre ! Encourager la relève entrepreneuriale est devenu l’un des enjeux des plus actuels des Pays de Savoie. Pour l’économie savoyarde, il est tout aussi important de s’assurer que les entreprises existantes bénéficient d’une relève qu’il importe de créer de nouvelles entreprises ! Des cédants potentiels restent incertains quant à la transmission de leur entreprise ; ils mettent principalement en avant les difficultés à identifier un repreneur compétent et capable d’assurer financièrement la reprise. D’autres cédants ont d’ores et déjà assuré leur transmission ou sont en voie de la réaliser. Enfin certaines entreprises sont jugées difficilement transmissibles pour des raisons très diverses (situation personnelle du dirigeant, particularité de l’activité ou de la localisation, absence de rentabilité…). Il s’agit d’entreprises dont la disparition pourrait néanmoins représenter la perte de nombreux actifs sur le territoire. Ce constat n’est évidemment pas sans incidence sur le maintien des savoir-faire et de centres de décisions dans les Pays de Savoie, de même que sur la vitalité du tissu économique, des territoires savoyards et de l’emploi. La crise financière et le durcissement de l’accès au crédit ont lourdement pesé ces deux dernières

Bruno Chevallet Directeur des rédactions Directeur du développement b.chevallet@ecosavoie.fr

années sur le marché des transactions (commerce et industrie). Toutefois l’année 2010 et le premier semestre 2011 ont vu le nombre de ces transactions croître sur les deux départements. Indéniablement, il faut saluer la mobilisation de tous les acteurs publics et privés savoyards et régionaux qui ont tous une approche commune, profitable aux cédants, mais aussi aux repreneurs qui trouveront des entreprises plus saines, mieux préparées, tout autant qu’à l’économie savoyarde en général puisqu’elle pourrait permettre de préserver des emplois. État, Région, Départements, chambres consulaires, partenaires sociaux sont dans l’offensive pour accompagner toutes les démarches de transmission. Mais plus encore, les occasions d’offrir des arguments pour doper la motivation à céder et à reprendre, comme des salons, des rencontres, des publications comme celle que vous avez entre les mains doivent se multiplier. Dans la période de turbulence internationale, nous devons redoubler d’efforts pour ne pas laisser filer de véritables opportunités de conforter des dynamiques économiques sur nos territoires. Réussir une transmission d’activités économiques, c’est permettre à l’entreprise de relancer une dynamique de développement avec les nouveaux outils numériques, de conforter une politique de formation et d’optimisations de compétences des salariés, et Éco des Pays de Savoie veut jouer son rôle humblement aux côtés de tous les acteurs !

C e dossier est un supplément gratuit de l’hebdomadaire Eco des Pays de Savoie n°45/1170 du 11 novembre 2011. Ne peut être vendu séparément. Impression Savoy Offset (74) - Édité par SOPREDA 2

transmission d’entreprise - ECO DES PAYS DE SAVOIE n°45

Transmission d’entreprise

La transmission d’une entreprise n’est pas un long fleuve tranquille. Mais avec une longue et soigneuse préparation, cédants et repreneurs y trouveront leur compte. Le cédant doit rendre son entreprise attractive pour en tirer le meilleur prix sans faire fuir les repreneurs potentiels. Or il n’est pas facile de déterminer un prix proche de celui du marché quand l’affectif entre en jeu. Le repreneur doit mener de front la recherche d’une entreprise, le montage de son projet et de son plan de financement. Et soigner son arrivée dans ses nouvelles fonctions. Les dispositifs d’accompagnement sont multiples. Et fortement conseillés. Car l’enjeu d’une transmission réussie, c’est aussi la pérennité de l’entreprise et le maintien de l’emploi sur le territoire. Dossier réalisé par Dorothée Thénot

Anticipation, la clé du succès En 2010, Oséo a accompagné, sur les deux Savoie, plus de 350 reprises d’entreprises (hors transmissions familiales et reprises sur fonds propres). Cela représente une hausse de 30 % par rapport à 2009. «Nous prévoyons une stabilité pour 2011, estime Cyril Gouttenoire, délégué Oséo Rhône-Alpes pour les Pays de Savoie, car traditionnellement beaucoup de cessions interviennent au cours du dernier trimestre. Nous sommes revenus à un niveau d’avant-crise.» En 2010 toujours, 4

ECO DES PAYS DE SAVOIE n°45 - TRANSMISSION D’ENTEPRISE

l’Observatoire de la création d’entreprise de la CCI de Haute-Savoie a enregistré 826 reprises d’entreprises (hors secteur agricole), en hausse de 15 % par rapport à l’année précédente. 6 538 emplois sont concernés. Le maintien de l’emploi sur le territoire est en effet l’un des enjeux majeurs de la transmission d’entreprise. Autre enjeu : le vieillissement de la population dirigeante : 18 % des établissements de Savoie ont un dirigeant de plus de 58 ans, ce qui est légèrement su-

responsable création, développement, transmission d’entreprise, pour nous informer de leurs projets, les renseigner sur les préparations nécessaires à une cession et inciter les plus âgés à se faire répertorier dans le fichier comme vendeurs.» Anticiper l’événement est en effet primordial pour effectuer les modifications fiscales et juridiques nécessaires, et maintenir l’activité et les investissements pour bien valoriser l’entreprise. Pour optimiser la valorisation de son bien, le futur cédant doit présenter une entreprise attirante. «Il faut faire un diagnostic sur ce qui est à toiletter : les écritures comptables, les dettes à solder, les bilans, l’état du fichier clients, établir d’où l’entreprise tire sa richesse, ajoute Bernard Michel, conseiller création, transmission d’entreprise de la Chambre de métiers et de l’artisanat de Haute-Savoie. C’est un travail de présentation de l’entreprise qui peut prendre plusieurs années.» Ce diagnostic permettra au vendeur d’établir pour son entreprise un prix proche de celui du marché. Qu’il parte à la retraite ou change d’orientation professionnelle, le cédant n’a pas toujours une vision objective de son bien. «Un dirigeant est parfois persuadé que son entreprise vaut de l’or, même si sa rémunération est peu élevée, développe Dominique Desbiolles.

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«Un dirigeant est parfois persuadé que son entreprise vaut de l’or.» périeur à la moyenne de la région. Un sur cinq dans l’industrie. Selon tous les experts interrogés, cédants et repreneurs doivent se préparer et se faire accompagner pour renforcer les chances de réussite de la transmission et assurer la pérennité de l’entreprise. Un processus qui peut prendre du temps. Cédants : définir un juste prix L’une des priorités des chambres consulaires est d’informer et de sensibiliser les cédants potentiels. À la Chambre de métiers et de l’artisanat de Savoie, une partie du fichier transmission est composée d’artisans qui veulent vendre leur affaire pour motif de retraite. «Nous contactons tous les ans les dirigeants de plus de 55 ans, explique Dominique Desbiolles,

Cela représente une vie de travail. Mais, si le matériel n’a pas été renouvelé et qu’il n’est pas aux normes, l’acheteur devra faire des investissements.» Le risque d’afficher un prix de vente trop élevé est, par ailleurs, de perdre en visibilité. «Il faut établir un prix économiquement acceptable pour ne pas rebuter les prétendants», confirme Bernard Michel. «Nous aidons les cédants à sortir de l’affectif pour établir une fourchette de prix. Au cédant de mener ensuite la négociation.» Sans compter qu’un prix trop élevé entraîne un emprunt plus élevé pour le repreneur et un risque pour la pérennité de l’entreprise après sa reprise. «Nous sommes très vigilants sur une valorisation excessive qui aboutirait à un montage financier tendu», précise Cyril Gouttenoire, délégué Oséo Rhône-Alpes. transmission d’entreprise - ECO DES PAYS DE SAVOIE n°45

Transmission d’entreprise

Repreneurs : le montage juridique et financier Le repreneur potentiel doit identifier sa cible. Là encore, les avis sont unanimes : anticipation sans précipitation. Les sources pour trouver une affaire à vendre sont multiples. Citons la bourse de la transmission d’Oséo, l’association CRA (Cédants et repreneurs d’affaires), les CCI. Les Chambre de métiers ont mis en place la Bourse régionale des opportunités artisanales (BROA), relais de la BNOA (bourse nationale). Faut-il jeter son dévolu sur un secteur que l’on a déjà pratiqué ? «La réussite d’une transmission repose

avoir un référent technique par rapport à la clientèle et lui donner le temps d’acquérir ces connaissances.» «Si l’entreprise est bien structurée et que les compétences sont présentes, il n’a pas besoin de maîtriser la technicité du métier ciblé», estime Marc de Buttet, directeur du Réseau Entreprendre Savoie. «Il pourra la faire évoluer différemment, voire la redynamiser.» Il faut donc diagnostiquer et auditer l’entreprise : la connaissance technique et la clientèle dépendent-elles de lui exclusivement ? Le savoir-faire et l’historique de l’entreprise disparaîtront-ils lors de son départ ? S’il a délégué à un directeur commercial ou technique, quel âge ont-ils ? Resteront-ils après la reprise ?

