Sparse 09 (déc. 2014)

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sparse www.sparse.fr • gratuit • où est le respect ?

sparse | numéro 09 | trimestriel | déc. jan. fév. 2014-15

guide moderne de dijon | gratuit

LÉGENDE mais qui contrôle le mag de la nuit ? ENQUÊTE Les meilleures attractions de gigaland immersion dans l’enfer des soirées célibataires à dijon INTERVIEW YVES BERTELOOT, CULTURE CLASS HERO tribune il faut couper cette saloperie d’arbre blanc Rencontre christophe, l’entretien culte hommage le palais des sports, forteresse imprenable dÉCOUVERTE les fenris : fOOT US, GUEULE DE LOUP ET BRIS D’OS + PAGE SHOPPING benoit bordat the blaze pierre-yves romano mode roman-photo guestlist courrier Des lecteurs


1200 COMMERCES 300 RESTAURANTS

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DIJON

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« Plus mignon qu’un petit poney, plus roublard qu’un intermittent, plus arrogant que Patrick Swayze dans Dirty Dancing »

édito. « Le Prozac, ça ne marche plus les gars. Moi, maintenant je prescris des abonnements à Sparse. En plus, comme vous le donnez, moi et mes collègues, on se gave de pognon sans creuser le trou de la sécu » me susurrait le Professeur Tiparti, psychiatre émérite et grand connaisseur de la presse locale, un soir de réunion au Lions Club. En effet, avec ce brouillard qui va comme tous les hivers t’appuyer sur les épaules jusqu’en avril, tu as besoin de lumière, de conseils et d’infos. De ce mélange de vérité et de vannes ciselées du meilleur goût qui caractérisent cette revue. Tu as besoin de réponses : quelle hache pour couper l’arbre de la rue de la Liberté ? Qui est plus prétentieux que Christophe ? Quelqu’un t’a-t-il plus fait vibrer que Skeeter Henry au Palais des Sports? Quand as-tu été en photo pour la dernière fois dans le Mag de la nuit ? Préféreras-tu garder ta copine ou ton abonnement à Beinsport ? Qui aura un bon point pour les Sparse Awards, le 19 décembre au Théâtre Mansart, cérémonie à laquelle tu vas te rendre parce que tu sais que l’équipe de ce magazine sait ce qui est bien et ce qui ne l’est pas. Sparse, ton magazine anti-gel. Le seul à pouvoir être bu par un Russe. Chablis Winston


sommaire amuse-bouche 3. édito 6. guestlist 8. CONTRIBUTEURS 10. COURRIER DES LECTEURs 11. LA PHOTO DU TRIMESTRE 12. the pulitzer sessions 13. SHOPPING 14. RETOUR SUR CES TROIS DERNIERS MOIS LÉGENDE 16. mais qui contrôle LE MAG DE LA NUIT ?

Rencontre avec Thierry Koenig, directeur de publication de cette institution dijonnaise.

ours Ce magazine est édité par Sparse Média. Siret : 750 725 806 00012 - APE : 9499Z www.sparse.fr - contact@sparse.fr Directeur de publication et rédacteur en chef Pierre-Olivier Bobo Contributeurs Aurore Schaferlee, Arthur Gérard, Bruno Simon, Chablis Winston, Franck Le Tank, Jeff Buckler, Julian-Pietro Giorgeri, Fabrice Magniez, George Deep, Germain Arfeux, Katy Purry, Loïc Baruteu, Louise Vayssié, Martial Ratel, Mr. Choubi, Nicdasse Croasky, Nicolas Boeuf, Romain Tremoy, Simon Galley, Tonton Stéph, James Granville forever Direction artistique internetinternet

PhotographIes Vincent Arbelet, Alexandre Claass, Louise Vayssié Illustrations David Fangaia, Hélène ‘Microbe’ Virey DÉVELOPPEMENT COMMERCIAL Romain Calange RELECTURE Aurore Schaferlee, Chantal Masson

interview 20. yves berteloot, culture class hero

La culture, le Chez Nous, VooTV, les embrouilles...

ENQUÊTE 26. LE TOP 5 DES ATTRACTIONS DE GIGALAND Parce qu’on pense aussi à vos gosses, bordel.

IMMERSION 30. le love game

Dans l’enfer des soirées célibataires à Dijon.

LA PAGE MODE 36. BRUNO ET PAMELA À LA VILLA MESSNER DIAPORAMA LES RONDS-POINTS

38.

FOODAGE DE GUEULE 42. où manger de la qualité pour 10 euros ? FISH ME PRENDS ÇA LA DINDE

44.

Tu dois préparer un repas de Noël pour 12 personnes.

ROMAN-PHOTO 48. NICDASSE À LA FÊTE FORAINE TRIBUNE 52. IL FAUT COUPER CETTE SALOPERIE D’ARBRE BLANC CULTURE CHRISTOPHE, L’entretien culte

Couverture Fête foraine de Dijon 2014 Photo : Alexandre Claass

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Imprimeur Chevillon Sens

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Dépôt légal : à la sortie du magazine ISSN : 2260-7617 La rédaction décline toute responsabilité quant aux opinions formulées dans les articles, cellesci n’engagent que leurs auteurs. Tous droits réservés © Sparse 2014-2015 Merci à nos partenaires et annonceurs, ainsi qu’à toutes celles et ceux qui ont permis la réalisation de ce numéro. Prochain numéro : mars 2015

HOMMAGE LE PALAIS DES SPORTS, FORTERESSE IMPRENABLE

SPORT AS FENRIS : FOOTBALL AMÉRICAIN ET GUEULE DE LOUP 60.

dessert 64. AUTO-FICTION Élodie, Séverine et Pierre. 66. RIP Ces rades mythiques qui ont disparu. 68. LA SÉLECTION MUSICALE (douteuse) D’ARTHUR 69. CRASH-TEST Tu t’es vu quand t’es né à... ? 70. CARTOGRAPHIE



GUESTLIST PAR la rédaction photos : DR

benoît bordat

the blaze

Pierre-Yves ROMANO

Tu es plutôt kir ou pain d’épices ? Le pain d’épices ne se buvant pas, pas mon dernier mot est pour le kir. Définitivement.

Si vous deviez abandonner discrètement un cadavre, vous le feriez dans quel coin de Dijon ? Chez Sparse !

Un argument en faveur d’un week-end à Is-sur-Tille ? La fête de la truffe. Un bon argument pour une sortie avec ta grandmère.

Le millésime 2014 du Bourgogne serait très bon. Vous n’en avez rien à battre ou vous êtes contents pour les notables de la côte ? On n’en a rien à battre, on tourne à la Belgium Beer Triple Distillation, et à ce niveau il n’y a pas de millésime.

Perso, j’aime beaucoup Babou à Chenôve pour les cadeaux de Noël. Et toi, quel est ton spot préféré pour régaler ta petite nièce ? Planète BD !

Conseiller municipal de Dijon délégué au quartier université Conseiller du Grand Dijon en charge de l’agriculture périurbaine

Euh... ils sont pas un peu élevés, les prix des loyers d’appartement à Dijon, quand même ? Tu tiens tes sources de qui ? Je croyais que tu habitais encore chez tes parents. Les prix des loyers sont dans la moyenne et la ville de Dijon a mis en place une vraie politique pour augmenter le nombre de logements à loyer modéré, la demande est forte. Eric Carrière, Alain Millot, Yves Jamait… C’est qui ta personnalité préférée à Dijon ? Alain Millot évidemment (il va lire ma réponse en plus). Sérieusement, c’est un homme que j’apprécie beaucoup pour sa proximité avec les habitants, sa vision ouverte des choses et une certaine fermeté quand cela est nécessaire. T’es plutôt centre commercial de Quetigny ou Toison d’Or ? Moi, surtout centre-ville. Je déteste le côté déshumanisé des centres commerciaux et j’aime bien flâner, boire un café en ville.

Guillaume Alric (a.k.a Mayd Hubb) et Jonathan Alric Musique et cinéma www.theblaze.fr

Votre affiche idéale pour un concert de rentrée à Dijon, c’est quoi ? The Blaze en première partie de The Blaze. Une Chinoise a récemment passé une semaine dans un KFC pour se remettre d’avoir été larguée par son mec. Il marche à votre avis, celui de Chenôve, pour les peines de coeur, ou il faut aller ailleurs ? Nous, pour les peines de coeur, on va chez Dersim Kebab. Vous êtes plutôt DFCO, JDA, DBHB, CDB, ou Dijon Hockey Club ? Plutôt THC, MDMA, GHB et kebab sauce Dallas. Si ça n’avait pas été Alain Millot, vous auriez vu qui pour remplacer Rebsamen à la mairie de Dijon ? Gérard Gagnant. Dijon a été libérée il y a pile 70 ans. De quoi doit­-elle être libérée, désormais ? De l’oligarchie reptilienne.

Gérant de Pyrprod et directeur de l’Oeno Music Festival

Ton mag’ préféré à Dijon, c’est Sparse. Mais sinon, tu lis quel journal et écoutes quelle radio ? À part Sparse (bien sûr !), je lis Charlie Hebdo et sinon j’écoute Radio Cultures. Cite-nous deux endroits : le premier pour boire une petite mousse entre potes, un autre pour goûter un bon vin en couple. Le Quentin pour la mousse et le Trou pour le vin. Le dernier concert que t’as kiffé à Dijon ? Celui des Johnny Mafia à l’Oeno Music Festival. Du coup, je les ai signés ! Le truc le plus ridicule dnas notre ville, c’est quoi ? Le fait que les bars ferment à 2h du mat’ ! Si je fais une pétition pour l’ouverture d’une putain de médiathèque bien mieux fichue que la Nef, au centre-ville, tu la signes ? Grave ! T’en penses quoi de la fête de la musique, honnêtement ? Bah pour moi, c’est un jour férié.

Tu fais pointes à combien, toi, sur la Lino ? Avec ma 2CV je fais des pointes à 45km/h. Le plus dur, c’est de freiner.

Qui sont les Dijonnais qui vont au magasin Hollister à la Toison ? Quels sont leurs réseaux ? Les réseaux sociaux-pâtes.

Ton quartier préféré à Dijon, c’est quoi ? Le port.

Invente un nom de rue qui n’existe pas encore à Dijon. Impasse Nicolas Sarkozy.

Vous allez fêter Noël où ? Chez toi, avec ta famille.

T’es plutôt vélo, bagnole, bus ou tram ? Vélo !

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Le Triomphe d’Amphitrite, Bon Boullogne, l’Aîné (1649-1717) (détail) © RMN-Grand Palais (musée Magnin) / Stéphane Maréchalle | Conception graphique : DG&C - Simon Lépine - 06 87 25 11 14

Bon Boullogne Un chef d’école au Grand Siècle

Musée Magnin

Dijon

5 décembre 2014 5 mars 2015

experts comptables - auditeurs et conseils - commissaires aux comptes


contributeurs PAR chablis winston photos : DR

Germain Arfeux Germain a su déceler le lien entre le grand complot judéo-maçonnique et l’arbre qui tourne sur la rue de la Lib’. Germain a créé le blog « Bourgogne libre ». Il croit dur comme fer à l’indépendance de notre douce région et est prêt à faire péter la préfecture de ce pouvoir Jacobin qui nous opresse. Stage à Ajaccio cet été. Il est prêt. Vigipirate renforcé.

Loïc Baruteu Loïc est étudiant en lettres étrangères appliquées. Autant dire, un beau feignant. Loïc a d’autres passions que de se faire enlever sa bagnole par les flics place du Marché le samedi matin : il aime aussi la violence et la méthodologie scientifique de la prise de drogue dans le sport américain. Même à Dijon.

David Fangaia David colle des images, coupe des photos, fait des petits dessins, joue avec des feutres et son ordinateur. Comme ma nièce de 4 ans. Sauf que lui appelle ça des illustrations alors que ma nièce juste « un truc que j’ai dessiné pour Tonton ». Lucidité. À mon avis, il ne saurait tarder à monter une expo à l’Alchimia... Tonton Stéph Le héros de la rédac’ de Sparse vit planqué dans une bergerie en raison de toutes les salves de haine qu’il distille sur les restaurateurs de la ville et les habitants du val de Saône. Dernièrement, il a réussi à se faire détester par la jeune garde du hip-hop de cage d’escalier dijonnais à cause d’un article pourtant clairvoyant. Menaces. Insultes. Une phrase avec sujetverbe-complément n’est pas à la portée de tout le monde Tonton, tu devrais le savoir.

Sophie Brignoli Sophie a raison. Et tu n’as pas intérêt à dire le contraire. Ce qu’elle fait, c’est bien. Elle risque sa carrière en enquêtant dans les milieux les plus glauques. C’est pas pour t’entendre faire le malin. Alors ferme-là.

A fish in my dish Peler et émincer l’oignon. Vider les poissons. Dans une grande cocotte, faire dorer l’oignon, l’ail, le fenouil et les tomates avec l’huile d’olive, puis couvrir avec la soupe de poisson. Ajouter le safran, saler et poivrer. Rajouter ensuite les pommes de terre, puis les poissons en commençant par les plus gros. Laisser frémir pendant 25 min. Une fois la cuisson terminée, retirer les poissons et les pommes de terre, puis les disposer sur les plats de service et les parsemer de persil ciselé.

Laurent Delahousse La mêche de Laurent Delahousse a été inventée en 1997 par des chercheurs autrichiens dans un laboratoire de physique moléculaire. Tenue parfaite, effet coiffé/décoiffé, ambiance Neuilly coquin « je t’emmène aux Maldives par le prochain vol Air France, chérie... » Personne n’a remarqué que Laurent Delahousse était le sosie de Pierre-Olivier Bobo, le bien-aimé directeur de Sparse ? Sérieux ?

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courrier des lecteurs

Merci pour toutes vos lettres d’amour ou d’insultes. ÉCRIVEZ-NOUS : CONTACT@SPARSE.FR

« Bonjour, Je suis le patron du El Berro et j’aimerais beaucoup prendre une page de pub dans Sparse. Je suis sûr que l’impact que ça aura va faire exploser mon chiffre d’affaires. Comment doit-on procéder ? » JONATHAN (DIJON)

Réponse de la rédaction Il faut commencer par répondre à tes mails. Et nous payer ce que tu nous dois. Après on verra.

« Salut les prétentieux, Vous ne pensez pas que c’est un peu bizarre ce début de saison tonitruant du DFCO ? Ils n’auraient pas acheté des matchs par hasard ? » DENIS (AUXERRE)

Réponse de la rédaction Ce n’est pas parce qu’Olivier Dall’Oglio, l’entraîneur de l’équipe, vient du dirty south, Nîmes pour être précis, qu’il faut l’accuser de tous les maux et le foutre au ballon pour rien. C’est discriminatoire. Par contre, c’est sûr qu’il y a une embrouille quelque part, Denis.

« Bonjour Messieurs-dames, Je me permets de vous demander si Sparse est en mesure de livrer les exemplaires du magazine en Suisse ? En effet, nous désirerions nous abonner depuis l’étranger. » claudia (LAUSANNE)

Non merci monsieur, vous pouvez garder l’or des nazis.

« Salut Sparse, Comme je sais que vous avez du goût, vous auriez pas un conseil cadeau de Noël classieux ? C’est pour ma mère. LOUISE (IS-SUR-TILLE)

Réponse de la rédaction Pour ta mère ? Je vois... Tu peux lui offrir Le beau jeu : football et politique de François Rebsamen, sorti chez Stock le 26 novembre... Normalement. François écrit des livres en rentrant du boulot, peinard au coin du feu. Ta mère va adorer. Putain de best seller.

Réponse de la rédaction

« Salut Francis, Les forces de l’ordre n’étant pas une troupe d’assassins, l’emploi de grenades auquel elles se voient contraintes révèle essentiellement une chose : le niveau de violence inédit atteint par les manifestations. Voilà le plus inquiétant. JEAN (Dijon)

Réponse de la rédaction Oh ! On vous rappelle l’adresse mail une bonne fois pour toutes : contact@sparse.fr. Sinon pas de soucis, on fait suivre votre courrier au BP.

« Salut, Je suis super fan de vous, votre magazine a changé ma façon de percevoir le monde et mes rapports avec les autres. Merci. vanessA (SAINT-APOLLINAIRE)

Réponse de la rédaction Arrête de mentir Vanessa ! Personne ne vient de SaintApollinaire ! C’est une ville fantôme créée dans le but d’élire Rémi Delatte ou pour qu’il y ait une zone tampon entre les Grésilles et la campagne. Sérieux, qui connait quelqu’un qui vient de St Apo ? Même ceux qui y habitent te disent qu’ils viennent d’ailleurs. Pas d’âme. Alors qu’est-ce que tu caches Vanessa ? Tu es des RG ?

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shopping PAR TONTON STÉPH

Ton mag’ te rencarde sur les meilleures affaires dénichées dans l’agglomération. Joyeux Noël !

Quad CAN AM Outlander 1000 MAX XT-P (17 999 euros) Idéal pour la ride en duo. Robuste, il permet de parader en toute impunité devant la place Suquet en faisant des roues arrières. Ce petit bijou ne semblera onéreux qu’aux sans-dents. → Concession Motricity, route de Beaune à Chenôve

Sticker mural « New York» (15,50 euros)

Carnet OCB Slim Premium (32,10 euros)

New-York, c’est la place. Toi qui a une personnalité qui fédère et qui déteste cliver, il y a fort à parier que cette déco te rendra d’autant plus populaire en soirée. → La Carterie, 17 rue du Bourg à Dijon

Avec son grammage légendaire, l’OCB slim remporte tous les suffrages des fumeurs de bon tabac. Et quitte à s’en procurer, autant le faire dans ce bar de supporters qui pourront vous vanter les qualités du Picon sur place. → Eden bar, 12 rue des Perrières à Dijon

Figurine en résine « Joker » (20 euros)

Bonnet Carhartt jaune (19 euros)

Sauce blanche Samia Halal 350 ml (1,96 euros)

Il est tout de même bien triste, ce buffet Störnas acheté le mois dernier à Ikea. Il va falloir remédier à cela et Sparse continue de meubler ta studette désuète en te proposant de faire trôner ce personnage truculent en plein milieu de chez toi, histoire de rappeler à quel point tu es toi-même quelqu’un de de rigolo. → King Collector, 72 rue Berbisey à Dijon

Un réquisit de base pour tout hipster à chemise à carreaux qui se respecte. À mettre surtout en été, avec une chemise en jean, en siroteant d’un air détaché une binouze à Alchimia. → Urban Culture, 8 rue Dauphine à Dijon

Recommandé par les Identitaires Bourguignons ainsi que leurs mamans qui en raffolent, cette sauce blanche pourra accompagner vos boeufs bourguignons et vos autres recettes locales au pain d’épices. Se marie parfaitement avec un Chambolle-Musigny Les Amoureuses 2009. → Cora, ZAC les Vignes blanches à Perrigny-lèsDijon

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CE QU’IL NE FALLAIT SURTOUT PAS RATER CES TROIS DERNIERS MOIS

par TONTON STÉPH, pierre-olivier bobo & julian-pietro giorgeri

Lundi 29 septembre

C’est Côte d’Or Tourisme qui cherche un bon coup ce jour-là en invitant ostensiblement George Clooney et sa future ex à venir dans le coin faire leur lune de miel. On les voit déjà au Bonsaï Hotel à Marsannay, avant de se péter un Flunch de derrière les fagots la veille d’une virée dans le Val-de-Saône, Canal de Bourgogne. Boum.

Samedi 13 septembre

Notre série trimestrielle d’hommage au genre humain commence sur les chapeaux de roue, avec cet homme agressant son ami en pleine rue de Dijon pour une dette de... 1,20 euros. Porter, interprété par Mel Gibson dans Payback, n’a qu’à bien se tenir.

Jeudi 18 septembre

S’il y a bien une profession qui souffre en ce moment du cap des réformes, ce sont les notaires dijonnais. Ils étaient près de 200 à occuper le tarmac devant la préfecture. Pulls mérinos négligemment mis sur l’épaule et mégaphone hurlant sur la « péréquation des actes notariés ». Pas trop ambiance merguez-CGT tout ça. Bien sûr, aucun incident n’a été relevé en marge du rassemblement. En même temps, pas mal de CRS avaient posé leurs congés.

Mardi 30 septembre Où l’on apprend que les cinémas de l’agglomération feraient le plein. Soyez ravis : Qu’est-ce qu’on a fait au bon dieu ? a fait le plein, restant 24 semaines au box-office. En voilà une nouvelle réjouissante ! Pendant ce temps, un élu FN dans l’Aisne aurait lancé à un couple d’Antillais : « Retourne dans ta cambrousse ». Dimanche 5 octobre

Dans le Nord, des passants sortent un automobiliste de son véhicule : l’homme avait 3,80 grammes. Le chatillonais réagira-til à ce qui ressemble fort à un défi ? Des habitants de Hong-Kong propose un autre rapport à l’alcool, en investissant 1,3 millions d’euros pour 110 bouteilles de Romanée-Conti.

Vendredi 19 septembre

Pour contrer Snapchat, Facebook lance Slingshot, pour que les statuts deviennent temporaires, visisbles par exemple une heure. Il faudra donc être au taquet pour profiter des indispensables posts de la page J’aime Dijon : « Bonne journée à tous ! » ou encore « Un beau soleil place de la Libération aujourd’hui ! »

Jeudi 16 octobre

La taxe foncière aurait augmenté de 31% dans le coin. Le tram est tout de suite accusé. Qu’est-ce que t’en as à battre? T’es bien parti pour être locataire à vie. Bon, pas dit que la taxe d’habitation ait baissé, d’un autre côté. Sinon la sémillante Nadine Morano pète son câble dans un commissariat parisien, dénonçant tout d’abord une femme portant le niqab, et en enrageant du fait que les fonctionnaires ne la reconnaissent même pas. Ce jeudi, notre république brille de mille feux.

Mardi 23 septembre

C’est aujourd’hui, ça a fini par arriver. Le mardi 23 septembre 2014, c’est bien le jour du futur qu’a voulu visiter Marty Mac Fly. Nous sommes donc dans le futur les gros. Toujours pas d’overboard, mais des segways un peu partout dans Dijon. D’ailleurs, plus près de chez nous, le quartier tranquille d’Hill Valley pourrait s’appeler Talant. Et c’est bien à Talant qu’hier un habitant se plaint d’émissions crapuleuses de chèques lui appartenant. Dernièrement l’homme dit avoir organisé un apéro dînatoire auquel il invita sa bande d’amis. C’est au moment de servir des kirs et des gougères à ses convives qu’un chéquier lui aurait été emprunté. Sans doute des amis trouvés sur OVS.

Lundi 20 octobre

La foire de Dijon approche. Les organisateurs nous mettent l’eau à la bouche en nous invitant à devenir jury du concours de jambon persillé. Ce qui a, convenons-en, tout de même plus de gueule que d’être membre d’un jury d’agrégation ou à Cannes. Un accomplissement. Pendant ce temps, le très sérieux Gorafi nous apprend que Kanye West avait une passion cachée : la trigonométrie. 14


Dimanche 16 novembre

Le train de l’orientation s’arrête en gare de Dijon. Le but ? Apporter aux jeunes des réponses sur leurs futures études, le marché de l’emploi et la vie étudiante. Franchement, le plus important pour ta semaine à venir, c’est de savoir que pour 3 euros tu peux te faire un fish & chips pas dégueu à la cafét’ Lamartine sur le campus. Boisson non incluse. Prévois quand même un bon quart d’heure d’attente si tu arrives après 12h15.

