Sparse 18 (mar. 2017)

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sparse www.sparse.fr • gratuit • à lire dans tes chiottes magazine tiré à 1 million d’exemplaires

sparse | numéro 18 | trimestriel | mar. avr. mai. 2017

guide moderne de la vie

Comment devenir un roi du curling ? futur Notre voyante connaît l’avenir de la BFC Retraite fumeuse à l’abbaye de Cîteaux Ida & Wilfried de la peinture et du foutre La musique céleste de paradis 120 ans de cinémas à dijon les sucreries pop d’agar agar Un tour en club échangiste sur les bords de loire + L’église de Satan de franche-comté la résurrection du Port Nord de Chalon flippers stands de tir horoscope gratuit.


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édito. Je vois... Donc maintenant en France, on peut cracher au visage de la justice en direct à la télé, ne pas se rendre aux convocations des juges, étaler du caca sur la face des fonctionnaires, des profs, des journalistes, détourner le pognon de l’Europe... Sans que personne ne s’émeuve. Et même carrément être candidat à la présidentielle... On a l’impression du scénario d’un vieux polar des 70’s à la Pakula ou Costa-Gavras, mais le truc est réel. « Je suis une victime, c’est la faute au complot des médias et aux juges gauchistes, c’est une cabale » Dis-tu ? Un juge « gauchiste », je vois un peu ce que c’est, c’est quelqu’un qui t’a mis en examen. Mais le complot des médias, c’est quoi ? Y’a 200 chaînes de télé, 2.000 radios, 200.000 sites Internet d’infos. Des médias publics, des privés, des indépendants, des culturels, des politiques, des institutionnels... De quels médias tu veux parler ? D’une chaîne d’info en continu ou du journal local ? Du site Internet de l’asso écolo ou de Bloomberg TV ? Du Canard Enchaîné ou de TF1 ? De Radio Courtoisie ou de 20 Minutes ? D’Égalité et réconciliation ou d’Astrapi ? De Sparse ou de Femmes en Bourgogne ? Je ne comprends pas, ce complot, il est où ? C’est tous les médias ? C’est qui ? T’es pas assez grand pour aller chercher des infos ? Y’a tout le panel de journaux sérieux sur tout un tas de sujets, sur tout support... Y’a des médias qui sont dans l’immédiateté, des médias de fond, des médias d’opinion, des médias sérieux et d’autres moins. Y’a même des médias à la solde de ceux qui crachent dessus... Le complot des médias, c’est comme le complot judéo-maçonnique, ou celui des illuminatis, voire celui des bobos cultureux de centre-ville, c’est vraiment un truc de gros bourrins. Moi, ce qui me fait halluciner, ce qui me donne envie de tout casser parfois au lieu d’aller voter (ce qui est tentant mais pas très constructif), c’est quand vous ouvrez vos grandes bouches pour nous dire que si vous avez détourné l’argent du Parlement européen ou que vous avez embauché les gens de votre famille alors qu’ils ne bossaient pas... Hé ben que c’est la faute des médias ou des juges. Y’a qu’un pas d’ici à ce que les mêmes nous disent que c’est de la faute des Arabes ou des Juifs... Oh merde, point Godwin. Sparse, la magazine avec des valeurs bien-pensantes de faibles de centre-ville utopistes voire staliniens pas conscients des réalités économiques et sociales qui l’entourent.

Chablis Winston

« Le système ? Ahahah ! Je ne sais pas ce que c’est, tellement je suis en dehors. Déjà à l’ENA, j’ai été élu mec le plus hors-système de mon école. Alors franchement, est-ce qu’on peut me soupçonner une seconde d’accointance avec le système ou les puissants de ce monde, que je vous promets que je ne sais absolument pas qui ils sont ? Certainement pas » Manu. M., mytho, 2017


sommaire ours Ce magazine est édité par Sparse Média. Siret : 750 725 806 00020 - APE : 9499Z www.sparse.fr - contact@sparse.fr Directeur de publication Pierre-Olivier Bobo rédacteur en chef Antoine Gauthier Contributeurs Aurore Schaferlee, Cédric de Montceau, Chablis Winston, Chloé Cloche, Franck Le Tank, Jeff Buckler, Léa Signe, Loïc Baruteu, Louise Vayssié, George Deep, Martial Ratel, Mr. Choubi, Nicdasse Croasky, Niko Vayssié, Simon Galley, Sophie Brignoli, Tonton Stéph, Doug Ritter, Riddimdim Selecta, Jean-Paul Goûter, Giorgio Armagnac, Badneighbour, Victoire Boutron, Benjamin Moreux, Thierry Blandenet, Laëtitia Déchambenoit, Lilian Elbé, Sophie Brignoli, James Granville forever Direction artistique internetinternet

PhotographIes Alexandre Claass, Louise Vayssié, Vincent Arbelet, Alexis Doré, Édouard Roussel Illustrations Hélène ‘Microbe’ Virey, Mr. Choubi, Léa Zamolo, Benjamin Moutte DÉVELOPPEMENT COMMERCIAL Romain Calange COMITÉ DE RELECTURE Marion Godey, Aurore Schaferlee, Maria Mood Couverture Patins et chaussettes, patinoire de Dijon Photo : Alexandre Claass Imprimeur Chevillon Sens Dépôt légal : à la sortie du magazine ISSN : 2260-7617 La rédaction décline toute responsabilité quant aux opinions formulées dans les articles, cellesci n’engagent que leurs auteurs. Tous droits réservés © 2017 Merci à nos partenaires ainsi qu’à celles et ceux qui ont permis la réalisation de ce numéro. Prochain numéro : juin 2017 Sparse bénéficie du soutien du Ministère de la culture et de la communication, fonds de soutien aux médias d’information sociale de proximité

amuse-bouche 3. édito 6. guestlist 8. CONTRIBUTEURS 9. pulitzer session 10. courrier des lecteurs 11. LE BON COIN 12. l’essentiel découverte 14. ice ice baby : curling à besac’ portrait Ida Tursic et Wilfried Mille

20.

reportage à tronsanges, on s’échange

24.

blasphème l’église de satan de franche-comté

28.

reportage 32. la résurrection du port nord de chalon portrait 36. sur les routes de paradis entretien agar agar, le gélifiant pop

38.

légende 42. la patinoire de dijon : reine des neiges paranormal 48. une voyante prédit l’avenir de la bfc diaporama 52. flippers dijonnais : play again immersion 56. un gonzo à l’abbaye de cîteaux story 120 ans d’histoire de cinémas à dijon

62.

Dessert 68. la page mode 70. la cuisine de so fish 72. ROMAN PHOTO : le troisième rail 76. SÉLECTION MUSICALE 77. crash-test 78. mOTS fléchés 79. HOROSCOPITONE 80. ABONNEMENT 81. HABILLE TON KÉVIN 83. CARTOGRAPHIE


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DIJON - LONGVIC MARDI 4 AVRIL | CELLIER DE CLAIRVAUX VEN 7 & SAM 8 AVRIL | ESPACE JEAN BOUHEY VEN 14 & DIM 16 AVRIL | BOULODROME COUVERT VEN 21 AVRIL | PÉNICHE CANCALE

17 RUE AMIRAL ROUSSIN 21 000 DIJON 03 80 30 61 00

HORAIRES: Du Mardi au Vendredi / 10h-13h et 15h-19h Samedi / 11h-17h (sans interruption)

MARDIS 11 & 18 AVRIL | CENTRE VILLE LE FESTIVAL BFC DES MUSIQUES ÉLECTRONIQUES

POINT G - S3A - RAINER TRÜBY BIRTH OF FREQUENCY - FLORE - LOWRIS ALEX KATAPULT PIT SPECTOR SHEITAN BROTHERS - JM - BASS ELEVATOR JEFF THE FOOL - LUMBAGO SOUNDSYSTEM ZANET - LIQUIDSTONE - BUENAVIBRA DJ BART - KETBI - POP CORN - G-REM SCREWDRIVER - PIT - RAILWAY - LUCIANO KONIK - P’TIT LUC - ANDREAS film : NEVER STOP, UNE MUSIQUE QUI RÉSISTE Infos : wwww.riskparty.com

40 rue Amiral Roussin Du mardi au samedi 12h à 14h / 18h30 à 2h

Pub et Restauration Traditionnelle Irlandaise, Anglaise, Ecossaise et Galloise TFTF qu’est-ce que c’est ? C’est pour boire un verre ! Pour prendre l’apéro ! Pour manger une tarte flambée fermière avec les doigts... et c’est une formule rapide le midi à 10 euros en 20 min.

Ambiance conviviale dans un décor typique, cuisine «maison» à base de produits frais

Ouvert 7j/7 du midi au soir


guestlist PAR la rédaction photos : DR

Benjamin Poulain

Musicien chez l’Impérial Kikiristan, programmateur du festival Cirque & Fanfares, 3 et 4 juin à Dole

Qu’est-ce que c’est que cette mode du gluten free ? En tout cas ça sauve mon couple.

tâche papier

Atelier de sérigraphie et galerie à Dijon Aidez-les sur Kisskissbankbank !

julien milleret

Directeur du Rock’a’bylette vintage festival, du 28 au 30 juillet à Luzy

Qui a volé l’orange du marchand ? Aux dernières nouvelles ce serait Gilbert Bécaud ou Nicolas Sarkozy ? En général cette réponse est validée quand on parle de vol...

Pourquoi les petits jeunes font tous de la muscu ? Car ils sont au chômage et qu’ils veulent faire les beaux sur les réseaux sociaux, bande de branleurs de jeunes.

Un bon rade pour boire un verre ? Chez les copains de l’Alchimia bien sûr.

T’es sur Tinder ? C’est quoi ton pseudo ? Oui : BarbuBouffeMoiLeCul.

La Haute-Saône est-elle une no-go zone? J’ai perdu mon portefeuille là bas donc oui mais en même temps je l’avais laissé sur le toit de ma voiture avant de prendre l’autoroute donc non.

Tu t’es déjà épilé le torse ? Non, on attend d’avoir des poils, après on verra...

Aide-nous : on cherche un endroit peinard pour boire un verre ? La buvette du Bresse Jura foot.

Tu te baignerais dans la Saône, franchement ? Déjà fait... à Mâcon précisément.

Un bon rade pour boire un verre ? Chez Josette et Michel au PMU de Luzy, c’est le café des sports, v’la la gueule des sportifs du troquet. J’ai un bureau là-bas à côté du dernier chiotte turc de France. À visiter pendant le Rock’a’bylette.

Xavier Dupont de Ligonnès planqué au Super U de Dole au rayon surgelé, c’est plausible ça ? Il apparaît souvent au Manège de Brack en fin de festival à Dole donc oui.

T’as déjà feuilleté l’excellent journal Mag’azette ? Non, malheureusement... ?

Que faisait Pénélope Fillon au lieu d’aller bosser ? Même Sparse est dans l’acharnement politico-médiatique, c’est moche.

Doit-on détacher Sens de la Bourgogne ? Ça n’a pas de sens...

Si ta mère t’annonce que tu dois choisir entre vivre à Nevers et Belfort, tu prends quoi ? Mon père.

Une saloperie à dire sur la Suisse ? (Réponse collective) Ils sont petits ?! T’as pas l’heure ?! Leurs plats sont pas bons. La capitale de la Suisse, c’est Genève ou Zurich ? C’est plein de Suisses. La liste est longue...

MMA ou MDMA ? On va pas s’emmerder pour un D.

T’es sur Tinder ? C’est quoi ton pseudo ? Venez pécho Le Tâche Papier !

T’en as pas marre de tous ces bobos écolos donneurs de leçon ? Le prochain que je chope…

Sérieux, tu sais ce qu’elle faisait Pénélope Fillon au lieu d’aller bosser ? Elle prenait des notes, faisait une sieste, mais est-ce que cette femme existe vraiment ?

Qu’est-ce qu’il y a dans Michel Drucker? 13 lettres. Un petit cœur qui bat aussi. Emmanuel Macron est-il un reptilien ? Évidemment. Mais je savais pas que les reptiliens avaient le droit se marier avec leur mère.

T’en as pas marre de tous ces bobos écolos donneurs de leçon, toi ? J’ai peur de rentrer dans cette catégorie alors je ne dirais rien... Mais les bobos écolos sont nos amis.

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Faut-il ouvrir une salle de shoot à la Toison d’Or à Dijon ? Il faut surtout fermer la Toison d’Or et les zones commerciales en général pour réinvestir les centres-villes de notre bonne vieille France qui en chie avec tous ces cons aux pouvoirs. Mais ça c’est du bon sens que les politiques n’ont plus… Conseille-nous un restau cool pour passer une soirée entre potes ? Sans déconner, le Bistr’au Cochon Ventru au bord de l’étang de Bousson à Saint-Didier-sur-Arroux. Si ta mère t’annonce que tu dois choisir entre vivre à Nevers et Belfort, tu prends quoi ? Nevers car j’ai déjà habité là-bas et il y a le Café Charbon et le Donalds Pub. Bon, dis-nous la vérité. Pour qui tu ne voteras pas à la présidentielle ? Je ne voterais ni pour Fion, ni pour Mac Système et encore moins pour Bas du Front et Mme Lepine. Hamon avis ne Mélanchon pas tout, votons pour le moins con et ce sera déjà difficile.