«La réussite d’une transmission repose sur l’expérience du repreneur dans le métier et sur le marché visé.» sur l’expérience du repreneur dans le métier et sur le marché visé, estime Cyril Gouttenoire. La compétence métier prime sur la compétence de manager. Dès qu’il s’agit d’un secteur technique, nous déconseillons la reprise si le candidat n’a pas la connaissance du métier.» Pour d’autres, le repreneur peut pallier cette lacune. «Il doit s’entourer de collaborateurs ayant ce savoirfaire, explique Philippe Lansard, administrateur du Réseau Entreprendre Haute-Savoie et dirigeant de Lansard Énergie, ou les embaucher s’il n’y en a pas, pour 6

ECO DES PAYS DE SAVOIE n°45 - TRANSMISSION D’ENTEPRISE

Convaincre les banques La recherche de financement est bien sûr une étape majeure. C’est aussi là que tout peut s’interrompre. En 2011, le Réseau Entreprendre Savoie a distingué 14 lauréats, dont quatre repreneurs : «C’est le plus faible taux de reprise depuis longtemps, insiste Marc de Buttet. Nous avons reçu autant de dossiers que d’habitude, mais beaucoup n’ont pas abouti, faute d’accord entre les parties ou par défaut de financement.» Une reprise mobilise de plus fortes sommes qu’une création d’entreprise, car il y a la clientèle, le matériel, etc. Il faut donc un apport personnel plus élevé et les dossiers qui ne sont pas bons financièrement ne passent

2013

Tour de France de la Transmission d’entreprise

étape de Chambéry mardi 15 novembre 2011 à 17H30

1000 jours »

pour maximiser la valeur de son entreprise en vue d’une cession

2012 2011

Le thème des « 1000 jours » a vocation à revenir sur la « boîte à outils » de la création de valeur dans les 3 à 4 ans qui précèdent la cession effective de l’entreprise. Animée par le directeur de la rédaction du magazine Reprendre & Transmettre en présence de 4 experts et d’un chef d’entreprise ayant « boosté » la valeur de son entreprise dans la dernière ligne droite, cette conférence abordera notamment :

Groupe Formation Entreprise Bâtiment Homère (à côté de la traverse) Savoie Technolac 13 avenue du Lac de Constance 73381 Le Bourget du Lac Cedex

- les principales faiblesses qui entraînent une décote de valeur de l’entreprise - les principaux leviers d’amélioration de la valeur

Programme 17h30 : Accueil des participants 17h50 : Conférence-débat animée par Marc Chamorel 19h30 : Cocktail Pour toute information : Hélène Berthet Moreno tél. : 0 820 22 73 73 (0,09e ttc/min) mail : info@savoie.cci.fr

grenelle de l’environnement - ECO DES PAYS DE SAVOIE n°13

Transmission d’entreprise

Repreneurs, n’y allez pas en solo !

pas. Les conditions d’octroi de crédit sont aussi décrites comme plus sévères depuis la crise. «Les banques sont plus regardantes et financent moins de projets, remarque Marie-Claire Deronzier, conseillère Création Transmission d’entreprise de la Chambre de métiers et de l’artisanat de Haute-Savoie. Normalement, elles requièrent 20 à 25 % d’apport personnel. Elles réclament plus d’engagement personnel aux repreneurs potentiels. Il n’est pas rare qu’elles demandent 30 % pour un technicien, jusqu’à 40 % pour une reconversion.» Pour le candidat, la trilogie expert-comptable/ notaire/avocat est souvent sollicitée pour préparer le dossier à présenter aux banques. Le montage financier doit être économiquement viable : le repreneur doit garder une marge de manœuvre et veiller à conserver la capacité de réinvestir et de supporter une baisse d’activité. Plusieurs choix sont à examiner : rachat du fonds de commerce ou des titres, location-gérance, reprise seul ou avec des associés, quel montage juridique choisir, achat en direct ou via une société. L’entrée en fonction La période de transition entre cédant et repreneur doit être définie par avance et contractualisée. Selon la loi en faveur des PME de 2005, les dirigeants partant à la retraite peuvent signer avec leur repreneur une convention de tutorat. Elle doit être conclue dans les 8

ECO DES PAYS DE SAVOIE n°45 - TRANSMISSION D’ENTEPRISE

Les dispositifs d’accompagnement à la reprise sont nombreux, et peuvent rapporter gros. Les experts interrogés conseillent tous aux repreneurs de ne pas en faire l’économie. Plusieurs organismes prévoient un soutien financier : les Réseaux Entreprendre Savoie et Haute-Savoie et les plateformes Initiative proposent, sous conditions, prêt à taux zéro, prêt d’honneur pour consolider un apport de fonds, garantie de crédit bancaire. Cela peut être un signal auprès des banques et créer un effet de levier pour l’obtention d’un financement. La Région a mis en place un fonds de garantie, IDéclic Transmission, pour les PME de l’artisanat, du commerce, de l’industrie, du tourisme ou des services. En co-garantie avec Oséo, la garantie du prêt bancaire peut s’élever à 70 %. Par ailleurs, l’emprunt bancaire peut être renforcé par le Prate (Prêt en Rhône-Alpes pour la Transmission d’entreprise) d’Oséo, de 10 000 à 240 000 euros, sur 7 ans, dont 2 ans en franchise de capital. Les CCI et les Chambres de métiers ont instauré des dispositifs d’accompagnement personnalisé. «Nous l’aidons à étudier sa cible et à bâtir son plan de développement, explique Éric Barboiron, responsable du service création transmission d’entreprise de la Chambre de métiers et de l’artisanat de Haute-Savoie. Mais il faut aussi évaluer sa capacité à reprendre cette entreprise.» Les plateformes Initiatives, l’association CRA (Cédants et repreneurs d’affaires) et les Réseaux Entreprendre fonctionnent avec un système d’accompagnement et de parrainage. Le projet du candidat (créateur ou repreneur) doit être validé par les chefs d’entreprises du réseau : «Ils ont un regard bienveillant basé sur son expérience, mais non complaisant», précise Marc de Buttet, directeur du Réseau Entreprendre Savoie. Le candidat retenu devient lauréat. Il rencontre régulièrement son référent et le Réseau, échange avec d’autres repreneurs et créateurs. «Un chef d’entreprise accompagne le porteur de projet pendant deux ans, ajoute-t-il, pour prendre du recul, évoquer la stratégie, briser la solitude du chef d’entreprise.» Un accompagnement à la carte, où le repreneur fixe la cadence en fonction de ses besoins. Sans oublier que Savoie et Haute-Savoie étant très attractives pour les repreneurs originaires du reste de la France, ce système de tutorat est un moyen d’intégration rapide sur un territoire qu’ils ne connaissent pas ou peu. es L interlocuteurs du service création-reprise d’entreprise à la CMA74.

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Transmission d’entreprise

Action coordonnée pour orienter les cédants

60 jours suivant la date de cession de l’entreprise. La prestation doit être détaillée : durée, actions à engager, modalités pratiques, éventuellement salaire et remboursement de frais. Elle peut durer de deux mois à un an. Convention ou non, durant cette période de cohabitation entre les deux parties, le repreneur doit demander au cédant de le présenter à ses contacts réguliers (clients, fournisseurs, banquiers) et surtout à ses salariés. Quelques mois suffiront pour éviter les tensions. «Les liens avec le cédant peuvent se dégrader rapidement, avertit Marc de Buttet. Je recommande de réduire la période de transition au minimum, car il y a un risque de télescopage, chacun veut marquer son territoire.»