Mardi 21 octobre

En bref dans la région, on apprend le vol d’un tractopelle à Nolay, l’ouverture à Saulieu du trop mignon salon du Bonsaï et un DFCO qui vient de taper Valenciennes 3-O à domicile et asseoit confortablement son cul sur la ligue 2.

Mercredi 19 novembre

On commence par les States où l’ancien gourou déglingué et vraie légende du crime, Charles Manson, s’est marié en prison. Pourtant, ce bon Charles ne verra pas la couleur d’une lune de miel avant 150 ans, facile. Rubrique judiciaire toujours. On déroule les faits. 6h du mat’, Olivier Dall’Oglio embrasse sa femme et descend à la cuisine se faire un bol de Muesli. Une journée ordinaire. Sauf qu’aujourd’hui, Oliv’ va faire une causerie musclée dans les vestiaires moites et plein de dealers de la place Suquet. Placé en garde à vue et entendu dans l’affaire des matchs arrangés de Nîmes. On est sûr d’une chose, c’est que la dernière fois qu’on a soupçonné un match truqué du DFCO, c’est le jour où Jovial a planté un doublé. Elle est pour toi, Brice !

Vendredi 24 octobre

Grosse hype des gares en ce moment, celle de Dijon a enfin son piano. Espérons qu’il n’arrive pas aux commerçants locaux la même mésaventure que ceux de Brest, où un prof d’université célèbre a décidé de péter son câble en jouant plusieurs jours sans discontinuer, provoquant l’ire de ceux qui, contrairement aux voyageurs, ne font pas que passer.

Mardi 28 octobre

« Greenpeace défend le thon à Chenôve. » Sur le parking du Babou ? À moins que ce ne soit sur celui du Sakura, ce resto japonais à volonté où le patron cherche absolument à limiter ta consommation, ne serait-ce qu’en te dégoûtant avec son unique poil au menton d’un mètre.

Vendredi 21 novembre

Bravo à Lilane C. et Sylvain M. qui ont gagné un million d’euros dans un tabac-presse de l’avenue Eiffel. Ils possèdent désormais de quoi acheter une baraque bourgeoise à Montchapet et quelques Mojitos à la Jam’. La vraie vie, quoi.

Samedi 8 novembre

Dans le Doubs (25), un jeune homme porte plainte après s’être fait arnaquer sur la toile : « Le garçon de 24 ans avait surfé sur un site internet de rencontres, dont l’intitulé -un tantinet humoristiqueinvite les dames à s’approprier un homme comme elle pourrait le faire avec un animal domestique. » Sévices sexuels toujours, d’après deux journalistes du Monde, François Fillon aurait souhaité que les juges « tapent vite » sur Nicolas Sarkozy pour ne pas le laisser revenir dans le politique-jeu. Smiley triste.

Samedi 22 novembre « La distribution en gaz naturel de 100 clients a été temporairement suspendue », titre la PQR. La situation en Ukraine devient plus que préoccupante, l’Union Européenne commence à imposer des sanctions vraiment drastiques à l’entourage du président russe. Vladimir Poutine ne l’entend pas de cette oreille et coupe le gaz au village de Corgoloin. Mesure de rétorsion proportionnée.

Vendredi 14 novembre

#idéesortie : On découvre, médusés, que Mickaël Vendetta sera présent ce soir-là dans le bar qui a pourtant tout misé sur le bon goût : El Berro. Si quelqu’un peut nous dire à quoi sert ce type, qu’il s’adresse au courrier des lecteurs. Merci d’avance.

Dimanche 23 novembre

C’est déjà Noël, la grande roue est installée place de la République. Pour le bonheur des futurs utilisateurs qui pourront de là-haut apercevoir les toits des habitations rue Devosge, les embouteillages chroniques de la place, ainsi que la sortie des élèves de Carnot. #idéesortie #indispensable

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légende

le poids des mots, le choc des photos Il est là depuis la fin des 90‘s... Tu le parcours avec un petit sourire coupable en attendant de te faire servir dans n’importe quel snack de la ville. Institution dijonnaise. Qui fait le Mag de la nuit ? Et surtout pourquoi ? Rencontre avec Thierry Koenig, le directeur de publication. Quand il parle du Mag, il dit « je ». Le Mag de la nuit et ses 10.000 exemplaires par mois, c’est lui. Depuis 13 ans. Tu nous vois venir avec nos gros sabots : le Mag de la nuit, c’est tout pourri et il n’y rien dedans ? Thierry va t’expliquer qu’en fait, il y a juste ce qu’il faut.

PaR chablis winston photos : le mag de la nuit, A.C.

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LÉGENDE

T

Le commissaire Van Loc à l’apéro

hierry donne rendez-vous pour l’apéro au Trinidad, place du Théâtre. Calé dans une banquette, Thierry est avenant, poli, doux et pèse bien ses mots. Propre. Comme un commercial, ce qu’il est depuis des années. À 56 ans, Thierry Koenig, qui en paraît facile 10 de moins, est dans la pub depuis 25 ans. Paris, Lyon, Belfort… Il revient à Dijon, d’où il est originaire, au début des années 80. Bosse pour Le 21 (oui, le journal de petites annonces), Radio2000, Nostalgie, Fun Radio. En 2001, la station de radio se fait racheter. « C’était le goulag commercial, plus d’humain ». À cette période, le Mag de la nuit est à vendre. Le magazine existe depuis deux ans, déjà le même format. Thierry ne l’a pas créé comme on le croyait. C’est Yazid Rezaiguia qui l’a monté en 1999. Un DJ de Mulhouse à la base. Le mec fait tout, tout seul, il s’est cramé, usé. Il veut vendre. « On connaissait. C’etait une super idée, on pensait qu’il y avait un potentiel. » Forte de sa connaissance des réseaux de la nuit, toute la petite équipe de Fun Radio reprend le Mag. « On a investi, on a créé une SARL. » À l’époque, il y a neuf discothèques qui tournent sur Dijon. La belle époque.

« Coeur de cible : 18-30 ans » « Malheureusement, très vite on s’est emballé. On a créé le Mag à Chalon, Bourg-en-Bresse, Mâcon, Auxerre. Ça a multiplié les frais. Je suis même allé en créer un à Besançon, mais ça n’a pas pris. Là-bas, il y a un syndicat de la nuit bien structuré. Ils se sont demandés ce que je foutais là vu que je rentrais tous les soirs à Dijon. Du coup ils m’ont boycotté au bout de 6 mois. Dijon-Besançon... Tu vois, quoi. » Trop lourd pour la structure. En 2005, cessation de paiement. « Je n’ai pas eu de conseils des comptables... et je ne suis pas un gestionnaire dans l’âme. On n’aurait pas dû se développer horizontalement. Faut jamais le faire. » La société est liquidée. Mais le Mag ne s’arrête pas pour autant, notre Thierry a de la suite dans les idées. Fini l’équipe de Fun Radio, fini de se balader. On se concentre sur Dijon. Il reprend le bébé grâce à l’imprimerie dans lequel le mag était imprimé, qu’il connaissait bien. L’imprimeur rachète la marque et éponge les dettes. Thierry garde le fonds de commerce. « On est marié par le Mag de la nuit. Indissociables. Cependant, je facture mes prestations à l’imprimeur. » Dijon, c’est la taille idéale. « Un bassin de population assez important, mais pas trop, pour que les gens puissent se reconnaître dans le Mag. » Lyon, ce serait trop grand. Chalon c’était trop petit. Pour Thierry, voilà l’essentiel : les gens se reconnaissent. Ou reconnaissent leurs potes. On est tous un peu égocentriques. On aime être mis en valeur par un mec qui veut nous photographier. Effet tapis rouge/photocall. Et puis on veut se voir donc on lit le Mag de la nuit. Effet 2.0. L’intérêt de la lecture, le coeur du Mag, c’est les photos. C’est pour ça que ça marche. Le photographe est Henri Samuel depuis 6 ans. « C’est le plus fidèle que j’ai eu. J’en ai eu des pas sérieux avant. Y’en a même un qui proposait des photos de charme aux filles. » Les photos, c’est pas un peu toujours les mêmes depuis 15 ans ? « Si. La photo est là pour retranscrire l’ambiance. » Alors l’ambiance ne doit pas changer beaucoup en fonction des établissements. En fait, si les gens regardent tous

l’objectif en souriant comme ça ou en faisant des cœurs avec les doigts, c’est parce que la prise sur le vif est interdite. Droit à l’image oblige. « On ne peut pas faire signer tout le monde », assure-t-il. Si les gens regardent l’objectif et sourient, on part du principe qu’ils sont d’accord pour apparaître sur le magazine. Donc pas de procès. Si le mec est avec sa maîtresse, il ne se laisse pas prendre en photo... Ou il est complètement con. C’est sûr que ça restreint l’intérêt des photos. Le pauvre Henri doit quand même un peu se faire chier à prendre toujours les mêmes clichés.

« Faut avoir l’esprit clair pour écrire les légendes » Et les légendes ? Parce que les photos sont peut-être le cœur du Mag, mais pour nous, le vrai mythe, la valeur ajoutée de notre petit A6 préféré, ça reste les légendes. « C’est moi qui les fais. » Ah ?! « J’ai peut-être un humour un peu trop acide. Je me suis calmé » Acide... « Oh, j’essaye d’être sympa. En général je fais les légendes des 250 photos le dimanche précédant la sortie du mag. En quelques heures. L’esprit clair. Quatre heures maxi. » Ça fait court pour 250 punchlines... Faudrait prendre un peu plus de temps, parce que là c’est un brin poussif. Ou alors ne pas faire de légende pour toutes les photos.

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le mag de la nuit

Sur chaque légende, on référence l’annonceur. Donc il a une mini-pub à chaque fois. Il n’y a pas de photo pour ceux qui n’achètent pas de pub ? « Non, il n’y a pas de pub sans qu’on vienne prendre des photos », nous répond-il sourire en coin. N’ont droit aux photos que les clients. C’est comme ça. C’est la pub qui fait tourner le mag bien sûr. Ça marche bien. « J’ai plus vraiment besoin de démarcher, les gens viennent nous chercher. J’ai 60 clients tous les mois. J’ai pas de mal a boucler. Au bout de 15 ans, la notoriété n’est plus a faire. » En effet, déjà en 2006, une étude de notoriété leur donnait tout simplement 100 % chez les 18-30 ans. Tout le monde connaît le Mag de la nuit. Pourquoi, au bout de tout ce temps, n’y a-t-il pas eu d’envie de changement dans la maquette ? Des reportages ? Plus d’interviews ? « Non je suis pas d’accord, la maquette a changé. Les couleurs flashy, ça fait partie du succès, on a fait un effort pour les annonces et le site internet, on a un graphiste qui bosse bien ». Nous, on dirait que... c’est un choix. Point de vue contenu, il y a l’édito, une interview d’un DJ, vite fait. C’est tout. Il y a bien un agenda, mais la plupart des établissements t’annoncent une clubbing party ou des soirées 80‘s... « Y’a pas assez de place sur le papier. » Trop de pub. L’éditorial, il y en aura peut-être sur le site. Qui marche encore bien, malgré sa petite esthétique psychotélétubbies-drapeau gay-90‘s. « Les gens ne lisent pas le Mag de la nuit pour l’éditorial. S’ils veulent s’informer, ils lisent La Gazette, Le Miroir, Bing Bang ou bien Sparse, qui est de mieux en mieux fait » (je vous l’ai laissée celle là -ndlr- merci, gros). « Le rôle du Mag de la nuit, c’est pas ça. C’est du clubbing. Moi je véhicule des photos, des souvenirs. Je les vends, j’ai pas de problème avec ça. » Ça me paraît clair.

autre. « Je veux etre réglo », avoue notre commercial. « J’aime aller au Trinidad. J’adore la serveuse, Janet. Je vais au Paris Night. Au Beverly, c’est les plus vieux clients du Mag. À La Casa del Mojito, là-bas, il n’y a rien qui dépasse, tout est net. Le patron est nickel chrome. J’aime les gens propres. Les beaux endroits. » Pas de partenariat avec les Tanneries en vue. « Récemment, je suis allé à la villa Messner. Parce que tout le monde doit y aller. » Le truc de Mario de la Star Ac’ ? Club privé et tout le tintouin ? Bon bah on ira alors. On s’étonnait de n’avoir jamais croisé Thierry avant. Maintenant qu’on sait où il traîne, on sait pourquoi.

« Je collecte des bels gens » « J’ai arrêté de prendre des kebabs comme annonceurs. C’est regrettable, parce que ces gars-là sont sympas et ils payent comme les autres, mais ça nuisait à l’image de marque. Il a fallu que je la redresse. » (L’image de la marque, hein, ndlr) C’est comme les photos. « Je ne donne pas de consigne, mais je sélectionne plutôt les jolies filles, je préfère... Déformation masculine. Le photographe et les annonceurs aiment ça. Je collecte des bels gens. » (double sic) Mais attention, Thierry peut s’éclater à la guinguette à Gevrey aussi. « Je suis un caméléon . Et puis les gens un peu différents, un peu moins beaux, ils ont le droit de sortir, ils ont le droit de vivre. » Ah, merci Thierry. « J’essaye de ne plus mettre uniquement des jeunes BCBG (sic), je travaille sur moi. » Du propre, de la nuit, de la fête, des jolies filles, des kebabs, miss Mag... C’est pas un peu beauf ton truc Thierry, si je peux me permettre ? Il manque que le foot. « Je suis pas universel. Ceux qui pensent que c’est un truc de beauf le lisent quand même. Pourquoi ? J’sais pas. Pour se regarder, comme les autres. J’ai envie de leur dire : ne le prenez pas » ajoute-t-il. « Vous, vous trouvez que c’est un truc de beauf ? » Bah oui un peu. « Ah. Mais vous le lisez ? » Oui, je suis à Dijon depuis 30 ans. « Si tu veux des articles culturels, faut lire autres chose. Toi, pourquoi tu le lis ? Déformation professionnelle ? » Non, plutôt parce que je suis un gros beauf. « Ah... » « Bon, il faut j’y aille ». Il n’a pas que ça à faire, Thierry. Il a sa femme à aller chercher à la gare et un business à faire tourner. Un business tu m’entends ? // C.W.

« N’ont droit aux photos que les annonceurs, c’est comme ça » Ces derniers temps, il n’y a pas que du clubbing dans le magazine. On a cru remarquer des pub pour des ongleries, ou des photos de jeunes geeks se tirant dessus au paintball. « Ces annonceurs se sont mis à m’appeler. On a une notoriété. La mairie aussi m’appelle, la CCI, les clubs sportifs -comme ça j’ai des écrans pub dans les salles de sports- le Grand Dijon pour la carte culture. » Oui, la carte culture dans le mag... « Ils supposent que ça va leur apporter quelque chose au niveau de la cible. » Le service marketing de la carte culture likes this... visiblement. « Le monde de la nuit a changé, ça bouge différemment. » Thierry regrette les vrais établissement de nuit. « Y’a le Chat Noir. Classique. La Centrale ? C’est un peu désuet. Y’a plus de clients, j’irais pas… J’ai pas d’affinités avec la direction. Pas du tout de bons rapports. Le Carré ? C’est sale. Ils n’ont rien changé. Même les étudiants n’y vont plus. Y’a que le côté 30-40 qui peut marcher. » Thierry sort encore de temps en temps, pour faire du relationnel surtout. Il s’est fait des amis dans la profession. « Dans le monde de la nuit, les gens sont sains. On n’est pas dans le bling bling dans ce métier. » On croirait que Thierry nous parle d’une épicerie solidaire associative. Ou d’une MJC. Quand il sort, il sort tout seul. En mercenaire. « Je visite les clients. Je préfère depenser mes sous chez eux. » Quand il sort pour lui, il ne le fait pas à Dijon. Il ne veut pas donner l’impression d’en préférer un plutôt qu’un

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entretien

Berteloot de source PaR chablis winston et pierre-olivier bobo photos : alexandre claass

« Je ne comprends pas pourquoi vous voulez m’interviewer... Mais bon, si vous y tenez. On se voit au Quentin. » 30 ans d’activisme, 25 ans de mandats, 13 ans adjoint à la Culture de la ville de Dijon. Un pan d’histoire. Désormais rangé des bagnoles, Yves Berteloot nous prévient dès le début qu’il ne balancera pas tout et tout le monde. Mais nous en dit largement assez. Les années Poujade, le Chez Nous, les Tanneries, VooTV, ses embrouilles lors de la Manif’ pour tous, son pote François et quelques verres de blanc : interview confession.

Tu es Dijonnais à la base ? Non ! Je viens de loin : Beaune. Mais ça on n’en parle pas, c’est pas glorieux ! Mes parents étaient Beaunois, Je suis né à Beaune mais aujourd’hui je n’ai plus aucun copain à Beaune. C’est une ville qui est quand même particulière. J’ai eu des copains beaunois qui sont maintenant à Dijon, à Paris, ailleurs… C’est une ville où je retourne pour voir mes parents. T’es arrivé à Dijon pour les études en fait. Oui, voilà ! Et j’y suis resté. J’ai découvert le Chez Nous. Le jour où je devais m’inscrire en fac, des copains m’ont dit : « On va t’amener dans un endroit super. » Alors on est allés au Chez Nous. Avec Aimée, la tenancière.

Sympa, on a discuté, on a bu des canons. Du coup quand je suis rentré à Beaune le soir, mes parents m’ont demandé : « Ça y est, c’est bon t’es inscrit ? » Je leur ai répondu : « Ah non, il y avait trop de monde, faut que j’y retourne demain ! » Tu l’as plus quitté depuis… Pratiquement plus. D’ailleurs, on a monté un club avec des copains de fac : une fois par mois, on vient déjeuner au Chez Nous. On est 8-10 et on fait ça quel que soit le propriétaire… Pour perpétuer l’esprit ! Alors ça a failli mourir effectivement, mais a priori aujourd’hui ça va mieux. Comment tu te retrouves dans le milieu culturel ? Je suis toujours allé aux concerts, voir

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des spectacles au Parvis Saint-Jean. En 1989, j’étais sur la liste de Rebsamen, contre Poujade, et naturellement, dans l’opposition, j’étais chargé des affaires culturelles parce que c’est quelque chose qui m’avait toujours intéressé. La culture, c’est un attrait très personnel, pas vraiment de famille. Je me suis toujours intéressé au spectacle vivant, à la musique, à l’art contemporain. Le déclic, c’est le Théâtre de Bourgogne et son directeur Jacques Fornier à Beaune dans les années où j’étais lycéen. Un tout petit théâtre, avenue de la République. Du coup, en 1989 au Parti socialiste, c’est toi le mec qui s’y connaît en culture. Qui s’y connaît, je ne sais pas, mais je m’y intéressais. →


yves berteloot

« L’opposition, sous Robert Poujade, c’était très compliqué »

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entretien

liberté ? Oui je le savais, et au départ avec beaucoup de liberté, bien sûr. Puis après, on s’est heurté aux réalités budgétaires. Alors on s’est dit qu’on allait faire un Zénith, on a fait un concert place de la Libération, le concert de rentrée, on va développer La Vapeur. D’ailleurs, le projet de La Vapeur est toujours celui qui me tient à cœur. Soutien également au Théâtre Dijon Bourgogne. On a rénové l’espace de la salle Jacques Fornier, rue d’Ahuy. On l’a mise aux normes pour l’accueil du public, pour que ce soit un lieu de répétition. Il y a eu aussi la ré-organisation de l’auditorium et du Grand Théâtre pour créer l’Opéra Dijon. Ça c’était un travail de longue haleine car il y avait le Grand Théâtre qui était une délégation de gestion privée et l’auditorium qui était municipal.

