Sparse 39 (Septembre 2022)

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sparse | numéro 39 | trimestriel sept. oct. nov. 2022 • www.sparse.fr GRATUIT • BOURGOGNE-FRANCHE-COMTÉ Imprimé à des millions d’exemplaires À lire sur le trône 72 pages à tartiner Toutous, drag queens et pénurie de moutarde.

édito.

«Notre maison brûle, et nous regardons ailleurs» nous disait ce grand défenseur de l’environnement qu’était Jacques Chirac, qui avait le sens de la formule, moins de l’action. Ça baratine depuis 40 ans, mais maintenant, place aux actes.

On nous demande souvent ce qu’on fait nous, chez Sparse, qui soit vraiment utile. À part faire des vannes, se moquer des gens, et écrire les meilleurs articles d’Europe (moi je répondrais que c’est déjà pas mal si t’ajoutes en plus le pipi sous la douche). Mais aux grands maux, les grands remèdes. Je vais te le dire ce qu’on fait. On a choisi de frapper un grand coup et de faire réagir les puissants de BFC. On a pris la décision de ne plus se servir du jet privé de Sparse. Rien de moins. Fini les allers-retours Dole-Longvic dans l’après-midi. Fini les RDV d’affaires à l’aéroport Vesoul-Frotey. Fini l’abondance des dîners d’un soir au Courtepaille de La Charité-sur-Loire.

On a embauché un chauffeur pour notre Aixam Crossline Evo pour nous ramener de soirée... Sparse, un problème, des solutions.

Par Chablis Winston Photo Bastien Francoulon
La Rodia présente Juliette Armanet Vitalic • Gazo Meute • Lujipeka Le Cabaret de l’Espace (avec Sofiane Saidi + Acid Arab + Malik Djoudi + …) Bigger & the Damned Dozen Kalika • Johnny Mafia • Gliz Taxi Kebab • Structures • Decius BCUC • Wu Lu • Mudhoney Mouse Party x Mehdi Maizi • Lalalar Nikola • Un*Deux • Gystere • Keg Psycho Weazel • Pierre Hugues José David Walters • Neus • Gwendoline Prose fm • Loharano • Calling Marian la Fanfare Battant • Vanille • Pi Ja Ma Poltergeist • Toksa • Didjier Corrèze Don’t Sweat • Dylan Dylan • Contrefaçon 23 > 25 septembre 2022 La Friche artistique à Besançonlive

ours

Ce magazine est édité par Sparse Média Siret : 750 725 806 00038 - APE : 5814Z

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DIRECTEUR DE PUBLICATION

Alexandre Claass

RÉDACTEUR EN CHEF

Antoine Gauthier

CONTRIBUTEURS

Frank le Tank, Loïc Baruteu, la cuvette de Dijon, Paul Dufour, Delphine Fresard, Maître Fougnard, Yannick Grossetête, Cyril Jacquens, Clara Jodon, Maïa Mignotte, Cédric de Montceau, Nicolas Popovic, Chablis Winston, James Granville forever.

DIRECTION ARTISTIQUE

Cédric de Montceau

PHOTOGRAPHIES

Paul Dufour, Bastien Francoulon, Thomas Lamy, Julien Lasota, Mathilde Leconte, Cédric de Montceau, Élodie Perret, Édouard Roussel, Jean-Charles Sexe.

ILLUSTRATIONS

Mr. Choubi, Yannick Grossetête, Michaël Sallit, Ornella Salvi.

COMITÉ DE RELECTURE

Martin Caye, Aline Chalumeau, Marion Godey, Lise Le Joncour, Thomas Lamy, Marie-Juliane Marques, Maïa Mignotte.

COUVERTURE Édouard Roussel.

IMPRIMEUR Estimprim (25)

Dépôt légal : à la sortie du magazine ISSN : 2260-7617

Tous droits réservés © 2022

Merci à nos partenaires ainsi qu’à celles et ceux qui ont permis la réalisation de ce numéro. Prochain numéro : décembre 2022

Sparse bénéficie du soutien du Ministère de la culture et de la communication, fonds de soutien aux médias d’information sociale de proximité, et de la DRDJSCS au titre du Fonds de développement de la vie associative (FDVA)

sommaire 3. ÉDITO 6. BD - DOIGT DANS L’FINFIN 8. CINÉ CULTE 10. GUESTLIST IMMERSION 16. ROYAL CANIN ENQUÊTE 22. QUI A TUÉ LE COLONEL MOUTARDE ? PORTRAIT 28. SARBACANE : F. CABREL RENCONTRE 32. 30 MILLIONS D’AMIS, UN SEUL QUI PARLE REPORTAGE 36. À FOND LA DRAG INTERVIEW 42. TÊTE DE MORT BOULEVARD DES HITS 46. OSSAYOL DIAPORAMA 48. CHALON DANS LA STREET 54. DESTIN D’ENTREPRENEUR 56. ROMAN PHOTO 60. LA PAGE MODE 62. LE DESSOUS DES CARTES 64. CHIENS ÉCRASÉS 66. COURRIER DES LECTEURS 68. HOROSCOPE 70. ABONNEMENT - BOUTIQUE
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Rappelle-toi tes « fiches profil » pour préparer le bac. Tout était résumé. On n’avait pas besoin de lire les bouquins pour en parler. Chez Sparse, c’est pareil pour le cinéma : on a regardé des classiques pour toi. Plus besoin de t’emmerder à mater ces trucs trop lents alors qu’il y a plein de super films avec des explosions sur Netflix. Ne passe plus pour un inculte mais deviens un vrai usurpateur grâce à Sparse et fais croire à tout le monde que tu as vu ces bijoux du 7ème art. ATTENTION MAXI SPOILER !

LA FICHE

POUR BRILLER EN SOCIETE N UMERO 9

Réalisateur : Llyod KAUFMAN

Genre : Film de super-héros crado et badass

Année : 1984

Durée : 85 minutes

CONTEXTE

La production ricaine a pris un sérieux coup de jeune au début des années 80 avec l’avènement du Blockbuster et l’adoubement du Film de Genre. Fini les petits films d’Horreur, de Science-Fiction ou Fantastiques de série B. Oubliez les William Castle, Jack Hill ou Roger Corman, rois des nanars projetés à la sauvette dans des salles de quartier ou en drive in. Le film de genre est désormais populaire donc rentable ; « L’exorciste », « Star Wars », « Les dents de la mer » ou encore « Alien » sont de véritables cartons au box-office. Sous l’impulsion d’un Steven Spielberg, le cinéma

US s’affiche en grand sur les façades des cinémas du monde entier avec des films ayant couté des dizaines de millions de dollars.

C’est dans ce contexte particulier que Troma Production, dernière petite firme aux productions irrévérencieuses va connaître son heure de gloire. Cantonnée à un semi anonymat depuis sa création en 1974, la société fondée par Llyod Kaufmann va profiter du Festival de Cannes 1985 et de la sortie de son dernier titre Toxic Avenger pour enfin connaitre une petite notoriété.

CASTING

Toxic Avenger est un film typique des titres de la Troma c’est-à-dire une production fauchée. Côté casting, on découvre à l’affiche de parfaits inconnus pour la plupart amateurs. Difficile de déterminer qui de Mitch Coen, Mark Torgl ou Dan Snow est le plus mauvais. Pour le casting des rôles féminins, les actrices sont choisies pour leur physique avantageux et leur enthousiasme à se dénuder. Classe. La star du film c’est son réalisateur, scénariste, producteur,

maquilleur et même parfois acteur Llyod Kaufman. C’est bien lui qui va donner, grâce à son extrême polyvalence et une mécanique mise en place au fil des années, son cachet au film : un scénario déjanté, des scènes gores burlesques et sans aucune limite, des filles affriolantes et souvent dénudées… Tels sont les ingrédients qui font le sel de Toxic Avenger.

AMBIANCE

Welcome to Tromaville !!!

De prime abord, cette croquignolette bourgade est une parfaite représentation de la réussite américaine à la sauce Reagan. Des fast-foods bondés au club de gym en passant par l’incontournable collège et les grosses bagnoles ricaines, tous les éléments sont bien présents… On découvre d’ailleurs aussi d’autres aspects moins glamours… Notamment tous les travers (de porc) de cette société consumériste : des immenses décharges sauvages de produits toxiques planquées aux portes de la ville, des bidonvilles glauques….

Les bons citoyens de Tromaville sont riches (évidemment),

jeunes, beaux et oisifs, ils sont obnubilés par leur physique, ingurgitent des vitamines et passent le plus clair de leur temps dans des salles de sport. Vicieux, sadiques et sans morale, ils trompent leur ennui dans le sexe, l’alcool, la drogue et la violence gratuite. Naturellement tout cela dans un climat de totale impunité.

À côté de cette golden génération, on trouve des pauvres.

Laids et à moitié idiots à force de respirer les gaz toxiques s’échappant des décharges, ils habitent dans des taudis loin du Downtow : c’est précisément dans cette catégorie que se trouve le protagoniste de Toxic Avenger

SPOILER

Melvin, adolescent attardé et bègue, est concierge dans le club de sport le plus prisé de Tromaville. Invisible au milieu de la génération dorée, notre jeune ami est la cible favorite du gang de Bozo, une bande de « fils à papa » débraillés et un brin psychopathes qui prend son pied en dégommant des gamins au volant d’une décapotable. Un jour ledit Bozo pousse le bouchon un peu loin : lui faisant miroiter un rencart avec une créature plantureuse, il parvient à convaincre Melvin de se déguiser en danseuse étoile avec tutu et collant rose, puis le ridiculise devant tout le campus. Acculé, Melvin se défenestre et tombe dans un baril de déchets industriels. Sous l’effet des produits chimiques, il mute et devient une créature aussi hideuse que surpuissante : le Toxic Avenger.

Tromaville a désormais son super-héros. Si Toxic Avenger, affublé de sa sempiternelle serpillère à franges, fait un grand ménage à Tromaville comme Batman à Gotham, la méthode est sensiblement différente. Toxic est clairement... Un gros bourrin. Il écrabouille les têtes de sauvageons dans une ruelle sombre, repasse une grand-mère dans un pressing, transforme un violeur en milkshake humain ou fait cuire un braqueur dans la friteuse d’un fast food.

Entre deux pugilats, Toxic trouve le temps de sauver d’un viol Claire, une aveugle aux allures de pin-up. Si celle-ci tombe sous le charme de notre héros à tête de gland, la romance tourne court car le Maire de la ville, véritable parrain de la pègre locale, s’inquiète de l’arrivée de ce super héros indésirable. Après une campagne calomnieuse contre Toxic Avenger, il lance les forces de police à sa poursuite. Dans un final très inspiré de Frankenstein, Toxic Avenger échappe de justesse au lynchage avant d’éventrer le premier magistrat...

Entre les nudies de Russ Meyer (Faster Pussycat, Supervixen, etc...) et les films gore de Hershell Gordon Lewis (Blood Fest, 2000 maniacs, etc…), ce pur nanar décomplexé est une petite pépite. Avec Toxic Avenger, la firme Troma affiche clairement sa marque de fabrique : système D, amateurisme totalement assumé, humour potache, incohérence scénaristique et profusion de scènes gores et très dénudées. Elle confirme également qu’elle est sans doute la dernière firme cinématographique capable au début des années 80 de maintenir une production cinématographique indépendante hors des grandes majors US….

Par Cyril Jacquens
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Julien Milleret

Julien Milleret est le fondateur du Rockabylette. Le festival le plus fou de Bourgogne-Franche-Comté, qui a ses quartiers dans le Sud Morvan, à Luzy puis Autun. Rock, garage, mobylette, solex, concours en tout genre, fête foraine... Le Rockabylette c’est un concentré de zinzinerie vintage des 40’s aux 80’s du meilleur goût. On l’a cru mort mais il se pourrait que le Rockabylette renaisse encore de ses cendres de cigarillo.

Alors c’est quoi cette histoire ? Ça relance le Rockabylette ou pas ? À Luzy ? À Autun ?

Oui, tout le monde est tombé dans le panneau : on n’a annoncé que la fin de cette association et la non-édition 2022… La vérité?

On ne bricole pas à l’atelier !!! On préparait en secret notre come back : On annonce une nouvelle association ; on a déjà 150 nouveaux bénévoles en plus des anciens et on recrute toujours !

On commence dès le 24 septembre pour le Bal du Rockabylette à Luzy et on se prépare déjà pour le festival à Luzy en 2023 et en 2024.

Y’aura encore des « murs de la mort » avec des motos ?

On aimerait avoir l’attraction pour le grand Best Of des 10 ans. On fera tomber tous les murs et sache que le festival est éternel… ROCKABYLETTE Will Never Die !!!

Pour ta mob’ t’es plutôt pot Ninja ou pot Devil ?

Pot Ninja Usine, cartouche carte noir. Mon premier achat sur ma MBK Mag Max en 1991. À cette occasion, je lance une alerte disparition pour retrouver cette mob...

Y’a un mec qui s’est fait flashé dans le Doubs avec sa mob 103 SP à 122 km/h. C’était toi ? C’est quoi ton record ?

Ce n’était pas moi, et d’ailleurs on lance une recherche par la CiBi : Ici le Captain’ Dobey, appel à toutes les voitures, course poursuite code 10-31 ! Moi, j’ai plutôt un record d’endurance, un Road Trip de 2500 km à travers la France.

Pourquoi Luzy est le village du futur ?

Facile, le futur c’est le retour à la campagne ! Faudrait vraiment être miro pour ne pas voir ce qui se passe (réchauffement climatique, surconsommation, coûts des énergies…). Tous les néoruraux sont les bienvenus, il y a toutes les infrastructures et équipements nécessaires au bien-être de tous et toutes.