ICI L’ONDE

DIJON

2017

Musique au centre d’art Le Consortium

A V R — JUIN


contributeurs PAR chablis winston photos : DR

Thierry Blandenet Thierry est arrivé calmement un soir de décembre dans la rédaction de Sparse. Il nous a regardé dans les yeux, d’un air flegmatique de Bourguignon qui a trop vécu à Paris et nous a dit : « Je vais prendre un Picon ». Bon, après on lui a expliqué que c’était pas un bar ici mais la rédaction d’un magazine, alors il est resté quand même parce qu’il y avait des Kro’ au frigo. On a sympathisé et maintenant il écrit et il prend des photos, avec style. Belle histoire, non ?

Louise Vayssié Dans son sac ? Un appareil photo. Dans sa canne ? Un sabre. Louise Vayssié est en mission. Elle n’est pas là pour rien et profite de ses piges pour Sparse pour exécuter des contrats. C’est le Ghost Dog de la BFC ou Kill Bill. Qui pourrait se méfier de quelqu’un bossant pour Sparse ? C’est la couverture idéale. La voie du Samouraï, mais de Mâcon.

Victoire Boutron Victoire Boutron est le tuteur légal à Nevers de notre grand reporter star Benjamin Moreux. Elle va en reportage, écrit les papiers, lui fait des sandwichs pour midi et le ramène chez lui quand il a trop bu. C’est-à-dire tous les jours. En fait, elle fait tout, pendant que Benjamin sert des paluches et raconte des histoires de vestiaires de rugby. Une belle équipe. Merci Victoire, on ne s’en sortirait pas sans toi.

Laëtitia Déchambenoit ésotérisme, cartomancie, contact avec l’au-delà, Dame blanche, morts-vivants, fantômes et tout le tintouin... Rappelle-toi de Mystères, l’émission sur TF1 dans les 90’s. ça te faisait flipper, hein ? Laëtitia, elle, c’est son quotidien. Elle enquête aux frontières du réel. Elle est revenue dix fois d’entre les morts et il paraît que c’est pas si hardcore que ça. Y’a des piscines, des discothèques... ça a l’air pas mal, franchement.

Franck le Tank « Francky ? Bien sûr que je le connais. Ce petit brigand traînait avec son gang et vendait du crack en bas de cet immeuble là-bas. À l’époque c’était un dur. Il fallait pas l’asticoter. Il contrôlait le game sur au moins 5 blocks entre la 8ème et Fairbanks. Mais ça, c’était avant. L’amour l’a remis dans le droit chemin... L’amour du journalisme, du terrain, de l’enquête... Ce mec était fait pour ça. C’est une évidence. »

David Pujadas David Pujadas était devenu une merde. Un pantin aux ordres. Il passait son temps à lécher la raie de ses invités nous expliquant qu’il n’y avait pas d’alternative au libéralisme à outrance. Et puis, prise de conscience, réveil mental pour David : « Mon dieu ! Que suis-je devenu ? Est-ce pour ça que j’ai commencé ma carrière sur TF1 à l’époque ? » Certainement pas. Il a demandé à ses collègues quel était le magazine le plus engagé de France. Maintenant il est là. Et on lui a confié la rubrique beauté/santé. Il réapprend le boulot, quoi. Pierre-Olivier Bobo « La puissance pour moi, c’est d’abord de beaux cheveux. Moi, j’ai choisi la beauté Elsève, l’extrabrillance du jojoba, la force des protéines réparatrices, et, nouveau, les bienfaits nutritifs du Massoia Balsam. Tu vois le genre ? Même quand je suis pressé, j’ai toujours 5 minutes pour me faire un petit massage du cuir chevelu. Je suis frais, bien dans ma peau, prêt à écraser la concurrence avec ma semelle. Si avec ça, je sors pas un bon magazine, moi… » 8


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courrier des lecteurs Merci pour toutes vos lettres d’amour ou d’insultes. contactez-NOUS sur facebook, twitter ou instagram.

Réponse de la rédaction Après enquête poussée dans le milieu des appartements crevettes, en compagnie de nos amis rois de la friture, les So Fish, il s’avérerait, en recoupant toutes les informations en notre possession, que l’essentiel d’un nem soit composé de nourriture. Dingue. En fait, on peut le bouffer. C’est comestible. Bon ap’.

« Bonjour Madame, Est-ce qu’on peut savoir ce qu’il y a à l’intérieur d’un nem ? » Laurence, Autun (71)

Réponse de la rédaction Oh non, Claude, c’est pas sport comme question ça… Sa mère. Oh ! tu vois, tu m’obliges à le dire ! Bravo Claude ! T’es content ?

« Salut les jeunes, Qui est la dame qu’on voit souvent à côté d’Emmanuel Macron ? » claude, Paray-le-Monial (71)

Réponse de la rédaction Essayons de comprendre ensemble. Un candidat anti-système, c’est un mec qui a fait l’ENA, qui a été inspecteur des finances, banquier d’affaires, ministre et qui est le meilleur pote de tout ce que compte le CAC 40. En fait, j’ai l’impression qu’il est surtout anti-système parce qu’il le dit. Tiens, moi je vais dire que je suis pilote de ligne, on me filera peut-être un avion si j’ai assez de potes chez Air France... Du coup, édith, tu vas me demander : qu’est-ce que c’est que le système ? Je sais plus trop là maintenant...

« Ouaich ma gueule, Qu’est-ce que c’est qu’un candidat anti-système ? » édith, Bouze-lès-Beaune (21)

« Pourquoi les thématiques de sparse sont de plus en plus debiles : c est cela le résultat d ‘études sup.ou plutot de pistons pour bobo trop con ? En tout cas on n est sure que vous n avez pas fais l Ecole du rire ni du journalisme non plus d’ailleurs ! Voilà encore une belle subvention qui vas à de la branlette subdo intellectuel » (sic) Guillaume, Dijon (21)

« Bonjour à toi mon média citoyen, J’avoue hésiter encore… Est-ce que je dois aller voter ? Alors même qu’aucun des candidats ne me fait vraiment envie… C’est un peu tous les mêmes. Qu’est-ce que je dois faire ? » Killyan, St-Vit (25)

« Salut, Je ne trouve pas de refrain à notre histoire. Tous les mots qui me viennent sont dérisoires. Je sais bien que je te l’ai trop dit, mais je te le dis quand même : Je t’aime. Voilà, il fallait que ça sorte. » Arthur, Lons-le-Saunier (39) 10

Réponse de la rédaction Oh ! ça fait longtemps qu’on n’en avait pas eu des comme ça. Merci Guillaume ! Déjà bravo pour le niveau d’écriture. C’est propre et agréable à lire. Tu places bobos, pistons, pseudo-intellectuel, journaliste et subvention dans la même phrase. Combo. Excellent ! De la haine pure de mec aigri derrière son ordinateur par je-ne-sais-quoi. Serais-tu Mehdi Meklat ? Sinon, c’est vrai qu’il y a des thématiques vraiment débiles dans Sparse. Ça nous fait beaucoup rire. Par contre, Guillaume, lui, va aller voter… J’en suis à peu près sûr… ça sent pas bon.

Réponse de la rédaction Alors Killyan, déjà, non, ce ne sont pas tous les mêmes. Renseigne-toi bordel ! Ensuite, tu fais comme tu veux, tu es grand maintenant. Mais ne viens pas chialer après. C’est pas quand on a fait dans son froc qu’il faut s’essuyer, si tu vois ce que je veux dire.

Réponse de la rédaction Dis moi Arthur, tu déclames souvent du Patrick Bruel pour déclarer ta flamme ? Parce que c’est pas super sexy, sincèrement. Pourquoi pas Didier Barbelivien tant que t’y es ? En plus, je ne sais pas si tu t’en rends compte, mais tu dis je t’aime à un magazine. Tu en es conscient ? Ce n’est pas une personne humaine... C’est bizarre, franchement, ce que tu fais...


shopping Table basse style colonial

PAR franck le tank

[ameublement] par Jean-Claude d’Arc

Le meilleur des annonces racistes en BFC. Ouvrez l’oeil et le bon, de vraies annonces se cachent dans cette page.

Description : L’affaire du siècle du domaine de l’introuvable, magnifique table coloniale qui aurait appartenu à un ténor du FN. Dimensions : h 88 x l 88 x p 88 cm + plateau de verre. Prix : Faire offre, pour collectionneur caucasien uniquement. Localisation : Dijon (21000)

Rangers souples [sport/hobby] par skindu21

Description : Bonjour, je me sépare de ces Rangers souples presque neuves pointure 39 avec bout coqué, légères traces brunes au bout mais dans un état exemplaire. Cirées avec amour. Lacets blancs non fournis, mais on peut s’arranger... Prix : 53 à débattre. Vente sur place uniquement Localisation : Beaune (21200)

Groupe electrogène [bricolage] par Colonel Bigeard

Ceinture Nazi

Boite Banania

[mode/style de vie] par Heinrich

[décoration] par Negrier

Pin’s Front National Aigle Noir/Blanc

Disque Legion 88 / Terroriste

Description : Ceinture d’officier nazi, ultra collector, je m’en sépare, elle appartenait à ma grand-mère (bien évidemment rasée à la Libération). Daté de 1941, l’âge d’or. Prix : Faire offre, pas sérieux s’abstenir, sa place est dans un musée. Localisation : Vesoul (70000)

[collection] par Nemrod

Description : Très beaux pin’s aigle du FN front national, noir ou blanc, état neuf, jamais portés, Mélenchon ne veut pas... Les pin’s sont dorés à l’or fin. Prix : 10 + envoi gratuit. Localisation : Pont-sur-Yonne (89140)

Description : Bonjour, je me sépare de ce groupe électrogène. Très peu servi depuis 1962. Tout fonctionne, utilisé récemment et ronronne comme en 40 si je puis dire. Pas sérieux s’abstenir, réduction aux anciens membres de l’OAS. Prix : 260 à débattre. Localisation : Auxonne (21130)

Description : Boîte récente de Banania, dernière fournée avant le politiquement incorrect. Collector. Nombreux produits de l’ère coloniale à partager si intéressé pour rentrer dans mon club. Tapez KKK sur Le Affiche Jean-Marie Le Pen Bon Coin pour d’autres offres. [collection] par Noeunoeuil Prix : 6. Description : TRES BELLE AFFICHE RARE Localisation : Gueugnon (71130) (petite usure du temps, trous de punaises, traces de scotch). Meilleur slogan « LA FRANCE DE RETOUR » bien mieux que les nouvelles versions du FN de Philippot et autres nabots. Période « je vais te faire courir moi rouquin ». Immanquable. Prix : 45 PORT (pas de mauvais jeu de mot) COMPRIS. Localisation : Dijon (21000)

[musique] par whitepower

Description : Bonjour je vends ce dix car jl’ai en doub’, original et pa tro rayey. Avec les chanson lé plus connu com Mohamed mouche à merde, Révolte blanche ou Violence nocturn (ma pref). Prix : 8,80 envoi possib’. Localisation : Belfort (90000)

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Mercredi 18 janvier

Ailleurs, au Brésil, la chanteuse qui a commis la Lambada est retrouvée carbonisée dans son véhicule. C’est un peu dur comme sanction, non ? Turbo toujours, à Pouilly-en-Auxois, un automobiliste est interpellé pour défaut de permis depuis 32 ans. Joli score.

l’essentiel par tonton steph & chablis winston

Jeudi 19 janvier

Efficacité policière, toujours. Dupond et Dupont se trouvaient peut-être au Texas, puisqu’un homme a été arrêté en possession de méthamphétamine – qui s’avéra en réalité être de la litière pour chat. Puisqu’on n’en est pas à une aberration près.

Mardi 10 janvier

Vendredi 20 janvier

Pendant que les Internets et lemonde.fr se passionnent pour l’accouplement observé entre un macaque et une biche au Japon, la presse quotidienne régionale propose un article extrêmement intéressant sur Pierre Bellemare qui s’est blessé en tombant de son lit. Pierre bouge encore, donc.

Le Journal de Saône-et-Loire attire notre attention sur une recherche de produits stupéfiants au lycée Léon Blum du Creusot. Le clébard a réussi à faire tomber trois gamins pour au moins quelques grammes, énorme. Pendant ce temps, des candidats à la primaire du PS proposaient une dépénalisation du cannabis. Qu’on leur ramène les bergers allemands !

Mercredi 11 janvier

Le Bien Public, très en forme et avec beaucoup de discernement fait sa une sur une Dijonnaise ayant refusé de retirer son voile, puis, sans lien, avec un article sur l’infidélité des femmes. Tempête dans un sablier et obscénité, toujours : en Bretagne, une écolière française trouve la fève dans la galette de son école. Celle-ci s’avère être cependant une représentation pornographique initialement destinée au club de rugby du coin.

Samedi 21 janvier Couternon : un chargement de poutrelles en béton se déverse sur la chaussée. Ce qui n’a probablement rien à voir avec le documentaire qui sort également ces jours-ci. Rocco Siffredi s’y affiche en repenti et revient sur sa longue carrière.

Jeudi 12 janvier

Du côté de Vignolles, vers Beaune, un chef d’entreprise porte plainte parce que l’écran digital de sa machine à café de compét’, provenant sûrement de l’Yonne, diffusait en effet rien de moins que des vidéos pédo-pornographiques. On ne saura donc jamais si lui et ses collaborateurs se seraient insurgés autant en cas de diffusion d’un vieux Dorcel des familles.

Lundi 23 janvier

Le bobo de base aime bien se délecter de Kusmi Tea dans son mug Twin Peaks fétiche. Qu’il se méfie, la marque a retiré de nombreux lots de ses produits car ils contiendraient une concentration importante d’alcaloïdes pyrrolizidiniques dont la forte concentration pourrait être cancérigène et endommager le foie humain. Et dire que tu faisais un mois de janvier sobre, lol.