« Pourquoi un gros festival qui coûterait la peau des fesses ? »

J’étais acteur du secteur culturel en tant que spectateur mais je n’ai jamais travaillé dans une structure culturelle. Et la politique, ça vient comment chez toi ? Ça vient du lycée, en 1968 à Beaune. Les événements de mai 68 m’ont permis de réfléchir et comprendre certaines choses. Mes parents gaullistes, puis mon arrivée en fac, les rencontres avec les mouvements d’extrême gauche… C’est venu naturellement. Une prise de conscience. Ensuite, les années 80-90 à Dijon, quand t’es au PS, c’est l’assurance de se faire défoncer à toutes les élections municipales. Ça a été un lourd travail d’opposition. On était quelques-uns, il y avait Colette Popard, François Rebsamen… Il n’y a plus grand monde de l’équipe actuelle de 2014 qui était dans l’opposition en 1989. Et vous ne pouvez pas imaginer ce que c’était d’être élu d’opposition à l’époque de Robert Poujade. Aucun droit, pas accès aux dossiers, c’était très compliqué. Tu faisais quoi comme boulot toi ? À l’époque j’avais créé ma société, j’étais

entrepreneur individuel en profession libérale, j’avais une régie publicitaire. Je bossais pour des collectivités locales, des structures associatives… Et c’était comment la culture à la fin des années 80, années 90 à Dijon ? Toi qui étais au cœur des dossiers ? Il n’y avait pas vraiment de soutien à la création, aux nouveaux projets. Le budget de la culture était plombé par la construction de l’auditorium. L’adjoint à la culture de l’époque, ça a été Jean-François Bazin, puis Michèle Curtil-Faivre qui était une femme plutôt impliquée dans le milieu culturel mais assez élitiste. C’était une ville de droite gérée comme une ville de droite, malgré quelques encouragements parfois. Le public visé n’était pas le même qu’aujourd’hui. 2001, vous gagnez l’élection municipale. Vous vous y attendiez ? On s’y attendait, oui ! Moment exceptionnel : la gauche gagne la ville de Dijon. Avec plein de projets pour la culture, mais après il y a la réalité budgétaire. Donc c’est à toi que Rebsamen confie la culture. Tu le savais déjà ? T’as eu de la 22

Ça c’étaient les premières priorités et donc très vite ensuite tu te rends compte qu’il n’y a pas d’argent ? À l’époque il y en avait un petit peu. Ça a permis ça. Et aussi le lancement d’un chantier qu’on ne découvre que maintenant : la rénovation du musée des Beaux-Arts. Mais il a fallu des années d’études. Enfin, nous avons soutenu énormément les associations culturelles, notamment les projets qui portent sur les quartiers : les Grésilles, Fontaine d’Ouche. On a mis le maximum qu’on a pu là-dessus, il y a toujours eu un soutien à ces projets et c’est toujours ce que porte Christine Martin (actuelle adjointe à la culturel, ndlr). Et oui, déjà à l’époque, il y avait des contraintes budgétaires. Quand on vote un budget en décembre pour l’année suivante, 80 % est déjà ciblé et il ne reste pas beaucoup de marge pour les nouveaux projets. C’est ça la grosse frustration de l’action d’un adjoint à la culture : ne pas pouvoir porter de nouveaux projets comme il le voudrait, parce que tout ce qui est en place « bouffe » déjà tout. On a le sentiment que lorsque vous êtes arrivés à la mairie, vous avez voulu faire des choses qui se voient : un Zénith, un concert de rentrée… Et finalement, bosser avec les quartiers, ça se voit moins. Tu sais pourquoi on a fait le concert de rentrée ? Lorsqu’on a gagné les municipales, on a fait un grand concert sur la place de la Libération, offert aux Dijonnais. Il fallait renouveler cela ! C’est


yves berteloot

public, c’est gratuit, les gens viennent… Au début, on le faisait qu’avec des groupes locaux. Puis ensuite, ça m’a un peu échappé et on a fait venir des têtes d’affiche. Mais ça ne sert à rien ! C’est une scène qui pourrait être ouverte pour les groupes locaux, c’est ce qu’on a fait pendant des années. Ça… Je regrette, vous pouvez le dire ! Le concert de rentrée, c’était des groupes locaux à qui on offrait une scène. Et il y avait quand même des têtes d’affiche : Yves Jamait, la première fois qu’il est passé à Dijon sur une grande structure, c’était là ! Mais des grosses pointures, ça ne sert à rien ! Bon… Je ne vais pas en dire plus… Voilà. Parce qu’après, ça a échappé à la culture, c’est devenu le projet de la com’. Ce qu’il se dit aussi à Dijon, c’est que d’autres villes en France soutiennent un seul gros projet qui va avoir un rayonnement national… (Il coupe) Mais ça, c’est ma politique et c’est celle de Christine aussi : pourquoi un gros festival qui coûterait la peau des fesses ? Ça ne sert à rien, ou alors c’est pour l’image de la ville. Et c’est aux dépens de toutes les associations qui font un boulot énorme. La culture à Dijon repose sur les grosses structures mais aussi sur un réseau associatif énorme. C’est un choix que je défendrais toujours. Est-ce qu’on vous l’a reproché à la mairie ? Les gens de la com’ ? Non, à la mairie, tout le monde est d’accord là-dessus. Il y a eu l’Oeno Music Festival, on vous a reproché de ne pas l’avoir assez soutenu. Oui, mais quand il a été lancé, le budget 2014 était déjà voté, il n’y avait pas de ligne pour ce festival. Pierre-Yves, je l’aime beaucoup (Pierre-Yves Romano, directeur de l’Oeno Music Festival, ndlr) mais il a un petit peu forcé les choses. Je ne suis pas sûr qu’on avait les moyens à ce moment-là, je ne suis pas sûr qu’on les aura l’année prochaine. Comme je vous le disais, il n’y a pas beaucoup de marge pour soutenir les nouveaux projets. C’est le gros problème des collectivités locales, pas que Dijon. (On marque une petite pause cigarette/pipi) (Il revient) Alors comme ça vous étiez à la Péniche Cancale hier ? Ah, j’y vais jamais à la Péniche ! C’est dommage hein, j’aime beaucoup ce qu’ils font pourtant, c’est un lieu super ! Mais bon, je vais à l’auditorium, je vais au TDB, à La Vapeur… Je suis toujours présent, ça m’intéresse. Hier je suis allé voir William Christie, les Arts

Florissants, à l’Opéra, c’est de la musique baroque. Je suis désolé d’être venu car je suis parti à l’entracte. Ça m’embête car je le fais jamais… Mais sinon, il y a un projet que je soutiens toujours et qui va se mettre en place, c’est la rénovation de La Vapeur. Si ça ne se faisait pas, ça serait pour moi un drame terrible.

« C’était beaucoup de pression, tout le temps. Tu ne dors pas la nuit »

Pourquoi ? Mais parce que ! Vous connaissez La Vapeur. Vous voyez dans quelles conditions ils travaillent ? Je ne parle pas des conditions d’accueil du public, mais du personnel : leurs petits bureaux, tout ça… Le projet, c’est aussi d’améliorer l’accueil du public, d’avoir une salle avec une jauge un petit peu plus importante, l’autre salle qu’on appelle « le club » qui soit indépendante de la grande salle. C’est un projet à 4 millions d’euros qui va démarrer bientôt. L’autre grand projet qui me tient à cœur, c’est la continuité dans la rénovation du musée des Beaux-Arts. On a inauguré la première tranche il y a un an, maintenant c’est au tour de la deuxième tranche. Le musée va être fermé pendant 18 mois et ça va se faire. Ça, c’est ce qui concerne les projets des grosses structures institutionnalisées. Oui ! Euh… Je ne sais pas si La Vapeur est une grosse structure. Le Théâtre Dijon Bourgogne, l’Opéra Dijon et le musée des Beaux-Arts, oui. La Vapeur est une structure municipale certes, mais je ne suis pas sûr que ce soit une grosse structure. Même si pour moi c’est un lieu très important. Arrive ensuite le deuxième mandat, où tu partages la responsabilité d’élu à la culture avec Christine Martin. (Il coupe) En bonne entente, hein ! Il y avait trop de choses à faire ? Trop pour un seul homme ? C’est-à-dire qu’en 2008, Christine Martin était chargée de l’animation de la ville, donc des relations avec les associations. Moi je ne pouvais pas m’occuper de toutes les associations, de toutes les structures, etc. Donc c’était une demande de ta part ? À peu près, il fallait partager le poste.

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Ça ne t’a pas vexé ? Non, moi je gardais ce qui m’intéressait plutôt : les structures culturelles municipales, les bibliothèques, les musées, les régies (l’Opéra, La Vapeur…). Alors qu’aujourd’hui, Christine récupère tout. Autant que pendant mon premier mandat j’ai l’impression. Lors du premier mandat t’as dû laisser des choses de côté ? Le rapport avec les associations ? Non, jamais, jamais ! Mais c’était une charge très lourde à porter. Il y a dans le domaine culturel beaucoup d’associations qui viennent te voir, avec leurs projets, avec leurs budgets. C’est compliqué de tout gérer quand tu as un budget qui ne te permet pas de porter de nouveaux projets. C’est beaucoup de pression, tout le temps. Tu ne dors pas la nuit, la journée tu te dis : « Mais comment je vais faire ? » Finalement, ça a été comme une libération pour toi quand Christine est arrivée ? Non, pas forcément. Mais le budget de la culture, comme le budget de la ville, n’a pas augmenté. Donc il n’y a pas plus de moyens, alors qu’il y a beaucoup plus de demandes. Et tout s’est développé depuis 2001. Donc c’est une question de choix, bien sûr. Il y a des assos qu’on aimerait bien aider plus, et d’autres qu’on devrait moins aider... Lesquelles ? (Silence) Quel regard tu portes sur les Tanneries et leur déménagement ? Quand vous êtes arrivés à la mairie, eux étaient déjà installés depuis un moment. C’est un lieu culturel très important. Alors après, est-ce qu’il faut soutenir un projet aux Tanneries, qui sont des marginaux et qui ne souhaitent pas dépendre de subventions ? Nous, avec ce qu’on leur offre, en signant une convention avec eux, puis en aidant au déménagement, la prochaine étape c’est la retraite ! C’est-à-dire ? Ceux qui sont à l’origine des Tanneries, qui sont toujours là, maintenant ils sont tranquilles ! On a signé une convention donc ils sont assurés - en termes d’assurance - quel que soit le problème qui peut arriver sur les lieux qu’ils occupent illégalement. Maintenant, on va les héberger. Donc quelle est la prochaine étape ? Le prochain projet ? Hé bien c’est leur retraite à eux ! Tu penses que vous leur avez offert un truc ? Qu’il ne fallait pas donner autant ? Car ça représente plus d’un million d’euros… Pour moi, c’est une erreur. →


ENTRETIEN Pourquoi ? Parce que ce sont des mecs qui vivent en marge ? Car ce n’est pas leur mode de fonctionnement… Oui, mais ils l’ont accepté cet argent. Alors ils l’acceptent mal. Tu penses qu’ils prennent l’argent mais qu’ils ont un peu honte quand même. C’est complètement ça. Sur le principe pourquoi pas, mais je pense qu’il y avait d’autres priorité en matière culturelle à Dijon, il y avait d’autres besoins et d’autres demandes. Pourquoi avoir accepté dans ce cas ? C’est politique, pour ne pas se faire emmerder ? Moi je n’y suis pour rien… En gros c’est le maire qui t’a dit de faire quelque chose, pour pas que les mecs des Tanneries mettent le bordel dans le projet de nouveau quartier ? Plus ou moins ? (Silence) On boit un coup ? (Il rigole) Je le répète, les Tanneries en tant que tel, c’est bien, mais que ce soit institutionnalisé… Ça pose des questions. Je pense qu’il y a plein d’autres choses qui se font à Dijon, plein d’associations… Qu’est-ce que tu trouves intéressant par exemple et qui est porté par des associations ? Déjà on peut parler de la Péniche Cancale. Ce n’est pas une association, c’est une coopérative. Oui, enfin bon peu importe… Le modèle économique n’est pas le même… La Péniche déjà, je ne sais pas comment elle vit ! C’est un mystère. Mais c’est un bel exemple… Il y en a d’autres, il y a plein d’associations de quartier. En mai 2014, nouvelle élection municipale, nouvelle équipe : tu n’avais pas envie d’y retourner ? Il y a eu plusieurs facteurs en fait. Le premier, c’est que j’ai eu un gros accident au mois de novembre 2013, j’ai été hospitalisé pendant plusieurs semaines à cause d’un accident bête. Je me suis cassé la hanche, le bassin. Le deuxième facteur, c’est que Rebsamen souhaitait renouveler l’équipe et c’était tout à fait normal. Gérard Dupire au sport n’a pas été renouvelé… Comment il te l’annonce ? On en a parlé ensemble, il m’a dit comment il imaginait la prochaine liste. Moi j’avais fait deux mandats dans l’opposition, deux dans la majorité. Je trouvais ça normal, et avec Christine, on avait bien travaillé.

Tu étais déçu ? Sur le coup, on est toujours un peu déçu, mais je m’y attendais, je le comprends. Moi j’ai toujours pensé qu’il fallait renouveler et je trouve que ça n’a pas été assez fait. Qui est le successeur de Rebsamen ? Je vous pose la question. Alain Millot. Alain… Bon, on ne peut pas en parler. Koenders ? Grandguillaume ? Laurent est quand même bien en retrait, vous n’avez pas remarqué ? Il est en retrait au niveau municipal. Nathalie Koenders, je l’aime bien mais bon, voilà… Et Alain Millot, là, sa maladie lui est tombée dessus (Alain Millot a annoncé son cancer du poumon le 14 octobre). Alors, qui est le successeur de Rebsamen, je n’ai pas la réponse… Et donc cette nouvelle liste n’a pas été conçue pour préparer la succession.

« Des mecs me tombent dessus, me plaquent au sol : c’était les flics » T’aimerais que ça puisse être qui dans la liste ? Moi je n’en vois pas. Mais sinon, c’est Laurent… même si je le vois très en retrait. Je pense pour des tas de raison. Peut-être peut-il arriver comme un recours ? Ou alors Rebsamen revient suite à un remaniement et repart pour un nouveau mandat où il se fera peut-être battre ? Tu nous as cité deux facteurs tout à l’heure, qui expliquent le fait que tu ne sois pas dans la nouvelle liste. Il y en a d’autres ? (Silence) Nous, on s’est dit que tu avais été aussi victime de ta mésaventure lors de la manifestation anti-mariage gay place de la Libération. C’était le mauvais timing. C’est évident que c’est mal tombé. Mais je ne le regrette pas, car tout ce qui a été raconté dans le Bien Public n’est pas la réalité. Et je n’ai pas pu faire de démenti parce que Rebsamen… Il ne voulait pas ? Il voulait que l’histoire s’arrête là ? L’histoire ne s’est jamais passée comme ça. Jamais. Ça s’est passé comment ? Non, je n’ai plus envie de parler de ça à vrai dire… C’était atroce.

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Parce que tu t’es quand même bien fait dézinguer par le Bien Public. Par un mec qui n’y est plus maintenant. C’était un type qui avait une autre vision du journalisme, qui passait là et qui avait décidé de faire un coup. Mais moi, je me suis fait avoir ! (Le premier article publié le 03 février 2014 est signé Vincent Gautronneau, le second datant du lendemain est signé par Nicolas Rouillard et Vincent Gautronneau, ndlr) Comment ça s’est passé alors ? Je me suis engueulé avec un mec qui portait un blouson d’une compagnie d’assurance. Je lui ai dit : « Votre employeur, il cautionne que vous soyez au service d’ordre de la manif ’ ? » Il me répond : « J’appelle le service d’ordre. » Mais moi j’ai cru que c’était lui le service d’ordre de la manif’, et des mecs me sont tombés dessus, ils m’ont mis au sol tout de suite, c’était les flics. Tu t’étais engueulé avec lui quand même, donc le ton était monté ? Non, il a même dit le lendemain dans le Bien Public qu’il n’y avait pas eu de mots… Mais alors pourquoi les flics te sautent dessus ? T’étais en train d’hurler au milieu de la place de la Libération ? Pas du tout, il y a des témoins. C’est terrible ce qui m’est arrivé. Ça m’embête beaucoup d’en parler parce que c’est très dur… Mais je n’étais pas tout seul, il y avait des gens à côté de moi. Lorsqu’il appelle le service d’ordre et que les mecs me choppent, là je me suis défendu et je les ai engueulés ! Je croyais que c’était le service d’ordre de la manif’ mais c’était les flics. Comment ça se fait qu’il y ait des flics qui sautent sur un type comme ça et le mettent au sol s’il n’a rien fait ? Demande à François Rebsamen qui n’a rien voulu faire… C’est une histoire qui m’a marqué. T’étais bourré ? Ah non ! Pourquoi tu dis ça ? Parce que c’est ce qui était écrit et c’est ce qui s’est dit... Ça, c’était écrit le lendemain : « Il était en état d’alcoolémie ». Ça a été repris le lendemain… Mais c’est complètement faux. Et t’as jamais pu faire de démenti. Non, Rebsamen n’a jamais voulu. Il a fallu que je fasse une lettre d’excuses aux flics. Que je n’ai jamais insultés et avec qui je ne me suis jamais engueulé. C’est très dur ce que j’ai vécu, c’est pour ça que j’ai un peu de mal à en parler.


Ça a quand même plus de gueule qu’Alain Houpert, non ?

« Rien n’a été préparé pour la succession de Rebsamen »

En tout cas, dès le lendemain quand on a vu ça, t’étais notre héros. (Il reprend) Je suis allé voir sur la place de la Libération des maires qui avaient leur banderole et je leur ai dit : « Mais qu’est-ce que vous faites là, ce n’est pas votre rôle ». Tu les as un peu invectivés ? Non, à aucun moment. Je suis allé les voir. Figure-toi que juste avant, j’avais rencontré le curé de l’église Notre-Dame, qui est juste derrière la mairie. On avait discuté un petit peu et il m’avait dit qu’il y avait d’autres problèmes que ça aujourd’hui ! C’est un mec vachement bien. Après j’ai essayé de reprendre ma voiture qui était dans la cour d’honneur, sur la place où il y avait la manif’. J’étais même avec le directeur de l’URSSAF. Ils t’empêchaient de sortir ta voiture ? Non, je n’ai pas voulu sortir, quand il y a la manif’ tu sors pas. Je suis allé voir deux-trois maires que je connais, comme je te disais et puis je vois ce type avec ce blouson, que je croyais être de la sécurité. Je n’ai insulté personne, je n’étais pas ivre. Les flics qui t’ont plaqué au sol ont craqué alors. Ceux qui m’ont choppé, oui. Ils m’ont mis en dégrisement. Ceux d’après, place Suquet, pas du tout. Après ça s’est très bien passé. Et alors il y a une chose qui m’a étonné avec ceux qui m’ont mis au sol, c’est qu’ils m’ont dit tout de suite : « Monsieur Berteloot ne bougez pas. » Comment ils connaissaient mon nom ? Les mecs je ne les connaissais pas, moi je pensais que c’était le service d’ordre de la manif’. Ça t’a marqué. Toujours, je suis traumatisé par ça. Tu te réveilles le matin, tu regardes sur Internet, tu vois le titre du Bien Public, et le lendemain encore et encore. Et pour le démenti, j’ai eu tort d’écouter Rebsamen. C’est un regret pour moi, il y avait des témoins, ils ont vu comment ça s’est passé. Ça pourrait être un traquenard... Non, mais il n’était pas prévu le traquenard, j’étais là au mauvais moment. Mais c’est dur à vivre. Maintenant c’est loin derrière… Ce n’est pas si loin, quand on en parle tu vois… (Il est ému) Ça remue beaucoup de choses. L’attitude de Rebsamen, tout ça…

Vous avez toujours de bons rapports ? Oui oui, tu ne me feras pas dire… (Sourire) Tu t’emmerdes pas trop depuis que t’es en « mi-retraite » ? Non, pas du tout… Je suis toujours présent dans le milieu culturel dijonnais, ça m’intéresse énormément. Peutêtre que j’irai plus dans des endroits où je n’avais pas le temps d’aller, comme la Péniche Cancale, l’atheneum… Et j’ai toujours une mission auprès du maire de Dijon. Dernière question : quel regard tu portes sur la fin de VooTV ? Pour moi c’est mystérieux ce qui s’est passé. Mais c’est hallucinant : comment une télévision qui vous regarde - car c’était le slogan - mais que tu ne peux pas regarder, peut fonctionner ? C’était le projet de la mairie quand même. Au départ, oui, le projet était intéressant, des médias locaux existent ailleurs. Mais je

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pense qu’il y avait autant de salariés à VooTV qu’à France 3 Bourgogne. Et bien payés. Moi j’étais au conseil d’administration de Dijon Bourgogne Images (la maison mère de VooTV, ndlr) en tant qu’élu, car il fallait un certain nombre d’élus de la ville. Finalement tu ne t’y es jamais trop intéressé ? Pas du tout, pour moi c’était un grand mystère. Je n’ai rien compris à ce truclà. Ça a coûté des sous. Mais ça a merdé tout de suite, déjà quand tu n’as pas de réseau de diffusion… Et à un moment donné, Jean-Louis Pierre, ancien du Bien Public, débarque à la direction. On se dit qu’il ne peut pas venir sans l’aval de la mairie, alors qu’il n’est pas réputé pour être pote des socialistes. Ah bon ? (Rires) Je te taquine. C’est un épisode que j’avais oublié ça aussi… Pfff... (Silence) Au final, on n’a pas mis tant d’argent que ça, mais on en a mis. Et pour rien... // C.W. et P.-O.B


ENQUÊTE

Le top 5 des attractions chez Gigaland parce qu’on pense aussi à vos gosses, bordel.

PaR nicolas boeuf photos : David cesbron

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A

u fond du Grand Marché Quetigny, tout près de la fameuse table Pizza Happy, s’ouvrent les portes de mon enfer personnel : Gigaland - Les Couloirs du Temps. « L’un des plus grands parcs couverts de France », de 1 à 12 ans. Imaginez une société post-apocalyptique où les enfants régneraient en maître sur le monde. C’est un peu ce qui se passe à l’intérieur de Gigaland. Le chaos le plus total. Partout, des dizaines de mioches qui courent en hurlant, se poussent et s’envoient des grands coups de jouets en mousse dans la tête. Mad Max version gratuite, sans les armes à feu, mais sous acide. Le niveau sonore de l’immense hangar rempli d’attractions colorées explose la grande scène du Hellfest au compteur de décibels. Facile. Finalement, au bout d’une bonne demi-heure, je finis par m’habituer au bruit. Passé l’effroi des premiers instants, je pose un deuxième regard sur l’endroit. Et soudain, c’est la poussée d’adrénaline. Je peine à me retenir d’envoyer en l’air mes chaussures, toute retenue et finalement toutes conventions sociales qui déterminent ce que l’on peut/doit faire en tant que jeune adulte aspirant à l’élite culturelle provinciale pour me jeter jovialement dans la piscine à balles. Évidemment, je ne l’ai pas fait, parce que je ne veux pas passer pour un pédophile embusqué qui aurait découvert la caverne d’Ali Baba, version deepweb. Mais voici les cinq attractions que j’aurais testées si j’avais eu 5 ans à Gigaland.

La tour infernale Taux de fun : 8/10 Taux de violence : 6/10 Taux de cris : 7/10 Imaginez-vous vous laisser glisser de filets en filets au pied d’une tour de quelques huit mètres de haut. L’attraction principale de la chose a l’air de consister à faire pression sur la tête de son camarade pour qu’il atteigne le sol avec la plus grande vitesse possible. Le taulier du parc, qui en a visité une cinquantaine avant de lancer Gigaland, me confiait que c’est une des attractions préférées des gosses. Comme je les comprends.

La piscine à balles Taux de fun : 7/10 Taux de violence : 7/10 Taux de cris : 8/10 Un grand classique, toujours aussi indémodable. Il y en a plusieurs dans le parc, mais ma préférée est celle des plus petits. En escaladant judicieusement un monticule en mousse avant de sauter, le jeune Enzo, 5 ans, a impressionné le jury en visant avec succès la tête de son petit frère. Une belle performance conclue par un atterrissage dans la piscine qui a envoyé des balles à peu près partout.

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enquête

Les pneus jaunes en mousse

Le donjon aux jouets

Taux de fun : 9/10 Taux de violence : 12/10 Taux de cris : 9/10

Taux de fun : 0/10 Taux de violence : potentiellement explosif Taux de cris : 6/10

C’est la première scène à laquelle j’ai assisté en entrant à Gigaland et je suis encore effrayé de la sauvagerie des enfants. Deux jeunes filles semblaient prendre grand plaisir à empiler sur leur camarade des sortes de pneus jaunes en mousse. Une fois ladite camarade recouverte, étrangement semblable au bonhomme Michelin, l’une des deux brutes l’a vigoureusement poussée d’un coup sec sur le torse. Évidemment, paralysée par le piège, l’autre s’est effondrée par terre. Elle est restée là, dans une position désarticulée, jusqu’à ce que je parte.

Le créateur de cet endroit n’est pas le bienveillant architecte d’un paradis pour enfant que l’on pourrait imaginer. C’est un sadique de la pire espèce. Au fond de la salle de jeux, une pièce bourrée de jouets et de jeux encore emballés est fermée par une infranchissable grille forgée. En tout cas, un panneau interdit de l’escalader. Quand un gamin fait son anniversaire, il a le droit de rentrer pendant 45 secondes tandis que les autres bavent devant.

Le mini-golf psychédélique Taux de fun : 6/10 Taux de violence : 0/10 Taux de cris : 2/10 Enfin, on comprend pourquoi ce Gigaland est soustitré « Les Couloirs du Temps ». Le mini-golf étire son parcours de 18 mini-trous du Jurassique jusqu’à la science-fiction, en passant par les chevaliers du MoyenÂge et la conquête spatiale. Le problème, c’est que le parcours se fait entièrement sous l’éclairage de lumière noire. Du coup, les décorations fluo brillent bizarrement dans le noir, et j’ai plutôt l’impression de voir des enfants jouer au golf dans le cerveau de Hunter S. Thompson dans Las Vegas Parano. Perturbant. // N.B.