Si tu devais choisir une seule chose du Morvan ?

La gnôle !!! Souvent vers 4-5 heures du matin, on travaille sur notre projet de biocarburant à base d’eau-de-vie !!! Mais on n’a toujours pas résolu le problème de serrage ! Et pis faudrait pas oublier notre prestigieux jambon cru, à consommer sans modération…

Elle est tunée comment ta chiotte ? Y’a des flammes un peu ?

J’ai une magnifique 103 Chopper HP1, spéciale bronzage sous les bras. Elle n’a pas de flammes mais elle en jette à mort !

Directeur du Rockabylette (58) Besançon | Chapiteau (Friche artistique) du octobre Johann
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Terces
Le Guillerm « Les numéros-machines du Léonard de Vinci du cirque contemporain » 2022. L-R 2021-006336/006340/006300/006460 Thomas Huot-Marchand Terces©Philippe Laurençon Découvrez l’ensemble de la saison 2022–2023 sur www.les2scenes.fr

Joséphine Pagnier

Dans la famille Pagnier, le saut à ski est une tradition qui se transmet de grand-mère en fille. À 20 ans, la jurassienne originaire de Chaux-Neuve épate le monde. Vice Championne du monde Juniors et Vice Championne Olympique de la Jeunesse, elle fait partie depuis 2017 de l’équipe de France de saut à ski avec plusieurs médailles à son cou et a disputé ses premiers Jeux Olympiques à Pékin cette année.

Quand on fait du saut à Ski, on fait comment l’été ?

L’été on saute sur des pistes recouvertes de plastique. Ce sont des balais en plastique entreposés, ce qui permet de retrouver les mêmes sensations que l’hiver mais sur un terrain sans neige.

Tu vas faire tes courses en saut à ski parfois ? Genre tu décolles de Chaux-Neuve et t’atterris sur le parking de l’Atac de Mouthe ? Pratique pour les déplacements.

J’aimerais bien mais j’ai pas encore trouvé le moyen de faire ça. C’est vrai que si on pouvait être en l’air en orientant le vent pour aller plus loin ça serait une bonne idée !

Il parait que ta grand-mère pratiquait le saut à ski alors que c’était interdit aux femmes. Elle faisait comment ? Elle se déguisait ?

Elle se déguisait pas mais elle allait sauter en cachette avec ses amis.

Franchement y’a pas un effort à faire sur les combinaisons des sauteurs à ski ? Pas très stylé tout ça...

Moi j’aime beaucoup, après il y a des choses à faire sur la réglementation des combinaisons mais ça c’est une autre affaire. Pour moi il y a encore trop d’injustice sur les combinaisons et sur la manière dont c’est contrôlé.

Les JO de 2026 en Italie, t’es sur le podium ? Parce que nous on a vidé le compte épargne pour parier sur toi.

Moi aussi je vais essayer de parier sur moi ! En tout cas je vais tout faire et travailler pour. Les JO ce sont des compétitions en une journée où il peut tout arriver mais je pense surtout à essayer de construire ma carrière sur des résultats en coupe du monde à long terme on va dire. Mais oui pourquoi pas chercher une médaille à Cortina !

Qui est pour toi la plus grande star de Bourgogne-FrancheComté ?

J’aurais dis Jason Lamy-Chappuis quand j’étais plus petite et quand il était encore en activité. Actuellement je dirais Quentin Fillion Maillet qui est très connu.

Championne de saut à Ski (25) Chaux- Neuve
guestlist
12 2012 - 2022 SUR TOUTE LA BFC RELEASE PARTY / TEUF 9 décembre / Dijon - Péniche Cancale 17 décembre / Besançon - Le Bastion VENEZ COMME VOUS ÊTES

UN APRÈS-MIDI DE CHIEN

UN APRÈS-MIDI DE CHIEN

Comme le répétait sempiternellement Omar Sharif sur TF1 : « les courses, c’est ma grande passion ». Nous aussi, Omar. Mais attention, pas question de parler ici du jockey à la casaque bleue et d’Étoile du levant dans la 4ème.

À la place, on est parti à la rencontre du meilleur ami de l’homme, en Saône-et-Loire, pour le championnat de France de course de lévriers.

Par Frank le Tank Photos Édouard Roussel immersion Sympa les maillots de corps.

« NOUS ON MANGE SOUS LA TENTE, L’INTÉRIEUR EST RÉSERVÉ AUX CHIENS »

« Un greyhound lancé à pleine vitesse, c’est environ 70 km/h. C’est le chien roi quand on parle de poursuite à vue sur leurre », nous explique Jean-Pierre, posté au centre de la prairie avec son tableau de notes. Jean-Pierre est juge international et il scrute les chiens lancés à toute berzingue derrière des bandelettes en plastique Royal Canin, qui servent de leurres en mouvement. Les chiens se taillent la bourre en se faufilant entre les arbres, taillis et autres arbustes et ne quittent pas leur objectif du museau.

« Le terrain fait 750 mètres de long pour les grands chiens qui concourent aujourd’hui, demain pour les petits ça fera 600 mètres », précise Jean-Pierre. La course est effrénée ; l’agilité de ces grands chiens est majestueuse et l’effet de vitesse rajoute une excitation notable au spectacle. À la fin du tour, le chien finit par attraper le leurre à travers sa muselière (qui est utilisée pour que le chien ne se blesse pas). Fin de la manche. On vient d’assister pour la première fois de notre vie à la poursuite à vue sur leurre, appelé aussi PVL.

Contrairement à l’image d’Épinal des courses de lévriers que l’on pouvait avoir au préalable et largement plébiscitée lors des courses anglo-saxonnes, il y a plusieurs pratiques distinctes chez le lévrier. Le racing sur cynodrome est la plus connue. Un anneau qui ressemble à un hippodrome où les chiens courent après un leurre sur un rail et où l’on va les chronométrer. Simple, basique et source d’énormes revenus sur les paris dans les pays anglo-saxons. Deuxième pratique : la poursuite à vue sur leurre (coursing) pratiquée en prairie. « C’est tout simplement un simulacre

de la chasse », nous précise Isabelle, secrétaire de la CNUL (Commission nationale de l’utilisation des lévriers) qui n’est autre que l’organisme de régulation qui s’occupe des courses et du championnat de France. Enfin, dernière catégorie : l’exposition, plus communément appelée concours de beauté, qui s’éloigne un peu des deux premières pratiques citées.

À partir de là, vous l’aurez compris, il n’y aura donc pas de paris incroyables, d’histoire de doigts coupés et autres chiens maltraités dans cet article (pour cela, il faudra reprendre ses classiques comme le film Snatch). Ici on va parler plutôt de chiens qui s’amusent dans une prairie, de maîtres aimants ambiance Pedigree Pal et 30 millions d’amis avec leurs chiens que l’on peut qualifier de rois. La preuve en est dès le parking de cette bourgade bien connue des amateurs de vin qu’est Chardonnay (prononcez [char-don-ney] pour les anglo-saxons) : les campingcars immatriculés en 90, 33 et 49 sont éparpillés autour du cimetière, à la sortie du village, ambiance la caravane passe, sauf qu’ici les chiens restent tranquilles. C’est le cas de le dire, car les dogs sont installés tranquillement dans les camping-cars pendant que leurs maîtres, eux, s’affairent : « nous on mange sous la tente, l’intérieur est réservé aux chiens », nous confie, amusé, un participant venu d’Angers. On comprend vite que les chiens sont chouchoutés et que l’on est loin de la violence animale souvent évoquée par les détracteurs de la pratique : « Il y a pas mal d’histoires de maltraitances notamment avec les galgos en Espagne. Les chasseurs les utilisent pour chasser et les tabassent. Dans les pays anglo-saxons, on retrouve de la maltraitance aussi, principalement autour du business des paris », nous explique Jean-Pierre. En France, ce problème n’existe pas ou plus : les paris autour de la course de lévriers sont interdits depuis 2019 et l’utilisation des lévriers en partie de chasse est proscrite par une loi napoléonienne : « Le lévrier a été interdit de chasse car il décimait le gibier. En période de famine, ça le faisait moyen ».

Meilleur ami de l’homme

Aujourd’hui, le lévrier est donc un chien domestiqué mais qui a tout de même besoin de se dépenser : « Il ne peut pas rester plus de deux jours à la maison », nous explique Isabelle, avant d’ajouter : « attention aux propriétaires fainéants ! ». C’est fort de ce constat que la plupart des participants présents ce jour se sont mis à la poursuite à la vue sur leurre : « j’ai découvert peu de temps après leur première course de PVL que c’était un plaisir pour le chien et qu’il trépignait avant de courir », nous confie Isabelle à propos de Jacob, un lévrier afghan qui concours en vétéran. « Il a bientôt 8 ans, c’est la limite d’âge légale pour la compétition, c’est donc sa dernière course aujourd’hui ». Pour l’inscrire, elle a dû débourser 30 euros par chien. Un prix dégressif pour des concurrents qui en présentent la plupart du temps plusieurs par compétition. Il y a d’ailleurs moins de concurrents inscrits pour le championnat de France cette année : « Il y a 58 propriétaires pour 87 chiens inscrits, ce qui est un très petit nombre mais avec la sortie du COVID, le coût de l’essence, tout cela ne joue pas en notre faveur ». Alain Branger, le président du club des lévriers de Bourgogne, qui reçoit aujourd’hui, nous le confirme : en 2017, il y avait 168 chiens en compétition. Il est président du club de Chardonnay (le seul de BFC), depuis 2010 et il voit le nombre d’adhérents baisser d’année en année. D’autant plus que les cinquante adhérents de son club viennent parfois de loin : Loire, Drôme, Isère… Ils font de la route une fois par mois pour profiter

de la prairie au milieu des vignes et entraîner leurs chiens pour les compétitions.

Royal Canin

Une compétition qui bat son plein donc, en ce samedi ; les chiens sont présentés dans la prairie par catégories : barzoïs, lévriers afghans, greyhounds, whippets (car oui, il y a plusieurs sortent de lévriers) … Ils sont deux à prendre le départ. Les propriétaires essaient de respecter le sexe des concurrents pour ne pas les « divertir ». Le leurre est remonté le long d’un système de poulie, tracté par un quad. Une fois que la ficelle est tendue, le départ est donné. Les chiens se lancent à la poursuite de cet animal en plastique étrange (composé, je le rappelle, de bandelettes Royal Canin auxquelles on a apposé un morceau de peau de sanglier pour motiver les chiens !). Le conducteur du leurre est posté au milieu de la prairie,

Parklife Vendanges rapides à Chardonnay.
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et joue avec sa télécommande sur la vitesse du leurre afin de créer cet effet de poursuite du gibier. « Les chiens sont jugés sur cinq critères : la vitesse, la résistance (forme physique), l’adresse (sa technique de manœuvre de leurre), son adresse (la façon de négocier les virages) et enfin son comportement tactique (sa façon de chasser en somme) ». Ce n’est donc pas seulement une question de vitesse qui est soulevée ici, contrairement au racing. Autre détail intéressant, en courant à deux les chiens vont avoir un comportement distinct qui va se mettre en place instinctivement : « Il y en a un qui poursuit et l’autre qui chasse. Un prend le lead dans la poursuite et l’autre va se mettre à chasser afin de pouvoir couper la route à l’animal et ainsi le piéger », nous raconte Isabelle. Encore plus fort : les organisateurs sont obligés d’inverser le sens de la course entre le matin et l’après-midi sinon les chiens retiennent le parcours et attrapent le leurre bien plus facilement. Y’a pas à dire, la nature c’est quand même bien fait.

Here comes a new challenger

Au fil de la compétition, on comprend deux choses : la course de lévriers est une pratique très contrôlée et les règles de qualification et de victoire ne sont pas piquées des hannetons. Les chiens passent un contrôle véto la veille ; leur identité est scrupuleusement vérifiée. On contrôle que le chien est bien LOF, c’està-dire inscrit au livre des origines françaises. Pour avoir la certification, rien de plus simple (en apparence) : il faut que le chien soit beau et bon... Avec ce précieux sésame, le chien peut courir partout en France et à l’étranger et se présenter à toutes les compétitions. Par exemple, pour être sélectionné à la finale du championnat de France qui a lieu ce jour, « le chien doit gagner 3 courses, dans 3 clubs et avoir été jugé par 3 juges différents », nous explique Jean-Pierre en bon jury qui se respecte. Le prix de champion de France est donc octroyé en août sur cette journée auprès de ces chiens sélectionnés au préalable tout au long de

l’année. Cependant, ça ne s’arrête pas là. Pour valider le titre de champion de France, le chien victorieux doit encore gagner une épreuve appelée « une spéciale » dans les 3 ans qui suivent. Si ce n’est pas le cas, le chien peut se faire chiper son titre par le vicechampion. Un règlement complexe encadré par les dirigeants de la CNUL (Comité Nationale d’Utilisation des Lévriers) présents sur site pour checker tout ça.

Ragoût Toutou

Près de la ligne de départ, on rencontre un lévrier magnifique et son maître originaire de Pau. Il me présente sa chienne, une podenco ibiscenco (venant donc d’Ibiza, un chien clubbeur sans doute). La chienne possède un pédigrée complet (ce qui est en somme l’arbre généalogique du chien, une donnée assez rare, surtout en Espagne). Selon les juges, et son maître, l’animal n’a aucun défaut. C’est vrai que parée d’une jupe blanche à poil ras et de superbes oreilles tachetées, elle en jette à mort. La chienne qui fait près d’un mètre alterne entre concours de beauté, course à vue sur leurre et racing.