Samedi 14 janvier

Avoir de la suite dans les idées, de la cohérence et être conséquent : autant de possibilités pour fonder l’éthique de journaliste. Suite à l’info de mercredi 11, le BP décide donc de titrer « Provocations anti-musulmans à Genlis ». C’est fou, ça. Qui aurait donc pu inciter ainsi les braves populations du Val-de-Saône à stigmatiser cette population ?

Mercredi 25 janvier

Dimanche 15 janvier

France Bleu Bourgogne décide de rivaliser avec la haute qualité de la presse locale et même de casser le game en lançant le sondage le plus zinzin de l’année : «Un Mexicain affirme posséder un pénis de 48 cm : qu’en pensent les Dijonnais ?» Le même jour, à peine installé au pouvoir, Trump décide de faire passer des lois anti-IVG.

On a pris quelques news de Bernard Madoff, a.k.a l’escroc du siècle, condamné à 150 ans de prison aux USA pour ses pyramides de Ponzi. Apparemment, il a pris le contrôle du marché du chocolat suisse dans la cour de sa zonz’ : après avoir acheté à l’intendant toutes les précieuses gourmandises, il les revend à prix d’or lors de la ronde.

Dimanche 29 janvier Benoit Hamon dérouille tout le monde à la primaire de gauche. Et commence à se faire étriller dans tous les médias parce que « trop utopiste ». Ne pas contrecarrer le business. Toujours le même « There’s no alternative » depuis Thatcher... Quelqu’un va-t-il enfin fermer la gueule de Franz-Olivier Giesbert ? Même avec les poings ?

Mardi 17 janvier

Dans L’Est Républicain, on peut lire qu’à Belfort, un homme a été interpellé par les indispensables forces de l’ordre pour avoir eu l’audace de rouler les vitres de sa caisse baissées (par -6°, c’est moyennement discret) afin de dissimuler qu’elles étaient teintées. Le gredin ! C’est désormais interdit par la loi. 12


Lundi 30 janvier

Dans l’Aude, on est bof bof concernant des promenades en forêt tranquilles sans que des beaufs beaufs défouraillent du sanglier et du chevreuil. On lit en effet qu’une « option chasse » est accessible aux élèves au baccalauréat. Prends ça, l’option surf à Biarritz.

Vendredi 10 février

On lit dans La Voix du Jura qu’il y aurait une légère recrudescence des vols dans ce charmant département. Pensez donc bien à ranger vos Comté et Morbier à l’abri des regards et des tentations.

Dimanche 12 février

Un habitant de Crotone, en Italie, a trouvé une solution inattendue pour assister à la rencontre de sa Juventus chérie. Ce supporter a tenté de se faire admettre à l’hôpital de sa ville où certaines chambres ont une vue plongeante sur la pelouse du stade. On voit le stade Gaston Gérard depuis le C.H.U ?

Mardi 31 janvier

Henry de Lesquen, candidat ultra-raciste aux présidentielles, amuse la galerie sur Twitter en donnant son avis sur le rap. Sympathique verdict : « Le rap est une sous-musique primitive qui s’adresse au cerveau reptilien. Elle libère l’homme sauvage qui est en nous. » Okay Henry, nous, on retourne écouter L.I.M.

Lundi 13 février

La page Facebook du Bien Public regorge de doux commentaires concernant des manifestations en soutien au viol « accidentel » du jeune Théo. Bien entendu, zéro modération sur les commentaires en question.

Vendredi 3 février

Bienvenue à la nouvelle application Hater, qui permet de rencontrer des gens qui haïssent les mêmes choses que vous. L’amour dans la haine, quel beau sentiment !

Mardi 14 février

Même lieu, même déferlement de sornettes. Cette fois-ci, c’est la dégradation certes pas très maligne de l’emblème pété de Dijon – la Chouette, dans la rue éponyme – qui déclenche l’ire d’une foule d’excités portés sur les superlatifs et le manque de mesure. L’attachement aux monuments pétrifiés est plus grand que celui à l’intégrité physique des concitoyens de couleur, de toute évidence.

Samedi 4 février

Quatre policiers d’Aulnay-sous-Bois sont mis en examen, dont un pour viol, puisqu’il se serait amusé à interpeller un « jeune de banlieue » pour lui introduire son tonfa dans le boule. Le même jour, un sondage crédite le FN de plus de 35% des votes assurés dans la profession au premier tour.

Jeudi 16 février

Un quotidien algérien fait sa une sur une déclaration de Marine Le Pen. Le hic, c’est que c’était en fait un canular du Gorafi, lui faisant dire qu’elle souhaitait un mur payé par l’Algérie protégeant la France de ses ressortissants. Crédible, tout de même.

Dimanche 5 février

Jacques Grosperrin, sénateur LR du Doubs, estime que les contrôleurs de bus de sa belle cité de Besançon devraient être armés. On leur donne quoi, un tonfa? Pour dominer du jeune de banlieue récalcitrant ?

Vendredi 17 février

Le Sénat américain vote pour la révocation d’une loi visant à empêcher les personnes atteintes de pathologies mentales d’acquérir une arme à feu.

Lundi 6 février

Il faut dire que nous vivons dans une société violente. Au Pecq, en Île-de-France, un homme dégaine une arme à feu devant le livreur de pizza pour réclamer un supplément fromage. Espérons au moins que c’était pour réclamer de l’Epoisses. Fromage malodorant, toujours : François Fillon s’excuse. Donc voilà : c’est bon ? Il peut se présenter?

Dimanche 19 février

Marine le Pen refuse de se rendre à une convocation des flics. Sa cheffe de cabinet est en garde à vue et le FN pille le pognon du Parlement européen. Où est le problème ? Elle passe à travers, relax. Comme si c’était une petite contravention pour stationnement gênant. C’est Fillon le méchant. Et les juges. Et les fonctionnaires.

Mercredi 8 février

à Rennes, une séparation se passe visiblement mal. Si mal, qu’un homme décide de clouer un chaton sur la porte de son ex. En voilà un qui a payé pour tous les lolcats visibles sur les internets. Léger ressentiment : apparemment, la rupture datait de... 25 ans. Le mec a donc eu le temps de remâcher son amertume.

Mercredi 22 février

Bayrou rejoint Macron. Mais qui veut nous faire croire que c’est un soutient de poids ? Il reste 6 personnes au Modem. Bientôt, Macron rejoint par Brice Lalonde ? ça va peser.

Samedi 25 février

Jeudi 9 février

Grosse manifestation à Nantes contre la venue de Marine Le Pen. Puis les gars ne peuvent s’empêcher de péter plein de trucs dans la ville et de foutre la honte à la gauche et de faire peur aux vieux encore une fois en se prenant pour des gens dangereux. // T.S. & C.W.

Fin de cavale pour le « retraité voleur de téléphones portables », apprend-on dans le si bien rédigé 20 Minutes. Celui-ci aurait été confondu par sa carte Leclerc. 13


ice ice

baby 14


découverte

La pratique du curling ne laisse personne de marbre, un comble pour un sport qui utilise des pierres en granit. Apparu, selon la légende, il y a environ 200 ans en Ecosse, dans les Highlands, le curling est passé d’une activité récréative sur les lochs gelés à un sport olympique. Bien souvent moqué pour son utilisation originale du balai, il en reste un sport très complet. Retour depuis la patinoire de Besançon, live in the flesh, sur une activité sportive atypique : 1,2,3 balayez !

par franck le tank, à besançon photos : alexandre claass

D’ailleurs commençons tout de suite par balayer les idées reçues sur ce sport. Non cet article n’est pas un pamphlet haineux contre un sport qui est souvent considéré comme risible voir ringard. Vous ne trouverez donc pas de blagues lourdes (ce n’est bien évidemment pas mon genre) concernant la capacité des techniciennes de surfaces, ou même pire des femmes, à réussir dans ce sport, puisque évidemment l’élément qui dérange ici c’est l’utilisation de ce balai sur la glace. Alors à quoi sert-il ? A frotter bien sûr mais pas que, et ça nous l’avons appris un peu plus tard, sur la glace… Un mardi soir, 20 heures, patinoire de Besançon, nous avons rencard avec l’un des deux seuls clubs de BFC (l’autre étant à Prémanon à côté des Rousses). Le président Wilfrid Coulot et son équipe ont eu la gentillesse de nous accueillir pour parler curling et surtout pour nous faire une initiation grandeur nature. À ceux qui se demandent pourquoi il n’y a pas de piste de curling à Dijon (et la question est revenue à plusieurs reprises), c’est que la glace qui est employée pour la pratique du curling est traitée de façon particulière, afin que les pierres puissent glisser uniformément. Toutes les patinoires n’ont pas de pistes dédiées à la pratique ou, comme à Besançon, n’acceptent pas d’altérer la glace pour un entraînement par semaine (ce qui implique de solliciter l’homme sur sa machine à glace que l’on appelle d’ailleurs une surfaceuse). Cet aspect technique qui peut paraître dérisoire s’apparente tout de même à un frein dans la pratique de ce sport encore peu développé en France. Seulement 400 licenciés à ce jour, pour une vingtaine de

clubs, principalement situés dans l’est près des Alpes et surtout de la Suisse, un des pays phares de la pratique. En parlant de pays phares, Simon Pagnot, membre de l’équipe de France et licencié du club de Besançon nous en a un peu parlé ; le Canada et les pays scandinaves (en particulier la Suède et la Norvège), sont les vrais dominants de la pratique. Les Ecossais, inventeurs, malgré un parcours en dents de scie, ne sont pas très loin, tandis que l’empire du milieu rattrape son retard vitesse grand V, pour assouvir sa soif de médailles. Au Canada, on retrouve même des démonstrations de curling sur toutes les patinoires extérieures à l’approche de Noël, et le nombre de licenciés avoisine le million. Selon Simon, il existe le même engouement pour le curling au Canada que pour le rugby à 15 en France. Le sport a même sa superstar, Glenn Howard, qui est au curling ce que Wayne Gretzky est au hockey sur glace. Cependant en creusant un peu, on voit que même les superstars de la discipline n’en vivent pas ; Glenn Howard étant manager dans une fabrique de bières au Canada. Même si ces joueurs sont considérés comme professionnels, le sport business autour du curling n’en est donc qu’à ses balbutiements, rendant la pratique assez difficile car non exclusive dans la vie de ses pratiquants. En résumé, le curling c’est une affaire de passionnés, et nous sommes là pour le découvrir. Pour ceux qui ne connaissent pas les règles de l’art on peut comparer ça, grosso modo, à une pétanque sur glace. Le lanceur doit faire glisser la pierre de 20 kg dans la maison (ou home pour les anglophones) qui représente la cible au bout de la piste d’une quarantaine de mètres. Le skip, ou capitaine, est placé dans la 15

« Le sport a même sa superstar, le Canadien Glenn Howard, qui est au curling ce que Wayne Gretzky est au hockey sur glace »

maison, et donne ses indications de direction mais aussi de rotation. Rotation, car la pierre doit être envoyée avec un mouvement rotatif (dans le sens des aiguilles d’une montre ou l’inverse) afin d’arriver à bon port. Si vous essayez de la lancer droite, elle va forcément partir en rotation non maîtrisée, et finir dans les choux. Enfin, deux balayeurs accompagnent la pierre, et en fonction de sa vélocité, de leur jugement et des directives du skip, frottent ou non la glace avec leur balai afin que la pierre s’arrête dans la maison. Il est important de noter que ces positions ne sont pas fixes, et que les lanceurs seront balayeurs et également dans la maison à un moment de la partie.Le jeu est divisé en ends,


La maison.

ou manches. À chaque manche, chaque membre de l’équipe lancera deux pierres, soit 16 pierres en tout par end. Pour le comptage des points, cela marche de la même façon que la pétanque : la pierre la plus proche du centre prend le point, si la deuxième pierre appartient à la même équipe, cela fait deux points, etc. De la même façon il est possible de tirer les pierres, de gêner en se mettant devant la pierre de l’adversaire, et toutes autres techniques bien connues des boulistes. Les ronds de couleurs qui composent la maison n’ont aucune incidence sur les points, ce que l’on pourrait penser de prime abord, un peu comme à un jeu de fléchettes. Détail rigolo, on a le droit de frotter avec son balai pour faire sortir la pierre adverse quand celle-ci a dépassé la ligne médiane de la maison, pas très Coubertin pour un sport qui pourtant se pratique sans arbitre, et qui prône les valeurs du fair-play. Au niveau du matériel, le curling ne serait rien sans cette pierre de 19,96 kg qui vient

d’une carrière unique en Ecosse sur la minuscule île de Ailsa Craig. Vous imaginez le lobbying de la fabrique de Kays qui commercialise les pierres ? Il n’y a plus beaucoup de granit disponible dans la carrière, alors la marque fabrique seulement des inserts au centre avec le vrai granit, pour pouvoir continuer d’en produire. Et à plus de 600€ la pierre on peut dire que le business est lucratif. D’autre part, dans la panoplie du curler on trouve également le balai, qui coûte tout de même la bagatelle de 100€ avec une mousse à remplacer assez souvent. On peut le dire, l’investissement de base au curling