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immersion

« Mais au fait, tu es de quel signe astrologique, toi ? » Le love game : l’enfer des rencontres dijonnaises PaR katy purry et franck le tank illustrations : david fangaia

Huit millions de célibataires en France, et moi et moi et moi. Nous cherchons tous les deux désespérément l’amour – n’ayons pas peur des mots – dans la capitale burgonde. Mais malgré nos sorties mondaines et notre vaste réseau, nous n’échappons pas au couperet des statistiques de l’INSEE. Comment faire en 2014 pour rencontrer quelqu’un IRL (in real life) sans passer par les sites piégés bien connus comme Adopte un mec et Meetic, ou les applis type Tinder ? Pour vous, on a testé les soirées célibataires. Franck Le Tank : 28 ans, romantique dans l’âme mais pas trop. Rech jf 25-35, fidèle et aimante pour balades romantiques autour du lac Kir. Pas sérieuses s’abstenir. CSP ++

Katy Purry : 30 ans, brune, enjouée, rech jh 2535 qui se respecte à minima et partage passion pour le karting. Je suis sensible, alors évitez les mensonges et de me faire perdre mon temps.

A

animée d’un film de Coppola. Assise à sa gauche, Julie, physique de documentaliste, rongée par la timidité, le genre de meuf que tu as eu 3 ans dans ta classe au lycée sans connaître son prénom, balbutie quelques réponses faisant choux blanc. D’ailleurs il y a plus d’hommes que de femmes à cette soirée et la deuxième célib’, habitée par le démon du jeu, ne laisse absolument rien passer. Nous l’appellerons vite Miss Domina, une sorte d’alter égo de Xéna version Time’s Up. Dès la première pause clope, elle nous fait savoir que nous sommes le cancer de la nation : « Ohlala, les casseurs d’ambiances les fumeurs ! » Franck l’aime déjà. Dehors nous découvrons David, unique autre addict du groupe, avec qui nous pouvons enfin échanger quelques mots. C’est le seul mec à peu près normal. Arrivé à Dijon il y a peu de temps, il a été séduit par le concept, et comme nous il est sceptique quant aux chances de rencontrer l’âme sœur ici. De retour de notre break, nous constatons que les autres se sont jetés à corps perdus dans une nouvelle activité ludique : Timelines, jeu abrutissant pour nerd consistant à retrouver l’année d’invention du sac poubelle ou celle de la découverte de la siphyllis. Notre dernier participant Pierre, geek émérite, qui s’est révélé incollable sur les licences de jeux vidéo au premier tour, s’avère être une véritable buse en histoire, il perd des points de street cred avec Miss Domina, sa partenaire. Malgré une première heure plutôt animée qui nous a permis de nous détendre, le malaise s’installe rapidement, lorsque tout le monde réalise qu’il n’y aura pas d’opportunité d’aller plus loin dans la séduction. La fin de la partie s’éternise, à l’unanimité nous avortons ce jeu infect. Et alors que notre animateur de →

près quelques minutes passées sur la toile, nous trouvons rapidement un premier prestataire, Casual Rencontre, qui nous propose une soirée originale. Le concept : se retrouver dans un bar dijonnais entre célibataires autour de différents jeux de société. L’annonce nous promet la parité et trois heures d’échanges entre participants pour la modique somme de 10€, verre inclus. Sur le papier ça a l’air plutôt prometteur... Le paiement via Paypal finit de nous rassurer. Une semaine passe et l’euphorie des premiers jours s’est transformée en une boule au ventre : mais qu’est-ce qu’on va bien pouvoir leur dire à tous ? On imagine déjà la tête des autres malheureux qui se sont inscrits... Vendredi, 20h, nous finissons l’apéro avant de rejoindre le rade l’Annexe, la mort dans l’âme. Nous nous séparons quelques mètres avant d’atteindre le bar, ce soir nous serons deux étrangers afin de ne pas biaiser le cadre du date. Aucun panonceau indicateur à l’entrée, il faudra se référer au barman qui nous indique la table réservée, au fond du rade, vers le radiateur. « Et c’est parti pour le show ». Alors que François, l’ambassadeur de Casual s’affaire à choisir notre premier jeu, nous nous présentons brièvement aux autres participants. Sans aucune autre forme d’introduction, on attaque dans une atmosphère plutôt tendue une partie de Time’s up. Et très vite, les personnalités se révèlent ; à commencer par le manque de confiance en lui de Benoit, puceau de 32 ans, à la calvitie luisante, plus intéressé par la vue d’un décolleté que par la description 30



immersion pour la cave à vin Le Trou. Malgré cet échec cuisant, on décide de passer la seconde en s’inscrivant à l’épreuve maîtresse de la rencontre IRL : le speed dating. Le formulaire à remplir sur le site Larencontre.net est des plus anxiogènes. Pas moins de 4 pages de renseignements divers sont à compléter en finissant par une description. Traits de caractères, motivations, le tout en moins de 500 caractères. Dur. Cette fois, le prix d’entrée est fixé à 20€ pour les hommes et 15€ pour les femmes dans le bar de nuit dijonnais qui fait aussi brasserie/concert/club dans le caveau/peep show (rayer la mention inutile). Encore un vendredi soir sacrifié à la grande cause du journalisme d’investigation, Bernard de la Villardière aime ça.

« Tu pourrais avoir l’âge de mon fils ! » soirée enchaîne sur une troisième distraction, nous décidons de nous enfuir. Nous étions venus pour rencontrer des célibataires, essayer de comprendre leur démarche, connaître leurs attentes... Mais le cadre hermétique du jeu n’a laissé aucune place à la spontanéité.

Highway to love. Arrivés sous une pluie diluvienne, nous faisons la queue devant le temple de l’amour. Le master of ceremony, Bertrand, assis derrière une minuscule table et arborant un t-shirt aux couleurs de sa boîte, nous accueille dans le patio. Nous patientons afin de récupérer le numéro qui nous est attribué ainsi qu’une feuille, le sésame, sur laquelle nous allons pouvoir indiquer notre sélection en fin de soirée. Ce qui nous frappe d’entrée, et nous inquiète un peu, c’est l’écart d’âge entre les participants : ça va de la jeune première d’une vingtaine d’année au vieux col blanc de 65 ans. Heureusement, ce sacré Bertrand a tout prévu en nous séparant en deux groupes, un premier pour les 25-35 ans, le second pour les 40 et plus. Dans le caveau à la déco vieillissante et au sol collant, la lumière se veut tamisée, rencontres obligent, nous sommes une cinquantaine de personnes à attendre désormais que le speed dating débute. La tension est palpable, les gens se toisent, s’observent avec une idée en tête : « Mon futur ex est-il dans la place ? » On remarque que l’organisation est réglée comme du papier à musique, à la différence de Casual, ce genre de rencontre est mensuelle, et le site distille du speed dating sur toute la partie est de la France. Les routiers de l’amour. Tous les mecs se sont naturellement agglutinés au bar et, tandis que les plus stressés essayent de commander des whisky coca en vain, nous réalisons que le cocktail prévu n’est autre qu’un verre de Saint-Véran. Pas évident pour s’ambiancer, mais assez pour délier les langues. Après dix minutes d’attente qui semblent interminables, notre G.O. nous explique enfin les règles du game. Les filles choisissent une banquette. Ce sont les hommes, les gentlemen qui vont devoir se déplacer toutes les huit minutes, lorsqu’il fera sonner la cloche. Nous nous séparons et prenons place chacun dans un coin du caveau. C’est désormais seuls que nous continuerons l’expérience.

Casual fail. Quelques jours passent après cette première expérience décevante, nous recevons finalement un mail de François. Il s’excuse à demi-mots et avoue que nous sommes les cobayes d’un concept mal géré, et d’une activité balbutiante... On nous propose tout de même une ristourne de 50% sur une dégustation de vin, entre celib’, merci mais non merci. Entre temps des affichettes ont fleuri dans toute la ville avec le programme des prochains événements - vous les avez forcément aperçues - on y voit un homme et une femme plutôt séduisants en train de danser, nez contre nez. Au dos, la liste des partenaires est des plus curieuses, on y trouve pêle-mêle une association sénégalaise, une autre de danse, quelques bars, mention spéciale

LA SOIRÉE DE FRANCK LE TANK. Le cérémonial commence, je rencontre Linda, une infirmière qui apparemment possède un handicap physique au niveau des jambes, puis moral : une très grande timidité. Je parle avec elle de son métier, de ses passions, de ses origines… Je la laisse parler et la questionne, je n’ose pas rentrer dans le vif du sujet, pourquoi le speed ? Qu’attends-tu de cette rencontre ? Est-ce que tu couches bordel !? La cloche retentit, les huit minutes sont passées, je ne reverrai pas Linda, ce n’est pas plus mal, elle m’a un peu fait flipper et je me voyais pas parler plus longtemps avec elle. Je switch pour Lucile, un physique de coiffeuse, avec le triangle d’or : carré plongeant de pétasse, piercing diamant dans le nez, maquillée comme une voiture volée. Lucile ne sera pas ma future ex, ce n’est pas son merveilleux métier de commercial dans la tourbe (sic) ou le fait qu’elle ait déjà une petite fille qui nous fera nous enjailler. Je ne suis pas son style et elle n’est pas le mien, nous ne sommes pas 32


les soirées célibataires rentrés dans les tractations façon Yalta, pour savoir si elle était plutôt bowling ou ciné le samedi soir. S’en suit un bref passage dans le groupe 2, dit de la dernière chance : les 40/60. Hé oui, comme il n’y a pas assez de nanas de 25-35 ans, on me propose de passer du côté mature de la force. Je rencontrerais finalement deux MILF, une divorcée de 55 ans et une charmante femme de 40 ans. Rompre la glace n’est pas évident, elles ont peur de passer pour les cougars de service, et me toisent en me sortant l’habituel : « Tu pourrais avoir l’âge de mon fils ! » Cependant, après quelques minutes, le discours s’adoucit et cela me donne l’occasion de parler avec elles de leurs expériences du speed dating ainsi que de leurs attentes. La rencontre n’a pas le même enjeu à 25, 30 ou 40 ans. Plus les années défilent et plus les questions se veulent précises, et l’attente du prince charmant, ou à défaut d’un mec ok et réglo, se fait pressante. Fin du cougar game, je repasse dans le groupe 1. Le Saint-Véran commence à me chauffer les oreilles et j’enchaine sur Jessicô, préparatrice en pharmacie à Avallon. Une joie de vivre naturelle emmenée par une bêtise sans borne. On discute de la vie, de l’amour, c’est

me transmet sa joie de vivre comme un sidaïque me tendrait sa seringue. J’arrive à la table de Katy, ma compère, avec le moral dans les baskets. Elle me faire reprendre goût à la vie, en me distillant quelques pépites sur les célibataires rencontrés. Les mecs sont bien trop chauds et essayent de lui taper son 06 recdi ! Il reste trois filles à rencontrer, je n’en peux plus, je ne fais plus l’exercice sérieusement. Je rencontre une cinéphile ne jurant que par Avatar, une « fan des Beatles », n’ayant pour référence que Let It Be et Yesterday. Les vagues d’informations se précipitent et je n’ai même plus le temps d’attraper la balle au bond. Le claquage cérébral est proche et je manque de finir le match sur une civière.

« J’ai un emploi du temps bien chargé mais mes soirées sont un peu moins remplies, si on peut trouver du temps un ou deux soirs par semaine, moi ça me va »

beau. Je lui demande quel serait le week-end parfait avec son futur ex, elle m’avoue que sa folie aventurière lui a fait faire du camping sauvage au bord de la mer, sur un coup de tête. Même si dès le lendemain, elle se replie dans une chambre d’hôtel, l’aventure c’est l’aventure. Dernière rencontre avant la pause, Sophia, probablement la fille la plus sympa que j’ai rencontrée ce soir-là. On parle boulot, mais pas trop, hobby un petit peu et relation mec/fille. J’arrive à concilier toutes les prérogatives d’un speed dating réussi. Je suis dans la place mais c’est la pause. J’ai rencontré 6 meufs et rien n’est concluant. À vrai dire, je ne sais pas si je réalise l’exercice correctement, plusieurs jeunes femmes semblent douter de moi à cause de mon aisance verbale. Même si je me défends en avançant l’argument de l’expérience humaine, j’ai l’impression qu’elles sont plus rassurées à la vue d’un mec qui a un balai dans le cul, les clichés ont la vie dure… Les filles sont assez sympas, mais aucune ne me donne envie de la séduire, et comme je n’arrive pas à me forcer, mon semblant de drague est aussi naturel que le nouveau faciès de Renée Zelweigger. Même si la dernière jeune femme de 23 ans rencontrée avant la pause, a réussi à me faire rire, et à éveiller en moi de la sympathie (chose rare), je ne me sens pas à l’aise avec la forme de l’exercice. On a beau dire ce que l’on veut, sur le côté avantageux du speed dating, l’enchaînement des rencontres s’apparente à une aprèsmidi chinage à la braderie de Lille. Malheureusement, cela ne va pas en s’améliorant, les trois prochaines nanas me font autant d’effet qu’une chanson de Christophe Maé. Les 20 minutes qui suivent sont un véritable calvaire, je n’arrive même à retenir le nom de machine qui aime le sport mais qui manifestement ne le pratique pas, Cindoche qui est une carriériste psychorigide (il en faut toujours une), ou Julia, la double mère célibataire qui

ET DU CÔTÉ DE KATY PURRY ? Le premier mec qui s’assied à ma table est plutôt séduisant. Il commence par noter sur sa feuille mon numéro (on m’a attribué le 10) et me demande mon prénom. « C’est ta première fois ? Écoute, moi c’est chaque semaine ! Non je rigole, c’est la deuxième fois. » Il enchaîne directement en me faisant la liste des questions à poser : « Estu mariée ? As-tu des enfants ? Et est-ce que tu te drogues ? » Attends... Quoi ? C’est quoi cette dernière question ? Il me laisse à peine le temps de répondre et se lance dans une logorrhée... Je m’ennuie déjà, le mec est bien trop sûr de lui. Mister ego travaille dans l’industrie, il « vend des systèmes qui permettent de transporter des charges. » (sic) Passons plutôt à ses attentes. Et là, Jason se lâche : « J’ai un emploi du temps bien chargé → 33


immersion

numéro et me balance : « Numérobis... C’est toi ? » Le rigolo de la soirée. Il prétend être pizzaiolo puis gigolo avant de m’annoncer qu’il est instructeur dans l’armée tout en gribouillant sur sa feuille. Brandon, qui a déjà vu au moins cinq filles, n’en est pourtant qu’à sa deuxième ligne. « Je suis sélectif, tu vois ta voisine elle a des gosses, moi ça ne m’intéresse pas. Mais je t’ai noté, c’est bon signe. » Me voilà rassurée... Il en profite pour me demander mon 06, au mépris des règles du speed dating. « T’es en 07 ? C’est pour ça que tu ne me réponds pas ? » Il ricane à nouveau. La cloche me sauve encore une fois, je fais mine de pianoter sur mon téléphone en attendant que le serial dragueur se tire. Dehors, j’échange quelques minutes avec Catherine, qui est aussi ma voisine de table du caveau, la femme dont me parlait le dernier goujat. Elle non plus n’en est pas à son coup d’essai en matière de soirées célibataires, elle avoue cependant ne pas réussir à trouver d’homme prêt à endosser le rôle de père pour ses deux enfants. Infirmière au CHU, elle n’a que peu de temps à consacrer à la recherche du prince charmant, et ce type de rencontre a au moins le mérite d’être expéditif. Fin du break, retour dans le caveau. Gonzague, 24 ans, le plus jeune de la soirée patiente déjà à ma table. Il est venu ce soir grâce à une annonce sur OVS (On va sortir). C’est un habitué des soirées du site : sorties dans les bars, au cinéma, au bowling, Gonzague se laisse tenter par à peu près tout. La cloche sonne alors qu’il commence à me parler de ses envies de construire une maison, une famille... « C’est un peu l’usine non ? Il faut badger quelque part ? » Le septième candidat semble tout droit sorti d’IT Crowd, il analyse des statistiques pour un groupe bancaire. Il a l’air assez cultivé mais je n’arrive pas à rester concentrée, en plus il n’est pas drôle. Le suivant, Simon, 35 ans, exploitant céréalier à côté de Chaumont, fini de m’achever. Il m’explique que son activité très saisonnière lui laisse pas mal de temps libre l’hiver. Ainsi il peut aller tester les pasta party entre célibs à Troyes, ou faire 100 km pour se rendre au Ciné Cap Vert et à la Piscine Olympique. « Mais au fait, tu es de quel signe astrologique toi ? » Filez-moi une corde. Le dixième n’est autre que Franck le Tank. Lorsqu’il me quitte, il reste encore quatre candidats, à ce stade je suis abrutie par tant d’informations : le n°36 travaille dans les énergies renouvelables, fait du volley en club, aime la moto et ses nièces. Le suivant, Didier, n°45, est commercial dans l’équipement agricole. Il se coltine des cultos en colère à longueur de journée et fréquente le club l’Exotique à côté de Pouilly les vendredis et samedis soirs pour se détendre. « Je veux trouver quelqu’un pour moins être seul. » Un autre Didier lui succède, ouvrier agricole à côté de Venarey-les-Laumes, c’est le pote du commercial, et de loin le plus timide de la soirée. Le mutisme du chasseur sans doute. Lorsque le glas sonne, je déchire le bas de la feuille dans lequel

mais mes soirées sont un peu moins remplies, si on peut trouver du temps un ou deux soirs par semaine, moi ça me va. » Ok, il cherche à remplir les trous dans son agenda. Charmant. J’essaie de déchiffrer l’heure sur sa montre. Il reste encore trois minutes à tuer, on a le temps de passer en revue ses hobbies : sport (évidemment), méditation et vacances au soleil. La cloche sonne enfin, je n’ai pas le temps de prendre de notes que le deuxième candidat s’est déjà installé. Il semble plutôt à l’aise. Âgé de 26 ans, c’est aussi sa deuxième soirée speed dating. Ce soir, il accompagne un ami : « Je ne suis pas là pour remplir des cases avec des numéros, je trouve l’ambiance sympa. » Le pire dans cette première déclaration, c’est qu’il a l’air sincère. Il n’a pas un physique facile mais est plutôt agréable, en tout cas bien moins fanfaron que le premier. Lui aussi travaille dans l’industrie. Quand je lui demande ce qu’il recherche exactement, il reste cependant assez évasif : « Je marche au feeling, je n’ai pas de profil type, je ne recherche pas tel physique ou telle profession. » Il a beau être sympa, il ne prend aucun risque. Trop tard, le temps imparti est déjà écoulé, next please. Avec sa voix aiguë, le troisième me fait penser à un gnome. Il se présente, s’assied au bord du fauteuil et m’observe du coin de l’oeil. Il se trouve que ce petit homme mal à l’aise est technico-commercial. « Avant j’étais serrurier mais on m’a licencié, c’est pas mal ce nouveau boulot, et pis des fois faut du changement ! » Mon dieu, le mec me parle de ses problèmes dès la première question... En moins de 5 minutes, c’est également le florilège de formulations type « au jour d’aujourd’hui », « il faut ce qu’il faut »... Ce diplômé en tautologie m’assure aimer la musique, par contre il est incapable de citer un seul album ou artiste, simplement une radio : Rire et Chansons.

« Je suis sélectif : tu vois, ta voisine elle a des gosses, moi ça ne m’intéresse pas. » Le quatrième a 37 ans mais il a l’air d’en avoir 45. J’avais pourtant précisé 35 ans maximum en remplissant ma fiche d’inscription. Il me parle de sa vie mais je ne l’écoute qu’à moitié, je suis déjà usée. SNCF... badminton... VTT... tombé par hasard sur le site... Ah ! Elle est bonne celle-là, je souris à cette dernière remarque et lui se marre ouvertement. Allez, plus qu’un avant la pause. S’installe alors un grand black, il regarde mon

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les soirées célibataires

« T’es en 07 ? C’est pour ça que tu ne me réponds pas ? »

j’ai déjà noté le numéro de Franck le Tank et file le déposer dans l’urne. J’esquive au passage le militaire qui est revenu pour me demander à nouveau mon numéro de téléphone. « Par contre j’ai oublié ton prénom... » Pauvre type. Coach Bertrand nous invite à rejoindre la piste, on se retrouve dans les vestiaires avec Franck et nous désertons aussi vite que possible. Dès le lendemain, nous recevons tous les deux un mail de Larencontre.net nous remerciant tout d’abord d’avoir participé à la soirée et lâchant ensuite l’adresse mail de l’élu(e) (nous nous étions sélectionnés mutuellement). Le mail se termine ainsi « D’autres personnes souhaitaient vous revoir mais vous ne les avez pas sélectionnées ; n’hésitez pas à vous réinscrire sur notre prochaine soirée ! » Ben voyons, parce que c’est un budget en plus cette histoire. Entre les frais d’inscriptions et nos quelques consommations au bar, sur les deux soirées nous avons dépensé 70 euros. Pour info, c’est le budget mensuel moyen en capotes d’un mec qui déchire sur Tinder ou le prix d’une mauvaise bouteille de sky au copacabana qui t’amènera la gloire des pétasses de boîtes de seconde zone. On a les dépenses que l’on mérite...

avantages et les inconvénients que cela suppose. Contrairement aux sites de rencontres, le face-à-face qu’offre le speed dating leur permet de se faire un avis beaucoup plus rapidement sur leur

« Je ne suis pas là pour remplir des cases avec des numéros, je trouve l’ambiance sympa. »

interlocuteur. La confiance, le feeling, l’attraction physique sont autant de critères qui font bien souvent défaut sur le web. Pourtant, il y a quelque chose de très surfait dans ce type de soirée ; le rythme effréné avec lequel les rencontres s’enchaînent s’apparente à du stakhanovisme. Tout le monde s’épuise à répéter la même chose, enfermant ainsi les participants dans un discours préconçu. Seuls les plus à l’aise arrivent malgré tout à jouer le jeu de la séduction, tandis que les autres, trop timides ou mal préparés, se laissent aller à des confessions souvent gênantes (licenciement, célibataire en CDI...). Le brouhaha rend parfois la discussion laborieuse, on s’entend mal, et on est obligé de se rapprocher de son interlocuteur inconnu en lui hurlant son CV et ses hobbies. Plus généralement, même si le concept du speed dating se veut rassurant, le procédé rébarbatif et codifié lasse très rapidement. Depuis vingt ans qu’il a été inventé aux États-Unis par un rabbin soucieux de préserver le mariage intercommunautaire, il est depuis devenu un véritable produit de consommation. On évalue chaque prétendant comme si on choisissait une voiture. L’offre des « rencontres express » continue de se développer en France, chaque occasion est un prétexte pour réunir des célibataires moyennant finance : pasta party, dégustation de vin, randonnée, soirée danse, etc. Aux États-Unis, la dernière mode, les phéromones parties, invitent les célibataires à renifler les t-shirts d’inconnus afin de trouver l’âme sœur, alors que nos voisins anglais s’essayent au toilet dating. Love is business. // F.L.T et K.P. (Tous les prénoms dans l’article ont été modifiés)

PHÉROMONES PARTIES. Malgré des expériences diamétralement opposées, on a tous les deux relevé certaines tendances, notamment dans la démarche des participants. La plupart d’entre eux ont déjà tenté l’aventure en ligne, avec les

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la page mode Ci-contre Lustre : crystal Duralex Independence Day. Portes fenêtres : Vernis protect active V33, érable canadien, aspect brillant. Colonnes : allée 34, espace Chevaliers du zodiaque, Botanic zone commerciale Quetigny. Petit chien : petit chien pupute.