Cependant ce genre de pédigrée à un prix, le chiot a coûté à notre propriétaire près de 1500 euros mais vu qu’il a acheté le chiot en Russie pendant le COVID, des frais annexes se sont vite rajoutés. La facture finale est douloureuse, près de 4500 euros pour le chien. « On le voulait quand il était chiot mais on ne le regrette pas. Ce sont des chiens très sociables avec les gens et avec les autres chiens. Ils ont un caractère superbe. Je vous recommande vivement le Podenco Ibiscenco !». Pas sûr qu’on ait les liquidités nécessaires pour investir l’équivalent du prix d’une Twingo dans un lévrier mais on sait désormais que le cas échéant on pourra se faire plein de nouveaux amis lors des différentes compétitions de PVL en France, que ce soit humains ou canins, et que l’on pourra, peutêtre, prétendre remporter un championnat de France de poursuite à vue sur leurre.

La cryothérapie. Le fameux chien girafe.
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«LE LÉVRIER A ÉTÉ INTERDIT DE CHASSE CAR IL DÉCIMAIT LE GIBIER. EN PÉRIODE DE FAMINE, ÇA LE FAISAIT MOYEN ».

Pourquoi la moutardeadisparu

Pas de pot

La moutarde de Dijon. Elle est ancrée dans le patrimoine culturel et l’ordinaire gastronomique des Français.

On en consomme 1 kg par personne chaque année.

?Elle s’est raréfiée cet été dans un monde qui change, pour diverses raisons, politiques, climatiques et diplomatiques, et ça peut prêter à sourire mais elle nous manque déjà.

Une pénurie de moutarde  ? Un scénario catastrophe aux ramifications obscures, digne des pires dystopies.

Bienvenue au 21e siècle.

Par
Loïc Baruteu Illustrations Michaël Sallit
enquête
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Ces dernières années, surtout depuis la crise sanitaire qui a bien perturbé la logistique mondiale, on commence à s’habituer aux pénuries dans notre société consumériste. C’est “la fin de l’abondance”, a même prévenu notre grand gourou à son retour de vacances. Il y a les composants électroniques, les matériaux de construction, l’huile, et même l’eau courante cet été. Le modèle économique d’une croissance sans fin et d’une mondialisation à tout prix semble avoir fait son temps, dans un monde aux ressources finies. Mais c’est un autre débat. Le sujet qui a agité les Français, comme une grande saga de l’été sur TF1, qui a fait couler de l’encre dans les médias et des pixels sur les réseaux sociaux, c’est donc cette pénurie de moutarde de Dijon dans tout le pays. Comme ça, sans prévenir, les consommateurs se retrouvent avec des rayons vides dans les grandes surfaces, entre les cornichons et la sauce algérienne. Et comme à chaque fois, on assiste à un comportement loufoque ; le panic buying, ou la crainte d’une pénurie définitive, pousse les Français à se ruer sur les stocks au début de l’été pour faire sans doute assez de provisions pour plusieurs générations. Franchement, qui voudrait faire un moutard dans un monde sans moutarde ?

Les restaurateurs, confrontés à la pénurie, sont contraints de modifier leurs recettes. Les boutiques Maille à Paris ou Dijon sont dévalisées. Sur les sites de vente en ligne, les internautes craquent leur PEL pour avoir leur dose de moutarde. La livraison passe de quelques jours à plusieurs semaines en l’espace de quelques heures. La folie. Avides de super-profits, les pires spéculateurs proposent le condiment à la revente sur les différents marketplaces, avec des annonces insensées : jusqu’à 5 000€ pour un pot. Un opportunisme indécent et grotesque, surtout depuis que les étals sont maintenant plus régulièrement fournis. Le vent de panique est retombé, les clients se contentent désormais du pot de moutarde alloué par client selon les directives des grandes surfaces. Pourtant, cette pénurie éphémère n’était peut-être qu’un avant-goût.

Canada Dry

À l’origine, la sécheresse biblique de l’été 2021 au Canada, 1er importateur mondial, provoquée par un dôme de chaleur, un phénomène météorologique qui piège l’air chaud et engendre des températures apocalyptiques ; avec 50°C au thermomètre l’an dernier, certaines parties du Canada ont vécu des incendies fulgurants qui ont consumé des villages en quelques heures et les cultures de graines de moutarde, complètement desséchées, ont été décimées. Une tragédie pour la filière française, qui importe en masse ; entre 70 et 80% des graines utilisées en France proviennent du Canada. Pourquoi ? Parce que chez nous, les interdictions de pesticide depuis 2018 ont entamé la rentabilité de ces cultures et ont poussé les agriculteurs à miser sur d’autres

exploitations : “il faut convaincre les agriculteurs de cultiver des graines de moutarde puisque la flambée des prix du colza et du blé les motivent davantage”, constate Thierry Guinet, ingénieur d’études à l’Institut Agro de Dijon, anciennement AgroSup. Les fabricants de moutarde en France passent ainsi par des tiers pour s’approvisionner, nous explique Luc Vandermaesen, directeur général de la marque Reine de Dijon : “nous achetons les graines canadiennes via des intermédiaires, à même de stocker la graine et d’assurer le transport dans un contenant approprié vers nos usines. Nous avons besoin d’être livrés à une date et une heure connue, ce qui n’est pas réaliste lorsqu’on importe directement du Canada.” Conséquence de cet épisode caniculaire, les récoltes de graines de moutarde ont ainsi diminué de 28% d’après le ministère de l’Agriculture canadien, passant de 130 000 tonnes en 2020 contre seulement 99 000 l’an passé. De quoi faire décoller le coût de la tonne aux alentours de 1700€ cette année, le double du tarif appliqué en 2021, avec un prix déjà fixé à 2000€ la tonne pour 2023.

Pour résumer, on achète de plus en plus cher des graines de moutarde élevées aux pesticides chez les Canadiens parce que les agriculteurs français ont réduit, voire cessé leur production de graines depuis que la France a interdit ces mêmes pesticides. Ouf, l’honneur est sauf. Comme si ça ne suffisait pas, l’invasion de l’Ukraine par la Russie a provoqué des remous jusque dans le commerce de la moutarde. Les deux pays sont des exportateurs importants de graines et la situation instable a compliqué les relations commerciales, comme l’analyse Luc Vandermaesen : “cette guerre joue un petit rôle : sans elle, la filière moutarde aurait pu passer commande en Russie ou en Ukraine de graines semées au printemps 2022, et qui auraient pu être reçues à l’automne 2022.” Sans parler des inflations de matières premières et les complications logistiques provoquées par le conflit : “l’impact direct est une augmentation des prix des flacons en verre, du carton et de l’acier, et bien sûr du transport en raison des surcoûts énergétiques.” Beaucoup de désagréments qui apportent de l’eau au moulin de détracteurs inattendus sur les réseaux, les plus prompts à discerner les contours d’une manipulation maléfique.

La moutarde monte au nez des complotistes Ceux qu’on appelle aujourd’hui les complotistes, par réduction, élaborent, diffusent ou valident des théories du complot sur Internet et il y en a pour quasi chaque sujet d’actualité. Pas étonnant de les voir déferler sur un thème aussi piquant que cette pénurie de moutarde. Médaille d’or du complotisme, cette courte vidéo diffusée le 8 juillet où un employé en logistique exhibe plusieurs palettes de pots de moutarde de Dijon prétendument destinées à l’enseigne Carrefour et entassées dans un entrepôt. Tempête sur les réseaux et dans les médias. Un démenti est rapidement établi de la part du géant de la grande distribution tandis que les internautes démontrent que les palettes appartiennent en fait à E.Leclerc, qui réfute à son tour l’idée d’une pénurie organisée et justifie le stockage de palettes dans l’attente de leur départ vers différents magasins. C’est quand même plus facile à croire qu’un plan mis en œuvre par tout le secteur de la grande distribution pour faire augmenter le prix de la moutarde, qui a subi environ 13% d’inflation cette année, comme la plupart des denrées alimentaires. Il y a sans doute mieux pour se gaver de pognon que spéculer sur la moutarde. Les complotistes les plus fougueux vont même jusqu’à envisager une manipulation de la part de la classe dirigeante pour habituer la population aux pénuries et la rendre plus docile. Démoniaque.

“on achète de plus en plus cher des graines de moutarde élevées aux pesticides chez les Canadiens parce que la France a interdit ces mêmes pesticides”
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Avec les congés d’été et le tourisme dans les pays frontaliers, pas mal de vacanciers rapportent également que les rayons sont bien fournis en moutarde de Dijon à l’étranger. Alors pourquoi on n’en a pas, nous ? Évidemment, on pense tout de suite à ce monstrueux complot de la mafia agroalimentaire. Ou peut-être que, comme l’explique Luc Vandermaesen, la moutarde de Dijon n’est pas aussi populaire hors de nos frontières : “les pays voisins de la France consomment tous de la moutarde de Dijon, mais en petite quantité. Ils consomment souvent d’autres moutardes, typiques de leur pays, et souvent moins forte que la moutarde de Dijon. Les rotations dans ces pays n’ont rien de comparable avec les rotations en France. Toutes les quantités livrées au Portugal, en Espagne, en Suisse ou en Italie ne serviraient que quelques jours de vente d’une région française. C’est une fausse polémique.”

Par amour du goût

Effectivement, hors de l’Hexagone, la moutarde de Dijon n’est pas la plus plébiscitée. On la fabrique avec des graines de moutarde brunes de la variété Brassica Juncea, les plus fortes, et du verjus. Une recette historique, distribuée dans le monde entier, principalement par Amora et Maille ; 90% de la moutarde de Dijon est commercialisée par les deux marques, qui appartiennent au groupe Unilever. Un mastodonte, quatrième acteur mondial de l’agroalimentaire derrière Nestlé, PepsiCo et Coca-Cola Company, qui écoule aussi bien du shampooing que de la lessive ou de la crème glacée. L’usine historique d’Amora à Dijon avait d’ailleurs fermé ses portes en 2009 pour relocaliser sa production sur le site de Chevigny-Saint-Sauveur. D’après un porte-parole de la marque à l’époque, il s’agit du “plus grand centre européen de fabrications de condiments”. “La moutarde Amora restera dijonnaise”, avait-il conclu. Dans l’ensemble, la région dijonnaise concentre pas mal d’usines de fabrication de moutarde. Il y a Reine de Dijon à Fleurey-sur-Ouche, Edmond Fallot à Beaune ou l’Européenne de Condiments à Couchey, deuxième producteur français de moutarde. Cette dernière produit notamment pour la marque allemande Kühne, qui promouvait récemment sur sa page Facebook le raifort comme “alternative à la traditionnelle moutarde de Dijon”.

Car il existe une multitude de substituts, comme l’ont découvert beaucoup de Français avec cette pénurie. Le raifort donc, un légume racine, surnommé “la moutarde des Allemands”, ou évidemment la moutarde douce anglo-saxonne, popularisée par l’expansion mondiale des fast foods. En France, le choix se multiplie également. Dans l’Ain, le Gaec de la Bourbellière sur le plateau d’Hauteville cultive et fabrique artisanalement une moutarde locale. À Orléans, l’entreprise Martin-Pouret, spécialisée dans le vinaigre, s’est lancé il y a une dizaine d’années dans la production du condiment. Enfin, dans le Bas-Rhin, l’usine Alélor tourne à plein régime ; les commandes s’envolent et la cadence de travail des vingt employés a été augmentée. Les agriculteurs de la région fournissent 60% des graines utilisées par la marque alsacienne, de quoi pallier le recours massif à l’exportation. Sinon, on a également découvert ces derniers temps la moutarde épicée de Sarepta, en provenance de Pologne, qui remplit les rayons désertés par la moutarde de Dijon. Devant les affichettes d’une grande surface qui vante ce palliatif, les consommateurs expriment leur mépris : “c’est quoi ça ? De la moutarde ukrainienne ?” s’exclame une cliente âgée. Pas loin. La moutarde de Dijon, numéro un dans le cœur des Français.

De plus en plus de Français se tournent vers la moutarde de Bourgogne, à indice géographique protégé (IGP)

Les graines de la colère

Forcément, il y a donc les best-sellers de Maille et Amora, mais de plus en plus de Français se tournent vers la moutarde de Bourgogne, à Indice géographique protégé (IGP), qui garantit une fabrication à partir de graines de moutarde cultivées dans la région (car la moutarde de Dijon n’est pas une appellation, c’est juste une recette, on peut en produire partout). Reine de Dijon et surtout Edmond Fallot en proposent toute une gamme. Un paradoxe puisque si la demande augmente, l’offre aurait plutôt tendance à diminuer. En 2016, les agriculteurs bourguignons avaient récolté 12 000 tonnes de graines de moutarde, contre seulement 4000 tonnes en 2021.

Thierry Guinet, ingénieur d’études à l’Institut Agro de Dijon, dirige un programme pour créer et développer des variétés de graines de moutarde plus résistantes, au meilleur rendement à l’hectare et adaptées aux menaces agricoles, en particulier les nuisibles et les conditions climatiques. Depuis 1990, il travaille en collaboration avec Amora, Maille, Edmond Fallot, EDC et Reine de Dijon et toutes les variétés cultivées en Bourgogne sont nées de ce programme ; “c’est un travail indispensable sans lequel il n’y aurait pas de filière en Bourgogne”, expose-t-il. “La résistance au froid a été nettement améliorée et permet de semer les graines de moutarde en septembre, pour une floraison en avril et une récolte en juillet, alors que le Canada sème au printemps”, explique l’ingénieur. Avec l’accumulation d’accidents climatiques depuis plusieurs années et le dernier rapport du GIEC prédisant que 8% des terres agricoles deviendront inadaptées si le climat se réchauffe de 1,6° d’ici 2100, le défi est constant pour Thierry, qui travaille quasiment seul sur ce programme capital pour la filière de la moutarde, car le Canada n’est pas à l’abri d’autres épisodes de sécheresse à l’avenir et tous les pesticides du monde ne pourront rien faire pour sauver les cultures.