«Le repreneur doit demander au cédant de le présenter à ses contacts réguliers et surtout à ses salariés.» Après signature de l’achat, il est conseillé au repreneur de rencontrer rapidement, rassurer si besoin, son personnel. La transmission elle-même est pour l’entreprise un facteur de risque : changement de management, de méthodes de travail, nouvelles relations clients-fournisseurs, nouveaux investissements. Quel que soit son passé, à l’issue de la transmission, le nouveau dirigeant doit quitter ses habits de repreneur pour endosser ceux de chef d’entreprise. 10

ECO DES PAYS DE SAVOIE n°45 - TRANSMISSION D’ENTEPRISE

Pour sensibiliser les chefs d’entreprises à la nécessité d’anticiper et de préparer la vente future de leur entreprise, les chambres consulaires et autres organismes professionnels dispensent conseils, diagnostic et accompagnement personnalisé. L’enjeu est de valoriser l’entreprise avant sa mise en vente, de l’estimer à sa juste valeur et… d’en tirer le meilleur prix. La CGPME Rhône-Alpes a mis en place, en 2010, un programme destiné aux futurs cédants, le projet Transmet’RA. Par ce biais, le chef d’entreprise rencontre les différents acteurs de la transmission, notaire, expertcomptable, avocat et un dirigeant qui a déjà transmis. «Ces trois experts apportent un regard extérieur à l’entreprise, sans affectif ni intérêt personnel, précise Agnès Colin, chef de projet Transmet’RA. Ils donnent un avis plus libre sur l’entreprise. Il ne faut pas oublier que l’enjeu d’une transmission bien préparée et bien menée est la sauvegarde de l’entreprise sur le territoire.» Cette action partenariale, soutenue par le Conseil régional Rhône-Alpes, l’État et l’Europe, vise à permettre aux chefs d’entreprises d’identifier les différents intervenants et processus et la nature de l’aide qu’ils peuvent leur apporter. Le site internet du dispositif (www.transmetra.fr) propose un autodiagnostic au dirigeant pour scanner, en 60 questions, les forces et faiblesses de l’entreprise : ses projets personnels, ses salariés, l’organisation de l’entreprise, sa clientèle. «Il faut, en moyenne, un à deux ans de préparation avant une transmission effective, met-elle en garde. Il faut vraiment anticiper. Nous voyons parfois des dirigeants en bout de course, fatigués ou en mauvaise santé. Leur entreprise sera d’autant plus difficile à transmettre dans de bonnes conditions.» 400 chefs d’entreprises ont rempli le questionnaire en 2010. Tous ne se sont pas déclarés cédants. Mais l’information passe. 40 ont été reçus en commission individuelle, où figure aussi un représentant des CCIT et des Chambres de métiers et de l’artisanat. Le principal travail porte sur l’estimation du bien. Pour trouver son futur repreneur, il faut être visible et afficher le bon prix.

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Fusion et Acquisition - MAnAgeMent de lA trAnsition En quoi sommes nous différents ? Notre champ d’action va du Conseil en Fusions et Acquisitions au Management Opérationnel de Transition. Cette double compétence nous donne de la crédibilité dans nos deux métiers : - La connaissance intime et opérationnelle de l’entreprise sur ces leviers de création de valeur nous confère une approche de l’Evaluation de l’entreprise très pertinente, qui nous permet d’être très percutants et persuasifs dans les négociations à mener en cas de Transmission. - La capacité à mettre en œuvre les financements nécessaires après une mission de pilotage réussie constitue une touche finale importante dans la finalisation de notre accompagnement. En tant que spécialiste des Fusions – Acquisitions : qu’apporte-t-on concrètement aux chefs d’entreprises ? - La Valorisation d’entreprise constitue l’étape où nous mettons en évidence le potentiel de notre client à concrétiser ses atouts dans son marché. - La conduite de sa Transmission va permettre de concrétiser ce potentiel dans les meilleures conditions pour le chef d’entreprise et ses actionnaires. Nous adaptons notre accompagnement en fonction du profil de repreneur souhaité par notre client (familial ou extérieur). - Certains dirigeants nous demandent de les accompagner dans la conception et la mise en œuvre de leur Croissance

Externe. Notre méthodologie va permettre en effet de réaliser les acquisitions dont l’entreprise a besoin pour créer de la valeur plus rapidement qu’en croissance organique ou compléter celle-ci harmonieusement. - Enfin, nous sommes sollicités pour réaliser des Levées de Capitaux où notre optimisation de la Valorisation de l’entreprise et notre Ingénierie Financière vont préserver la dilution des fondateurs. Quel rapport avec le Management de la Transition ? - Quand une entreprise est en crise, elle est clairement dans une situation de destruction de valeur. Notre mission va consister à en connaître précisément les causes grâce à un diagnostic complet puis, si notre client nous le demande, nous mettrons en œuvre les actions permettant d’assurer sa pérennité grâce à une conduite de changement réaliste et maîtrisée de sa stratégie et de son organisation. - Par ailleurs, toutes les entreprises ne sont pas prêtes à être cédées au moment précis où les dirigeants le souhaitent. Notre intervention va donc ici s’attacher à préparer l’entreprise à sa transmission selon un plan d’actions conduisant à la vente de celle-ci dans 2 ou 3 ans, après avoir retrouvé le chemin d’une dynamique de croissance ou d’amélioration de la rentabilité, ou parfois même les deux. Quel est notre champ d’action territorial ? Afin d’être proches de nos clients, notre action se veut résolument régionale en y

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Avis d’expert

«La rentabilité est le critère n° 1» Quand intervient l’expertcomptable lors d’une transmission ? La mission de l’expert-comptable est permanente auprès de l’entreprise. Il assure un travail de conseil privilégié auprès du chef d’entreprise. Une transmission est un événement parmi d’autres dans la vie de la structure. Elle se prépare théoriquement dès sa création. En ce qui concerne le vendeur, l’expertcomptable intervient dans l’estimation du bien.

laisser vieillir son entreprise, veiller aux performances du parc machines et à intégrer des jeunes dans ses équipes. Un personnel vieillissant annonce le départ prochain des savoirfaire de l’entreprise. Ce sont des éléments de valorisation pour rendre une entreprise intéressant aux yeux d’un repreneur potentiel.

Pour le vendeur, il y a une grande part d’affectif. Jacques Perrier-Gustin, délégué de l’Ordre Pour le vendeur, c’est un des experts-comptables pour la Savoie traumatisme. Notre rôle est de leur faire comprendre que Quels critères faut-il prendre en le prix n’a rien à voir avec compte lors de l’estimation ? l’affectif. La rentabilité est une question financière, La rentabilité est le critère numéro un. Le banquier qu’il faut anticiper. Mettre une affaire en vente examine la capacité de l’entreprise à permettre au au juste prix est la garantie d’assurer sa visibilité repreneur de rentabiliser son investissement et remet de ne pas détourner un éventuel repreneur. Il bourser l’emprunt. Si elle ne dégage pas de bénéfices, est vrai que le juste prix est souvent inférieur aux l’entreprise sera difficile à vendre. Il faut maintenir prétentions initiales du cédant. l’affaire en bon état : le futur vendeur ne doit pas 12

ECO DES PAYS DE SAVOIE n°45 - TRANSMISSION D’ENTEPRISE

Vous accompagnez aussi les repreneurs. Les conseils de l’expert-comptable sont importants car il existe de multiples outils juridiques, statuts fiscaux et sociaux. Tous peuvent s’imbriquer les uns les autres. Il faut donc une étude personnalisée dans chaque cas, pour choisir le meilleur outil juridique et le meilleur statut fiscal et social. Quelles sont les différentes formes de statut juridique ? Chaque cas est différent et le montage juridique doit être personnalisé. Depuis le 1er janvier 2011, un nouveau régime est disponible pour les petites structures : l’EIRL (Entrepreneur individuel à responsabilité limitée). Ce régime n’est pas une forme sociétale. Il permet au repreneur de séparer les biens professionnels et les biens privés, et donc de protéger son patrimoine personnel. C’était particulièrement demandé par les chambres de métiers. En revanche, ce n’est pas la panacée. La fiscalité est parfois moins avantageuse qu’une EURL (Entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée, qui est une SARL constituée d’un seul associé), et tous les textes ne sont pas connus. Je conseille au moins de choisir l’EURL pour bénéficier d’une meilleure protection juridique.

tion car ils peuvent permettre de faire baisser les taxes. Par exemple, la loi Dutreil permet, sous condition et avec la signature d’un pacte d’associé, une exonération de 75 % des droits au moment de la transmission de l’entreprise. Cette mesure nécessite d’anticiper car le pacte doit être signé deux ans avant la transmission. Par ailleurs, les dernières lois fiscales changent la donne et nous devons revoir les montages en cours pour les adapter. En effet, avec la loi sur les plus-values immobilières du 24 août, il faut désormais attendre 30 ans, et non plus 15 ans, pour être totalement exonéré de taxation sur la plus-value. Cela s’applique aussi pour un atelier ou une usine.