Avec un petit zigouigoui pour l’attraper, c’est mignon. 16

est assez onéreux, sans compter les tenues traditionnelles à sortir pour les matchs de gala ! Enfin, il est important d’avoir soit des chaussures spéciales, ou une patinette afin de glisser sur un des deux pieds pendant le lancer de la pierre. D’ailleurs c’est par là que nous avons commencé notre initiation. Ce qui choque immédiatement au curling c’est que l’on peut marcher tranquillement avec ses chaussures sur la glace. Comme je le disais plus haut, la glace est traitée de façon à ce qu’elle soit plus compacte : un des curlers arrose la glace avec de fines gouttelettes d’eau appelées pebble qui vont permettre à la pierre de ne pas « ventouser ». C’est donc plutôt agréable de pouvoir marcher tranquille et même courir lorsque l’on balaie, sans risquer de tomber tout le temps. Le seul qui glissera pendant la manche, c’est le lanceur qui met un patin sous sa chaussure, façon grand-mère qui venait de lustrer son parquet et qui ne voulait pas de taches d’un hooligan en Atemi comme vous. On commence l’initiation par le lancer, élément fondamental du curling. Un starting block, appelé hack, est installé au bout de la piste. Un des deux pieds (le droit ou le gauche en fonction de votre pied d’appui) partira de là, l’autre est sur la glace avec la patinette pour pouvoir glisser ; on s’appuie d’un bras sur la pierre, et le deuxième sur son balai, pour gagner en équilibre. Après un petit balancier façon rasta rockett, je m’élance sur la glace et lâche la pierre en lui faisant faire sa rotation. Je manque de m’en prendre une superbe avec la patinette qui rend le truc vachement glissant ; autant être honnête j’ai clairement l’air d’un con sur la glace et mes deux accompagnants se moquent


Choisis ton arme.

de moi et trépignent de moins en moins à l’idée de lancer la première pierre. Il y a pas mal de paramètres à prendre en compte lors du lancer ; le glisser, l’appui sur le balai, la rotation de la pierre, la distance d’élan et la force que l’on met dedans. Cependant après une dizaine de lancers on commence à comprendre la technique (je ne dis pas que je ne me suis pas vautré une bonne paire de fois) ; le curling n’est pas un sport de bourrin et le lancer doit être véritablement mesuré afin que la pierre arrive tranquillement dans la maison. Après cette préparation au lancer carrément fun, on passe au balayage, qui lui n’est pas cool du tout. C’est la partie violente du sport. Quand j’ai demandé à Simon au début de l’activité si celle-ci était physique, il m’avait prévenu sur le balayage. Effectivement il ne m’avait pas menti, et frotter sur 10 ou 20 mètres devant la pierre s’avère carrément fatiguant, surtout si vous recommencez cela toutes les minutes et demie en match. Cela dit la technique est beaucoup moins difficile pour cette activité, et le coup de main, si je puis dire, on le connaît déjà. On a vu à peu près tous les aspects basiques du sport, alors pourquoi ne pas se lancer dans le grand bain et faire un match ? On se retrouve face à une équipe de jeunes licenciés, qui ont rejoint le club depuis environ 6 mois et sont ok pour nous défier. Simon, notre formateur joue avec nous et se place en position de skip pour nous coacher. La partie se passe pas trop mal, c’est toutefois vraiment dur de lancer la pierre avec la bonne intensité, j’ai tendance à lancer trop fort. Les copains n’ont pas besoin de balayer mais cela ne fait pas marquer de points pour autant. Les gars d’en face ont clairement le niveau pour nous mettre une bonne piquette, mais je les

sens fair-play et pas particulièrement en veine ce soir. On finit la partie en se prenant tout de même deux points dans les jumelles ; on a beau avoir réussi à tirer une pierre, on peut dire qu’on a joué comme des patates. D’ailleurs j’en profite pour vous dire que le bruit d’une pierre qui en tire une autre est tonitruant, et plutôt jouissif. Nous sommes convaincus par la convivialité du sport et si nous n’étions pas là depuis déjà deux heures, nous aurions bien enchaîné sur la revanche ou éventuellement sur la troisième mi-temps ! Simon nous confie qu’entre les matchs les perdants payent un coup aux gagnants, mais qu’il faut faire attention en compétition car il y a un match toutes les heures et demie et il vaut mieux y aller mollo sur le destroy. D’ailleurs, la légende veut que le curling était à la base un jeu à boire, et que c’était une excuse pour ingurgiter une quantité astronomique de whiskys. Ah ces Écossais… Du côté de Besançon, ils sont moins attachés aux traditions, et le whisky peut se transformer aisément en Pontarlier (excellent breuvage anisé du cru) qui remplace au pied levé l’alcool tourbé. Je profite de la fin de l’entraînement pour m’entretenir avec Wilfrid Coulot, président du Curling Club, plusieurs fois champion de France Junior, capitaine de l’équipe de France Senior, membre de l’équipe olympique et curler depuis tout jeune. Je lui pose tout 17

Ça se tient avec un doigt tendu (pour les connaisseurs).

« Les gens sont de moins en moins dans la moquerie, ils sont aujourd’hui ok pour tester le sport, et curieux, chose impensable il y a encore dix ans » Wilfried Coulot, membre de l’équipe de France de curling


Mais frotte, bordel !

La playlist du curling Ice, Ice Baby – Vanilla Ice Hearts on Fire – Hammerfall LMFAO – Yes ! That Curling Song – The Bog Boys Howlin’ For you – The Black Keys The Curler’s Song – Andrew Murdinson

« Après la préparation au lancer, on passe au balayage, qui lui n’est pas cool du tout. C’est la partie violence du sport »

de même la question de base lorsque l’on rencontre un curler ; comment vient-on à jouer et à aimer le curling ? La réponse est d’ailleurs unanime, c’est souvent un heureux hasard. Wilfrid est venu à la patinoire pour le patin à glace, il est tombé sur le curling et ne s’est jamais arrêté. Les bons résultats en championnat de France junior ne l’ont que conforté dans la pratique et le développement du sport. Naturellement, on en vient à parler avec lui de l’état du curling aujourd’hui et des freins à son évolution, lui qui côtoie le sport depuis plus d’une dizaine d’années. Selon lui, le sport évolue de façon positive, les gens sont de moins en moins dans la moquerie, ils sont aujourd’hui ok pour tester le sport, et même parfois curieux, chose impensable selon lui il y a encore dix ans. Les Jeux olympiques ont fait du bien à la pratique ; cependant le sport est encore trop

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confidentiel, en France notamment. Aucun salarié de structures, ni de professionnels, il en résulte une promotion très compliquée du sport. Les résultats en demi-teinte de l’équipe de France au JO de Sotchi (élimination lors des barrages) ont entaché quelque peu la motivation et mis un frein, ponctuel selon lui, à l’évolution du curling en France. Pourtant Wilfrid reste motivé et arrive à transmettre la passion qui l’anime aux licenciés du club ; il est sûr que le curling a de beaux jours devant lui. Je lui parle d’un groupe de métal suédois hyper connu là-bas, qui a fait un clip avec l’équipe nationale de curling, il connaît déjà et trouve que c’est une super idée de promotion pour le sport. Selon lui, ce serait possible de faire la même chose en France avec un truc un peu décalé, en adéquation avec la vision du sport ici ; il me propose Michaël Youn et je pense ma foi que c’est pas trop une mauvaise idée ! Wilfrid a une vision très claire de son sport et de l’image qu’il renvoie, cependant je peux vous assurer qu’une fois sur la glace, même les réfractaires ne peuvent que s’amuser. Si vous en doutez encore, on ne peut que vous inviter à vous rendre à Besançon au mois de mai pour les week-ends d’initiation, c’est gratuit et vous pourrez juger de votre appétence avec la pierre qui glisse et qui sait, dans quelques années défendre le drapeau tricolore. Le curling à besoin de vous ! // F.L.T.


« des solutions pour le futur »

sparse

l’empire

magazine

culture société consulting speed dating descentes de caves go fast plomberie humour fascinant vannes en gros et demi gros


Dirty Girl, 2015. 50


LES DÉSIRS SONT DÉSORDRES

portrait par Édouard Roussel, à diénay photos : E.R. , I.T. et W.M.

Rencontre avec le couple d’artistes contemporains Ida Tursic et Wilfried Mille. Ce duo de peintres formés aux Beaux-arts de Dijon, étonne depuis plus d’une décennie le petit monde de l’art contemporain avec des œuvres provocantes et potaches. Vous avez déjà vu ou aperçu leurs œuvres : d’onctueuses éjaculations faciales, portrait de Kurt Cobain et Courtney Love tout sourires, ou des paysages constellés de petites fleurs chatoyantes. On les pensait installés à Paris, Brooklyn, ou Berlin… même pas. Depuis tout ce temps, le couple était tranquillement posé à la campagne, leur atelier en Côte-d’Or. Du coup, on est passé pour dire bonjour et surtout essayer d’en savoir un peu plus sur leur démarche, discuter de leurs inspirations, de Tarkovski à Courbet, causer chauffage, dégât des eaux et même déménagement.

« Écrire sur la peinture, c’est comme essayer de danser de l’architecture. » Cette ligne attribuée à Elvis Costello, sonne comme un avertissement. Parler d’art contemporain sans passer pour un branleur de dindon n’est pas une mince affaire. Et pourtant, en rencontrant Wilfried Mille (Ida Tursic n’était pas dispo ce jour-là, ndlr), il a bien fallu se tortiller et se dandiner un peu. Certains artistes sont de vraies pipelettes, adorant épater leurs auditeurs dans des concepts nébuleux et de longs discours ; Wilfried n’est vraiment pas de ce genre-là. Pas d’esbroufe, pas de posture. On a l’impression d’être en face d’un quadragénaire parisien qui a décidé de prendre un congé sans solde pour bricoler au calme. Les questions glissent sur lui, ne s’obligeant pas à y répondre ni à expliquer son travail à un curieux. Cela laisse d’ailleurs le champ libre aux journalistes pour divaguer en essayant de traduire, voire d’interpréter, leurs créations. Heureusement, dans les peintures d’Ida Tursic et de Wilfried Mille, il y a quelque chose d’anglo-saxon, une approche plus « sensualiste » qu’intellectuelle. Pas besoin d’un doctorat en Histoire de l’art, ou de connaître sur le bout des doigts la bible d’Ernst Gombrich, pour apprécier et comprendre les réflexions qui sous-tendent leurs créations. Une de leurs séries les plus connues, du moins celle qui fit le plus jaser, est sans doute celle des Cumshots commencée en 2005. Dans ces peintures grand format, le duo reprend de vulgaires images d’éjaculations faciales comme on en trouve des milliers sur Internet mais en les agrandissant et les glorifiant

de cette présupposée noblesse de la peinture. Ils ont souvent procédé ainsi, prélevant leurs inspirations dans le tout-venant de notre quotidien : paysages, extraits de film, pornographie… Bref, notre banalité augmentée par les réseaux sociaux, YouPorn, ou glané au hasard des pérégrinations sur Internet. « Pour moi c’est un peu comme aller sur le marché, acheter une pomme et la peindre, je ne la fais pas pousser. » À leurs débuts, les peintures des premiers impressionnistes étaient taxées de vulgaire pour le choix de leurs sujets inspirés par le quotidien. Trop banal, trop trivial pour les élites de l’époque et les amateurs d’art. Le déjeuner sur l’herbe, ce fameux pique-nique le cul à l’air peint par Manet en 1863, déclencha même un véritable scandale en figurant une femme nue dans un contexte contemporain. Pour ceux qui en douteraient encore, le sexe et sa représentation, sont un thème sous-jacent voire explicite dans bon nombre d’oeuvres classiques de la Renaissance, comme Léda et le Cygne, Bethsabée aux bains, ou la Golden-shower de Danaé. Certains ont même 21

Collection privée. Très très privée.


Breaking Bad, dans l’atelier.

vu dans l’Annonciation une allusion à peine voilée au cunnilingus. Le duo assume parfaitement cette franchise et cette frontalité d’approche (et d’accroche) : « Pour nous, un tableau il fallait que ce soit évident, on ne peint pas des idées. Il faut que ça saute au visage, explique Wilfried, avec un sourire un brin espiègle. Cette série des Cumshots était vraiment en réaction avec l’époque, le début des années 2000. Il fallait que ce soit clair au premier degré. Pour nous c’était un moyen de faire du nu ou du portrait, ce que tout le monde détestait ou délaissait à l’époque. Aux Beaux-arts quand tu faisais de la peinture tu te faisais limite traiter de mongol. Dans une école d’art, on te demande tout de suite un discours, une explication, une démarche, et un rendu propre, qui ne sente pas mauvais. » Sans vouloir forcer l’interprétation de ces éjaculations, on peut quand même y trouver de l’humour, un geste potache, et même une analogie entre le sperme et la peinture comme matière sensuelle. Après tout, ces Cumshots sont peut-être aussi comme un clin d’œil goguenard à l’Action Painting façon Jackson Pollock. Pas besoin de courir les foires internationales d’art contemporain ou les galeries pour découvrir une de leur création. Les Dijonnais en ont une sous le

« On fusionne nos idées et c’est sûr qu’il y a des choses qu’on n’aurait jamais faites tout seul. Par contre, dans la réalisation on est parfaitement interchangeable » Wilfried Mille

nez. Place Junot, entre la Matmut et le Casino Shop, cette ondulation de l’asphalte qui fait le ravissement des skateurs est une de leurs réalisations. « Voilà ce qui arrive quand on demande à des peintres de faire une place », plaisante Wilfried. Ce type d’installation n’est pas forcément la partie la plus représentative de leur travail. Wilfried Mille et Ida Tursic aiment assurément le portrait. Au printemps dernier ils en exposaient même une quarantaine à la galerie Almine Rech. « Il y avait notre Kurt & Courtney, Schopenhauer, William Burroughs et son flingue, Nietzsche à poil et Lindsay Lohan qui fait des lasagnes qu’on a trouvé sur son compte Instagram. On aimait beaucoup ce côté homemade d’une icône pop et l’empâtement un peu crade des lasagnes. » Parmi leurs inspirations évidentes ou supposées, citons Rauschenberg, Ed Ruscha un peu, Peter Doig peut être. « On aime

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Facial Sunset, 2002.