Ça passe pour cette fois, les récoltes bourguignonnes et canadiennes étant généreuses cette année ; les graines de moutarde d’outre-Atlantique débarqueront chez nous cet hiver, alors que la production aura été soutenue d’ici là par l’agriculture locale. De quoi alimenter des Français forcés à l’abstinence et pas encore convaincus par les alternatives étrangères, qui espèrent bien ne plus avoir à revivre ce cauchemar. Les graines d’un monde qui change ont été semées, reste à voir à quelle sauce on sera mangés. En espérant que ça soit à la moutarde de Dijon.

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À PLEIN TUBE

Sa bouche est collée à l’embout de la sarbacane. Les joues sont gonflées au maximum. Les yeux sont fixés sur la cible à 20 mètres. Le temps est suspendu, l’espace de quelques secondes. Soudain, la langue se retire et les joues se vident brutalement. L’air comprimé dans les joues explose ; sa seule issue est le conduit de la sarbacane. Le trait est expulsé à 150 Km/h et suit sa trajectoire recta. Ça fait « Plop » ! Ce son est à peine terminé que le trait est déjà planté dans la cible. Le dijonnais Willy Joly vient de faire un carreau en plaçant son troisième trait au centre de la cible. Ses pieds sont toujours stables au sol. Pas de tremblement, la sarbacane est toujours fixe entre ses deux mains. Et c’est là qu’il nous dit de sa voix sûre et très douce que le souffle doit accompagner le trait jusqu’à ce qu’il soit planté. Respect.

Les nuages reprennent alors leur promenade au-dessus des hautes plates et de nos têtes, près de la Combe à la Serpent, top of Dijon. Manque plus qu’une virgule à l’harmonica, façon Ennio Morricone. Willy a ramené en juin la médaille de bronze catégorie homme des championnats d’Europe de sarbacane sportive à Hattgenstein, en Allemagne, et son fiston de 15 ans, Lenny, est carrément revenu avec la médaille d’or, toutes catégories confondues. C’est dans son hood qu’il nous a donné rendez-vous ce samedi matin. On venait faire notre interview tranquille, prendre deux-trois photos et voilà qu’on se prend direct une master-class en sarbacane sportive par le champion dijonnais.

Willy revient des championnats d’Europe de sarbacane avec une médaille (et son fils avec le titre). Texte Nicolas Popovic Photo : Thomas Lamy portrait
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Il est comme ça Willy, la pédagogie c’est son truc. Il n’a rien d’un chasseur de Bornéo en quête de gibier. Il est éducateur sportif indépendant depuis près de 20 ans et s’est spécialisé dans des pratiques sportives originales pour se démarquer. Kin ball, Ultimate, Speed badminton… Aujourd’hui, la sarbacane c’est 90% de son activité pro. « Rien que cet été, j’ai initié 1600 personnes, et y’en a 1595 qui ont kiffé » nous annonce-t-il fièrement.

Calme, maîtrise, précision

Lui, il a découvert vers 2008 et il est tombé amoureux de la vitesse de la flèche. La sarbacane l’a immédiatement séduit par sa simplicité et les qualités nécessaires pour sa pratique : calme, maîtrise de la respiration et du souffle, précision. Willy a d’ailleurs repéré que les photographes et les joueurs d’instruments à vent ont une meilleure visée et un meilleur souffle. En compétition par contre c’est de l’endurance. Les tireurs (hommes et femmes) sont tous affûtés et empilent les shoots au centre sans forcer. Ça se joue à rien. Un micromouvement et paf, t’es à côté…

« Un championnat en salle, c’est entre 120 et 300 tirs sur deux jours, et vous n’avez pas le droit à l’erreur, c’est le sport le plus exigeant que j’ai jamais pratiqué ! » nous précise Willy. Bon ça c’est pour les champions. Pour les débutants, c’est un sport hyper abordable, qui ne nécessite pas de matériel sophistiqué pour commencer. Aujourd’hui on dirait que la sarbacane, c’est complètement Low tech. Après avoir été initié, on peut tirer direct et se faire plaisir pendant des heures : « C’est un gros plaisir, deux ans après, je revois des gosses qui se souviennent de tout ce qu’on avait fait, me remercient et s’y remettent direct. » Willy nous explique tout ça en nous apprenant la technique à air

comprimé pour envoyer des traits plein pot dans un rectangle de polystyrène fixé sur un chevalet de peintre.

Je plonge alors très loin dans mes souvenirs de lycée, pour me rappeler ces mornes heures qu’on ambiançait en dégommant des fayots à la boulette de papier baveux shootée depuis nos stylos bic transformés en sarbacanes de fortune. Le plaisir était déjà là. Mais rien à voir avec les sarbacanes sportives qu’on a pu tester. Willy nous en a sorti une de débutant, avec un embout pour pas avaler le trait ; une autre sportive, avec un tube en métal bleu, assez classique ; et puis la sarbacane avec laquelle il a cartonné aux championnats d’Europe. Et enfin une sarbacane traditionnelle made in Bornéo spécialement confectionnée pour lui : la classe. « Le chef de la tribu des Penan de Bornéo me l’a offerte pour que je la montre autour de moi et que le public voie ce qu’est une sarbacane traditionnelle ». #Emotion.

Elles mesurent entre 1,20m et 1,60m de long, la longueur règlementaire pour les engins propulseur de compétition.

Les traits, c’est l’équivalent des fléchettes. Ils sont en carbone et mesurent à peine dix centimètres. Bien évidemment, ils ne sont pas enduits de poison comme à Bornéo ou en Amazonie, là où la sarbacane de chasse existe depuis au moins une éternité. Pour la France, Willy nous explique que c’est à Saint-Étienne que la sarbacane a connu son heure de gloire. Tiens donc, y’a pas qu’un chaudron de footeux là-bas. « Les mineurs l’utilisaient pour expectorer le charbon qui tapissait leurs poumons et ça permettait également de repérer ceux qui n’avaient plus assez de souffle pour redescendre dans les galeries. »

Début des années 2000, la sarbacane connaît un nouveau souffle et suscite un intérêt discret sur tout le territoire et un peu partout en Europe, surtout en Allemagne et en Autriche. Les championnats du monde à Munich en 2019, organisés à l’Olympique stadium ont attirés 11 nationalités et près de 300 tireurs : défilé des nations et tout le tremblement. Grand spectacle ! Par contre en France, Willy nous explique qu’aujourd’hui ça reste compliqué. Y’aurait moins de 1000 adhérents sur l’ensemble du territoire. « Ça reste approximatif, tout simplement parce qu’il n’existe pas de fédération officielle. La sarbacane est captée par des fédés multisports : l’UFOLEP, la FSGT, l’ASPTT, la fédé française de sarbacane sportive… Difficile de structurer et développer dans ces conditions ». Même la fléchette sportive est mieux lotie ! Et puis faut pas compter sur les JO 2024, y’a pas assez de pays pratiquants dans le monde pour que la sarbacane soit dans la set list des JO. Tony Estanguet, si tu nous lis, qu’est-ce que tu fous ?

« Ce que j’aimerais, c’est développer la sarbacane sportive sur le modèle des tournois de fléchettes, dans une arène pleine de public et avec des écrans géants pour bien voir les duels ! ». Si tu es fan ou que tu as zappé sur la chaîne TV l’Equipe, tu vois de quoi on parle. En attendant, Willy continue de faire connaître cette pratique sportive avec son asso, dans des séminaires, des centres de loisirs, des écoles, partout en France où on l’appelle.

« C’est ça mon kif : faire découvrir ce sport dans une bonne ambiance. J’adore rouler dans ma camionnette avec tout mon matos et pratiquer en pleine nature, de préférence ». Son horizon : les championnats d’Europe en mai 2024 à Saint Dizier en Haute-Marne. Là, il vise le titre, ça fera pas un trait !

Retrouvez le site internet de son asso où il promeut entre autres la sarbacane : parc éco-loisirs sportifs parcecoloisirs.jimdofree.com

« LE CHEF DE LA TRIBU DES PENAN DE BORNÉO ME L’A
POUR QUE JE LA MONTRE AUTOUR DE MOI ET QUE LE PUBLIC VOIE CE QU’EST UNE SARBACANE TRADITIONNELLE »
DJ Ridou.
OFFERTE
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Après Beethoven, Didier, Laïka, Lassie et Rintintin, voici Coco. Ce n’est pas un perroquet ni une créatrice de mode, c’est un jeune Border Collie de 13 mois objet d’une étude par une doctorante en Sciences du langage, tentant de prouver que les chiens peuvent communiquer et ainsi exprimer leurs besoins. On est parti à sa rencontre dans un joli quartier dijonnais au bord de l’Ouche.

« Balle », « douche », « vachette », « manger », « content », « maison », « plus tard », « fini », « je t’aime » autant de mots que Coco maîtrise parfaitement... Meiyun, la maîtresse de Coco, nous explique qu’elle lui a d’abord appris les règles de base orale (assis, couché, debout…) afin qu’il s’habitue à sa voix et à sa façon de communiquer. Une fois la confiance et le lien établi, vers ses quatre mois, elle lui a installé le tapis avec des buzzers simples en rapport avec les premiers besoins. Sortir, jouer. « Avant de jouer avec lui, je cliquais sur le bouton JOUER, puis on s’amusait ». De cette manière, il a pu associer la voix de Meiyun enregistrée dans le bouton avec le fait de jouer. Il connaît le mot « jouer » mais par ce principe il comprend qu’il peut cliquer sur le bouton pour déclencher l’action. « En deux jours, il avait compris le fonctionnement du bouton » nous explique t-elle. Ensuite, il a appris le mot « sortir » en appliquant la même

règle. Tous les jours sont une vraie gymnastique du langage. Il faut faire les choses dans l’ordre pour que le système mis en place fonctionne. Coco est spécial, c’est un être vivant objet d’une étude. C’est donc pas le moment de déconner, y’a du taf ! Il a déjà appris une trentaine de mots. « Le dernier mot ajouté sur le tapis qu’il a appris c’est DOUCHE. Mais celui-là, il ne l’utilise pas ! Il ne l’aime pas mais il le comprend très bien. Quand on clique dessus, il se cache ! ». Avec ce principe de tapis-bouton, Meiyun communique avec son chien mais le circuit inverse existe aussi : c’est une interaction. Coco est capable d’exprimer de l’interrogation « Dernièrement il a manifesté de l’impatience. Mon compagnon était au travail en dehors des heures habituelles et Coco est venu cliquer plusieurs fois sur le bouton « Papa » de sa propre initiative. Il a fait ça plusieurs jours de suite ». Il est aussi capable d’exprimer son stress face à certaines situations...

Texte et photos Cédric de Montceau
Manimal.
rencontre 33

« Lorsque nos conversations sont tendues comme parfois ça arrive dans les couples, il clique sur JE T’AIME et vient nous voir ». Il ne lui manquerait plus que la parole.

Coco utilise donc un tapis sonore évolutif, bricolé par Meiyun sur la base d’un modèle en mousse pour bébé « Je n’ai rien inventé », nous prévient-elle. Ce système de boutons cliquables mis à disposition d’un chien est un principe inventé par Christina Hunger. Une orthophoniste californienne qui développait des méthodes à base d’images et de symboles pour aider les enfants perturbés à s’exprimer autrement que par la parole directe. La thérapeute cohabitait avec sa chienne Stella, c’est alors qu’elle a eu l’idée d’essayer un principe dérivé de ses consultations pour échanger avec sa bestiole. Stella a vite pigé : Vas-y paye tes Curly ou un bout de sauc’ l’humain, fais pas ton rat ! Le concept du tapis est assez développé aux États-Unis et manifestement d’autres expériences sur le même principe ont lieu avec des clébards.

Meiyun est arrivé en France il y a sept ans dans le but de parfaire ses connaissances de la langue française. « En Chine, j’ai vécu à la campagne. Mon enfance était très agricole, j’ai grandi avec des poules, des cochons, des lapins, un chat et un chien… Je voulais découvrir le monde et j’ai choisi la France. J’ai déjà étudié cette langue dans mon pays. À la base je suis venue faire mes études et améliorer mon français. C’est ce que j’ai fait puis j’ai découvert les sciences du langage ». L’étudiante pose ses valises en Côte d’Or et à la fin de son Master II elle décide de se pencher

sur les théories linguistiques en lien avec les animaux. Elle veut comprendre comment un langage ou une langue est créée, et souhaite exploiter les capacités langagières des animaux. Son sujet de thèse c’est d’enseigner une langue à un animal « de l’arbitraire à l’iconicité, en gros. À travers mes expériences avec Coco, j’envisage de tester certaines théories linguistiques que j’ai développées en Master. Est-ce que les animaux peuvent mieux apprendre une langue quand on pratique certaines règles linguistiques pendant l’apprentissage ? Moi j’expérimente avec Coco pour le moment ».

L’étudiante nous rappelle que les chiens ont évolué avec nous, les humains. Ils connaissent nos codes avec le temps, ils connaissent nos regards et nos attitudes suivant les situations rencontrées. Ils ont développé des aptitudes propres, ils comprennent ce qu’on appelle : le pointage. « Par exemple, si le jouet de Coco est coincé sous le canapé, il est capable de venir me chercher et de me pointer l’endroit, puis de me regarder moi et de manifester une demande d’assistance voire de cliquer sur le bouton AIDE. Il pointe les choses. Le tout associé avec une expression et un regard ». Cette histoire de pointage se retrouve essentiellement chez les chiens et dernièrement chez quelques babouins. La doctorante nous apprend aussi que les muscles du visage d’un chien sont très proches du nôtre. Ils ont la possibilité d’exprimer des émotions par le visage, la face. Un chien peut sourire, montrer de la colère, de l’incompréhension ou du plaisir par sa seule structure faciale. Les muscles se sont développés par leur utilisation au fil du temps, certainement liés à un mimétisme dû à l’observation de l’Homme.