«Il est vrai que le juste prix est souvent inférieur aux prétentions initiales du cédant.»

Et s’il s’agit d’une affaire de plus grande taille ? Si l’entreprise est plus importante, le repreneur peut choisir de constituer une société de holding, qui rachète les actions de la société cible. C’est cette holding qui contracte le prêt et bénéficie de la déductibilité des intérêts d’emprunt. Elle est rémunérée par la distribution de dividendes. D’où l’importance de bien étudier la rentabilité de la cible : si l’entreprise rachetée ne fait pas de bénéfices, il n’y a pas de dividende pour la holding. Et le mécanisme économique se grippe. Quel régime fiscal et social choisir ? Là encore, il y a une grande diversité d’options et c’est du cas par cas. Au niveau fiscal, le repreneur peut choisir de s’acquitter soit de l’impôt sur le revenu, soit de l’impôt sur les sociétés. Il faut savoir que dans ce dernier cas, c’est un engagement sur le long terme car c’est un choix irréversible. Le choix du régime social dépendra de la forme de la société : le futur dirigeant peut s’enregistrer comme travailleur salarié ou non-salarié. Le cédant aussi doit faire des choix. Il y a plusieurs textes à examiner lors de la prépara-

Quel est votre avis sur la cohabitation entre cédant et repreneur ? La loi a beaucoup assoupli les possibilités de cohabitation entre les deux parties. Le cédant qui a pris sa retraite peut ainsi cumuler emploi et retraite. Selon la nature de l’activité et de la clientèle, l’accompagnement s’avère ou non indispensable. Le cédant peut ainsi faire la tournée de ses clients avec son successeur pour le présenter. Mon avis personnel est que cet accompagnement doit être réduit au strict minimum. Le temps de passer le relais et de transmettre les informations nécessaires. Mais il ne faut pas jouer les prolongations car cela peut générer des conflits : le cédant a ses habitudes de management, le repreneur veut gouverner, les salariés peuvent en jouer ou en pâtir. Est-il possible de changer de statut juridique après la reprise ? Une transmission ratée ou mal préparée est source de défaillance d’entreprise. C’est préjudiciable pour le tissu économique. Il faut vraiment personnaliser chaque projet. Le législateur fournit une multitude d’outils à choisir selon les objectifs du client. Je mets en garde vendeurs et acheteurs, on trouve sur internet de bons outils, mais aussi le pire. Une entreprise mérite un bon démarrage. Il faut valider et bien dimensionner son projet dès le départ, et mettre en place le bon cadre juridique. C’est une fausse économie que de se dire : je démarre petit et on verra. En cas d’échec, on n’a pas de protection juridique. Et un changement de statut juridique coûte cher. transmission d’entreprise - ECO DES PAYS DE SAVOIE n°45

Pratique

Pour le cédant,

le casse-tête du prix L’évaluation de l’entreprise à céder est une opération délicate, d’un point de vue technique et psychologique. Il faut réaliser une évaluation professionnelle car l’établissement d’une fourchette de prix fixera le cadre des négociations. Devant la complexité des méthodes, il est nécessaire de s’entourer de conseils d’experts. Citons : - la méthode fiscale, pour les fonds de commerce. C’est la plus simple : il s’agit d’appliquer un coefficient (déterminé par l’administration selon les métiers) au bénéfice ou au chiffre d’affaires dégagés lors de l’exercice précédent. Ainsi tel magasin est évalué entre 65 et 90 % de son chiffre d’affaires annuel. - les méthodes orpheline patrimoniales sont les plus utilisées, pour l’évaluation d’un fonds de commerce comme d’une société. La valeur de l’entreprise cor14

ECO DES PAYS DE SAVOIE n°45 - TRANSMISSION D’ENTEPRISE

respond à la valeur vénale de ses biens moins les dettes de l’entreprise.

«Devant la complexité des méthodes, il est nécessaire de s’entourer de conseils d’experts.» - les méthodes de rentabilité : le calcul de la valeur de l’entreprise s’effectue à partir d’une exigence de rentabilité de l’acquéreur, ou bien la valorisation de l’entreprise est établie en fonction de son bénéfice ou de son cash-flow. Par ailleurs, le cédant peut optimiser le coût fiscal de l’opération. Celui-ci dépend :

- du statut juridique de l’entreprise : c’est un critère important et il peut être parfois judicieux de modifier le statut juridique de l’entreprise avant de la céder, par exemple passer du statut de SARL à celui de SA ; - de l’imposition sur les plus-values. Les plus-values professionnelles se rapportent aux éléments d’actif : le fonds de commerce, le matériel, le mobilier, les stocks… Les plus-values représentent le prix de cession auquel on soustrait la valeur d’origine et les amortissements ; - des droits d’enregistrement ou de mutation. S’ils sont à la charge du repreneur, ils peuvent influencer le prix final. Plus ils sont élevés, plus le candidat repreneur voudra négocier. Le Pacte Dutreil permet de bénéficier d’une exonération sur les droits de mutation à titre gratuit, jusqu’à 75 %. Il repose sur un engagement de conservation des titres. Néanmoins, les conditions sont strictes et nécessitent d’anticiper la transmission car le pacte doit être signé deux ans avant l’événement. La loi de finances rectificative pour 2011 change la donne en ce qui concerne la taxation des plus-values immobilières. Dans le nouveau régime, il n’y a toujours aucun abattement pendant les 5 premières années de détention, afin d’éviter les opérations spéculatives. Après 15 ans de détention, l’abattement ne sera plus que de 20 % contre une exonération totale aujourd’hui. Puis, un abattement de 4 % par an sera appliqué à partir de la 18e année et jusqu’à la 24e, 8 % de la 25e à la 30e année. Le taux d’imposition passera de 31,3 % à 32,5 % en raison d’une augmentation de la CSG. Enfin, dans le cas d’un départ à la retraite, celle-ci est aussi à préparer. - Il est conseillé de s’informer de ses droits, un an avant, auprès de sa caisse d’assurance vieillesse et de contrôler son relevé de compte. Puis, six mois avant le départ à la retraite, adresser une demande de liquidation à la caisse de retraite en indiquant bien la date de départ (ceci pour éviter de toucher sa retraite dès le premier jour du mois suivant la demande). - À la date de départ choisie, fournir à la caisse d’assurance vieillesse un certificat de radiation au Registre

du commerce et des sociétés ou au Répertoire des métiers. Pour les artisans, industriels ou commerçants, le cumul emploi/retraite offre la possibilité, sous certaines conditions, de continuer à exercer une activité rémunérée au sein de l’entreprise cédée pendant 6 mois. - Pour l’indemnité de départ : faire une demande à la caisse d’assurance vieillesse pour obtenir le dossier nécessaire à l’étude des droits. Au final, le prix de cession est toujours le fruit de l’accord entre le cédant et le repreneur. Il doit toutefois correspondre à la rentabilité de l’entreprise et permettre au nouveau dirigeant de respecter son montage financier et de rembourser ses emprunts.