À droite Seau à mousseux : Veuve Ambal, chourré à la foire. Fauteuil : Moelleux vert. Parquet : Posé par « Romu’ parquet », Chevigny-Saint-Sauveur. Petit fauteuil au fond : Ikéa.

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Photos : Vincent Arbelet Modèle : Billy Ray Valentine Costume : Loué à La Boite à Malice Chemise : Un poil serrée Chaussures : 11,5 US Série réalisée à la villa Messner (Dijon) Merci à Nature d’Homme, Mario, Denis et Pamela.

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diaporama

par MARTIAL RATEL PHOTOS : ALEXANDRE CLAASS

Un rond-point c’est tout !

Symbole, splendeur d’un monde qui tourne en rond, le carrefour giratoire a conquis les villes mais pas encore ses lettres de noblesse. Ton magazine en six lettres t’invite à explorer cet élément urbain, sans parti pris, dans un voyage à 360 degrés. Calamité pour les uns, « enfin le 1 % culturel utilisé à bonne escient » pour les autres, le rond-point s’en fout et bouffe les pneus invariablement à gauche plus qu’à droite. Sur des forums spécialisés, on apprend que pour lutter contre ce fléau, ce gauchisme du giratoire, il faut intervertir les pneus tous les 10-15.000 km. Entre cercles, spirales et vortex, ces courtes lignes n’ont évidemment pas la prétention de faire le tour de la question. Notons que d’aucuns voient dans cette fabrication humaine, trop humaine, un ultime hommage au concept nietzschéen de l’éternel retour : « Ce moment présent a déjà existé bien des fois et reviendra de même, avec une distribution des forces identique à celle d’aujourd’hui, et il en est de même de l’instant qui a engendré celui-ci et de l’instant qu’il engendrera lui-même. [...] le cours cyclique de l’univers ramène toutes les conditions dont tu es né. » Le rond-point, on aime ou on aime pas, mais on est bien obligé d’admettre que derrière chacun palpite le petit cœur d’un urbaniste. Un rond-point, un univers. Le rond-point, ce diorama*.

*Petite scénette. Mot que tu découvres quand tu peins des figurines de jeux de rôles.

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les ronds-points

Place du 30 octobre (et de la Légion d’Honneur)

Certainement le rond-point le plus célèbre (à Dijon) avec sa Marianne, œuvre de Paul Cabet, qui se la joue tout là-haut, tournée vers l’est, et avec cette rare station service en centre-ville. Tout le monde a oublié qu’il s’agit du 30 octobre 1870. Que les Dijonnais opposaient une farouche défense à des Prussiens casqués, sabres au clair... Pas loin, la rue Jeannin n’était qu’une barricade. Naquit alors la légende des « franc-tireurs », corps volontaires pour pallier l’incurie des officiers français pas trop chauds pour affronter le prussien. Belle bataille mais belle défaite, la ville est occupée. Bon, on s’en arrange, ça fera une belle légende et un beau rond-point, en 1875. Calèche oblige.

Alors là, c’est ambiance caserne. Cachées derrière les fleurs, à l’abri du regard des conducteurs, on a droit à des mosaïques qui donnent du « garde mobile », « chasseur à pied » ou de la « garde nationale », chef-oui-chef. Les basreliefs ont morflé : la belle Dijon défendant son peuple, ou l’inverse, part en sable. Faudrait lui faire une petite jeunesse. Planqués par les roseaux, que le jardinier en chef de la ville a sûrement choisi par envie d’exotisme, on se prend à rêver de barbecue. C’est sobre. Il y a de la végétation, des fleurs, des arbres en opposition au minéral du monument. Un bon rond-point pour chiller à l’ombre de l’Histoire. Par contre, faut faire un truc avec cette circulation autour. Ça tourne pas mal quand même. Indice fleurs : 3 étoiles. Indice barbecue : 4 étoiles. Indice voitures : 4 têtes de mort.

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diaporama

le rond point GDF (rue de longvic)

Plus connu sous le nom du « rond-point qui brille la nuit ». Hé bien, Sparse te le fait découvrir de jour ! Alors, dans le sol, incrusté dans le macadam, il y a tout un tas de petits bouts de verres qui provoquent cet effet brillant-la-nuit. Au milieu, l’ingénieux urbaniste a fait planter un arbre au pépiniériste. Comme ce n’était pas assez sauvage, il a ensuite demandé qu’on plante deux rochers. Ah, ça coupe le souffle cette installation, un vrai coin de nature primitive ! Le lascaux des rondspoints. Indice rocher : 5 étoiles. Indice verroterie : 6 étoiles.

Place Wilson

Un winnie polaire. Sûrement, le responsable de cette scénette païenne a tenu à nous rappeler que l’hiver, c’est le froid. Je ne sais pas si le titre existe mais on devrait parler « d’ingénieur décor », tant les impressionnantes structures en bois et les drapés qui accompagnent les animaux relèvent du génie. Un diorama* à l’état pur. On ne parlera pas de goût mais de défi au bon sens. Ces plantigrades roses et ces pingouins, c’est un pari entre deux types de la ville pour savoir combien de temps ils resteront intacts. C’est quand même la place Wilson et c’est un spot de fin de soirée ! Bon, quand on est passé, on a plutôt vu des gars qui cherchaient à faire des selfies avec le pingouins que des fêtards qui tentaient d’infliger les derniers outrages aux animaux. Indice fleurs : 3 étoiles. Indice nounours et pingouins : 5 saumons et 4 harengs. Indice génie urbain : 10 entonnoirs.

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les ronds-points

Place henri Barabant (aka Saint Jo’)

Oui, ça ressemble à un rond-point, c’est moche, pareil, mais c’est une place, « Barabant » du nom d’un ancien maire de Dijon. Avec ces cascades de fleurs, on hésite l’art funéraire et... Rien. On remercie le forgeron qui, sans rechigner, a exécuté cette sculpture tubulaire commandée par un urbaniste... Inspiré. Ou alors, c’est pour pourrir la vie/vue au bahut privé. Dans ce cas, c’est bien joué. Un rond-point comme on les déteste. Indice floral : 5 têtes de mort.

Le secret spot (rue Frédéric Mistral)

Un vrai plaisir des yeux. On se sent comme à Walibi-Schtroumpf. Ça donne envie de pleurer, ces adultes qui retrouvent les âmes d’enfants. Fabriquer une chenille. Franchement, il fallait y penser. Je reviendrai au printemps voir si un papillon l’a remplacé (message subliminal aux urbanistes). Indice voiture : zéro étoiles. Indice bien-être : 5 chenilles.

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foodage de gueule

où manger des choses de qualité pour 10 euros ? Ceux qui connaissent un peu Dijon se douteront bien que cet article a peu de chance de devenir une rubrique, laquelle relaterait chroniquement les meilleurs plans grailles/radins du coin. En effet, dans ce patelin si t’es fauché, autant rester manger chez toi. Les quelques deniers bien dépensés à l’extérieur sont donc consignés ici. Encore une fois, le propos n’a rien d’exhaustif et ne donne pas dans le publi-reportage. Enfin, presque. Il n’a pas non plus de vocation prescriptive. C’est juste que t’es une merde si tu penses autrement que les gens de Sparse. Mais ça tu t’en étais déjà rendu compte, et on avait bien vu que tu bouillonnais de ressentiments. Allez, reçois la bonne parole gastrique. Et (re)mâche bien.

par TONTON STÉPH photos : alexandre claass

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BON PLAN à 10 BALLES

alchimia

C

(13 rue auguste comte, dijon)

’est bien connu : dans la petite mafia culturojournalistique dijonnaise, les renvois d’ascenseurs sont légion. En bon proto-franmass’, les membres de l’équipe de Sparse ne pouvaient que rendre un hommage appuyé aux efforts de Christophe et Alex, lesquels trouvent le moyen de servir des petits plats consistants, bons et pas chers. Et ce, dans le quartier qu’on peut estimer le plus beau de Dijon. Quelle est leur recette ? Quels sont leurs réseaux ? Alchimia te propose des croque-monsieur super chiadés qui vont définitivement te faire mépriser ceux de ta mère, avec du jambon Lidl qui croque sous la dent, là. Faut lui dire qu’elle arrête et l’emmener rue Auguste Comte. En plus, ça permettra à ta daronne de briller dans les conversations mondaines, puisque l’établissement se propose de faire des expositions œuvres d’arts, notamment de photographies, que tu pourras contempler avec elle. Une fois ébahi et la sacro-sainte satiété atteinte, il te sera loisible de te pavaner, l’été, sur la terrasse-parking originale, au point d’avoir créé un précédent auprès des services de la mairie qui souhaitent démocratiser cette pratique. Toi l’étudiant qui végète comme une larve du côté du RU Mansart, ceci est une injonction. Mélange-toi à la fange culturelle dijonnaise. Fais semblant de te cultiver. Mange.

salon pains, vins et fromages (halles, beaune)

L

a cohérence, on l’emmerde. Donc pour te proposer nos meilleurs plans bouffe sur Dij’, quoi de mieux que de t’envoyer en TER dans un autre patelin ? Pour ceux qui ont donc un pouvoir d’achat en berne, mais toujours le même désir irrépressible de becter du bon fromage arrosé de pinard local correct, je ne peux que recommander un plan qui n’a lieu qu’une fois l’année, chez nos chers voisins beaunois. Le salon Pains, vins et fromages, dont le nom n’aurait probablement pas été renié par le maréchal, est une espèce de petite sauterie qu’organisent tous les ans de valeureux élèves de la section BTS tourisme du lycée Clos Maire, à Beaune. Leur week-end est ruiné, tout comme ton semblant de régime ainsi que ta dignité, en seulement quelques heures. Vise donc : le concept tient en une ligne. Tu files quinze boules (ok, on t’a menti dans le titre) et tu peux becqueter à volonté les trois ingrédients en question. Dont un avec ta célèbre modération. Une vingtaine de viticulteurs proposent leur nectar avec un regard d’abord amusé, puis consterné sur les hordes d’alcoolos qui viennent réclamer de nouveau la précieuse libation. La même gêne s’installe progressivement dans le regard des étudiantes, d’abord souriantes puis harcelées de demandes d’Époisses, de Comté ou de Délice du Chambertin. Seul le stand où il est loisible de boire du sirop (sic) est un havre de paix, où on peut venir se reposer entre deux raids caloriques. On te distribue un verre à vin avec sa pochette à foutre autour du cou, et roulez jeunesse. L’orgie a lieu dans les Halles, juste à côté des Hospices. Ne nous remercie pas, tu dois de toute façon attendre encore un an pour y participer (vers la mi-octobre), et tu oublieras probablement d’ici-là.

le goût de la rue (kiosque place de la république, dijon)

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Concert chez Alchimia. Pour info : on prononce [al.ki.mia]

es hamburgers super originaux à trouver ici : au guacamole et oignons frits à la plancha, au jambon Serrano grillé façon bacon, et même au chou. Les buns bio sont fabriqués dans le coin tous les jours, ça te changera du pain Harris. Les burgers sont à moins de 8 euros, ce qui n’est pas négligeable lorsqu’on ne peut sentir les fast foods traditionnels et qu’on leur cherche des alternatives. Et si les burgers finissent par te blaser aussi, l’établissement propose également des sandwichs du jour. Par exemple en octobre, il y en avait au chou sauté aigre doux et saucisse de Morteau snackée à la plancha. Et puisque tu nous demandes aussi ce qu’ils proposent d’autre ; en dessert, c’est pas mal non plus : gâteau carambar, cupcake au caramel, flan noix de coco, yaourts fermiers… Le tout à moins de 2 euros. Si tu ne savais pas quoi grailler en rentrant du campus par le tram, tu n’as plus d’excuse. Même si tu n’as pas envie d’attendre, puisque tu peux réserver ton repas depuis ton phone au 06 75 84 64 37.

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foodage de gueule

on a aussi repéré

À ÉVITER SOIGNEUSEMENT

(bien aussi, ailleurs dans la ville)

(bof bof)

Aki (7 rue François Jouffroy) Difficile de ne pas reparler des 10 futomakis pour 9 euros de chez Aki, vers la place Emile Zola. Il y a aussi des bols de ramen et des crèpes délicieuses dans la même gamme de prix, qui se nomment l’okonomiyaki : « Une sorte de crêpe typiquement japonaise. Il est composé de okonomi (littéralement ce que vous aimez/voulez) et yaki (littéralement grillé). Ce nom vient du fait qu’on peut y fourrer de nombreux ingrédients, que ce soit du chou, des oeufs, des ciboules, des ignames japonaises, du porc, des fruits de mer, etc. » Y aller les yeux fermés.

Gina, autour du marché. Espèce de resto jouant sur la mode italienne, mais seulement sur les apparences, disposant d’une terrasse bien située, qui propose des paninis aussi goûteux que ceux que tu pourrais pécho au Monop : c’est dire... Et il se trouve que le petit personnel s’est montré particulièrement désagréable et grossier lors de notre venue. Next. Tartin’art, rue Musette. Alors, certes, de gros efforts sont proposés pour fournir des tartines originales (par exemple : magret de canard, mesclun, tomates cerises, le tout déposé sur un tartinable à base d’oignons confits et de vin rouge). Mais là où le bât blesse, c’est que pour 6,50 euros, il faut pas avoir la dalle, les tartines sont vraiment, vraiment trop petites. Tout est fait pour que vous reconsommiez quelque chose après votre en-cas.

Le Liégeois (33 rue Crébillon) Partant sûrement du constat évident que la Bourgogne s’étendait jusqu’en Belgique à l’époque, un établissement bien intentionné vous propose les spécialités de là-bas dans un carrefour stratégique du centre-ville. Fricadelles, côtes de porc et poulet à la Wallonne, boulettes frites sauce liégeoise et évidemment cornet de frites comme là-bas, avec sandwich mitraillette si vraiment tu veux pas rentrer ton ventre. Si là dessus tu rajoutes la gaufre de Liège, il ne te reste plus qu’à t’abstenir de repas le soir. Réduc’ pour les étudiants.

Le hamburger hyper étouffe-chrétien à la cafét’ Montmuzard, sur le campus. Avec un Rösty et une sauce chelou qui fout la gerbe pour tout l’aprem.

Chez Aki, prévoyez simplement de changer de vêtements si vous sortez quelque part après.

Jolie enseigne, cela dit.

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géRéRiq RHIN-RHÔNE présente

LES PREMIERS ARTISTES RONE FEU! cHATTERTON FAKEAR LAETITIA SHERIFF KELE TWIN PEAKS JUDAH WARSKY KUAgE LES HAY BABIES DAD ROcKS ! MY BRIgHTEST DIAMOND LAST TRAIN BUvETTE BETTY BONIFASSI FLAvIEN BERgER gHOST cULTURE LOUP BARROW LYDIA AINSWORTH BAD BREEDINg THYLAcINE gRAND BLANc vALY MO ScHWARZ Spectacle Jeune public

cHANSONS ROBOT À SUIvRE...

SCHLEP GénéRiQ Rhin-Rhône 2015 – SiRet : 509 852 075 00019

DU 15 U 12 A RIER FÉV 015 2

À DIJON du 19 janvier au 2 février 2015

DIJON / BESANÇON / BELFORT PAYS DE MONTBÉLIARD / MULHOUSE PROgRAMMATION cOMPLèTE SUR gENERIq-FESTIvAL.cOM

Billetterie 07 78 63 44 15 art-danse.com


FISH ME

A fish in my dish en partenariat avec Sparse

PRENDS ÇA LA DINDE ! illustrations : Benoit Ecoiffier & fanny giordano

Salut l’apprenti ! T’en as marre des chips et du tarama Monoprix en apéro, des pizzas de chez Domino’s quand tu accueilles tes potes ou de ton combo magique quiche lorraine-salade quand tu veux impressionner ? Tu rêves d’intensité, d’originalité et de « whaa comme c’est beau ! » quand tu amènes un plat ? En même temps, la cuisine c’est pas vraiment ton truc… Tous les trois mois, on va t’imaginer en cuisine, dans une situation un peu particulière et comme c’est de la fiction, on va même pouvoir t’aider ! Let’s do it !

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er novembre : Le jour des morts. Mamie Jeannette, dernier bastion de la Sainte Eglise catholique de la famille, vient chez les parents pour ce qu’on appelle un repas dominical. Toi, de ton côté, tu te remets à peine de ta soirée de la veille. Après tout, qui dit jour férié dit veille de jour férié... Tu profites de la farandole de toasts que ta mère a prévue pour l’apéro en buvant du Perrier. Tu sais qu’après ces toasts, le repas ne sera plus que souffrance pour ton estomac… Mais tu sais y faire, tu es Français. Le daron, de son côté, commence à faire tomber les bouteilles, ta sœur t’en veux pour ton apathie, mamie picole tranquille et ta mère, elle, lance un sujet périlleux : « Comment fête-t-on Noël cette année ? » Toi, au fond du canap’, tu te remémores ta dernière omelette aux cèpes. Tu sais, celle de mardi dernier, celle pour séduire... Du coup, le 1er novembre, tu es en totale confiance culinaire : « Et si on faisait ça chez moi pour une fois, j’ai un nouveau four ! » Ni une ni deux, mamie te regarde du haut de ses 88 ans avec des yeux d’une tendresse infinie, tes neveux et nièces te demandent comment le Père Noël connaîtra l’adresse, ta mère est plutôt circonspecte et les autres s’en balancent, tant qu’on mange bien… 23 décembre 2014. Il est 18h, ton portable vibre… Google et son agenda te rappellent que demain, c’est jour de fête à la maison ! Tu t’es engagé à faire à manger pour toute la famille

et toute ta famille ça donne ça : tes parents, mamie, ta sœur, son mari et leurs trois enfants, ton oncle, ta tante et ton cousin de 17 ans. La dernière fois que tu avais autant de monde chez toi, tu avais commandé des pizzas au Gril’Laure ! Qualité oblige... À cette heurelà, les premières idées qui te viennent en tête, c’est dinde au marron, saumon fumé et bûche de Noël… Pas d’inquiétude, on est là pour que tu vois Noël autrement !

« Et si on faisait Noël chez moi pour une fois, j’ai un nouveau four ! » Ta journée du 24 commence donc à 8h, T1 direction centre-ville et le marché couvert ! Comme tu as lu cette recette dès la sortie de Sparse en kiosque, tu as déjà commandé la plupart de ta bouffe le samedi précédent ! Du coup, tu files chez le poissonnier choper tes coques et tes palourdes, en plus de tes huîtres et ton saumon fumé si tu en as prévu à l’apéro. Tu vas ensuite chez ton volailler préféré, ravi de te vendre des magrets de canard et non une 673ème dinde. Tu passes devant ton maraîcher. Les panais et les rutabagas te font de l’œil. Tu hésites mais tu n’as pas forcément envie

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d’être celui qui rappelle à ta grand-mère son ancien voisin de 42, le caporal Himmel, qui se goinfrait de viande pendant qu’elle se tapait des soupes de légumes racines du soir au matin. Tu fais ensuite un tour chez ton vendeur de produits asiatiques pour le bouillon, la marchande d’herbes magiques et tu peux te faire un plateau de fromage plutôt sympa si besoin ! Pour le dessert, un petit détour chez les pâtissiers de la rue des Godrans serait le bienvenu, avec option fruits tropicaux pour ce repas de Noël. Tu rentres chez toi, il est 11h, tu as pété ton portefeuille mais tu as du temps devant toi ! Va faire un footing, ça te détendra. Par contre, évite la fume, c’est jamais bon en cuisine, ça donne beaucoup trop faim… Il est 16h quand il est temps de te mettre aux fourneaux. Ta famille arrive à 19h. Si tu as vraiment envie de faire des toasts à gogo pour l’apéro, commence une heure avant. D’abord, tu t’occupes des coquillages. En parlant de ça, c’est con à dire mais vous êtes pareils : 5h sans vous abreuver et vous êtes mourants, mets-les donc à tremper dans de l’eau froide et salée en les retournant régulièrement pour que le sable tombe au fond. D’un autre côté tu laves bien bien tous tes légumes, et ne nous prends pas pour des paranos de la lingette ! Tu verras, ça servira. Maintenant, tu fais ton bouillon pour l’entrée. Tu fais rissoler à l’huile d’olive l’oignon, le gingembre et l’ail. Tranquille, sans tout cramer… Tu ajoutes les légumes (carotte et blanc de poireau). Surtout, tu gardes les épluchures de carotte et le vert du poireau… Une fois que ça sent bon, tu mouilles à fond et ajoutes la citronnelle. Tu cuis tout ça 20 minutes et tu laisses de côté à température ambiante.


prends ça la dinde !