Pour Meiyun ce n’était pas gagné au départ « J’ai toujours rêvé d’avoir un chien… Mon compagnon n’en voulait pas parce que nous vivions en appartement. J’ai été naturellement persuasive, puisque c’était quand même plus simple d’avoir un chien sur place avec moi que de se déplacer régulièrement

MONTRER DE LA COLÈRE, DE L’INCOMPRÉHENSION

dans des instituts à l’autre bout de la France pour travailler avec des primates. J’avais trouvé le bon argument logistique et économique. Aujourd’hui Coco et mon compagnon sont inséparables ». Faut dire que le jeune canidé est une resta, compte instagram largement suivi (@hello_cocospeaking), déplacement de médias nationaux au pays de la moutarde et bouche à oreille local. « Tu connais le chien dijonnais qui parle ? ». On serait à sa place, on dealerait les demandes d’interviews contre des sacs de croquettes maxi premium.

Lors de notre rencontre avec Coco nous avons pris quelques photos mais il nous a semblé que la balade qui a précédé notre venue l’avait bien calmé puisqu’il a appuyé sur le bouton « fatigué ». Il en avait plein les pattes… Et comme un bon chien savant, il a su se faire comprendre. D’après sa maîtresse, il aurait même récidivé après notre départ. Coco a répondu présent à son devoir médiatique, il a fait l’boulot mais son seul objectif était visiblement de taper une bonne grosse sieste. Le travail c’est pas fait pour les vivants, la preuve ça épuise !

Un jeu Ravensberger.
LORSQUE NOS CONVERSATIONS SONT TENDUES COMME PARFOIS ÇA ARRIVE DANS LES COUPLES, IL CLIQUE SUR JE T’AIME ET VIENT NOUS VOIR. 34
UN CHIEN PEUT SOURIRE,
OU DU PLAISIR PAR SA SEULE STRUCTURE FACIALE. 35 Tintin et Milou.

DRAG ADDICT

Vous êtes masculiniste et anti-wokiste ? Bienvenue dans votre plus beau cauchemar. Les drags de BFC sont là pour questionner les constructions du genre, la bienséance et le politiquement correct à coups de blush, de perruques et de performances endiablées. Les collectifs drags de la région se comptent actuellement sur les doigts de la main, mais on en a rencontré deux, et comment vous dire que ça déménage.

Texte et photos Paul Dufour Ligne d’arrivée.
reportage

QUÉSACO ?

Bah oui, parce que le drag, qu’est-ce que c’est ? Pour le savoir, on a causé autour d’une petite bière avec Pursy de Médicis et avec des membres de la « House of Detritus ». Pursy est l’une des fondatrices de Gang Reine, association de drag de Dijon d’une vingtaine de membres, et la House of Detritus est un groupe de 6 créatures de Besançon. Je suis accueilli par Pursy, la vingtaine, charismatique et solennelle, dans un appartement teinté d’une âme artistique : ambiance vinyle, bouquins et formica. Chez les détritus, on ne peut pas se tromper : à nos discussions se mêlent des effluves de bières et de cigarettes. Ces collectifs, nés il y a moins de 5 ans, ont été fondés par des élèves des Beaux-Arts aux volontés de représentation : « on sentait un manque de représentation dans nos identités queers et nos pratiques artistiques au sein de l’école et à Dijon. », nous dit Pursy. Mais avant tout, il faut savoir que le monde du drag a son propre vocabulaire, donc petite séance pédagogique avant tout. (on promet, c’est mieux que vos cours d’EMC).

QUEEN, KING, QUEER, MONSTRE, HOUSE...

Le drag est une activité performative qui consiste à se transformer pour incarner des codes de genre ou des concepts selon le type de drag que vous pratiquez : comme nous l’explique Pursy « Le queen (drag queen) c’est l’incarnation de codes esthétiques et de représentation du féminin, et l’exacerbation de ces codes-là, le King c’est l’équivalent pour les mecs, et ce indépendamment de ce que tu es au départ. Peu importe d’où tu viens la seule chose qui importe dans le drag c’est où tu vas, donc des meufs cis (dont le genre est identique que celui attribué à leur naissance) font du drag queen, et inversement pour le king ». Les drag queers ou drag monstres incarnent plus des idées, ou des concepts, comme Pees, de la House of Détritus, dont l’inspiration vient de l’idée du chaos. Une house, c’est un collectif queer, dont les personnages drags ont des liens de « parenté » : on a les « mothers », qui donne naissance aux « babies ». Pour Pees, « la house c’est aussi la famille choisie, la house of detritus c’est ma famille, c’est ce truc à la fois émotionnel et professionnel ». Chez les détritus, le dénominateur commun, c’est la pauvreté : « dans nos drags, y’a ce truc de crado, de pauvre. On fait du drag avec peu de moyens. Et j’embrasse ça, pour moi c’est un vrai parti pris politique. Mon drag c’est plus un truc où j’explore ma pauvreté que mon genre. C’est aussi une façon de reprendre un peu le discours de gens qui font des queers « les déchets de la société », « ces gens-là ».

UN SPORT OLYMPIQUE

Le show drag est une activité très complète, et c’est notamment ce qui a attiré Pees : « je me suis dit que ça rassemblait tout ce que j’aimais : la scène, le maquillage, le costume, le théâtre, incarner un

personnage, créer des performances ». En show, on retrouve très souvent des « lip-sync », des playbacks où les drags miment le fait de chanter une chanson. La musique est très importante dans le drag, comme le dit Pees « L’aspect de lip-sync du drag, pour moi c’était l’évidence. Le drag c’est un des seuls endroits où je vois une vraie célébration de la pop dans l’art. J’ai l’impression que dans l’art contemporain, la musique populaire n’est utilisée que pour des performances parodiques, qu’elle n’est pas prise au sérieux. Dans le drag, tu fais ce que tu veux ». De la vidéo, de la performance, du chant live, le show drag se décline selon l’artiste qui performe.

LE DRAG AU-DELÀ DE LA PERRUQUE

La scène drag connaît en ce moment une visibilité grandissante. C’est notamment dès les années 70, dans les ballrooms, lieux emblématiques aux Etats Unis où se réunissaient les personnes queers et racisées, que le drag prend une grande ampleur. Les ballrooms se sont développés à l’Est des Etats-Unis et se sont vite exportés, on en trouve d’ailleurs en France. Comme leur nom l’indique, étaient organisés dans les ballrooms des « bals », où des houses s’affrontaient dans des défilés sur des catégories variées. Le personnage de Clem, Gothel Stratholm, membre de la House of Detritus, est très attaché à cet univers. Elle me dit : « l’époque ballroom a mis en lumière des femmes trans-racisées qui pouvaient enfin être comme elles voulaient être, comme Crystal LaBeija. » Le drag du ballroom est une performance hautement politique qui permet de questionner les codes assignés aux genre féminins et masculins en les exagérant, comme le dit Pursy : « Le truc c’est que quand on fait du drag, on prend le pouvoir sur les codes qu’on incarne et qu’on représente. Dans la vie civile on incarne quelque chose mais on ne décide pas, ce sont de codes liés à un environnement, à un genre lié à la naissance, de lieu où on vit. Faire du drag c’est prendre le pouvoir sur ces codes pour en incarner d’autres ». L’une des idées du drag est de remettre en cause le genre

comme une construction sociale. Mais attention, comme nous le clame Pursy, le drag n’est pas une activité qui vise à imiter la femme : « Une drag queen n’incarne pas une meuf. Si les drags incarnaient des meufs, on aurait des problèmes. On incarne une idée stéréotypée de la meuf. On ne peut pas représenter la femme, c’est un spectre infini, chaque femme incarne la femme à sa façon. Par contre la représentation de la femme tout le monde la connaît. Elle est basée sur des stéréotypes d’oppression, d’injonctions physiques ou comportementales. Il ne faut pas oublier que la vision caricaturale que l’on revendique a un but critique et n’est pas représentative de la réalité ».

Le drag, c’est aussi pouvoir incarner des personnages pour bousculer les hiérarchies sociales. Dans les ballrooms s’était instaurée la tradition des « catégories », moments pendant lesquels des « houses » s’affrontaient sur des défilés qui correspondent à un thème. C’était l’occasion, pour une nuit, d’incarner un PDG d’une grande entreprise, et pour les drags racisé.e.s, d’incarner des fonctions qui leur étaient interdites : « ce qui m’intéressait c’étaient les militaires. A l’époque les personnes racisées et queer ne pouvaient pas rentrer dans l’armée, et la catégorie militaire leur permettait d’accéder à un rôle qui leur était interdit, le drag leur permettait de l’imiter. Je trouve ça plutôt incroyable l’idée des défilés militaires dans des caves queers », nous explique Pees.

LA DÉMOCRATISATION DU DRAG, À DOUBLE TRANCHANT

La scène drag queen est la plus répandue, elle a notamment été mise en lumière par l’émission américaine « Rupaul’s drag race », une téléréalité où une dizaine de drag queens se disputent une couronne. Son manitou, Rupaul, est peut-être la drag queen la plus connue du monde. Elle a sorti des singles comme « Supermodel of the world » en 1993, et a permis l’expansion de la culture drag à grande échelle des années 90 jusqu’à aujourd’hui. Son show est devenu

S’il te plaît, dessine-moi un sourcil.
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internationalement connu, il compte aujourd’hui 14 saisons, sans compter les spin-off, dont un français, sorti en juillet dernier sur France 2. C’est vrai qu’on ne peut pas passer à côté quand on parle de drag. Néanmoins, le progrès apporté par l’émission, tel que la mise en visibilité des drag queens, a son revers de médaille. Le drag king et le drag monstre souffre d’un manque de représentation « Avant je me demandais pourquoi seulement les queens sortaient et étaient bookées. », nous dit Pees. Ce show, pour Pursy, c’est un peu une relation de « je t’aime moi non plus » : « je trouve qu’il a donné une grande visibilité au drag mais qu’il a aussi entraîné une uniformisation de ce qu’est le drag, toujours très glamour ou « showgirl ». Dans Gang Reine, on avait la volonté de ne pas s’uniformiser. » Que ce soit dans la House of Detritus ou chez Gang Reine, on retrouve des styles de drag très différents. Pour Pees, la scène bisontine, peu développée, a été une vraie aubaine pour le drag monstre : « le drag de l’Est est nouveau, et donc on définit les codes. On a cette chance d’être un drag très jeune, et on définit ce que l’on veut en faire, les spectateurs et spectatrices n’ont pas des idées préconçues. A Paris, je pense que certain.es drags passent moins et sont moins diffusé.e.s » .

DU DRAG PARTOUT, POUR TOUS ET POUR TOUTES.

Et puis finalement, comme nous dit Pursy, tout le monde fait déjà du drag. En incarnant vos propres codes en société, vous aussi vous êtes en drag : « les drags adorent le personnage de la petite bourgeoise. C’est pour la moquer, en faire une satire, mais le fait est que quand tu croises ces personnes dans la rue, tu te dis qu’en fait, elles font du drag. ». Pour démarrer le drag, les opportunités en BFC ne manquent pas. Eli a commencé le drag pour explorer le genre, et a pour ça développé deux personnages extrêmement différents. L’une est une instagrameuse superficielle, Albertine Von Dildo et l’autre un gros beauf masculiniste, Kiwees. La scène de Besançon fut une opportunité sans pareille pour expérimenter : « Avec les houses très différentes, y’en a pour tout le monde. Pour toute personne qui veut se mettre au drag, y’a vraiment deux houses à Besac, une glam et l’autre alternative ». Ce qui reste à développer, ce sont les espaces d’expression : « Créer ce groupe a fondé des lieux safes pour exister sans se poser de questions, nous explique Pursy à propos de Gang Reine. A Dijon, il n’y avait plus de lieux pour rassembler les communautés queers. Cet endroit, on l’a créé, aux Tanneries, espace autogéré hyper représentatif du phénomène de communauté. C’est un lieu qui est créé par les personnes qui se l’approprient pour les gens qui se l’approprient ».

Le drag c’est un lieu de liberté, de communauté, et d’ampoules au pieds aussi (car oui certains talons n’ont pas l’air méga agréables, avouons-le-nous). Le drag est un milieu en pleine expansion, et les drags sont de plus en plus booké.e.s, « J’ai l’impression que ça prend, y’a des évènements qui arrivent » nous fait deviner Pees. Des nouveaux collectifs se forment, et ce n’est que le début. On vous invite à aller voir ou booker des drags, car titiller le patriarcat et l’homophobie à coups de musiques pop et de performances super créatives, c’est quand même un meilleur programme que la Manif pour Tous non ?

Bonnet obligatoire à la piscine.
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LA MORT VOUS

MORT VOUS

MORT VOUS

SI

SI BIEN

Dans la vie, Elodie Cretin s’intéresse plutôt à la fin.

Si elle a décidé de faire de la mort son sujet de recherche, elle consacre également une partie de son temps à tatouer les vivants. On a rencontré cette chercheuse bisontine en sciences humaines et sociales, directrice de la plateforme pour la recherche sur la fin de vie à l’UBFC... Et tatoueuse.