Cédant, ce qu’il faut déclarer aux impôts

- Imposition immédiate sur les bénéfices : après la cession d’un fonds de commerce, les bénéfices non taxés de l’exercice en cours sont imposables. Il doit donc les déclarer rapidement et établir une déclaration de cessation d’activité, et de TVA. - Imposition sur les plus-values professionnelles. - Impôt de solidarité sur la fortune. L’entreprise vendue n’est plus considérée comme un outil de travail et le patrimoine dégagé peut être soumis à l’ISF.

Les conséquences fiscales pour l’entreprise

- C ontribution économique territoriale (CET) : si la cession d’un fonds prend effet le 1er janvier de l’année, le repreneur sera redevable de la CET. Si elle a lieu au cours de l’année civile, c’est le cédant qui la paie, pour l’année entière. L’acte de vente peut néanmoins prévoir son remboursement par le repreneur au cédant. - Dettes fiscales : après la vente, l’État peut réclamer des dettes fiscales au titre de la gestion par le prédécesseur. Le contrat prévoit généralement une garantie de passif pour la prise en charge par le cédant des dettes issues de sa gestion, même si elles sont postérieures à la cession.

transmission d’entreprise - ECO DES PAYS DE SAVOIE n°45

témoignage

«Reprendre Rosset était “une folie”, mais 2012 s’annonce une meilleure année.» le départ remettre de l’argent. Après quinze ans dans l’inIl a reçu le soutien d’Albertville dustrie du sport, chez Lafuma Tarentaise Expansion et du puis Patagonia, dont il a dirigé Réseau Entreprendre Savoie, la filiale Europe jusqu’en fédont il a été lauréat en 2010. vrier 2008, Hervé Chabert s’est L’accompagnement du cédant mis à son compte. Licencié à a été contractualisé sur quatre 40 ans, il avait un capital à invesmois. «J’ai voulu que cette tir. Et deux options : retrouver période soit courte car cela coûte un emploi comme salarié, «La cher, et c’est une position difficile. voie la plus facile», explique-tL’un doit céder sa place, l’autre il, ou reprendre une entreprise. s’y installer. J’ai tout de suite La balance penche rapidement pris son bureau et sa chaise. Pour vers la deuxième voie. Il suit un que ce soit clair, même concrèstage de trois semaines à Lyon tement.» Il y avait 23 salariés avec l’association CRA (Cédants présents lors de la reprise. Ils et repreneurs d’affaires) pour sont actuellement 18, des CDD valider son envie de reprise. Et Hervé Chabert - Rosset n’ayant pas été remplacés. Après entame dès septembre 2008 ses un retour à l’équilibre en 2011, recherches. «Je voulais une entre2012 s’annonce correcte avec une bonne visibilité et un prise dans le secteur du bâtiment. Avec un père archicarnet de commandes rempli. Hervé Chabert cherche tecte, j’ai connu ce milieu enfant et je savais que cela à recruter deux aides plombiers, sans succès pour l’insme plaisait. Et il y a une grande part de hasard.» tant. Pourquoi avoir signé, alors qu’il savait que l’entreprise était en mauvaise santé ? «Sur la base des informations dont je disposais, 2010 ne s’annonçait pas si mal… Mais je n’avais pas toutes les données et je ne l’ai compris que quelques mois après. Par ailleurs, préparer une reprise est un processus long. On s’approprie le sujet. Même si vous Celui-ci l’a mené à Ugine (Savoie) vers la société avez plusieurs cibles en vue, il devient difficile de changer Rosset… qui venait de connaître de grosses difficultés. d’avis et de recommencer.» Avant la signature en décembre 2009, il découvre avec son expert-comptable que l’entreprise vient de subir Son conseil de lourdes pertes. 2010 s’annonçait mal. Hésitations, Ne pas choisir une entreprise en difficulté. «La nouvelles négociations. Et signature en juin 2010. première année, il faut se concentrer pour apprendre «J’ai racheté l’entreprise à bon compte, reconnaîtle métier et mettre ses idées en application. C’est il. Mais avec le recul, je pense que c’était une folie. assez difficile pour ne pas avoir à se bagarrer avec la Après une reprise, il faut prendre rapidement les bonnes trésorerie et les banques.» Si l’on ne connaît pas le décisions. Or, je n’avais pas la maîtrise des codes et secteur, vérifier qu’il y a une ou deux personnes pour du timing du secteur, ni les compétences techniques.» assurer le quotidien technique de l’entreprise. Après un premier apport de 150 000 euros, il a dû dès

«J’ai tout de suite pris son bureau et sa chaise. Pour que ce soit clair, même concrètement.»

ECO DES PAYS DE SAVOIE n°45 - TRANSMISSION D’ENTEPRISE

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témoignage

Pour Jean-Luc Brun, il faut maîtriser le processus de A à Z données sociales) et différents À 45 ans, Jean-Luc Brun, contrats. Au total, entre le preingénieur frigoriste climaticien mier entretien et la signature originaire du Jura, est à la tête du compromis d’achat, quatre depuis septembre de la Savoimois se sont écoulés. «Il faut sienne du Froid, à Montmévraiment être libre car cela nélian (Savoie). Il était directeur cessite tout votre temps et toute commercial France, Maghreb, votre énergie. La formation Afrique de l’Est d’un fabricant et l’expérience du repreneur allemand de matériel frigoridoivent être liées à l’activité fique lorsqu’il a été licencié à de l’entreprise. C’est un point 41 ans. Après avoir étudié pluimportant», insiste-t-il. sieurs rachats, qui n’ont pas Avec neuf salariés actuelleabouti, il participe alors à un ment, la Savoisienne du Froid séminaire consacré à la reprise a deux activités : la distribud’entreprise à la CCI de Lyon. tion de produits électroménaPuis se lance à la recherche gers, et surtout sa spécialité, d’une PME dans le secteur friJean-Luc Brun et Jean-Pierre Balthazard la fabrication, l’installation, la gorifique. Savoisienne du Froid maintenance et le dépannage Il consulte les annonces, node systèmes de réfrigération, tamment auprès des Chambres climatisation et traitement de l’air. Jean-Pierre Baldes métiers et de l’artisanat de différentes régions, où thazard, le cédant retraité depuis janvier, accompagne le tissu économique lui semble soutenu. «Pour moi, il son successeur pendant quatre mois en tant que salay avait trois paramètres à respecter, explique-t-il. Il falrié. La transmission se fait donc dans la concertation lait que le cédant ait pris la décision de vendre, qu’il ait et en étroite collaboration : ils ont d’ailleurs recruté informé le personnel de ses intentions et qu’il affiche un ensemble une chargée d’affaires spécialisée. «C’est une prix de cession des parts sociales juste.» Ses recherches entreprise à forte renommée, dont le personnel est comle conduisent en Savoie vers une entreprise que le cépétent. Ce sont ces hommes et ces femmes qui construisent l’entreprise. Je ne vais pas modifier ce qui fonctionne», conclut Jean-Luc Brun.

«La formation et l’expérience du repreneur doivent être liées à l’activité de l’entreprise. C’est un point important» dant retraité a créée, il y a 35 ans, et qu’il souhaite transmettre à un professionnel indépendant. Tout va ensuite relativement vite. Ses trois prérequis au rachat sont validés dès ce premier entretien. Lors de sa seconde visite huit jours après, il rencontre le personnel. Entre-temps, il étudie les liasses fiscales des trois derniers exercices, la DADS (Déclaration annuelle de 18

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Son conseil Mener sa recherche soi-même et ne pas la déléguer. Faire jouer ses réseaux, parmi ses fournisseurs notamment. Choisir soigneusement ses experts comptable, juridique et bancaire. «Il faut avoir soi-même des notions comptables et être capable de lire une liasse fiscale. Et surtout, soigner la rédaction du compromis d’achat.» Il est essentiel également d’établir une relation de confiance avec le cédant.