Pizza 4 couleurs.

« Vermeer décore des yaourts, les fleurs de Murakami bourgeonnent sur des sacs à main Vuitton. Vous vous verriez bien sur quels genres de produits ? Des chaussettes. (Wilfried Mille)

aussi beaucoup Richard Prince, continue Wilfried. Il y a quelques années, il avait eu une commande d’Ivanka Trump et quand son père a été élu président, Richard Prince lui a remboursé la pièce en prétextant que ce n’était pas lui qui l’avait faite. » Le travail et les œuvres de Wilfried Mille et Ida Tursic sont indissociables de leur couple, à la ville comme à l’atelier. « On est sortis de l’école des Beaux-arts de Dijon en 1999, se souvient Wilfried Mille, puis on a eu un petit atelier en commun, et très vite on s’est mis à travailler ensemble si bien qu’on ne savait plus qui faisait quoi. » Beaucoup de journalistes s’interrogent sur leur process, le fameux ‘‘qui-fait-quoi ?’’ ; même si à vrai dire on s’en fout de savoir qui a peint la fleur en bas à gauche. Ce qui intrigue, c’est toute la phase de négociation, d’échanges, qui précède la réalisation de l’œuvre. « Ce sont des envies qu’on conjugue à deux, continue Wilfried Mille. On fusionne nos idées et c’est sûr qu’il y a des choses qu’on n’aurait jamais faites tout seul. Par contre, dans la réalisation on est parfaitement interchangeables. » On imagine un ping-pong, ou plutôt une partie de Pictionary à quatre mains. « Bien sûr que parfois il y a des résistances, des objections. Mais peut-être qu’on s’engueule moins à la maison, plaisante Wilfried, on laisse nos disputes à l’atelier ». Voilà, tout est parfaitement clair : l’art d’Ida Tursic

et Wilfried Mille, c’est en quelque sorte une thérapie de couple. « Dès qu’on est sortis des beaux-arts, on nous a dit qu’il fallait toujours peindre, produire des œuvres, ne pas perdre le rythme, surtout ne pas trouver un boulot à côté. Sans thune, ce n’est pas évident de trouver un atelier. Moi je travaillais un peu à côté pour Pei-Ming. On a gardé ce rythme comme ça pendant 10 ans. Physiquement ça commence à être un peu dur. Quand il fait -15° à l’atelier, ce n’est pas évident de s’y mettre. Dernièrement, les tuyaux ont pété et on a eu une inondation, du coup on est emmerdé pendant un mois. Il fait trop froid ici et on en a marre de faire 60 kilomètres par jour pour venir à l’atelier. » L’été prochain, le couple ira s’installer non loin de Toulouse, au pays des chocolatines et d’Airbus, dans un atelier attenant à leur domicile, un vrai loft d’artiste façon Brooklyn ! Le rêve américain au pays du cassoulet. // E.R.

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reportage

par Benjamin Moreux et Victoire Boutron, à tronsanges illustration : mr. choubi photo : joyce

On est retourné le temps d’un instant sur la route des vacances, cette fameuse nationale 7, comme les voyageurs peu pressés d’antan, qui pouvaient ainsi admirer quelques-uns des plus beaux paysages que compte la France. Si la RN7 n’est aujourd’hui plus qu’un souvenir nostalgique, elle reste tout de même bordée d’établissements insolites, comme celui de l’Addict Club à Tronsanges, seul club libertin de la Nièvre. « L’Addict » était un hôtel-restaurant à routiers qui s’appelait alors « l’Auvergnat ». C’est devenu le lieu où vos souvenirs d’ado sur Brigitte Lahaie « Alpha France » peuvent devenir réalité, dans la joie et le respect de chacun. Nous avons rencontré Alex et Joyce qui nous ont ouverts les portes de leur temple du sexe, version bourguignonne.

Samedi soir, 23h, derrière mon caractère de grande gueule je n’en mène pas large et je vais vaincre mes peurs. Ce soir, c’est le grand soir. J’ose, je franchis le pas. Le samedi soir à l’Addict, c’est soirée libertine. J’enfile mon plus bel habit (pas de basket pour moi, c’est rare), je prends mon courage à deux mains et c’est parti. Attends, un petit verre quand même, ça va m’aider. Je demande à un pote de m’accompagner. Le patron Alex me confirme que je peux venir avec lui et m’explique que les clubs libertins sont faits essentiellement pour les couples, mais que vous n’êtes pas obligés de venir accompagnés. Il y a une parité entre les couples, les femmes ou hommes seuls. Dans ce cas-là, ces derniers deviennent des objets de jeu. « Vous pouvez rencontrer des personnes qui se lassent de leur conjoint et d’autres qui ont envie de voir autre chose, de tenter l’expérience. Les clubs libertins sont ouverts à tous, tant que vous êtes apprêtés » nous explique le patron. Merde, j’ai beau avoir les yeux légèrement dans le flou c’est bien le logo de l’Addict Club qui clignote devant moi. Il y a un tas de voitures sur le parking, il doit y avoir du monde, j’angoisse. J’appelle Alex pour qu’il me confirme mon accès à la boîte. Je ne peux plus faire marche arrière, il vient d’acquiescer. Je suis partagé entre la curiosité, l’envie de découvrir et la peur. La lumière tamisée ne m’empêche pas de foncer droit vers mon but. Non, pas la belle brune là-bas avec sa mini-jupe et ses bas-résilles mais mon bon vieux Jack avec son acolyte Daniel’s sur le bar, coquins. 12 euros la conso, je suis tout de même content d’avoir bu avant. Par contre, la différence entre un bar normal et le bar libertin, 24

c’est qu’en plus de la conso, si t’as envie, t’as le gode qui va avec. ça n’a pas de prix ! J’observe. Autour du bar, une piste de danse, le patron aux platines, un fumoir et quelques accessoires coquins. Ambiance fruit de la passion, les « vas-y Francky c’est bon » commencent légèrement à m’oppresser. On m’interpelle au loin, une personne arrive. Gêné, je détourne le regard. Merde mais je le reconnais, j’ai pris un café en terrasse avec lui pas plus tard qu’hier... Il vient me serrer la main, là ? Ok, on discute, entourés de bas-résilles et porte-jarretelles. Il me met à l’aise et je me rends compte que c’est mon comportement qui m’emmène à faire des fixettes car finalement, la normalité est bien présente. Le regard des autres m’importe peu à ce moment-là et je me sens de plus en plus à l’aise grâce à cette clientèle. Vous vous demandez sûrement quelle conversation on a bien pu avoir, moi le

« Même le Cap D’Agde n’est plus ce qu’il était » nouveau, et lui le libertin aguerri. à l’Addict, les maîtresmots sont courtoisie et respect. Le libertinage, c’est aussi des conversations qui ne tournent pas qu’autour du sexe. Il faut discuter, ça fait partie des rites, il faut que les choses soient dites et de manière claire, tout ça dans un esprit très festif. On parle beaucoup et finalement on agit peu. Il y a une grande partie des gens qui vient comme dans un établissement


nocturne, pour boire un coup, pas nécessairement pour le sexe. On sourit, on charme, ce sont déjà les premières coutumes du libertinage. Dans le cas contraire, vous pouvez passer à l’acte dans « les coins câlins » où se trouvent douches et préservatifs, dans un état de grande propreté. Étonné de voir peu de monde en ce début de soirée, je comprends vite que la majorité des clients se trouve justement dans les « coins câlins » à l’étage. Ambiance. Mon pote me dit 59 25

qu’en haut, une femme a une expérience trioliste. Je monte. J’arrive et me retrouve nez-à-nez avec une salle verrouillée où se trouve un lit. Sur ma gauche, une salle de bain extrêmement bien entretenue. Des draps sont à disposition dans les « coins câlins ». Aux clients de les changer et de jeter leurs préservatifs usagés à la poubelle. Ce sont des règles communes connues des libertins. J’avance et aperçois une salle ouverte, propice au voyeurisme. Je me retrouve au


milieu de 5 ou 6 coins câlins. Bouffée de chaleur. « Mon pote, moi, je redescends ! » J’en profite pour sympathiser avec Joyce, la femme du patron, serveuse durant la soirée. Elle me raconte leur histoire et celle de l’Addict. C’est un couple de gens normaux, trente ans de mariage, un garçon et un petit-fils. Mais à une époque de leur vie, ils ont souhaité s’émanciper de la vie de famille et ressortir entre eux. à la recherche

du mari pour enlever la culotte de sa compagne, il accepte. Réjouissance. Elles se laissent aller et ce show lesbien ne me laisse pas indifférent. J’entends Marvin Gaye me susurrer à l’oreille Sexual Healing : « And when I get that feeling / I want sexual healing / sexual healing / oh baby, makes me feel so fine ». J’apprends à l’Addict que lorsqu’un couple de libertins se rencontre, c’est toujours un cadeau que son homme fait à la femme et inversement. L’homme offre à sa femme ce dont elle a envie, avec une ou plusieurs personnes. Les contacts avec les personnes choisies restent limités. La majorité des gens choisissent de se voir une seule fois, de peur de tomber amoureux. Ce sont généralement des rencontres d’un jour qui se passent bien mais se finissent rapidement. Un coup de foudre le temps d’une soirée. L’Addict est assez particulier car Alex et Joyce possèdent une clientèle relativement jeune pour ce genre d’établissement, d’une quarantaine d’années, envieuse d’une éclate d’un soir. Mais quel plaisir peut ressentir une femme au milieu de plusieurs partenaires ici ? Quel plaisir peut ressentir l’homme ?

« On discute entourés de bas-résilles et porte-jarretelles » d’un cadre adéquat où les personnes de 35 ans sortaient, ils étaient surtout dans l’optique de ne pas croiser leur fils dans la même boîte. Après avoir traversé la France entière, les boîtes libertines ont été l’endroit propice à leur désir de fête, à leur envie de voir « de belles personnes », agréables et de bons contacts. Leur premier désir n’était pas de vouloir à tout prix rencontrer mais « voir et s’amuser dans un cadre festif et accueillant ». Au début, ils n’avaient pas envie de rencontrer d’autres partenaires, ils étaient même assez réticents. « On avait juste envie de faire les fous ensemble ». Mais il faut savoir que les clubs libertins ne sont pas des clubs échangistes. C’est un endroit dans lequel votre femme peut s’habiller sexy sans prendre une main aux fesses, un endroit où un couple peut rester sans participer aux actes sexuels. « La courtoisie est cette partie du libertinage qui nous plaît ». Après avoir parcouru des kilomètres et lorsque leur paysage professionnel s’est dégagé, ils ont décidé de créer leur propre établissement libertin. « On est tombé par hasard sur cet endroit, qui se prêtait parfaitement à ce qu’on voulait faire. L’ancien lieu contenait déjà des chambres, des accès autoroute, un parking. L’établissement était L’Auvergnat, un hôtel qui faisait aussi restaurant. C’était l’endroit idéal pour nous, dans une Nièvre dépourvue de tout club libertin. On a ouvert en 2011 »

Alex m’explique que c’est du ressort de la soumission. Les femmes qui se retrouvent au milieu de plusieurs partenaires ont envie à l’instant d’être leur jouet. Elle se retrouve dans une situation à l’inverse du féminisme, elle a envie d’être une chose. Pour l’homme, c’est le plaisir de regarder sa femme jouir, « ce n’est certes pas un bouquet de fleurs mais c’est le cadeau qu’on offre à une femme » nous glisse Alex. À l’Addict, vous pouvez discuter avec les patrons, j’en profite

Joyce finit par m’observer : « Toi, t’es un petit joueur. Un conseil : la première fois, il vaut mieux que tu sois un chien fou. » Ah ! Ça y est, j’ai compris, il faut que je me libère. Pas le temps de dire ouf, je me retrouve invité par une femme et sa lingerie sur la piste. Corps de déesse, voix suave, les atouts de Pamela au fin fond de la Bourgogne, bingo. Me voilà chien fou sur la piste de danse. C’est parti mon pote, ce soir c’est ton soir, donne tout. Finalement, ce n’est pas désagréable de se faire charmer, de voir sa main atterrir sur les fesses d’une femme sans se prendre un aller-retour. Les contacts sont faciles, les gens se libèrent à l’Addict. à aucun moment, je ne me suis senti jugé ou regardé de travers. PAUSE ! Là c’est moi qui commence à voir de travers, je vais m’asseoir. À côté de moi, un couple, des habitués. Ce soir-là, c’est leur première expérience saphique. La femme n’avait jamais osé se déshabiller jusque là. La partenaire demande l’autorisation

donc pour parler sexe avec Alex. Que pense un gérant de boîte libertine de l’évolution du sexe dans notre société ? Le sexe sur Internet est un commerce lucratif : « Il s’adresse aux gens qui font ça en cachette. Cela concerne les hommes

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derrière le dos de leur femme, les adolescents. C’est pour les grands timides ». C’est un choix de vie : il y en a qui préfèrent vivre dans le rêve et puis il y a les soirées libertines à l’Addict pour ceux qui vont franchir le pas et découvrir ce qu’on ne trouve pas chez soi.