Par Delphine Fresard Photos Jean-Charles Sexe
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BIEN interview LA
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Tu es directrice de la plateforme nationale pour la recherche sur la fin de vie à l’Université Bourgogne Franche-Comté, tu nous expliques les missions de cette structure ?

La Plateforme nationale pour la recherche sur la fin de vie a été créée en 2018 pour fédérer et structurer la recherche dans le domaine de la fin de vie et des soins palliatifs. C’est disons une « photographie » de qui fait quoi en France dans ce domaine. Ça peut aller des essais cliniques sur certains types de molécules pour la prise en charge des patients jusqu’à des travaux d’anthropologues qui vont travailler sur des rites funéraires. Dernièrement, on a même une archi qui s’est inscrite sur notre annuaire national des chercheurs : elle travaille sur l’architecture funéraire. Tout cela est très pluridisciplinaire. Le but est de mettre en dialogue des domaines qui n’ont pas forcément l’habitude de se côtoyer. Cette plateforme est co-présidée par Régis Aubry, professeur en médecine palliative et Marie Gaille, philosophe. Nous avons également une mission de valorisation du travail des chercheurs pour faire connaître ces travaux sur la fin de vie car c’est un domaine assez particulier... Dans le sens où les gens n’ont pas forcément envie d’en entendre parler.

Justement, pourquoi cette réalité universellement partagée, qu’est la mort, estelle encore si taboue ?

Le fait est que la mort, moins on y pense, moins on la voit, mieux on se porte. Généralement, quand on y est confronté, c’est à contrecœur. C’est quelque chose de subit à laquelle on n’est pas forcément préparé car on est dans une société qui ne met pas la mort comme une étape de la vie. Les rites funéraires existent encore mais sont moins présents car nous avons un rapport à la religion moins fort que par le passé. C’était le rôle de la religion de normer et structurer notre rapport à la mort. Une pathologie qui est beaucoup travaillée autour de la fin de vie dans la recherche, c’est le cancer : ce qui nous intéresse, ce sont les traitements, c’est combattre, c’est faire vivre les gens... Par contre ça ne nous intéresse pas le moment où on va en mourir. Le sujet de la mort rend mal à l’aise et on ne sait toujours pas quoi faire de cet état de fait qu’on meurt tous. Puis, il y a aussi l’imaginaire que la science va nous sauver. On a perdu de vue la simplicité de la chose, que ça va arriver, quoi qu’on fasse. Tout ce qu’on a comme avancée scientifique ne va rien changer à cela et ça nous ramène à une certaine forme d’impuissance et de vulnérabilité et ce n’est pas quelque chose dans nos sociétés qui est valorisée. Notre société occidentale est basée sur le mythe de l’immortalité.

Il y a aussi un refus de la vieillesse...

Tout à fait, quand on est âgé il faut être un « senior actif », « senior qui fait du sport », « senior qui s’occupe bien de ses petits-enfants »... Il faut avoir l’énergie d’une personne jeune.

La crise du Covid a remis la mort sur le « devant de la scène », notamment dans les EHPAD. Est-ce que le personnel soignant est assez préparé pour accompagner la fin de vie ?

On l’a bien vu avec le Covid, et on va le voir de plus en plus avec la crise de l’hôpital et la dégradation des moyens, mais les soignants ne peuvent pas prendre en charge les patients comme ils aimeraient le faire. Notamment sur l’accompagnement de la fin de vie. Le ministère a missionné notre Plateforme pour coordonner une étude nationale sur la fin de vie et les décès liés au Covid en EHPAD.

L’objectif était de réaliser cette étude le plus rapidement possible pour avoir les données à chaud pendant la première vague. L’idée étant de « faire trace » en recueillant des témoignages pour essayer de comprendre ce qu’il s’est passé. Comment le personnel soignant dans les EHPAD a fait face à cette crise, comment ils ont accompagné les gens en fin de vie et notamment l’impact que ça a eu sur le personnel. Pendant la crise, on n’entendait que les chiffres des décès, nous ce qu’on a fait, c’est une étude qualitative pour comprendre les émotions mais aussi se faire le porte-voix des personnes dont le discours n’est pas écouté, comme les aides-soignantes ou les infirmières.

On en est où en France, concernant le débat sur la fin de vie ?

Il y a différents mouvements qui se percutent. Quand on regarde, la société est prête à une évolution de la loi : soit l’euthanasie soit le suicide assisté mais, en tout cas, sur la possibilité de choisir la façon dont on va décéder. Et en même temps, beaucoup de mouvements de personnes y sont farouchement opposées, comme pour l’avortement ou le mariage pour tous. Seulement, en réalité et en adoptant une posture assez caricaturale, les « proeuthanasie » ou « pro-soins palliatifs » ne s’opposent pas du tout ! Si la loi évolue en faveur du suicide assisté par exemple, ça ne veut pas dire qu’il n’y aura plus de soins palliatifs de qualité. En tout cas, comme pour le climat, le gouvernement a prévu d’organiser une convention citoyenne sur la fin de vie. Et, comme pour le climat, voyons si cela va servir à quelque chose...

De parler de la mort toute la journée, est-ce que tu en as

C’est intéressant l’impact de notre objet de recherche dans nos vies personnelles... Comment on peut être contaminé en quelque sorte par celui-ci. Bien sûr, il y un impact : ça passe par la prise de conscience que tout peut s’arrêter du jour au lendemain et de notre vulnérabilité. Profiter de la chance qu’on a d’être en bonne santé. C’est peut-être un peu cucul, mais disons que ça recadre les priorités. Je suis aussi passée par des moments de saturation totale, je ne voulais plus aller voir les films ou écouter des émissions de radio qui parlaient de ça, toujours avoir en tête l’idée qu’on va mourir, des fois on sature. Mais finalement, peut-être que si je travaille là-dessus, c’est qu’à la base je n’en ai pas peur. En fait, je crois que c’est plutôt certaines conditions de la vieillesse qui me font flipper.

Et comment on fait pour rester cool quand on parle de la fin de vie toute la journée ?

On décompresse ! Comme les soignants qui font de l’humour noir par exemple. De toute façon, on va mourir, autant faire le maximum pour être bien quand on est en vie !

Tu as une activité extra-professionnelle pas forcément banale pour une chercheuse, tu es tatoueuse...

Ce n’est pas banal, oui. Je tatoue depuis trois ans et demi, sous le nom de «Mushi Tattoo». J’ai un salon à Marchaux avec deux autres tatoueuses. C’était d’abord en contraste avec le travail de chercheur. J’ai fait des études de philo et j’avais une vision intellectualisée du monde. J’avais besoin d’avoir quelque chose de très concret, un rapport au corps. Et puis aussi le besoin d’avoir une relation temporelle à mon travail qui est différent. Quand on fait de la recherche ça peut prendre des années, c’est un processus qui est long, tandis que là, il y a la satisfaction immédiate d’une chose qui est faite, ancrée dans le corps des gens. Et puis, finalement, j’y ai trouvé pas mal de points communs avec mon travail de chercheur. Pendant un tatouage, les gens se livrent beaucoup, comme quand je faisais mes entretiens dans le cadre de la recherche. Et puis, des gens se font tatouer pour marquer des ruptures biographiques importantes pour eux, dont notamment l’étape du deuil. Enfin, il y a aussi un travail de recherche dans mon activité de tatoueuse car je propose des tatouages inspirés de spectrogrammes de sons d’animaux. Je consulte en amont des publications scientifiques et travaille avec des chercheurs en bioacoustique, c’est passionnant !

« LE SUJET DE LA MORT REND MAL À L’AISE ET ON NE SAIT TOUJOURS PAS QUOI FAIRE DE CET ÉTAT DE FAIT QU’ON MEURT TOUS. »
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BOULEVARD DES HITS

Joie de vivre.

DANS LA DISCOTHÈQUE DE OSSAYOL

La musique d’Ossayol pourrait être la bande-son d’un film en noir et blanc, un classique triste et beau à la fois, qui nous fait chialer à la fin. Après nous avoir ému avec des compositions folks, la formation chalonnaise remet une pièce dans la machine avec des titres plus électriques, compilés dans un deuxième album ; Violent Expression of Desire, sorti cette année. Un disque enregistré quasi live pour garder un côté organique, atmosphérique et cinématographique propre à leur univers. On a parlé des influences musicales avec Mickael Pillisio, tête pensante du groupe, où le ciné n’est jamais vraiment loin.

SMASHING PUMPKINS PISCES ISCARIOT (1994)

C’est un album que j’ai choppé chez un disquaire dans le sud grâce à mon cousin qui m’a initié à la guitare. C’est lui qui m’a fait abandonner les power chords (gros accords de puissance de rock ndlr) pour aller vers des accords plus ouverts et rechercher des choses plus planantes. En termes de mélancolies et de rêves, il y a des trucs assez fous chez Smashing Pumpkins en particulier dans le titre Starla où il joue avec une certaine virtuosité sur un titre de 11 minutes. Billy Corgan (le guitariste chanteur) c’est un peu le Mozart du rock alternatif !

La chanson préférée du disque  ? Starla

ELLIOTT SMITH EITHER / OR (1997)

C’est le plus pop de la sélection mais c’est aussi celui qui s’est mis deux coups de couteau dans la poitrine (selon les dires de la police) ! J’ai découvert ça au collège et ça a un côté madeleine de Proust. J’aime le côté spontané et l’urgence dans le travail d’Elliott Smith. Il a un besoin viscéral d’écrire, c’est de la musique de besoin pas un truc pour se montrer. Sa musique a été utilisée massivement au cinéma (La Famille Tenenbaum, Will Hunting, The Girl Next Door…) et à chaque fois ça crée un moment plus léger, suspendu.

La chanson préférée du disque  ? Angeles

Cave à

SLINT SPIDERLAND (1991)

J’adore le mélange entre les arpèges à l’acoustique et les guitares électriques, ça crée un son très organique et sur le fil en permanence avec leur musique.

La guitare c’est mon instrument principal, je suis donc attaché aux sonorités des guitares mais l’émotion joue aussi une grande part pour moi dans l’appréciation des titres. Je recherche souvent l’approche cinématographique, c’est d’ailleurs de là que je tire principalement mes influences. Par exemple, Slint pour moi c’est un film avec du grain ; on sent la pellicule. Ça aurait pu être la B.O d’Elephant Man ou de n’importe quel film de Lynch d’ailleurs !

La chanson préférée du disque  ? Washer

SHANNON WRIGHT OVER THE SUN (2004)

Elle réunit tout ce que j’aime artistiquement. Elle arrive à laisser l’aspect pop de côté, pour un truc complétement brut. Chez elle, il y a une maturité sans aucune concession, elle n’a pas besoin de petites mélodies sympas pour exprimer son propos. J’ai pour ma part du mal à laisser complètement l’aspect pop, accessible et « facile » de côté. J’ai encore ce défaut-là sur ce deuxième album, si on peut appeler ça un défaut, d’avoir un côté sympa avec l’auditeur. Elle me fait penser à des acteurs comme Daniel Day-Lewis ou Joachim Phoenix au ciné ; des artistes discrets qui sont capables d’exploser sur scène.

La chanson préférée du disque  ? You’ll be the Death

(Dijon/Chalon) 21/22 septembre 2022

(Mâcon) 24 novembre 2022

Par Frank Le Tank Artwork  DR
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Violent Expression of Desire est sorti sur le label Osto Records ostorecords.com Dates programmées : - Novosonic
- La
Musique
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On Photos  : Julien Lasota
a vadrouillé à Chalon Dans la Rue.
DIAPORAMA 8°6 à l’ombre.
Balance ton quoi ? Demi-Lune. Freddy Mercurey

destin d’entrepreneur

Ambroise Deboussac

« Du fric, de l’eau de source, du fun », quand l’idée géniale d’un entrepreneur engagé sert l’intérêt général et patrimonial.

Des mégafeux dans les Landes, un incendie ravageur dans le Luberon, une partie de la forêt vosgienne décimée à cause du stress hydrique. L’Inde s’ébouillante, une pénurie de moutarde met la pression sur les Dijonnais, le manque de houmous commence à se faire sentir, la coriandre disparaît. Quel été me direz-vous… Il y’a de quoi céder au marasme .

La période que l’on vit nous rend tendus, irascibles, surtout lorsque les hordes de khmers verts gauchistes nous somment d’uriner sous la douche, de manger des légumes et surtout de ne pas produire de déchets. Fort heureusement, dans ce tumulte brouillardeux d’invectives écologistes et de culpabilisations individuelles, des hommes, dont le courage n’a certainement d’égal que leur dévouement, vont de l’avant en proposant de véritables projets d’intérêt général. Face aux sacro-saints petits pas, certains n’hésitent pas à opter pour le grand saut.

C’est le cas d’Ambroise Deboussac, ancien courtier en assurance et fils du DG d’EIFFAGE Dijon. Cet enfant de l’Yonne s’est attristé de la disparition progressive de nombreuses sources de son pays natal et d’ailleurs l’an dernier. La Moselle dans les Vosges ne coule plus, le Doubs non plus, les Ardéchois font également grise mine. Les cours d’eau ne sont pas à sec, mais ces rivières fonctionnent désormais grâce à leurs affluents. La terre se meurt et les larmes de Greta Thunberg paraissent bien vaines pour abreuver l’humanité. Une situation inacceptable pour Ambroise, la disparition de la nature l’émeut. Il se revoit pleurer à chaudes larmes lors de son voyage à l’île Maurice lorsqu’il apprit la disparition des Dodos.