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«Faire évoluer la société, pas la révolutionner» voulu accélérer. «La difficulté, «C’est un bonheur énorme ! Je c’est la différence de tempo n’imagine pas redevenir salarié. avec le cédant. Je comptais en Pourtant, je gagnais bien ma jours. Mon vendeur comptait en vie, mais là, c’est mon propre semaines ou en mois, le temps projet.» Pierre Oudin a repris la de mûrir son projet de vendre.» Menuiserie Savoyarde, à MarignyLe métier étant très technique, Saint-Marcel (Haute-Savoie), le tous deux conviennent d’un 1er juillet 2011. Avec onze salariés, accompagnement de trois mois. cette entreprise fabrique des L’entreprise était en mauvaise portes et fenêtres en bois massif. santé financière. L’objectif de la Sa situation est idéale, à proximité reprise est de la remettre dans une du futur “Pôle bois Savoie/Hautedynamique de croissance. Mais Savoie”. sans trop de hâte, s’empresse-tAprès une carrière dans des il de préciser. Attention à ne pas groupes internationaux, dans des démotiver les équipes en place. postes à dominante marketing «J’ai d’emblée précisé à mes dans l’univers du bâtiment, il a Pierre Oudin - Menuiserie Savoyarde nouveaux collaborateurs que mon quitté son employeur en 2010 et objectif était de faire évoluer la a cherché une affaire à reprendre. société, pas de la révolutionner. Il y a bien sûr la tentation «À 50 ans passés, on se pose la question de ce qu’on va de tout changer très vite. Mais il faut prendre le temps faire de ses dix dernières années de travail, explique-td’écouter, de comprendre l’équilibre entre salariés, clients, il. Je projetais de racheter une entreprise depuis plusieurs fournisseurs. Ces trois mois m’ont permis de voir beaucoup années. Il m’a fallu quinze mois, à temps plein.» Il s’est de choses.» Et d’introduire quelques changements : fait accompagner par l’association CRA (Cédants et mettre des étiquettes sur les produits, faire évoluer la repreneurs d’affaires) et le Réseau Entreprendre Hauterépartition du travail, des réunions sur les clients tous les Savoie, dont il est lauréat en 2011. «L’accompagnement 15 jours. du Réseau permet de structurer la démarche et de La reprise s’est faite par la constitution d’une holding. Il professionnaliser la recherche d’entreprise, l’analyse n’est pas rémunéré car il est indemnisé par Pôle Emploi du dossier et la décision de la reprendre.» Une aide et bénéficie du dispositif Nacre. «Comme je n’ai pas la aussi pour bâtir son business plan et préparer connaissance du métier, tout prend deux fois plus de temps. Ce sera moins difficile dans quelques mois.» Dès son arrivée, il a embauché un chef de fabrication. Il cherche actuellement à recruter un menuisier professionnel. Son conseil l’argumentaire à présenter aux banques. Il avait les Respecter son domaine de compétence. «J’ai été 2/5e de la somme en fonds propres : «Il faut vraiment surpris par la qualité des équipes en place, par leur courtiser les banquiers et les convaincre de l’intérêt implication dans le fonctionnement de l’entreprise. du projet». Le développement passera par l’humain.» Un processus long que Pierre Oudin aurait parfois

«Il faut prendre le temps d’écouter, de comprendre l’équilibre entre salariés, clients, fournisseurs.»

transmission d’entreprise - ECO DES PAYS DE SAVOIE n°45

Témoignage

Dans le décolletage, une transmission bien huilée et un démarrage réussi mission a été bien préparée, préAvant de se mettre à son cise-t-il. Il n’y avait pas de vice compte en janvier 2011, Loïc caché. L’entreprise avait bonne Bultot, 35 ans, avait déjà une réputation. Nous continuons à vie professionnelle bien remplie. nous voir.» L’équipe en place Après avoir gravi les échelons est présente depuis longtemps : d’une entreprise de décolletage «Il y a d’abord eu une phase de 60 personnes, il l’a dirigée d’observation. Ils étaient inpendant 4 ans avec un associé. Il quiets pour leur emploi. Puis ils prend goût à la direction et aux ont vu que leur nouveau patron risques, attrape une envie d’enétait jeune et voulait développer treprendre et de liberté. Il quitte leur entreprise. Ils ont adhéré à la société en 2010. «J’avais le mon énergie.» Résultat, en sepréseau, la culture d’entreprise et tembre 2011, il a déjà doublé la connaissance du métier de déson chiffre d’affaires (640 000 € colleteur, explique-t-il. J’ai cheren 2011, contre 350 000 € en ché une opportunité. Mais nous 2010), quand le business plan étions en pleine crise et beaucoup Loïc Bultot - NJA Entreprise prévoyait une croissance de d’entreprises étaient en mauvais 40 %. De nouveaux clients sont état.» démarchés : le principal client Six mois pour identifier sa représentait 70 % du chiffre d’affaires, il n’en reprécible, puis un an pour concrétiser l’achat : il devient sente plus que 35 % pour le même volume. «Nous lauréat du Réseau Entreprendre Haute-Savoie en avons atteint le niveau d’activité qui était prévu dans octobre 2010. trois ans. Or, nous sommes toujours cinq, y compris ma «Personne ne voulait me suivre, se souvient-il. Mon femme et moi, avec 17 machines.» apport était insuffisant et je visais le décolletage, une Fort de cette croissance, il compte embaucher dès industrie à risque. Je me suis tourné vers mon banquier 2012, dans un premier temps un jeune en alternance. Puis, dès le deuxième trimestre, un responsable logistique. «J’ai besoin d’être déchargé de la partie production pour me consacrer au commercial et à la gestion de l’entreprise.» D’ici trois ans, il a prévu de doubler l’effectif. personnel. Sa condition : que je sois nommé lauréat.» L’appui du Réseau lui permet de faire monter son Son conseil apport de 10 % à 25 % et de bénéficier d’un accompaSe faire accompagner et soigner le business modèle et gnement de trois ans. le plan de financement. Les Établissements Buat, à Marnaz, deviennent «Il ne faut pas partir avec une trésorerie a minima et NJA Industrie. Avec le cédant, parti en retraite, Loïc vouloir réduire son emprunt à tout prix. C’est le prix Bultot a négocié une période de transition de trois de la sérénité.» mois, un à temps plein et deux à mi-temps. «La trans-

«L’appui du Réseau lui permet de faire monter son apport de 10 % à 25 % et de bénéficier d’un accompagnement de trois ans.»

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Le fils rachète au père la serrurerie familiale de management différents : il s’est Lorsque son père, Gérard Favreséparé d’une personne, a mis en Félix, a cherché à vendre son place l’intéressement, ainsi qu’une entreprise en 2008, son fils, Nicolas mutuelle. Une manière de couper Favre-Félix a considéré qu’il les amarres. Pourtant, la transition connaissait l’outil de travail, le se fait… dans la continuité. Le fils métier et le secteur. Il lui a fait une était déjà présent dans l’entreprise, proposition de rachat en 2009. Le six à huit mois avant le rachat. 1er janvier 2010, il a pris la direction Le père a accompagné la reprise, de la société du Villaret à Sainten particulier pour les devis et le Jorioz, anciennement Serrurerie du chiffrage. «Mon père a créé cette Villaret. Il a alors 32 ans, a exercé entreprise, il y a 30 ans. C’est son plusieurs emplois dans des grands bébé. Il sera toujours le bienvenu. groupes de la région. «J’ai supprimé L’accompagnement continue.» Il la serrurerie de l’appellation de la insiste néanmoins sur un point : ses société pour marquer la rupture, Nicolas Favre-Félix week-ends sont réservés à sa vie de explique-t-il. Cela reste l’un de nos Société du Villaret famille. domaines d’activités, mais elle pèse L’entreprise compte actuellement peu dans notre chiffre d’affaires. cinq salariés. Pour 2011, Nicolas Favre-Félix prévoit Nous faisons surtout de la construction métallique et de une hausse de 30 % du chiffre d’affaires par rapport la ferronnerie d’art.» à 2010. Le carnet de commandes est rempli jusqu’au Avant le rachat, Nicolas Favre-Félix a fait appel à printemps. «Je veux faire attention à la satisfaction du la Chambre de métiers et d’artisanat de Haute-Savoie, client. Nous avons du retard sur des devis et des chantiers pour estimer la valeur de l’entreprise et expertiser le alors je les tiens informés. Nous devons refuser du trafonds, et demander conseil. La société change de statut vail. Nous espérons embaucher une personne.» Comme pour l’achat de matériels, cela nécessiterait de chercher des locaux plus grands. Pour cela il faut du temps et de nouveaux investissements.