Si tu veux une expérience en club libertin, on te donne le vocabulaire pour parler comme un vrai, un bon, pour que tu sois in devant une nana en lingerie, plutôt que de bafouiller comme un puceau. Accompagnatrice - Lors de soirées couples, seuls les couples et les femmes non accompagnées sont autorisés. Certains hommes seuls peu scrupuleux trouvent une copine compréhensive ou une prostituée pour les accompagner : ce sont les accompagnatrices.

Et l’avenir de ce lieu dans tout ça ? Faut se l’avouer, le futur se trouve essentiellement sur Internet. Vous n’êtes plus obligés d’aller en club pour pratiquer le libertinage, il existe des sites pour ça. Payant, mais pas excessif, dans les 60€ l’année. L’avenir du sexe se convertit en quelque chose d’intimiste. « Même le Cap d’Agde n’est plus ce qu’il était » selon Joyce. Le problème lié à la fréquentation en baisse est parallèle à celui du milieu de la nuit. « Les clubs libertins ne sont jamais plus que des discothèques, on touche la même clientèle. Le problème financier est le même partout, on ne fait pas ça pour devenir riche. » En ce qui concerne l’Addict, du mardi au jeudi de 21h à 2h00, des hôtesses sont là pour vous faire découvrir des shows sexy, des danses, c’est ce qu’on appelle les soirées Strip Bar. Quant au vendredi, jusqu’à 4h du matin, l’Addict devient plus traditionnelle, ambiance discothèque. L’avenir de l’Addict réside dans les soirées à thèmes divers et surtout dans les soirées libertines du samedi soir. Alex finit par me donner quelques conseils pour être un parfait libertin et revenir découvrir ses soirées variées : « Il faut mettre sa peur de côté. Oser pousser la porte et emprunter le chemin inverse si ça ne vous plaît pas. L’expérience du club libertin est analogue à la découverte d’un restaurant. Vous payez, vous tentez et si ça ne vous plaît pas, vous n’allez pas vous forcer. Comment savoir si vous allez aimer les sushis si vous n’avez pas goûté ? Il faut prendre sur soi et aller à la découverte. » Si vous voulez jouer, goûter au plaisir et à la découverte, alors vous avez certainement au fond de vous l’envie cachée d’être un libertin.

Candaulisme - C’est le fait de prendre du plaisir à regarder son/sa partenaire coquiner avec une tierce personne (inverse de la jalousie). Célibertin(e) - Néologisme tout à fait personnel pour désigner les partagistes célibataires. Chien fou - La première fois qu’ils entrent dans un club libertin, certains hommes ont l’impression que tout leur est permis. Ils passent nerveusement de femme en femme, ne tenant pas en place. Code - Signalétique pour communiquer discrètement avec son ou sa partenaire, sans risquer de blesser la sensibilité des autres personnes présentes. Il peut s’agir de mots ou de gestes. Le signe plus important est celui qui veut dire « STOP ». Les adeptes de SM parlent de safeword (le mot qui sauve). Coquiner - Ce terme semble désuet a priori, mais avec l’expérience, on l’utilise naturellement. C’est moins sentimental que « faire l’amour », moins grossier que « baiser » et moins clinique que « coucher ». Côte-à-côtisme - Lorsque deux couples font l’amour côte-à-côte, sans qu’il y ait contact physique hors couple, ils pratiquent le côte-àcôtisme. C’est une sorte de mélangisme très édulcoré, une manière de pratiquer le partagisme sans devoir trop affronter la jalousie. Echangisme - Il y a deux définitions : 1. Terme générique qui regroupe les sexualités de groupe, mieux compris que le terme « libertinage ». 2. Opposition entre échangisme et mélangisme. Les échangistes pratiquent la pénétration « hors couple », tandis que les mélangistes échangent seulement des caresses (manuelles ou orales). La frontière entre mélangisme et échangisme est floue. Nous préférons le néologisme plus neutre : « partagisme ».

Je pars convaincu du fait que ce sont des personnes « normales », qui se délient de tous les dogmes dont notre société actuelle est remplie. Et finalement, ça fait du bien de nos jours ! Qu’est ce qui est le plus malsain : se cacher ou vivre sa sexualité de manière libérée ? Être devant l’entrée d’un club libertin, c’est avoir envie de découvrir quelque chose qu’on ne connaît pas, que beaucoup de personnes ne connaissent pas. Chacun fait c’qui lui plait ! // B.M. et V.B.

Exhibitionnisme - Plaisir de se montrer pendant l’acte sexuel (ou simplement nu(e) voire très dévêtu(e)). L’exhibitionnisme en public est réprimé par la loi, sauf, bien sûr, dans les clubs libertins. Femme seule - Les femmes seules sont très rares dans les événements libertins. Elles entrent souvent gratuitement ou à prix réduit. Elles ont accès à toutes les soirées sauf les soirées gay (gang bang, couples et mixtes). Ceci vaut pour les libertines, pas les prostituées. Homme seul - Ce sont les clients qui paient généralement plus cher que les couples l’entrée dans les soirées. Ils sont aussi sélectionnés sur leur apparence. Ils n’ont théoriquement pas accès aux soirées couples, mais seulement aux événements mixtes, gang-bang et trios. Libertinage - Terme générique qui désigne de manière très large un mode de vie basé sur le sexe libre et non exclusif. Nous préférons le terme «partagisme» qui regroupe toutes les sexualités plurielles.

« La partenaire demande l’autorisation du mari pour enlever la culotte de sa compagne, il accepte »

Mélangisme, mélangiste - Par opposition à « échangisme », les mélangistes ne se permettent pas de pénétration hors couple. Seules les caresses et fellations sont autorisées. Trio, Triangle, Triolisme - Trois personnes qui coquinent. Il s’agit souvent d’un couple additionné d’un homme ou d’une femme seule. On parle de « trio » ou de « partie triangulaire ».

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sl’habite atan blaspheme

par chablis winston, à besançon photos : Christophe Vaubourg / EDS

La Franche-Comté est une terre de contrastes. Bim ! Ça, c’est une phrase qui pose un début d’article. Je verrais bien André Dussolier la déclamer dans un reportage. Bref, la Franche-Comté a en son sein un nouveau culte qui glorifie l’Antéchrist dont on a vu fleurir les stickers sur la région. Très actif sur le net avec une petite pointe de cynisme, de j’menfoutisme, pas mal de convictions et des références auxquelles on n’a pas toujours tout compris. Rencontre avec un représentant de l’Église de Satan de Franche-Comté prêt à vendre son âme.

Ça existe depuis quand cette Église de Satan de FrancheComté ? 2013.

unité, en deux camps : l’un prétendant détruire l’univers et régner sur ses décombres, l’autre rêvant simplement de lui imposer un culte démoniaque dont il serait l’archiprêtre. Sinon il y a une ribambelle d’Églises façonnées par des proto-gothiques défoncés à la coke, avec leurs deux triangles accouplés en pendentif autour du cou. Pour eux, messes sacrilèges, maléfices et succubats sont la véridique quintessence du Satanisme ! Un programme aussi lisse que le cul d’un bébé.

Elle est où cette église ? Et pourquoi je te dirais ça ? Je sens venir l’entourloupe ! C’est une chose tellement importante, mais tellement importante, qu’elle doit rester secrète. Vous êtes une assos’ ? Écoute... Nous sommes à l’époque du recomposable : des corps recomposables, des relations sexuelles recomposées, des textes recomposables, des cultures recomposées. Démanteler les données pour nous intéresser à la seule conscience raisonnable qui est l’invraisemblabilité des choses. Alors franchement, déclarer des statuts à la Préfecture et publier dans un journal officiel, je préfère laisser ça aux lecteurs de Charlie Hebdo.

As-tu un rapport avec eux ? Non. Mais je peux causer « officiel »: l’esprit de Sat’ embrasse bien des champs, il y a la physiognosie qui concerne la physique occulte, statique, dynamique et cinématique, l’astrologie hermétique et l’astrologie biologique. Il faut ajouter la cosmologie, la physiologie, l’ontologie, ou l’anthropognosie qui étudie l’anatomie homologique, les sciences divinatoires, la physiologie fluidique, la psychurgie, l’astrologie sociale et l’hermétisme de l’histoire. Il est impératif d’étudier le maniement fluidique, l’alchimie, la spagyrie, la télépathie, l’exorcisme, la magie cérémonielle et évocatoire, la théurgie de base. Et pour l’occultisme, jetez un œil avisé sur les champs de la Kabbale primitive, brahmanisme et de la gymnosophie.

Y’a des messes noires ? Vous brûlez des poulets ? Vous sacrifiez des animaux ? Non, ces trucs-là ne sont que de simples anecdotes, des faits-divers découpés dans un journal, rien que des contes fatigués et des histoires véreuses, sans même l’étai d’une idée sur la vie ou sur l’âme qui les soutiennent. Tu veux que je te raconte quoi ? Que je lis l’avenir dans le sang menstruel des filles ? Vous vous prenez pas la tête avec des Églises plus « officielles » ? Y’a des fights ? La plus vaste de ces sociétés dont la fondation remonte à l’année 1855, c’est la Société des Ré-théurgistes Optimates. Elle se divise, sous une apparente

ça fait pas mal de références à maîtriser, non ? Pour le principe du mal, je dirais qu’il faut se familiariser avec les mystères de Belzébuth comme autodestruction, et de Satan

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ApĂŠro peinard, au soleil, sur la terrasse.


comme prince détrôné, d’Euronimus, de Moloch, incubes et succubes. Pour le principe, les mystères célestes de Saint-Michel, de Gabriel et de Raphaël et des agathodémons. Puis les mystères d’Isis, de Mithra, de Morphée, de Samothrace et d’Eleusis et les mystères naturels du sexe viril : phallus, Bois de Vie, Clef des Sciences, Baphomet, maillet. Les mystères naturels du sexe féminin : Cérès, Ctéis, Patère, Cybèle et Astaré… et bing dans ta gueule mon pote ! Alors comment définiriez-vous l’Église de Satan FC ? Je te le dis tout de go, on peut avoir de magnifiques idées d’organisation et des finalités très confuses. En premier lieu, faire preuve d’un idéalisme de ganache et d’une inanition de vieille fille exaltée par le célibat. Comme je te l’ai dit, il ne s’agit plus de défendre une cause, mais de la redéfinir. Ici, on cause misanthropie tant pour l’originalité du dessein que pour la hardiesse et l’ampleur du style. Comment redéfiniriez-vous donc cette cause ? On pourrait y voir une farce de nature festive pour ce qui concerne la pop culture et l’étrange. Mais nous nous targuons d’être un obscur pourvoyeur subversif de frivolité. Un mélange de bubble gum et de misanthropie austère. Si je me fie à ce que je trouve sur vous sur le net, vous faites de la musique aussi, non ? Je suis en mèche avec un one-manband de Besançon qui joue sous le doux pseudonyme de Désir de Mort. Ce que j’aime chez ce gars, c’est la vélocité dont il fait preuve et la hâte qui le tenaille pour regagner le cimetière au plus tôt. D’ailleurs, il sort un LP sous peu, sponsorisé par l’Église de Satan FC et par Gillette. Quel serait votre slogan ? Si tu ne peux pas affronter la sentence, ne commets pas de crime. Vous parlez souvent de vertu surévaluée. Laquelle vous le semble le plus ? La virginité. Votre film préféré ? Un justicier dans la ville avec Charles Bronson. Allez, plein de bisous avec une chaude haleine exaltant le puissant arôme du triple-six. // C.W.

Satan ? ça fait flipper...

« On pourrait y voir une farce de nature festive pour ce qui concerne la pop culture et l’étrange » 30



reportage par thierry blandenet, à chalon-sur-saône photos : t.b.

Port Nord de Chalon Retour sur le devant de la Saône

Le site du Port Nord, situé à l’entrée est de Chalon-sur-Saône, n’en finit plus de faire parler de lui depuis des siècles. De son rôle marchand à l’époque antique jusqu’à l’installation des différents acteurs culturels et patrimoniaux au début des années 2000 en passant par l’arrivée de l’Espace des Arts il y a quelques mois, le Port serait donc voué à une renaissance perpétuelle et à un nouvel essor imminent. Mais qu’en est-il réellement ?

Un port vieux comme Hérode (ou à peu près) Sans trop entrer dans la longue et passionnante histoire de la ville (n’est pas Lorent Deutsch qui veut), Chalon-sur-Saône, qui s’appelait au temps des romains Cabillonorum, fut un lieu d’intenses échanges commerciaux, idéalement situé au carrefour des pays nordiques et méditerranéens et ce dès le 1er siècle avant JC. Au fil des différentes époques, le port a toujours revêtu un rôle stratégique, véritable pouls économique de la ville. De Chalon, il était facile d’atteindre Paris, l’est de la

France, le nord ou même la Suisse et l’Allemagne par différents canaux. « Point de transit, point d’éclatement »1, Chalon doit donc beaucoup à son port où s’entrecroisent voie fluviale, voie ferroviaire et voie routière. Plateforme multimodale, cette zone dite industrielle marqua le dynamisme de la ville et de la région entière. Mais les meilleures choses ont une fin et le déclin surviendra suite à diverses raisons, dues essentiellement à la baisse d’activité du bassin minier et à un manque de place. Le port sud prendra le relais. Abandonné, l’endroit fut donc amené à devenir un repère pour l’imaginaire, un creuset d’idées, voire une légende urbaine.

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Tu y es, c’est marqué dessus.