Véritable décideur d’intérêt commun, Ambroise s’est donné pour mission de préserver ces sources avant leurs disparitions en les vendant au verre. « C’est une sorte de voyage dans le temps, un voyage culinaire dans le passé. » C’est ainsi que naquit « Suz’eau, retour aux sources » un bar à eau de dégustation où il est possible de prendre un verre de Doubs, de Moselle, ou encore de Neuvon bien frais alors que la sécheresse les a fait disparaître. « C’est presque un musée culinaire » s’exclame-t-il en nous servant une petite Oulambator, une eau gazeuse de Mongolie en pression.

Ambroise s’est déjà installée dans la plupart des villes de BFC. «De l’eau ! Investissement : zéro, à part la mise en bouteille. Bénéfices : énormes. Je suis un génie du business. Je mérite de gagner beaucoup d’argent » avoue Ambroise dans un des élans de lucidité que le monde de l’entreprise lui connaît.

Dans une ambiance feutrée, des serveurs en free-lance viennent vous servir tout en vous comptant l’histoire de ces eaux. Ancien guide conférencier nature sur la Bourgogne-FrancheComté, Mathieu, nous explique la souplesse avec laquelle il a pu travailler dans la structure Deboussac : « M. Deboussac a su profiter et exploiter le boom de la tech ! C’est assez visionnaire.

Il a créé une application super intuitive, « X’tra », qui propose un planning de service sur le mois. Chaque « Suz’eur » (nom des entrepreneurs indépendants travaillant dans le service en salle) s’inscrit, et un algorithme répartit les shifts. Tout le monde peut s’inscrire, il suffit juste de créer son auto-entreprise. C’est souple, facile et flexible » .

Mathieu a donc pu se reconvertir et mettre à profit ses compétences en histoire afin de distiller l’historique des sources mises en vente au « Suz’eau ». Véritable success-story, la petite entreprise d’Ambroise démarre sur les chapeaux de roues, « Je vais ouvrir d’autres établissements, en Alsace où la clientèle est plus aisée et les marges plus faciles à gonfler. »

Véritable projet d’intérêt général, le Suz’eau, à l’instar du zoo, deviendra le dernier endroit où il sera possible de contempler des choses disparues. Mais là, il sera même possible de les goûter ! La motivation d’Ambroise Deboussac est sans faille. Peut-être ouvrira-t-il un jour un bar à shot d’air pur ! Qui sait… Rendez-vous sans complexe dans l’une de 8 boutiques Suz’eau.

Gacon
54 100x130 SPARSE_laCoursive.indd 1 29/08/2022 17:16:38 jeu. 1er DéC. 20H tHéâtre grain De sel clown / Tarifs de 6 € à 11 € par le boudu Bonaventure
jeu. 20 OCt 20H auDitOrium jazz punk / Tarifs de 6 € à 11 € my mother is a fish Sarah Murcia BilleTTerie weB renseignements 03 85 42 42 65 conservatoire du Grand chalon 1, rue olivier Messiaen 71100 cHalon s/Saône conservatoire.legrandchalon.fr

La loi, l’ordre et l’apéro

Les

l’inspecteur

l’affaire Grégory

au tout venant de leur carrièr

les planques. Flic, c’est savoir attendre, parfois au bistrot et parfois devant...

Beau score. Merci. Mais j’adorerais être dedans. Que non. On peut pas lui donner tort. Que oui. J’ai connu un Moldave qui en avait sorti 85, en une fois.
Vosges, la terrible année 1984. Le Commissaire Vinston et
El Tanko font une petite pause sur
pour revenir
:
Mais pourquoi on est en planque devant ce bistrot ? Aucune idée. J’ai pas écouté. Je comptais mes crottes de nez. Et alors ? La cheffe ne voulait pas qu’on soit en planque à l’intérieur du bistrot, elle pensait qu’on allait consommer. Y’en avait 31 Mais pourquoi on planque pas dans le bistrot ? Café des sports j’écoute. De qui ? El señor escobar no está aquí, por favor llame más tarde. Oh, encore les Colombiens. Je croyais que tu leur avais dit de ne plus appeler aux heures des repas, on a du monde. 56 CRRR CCRRRRRCRRR CCRRRRR Non... Allemand ? En 2... Agression. Jean-Luc Lahaye ? Schumacher ! Allo, oui madame la divisionnaire. Oui, oui ? Mais qu’est ce qu’elle dit ? Elle nous dérange pendant notre planque là... Hein ? Ça se pourrait. Ah, ouais c’est super important pour mes clients. Vous m’entendez !? Oh, vous m’entendez ? Le suspect entre dans le bar. Mais dites quelque chose bordel ! Vous l’avez pas vu rentrer ? Oh aquí, hace calor y bochornoso, es verano. Y usted ?... Excusez-moi, je cherche un vieil ami... Oui, il ressemble à quoi ? …Oh, des bras, des jambes. Esta illovendo hallebardes ? Que pena. Oui ! Bien joué. C’était facile. Quel enfoiré celui-là... Qu’est-ce que c’est que ce bruit ? Ça crisse, ça me dérange. Oh, c’est la radio. On nous parle... Si ton ami est du genre à vendre de la drogue, il est là... Ah merci, enchanté. C’est toi le Cagneux ? Vous m’entendez ? Les gars échangent... CRR Ccrrrr J’ai une sélection de produits labellisés commerce équitable, c’est-à-dire que chaque intermédiaire touche sa com’. Le flag parfait ! Au fond du bar. Vamos a la playa. 57

Ça pousse dans la vallée de la Vologne, à côté de Lepanges.

Le circuit court c’est un truc super courageux pour un jeune entrepreneur.

Si señor, con un deco en la caja de chocolate. Juro.

Si chacun fait un peu c’est la vie qui gagne.

Chiale pas tu vas me mettre mal à l’aise.

Je te cache pas que c’est empaqueté par des gens en insertion.

Vous êtes déclarés d’intérêt public, pour savoir si je peux dégrever des impôts ?

Oh non de dieu ! Ils sortent et on les coffre !

Mais si, c’est le deal le plus humain que j’ai fait en 20 ans de carrière !

On est des militants, des activistes...

Il en reste plus beaucoup.

Allez, je te raccompagne.

C’est sympa parce que je suis venu en stop depuis la ferme. Allez, salut la compagnie, la bise à Pablo !

Police française !

Messieurs, vous êtes faits. On ne sait pas exactement ce qu’on vous reproche, mais on va vite le trouver ! Videz vos poches !

Diantre !

Intervention ! Les deux qui sortent, vous me les interpellez !

Bon, ça m’arrange que ce soit pas vous pour le petit Grégory, je vous l’avoue, ça m’aurait fait de la paperasse.

Mais qu’est-ce que c’est que ce truc dans vos poches ?

C’est de la farine.

C’est pas nous le petit Grégory !

C’est pour ma mère, elle fait des gâteaux.

Oui, on est meilleurs amis d’enfance.

mère connaissait le petit Grégory ?

La cuisine c’est

Non.

Messieurs, on ne voudrait pas abuser de votre si précieux temps...

Votre
Tant mieux. Fais-moi voir ça. C’est pour un soufflé ou une tarte ? Parce que c’est pas la même chose... 58
50% de bons ingrédients les mecs. Et vous roulez à fond hein ! Ils sont pas nés les gars qui nous feront porter la ceinture de sécurité. Bien sûr, on a une éthique. Merci messieurs. Mais qu’est ce qu’elle leur voulait la Cheffe ? Aucune idée. Mais ces gars sont clean. Alors c’est quoi ce bordel !? Ils sont où les dealers !? Des mauvais pâtissiers, tout au plus. Moi-même j’ai très peu d’amis dealers. Faut pas voir des dealers partout. Des dealers, finalement, ça court pas les rues. · une production Sparse Media · La loi, l’ordre et l’apéro Photos Elodie Perret Montage Maïa Mignotte Scénario, dialogues Chablis Winston Frank le Tank est habillé par sa mère Merci à Tonton pour la BM et Jean-Mi pour l’accueil au café du dépôt Merci à ce bon vieux Dave TV Mais elle est dégueulasse cette farine ! Bien trop acide ! Faut prendre de la t-45 si tu veux que ça lève. Tu vas au devant de grandes déconvenues gustatives ! Allez, reprenez votre merde. Au revoir ! Embrassez monsieur Mitterrand ! Y’a pas à dire, la France c’est vraiment bien. Y’a pas de dealer. C’est pas vrai... C’était du tout cuit... Ça se dit dealer mais c’est pour crâner en fait. Suivez bien le prochain épisode de cette histoire trépidante, parce que je vais les défoncer. 59

CASQUETTE À L’ENVERS

Même après son âge d’or, la casquette à l’envers sonne aujourd’hui plus que jamais comme un doigt d’honneur au réchauffement climatique. Un sourire au coin des lèvres, Déméter et Perséphone témoignent : «Nous sommes spécialisées dans les changements de saison, [...] alors forcément, le réchauffement climatique, on le suit de près. C’est devenu complètement anxiogène et cet été n’a rien arrangé. Pour nous, porter notre casquette à l’envers, c’est comme dire au monde et au futur : « Tu ne nous fais pas peur ». On décide de s’exposer au soleil et aux risques d’insolation de manière effrontée mais toujours avec style.»

Aujourd’hui, la casquette se porte à contre-sens, les cheveux longs et faussement sales pour rappeler nos années adolescentes.

Le retour du mythique boys band Sexion d’Assaut en est la preuve.

Ratcoste, nouvelle marque Balinaise en vogue, nous offre ses meilleurs conseils pour briller à la rentrée : «Toutes nos casquettes et nos polos floqués de notre légendaire Rat vous habilleront parfaitement pour vous rendre à vos teufs souterraines. Plus qu’acheter un vêtement, vous vous engagez pour un monde plus durable, éthique et équitable : nous ne travaillons qu’avec des enfants accompagnés de leurs parents dans nos usines. Parce que porter Ratcoste, c’est porter les couleurs de la street au-dela du style.»

Merci à Ratcoste, notre sponsor, d’avoir offert des casquettes à toute la rédac. Retrouvez tous leurs modèles éthiques sur rat-vissant.fr

Photos Mathilde Leconte Modèles Margot Whitehead, Floran Maréchal, Fanny Boureux, Louise Boureux.
En daim, en velours côtelé ou en poils de rat, n’hésitez plus : la casquette à l’envers est la chemise hawaïenne de cette rentrée !
Ratcoste. Maître Gims et Black M.
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le dessous des cartes

Les sites Seveso, c’est les sites à risques, les sites avec des matières dangereuses qui peuvent péter ou répandre de la merde dans la nature. Des sites très surveillés. En BFC, il y a 40 sites Seveso seuil bas (genre ça peut péter mais ça ne tuera pas trop de monde) et 29 sites Seveso seuil haut (là si ça pète ça va tuer plein de gens). Petit inventaire non exhaustif des lieux les plus dangereux de la région. Avec souvent plein de monde qui vit juste à côté... Bonne balade en BFC !

LA SOPREMA

St Julien-du-Sault, Yonne.

Le nom fleur bon l’atome des années 80. En fait, c’est des

TITANOBEL, LA POUDRIÈRE DE Pontailler-sur-Saône, Côte d’Or. Fabricant d’explosifs, tout simplement. Lui ne se fourvoie pas sur ses intentions. Il est là pour tout faire péter, très honnêtement.

SUEZ RR IWS MINERAL FRANCE

Vaivre-et-Montoille, Haute-Saône.

Ces gars stockent tout. Tout ce qui est dangereux ils te le gardent. Tout. Gaz liquide, déchets industriels, opinel n°8... Tout. «Tu peux me garder ça pendant que je vais danser ?» Ouais pas de problème» «Cimer».

DÉPÔT BUTAGAZ

Deluz, Doubs. Belle collec’ de gaz sous toutes ses formes. Enterré ou pas... Ça chiffre en centaines de tonnes quand même...

LES SILOS DE DIJON CÉRÉALES

Longvic, Côte d’Or. Oui, des céréales ça peut faire tout péter. Ça fermente. Tu ne regarderas plus tes Chocapic pareil...

SOCIÉTÉ FRANÇAISE DU PIPELINE

DU JURA

Gennes, Doubs.

Le nom est incroyable pour ce site de stockage de pétrole à côté de Besac.

J’ai l’impression d’être en Alaska, avec Steven Seagal, dans Terrain miné. Bon film.

USINE SOLVAY Tavaux, Jura.

L’usine chimique du Jura fait le grand Combo : fabrication, emploi et stockage de gaz et de liquides toxiques et très toxiques, stockage de gaz inflammables liquéfiés, fabrication et stockages de liquides inflammables… La bise à tous les Dolois.