«Mon père a créé cette entreprise, il y a 30 ans. C’est son bébé. Il sera toujours le bienvenu. L’accompagnement continue.» juridique, passant d’EURL à SARL. Enfin, il s’est associé à deux salariés de l’entreprise, tout en restant majoritaire. «Je les connais depuis longtemps, expliquet-il. C’est le moyen de leur donner des responsabilités et de les motiver davantage.» Il a une expérience de commercial, une formation en comptabilité, et met rapidement en application ses propres méthodes. «Je suis né dans un milieu d’entrepreneur. Les discussions familiales tournaient autour de l’entreprise. Mon père gérait tout.» Lui veut étoffer le portefeuille clients et fait des choix

Son conseil La connaissance du métier et du secteur est un atout. «Dans le cas contraire, le démarrage prend plus de temps. Moi, je connaissais les salariés de l’entreprise ainsi que les confrères de mon père.» Par ailleurs, il souligne le nombre d’entreprises artisanales à reprendre : «Il faut avoir l’envie d’entreprendre. Beaucoup d’artisans de la génération de mon père vont prendre leur retraite. Sans toujours trouver de repreneur. Cela augmente notre charge de travail, ce qui est bien, mais ces entreprises risquent de s’éteindre.» transmission d’entreprise - ECO DES PAYS DE SAVOIE n°45

témoignage

Il choisit son collaborateur sept ans avant de lui céder son entreprise L’entreprise emploie une diLorsqu’il a embauché Laurent zaine de salariés. Éric Muller Mollet en 2003, Éric Muller avait aussi préparé la transmisdirigeait alors l’entreprise de sion au niveau du personnel : peinture en bâtiment EMP Éric «Nous formions un binôme, plutôt Muller Peinture à Villaz (Hauteefficace. Après mon départ, il falSavoie), qu’il avait créée en 2002. lait qu’il puisse générer le même Il lui a annoncé d’emblée qu’il chiffre d’affaires. J’avais donc recomptait prendre sa retraite à cruté une personne en alternance, 60 ans. «Je lui ai dit que je ne ferai qui a terminé son cursus en juillet pas d’années supplémentaires, se et a été embauchée. Malgré tout, souvient Éric Muller. S’il se monil fallait aussi quelqu’un d’expéritrait intéressé et que notre collabomenté pour maintenir le chiffre. ration se passait bien, il aurait la Sur mes conseils, mon successeur priorité s’il souhaitait racheter la a débauché quelqu’un qui prend société.» La vente a été signée en ses fonctions début novembre.» décembre 2010. Éric Muller - EMP Il a informé ses clients de son Éric Muller a préparé sa retrait, mais son collaborateur transmission un an avant. Sa les connaissait déjà : une contipremière priorité a été de faire nuité immédiate en somme. estimer la valeur de son entreprise. Il a alors pris «L’accompagnement s’est achevé fin août. La recontact avec la Chambre de métiers et d’artisanat, traite, c’est encore tout neuf pour moi. Nous nous voyons beaucoup, Laurent et moi. Mais le téléphone ne sonne plus. Je suis assez fier de ce que j’ai transmis : j’ai beaucoup travaillé, j’ai commencé en 1968. Je vais consacrer du temps à ma famille.» son expert-comptable et son conseiller juridique. Son conseil Et comparé : «Leurs estimations variaient du simple Prendre plusieurs avis auprès de gens de terrain au double, précise-t-il. Ils ont chacun leur méthode pour estimer la valeur de l’entreprise et établir une de calcul. Mon expert-comptable connaissait bien fourchette de prix. «Finalement, entre mon estimation l’entreprise. La Chambre de métiers connaît le tissu initiale et le prix réel, il y a une baisse de 20 à 25 %.» économique, mais pas la réalité de l’entreprise. Je Autre point : pour céder, il faut se préparer à l’avance. tenais à céder l’entreprise à ce collaborateur et n’ai «Céder à un collaborateur nécessite de cibler la bonne pas privilégié le côté financier à tout prix. Il fallait personne, d’estimer ses compétences, et cela implique que mon collaborateur ait les moyens de se la payer. peut-être de s’y prendre un peu plus tôt. Il ne faut pas le Et il m’importait d’assurer la pérennité de l’entrefaire par facilité.» prise.» Tous deux tombent d’accord sur une période Un collaborateur qui doit être opérationnel à 100 % d’accompagnement de neuf mois. Son successeur lui pour remplacer le partant. loue les locaux, autre motif pour ne pas demander un prix trop élevé.

«Finalement, entre mon estimation initiale et le prix réel, il y a une baisse de 20 à 25 %.»

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témoignage

Une reprise à deux, un chiffre d’affaires par trois non-salariés. Le cédant les a Laurence Boisset était commeraccompagnés pendant un mois ciale indépendante, son mari, et demi. Le baptême du feu est Pierre Boisset, était cadre dans venu rapidement : en trois mois, l’industrie automobile. Ils étaient trois salariés sur six sont partis. installés depuis trois ans en Sa«Nous avons dû recruter très ravoie après avoir travaillé dans pidement. En règle générale, nous diverses régions de France. En n’avons pas de problème pour 2007, ils ont décidé de reprendre embaucher. Il faut être en veille et ensemble une entreprise. «Nous actifs.» ne connaissions pas particulièPour préparer leur dossier de rement le métier ni le secteur, se reprise en 2007, ils ont approché souvient Pierre Boisset, mais le Réseau Entreprendre Savoie, nous avions l’expérience de salasont devenus lauréats et ont riés et la maturité, et il était temps bénéficié d’un prêt d’honneur. pour nous de prendre notre avenir Pierre Boisset souligne surtout en main. Je me savais gestionnaire, Pierre et Laurence Boisset l’appui apporté par l’accompacapable de gérer et d’optimiser.» Il CIMS Savoie gnement de trois ans et les renleur a fallu trois mois pour troucontres mensuelles avec le club ver leur cible, huit mois pour sides lauréats. Autre atout, et de taille : ils sont deux. gner l’achat. Les bourses d’affaires (CCI et Chambre «Nous travaillons ensemble et c’est un vrai plus, insistede métiers et d’artisanat) leur donnent l’occasion de t-il. La solitude du chef d’entreprise n’existe pas. Nous scruter le marché et de le comparer à leur cahier des partageons les soucis, difficultés et succès. L’important charges. est de savoir établir une coupure entre la maison et le travail.» Il estime qu’il leur a fallu trois ans pour maîtriser la société (clients, finances, salariés) et trouver une crédibilité vis-à-vis de la clientèle. Pour 2012, des projets sont matures, notamment de croissance extérieure, car la production est au maximum des caL’entreprise CIMS Savoie (Chaudronnerie induspacités actuelles de l’entreprise. trielle, mécano-soudure, serrurerie) à Aigueblanche employait alors six salariés et réalisait 600 000 euros Son conseil de chiffre d’affaires. «C’est une démarche de vie comÊtre conscient de ses compétences comme chef mune, reprend-il. Nous avons des compétences compléd’entreprise et ne pas laisser de zone de compétence mentaires et la volonté de bâtir quelque chose à deux.» vide. «C’est un métier complet, qui va de la technique à Et ça marche : un million d’euros de chiffre d’affaires la gestion du personnel. Là où il y a une faiblesse, il faut la première année, 1,4 million la deuxième, 1,7 milse faire aider. C’était notre cas sur le juridique, aussi lion la troisième. «Nous avons triplé notre activité en avons-nous pris un conseiller pour tout vérifier, surtout trois ans et comptons à présent quinze salariés.» À la sur l’aspect RH. C’est un coût qui en vaut la peine.» tête de cette SARL, ils ont un statut de travailleurs

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Avis d’expert

«Le cédant doit investir d’autres aspects de sa vie» Pourquoi parle-t-on de deuil lorsqu’un dirigeant cède son entreprise ? Il est exact de parler de deuil. Dans nos sociétés, on se présente par sa fonction. On n’exerce pas un métier, on est son métier. Cela rend tout changement difficile, de la perte d’emploi au départ à la retraite. Dans ce dernier cas, le cédant doit faire le deuil de sa façon de vivre. Être chef d’entreprise, c’est valorisant. Cela laisse aussi moins de temps pour investir d’autres aspects de sa vie, comme la famille ou les loisirs. Si le cédant ne s’est pas préparé, quand il perd le support de son travail, il perdra ses béquilles. Cela peut peser sur la reprise de l’entreprise.