Installations intactes et mouvement perpétuel

les trémies, les entrepôts, quelque peu rongés par le temps certes mais en état de marche. Un vrai village fantôme qui ne demandait qu’à revivre. C’est ainsi que le Port Nord devint la nouvelle coqueluche d’architectes, d’artistes et surtout un enjeu d’importance pour la ville, permettant des collaborations riches et foisonnantes de projets pour cette friche portuaire, un des symboles de Chalon-sur-Saône et gros morceau de son patrimoine à la fois industriel et culturel. En 2003, l’association Ritacalfoul, emmenée par Xavier Juillot, enseignant plasticien à l’École d’architecture Paris-La Villette, s’attacha à piloter un projet visant à long

À huit cent mètres du centre-ville, le vaste espace du Port Nord demeura longtemps comme un no man’s land, un peu dissimulé sous le tapis. Un lieu désert et tristounet où l’on ne traînait pas la nuit. L’objet encombrant dont on ne sait que faire malgré le potentiel. Car du potentiel, il y en a ! Toutes les installations et les bâtiments sont debout, même pas hors d’usage. Machines-outils, équipements portuaires, tout est là. Le visiteur se balade parmi les grues, les silos, 33


Le chapiteau de l’Espace des Arts.

terme un renouveau total du port, inscrit dans une urbanisation en pleine mutation, à travers des recherches et des travaux expérimentaux tant en architecture qu’en arts de tous poils. Une fois le déclic effectué, ce territoire isolé se mit à renaître de ses cendres, retrouvant progressivement une place dans le paysage chalonnais et tâchant de se fondre dans le décor plutôt que de demeurer une vilaine excroissance. Alors bien sûr, pas évident de dénicher un petit côté poétique à un silo ou à une grue, mais avec un chouia de bonne volonté et d’imagination, le miracle eut lieu. À partir de 2004, des spectacles de Chalon dans la rue se jouèrent là-bas, les grues et autres gros engins permettant des jeux de lumières intéressants. Deux ans plus tard, Ritacalfoul – dès lors indissociable du Port Nord – organisa une réunion en présence du maire de l’époque, Michel Allex, de Pedro Garcia de L’Abattoir, d’architectes et d’étudiants de l’école d’architecture La Villette ainsi que des beaux-arts de Dijon. Coordonné par Xavier Juillot himself, le débat portait sur l’avenir et la revitalisation du port fluvial. Entre temps, l’association L.E.U.R.R.E (Laboratoire EURopéen de Robotique Emotive) menée par l’ingénieur Mario Goffé expérimentait la robotique dans les arts de la rue. Une poétique de la robotique en quelque sorte avec un travail sur le mouvement, la mise en mouvement, particulièrement pertinent au milieu de toutes ces machines en sommeil.

Architecture et Moralité Et puis il y a l’Agence de Cohérence Territoriale, formée par l’architecte de Paris-La Villette, Kevin Théraud et Jonathan Goffé, ingénieur Arts et Métiers, tous deux investis depuis 2003 dans cette réhabilitation et la relecture spatiale du Port Nord. Plus précisément, « c’est une méthode de requalification qui est envisagée pour le port (…), s’appuyant sur son identité, ses singularités, son cadre urbain privilégié et le potentiel du site à héberger diverses activités... » Les architectes du port sont en quelque sorte le lien entre le côté purement technique et les propositions artistiques. Une plateforme de transmission entre les deux afin de transformer l’inertie actuelle propre aux outils et aux bâtiments portuaires en un territoire en mouvement et s’inscrivant dans le futur de la ville et de la région. En contrebas du Port Nord, la friche est idéalement située. À quelques encâblures de là se trouvent le Colisée et le Parc des Expositions, deux structures où se déroulent pas mal de grandes manifestations culturelles et sportives ; cent mètres plus loin, le centre-ville. Selon les architectes, ce lieu providentiel serait propice à développer « un carrefour universitaire » qui lierait « enseignement, innovation, recherche et industrie ». Un vaste projet pas si fou que ça au vu

de son évolution, bien avancée, et qui se traduit par la montée en puissance du collectif d’artistes La Méandre, qui occupe une partie du lieu, la présence du chapiteau de l’Espace des Arts durant les deux ans que dureront les travaux du bâtiment originel et le regain d’activité fluviale puisque le port est de plus en plus demandé par les compagnies des bateaux de croisière afin d’amarrer ceux-ci le temps de la saison hivernale. À n’en pas douter, Ritacalfoul et les archis de Paris-La Villette ont eu le nez creux et leur pugnacité a payé.

La culture, vecteur plus ? Mais est-ce suffisant pour redorer le blason de ce lieu hanté par son lointain passé glorieux aux yeux du Chalonnais lambda ? Pas sûr. Il reste encore beaucoup de défrichage à effectuer malgré le surcroît d’activité de la part de tous les acteurs participant à la reconstruction du lieu. Si au niveau touristique, industriel et architectural

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Le Golden Gate.

public que l’on y retrouve. Quant à l’Espace des Arts, si la qualité des spectacles proposés n’a pas faibli, le public traîne un peu la patte pour s’y rendre. La faute surtout à un flagrant défaut d’éclairage et de balisage qui dessert totalement le concept et qui fait encore assimiler le Port Nord à un lieu hautement alternatif.

E La Nave Va (dans le sens où la cohérence commence à devenir tangible par rapport au tissu urbain), le pari semble réussi, des difficultés demeurent quant à déplacer les foules pour un spectacle et ce n’est pas faute de redoubler d’effort du côté des artistes. La Méandre, par exemple, après être restée longtemps dans l’alternatif, a basculé du côté « officiel » de la force – sans perdre toutefois son âme alter – en accord, là aussi, avec les travaux et les expériences réalisés par les autres acteurs du site. Longtemps considérés comme marginaux, les membres du collectif se dévoilent plus clairement et enchaînent les projets artistiques dans un univers de bric et de broc tout à fait unique. L’installation de l’Espace des Arts n’y est pas pour rien. Le chapiteau rouge se devait d’agir comme un phare, un emblème fédérateur faisant du Port Nord un nouveau lieu couru de la culture chalonnaise. Malgré tout, le soir, l’obscurité domine. Les gens de La Méandre se plient en quatre pour animer avec intelligence et diversité les bords de Saône mais c’est souvent le même

Pour autant, ce raté n’est qu’un détail qui pourrait se régler facilement et il n’enlève rien à tout les efforts réalisés et les études menées depuis plus de dix ans par les différentes associations qui ont pris possession de ce territoire voué à mourir. Elément important, voire essentiel dans le paysage urbain de la ville de Chalon et dans sa trame patrimoniale, le port arbore petit à petit un visage plus lisse. Travail de longue haleine ayant nécessité des débats, des remises en question, des interrogations, la remise du Port Nord dans le circuit industriel, touristique, architectural et culturel semble désormais naviguer sur de bonnes eaux. Un nouveau souffle, assurément... ? // T.B. 1 in Historique du Port Nord, CCI, 1949 À lire pour avoir une vision détaillée du projet architecte : Chalon-sur-Saône avec les moyens du Port, par Olivier Hertz et Kevin Théraud de l’Ecole d’architecture Paris-La Villette.

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portrait

Les routes de Paradis

par sophie brignoli, à dijon photo : édouard roussel

Rencontre avec Simon Mény et Pierre Rousseau, la face pile et le côté face de Paradis. Ambassadeur d’une house chantée en français, le groupe parcourt la France en live pour une relecture grisante de leur album, Recto Verso.

beau » confie Pierre. « Brian Eno, quand on lui a proposé de travailler avec U2, au départ il n’aimait pas leur musique mais il en a tiré la conclusion qu’on peut créer les choses les plus intéressantes en travaillant avec des gens avec lesquels on n’est pas d’accord. » Bien qu’ils semblent être cul et chemise, les deux artistes ne partagent pas pour autant les mêmes goûts. Simon, le chanteur, vient plutôt de la techno, alors que Pierre, guitariste sur scène, est grand amateur de disco. Et parce qu’ils choisissent méticuleusement chaque mélodie, chaque mot, chaque phrase ensemble, il leur faut parfois des mois pour trouver le parfait équilibre entre leurs deux imaginaires. Ainsi ils vont passer près de trois ans sur la création du premier album. « On avait la liberté de faire ce qu’on voulait sur ce disque, et nous étions très attachés à l’idée de proposer un format long, de raconter une histoire » insiste Simon. En 2014, ils rejoignent la maison Barclay, et bénéficient du soutien d’une grosse équipe pour la production de l’album. « Au bout d’un an de travail, nous avons envoyé un premier jet à Barclay. Ils se sont vite rendus compte, en bonne intelligence que ça allait être beaucoup plus long que prévu, mais en tout cas ils ont compris l’album et ne nous ont jamais bridés » se souvient Pierre. À sa sortie en septembre 2016, Recto Verso est salué par la presse. La simplicité des textes et son enrobage électro font mouche également auprès du public. Il n’y a qu’à voir les 5 premiers rangs du public pendant leur concert, clamant les paroles des tubes, pour finir de s’en convaincre. Pourtant, les textes ne sont pas aussi naïfs qu’ils y paraissent. Tout comme la musique, ils soulignent la dualité des choses, l’envers et le revers, le « moi » et le « toi ». « La diction était quelque chose d’important dans les années 80, qu’on puisse comprendre les mots, qu’ils soient honnêtes, qu’on les entende (…). On aime les mots simples car ils sont accessibles, mais c’est hyper compliqué d’arriver à des choses simples, que le morceau puisse être compris par des gens très différents, qui n’ont rien en commun. Ce n’est pas une démarche marketing, nous on trouve ça beau » lâche Pierre. « C’était quoi la phrase de Tracey Thorn déjà ? So much work to seem so effortless ? » demande Simon. L’artiste anglaise, moitié de Everything But the Girl est une des références du duo. Et quand on réécoute Missing, le tube de 1994, la filiation semble évidente.

C’est lors de leur passage en février dernier au Consortium pour le festival GéNéRiQ, que nous les avons rencontrés. Installés dans l’énorme canapé d’angle des loges, les deux membres de Paradis viennent tout juste de sortir de scène. Simon, 31 ans, le plus réservé des deux, est vêtu d’une chemise et d’un pantalon de costard. Il s’est installé à la droite de Pierre, 26 ans, à l’aise dans son T-shirt oversize et sa paire de jeans. Bien qu’ils ne se ressemblent pas physiquement comme des frères, on capte une franche complicité entre les deux. Ils se sont vus pour la première fois en 2010 à Paris, lorsque le premier est passé dans le concept store où travaillait le second. Peu de temps après, ils se sont retrouvés lors d’une soirée au cours de laquelle ils ont longuement parlé musique. Dès le lendemain, Pierre est allé chez Simon pour essayer ses machines et commencer à produire avec lui. Paradis était né. « Avant même de se connaître, on s’est mis à faire de la musique ensemble, notre amitié s’est construite là-dessus » raconte Simon. À l’époque, Pierre étudie les sciences politiques à Londres alors que Simon lui, travaille à Paris. Pourtant, malgré la distance et au bout de six mois de collaboration, le duo a déjà un morceau de prêt. Ils décident d’envoyer le titre Je m’ennuie à plusieurs pros, dont l’animateur radio et DJ new-yorkais Tim Sweeney. « Il a été le premier à nous contacter, on espérait simplement qu’il le passe dans son émission, mais on ne savait pas du tout qu’il avait un projet de label » se souvient Pierre. Emballé par la maquette, Tim Sweeney les rencontre à Paris et leur propose de devenir la première signature du label naissant Beats in Space. Il va également les encourager à continuer de chanter en français. Paradis va alors sortir ses deux premiers maxis en 2011 et 2012 sur le confidentiel BiS. Paroles légères, chantées façon années 80 sur de lourdes rythmiques house, le son de Paradis est déjà bien en place. Sortie en 2011, la reprise de La ballade de Jim de Souchon va notamment réconcilier variété française et musique électronique. « Notre idée, c’est une confrontation, pas au sens négatif du terme, mais plutôt pour faire quelque chose de

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Une sorte d’idéal imaginaire de ce qu’est réellement la chanson française. « C’est vrai qu’en terme de musique, les groupes qu’on aime aujourd’hui sont très influencés par les années 80 – 90, et nousmême beaucoup ! Nos groupes de pop préférés sont de ces années-là » reconnaît Pierre. Mais malgré le succès de l’album et de l’actuelle tournée, Simon et Pierre n’admettent toujours pas leur réussite incroyable du moment. « On est tous les deux très critiques de notre travail, et ce trait de caractère ne nous permet pas d’être satisfaits » reconnaît Pierre. « On a aussi vraiment pris conscience de ce qu’était un concert, il y a seulement un an. De ce qui était attendu de nous, à la fois d’interpréter et d’incarner quelque chose, de pas être juste dans la reproduction de notre disque. » Au début de Paradis, ils ne se produisaient qu’en DJ set, et comme ils ne passaient jamais leurs morceaux ils avaient souvent les retours d’un public frustré. Depuis plusieurs mois, ils tournent avec deux autres musiciens, leur permettant d’enrichir en live la section harmonique avec une guitare et de rendre plus vivante les rythmiques grâce à l’apport de la batterie. Deux instruments qui n’existent pas sur disque. « L’idée de cette formule à quatre était de pouvoir proposer une interprétation de notre musique, basée sur notre capacité à se faire plaisir » sourit Pierre. « C’est bizarre de dire ça sur un ton sérieux : à se faire plaisir ». Au-delà de la dimension chanson très forte de leur univers, les Paradis portent également une attention toute particulière au traitement visuel du projet.