Par Chablis Winston illustation Ornella Salvi BFC DANGEREUSE
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chiens écrasés en BFC Par Frank Le Tank et Chablis Winston Une start-up récompensée pour un spray contre l’obésité. Le Bien Public Sale temps pour les gros. BLESSÉ AU THORAX PAR UN COUP DE COUTEAU À AUTUN, IL REJOINT UNE BRASSERIE POUR DEMANDER DE L’AIDE… ET UNE BIÈRE. Question de priorités. LES GENDARMES INTERVIENNENT APRÈS PLUSIEURS BAGARRES À LA FÊTE DES ESCARGOTS. L’Est Républicain Les coups pleuvaient à une vitesse… Pas folle. À Dijon, un père donne carte blanche à ses enfants dans un magasin, ils repartent avec 600 euros de livres. France 3 Pas une console... Petits cons. La maison du rideau à Nevers a tiré le rideau. Le Journal Du Centre Que Sera, sera. MARCHE CLIMATIQUE : PLUS DE 300 MARCHEURS ENTRE CHAUX ET FRAIS. Le fan club de Laurent Ruquier ? FOU DE RAGE, IL DÉTRUIT SA VOITURE DEVANT LES POLICIERS. L’Est Républicain Le niveau Bonus dans Street Fighter 2 grandeur nature. LES FORCES DE L’ORDRE EN PRÉVENTION AU RASSEMBLEMENT DE TUNING. Le Journal de Saône-et-Loire Est-ce que l’on ferait pas claquer les basses mon adjudant ? DIJON : IL SE ROULAIT UN JOINT DANS LE TRAMWAY. Je ne vois vraiment pas où est le problème. EN PLEINE PARTIE DE BOULES, DEUX INDIVIDUS CAGOULÉS DÉBARQUENT ET S’ENFUIENT AVEC LE COCHONNET. L’Est Républicain Braquage à la française. 64 Le Journal de Saône-et-Loire Le Bien Public l’Est Républicain La plus belle titraille de la presse régionale. 100 % vrai ! lavapeur .com Scène de musiques actuelles Dijon Izïa · Yann Tiersen · Jeanne Added Groundation · Fishbach · Ziak Jean-Louis Murat · Aloïse Sauvage Bertrand Belin · Helena Hauff Guy2Bezbar · November Ultra The Notwist · Françoiz Breut Lonny · Orchestra Baobab Canelle Doublekick · Rakoon Zombie Zombie · Mad Foxes TH Da Freak · Tetra Hydro K ...

courrier des lecteurs

Régis | Toucy (89)

Salut la fin de l’abondance, vous qui connaissez la région comme votre poche, je suis à Jambles, je dois aller chez Mme Gaudry, mais je suis perdu là. J’ai dû prendre à droite trop tôt. Mon GPS ne capte plus…

RÉPONSE DE LA RÉDACTION

Ah c’est moins facile sans GPS. Comme quoi une vieille carte routière, c’est bien aussi... Alors, fais demi-tour, tourne à gauche au tabac, va jusqu’à la ferme du Dédé Mouchot, puis prends à droite jusqu’à la départementale. Tu la traverses et 100m après t’es chez Maryse. Gare toi dans la cour. Sonne pas, à ct’heure-là son fils fait la sieste. Passe par la cuisine. Voilà, de rien.

Gaëlle

| Semur-en-Auxois (21)

Salut les princes des RTT, C’est quoi cette histoire de «tracances» ? C’est quoi ce nouveau concept ? Genre tu pars en vacances mais tu taffes quand même ? Quel est l’intérêt ?

RÉPONSE DE LA RÉDACTION

L’intérêt c’est surtout de créer un nouveau mot. C’est toujours cool de créer des mots. Et aussi de culpabiliser les gens qui osent ne pas être amoureux de leur travail. Bon, les tracances, c’est pas pour ceux qui travaillent à l’usine. C’est pour ceux qui travaillent avec un ordinateur. Donc la feinte pour esquiver les tracances c’est de bosser à l’usine. Mais franchement, si on te dit : « Dorénavant t’as 20 semaines de congés par an, mais je te préviens, c’est des tracances ». Tu prends ou tu gardes tes 5 semaines de vacances ? Réfléchis bien.

Ursiana

Salut la mobilité qui gagne, ils cherchent quoi les jeunes qui se trimballent en vélo avec des earpods dans les oreilles ? (earpod, ça veut dire écouteur sans fil, je le dis pour les plus vieux)

RÉPONSE DE LA RÉDACTION

(Merci pour la trad Ursiana). Que cherchent ces jeunes ? A mourir très vite. Ou à faire mourir quelqu’un d’autre. Je ne vois pas d’autres explications. Parce qu’avec le vélo, la carrosserie c’est toi. Donc enlève ces earpods ou je te gifle !

Max | Les Rousses (39)

Bonjour, vous voulez vivre une vie sans regret ? Cesser d’être prisonnier de vos doutes ? Je peux réunir toutes les conditions pour vous faire atteindre vos rêves, et aussi vous donner un maximum de vues et de gains potentiels sur les réseaux sociaux.

RÉPONSE DE LA RÉDACTION

Oh ! Un coach en réussite ! Génial ! Salut ! Les regrets faut toujours en avoir un peu sinon c’est suspect. Pour les doutes, on fume du shit, ça aide. Pour les vues sur internet, facile, faut sponsoriser ses posts. Par contre sur le pognon j’ai l’impression que tu vas surtout m’apprendre à t’en donner un max, Max (t’as vu le jeu de mots ?). Moi je suis sûr que le Max c’était une énorme victime au collège. Je sais pas je le sens comme ça. Un jour il est tombé sur une espèce de gourou masculiniste qui lui a donné confiance et qui lui a filé des tips pour soutirer de l’oseille à des gens tristes sur internet. En plus des 20% que lui doit Max sur tous ses gains. Pas joli, joli...

66 → JEU. 22 SEPT. → 12H CONCERT PIERRE-HUGUES JOSÉ* En partenariat avec La Rodia dans le cadre du festival Détonation → JEU. 6 OCT. > 20H THÉÂTRE LE CABARET LIP Cie L’oCCasion Tarifs de 5,5€ à 15€ / *Gratuit Toute la programmation de sept. 22 à jan. 23 à découvrir sur : CULTURE.CROUS-BFC.FR Nouvelle saison 22/23 THÉÂTRE MANSARTTHÉÂTRE DE LA BOULOIE → JEU. 15 SEPT. > 20H CIRQUE FÖDOSÖKANDE BI (Alive)* Sébastien Bruas En partenariat avec CirQ’ônflex → MER. 21 & JEU. 22 SEPT. > 20H THÉÂTRE divertisserie Cie SF → JEU. 13 & VEN. 14 OCT. > 20H THÉÂTRE enfant sauvage Cie Hums © Graphisme atelier-pangram.fr Livia Marchand BESANÇON DIJON FÊTE SES 10 ANS ! SEPTEMBRE DÉCEMBRE 2022 Infos et billetterie www.lemoloco.com Assistez au spectacle et rencontrez les artistes autour d’un verre ! pour les étudiants ! auditOrium place Jean Bouhey granD théâtre place du Théâtre Opéra de Dijon 2022 2023 opera-dijon.fr 5 , 50€

horoscope

C’est dur à assumer ces temps-ci, la qualité de Bélier, le troupeau de Claude Allègre (31 mars 1937). Des visionnaires.

« L’imposture climatique ou la fausse écologie » a seulement dix ans. Rasez les murs et expiez !

Sexo : je ne vois pas ce qui vous rend aussi allègre !

On sait pas trop quoi penser de vous les Nicolas Hulot (30 avril 1955) du zodiaque.

Un coup, on vous trouve sympathique dans votre engagement précurseur, un coup on tombe de la chaise en lisant des trucs privés totalement toxiques. Va falloir travailler la cohérence.

Sexo : assurez-vous de la présence d’un témoin quand vous êtes seul(e) avec une femme.

Vous auriez dû lire la fiche de poste avant d’accepter cette promotion dans un autre service : il était pourtant écrit « connaissance du secteur indispensable ». Maintenant, va falloir faire comme Christophe Béchu, le ministre de l’ecologie (11 juin 1974) : espérer que ça passe sur un malentendu.

Sexo : faites celui qui est rentré par inadvertance dans une cabine occupée.

Être du signe de Mini Yuan ZI (4 août 2007), le panda du zoo de Beauval, vous pose en amis de la terre des lions. Quoique.

Selon une étude, les lions qui sont les plus actifs la nuit pourraient accroître la vulnérabilité des herbivores en les contraignant à se nourrir aux heures les plus chaudes de la journée. « No one is innocent ».

Sexo : du coup, faites les gazelles plutôt que les lions.

On vous grimpe dessus les Balances. Comme Kim Kardashian (21 octobre 1980), vous rêvez de vous offrir un jet privé pour relier Dijon à Quetigny ? Bon d’accord, Kim n’est pas seule, toutes les idoles du showbiz font pareil. Mais il serait temps de vous peser avec un indice carbone les Balances.

Sexo : pour s’envoyer en l’air, merci de préférer le train.

Sais-tu brave Sagittaire que tu es du signe de Captaine Igloo, apparu sur nos écrans le 23 novembre 1967 ? Toi aussi, tu es gravement menacé par le réchauffement climatique. Rejoins la fondation Picard Surgelés pour la COP 26.

Sexo : pas en dessous de 18°C pour toi, mais au moins c’est forcément dur.

Comment tirer le plus de profits possibles de la fin du monde ? TOTAL respect, Cancer, signe du PDG de TOTAL, Patrick Pouyané (24 juin 1963). « La compagnie TotalEnergies a la conviction qu’une entreprise doit être un acteur engagé dans les territoires où elle est présente, au-delà de sa contribution économique, sociale et sociétale.»

Sexo : quoi de plus tendance qu’une séance de sauna dans une cuve de mazout ?

Vierge, comme Ségolène Royale, native du signe (22 septembre 1953). Après avoir vaillamment défendu les pôles, vous trouvez que les crimes de guerre russes sont de la propagande de Zelensky...

Sexo : restez vous-même (vierge), de toute façon personne ne veut de vous, ni en 2007, ni en 2022.

Ouf les Scorpions ! Vous êtes un des seuls signes à relever le niveau, grâce au chef Raoni (23 octobre 1939), chef du peuple Kayapo. Comme lui, vous vous battez contre la déforestation de l’Amazonie. Bon c’est un peu loin de la BFC, mais Pacha Mama habite aussi le Morvan et le Jura.

Sexo : chez les Kayapos, les jeunes garçons de 16 ans sont initiés par la femme de leur frère.

Alors petit Capri Thunberg ! Comme Greta (3 janvier 2003), on veut plus aller en cours parce que les ours blancs ont les papattes qui chauffent ? Avoue plutôt que tu as passé ton dimanche sur insta à mater des vidéos d’influenceuses.

Sexo : attention aux préservatifs en maïs, ça fond aussi vite que la banquise.

La classe absolue les Verseaux, vous êtes du signe de JMJ. Non, pas comme les Journées Mondiales de la Jeunesse catholique, mais comme Jean Marc Jancovici (13 février 1962) ! Vous aviez raison sur la crise climatique avant tout le monde. Continuez !

Sexo : comme le dit JMJ, nous avons bâti un système qui n’est stable que dans l’expansion.

Vous faites le buzz permanent : vous êtes né.e.s dans la constellation de Sandrine Rousseau (8 mars 1962). Pour nos lecteurs mâles blancs binaires cisgenres, il est temps de rompre avec votre androcène, responsable du système de prédation capitaliste et de la disparition du barbeuque du dimanche.

Sexo : dites adieu au fantasme du camionneur.

Lune et demi-lune, les prédictions astroligiques qui vous aident à faire pipi sous la douche. Par la cuvette de Dijon  Illustrations Mr. Choubi
68 © Richard Haughton © Galactik Ensemble © Étienne Rochefort © Jean-Louis Fernandez © Seamless © Vladimir Lutz © Camille Vivier © Le Grand Chalon UN APERÇU DE LA PROG’ SAISON 2022-2023 ROOM ZUGZWANG JAMES THIERRÉE CIE DU HANNETON GALACTIK ENSEMBLE STEPHAN KAEGI RIMINI PROTOKOLL CIE 26000 COUVERTS PHILIPPE NICOLLE GABOR RASSOV CIE EQUINOTE MUSIQUE | DANSE | THÉÂTRE 4 > 8 OCTOBRE 2022 CIRQUE 12 ET 13 MAI 2023 SALIA SANOU CIE MOUVEMENTS PERPÉTUELS À NOS COMBATS DANSE | BOXE 19 NOVEMBRE 2022 SOCIÉTÉ EN CHANTIER THÉÂTRE 24 > 26 MAI 2023 CHAMONIX AVANT LA NUITD’APRÈS JEANNE ADDED EDA CHALON BATTLE #5 THÉÂTRE – SPACE OPÉRETTE 20 > 23 DÉCEMBRE 2022 CIRQUE | THÉÂTRE ÉQUESTRE 1ER > 3 JUIN 2023 CONCERT 24 MARS 2023 DANSE | BREAKDANCE 10 JUIN 2023 EN CORÉALISATION AVEC À CHALON SPECTACLES ESPACE-DES-ARTS.COM |
SEPT -NOV 2022 PAUL BENJAMAN .Blues + HERMETIC DELIGHT .Indie rock + LA HOULE .Noise pop + POLTERGEIST .Cold wave + ALMA CATIN .Chanson pop + MINES FLOOR COWBOYS .Blues folk + BABY VOLCANO .Hip-hop trap + BON VOYAGE ORGANISATION .Groove cosmique + OSMOSIS .Electro drum’n’bass + ZKR .Rap + TOKSA .Afro trap + LEWIS OFMAN .Électro pop + SMASH HIT COMBO .Metal + TALLULAH .Metal + BIRDS IN ROW .Hardcore sensible + ALTA ROSSA .Post metal sludge + GLAUQUE .Hip-hop transformé + DON GABO & KREG .Rap électro + ROMANE SANTARELLI .Électronica + GAETTSON .Électro + BLACK SEA DAHU .Indie folk + JULIE ODELL .Folk ... Vous avez flashé sur nos concerts ? WWW.POUDRIERE.COM Parking de l’Arsenal, au pied du Lion de Belfort abonnement 25 euros pour 1 an * soit 4 numéros livrés à votre adresse par un gentil facteur *(frais de port inclus, sauf livraison hors France métropolitaine, nous contacter) COMMENT FAIRE ? Par Internet (carte bancaire) boutique.sparse.fr Par courrier (chèque) sur papier libre accompagné de votre règlement à l’ordre de Sparse Média et envoyé à cette adresse : Sparse Média 26 boulevard de l’université 21000 Dijon la boutique COMMANDEZ EN LIGNE SUR BOUTIQUE. SPARSE.FR ! CASQUETTES SLIPS BANANES TSHIRTS 70

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