désinvestissement du travail, et aller jusqu’au départ de salariés. Il peut aussi y avoir de la retenue d’informations fondamentales pour le repreneur. En prenant ses fonctions, il doit s’appuyer sur les salariés clés de l’entreprise. Il doit donc les identifier rapidement pour les garder, surtout s’il n’a pas la connaissance du métier. Cela ne s’improvise pas : il est fondamental de leur inspirer confiance pour qu’ils perçoivent la continuité entre l’ancien et le nouveau. Même si le nouveau dirigeant a des objectifs ambitieux, Virginie Jullin, psychologue du travail, il doit éviter les changements Annecy Santé au Travail. brutaux, comprendre le fonctionnement des salariés avant de mettre en application de nouvelles méthodes. Il y a des accompagnements au changement pour aider ces chefs d’entreprises. Pris dans la tourmente du changement, Comment peut-il se préparer ? ils peuvent perdre leurs bases et leur bon sens, par Un départ à la retraite s’anticipe. On voit la retraite manque de recul. comme une mise en retrait. Cela peut être difficile, surtout pour des gens qui ont bâti leur entreprise et ont Comment se prémunir de ces risques ? l’habitude du contrôle. Il faut penser différemment Le repreneur doit prendre garde à bien cerner le l’après, trouver un sens à sa retraite, à cette nouvelle contexte dans lequel la reprise intervient : s’agit-il d’un vie, prendre conscience qu’il n’y a pas de mise en redépart à la retraite, est-ce attendu ? Bien vécu ? Y a-t-il trait, mais une retraite professionnelle. C’est un travail des problèmes d’argent ? Ce contexte sera présent dans à faire, seul ou accompagné. Un dirigeant pour qui son la relation de confiance que devront construire repreentreprise est l’aboutissement d’une vie, doit avoir un neur et cédant. C’est ce que percevront les salariés. Il autre regard sur son passé professionnel pour se repréfaut donc la travailler : tous deux doivent avoir une visenter la vie qui s’annonce. Il doit investir d’autres assion commune du devenir de l’entreprise. Cela permet pects de sa vie pour la rendre appétissante. Et puis, il y de tenir le même discours face aux salariés. C’est rassua des gens pour qui le travail est une échappatoire. C’est rant pour eux. L’enjeu de la relation entre repreneur et parfois une fuite, consciente ou non, de sa vie personcédant est un transfert de pouvoir et d’autorité, de posinelle ou familiale. Il faut tout repenser. tion et de positionnement managérial. Le cédant doit accepter d’accompagner cette transition, tandis que le Quelles précautions doit prendre le repreneur ? repreneur ne doit pas perdre de vue la fierté du cédant La reprise d’une entreprise peut générer des risques et respecter ce qui lui est transmis, sans s’interdire de psychosociaux parmi les salariés, comme du stress ou l’adapter et le moderniser. de l’inquiétude. Et cela peut engendrer la méfiance, le 30

ECO DES PAYS DE SAVOIE n°45 - TRANSMISSION D’ENTEPRISE

DAVID JOGUET EST ENGAGÉ À la Caisse d’Epargne Rhône Alpes, les Conseillers Pros sont partenaires des entrepreneurs. Ils sont impliqués à chaque étape de leur développement. Ce sont des acteurs à part entière de leur réussite.

David JOGUET Directeur d’Agence en charge des Clients Professionnels St-Jean-de-Maurienne, Savoie

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pratique

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Pour résumer, les points clés Pour le cédant

1 Préparation personnelle

2 Préparation de l’entreprise

3 Structuration de l’entreprise

être prêt à mener la cession à son terme. S’il s’agit d’un départ en retraite, envisager la vie après. Si c’est une reconversion, étudier les perspectives de rebond.

En d’autres termes, la rendre transmissible. Maintenir le matériel en bon état et aux normes, réaliser les investissements nécessaires, établir une stratégie à moyen terme pour lui donner un avenir. Rendre les comptes et bilans lisibles.

Elle doit survivre au départ de son dirigeant, parfois son créateur. Recruter et former le personnel compétent pour assurer la pérennité du savoir-faire. Si les collaborateurs proches sont âgés, donc susceptibles de partir rapidement à la retraite, prévoir aussi des embauches. Si le savoir-faire technique ou le portefeuille de clientèle dépendent exclusivement du chef d’entreprise, déléguer et former les collaborateurs nécessaires. Ils permettront, durant la période de transmission, d’assurer le quotidien technique et commercial de la société.

4 S’entourer de professionnels

Un candidat peut se déclarer parmi les salariés, qui connaîtra l’histoire et la culture de l’entreprise. Par ailleurs, l’incertitude pourrait déstabiliser le personnel.

5 Optimiser la fiscalité

Se rapprocher de son expert comptable ou juridique pour optimiser la fiscalité de la transmission (effets de seuils, taxation des plus-values immobilières, etc.)

ECO DES PAYS DE SAVOIE n°45 - TRANSMISSION D’ENTEPRISE

4 5

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repères

Les chiffres clés de la transmission Le marché de la transmission d’entreprise avait baissé en 2009 en Rhône-Alpes. La faute à la crise principalement. Beaucoup de dirigeants avaient préféré reporter leurs projets de cessions par peur d’être obligés de brader leurs sociétés. Et des repreneurs avaient aussi rencontré des difficultés de financement. Le contexte a changé en 2011 avec une nette reprise des transmissions sur les neuf premiers mois de l’année. En Haute-Savoie, le nombre de reprises avait chuté de 17 % en 2009 avant de repartir à la hausse (+ 15 %) en 2010.

65 %

C’est le pourcentage de reprises concernant des entreprises employant au moins un salarié. Le pourcentage n’est que de 6 % pour les créations d’entreprises.

Chablais 15 %

2010/2009

Genevois 18 %

2010/2009

+ 19 %

Vallée de l’Arve 28 %

31 %

C’est la part des reprises d’entreprises concernant le secteur hébergementrestauration en Haute-Savoie.

+ 27 %

Bassin annécien 39 %

2010/2009

+3%

+ 20 %

17,30 %

6 538

C’est le nombre d’emplois qui aurait été maintenu en 2010 en Haute-Savoie grâce aux reprises d’entreprises.

C’est la part des chefs d’entreprises âgés de plus de 58 ans en Savoie et qui seront donc concernés par la transmission dans les prochaines années.

Sources : CCIT de Savoie et CCIT de Haute-Savoie

27 % Commerce

8% Construction 7% Activités de soutien aux entreprises 6% Autres activités de services aux particuliers

5% Activités immobilières

2% Activités financières et assurances 2% Transport et entreposage 1% Information et communication 1% Enseignement, santé et action sociale

Source : CCIT 74

Une sectorisation spécifique Contrairement à la création d’entreprise, la transmission concerne en premier lieu les secteurs de l’hébergement-restauration, du commerce et de l’industrie.

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Dynamisme marqué Le marché de la transmission est porteur dans l’ensemble du département, même si le dynamisme est moins sensible dans la vallée de l’Arve.

Évo. 2010/2009 Évo. 2010/2008 31 % Hébergement restauration

11 % Industrie

Source : CCIT 74

évolution des reprises depuis 2008

épartition sectorielle des reprises R En Haute-Savoie, en 2010

épartition et évolution géographiques des reprises R En Haute-Savoie, en 2010

Hébergement restauration Commerce Industrie Construction Activités de soutien aux entreprises Autres activités de services aux particuliers Activités immobilières Activités financières et assurances Transport et entreposage Information et communication Enseignement, santé et action sociale Total

-1% 25 % 35 % 17 % -1% 23 % 106 % 47 % 12 % 19 % - 15 % 15 %

Source : CCIT 74

Trio gagnant En 2010, trois secteurs d’activité ont porté les reprises : activités immobilières, financières et d’assurance et l’industrie.

- 12 % 5% 2% -8% - 24 % 13 % 40 % 1% -2% - 34 % - 25 % -5%

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