Pendant ce temps, tu continues sur les légumes avec la préparation du plat. Tu épluches les navets, choux-raves, radis et gardes les peaux des deux premiers. Tu coupes tout en fins bâtonnets1. Une fois coupés, tu les réserves2 au frigo… Avec toutes tes épluchures, tu fais un autre bouillon (il te faudra pas mal de casseroles). Pour ça, rien de plus simple : de l’eau froide, tes épluchures, « laurier-thym citronné-persil plat »3, du sel. Tu fais cuire une petite demi-heure et le tour est joué. Tu mets de côté dans un saladier. Il est 17h, tu es encore large… Il faut maintenant s’attaquer à la carne et faire mariner les magrets. Pour ça, dans un bol ou dans ta main si tu es vaillant, écrase les baies roses que tu mélanges aux 4 épices, au miel et au jus d’une orange dont tu retires également le zeste. Tu badigeonnes les magrets avec ce beau mélange (pas sur le gras, sois malin), tu couvres avec un film et tu fais reposer une heure au frigo. Ensuite, tu épluches les patates douces, les coupes en morceaux et les cuis, démarrage à l’eau froide salée. Après 30 minutes, tu piques et ça devrait le faire ! Tu vides l’eau et garde les patates de côté dans la casserole. Tu feras ta purée pendant l’apéro, juste avant d’envoyer l’entrée. Comment fait-on une purée ? T’es sérieux, tu te moques de nous ? Tu écrases tes patates au presse purée sur feu tout doux, en ajoutant le beurre, la muscade, la crème liquide et le zeste d’orange (fais un effort). Il est temps de revenir aux coquillages. Tu fais fondre un oignon, les verts de poireaux et une carotte dans une casserole. Une fois tout ça rissolé, tu mouilles au vin blanc et à l’eau, tu ajoutes un bouquet garni. Tu fais frémir 10 minutes et tu ajoutes d’abord les palourdes, puis les coques après 3 minutes. 7 minutes plus tard, c’est tout bon, ils ont la gueule grande ouverte ! Récupère le jus, ajoute-le au bouillon (préparé au tout début), décoquille presque les petites bêtes et assemble tout ça au moment de servir avec les herbes, le citron vert et le lait de coco. Il est 18h-18h30 en fonction du retard que tu as pris, tu peux boire un verre de blanc… Deuxième étape minutieuse pour préparer les magrets. Tu entailles la partie grasse, tu les assembles 2 par 2, chair contre chair avec une ficelle (comme un sandwich). Il est 19h max, tu es serein quand tes convives arrivent ! Ça sent bon… Mamie a tellement hâte de goûter ce que lui a préparé son petit-fils, ta mère est fière d’avoir un fils qui dépasse les préjugés et ta sœur ne souhaite qu’une chose, que ta 1 Julienne : Tranches de légumes trés fines émincées en filaments réguliers. 2 Réserver : Mettre de côté une partie des aliments.

cuisine crame ! On ouvre les cadeaux, la soirée commence... Pendant l’apéro, tu t’éclipses en cuisine, tu peux demander à ton beauf’ un coup de main si tu veux. Tu fais d’abord rissoler les légumes au beurre et huile d’olive que tu arroses avec une louche du bouillon4 une fois qu’ils sont grillés. Cuits mais encore croquants, tu couvres la poêle et tu réserves. Utilise le cerfeuil juste avant de servir. Pour faire cuire les magrets, tu t’y prends juste avant de manger l’entrée. Tu les mets dans un plat avec la marinade et au four à 250° pendant 10 minutes. Après ces quelques minutes passées, tu as mangé rapidement ton entrée, tu te lèves et tu enlèves la graisse de ton plat. Tu déglaces avec une bonne louche de bouillon mélangé à de la sauce soja. Arrose les magrets avec le jus et retourne-les. Laisse cuire 10-15 minutes de plus. Il faut que le cœur soit saignant… Si tout s’est bien passé, tu les sors entre l’entrée et le plat, tu les laisses reposer 5 minutes avant de les couper en tranches, pendant que tu dresses tes assiettes. Tu peux remettre un peu de mélange bouillon-soja dans le plat pour faire Bouquet-garni : assortiment de plantes aromatiques. Déglacer : Dissoudre à l’aide d’un liquide pour faire un jus ou une sauce. 3 4

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plus de jus. Pour le dressage de tes assiettes, tu as quartier libre, ça t’apprendra… A priori, si tu nous as plutôt fait confiance, ça devait être bon, surtout le dessert. Tu as complètement été à la bourre et vous avez partagé les magrets à 9, tes neveux et nièces ayant préféré jouer avec leurs nouvelles figurines débiles. Ta sœur s’est moquée de toi comme prévu mais le regard de ta mamie pendant tout le repas restera gravé dans ta mémoire. Tu es fier et transpirant, tu as réalisé un repas de Noël pour 12 personnes qui avait de la gueule ! Be proud ! // S.G. & A.S.

Entrée. Bouillon « légumes et coquillages » : 2,5 kg de coquillages (coques et palourdes), 1 pousse de Gingembre, 2 gousses d’ail, 1 gros oignon, 1 bâtonnet de citronnelle, 1 citron vert, coriandre, persil plat, ciboulette thaï, 6 carottes, 1 petite brique de lait de coco, 2 petits poireaux, vin blanc, sel, poivre. Plat. Magrets de canard rôtis : 6 magrets de canard, miel, jus d’une orange, 4 épices, baies roses, sauce soja, bouillon de légumes, ficelle de cuisson, sel, poivre, un four. Purée de patate douce : 2 kg de patates douces, 50 cl de crème liquide, 125 g de beurre, sel, poivre, muscade, piment d’Espelette, zeste de l’orange (pas tout). Légumes de saison rissolés : 4 navets, 4 radis noirs, 4 choux-raves, bouquet garni, cerfeuil, sel, poivre, huile d’olive.






tribune

par germain arfeux photos : alexandre claass

L’arbre blanc « La forme d’une ville change plus vite, hélas ! que le cœur d’un mortel. » Charles Baudelaire

La première fois qu’on l’a vu, on s’est tous demandé ce que c’était que cette saloperie qui trônait au beau milieu de la rue de la Lib’. On a d’abord cru que c’était un lampadaire, ou bien l’arbre de Noël des grands magasins, dont les branches avaient été sciées. On croyait à une exposition, inepte mais temporaire. Puis il a bien fallu se rendre à l’évidence : il était là pour durer, hélas, cet arbre blanc, cet ignoble arbre blanc.

C

se déverse de façon continue dans un silence effrayant. Le mouvement est incessant, comme si chacun, inconsciemment, cherchait à quitter cette rue lugubre le plus vite possible. Il n’y a plus ni rires, ni causeries, ni rien. Plus personne n’est à l’arrêt, à part quelques clochards avachis, qui d’ailleurs meurent tous un par un, parce qu’ils ne supportent plus de vivre dans un pareil endroit. L’ancienne rue de la Liberté était peut-être bruyante et encombrée, mais c’était une rue normale, pas un mouroir. Et c’est cet arbre blanc, par son absurdité, qui symbolise parfaitement cette décomposition. Il est tellement inepte, tellement bête, qu’il vide la vie de toute substance. On ne sait pas comment réagir devant un monument d’une connerie aussi triomphante. On est figé par la bêtise. Toute possibilité de spontanéité est abolie. La vie est mise à distance, ce qui rend ainsi toute attitude vraiment vivante totalement impossible. On dirait que l’arbre blanc fait de nous des légumes, il végétalise littéralement ses spectateurs. Dijon avait-elle vraiment besoin d’un tronc d’arbre blanc pour embellir ses rues ? À mon avis, on les embellirait davantage en l’abattant. Ô bucherons aux haches aiguisées, pourquoi retenir vos coups sur ce tronc trop tentant ? Qu’attendent les tronçonneuses pour tronçonner ? D’ailleurs pour vraiment embellir Dijon, il y aurait finalement plus de choses à détruire qu’à construire. Rien de plus facile. Confiez-moi quelques bâtons de dynamite et je rendrai à la ville toute sa splendeur ! C’est ce que les artistes corses ont très bien su faire, avec leurs merveilleuses performances pyrotechniques. En voilà de l’art contemporain ! Didier Marcel ferait bien d’en prendre de la graine.

e n’est même pas vraiment un arbre d’ailleurs. C’est juste un grand poteau blanc. Un tronc. Un gros tronc blanc, posé en plein milieu du trottoir, comme le font les canidés. C’est une œuvre qui n’a ni forme, ni couleur, ni matière, ni rien. Ce n’est même pas vraiment une œuvre. Elle tourne, simplement. Elle tourne en rond, sur elle-même, absurdement, comme un autiste qui bascule sans cesse sur lui-même. Qu’est-ce qu’un arbre sans branches, sans feuilles, sans couleur, sans forme, peut bien vouloir exprimer ? La stérilité peut-être ? La fadeur ? L’atonie ? On hésite devant toutes ces interprétations. Récemment, un jeune rappeur exalté, qui s’était donné pour mission de célébrer « toute la beauté, la force et la poésie de l’œuvre de Didier Marcel » (sic !), avait décrété que cet arbre blanc illustrait « le cynisme de notre société capitaliste. » L’avantage avec ce genre d’interprétation fumeuse, c’est que ça ne mange pas de pain, puisque personne ne va défendre le cynisme, et parce qu’on peut greffer ce genre de discours sur à peu près n’importe quel objet. Moi, ce que ça m’évoquerait, c’est plutôt un immense poteau de torture sur lequel on aurait attaché la ville entière, livrée au supplice de son inanité. Ce qui rend cet arbre blanc si haïssable, ce n’est pas tellement son insignifiance artistique. Non, l’art contemporain nous y a trop habitués. C’est plutôt ce qu’elle symbolise, c’est-à-dire la mort du centre-ville de Dijon. Il incarne à lui seul tout ce qu’est devenue la rue de la Liberté, c’est-à-dire un immense couloir d’hôpital où une foule hagarde

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« Qu’attendent les tronçonneuses pour tronçonner ? »

Didier Marcel. C’est ainsi que se nomme le créateur de l’arbre blanc, qui a tout de même eu le courage de signer son forfait. Il y a une petite plaque, devant l’arbre blanc qui nous l’apprend, et qui nous en explique la signification. Didier Marcel devait sans doute penser que les gens n’étaient pas assez intelligents pour comprendre son travail, alors il a rédigé un petit texte qui permet aux abrutis de comprendre pourquoi ils trouvent cet arbre moche. S’il y a bien une réussite dans cet arbre blanc, c’est bien ce petit texte explicatif : un vrai chef d’œuvre de fumisterie. Au fond, c’est peut-être dans cet art que Didier Marcel est un véritable génie, dans l’art de se foutre de la gueule du monde. On y apprend que cet arbre blanc ressemblerait à « une colonne de l’architecture classique » (et alors ?), et qu’elle ferait « écho à une sculpture cinétique » (voilà qui rassurera les amateurs de sculptures cinétiques). Dans de ce genre de description, on parle toujours que de la signification de l’œuvre, mais jamais de son aspect plastique, parce que dans ce cas, on serait obligé d’en constater la nullité. D’ailleurs si une œuvre a besoin d’être expliquée, c’est qu’elle n’a aucun intérêt. Ce n’est pas en lisant une pancarte qu’on va subitement se mettre à trouver une croûte géniale. C’est l’œuvre elle-même qui doit constituer sa propre justification. On n’imagine pas Michel-Ange poser une pancarte au pied de sa chapelle Sixtine. C’est quand on vend de la camelote qu’on a besoin d’un maximum de baratin. Pourtant, si ce tronc blanc constitue une sculpture sans intérêt, il n’est pas totalement dénué de potentiel artistique, mais dans un tout autre domaine : celui de la performance. Avec un tout petit peu de bricolage et un rien d’imagination, on pourrait mettre au point une formidable mise en scène. Voilà ce que je verrais. D’abord, il faudrait attacher solidement, au sommet du tronc, une corde à laquelle on suspendrait le performeur par les pieds. Didier Marcel serait idéal dans ce rôle. Il est normal que le concepteur de cette œuvre soit également son performeur. Ensuite, on brancherait l’arbre sur un puissant moteur, de type

industriel, afin d’accélérer sa rotation. C’est là que la performance prendrait toute son ampleur. Au fur et à mesure que le tronc se mettrait à tourner comme une toupie, on verrait le génial artiste décoller petit à petit, et, avec la force centrifuge, tournoyer, tournoyer de plus en plus vite autour de son tronc blanc, jusqu’à former avec lui un angle de 180 degrés et qu’on ne distingue plus qu’un immense cercle qui formerait comme le feuillage qui manque à cet arbre. Puis, quand le tourbillonnement atteindrait son paroxysme, quand l’arbre se mettrait à gyrer d’environ trois cents tours par minute, on couperait subitement la corde. Alors on verrait le corps de Didier Marcel s’envoler majestueusement dans les airs, dans une sublime performance aérienne, pareille à « une comète traînant après elle sa queue flamboyante », on le verrait, dans le parcours de sa parabole, surmonter les grands magasins, passer au-dessus de la tour Philippe le Bon, survoler Notre-Dame, avant de venir frapper le dôme de l’une des tours de la façade de l’église Saint-Michel. C’est sur sa superficie sphérique et convexe, qui ne ressemble à un grain de raisin que pour la forme, qu’on verrait, à toute heure du jour, Didier Marcel rester suspendu. Quant à ceux qui n’auraient pas eu la chance d’assister à cette œuvre d’art, on leur dira : « Allez-y voir vousmême, si vous ne voulez pas me croire. » // G.A.

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RENCONTRE

In bed with Christophe Après avoir poireauté plusieurs dizaines de minutes dans un couloir. Après avoir attendu qu’il finisse de débriefer son concert (de rentrée) avec son équipe, puis qu’il raconte son atterrissage à Dijon. « Vous avez vu comment il a fait ? Ça c’est un super pilote ». Après m’être fait griller la politesse par Isabel Pasquier de France Inter venue simplement lui faire « un petit coucou ». Après qu’Isabel Pasquier ait noté le numéro du coach en fringues de l’assistante. Après que cette même assistante ait demandé à la volée si on n’avait pas vu son sac Vuitton « avec un iPad air dedans et dédicacé à l’intérieur par Catherine Deneuve ». Après qu’il ait reçu les salutations de Brodinski. Après avoir fini de longuement discuter avec trois « dames de l’aéroport » rencontrées à son arrivée, dont une en robe rouge... J’ai pu pénétrer la chambre dans laquelle Christophe tenait séance. Posé pépère au pied du lit, qu’il était.

PaR MARTIAL RATEL ILLUSTRATION : MR. CHOUBI

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christophe

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rencontre Le concert est fini depuis une heure. Là, vous rencontrez des gens, des amis, des personnes du public... Comment ça va ? Ah, ouais ? Bah, là c’est des gens... Ils sont comment ? Comment dire... ? Ils sont... Moi en fait, j’adore les promenades, parce que moi, je n’aime pas les trucs professionnels... Donc, je ne fais que des trucs en amateur et en expérimental. Donc si je suis là, c’est parce que je rencontre des jeunes mecs. Il m’aime bien. Lui, je ne sais plus comment il s’appelle... Brodinski (qui vient de le saluer) Ah, ouais ? Bien ? Ahhh, ouais... d’accord ! Ah, ouais, ok... Eux, je les adore, si tu vas dans mon ordi, je les ai. Bon, voilà, j’aime me balader. Je viens dans une ville, je rencontre le maire, ou pas. Là, il voulait que je visite les caves. Bon, bah, avant le concert c’est difficile parce qu’à ce moment-là on ne fait pas de concert, quoi. Donc, on s’est promis, la prochaine fois, de faire un concert dans une salle qui est rénovée. Mais c’est jamais pareil, tu vois. Ce sont des expériences qui sont nouvelles pour moi. Parce que je suis dans une route un peu... Je rentre à Paris, là. Trois jours, pour acheter un matériel que les gars de Brodinski connaissent, on en a un peu parlé. Parce que je veux améliorer mon truc. Je veux améliorer le son et c’est très-très dur d’améliorer le son. Pfff... c’est dur. Moi, j’ai besoin d’avoir le son comme à la maison. Et, bon ce soir je l’avais moyennement mais les gens avaient l’air content. Justement, je me demandais si chez vous, « à la maison », c’était la même chose que la disposition sur scène : votre piano, puis à côté, les guitares et un peu plus loin les synthés. Le tout bien rangé. Et si vous évoluiez de l’un à l’autre selon vos envies ? Disons que moi, je fais les choses par plaisir, pas par profession. Donc... (silence) Je suis un chineur et un mec qui regarde sa guitare avec amour. C’est comme ça que je respire. Comme les meufs... Donc, là, la meuf avec sa robe rouge (il siffle), elle est comme ma guitare chérie, 1965, Gibson. Moi, je collectionne les guitares mais je suis mauvais guitariste. Non, je ne suis pas « mauvais », je suis « moi ». Je n’aime pas dire que je suis « mauvais ». J’aime dire que je suis « moi », avec mon impossibilité, parce que je n’ai jamais appris et je m’en fous, je joue du piano comme je peux, je m’améliore parce que j’aime, cet inconnu... Surtout cette inconnue qui m’a appris à le jouer : Justina, une polonaise de 30 ans, une instrumentiste classique, merveilleuse. Moi, il y a un truc que je maîtrise bien, c’est les tables de mixage, que ce soit les Studer, les Neve, les vieilles tables, voilà. J’ai une vieille Studer

de 1980, je fais du très beau son. Je prépare un nouvel album, qui sortira Inch’Allah en avril 2015, et je pense qu’il sera à la hauteur de ce que j’entends dans ma tête. Un album, pour moi, c’est quelque chose qu’on n’écoute pas sur le tas mais qu’on écoute avant. Il est réel et après... (silence) Il est parti, après... Il s’en va, quand il est fini. C’est comme une histoire d’amour, il prend même le dessus sur une histoire d’amour, hein. C’est fou... Moi, ce qui me tient aujourd’hui, voilà, à mon âge, ça me fait chier de dire ça, parce que moi... C’est les mecs qui me disent que j’ai cet âge là, mais franchement, je ne les écoute pas ces mecs-là ! Moi, je pense que j’ai 16 ans ou 18 ans, hein ? C’est pour ça que j’aime bien les meufs de cet... Enfin, bon... Et donc, moi, j’ai ce don d’avoir aimé, avant tout, la matière sonore de l’environnement. C’est pour cela que je me suis attaché aux machines dans les années 1970, les synthétiseurs mono ou biphoniques... Et en 1980, même avant, je me suis intéressé aux samplers, parce que c’est quelque chose qui attrape le son d’une façon particulière, pas comme un magnéto, mais avec de la mémoire, quelque chose qu’on peut triturer. Si je comprends bien, dans votre long et riche parcours, et malgré toute la diversité de vos morceaux, il n’y a pas eu de basculement, c’est finalement la technologie qui vous a toujours tiré, fait avancer, réfléchir. La technologie et puis aussi... Ouais, bon... Ceux que j’aime ! Il y a eu Gary Numan, dans les années 1980. Aujourd’hui mon idole, c’est Trent Reznor. Lui, c’est comme Elvis pour moi, comme Ray Charles, comme James Brown, comme John Lee Hooker...

« Franchement, ils ont eu du mal à se réveiller, hein, les producteurs, les mecs qui mettaient le blé pour que je fasse des albums » Ah, oui, pourquoi ? Ça fait 10 ans que je le suis. Je l’aime. Dans la musique, j’aime les batteurs qui font du hard rock. Et, je pense que les meilleurs batteurs d’électro, ce sont les batteurs de hard rock. Aujourd’hui, le batteur de Nine Inch Nails, il a 20 balais, quand je le regarde, c’est un ovni. En studio, on sait comment on travaille, hein, on ne travaille plus avec le son batterie direct, on ne travaille pas avec la peau. Maintenant, il 56

y a des capteurs et on envoie les sons choisis. Mais par contre, il y a un mec qui joue, ce n’est pas une machine ! Les machines, bien sûr, j’adore, mais j’aime quand c’est senti, quand c’est feeling. C’est normal, je suis un mec du blues, je suis né dans le blues, moi. En 1965, au moment de Aline, est-ce que vous envisagez déjà de devenir un Christophe comme aujourd’hui, qui a changé radicalement ? Non, pas changé : évolué ! Mais, je ne suis pas un copieur ! Alors, « qui a évolué », c’est vrai. Notre regard sur vous a changé depuis tout ce temps. Vous envisagiez une carrière aussi riche ? Franchement, j’aurais espéré avant, hein, pour être cash... Franchement, ils ont eu du mal à se réveiller, hein, les producteurs, les mecs qui mettaient le blé pour que je fasse des albums. J’ai proposé des trucs, si vous écoutiez, c’était Alan Vega, avant Vega... Mais les mecs ne se mouillaient pas. Et en même temps, j’aime la variét’. Ça me plait la variét’, j’aime ça. Quand, je chante Aline... pfff, les gens chantent, moi je les laisse chanter, c’est une merveille, hein ? Et ce soir, il y avait ceux de devant et puis ensuite j’entendais au lointain... (silence) Qu’est-ce que je disais ? Est-ce que vous envisagiez en rêve d’être encore là, comme ça ? Oh, ouais, mais ce n’est pas mon truc parce que j’ai d’autres trucs dans ma vie, hein... Je n’ai pas que la musique... Oui, vous avez une passion pour les voitures. Bah, non, j’ai les filles. C’est important. Et puis, je suis un chineur comme je disais. J’aime découvrir des trucs, des mecs qui me mettent la claque. J’aime ces Français, là qui jouaient avant moi. Je ne suis pas un mec qui fait « du violon » mais je l’ai dit ce soir sur scène : « Vous avez eu la chance d’avoir les lumières de ces mecs d’avant et puis vous aurez ceux après », parce que... Ça fait partie de ce truc que je vis ici, hein. Il n’y a pas que moi, loin de là. Je n’aime pas les stars, en fait. Je pense que David Bowie n’est pas une star. Je pense que c’est un... Esthète. Il ne faut pas confondre « esthète », dans toute sa forme et le fond, et « star » ! Parce que... (il siffle) Les stars, souvent, on s’en dégoûte vite. Vous avez dû croiser un certain nombre de stars dans votre carrière. En croiser ? Oui, mais pas tellement, parce que je suis un solitaire... Alors les filles, là, elles se la jouent. Oh, putain, elles se la jouent. Mais, bon, moi j’aime bien les filles ! Moi, j’aime bien les filles qui se la jouent...


christophe

Ce n’est pas trop dur de porter un statut comme le vôtre ? Parce qu’il n’y en a pas beaucoup d’autre comme vous sur la scène française... Non, rien n’est dur.

moi. À la guitare, je suis capable de faire du blues tout d’un coup ! Ils le savent : je change tout, moi. Je suis un mec informaté, moi !

Même quand les gens vous réclament encore et toujours des chansons comme Aline ? Je ne sais pas. Moi, je fais Aline parce que c’est une chanson qui m’a porté, je la respecte et je l’aime. Comme j’aime chanter Les Marionnettes, comme j’aime chanter Les Mots Bleus. Comme... Elvis a toujours chanté Tutti Frutti, That’s All Right Mama, Heartbreak Hotel... Comme Ray Charles a toujours chanté What’d I Say, comme John Lee Hooker a toujours chanté Shake It Baby... Quand on fait ces chansons à 20 ans, on ne se répète pas. Mais quand on les fait à 70 balais, on trimballe... Si on n’est pas un bluesman, si on est une star, on rejette. On est une star : on ne fait pas les trucs du passé parce que... Moi, je fais Aline et ce n’est jamais la même version, ce n’est jamais pareil.

« Oui, je jouis toujours, c’est pour cela que les femmes m’aiment bien »

D’où votre album Intime dans lequel vous revisitez vos morceaux seul au piano. Ben, j’ai surtout voulu m’entraîner au piano. Ça fait longtemps que je tape des notes sur un piano, j’ai même fait des trucs au piano mais je ne connaissais pas les accords. Ma copine polonaise Justina Gveloviek m’a enseigné les dièses et les bémols. Elle m’a beaucoup enseigné et depuis je suis à fond dans mon truc, et j’aime bien la solitude sur scène. J’adore ça, ça me plait. Pour l’instant, je suis comme ça. On a parlé instruments mais vous n’avez jamais parlé de votre voix. Pourtant, elle est importante dans vos interprétations. Vous la travaillez ? Non, je ne la travaille pas. Non, aujourd’hui, elle était fatiguée ma voix, putain... Mais bon, c’est comme ça. Les vrais mecs qui ne travaillent pas les voix sont des rock’n’rollers, des bluesmen, voilà. Ce soir, j’étais fatigué, je l’ai dit aux gens... Ah, ouais je leur ai dit : « Ce soir, je voulais faire un truc électro, mais à fond. Mais, pfff, je ne pense pas que je vais le faire parce que je suis un peu fatigué. Je vais faire des trucs un peu... Enfin, je ne sais pas ce que je vais faire. » Parce que j’ai beaucoup improvisé ce soir, hein ! Moi, je n’ai pas de setlist, hein ! Moi, je change quand je veux, moi ! Il y a une liste qui est faite, bien sûr. Elle est préparée, mais mon équipe sait que je peux vite improviser,

Du coup, qu’est-ce qu’on peut vous souhaiter pour la suite ? La santé. Il n’y a que ça qui permet de... On ne dit pas ça à un jeune, bien sûr, mais un mec comme moi, qui vit à fond la caisse, qui vit comme une Formule 1... Il n’y a que ça... Quand on a la santé, on s’aime un peu et puis la passion perdure. La technologie, je la suis au quotidien puisque je rentre à Paris pour voir trois machines importantes pour moi. Et, je rentre dans les machines et je me dis que les mecs qui ont créé ces machines, aujourd’hui là... Je ne vais pas dire de noms parce que les mecs savent de quoi je parle... Avec la nouvelle technologie des machines électro, je me dis qu’il y a des mecs qu’il faut saluer et embrasser. On ne les rencontre pas ces mecs mais quand même ce sont des inventeurs. Et moi, j’aime les inventeurs, voilà. Nous aussi on vous aime. Ouais, mais bon... Hé, j’suis content ! Je ne vais pas dire que je ne suis pas content. Mais bon, je veux dire... Ouais... De toute façon, je suis altruiste, hein. Moi, j’aime la rue, tout ça. C’est ce qui déclenche parfois des idées particulières de textes importants... Parce que mon prochain album prévu en avril, il est musicalement top à mon avis. Sans avoir, comment dire, les chevilles qui gonflent. Maintenant, j’ai les textes à écrire. J’ai les maquettes des quinze musiques mais pas finies... Y’a Reznor, Nick Cave peut-être pour un truc, The Irrepressibles, un groupe anglais pas très connu, je les écoute depuis quatre ans et ça déchire. Et Jamie, le leader, il est homosexuel. Quand il vient chez moi, il vient à la maison, il sait qu’il n’a pas de chance parce que moi, ce n’est que les meufs. Et c’est un mec de haut niveau. Génie. Et donc, il y a Trent Reznor, peut-être Nick Cave... Ouais, Nick Cave, il fait partie des 57

mecs que j’aime... C’est comme Scott Walker, des mecs comme ça... C’est des mecs du son. C’est des mecs qui ont une « couleur » particulière. Quand j’écoutais de la musique en 1968, je n’écoutais pas ce que mes potes écoutaient. J’écoutais Vanilla Fudge. Pourquoi ? Parce qu’il y avait trois mecs qui déchiraient dont un mec qui s’appellait Carmine Appice qui faisait les chœurs. Je l’ai pris dans mon album Aimer ce que nous sommes, pour 2 morceaux. Et quand il venait à la maison, je lui disais : « Tu peux faire les chœurs de Vanilla Fudge ? », et ça me filait les frissons. Parce qu’en 1968, il y avait ce groupe magnifique avec l’album The Beat Goes On. Allez revisiter ça. Vous verrez les dimensions esthétiques, sonores... Et puis, j’étais dans les trucs plus classiques comme les Led Zeppelin... Voilà, hein... Moi, j’ai fait de la musique jour et nuit... Moi, je suis un chineur de nouveautés. Pour vous, cette nouveauté, est-ce que c’est aussi une course, un challenge ou c’est une recherche juste pour vous, être capable de produire un son incroyable ? Non, moi je n’aime pas le mot « capable ». J’aime pas. Non, c’est juste un plaisir, une jouissance. Oui, je jouis toujours, hein, c’est pour cela que les femmes m’aiment bien. Parce que de toutes façons je suis un mec, toujours au niveau, hein, et donc c’est pareil pour la musique. Je ne prends pas de... Je ne bois que du thé, sauf quand je suis en bourgogne, parce que franchement le vin que j’ai bu ce soir, c’est un délice. Et puis voilà, je n’ai plus de permis... Bah, tant mieux parce que je suis contre le permis à points. C’est de la merde, c’est une escroquerie. Les gens ne descendent pas dans la rue contre ça, ils ont tort ! Et vous écrivez toujours pour les « meufs » ? Oh, non. Je fais pas mal de musique de films en ce moment. Mais je passe tellement de temps à ne pas dormir... Là, j’ai passé une semaine sur mon voilier à travailler. Travailler jusqu’à six heures du matin. Très peu de sommeil. Mais ce n’est pas grave, les chanteurs de blues, ils sont comme ça. C’est comme ça, hein... On ne cherche pas le niveau... Je ne travaille pas ma voix, hein... Ma voix, elle est là. Elle résiste. Elle fait ce qu’elle peut. // M.R


hommage par george deep photo : nicolas dorbon

« debout le palais, debout le palais ! » Nombreux sont les lieux emblématiques en la cité des Ducs. De la porte Guillaume à la Toison d’Or en passant par le square Darcy et l’ours Pompon, de la rue de la Chouette et son porte bonheur au port du canal et son obélisque phallique, du Zénith aux Tanneries en passant par le parc de la Colombière, du Palais des Ducs à la place Wilson, il ne doit en rester qu’un. Le Palais, lieu d’événements sportifs ou, fut un temps, d’événements culturels. Le Palais des sports Jean-Michel Geoffroy, 17 rue Léon Mauris, c’est cet endroit magique où j’allais, basket Pump et bouton d’acné, vibrer pour les matchs de la Jeanne. Prends ça, la patinoire municipale.

I

nauguré l’année bénie des dieux, 1977 (mon année de naissance), plus précisément le 21 janvier. En cette époque, le baron du coin se nommait Robert P. et un certain François R. allait connaître plusieurs branlées électorales avant de régner en maître. Voila pour le contexte politique. Question naming, ou « parrainage » si t’es attaché à la loi Toubon, j’ai dû en référer au souvenir de mon père. Qui es-tu Jean-Michel Geoffroy ? Joueur de handball star du grand CSLD (Cercle laïque sportif dijonnais) des années 70, vainqueur du championnat de France en 1973, une moustache à faire pâlir n’importe quel « chipster », 150 sélections et capitaine de l’équipe de France à partir de 1977. Comme me le rappelle tous les ans un ami vigneron : « Y’a que des bonnes années et des très bonnes années. »

attaché à la loi Toubon. Point barre. Respect éternel à tous les fans qui suivent les matchs debout dans les travées ou derrière les baies vitrées du bar-buvette VIP. Les yeux qui brillent quand tu prends tes premiers shoots sur le terrain de tes joueurs favoris à la fin du match. Adrénaline. Le Palais, c’est aussi un labyrinthe de couloirs, d’escaliers et de salles cachées comme dans Tomb Raider. Salles de musculation, salles de gym, dojo, loge du gardien et autres salles de réception. Fallait pas te perdre enfant, y’a pas de caisse centrale où le petit Nicolas peut attendre sa maman. Solitude. Coincé à jamais pendant quinze jours durant l’automne entre les voisins de la fête foraine et la foire gastronomique au Palais des Congrès. Combo : JDA-Reims + pavillon Bacalhau + la maison hantée = perfect 2014. Pour peu qu’il y ait un opéra à l’auditorium, si t’es du quartier, pense à te garer à la Toison d’Or. Ici, y’a plus de place.

UNE FORTERESSE OLD SCHOOL. Il faut l’avouer, s’il y a bien quelque chose qui n’a pas beaucoup bougé depuis 40 ans à Dijon, c’est le Palais des Sports. Une forteresse au charme old school pour le meilleur et pour le pire. Même moquette marron orangée au mur de la tribune sud où tu peux prendre cinq minutes de plaisir, voire plus, pour mater la multitude de panneaux publicitaires d’entreprises locales. Même assise, toute aussi orangée. Où il faut bien prendre soin, après t’être levé pour extérioriser une émotion, de rabattre le siège. Coquin de strapontin. Même tribune est et ouest où tu maudis les places situées derrière les barrières d’accès en places hautes. Visibilité pourrie par une rambarde. Pour l’éclairage des événements sportifs, je suppose qu’on n’a jamais proposé à un lighteux professionnel mais plutôt sollicité le gardien. On/off. Ou marche/arrêt si t’es vraiment

Entertainment. La JDA bien sûr, club phare du paysage local depuis bientôt une trentaine d’années et la montée de la Pro B à la Pro A avec Dominique Roux à sa tête. Ces années qui ont vu la JDA accompagner l’essor du basket mondial. Ou l’inverse, je suis partial. Tu rêvais de Magic, Jordan, strass, paillettes et de la NBA. T’avais droit aux Harlem Globetrotters, otaries du basket-ball, un entraîneur classieux américain, Chris Singleton, un dunkeurshooter fou que tu croisais fréquemment à la Jam un verre à la main, Skeeter « Moustique » Henry et… Jean-Philippe Fédi, grand blond balourd à la coupe de GI et au tatouage tête de Maure qui semblait jouer avec des moufles. Dream Team. Les années Adidas Streetball qui te transforment le parking du Palais en plus grand playground dijonnais. Je ne connais pas un seul basketteur du coin né dans les eighties qui n’y aurait pas participé. Mytho. →

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Plein comme un oeuf... en meurette.

mascotte lapin qui sévissait déjà lors des diffusions télévisuelles de la pub Stimorol. Dès son entrée, réaction immédiate du public qui scande en rythme : « Laaapin, Laaapin, Laaapin » tout en visant la fragile bestiole. Prends ça, cœur avec les doigts. On a bien tenté de lui coller quelques compagnons pour faire style : des voitures télécommandées en 2D, des cheerleaders, des lanceurs de cadeaux éduqués façon caravane du tour et... Un gros cassis. RIP Cassissium. Des petits balayeurs équipés façon curling pour essuyer le parquet de la sueur de ces mastodontes tombés à terre. Des fois ils font ça bien, des fois t’as l’impression qu’ils en ont rien à branler. Blasés. Kops de supporters actifs du début à la fin d’un match : la tribune sud, groupe créé je suppose au moment de la construction de cette dite tribune. Avant, il n’y avait pas de tribunes nord et sud, et les panneaux étaient accrochés au plafond. Les plus récents (mais pas les moins hostiles) sont les Burgond Furies : placés à l’extrémité basse de la tribune est, côté nord pour pouvoir répondre à leurs confrères ou ennemis, je ne connais pas bien leurs obédiences. Mais aussi tous ces bénévoles vieillissants et toujours vaillants qui font rentrer le cash aux buvettes avant, pendant et après le match. Pour l’après-match, surtout les big match, c’est souvent rideaux fermés et portes closes. Tu peux t’asseoir sur ton jambon-beurre et ta bière pour fêter la victoire avec les copains. « On n’avait pas prévu autant de monde et y’a plus rien. » Misère. Enfin, la dernière minute du match approche et tu sens venir ce moment tant attendu de communion et de partage. Tu poses tes affaires, te lèves comme le reste de la foule, et harangué par un speaker en feu d’une seule et unique voie, tu entames : « Debout le Palais, debout le Palais, debout le Palais ! » Plaisir. // G.D.

Depuis, les matchs de la Jeanne, c’est l’histoire d’un club bien installé dans l’élite française. Vainqueur de la Semaine des as en 2004, de la coupe de France et du Trophée des champions en 2006, bisous Laurent Sciarra, et invincible à la maison l’année dernière. Pépère. Un nom de handballeur pour une salle où résident les deux clubs dijonnais de balle à la main du CSLD et du DBHB (Dijon Bourgogne Handball). Une histoire commune, puis la séparation. Larmes. Pour une fois, ce sont les dames qui garderont le patronyme historique du CSLD. Parcours croisé pour ces deux équipes, ponctué de haut (les petites coupes d’Europe) et de bas, l’ascenseur émotionnel très fréquent entre la première et la deuxième division. Je vous avouerais bien que j’en n’ai rien à carrer du hand. Simplement. De nombreux autres événements sportifs se sont déroulés au fil des années. Combat de boxe, l’historique Razzano vs Boudouani pour le championnat d’Europe super welter du 5 octobre 1993, duel franco-français remporté par le régional de l’étape, Nanard en pleure. Émouvant. Rêve de gosse avec les éditions du tournoi international de football pupilles des PTT. Ou comment transformer une salle de sport en une gigantesque cour de récré peuplée d’un maximum de mini Tony Vairelles venus des quatre coins de France et d’ailleurs, courant et hurlant après un ballon fluo. Chienlit. Bien avant La Vapeur et le Zénith - j’étais très jeune - le Palais était une salle de concert... Michel Sardou. Désolation. Love symbol. Sans eux, sans toi, sans nous, une soirée au Palais n’aurait plus la même saveur. Je veux parler de tous ces sans-dents qui composent les spectateurs, les organisateurs et les animateurs qui font perdurer le game. Lifestyle. Mon préféré : la

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SPORT

L’heure de la prière.

Ça braille, ça transpire, mais surtout ça s’explose la tronche dans un fracas de virilité et de testostérone. Non, je ne parle pas d’une soirée au Chat Noir mais d’un entraînement avec les Fenris, le club local de football américain, ces gladiateurs modernes de Dijon. Avé Sparse, ceux qui vont mourir te saluent.

dans la gueule du loup par loïc baruteu PHOTOS : ALEXANDRE CLAASS

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L’Enfer du dimanche, à Longvic, où les Fenris s’entraînent.

« Le show à l’américaine, vu à la télé, est loin de la réalité des terrains français »

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epuis ses débuts, votre magazine préféré a adopté le parti pris de l’information à son extrême, faisant fi des convenances et parfois du danger. Tel un reporter de guerre bien couillu, j’entre par la petite porte dans un monde où la violence est érigée en sport et où sécher son adversaire bien comme il faut est un art. Aux États-Unis, le football (ou football américain comme on l’appelle chez nous) est bien plus qu’un sport. C’est un business, qui brasse des milliards de dollars répartis entre des joueurs multimillionnaires, des franchises sportives gérées comme des entreprises et une Ligue omnipotente. C’est une religion, particulièrement dans les états du Sud comme l’Alabama, le Mississippi ou le Texas. C’est un show sans commune mesure, qui prend place dans des stades gigantesques où le public se masse pour assister aux prouesses extraordinaires d’athlètes survitaminés, aux chorégraphies de cheerleaders à la chirurgie plastique parfaite ou au ballet des avions de chasse qui survolent parfois l’enceinte avant un match. Le dernier Super Bowl, la finale du championnat, a été suivi par plus de cent onze millions d’Américains, tandis que Bruno

Mars et les Red Hot Chili Peppers assuraient le spectacle de la mi-temps. En France, le football américain est un sport relativement obscur, où quelques pèlerins s’évertuent à courir derrière un ballon, engoncés dans une panoplie relativement chelou qui ferait mourir de jalousie une Tortue Ninja ou nos fiers CRS, lorsqu’ils paradent rue Berbisey pour empêcher le peuple de couper la tête du roi des sans-dents. Grande fierté, Dijon peut se targuer d’abriter quelques-uns de ces marginaux, regroupés au sein des Fenris. Sur son site officiel, on découvre que le club existe depuis une trentaine d’années, mais c’est seulement depuis quelques saisons qu’il a pris son envol. À la tête d’un comité directeur d’une douzaine de personnes, le président du club Olivier Champion a misé sur l’évolution du club : « Depuis deux ans, nous sommes structurés en comité directeur, et non plus en bureau association standard. Cela nous permet d’obtenir des agréments, notamment de la Jeunesse et des Sports et des Services civiques. » Avec plus de cent licenciés répartis au sein de plusieurs catégories d’âge, les Fenris, dont le logo représente une sorte de loup, se complaisent dans la dimension que prend « la meute ». À première vue, on 61

a du mal à imaginer ce qui peut plaire dans la pratique de ce sport barbare, où l’objectif est visiblement d’éclater la tronche de son adversaire en pleine course, et par extension de se faire soi-même aplatir. Généralement assimilé au rugby, le football américain diffère énormément, de par ses règles et son engagement physique bien plus violent, d’où la nécessité des multiples protections, qui donnent l’impression d’un chevalier s’armant pour une joute équestre. Difficile également de ramener le folklore typiquement ricain autour du foot US à notre bonne vieille terre franchouillarde. Si les Fenris aiment traîner avec un teddy, ce blouson porté par les sportifs lycéens aux États-Unis et entré dans l’imaginaire collectif grâce à Smallville, aucun d’entre eux ne roule dans le pick-up de Walker Texas Ranger. Aux Fenris, on crie haro sur les clichés. « Certains joueurs peuvent venir pour le côté ‘paillettes’ de notre sport, explique Olivier. Le show à l’américaine, vu à la télé, est loin de la réalité des terrains français à tous niveaux. » Les pieds sur terre. Surtout que certains arrivants ne connaissent ni les règles, ni le football américain aux ÉtatsUnis, qui passionne pourtant la plupart des pratiquants de ce sport en France. « Je pense que nos licenciés sont animés par la curiosité de découvrir cette discipline et ses rudiments. Cela donne aussi un aspect neuf quand on demande : quel sport fais-tu ? » C’est d’autant plus surprenant que le football américain semble pourtant un sport réservé aux initiés, avec une tripotée de termes techniques élaborés dont l’enchaînement ressemble à du chinois. Bon ok, c’est de l’anglais, mais même Shakespeare aurait miséré à comprendre un truc du genre « hot route red fifty six fly post » ou « man press cover three deep zone ». Ce qui ne veut probablement rien dire pour un initié non plus vu que je l’ai inventé, mais je n’ai pas eu le temps de retenir grand-chose en l’espace de deux petits entraînements. →


Le pantalon dans les chaussettes, 90’s ghetto shit.

Parce que ouais, Sparse avait décidé de livrer en pâture un de ses reporters pour intégrer la meute et en savoir plus. Tel un reporter de guerre, j’enfile mon casque. L’analogie est toute trouvée. Et aussi des épaulières pour protéger le haut du corps. Je vais attendre un peu avant de paniquer. Ne vous faites pas d’illusion, ceci est un article pacifiste. Pas de foutage de gueule ici. Qui aurait envie d’aller chatouiller une équipe composée de dizaines de mecs qui s’entraînent à se rentrer dedans ? Chacun son truc, il y a assez de clubs libertins à Dijon pour assouvir ses pulsions masochistes sans risquer sa vie. Après l’échauffement de coutume, place à la première difficulté : l’exercice physique. La base du football américain, c’est d’être affûté, athlétique et puissant. Même si en France on trouve tous les gabarits ; des petits aux grands, des très minces aux moins minces. On part donc sur un circuit composé d’ateliers qui font transpirer : pompes, burpees, sprints, gainage, et toute la panoplie de la torture classique. Sans oublier cinq minutes de fractionné, de quoi faire fondre ce début de ventre qui pousse depuis le début de l’été. Et dire que pendant ce temps, les autres reporters de la rédac’ se tapent du ruban rouge à un vernissage. Vient ensuite l’apprentissage de la technique. Car le football américain requiert une rectitude efficace, sinon parfaite, dans l’exécution des mouvements. Pour éviter de se blesser d’abord, et pour ne pas rater son adversaire afin de bien l’envoyer bouler

ensuite. Ou l’inverse, selon les points de vue. Les joueurs apprennent ainsi à plaquer correctement, c’est-à-dire agripper son opposant à la taille pour glisser le long de ses jambes tout en roulant pour l’emporter au sol. J’avais bien dit que c’était technique. Pourtant dans l’application, on est loin de la virtuosité des pros. La plupart des mecs galèrent, certains font glisser le short de leur partenaire d’exercice dans l’exécution du plaquage, et la moitié de l’équipe se retrouve cul nu. Évidemment, vu comme ça, on ne peut s’empêcher de penser que le sport le plus viril du pays, avec les plus grosses cojones, a quand même une sérieuse particularité naturiste. Forcément, les blagues fusent sur le sujet et le coach n’hésite pas à en rajouter une couche avec son conseil pour bien réussir l’exercice : « Sexe contre sexe, les gars ! » Malgré le ton léger ici, le cas de Michael Sam, premier joueur professionnel ouvertement gay en NFL, la ligue professionnelle américaine, a fait couler beaucoup d’encre aux États-Unis il y a quelques mois.

« Sexe contre sexe, les gars ! » Après avoir récupéré de ses émotions, l’équipe se réjouit à l’entame de la dernière partie de l’entraînement, qui permet enfin d’appliquer tant de préparations physiques et techniques à la vérité du terrain. D’un côté l’escouade offensive, de l’autre la défense. Car le football américain se compose de plusieurs secteurs dont chacun est spécialisé. Aux États-Unis, une équipe professionnelle compte cinquante-trois joueurs sur sa feuille de match à chaque rencontre. En France, le manque d’effectif ne permet pas d’approcher ces chiffres, et les joueurs privilégient donc la polyvalence. Pour développer le jeu, le principe est simple : le quarterback (généralement le beau gosse dans les séries américaines) est chargé de transmettre le ballon à un coureur pour avancer au sol, ou à un receveur avec une passe aérienne, tandis que les joueurs avec le gabarit le plus imposant sont chargés de le protéger de la défense adverse. Chaque action est relativement courte mais demande une concentration parfaite tant la vitesse du jeu est déroutante. Si les protections s’avèrent bien 62

moins handicapantes qu’au premier abord, le casque, équipé d’une grille pour protéger le visage, est toutefois plus gênant pour disposer d’une vision optimale. Si la première difficulté était l’aspect physique, et vous vous en souvenez car vous êtes un lecteur assidu, la seconde est indéniablement la barrière de la langue, évoquée rapidement ci-avant. Parce qu’on a plutôt l’impression que les mecs pratiquent un idiome complètement différent, avec tous ces termes techniques. Durant le huddle, le regroupement de chaque escouade avant une action pour décider de la tactique à mettre en place, le capitaine balance un tas de termes anglophones qui permettent à tous les joueurs de comprendre immédiatement leur rôle et celui des autres. Absolument pas évident pour les novices. Olivier, président et coach, défend cependant sa vision d’encourager les nouveaux joueurs à apprendre les tournures d’origine, plutôt que de les vulgariser : « Nous gardons la terminologie américaine, qui est beaucoup plus fluide et efficace que si nous cherchions à la franciser. Un nouveau qui ne connaît pas la discipline n’aura aucun mal à apprendre les appellations à l’aide des sources originales, plutôt que des termes à notre sauce. » Outre l’aspect physique, l’aspect tactique est une facette primordiale du football américain. « C’est un sport complexe. » Ces stakhanovistes de l’effort s’appliquent par ailleurs à connaître des dizaines de stratégies différentes, qu’ils peuvent ensuite mettre en place en un clin d’œil en situation de match. C’est pourquoi ce sport implique une si longue préparation : les Fenris ne débuteront pas leur saison avant le printemps prochain. Le temps d’intégrer les nouveaux venus et de partager l’irréfragable ambiance du vestiaire : « En entrant dans la meute, on découvre une famille, pour certains, avec une jeune communauté très humaine et solidaire. C’est notre vraie force. » Fin de l’entraînement. Quelques jours d’impéritie musculaire se profilent, mais la mission est accomplie : infiltrer la meute et s’en sortir sans se faire croquer. Avec peut-être un prix Albert-Londres à la clé de ce reportage en immersion. Sens de l’honneur, rigueur, soif de vaincre : autant de valeurs partagées par les Fenris et Sparse. À moins que ce ne soit vaincre la soif, chez nous. Quoiqu’il en soit, veni, vidi, et on va dire vici. // L.B.


J’aurais pas dû oublier le cadeau du chien !!

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auto-fiction

NEW

U

n jour, Pierre chercha un briquet coloré pour allumer la cigarette qu’il avait roulée entre les doigts agiles. Et il ne témoigna pas, pour le coup, de cette forme particulière de sollicitation qui l’avait déjà desservi, mon Dieu, de manière à ce qu’on lui trouvât certaines journées d’été une excentricité un peu snob, par un après-midi las et insoucié, le héros de se rappeler qu’une fois on l’avait trouvé trop prétentieux dans le choix de sa volonté, oui oui, tu veux une fille, alors va à la Jam et ne nous ennuie plus avec ça, mais aujourd’hui on lui tendait complaisamment ce briquet rose et blanc, et Pierre se défit très vite de ce souvenir paranoïaque.

par FABRICE MAGNIEZ illustrationS : hélène virey

Le ciel était bleu et la terrasse correspondait au soleil de quatorze heures. C’est sans doute pourquoi on était bien aimable ce jour-là et prévenant et jovial ; je veux dire que Pierre, Séverine et Alexandre trouvaient un confort évident à leur amabilité. Trois cafés accompagnés par leur verre d’eau reposaient sur la table verte, à l’intersection de la rue Berbisey et de la rue Piron. Les trois jeunes gens souriaient au bonheur de ne pas avoir à s’entretenir expressément. Ils se souriaient voilà tout, heureux de retenir leurs yeux et chacun imaginait ce à quoi les deux autres réfléchissaient et comment ils le réfléchissaient ; par exemple, Alexandre sut lire dans la prunelle bleue droite de Séverine un brin d’inquiétude perverse qu’il interpréta comme une attirance vers lui, et ils jouèrent quelques minutes ainsi... Bref, le ciel était bleu azur et la terrasse ensoleillée échaudait les esprits assis dans leur malignité. Depuis quelques temps, depuis exactement la nuit qu’ils avaient passée ensemble, tous deux Pierre et Séverine possédaient le don de satisfaire leur besoin d’un clin d’œil zélé, et c’est ainsi qu’on avait pu allumer facilement sa cigarette au moyen du briquet rose et blanc. On se souriait amoureusement comme on dit, mais qu’on ne s’y trompe pas, ces sourires demeuraient pure réflexion. À cette heure-là, les bipèdes portaient des lunettes de soleil qu’ils avaient payées deux cents euros et buvaient du café italien à plus que faire de leur nervosité. C’était pas très grave ça, de gigoter dans tous les sens et de parler fort quand on n’avait rien à faire, non, mais ce qui socialement eût été déplacé c’est de ne pas gigoter du tout et paraître ainsi atone face au monde, car enfin on ne reprochait pas son oisiveté à l’homme oisif, mais qu’il eût le mauvais goût d’une apathie, alors on ne l’approchait plus.

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Et les trois amis rigolèrent après cette même pensée. Il s’en suivit quelques mots prononcés avec une certaine élégance et un certain style même, lorsqu’elle parut. Il était deux heures et demie. Elle devait sortir du Musée de l’Art Contemporain, du Nicolas de Staël plein les oreilles on aurait pu palper son abstraction. Solaire et acquise à la douceur des premiers rayons bouclés du premier soleil, elle s’approcha du groupe en deux temps et trois mouvements adroits et aérés. Une bise à sa copine Séverine, un bonjour poli et mesuré aux hommes et elle s’assit dans la lumière encore confuse du printemps qui n’avait pas tardé. Qui était-elle ? Son nom ? Qu’est-ce qu’elle faisait là ? Qui était-elle ? Pierre et Alexandre restaient subjugués après les yeux de cette fille. Quinze heures moins le quart. Le soleil tapait et déliait les langues. Les mots sortaient les uns après les autres sans qu’on les forçât, et ça se répandait dans le monde sans être empêché par aucune frontière. Au reste, Pierre paraissait maintenant plus à son aise, il éprouvait cette sensation rare que seul le doux visage aimé avant d’être connu, aimé en puissance, pouvait lui suggérer, et même il passa la main dans ses cheveux en souriant à sa liberté et on peut dire enfin que la table entière lissait tous les corps qui la composaient pour qu’ils ne manifestassent aucune difficulté de compréhension. La belle inconnue développait ce genre de comportement. Ainsi Alexandre faisait la ronde et tournait très vite devant les yeux la nouvelle jeune femme et proposa un interrogatoire serré : Comment vous appelez-vous ? La petite chatte s’appelait Elodie. Qui aimez-vous ? Elodie aimait les hommesroses qui lui piquaient le ventre. Eh bien, je suis de ceux-là ! Affirma Alexandre, qui ne doutait pas qu’on pût douter de


élodie, séverine et pierre

« À trois heures et demi, le tibia d’Elodie frôla le tibia de Pierre et le contact de cette jambe nue remua sérieusement leur attention. » sa franchise quand il l’exportait comme ça, dans l’air sans mesure. Mais ça ne prendrait pas avec elle. Elodie avait déjà jeté un puissant dévolu vers la figure brune de Pierre. Quand Séverine dut quitter le cher groupe dans l’intention de remplir à regret un office professionnel inconséquent, nos trois personnages étaient donc installés de manière à ce que tout se déroulât naturellement ; nous trouvions ainsi Alexandre dos au mur blanc-crème du café, Pierre lui faisant face et Elodie, qui recevait la chaleur solaire contre sa nuque dévoilée. À trois heures et demi, le tibia d’Elodie frôla le tibia de Pierre et le contact de cette jambe nue remua sérieusement leur attention. Le piège s’était refermé sur le héros impuissant. Il ne resterait plus à notre victime que de conforter son statut et mener à bien ce pourquoi il avait été choisi.

Le bus était bondé. Le feu du jour compressait bien la philanthropie de Séverine au point qu’elle détestât un instant l’homme auprès de qui elle s’asseyait. Séverine est le genre de fille qui n’apprécie pas la confiance générale, c’est-à-dire qu’elle ne la valorise pas,

de sorte que ses amants et ses amis, ses hommes et ses femmes pouvaient bien fabriquer leur histoire propre sans elle, Séverine n’en porterait pas le douloureux souci. Car enfin, chacun fait ce qu’il a à faire et chaque acte est dû, et Séverine ne punissait donc pas la transigeance. C’est avec une tendresse évidente qu’elle sourit vers son amour, Pierre. On avait fait brûler un peu de charbon et l’avait appliqué sur le papier d’aluminium qui recouvrait le tabac humide. Il était certain qu’on ne refuserait pas la satiété de leur ambition. Alors on prit position, rendant disponible pour l’autre son désir ardé ; on se préparait à jouir ensemble et c’était bien, c’était cool, on aurait vraiment perdu quelque chose en ne fomentant point le plan de ce devoir. Et puis Elodie passa dans la chambre après avoir fumé cinq minutes silencieuses. Elle saisit une bouteille de parfum que Pierre avait offert à Séverine, un parfum moscovite jaune et vert dont elle vaporisa la pièce brusquement assombrie parce que Pierre venait de tirer les deux rideaux bruns qui voilèrent brusquement leur présence au monde. Et puis rapidement les deux corps qui habitaient l’appartement furent pris d’une envie folle de baiser à quatre pattes comme les animaux ou bien sur le lit contre le papier peint délavé bref, Pierre rejoignit Elodie pour embrasser le corps, baiser le cou puis les joues émoustillées et croquer les lèvres comme des mûres poivrées, et commença de toucher les seins et les cheveux ; la jeune femme lui répondit avec malice et assurance. Une caresse appuyée à l’endroit du bas ventre

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décida la belle à se défaire enfin de la jolie chemise qu’elle portait si bien puis Elodie s’occupa elle-même du soutien-gorge qui tomba sur un tapis. Et puis ils allongèrent la matière sexuée sur le lit retourné du matin, encore empreint du langage de Séverine absente, et ils s’allongèrent pour en finir avec ça, et leur dessein fut achevé après une heure de frénésie animale. Dix-neuf heures. La solitude était revenue. On s’était réfugié chez soi, dans son appartement réchauffé depuis le soleil matinal et Pierre concevait parfaitement bien le sang d’une émotion débilitante qui lui ouvrait son entre-jambe glauque, pour qu’il importât maintenant, en vue d’une thérapie efficace, de distinguer mieux la pensée de ses opinions sensationnelles. J’écris que la solitude était revenue vers dix-neuf heures. Oui comme la nature du cargo garantit nécessairement le retour de son objet, le héros devait à présent soustraire au monde une parole médiate. Il se livrait de lui-même à la prison de son appartement vers dix-neuf heures ; le corps une fois recueilli par le vieux fauteuil de cuir ocre, une fois qu’il maintînt un verre d’eau régénérateur, le héros comprit enfin les sentiments qu’il portait vers Séverine, dans le sens qu’il les avait portés tous les jours depuis leur rencontre. Parce qu’elle l’avait épaté, séduit et transformé en un sujet amoureux, Séverine devait être remplacée. Pierre éprouvait l’attachement comme danger. Et le sursis de leur liaison profiterait à Élodie. // F.M.


RIP

CES RADES MYTHIQUES QUI ONT DISPARU Terminé. Le Cappuccino a fermé ses portes au mois de septembre après 30 ans de bons et loyaux services dans la picole conviviale. Fin d’une époque. Début d’une légende. Il rejoint ainsi les rades ou autres boui-bouis aujourd’hui disparus, dont le seul souvenir nous fait prendre conscience du temps qui passe. Saleté de nostalgie. Pour l’occas’, petite liste des établissements à avoir laissé une trace -et pas que de vomi- dans le patrimoine dijonnais.

par mr. Choubi PHOTOS : DR

Attention : liste non exhaustive, j‘en entends déjà deux-trois qui gueulent dans le fond.

Le Gold Coast Route de Beaune. Rade de bikers situé dans un ancien entrepôt. Déconseillé de faire le malin. Un gros balèze tatoué au bar matait ta meuf ? Bah tu baissais les yeux. Ambiance Roadhouse. Mais surtout top concerts : Calvin Russell, Import-Export, je me demande même si y’a pas eu Jeff Healey jouant derrière une grille… Exotique. Le Glacier Place Darcy à la place du Crédit Mutuel. Prout-prout style. Pour vieilles rombières du centreville. Un des rares endroits de Dijon où on pouvait se croire à Cannes. Valait le déplacement pour ses poufs bleus et la mamie zinzin qui tenait l’établissement. Drôle. Le Bar Déco À la place du Tzar. Proche de la perfection. Clientèle assez large : rastas black, vieux rockers, étudiants mal défraîchis et profs aux Beaux Arts. Avec au sous-sol, Jenlain à foise, bedots roulés dans les chiottes et Stone Roses à fond. Madchester à Dijon en quelque sorte, avec de temps en temps un peu de Thiéfaine dedans. Enfumé. La Petite taverne Le Vieux Léon 1.0. Se trouvait aux Halles à la place de la Gargouille. Incontournable pour sa terrasse, ses gueules, ses viandes saoules et surtout son blanc-pêche. Efficace pour draguer des meufs en sandales. Roots mais cool. Bon marché. Le Mosquito Moment de gloire : un mec s’était fait dessouder par une balle perdue tirée de l’extérieur. Hormis ça, ambiance place de la Rép’. Passable dans tous les domaines (déco, zique, meufs) mais toujours blindé. Valait plus le coup pour les tenanciers, sorte de Tango & Cash version PACA. La Concorde Actuellement l’Imprimerie. Cousin éloigné du Glacier. En moins péteux. Chiotte en bas,

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étage assez classe et entre les deux pas grand-chose. Se souvient s‘être fait virer avec ses potes pour avoir fait la chenille sur leurs canapés après la finale de l’Euro 2000. Madeleine. L’Iceberg Bar d’étudiants par excellence. Mais les plus cools : lettres, histoire ou histoire de l’art. Interdit aux faluchards de droit. Bon son, déco chaleureuse, jeux de société. Idéal l’hiver. Sorte de mix entre une MJC de quartier et l’Antre 2 Mondes. Boisé. Le Welcome Place Suquet. À la place de l’immense kebab. Peu de débordements à cause de l’emplacement géographique. Sorte de bar de quartier à l’ambition inappropriée. Froid. Point positif, y’avait un baby. Époque demi-fraise. So 90’s. Le Krony’s Anciennement le Deep Inside. Pratiquement à l’identique, un poil moins rockab’. Et baby à côté des chiottes. Les 80’s étaient super ludiques en fait. Par contre, on y voyait aussi clair que dans le cul d’un âne. Légère impression de se trouver dans un train fantôme. Picon style. Bonus, aux alentours La Dominière Vers Beaune. Parce qu’il y avait une vie avant l’Opéra Night. Était la caution rock de la côte dans les 80’s en enfilant les concerts super pointus. Arriva à faire le pont entre les vieux fans des Dogs et les jeunes boutonneux adulant Noir Désir. London-lès-Beaune. Haute crédibilité. Hors catégorie L’Anfer Monument dijonnais, au même titre que Poujade ou la Maison Millière. La référence nocturne et électro à Dijon dans les années 90. Puis en Bourgogne. Puis en France. Puis en Europe. Et enfin dans le monde entier. Mériterait un nom de rue. Culte.



LA SÉLECTION MUSICALE (douteuse) D’ARTHUR par arthur gérard

ZAZ – PARIS. Si les lecteurs de Sparse ont pigé qu’acheter des skeuds n’a plus de sens, il existe encore des gens à la ramasse. Y’a plus que les vieux qui achètent de la musique, coquetterie d’une époque où la couleur crème était OK pour une voiture et où on pouvait fumer dans les avions. Mais quel intérêt de se trimballer de lourds vinyles en 2015 ? Perso, habiter un 9m² m’a permis de régler la question. Soyons modernes. Je me suis aussi débarrassé de toutes mes possessions pour me contenter d’un carton, d’un bol de lait frais et d’une litière. Moderne, j’vous dis. C’est pas Zaz qui va me faire regretter l’occupation, merde.

VIPER – Fuck tha world it ain’t real I bend tha spoon wit my mind. C’est toujours une épreuve de rendre mes chroniques à l’heure, et ce pour le simple fait que je déteste la musique. Mais Viper est le genre de type qui te bouscule dans tes certitudes, et t’offre une vision neuve des choses, au point de vouloir spontanément t’ouvrir un 3ème œil sur le front au canif. Je vous encourage à consulter sa discographie sur Spotify, qui est littéralement sans fin. À croire que le mec publie une mixtape par jour en mode flux de conscience ininterrompu. Sur un rythme lourd comme des paupières sous crack, on y parle ter-ter, drogue, clonage et galaxies lointaines. Mais ça reste à chier, hein.

La Souterraine / Beko – Mostla Tape. On m’a récemment demandé pourquoi la coldwave française n’avait pas autant marqué le patrimoine musical au même titre que les yéyés ou encore le rap. Bien emmerdé, j’aurais voulu prétexter un argument esthétique, mais en réalité, c’est juste que tout ce monde s’est dépêché de mourir du SIDA ou d’une overdose. Les survivants ont naturellement décidé d’arrêter les frais, ont rangé les synthés et repris leur boulot de profs « d’arpla ». Ca fait moins rêver. L’histoire aurait pu s’arrêter là, mais cette chouette compil prouve qu’une armée de doux kids sont nostalgiques de 1981. Bah c’est pas plus con que Sarkozy 2017.

Souchon et Voulzy - Watch the Throne. Hourra putain, le retour tant attendu des deux mecs les plus sûrs dans ce jeu céfran est arrivé. Chaque track se charge de foutre des bonnes mandales à tous ceux qui n’auraient pas encore pigé. Rappel des faits : Souchon est juste le dictateur-président à vie des Enfoirés, label qui pond tous les ans la plus grosse sortie française en termes de ventes. Le mec palpe. Voulzy, dit « Yeezy », producer émérite, est le héros qui a commis Wiggas in Belle-Île. On dit que leur tournée pharaonique fait péter les plombs à tout le monde. Et pour cause, ils y interpréteraient 10 fois d’affilée le tube J’ai 10 ans. Du G-É-N-I-E.

Christian Prommer – Übermood. J’aurais tant voulu que cette pochette m’évoque une rencontre à 4h du matin sur une plage de Majorque en marge d’une fête sans faille, contexte parfait pour cette house propre taillée pour des rentiers. Mais le souvenir trop vivace d’un épisode de ma vie de naze l’emporte sur les fantasmes : j’ai récemment dû déboucher des chiottes. Malins, des tutos YouTube me conseillaient d’y verser un mélange d’eau bouillante et produit vaisselle pour ramollir le bouchon. Alors non seulement ça marche pas, mais ça implique ensuite de justifier auprès de vos colocataires cette odeur tenace de merde chaude dans tout l’appart.

Dorian Concept – Joined Ends. Dernière chronique de l’année 2014, allez paf je me sens grand seigneur et je colle un 10/10 à cet album qui en 2012 aurait tout pété pour sûr. Je les vois bien, tous les prétendants, se décomposer devant ce qui aurait été un golem d’electronica rococo. Flying Lotus aurait eu à s’expliquer pour son imposture, Bibio aurait mis fin à ses jours, et Clark n’aurait jamais cessé de faire sa musique de défonce-man. Mais voilà, cet album a 2 ans de retard, et personne n’en parlera donc jamais. Dorian, écoute. John Hammond, dans Jurassic Park, disait « La vie trouve toujours son chemin ». Voilà, hmm… démerde-toi avec ça.

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crash test par jeff buckler photo : dr

Tu t’es vu quand t’es né à... Descriptif faussement sociologique et non exhaustif de certaines villes et certains quartiers qui t’ont vu grandir. Sache que ton lieu de naissance conditionne ton développement, un peu. Rats des villes ou rats des champs, on n’a pas le même blaze mais on a la même passion : le 2.1. « Ici, c’est chez nous » (Tribune Sud, Les Téméraires).

Fontaine-lès-Dijon

Parce qu’en fait tu préférerais être de Paris ou de Versailles. Parce que, étonnamment, tu te baignais toujours chez tes potes quand tu étais plus jeune, Google Earth Certified. Parce que ça te pose pas de problème de payer l’amende pour non-respect du nombre obligatoire de constructions HLM dans ta commune, 20% pour info. Parce que l’enseigne Mammouth de Fontaine, légendaire. Parce que t’es pas parti en vacances au ski cette année ! Tes parents, c’est des pauvres ? Parce que comme le chantait Charles A. « Il me semble que la misère serait moins pénible à Fontaine », normal, y’en a pas. Tu es : un bourgeois de Fontaine. Ou pire, un faux bourgeois de Fontaine.

quetigny Parce que tu vis dans le brouillard. Parce que t’as déjà vécu une élection municipale avec des scores à faire pâlir un dictateur africain, plusieurs fois. Parce que t’as su que très tard, désolé Monsieur le vigile, qu’à Carrefour les produits étaient payants. Parce que le seul golf de France pour les prolos comme nous. Parce que le toboggan jaune du Cap Vert, frayeur. Parce que dans ta commune il n’y a qu’un club de sport, l’ASQ multisport, comme en URSS. Parce que les portes de la plaine, ça pèse. Tu es : de gauche. Ou t’as oublié de voter.

Châtillon-sur-seine

Parce que ce sont les petits ruisseaux qui font les grandes rivières, prends ça l’Yonne. Parce qu’à un moment il faut savoir rompre avec ses racines. Parce que le combo : alcool + permis de chasse + permis de conduire = accident, tu connais. Parce que c’est aussi une région viticole, merci le crémant. Parce que c’est plus du tout, mais plus du tout un bassin d’emplois, misère. Parce que c’est un peu notre Amityville à nous, angoisse. Parce que le vase de Vix c’est pas le vase de Soissons, à ne pas confondre stp. Tu es : une assistante sociale. Ou au chômage.

fontaine d’ouche

Parce que la ligne du 12, STRD représente. Parce que t’as cru que tu allais avoir le tram, inch’Allah. Parce que c’est le fief de messieurs Laurent G. et Francois R. Parce que c’est la piscine la plus classe de l’agglo dijonnaise. Parce que tu sais ce que c’est la mixité culturelle, little Manhattan. Parce que t’as jamais foutu les pieds à la Combe à la Serpent. Parce que la Fontaine d’Ouche, c’est ce qu’on pourrait appeler un quartier balnéaire, lac Kir beach. Tu es : un médiateur de la ville. Ou un amoureux de la pétanque.

talant

Parce qu’une maison bleue adossée à la colline. Parce que tu sais ce que c’est de combattre l’état pendant 50 ans. Parce que tu vis au-dessus du brouillard, prends ça Plombières. Parce qu’en ridant la combe enneigée durant les 90’s, enlevant les trucks de ton skate et fixant deux lanières en cuir avec ton grand-père, t’as cru que t’avais inventé le snowboard. Parce que Correspondance, Al qui pose son flow avec Fabe sur Détournement de son, c’est l’ultime rap game du coin. Parce que « Ouhouh », toi-même tu sais. Parce que t’as toujours contemplé Dijon et les Dijonnais de haut, voire de très haut. Tu es : la LINO. Ou mon meilleur ami pour la vie.

Saint-Jean-de-Losne

Parce qu’à Dijon t’y vas que pour faire tes courses ou tes études, non je déconne. Parce que t’es un marin d’eau douce, premier port de tourisme fluvial de France. Parce que tu fêtes la résistance du siège de Saint-Jeande-Losne en 1636, la Gallas, que tous les cinquante ans, pépouze. Parce que fut un temps c’était aussi la plus petite ville de France. Parce que de l’autre côté du pont en traversant la Saône c’est plus chez toi, c’est Losne. Parce que bientôt un vol Dôle / Istanbul à pas cher. Parce que t’aurais préféré être Jurassien, traître. Tu es : Lionel Junior. Ou Okan.

beaune

Parce que tu es ce que je déteste le plus avec les Anglais, d’ailleurs ton centre-ville en est blindé. Parce que j’ai toujours trouvé les vins de la côte de Nuits plus subtils et bien meilleurs. Parce que tu rabâches tout le temps que les étrangers connaissent bien plus Beaune que Dijon, et putain t’as raison. Parce que t’es le seul Côte-d’Orien à considérer les mecs de Fontaine comme des pauvres. Parce que tu as déjà participé au 24 heures de Beaune, pour une fois respect. Parce que Père et Mère, Bon-Papa et Bonne-Maman, dans ton vocable tu emploies. Tu es : Enguerrand. Ou Hermès.

BÈZE

Parce que tous les ans Mister Cornichon et Miss Andouille, régal. Parce qu’en tant que Dijonnais, lors de ta première visite aux grottes à l’âge de 7 ans, tu t’es pris pour Indiana Jones et les aventuriers de l’arche perdue. Parce qu’il y a eu un Festival de Bèze, trois ans c’est peu. Parce que c’est pas la Vingeanne. Parce que ton lycée de secteur c’était Monchapet, avec les mecs de Sombernon. Le rectorat likes this. Parce que Bèze fait partie de l’association des communes de France aux noms burlesques et chantants, second degré. Tu es : une stalactite. Ou une stalagmite.

PS : Notre honneur nous a imposé de ne pas vous parler de Saint Apollinaire, ville sans âme.

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