Pierre/Simon - Richard Cocciante/Jean-Jacques Goldman

Tous les deux fans de photo, ils ont confié depuis trois ans l’image à Andrea Montano, véritable troisième homme du groupe. Avec sa vision très esthétique du détail (on pense à la pochette de l’album où Simon et Pierre jouent dans la mer), son travail se fond parfaitement dans l’ambiance doucement mélancolique de la musique. Il a d’ailleurs co-réalisé les deux derniers clips sortis - Toi et Moi et Recto Verso - avec Pablo Padovani, monsieur Moodoïd, autre mordu d’image. « Un clip peut vraiment sublimer un morceau, mais ça reste un exercice délicat, qui donne le vertige » confie Simon. Toujours prudents et minutieux dans leur quête du beau, les deux artistes affirment chercher d’abord une forme d’apaisement dans leur travail. « C’est une sorte de thérapie, et même si la question de l’évasion est hyper contestable, on a réussi à faire des choses ensemble nous permettant de faire abstraction du reste » affirme Pierre. Il y a quelque part une approche assez naïve dans leur travail, une sorte d’idéal imaginaire de ce qu’est réellement la chanson française. Un traitement qui s’explique sans doute par la relation particulière que Simon et Pierre entretiennent avec la France. Ayant tous deux grandis à l’étranger - l’un entre l’Argentine et le Portugal, l’autre en Angleterre - ils ont longtemps idéalisé ce pays qu’ils ne connaissaient que par le prisme des vacances. « Le simple fait de parler le français, c’est une madeleine de Proust pour nous, un truc de vacances, de famille, d’héritage. D’ailleurs le projet Paradis est assez magique pour moi, parce que j’ai toujours l’impression d’être en grandes vacances, mais studieuses » s’amuse Pierre. En fin de compte, leur musique c’est un peu ça, une vision romantique des vacances, ou l’on prendrait le temps pour soi et pour l’autre, le temps de se dire des choses essentielles. // S.B.


agar agar, le gél rencontre

Retour sur un groupe que l’on a découvert en 2016, et avec qui il faudra compter en 2017. Entrevue avec Clara et Armand du groupe Agar Agar, sur leur début de carrière fulgurant, autour d’une bière, avant leur concert à Dijon en décembre dernier.

Vous n’avez pas peur d’avoir une mise en avant super forte dès le début et que ce soit un truc éphémère ? Que les médias vous en demandent trop, tout de suite ? Clara : C’est forcément ce à quoi tu penses, quand justement tu as une espèce d’éloge d’un coup alors que tu as sorti 5 tracks. On s’attendait pas du tout à ça, on fait de la musique sans se prendre la tête. On fait nos « bails » et c’est tout. Armand : On pense pas au succès et c’est pour ça qu’on n’a pas trop peur. C’est pas quelque chose qui nous intéresse foncièrement, après c’est cool parce que cela nous permet de tourner et cela te pousse à t’améliorer aussi. Après on verra, on va continuer à faire notre musique, à creuser dans les directions que l’on veut.

J’ai vu que vous aviez sorti un EP en octobre dernier, on sait que le projet est récent mais ça a commencé quand en vrai Agar Agar ? Armand : Pour de vrai, je dirais que notre premier concert vraiment sérieux c’était en octobre 2015. Tu peux nous expliquer la genèse du truc, comment ça a commencé ? Armand : On est tous les deux aux Beaux-Arts de Cergy, dans la même promo et sur un coup de tête on a essayé de faire de la musique ensemble pour le pot départ à la retraite de notre bibliothécaire. On s’est posés chez moi, on a branché les machines. On a commencé à faire de la musique et puis on s’est dit que ça collait bien. On a donc fait 3 morceaux, dont 2 en maquettes que Cracki Records a écoutés. Ils nous ont dit : « Allez-y, passez aux choses sérieuses ! »

Hormis votre talent certain, on l’a évoqué un peu au préalable, il y a Cracki Records, un label parisien qui fait beaucoup parler de lui ces derniers temps. Ça s’est passé comment la rencontre ? Comment se sont-ils investis dans le projet ? Armand : On a un pote en commun à Cergy, aux Beaux-Arts, qui m’a encouragé à continuer. La rencontre s’est faite de façon hyper naturelle. Clara : à la base, on n’avait pas de nom, et leur façon à eux de nous pousser, c’était de nous proposer des dates et de nous dire : il faut trouver un nom et bosser. Il y avait un peu cette urgence : cette obligation de trouver un nom et de taffer le live. Armand : C’était pas vraiment une obligation, car on aurait pu refuser, mais comme ça nous sauçait, on y est allé !

On va parler un peu de l’EP, c’est votre actu chaude, l’accueil du disque est assez dingue, vous êtes largement chroniqués, il y a eu des lives radio, comment vivez-vous ce succès fulgurant ? Armand : Déjà Cracki, notre label, bosse bien. Ils ont un super service com’ ! Non plus sérieusement, c’est cool de pouvoir jouer un peu partout, devant un public différent à chaque fois. Clara : C’est une belle chance que l’on a, l’expérience est incroyable à chaque fois. Après, c’est un buzz, on sait pas si ça va durer.

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par franck le tank, À Dijon illustration : lÊa zamolo

lifiant pop


Je trouve que votre son est clairement influencé par les 80’s. Est-ce que ça vient d’une nostalgie, la volonté de faire un revival, ou tout simplement une explication technique avec l’utilisation de matériel d’époque ? Clara : On écoute énormément de choses mais on n’est pas des fans éperdus des 80’s. On ne s’est pas dit : « on doit sonner comme ça ». Il se trouve que le matériel, notamment les claviers donne cette couleur au projet. Armand : Il y a d’ailleurs un des claviers que l’on retrouve sur tous les morceaux qui est très typé 80. J’arrêterai peut-être un jour de l’utiliser. C’est mon premier clavier polyphonique qui date de 82 ou 83 et que j’ai depuis hyper longtemps. Comment ça se passe au niveau de la composition ? Vous scindez le travail en faisant de l’écriture au préalable ? Clara : On improvise beaucoup, Armand me propose une mélodie et moi je vais chanter dessus. En aval, je vais écrire des paroles. Mais à la base on fait la structure à deux. Armand : Dans tous les cas, on compose à deux. Du coup, comment ça se passe au niveau des textes ? Clara, écris-tu sur une thématique connue ? Clara : Dans l’évolution du projet, on aimerait créer un concept, une grande histoire, avec plusieurs chapitres. Mais là, comme ça fait peu de temps qu’on écrit, je donne une idée d’histoire et Armand valide ou me propose un autre sujet. Et après, je vais me mettre à écrire le chant en anglais. Pourquoi le chant en anglais est-il privilégié ? Clara : J’ai commencé à faire de la musique aux USA, à 15 ans, j’étais timide, je vivais dans une famille d’accueil où je me faisais trop chier. J’étais bénévole dans un bar et je me suis dit qu’il fallait que j’apprenne à faire de la scène. Alors une fois par semaine, je faisais un show devant deux personnes. Mais je m’en foutais, c’était plus pour être à l’aise sur scène. Avec cette expérience américaine, j’ai vachement écrit en anglais, j’ai essayé en français mais je n’y arrive pas. Je trouve que j’ai pas la même voix quand je chante en français. Quel est l’enseignement que vous retirez des Beaux-Arts dans votre travail avec Agar Agar ? Armand : Les Beaux-arts, ça crée, pour le meilleur et pour le pire, un complexe du concept. Le complexe du control freak sur l’idée que l’on veut intégrer dans le projet avant même d’avoir mis les mains dedans. On nous apprend à « surpenser » le projet, ce qui peut être très positif ou très négatif. La pensée dépasse parfois la forme et c’est un défaut, d’ailleurs, de l’art contemporain aujourd’hui.

Comment s’est passé l’enregistrement du disque ? Clara : On a enregistré des démos à la base et Cracki nous a envoyé dans une maison en Normandie, chez un mec très gentil qui s’appelle Alain et qui enregistre plein d’artistes chez lui. Il nous a enregistrés pendant 3 jours. Ah ouais, donc plus ou moins du one shot. Vous vous êtes sentis comment avec l’exercice du studio ? Armand : Le premier EP était composé pour être joué en live, du coup ça avait plus de sens de faire des prises en direct sans trop de fioritures. Il y avait un état d’esprit très traditionnel dans l’enregistrement. Par contre, pour le prochain EP ou album, je pense qu’on fonctionnera différent. Il y aura des morceaux avec une approche live tandis que d’autres seront plus travaillés en studio, finement, à la recherche du timbre parfait. Pour finir on va parler du turfu, l’avenir d’Agar Agar en 2017 c’est quoi ? Une tournée, un album ? Armand : ça avance tranquillement, on sait pas si on va faire un EP ou un album. Clara : Il y a la reprise du morceau de Demon, You Are My High 1, qui était une commande d’Arte. On l’avait enregistrée en field recording dans une boîte vide et on est en train de la ressortir. // F.L.T. 1

Chanson disponible sur le soundcloud de Cracki Records.

Les Beaux-arts, ça crée, pour le meilleur et pour le pire, un complexe du concept. Le complexe du control freak » «

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La Reine légende

par george deep, à dijon photos : Alexandre claass


des neiges Il y a des lieux et des instants uniques qu’un enfant devenu adulte n’oubliera jamais. Les premiers pas sur la plage, le premier rayon “saloperies sucrées” dans un supermarché, les premiers pas dans le couloir de la mort de son école, la première fois au zoo, la première fois dans son slip... Moments magiques ou pas du tout. C’est l’ensemble de ses expériences qui construisent un homme. Rencontre avec l’univers de la glace en pays dijonnais. Pas ton premier sorbet deux boules vanille mais la découverte d’un endroit de rêve adossé à la colline de Montmuzard. La patinoire municipale Trimolet. Prends ça, le lac Kir cet hiver.


A

ujourd’hui le Zénith, la piscine olympique, l’Auditorium ou très bientôt le stade Gaston Gérard, trônent fièrement au firmament des équipements sportifs et culturels de la capitale burgondocomtoise. Mais la daronne du coin se situe sur le boulevard Louis Joseph Trimolet qui lui a, par la même occasion, donné son nom. Pour info, le Louis Jo était un peintre, graveur et lithographe parisien du 19ème. Le siècle, pas l’arrondissement. Inaugurée en 1972, la patinoire municipale est un monument historique pour les plus jeunes lecteurs de ce magazine. Elle a survécu à toutes les transformations architecturales et à tout l’aménagement 2.0 de notre bonne vieille cité. Pour les sports de glace, une fois passé la porte, tu comprends vite que la municipalité du coin a préféré mettre ses billes pour une installation éphémère en centre-ville qui ravit les enfants des gogos du marché de Noël. Tu t’es cru à Chamonix ou quoi ?

Je rêve où Pascal est en train de pelotter grossièrement Sophie ?

L’âge de glace.

Ici, rien n’a changé depuis mes premiers pas dans les années 80. Et quand je dis rien, c’est rien. Tout est dans son jus. Hormis le personnel et le portillon électronique de l’entrée, la patinoire est restée fidèle à l’image que je m’en faisais. Un énorme hangar frigorifique où la température avoisine les -5° C. Of course. Vestiaire à l’odeur sympathique de vieilles chaussettes. Casiers à l’ancienne pour louer tes patins où tu flippes toujours de retrouver des vieux godillots pourris à la place de tes baskets flambant neuves. Le sol des travées et des couloirs est toujours un puzzle de plaques en mousse polyuréthane qui joint


Alors... Ça se la craque à la patoche ?

l’utile à l’agréable. Soyeux. Pour les tribunes, c’est du Lego Technics 18 ans et +, tu fais confiance au mécano en chef qui a assemblé l’échafaudage à la construction du lieu. Si t’es victime du syndrome de Furiani, oublie. Pour la glisse, la « patoche » de Dijon propose deux espaces. La grande, zone de non-droit et la petite, la zone tout simplement. Comme au collège, l’infirmerie ne désemplit jamais. La glisse c’est pas inné quand t’es pas né au Québec. Côté ambiance musicale, si t’es friand du clubbing à l’ancienne tu ne seras pas déçu. Pour les mélomanes faudra repasser. Face à tant d’agitation, tu peux toujours te ressourcer au bar avec une vue imprenable sur la grande patinoire. Étonnamment pour un lieu dédié aux pratiques sportives, tu peux te la coller pépère en attendant ta progéniture les deux pieds sur terre. Rassurant.

Holiday on ice.

Au commencement ils n’étaient qu’un. Le Club des Patineurs et des Hockeyeurs Dijonnais regroupait toutes les activités sportives pratiquées sur la glace. Fondus de la glisse, amoureux du triple boucle piqué et manieurs de rondelle réunis sous la même bannière. À chacun son plaisir. Aujourd’hui, trois

clubs distincts ont émergé : le Dijon Hockey Club, le Speedy on Ice Dijon Bourgogne et l’Académie des Sports de Glace Dijon Bourgogne. Tu remarques comme moi que la fusion des régions n’est pas encore passée par là. Récemment les Ducs ont tenté un rapprochement avec nos voisins bisontins. Ils ont déserté le temps d’un match de championnat leur patinoire fétiche. Exil en Franche-Comté, Besançon, où se trouve une « vraie » patinoire. What the fuck ! Les Ducs aimeraient bien une nouvelle patoche à Dijon, mais apparement ça clashe avec la Mairie qui ne veut pas cracher au bassinet, question de choix. Affaire à suivre... En tout cas les hockeyeurs dijonnais côtoient le plus haut niveau depuis belle lurette. Public nombreux et grosse ambiance à tous les matchs. Du spectacle à l’américaine aux portes de chez toi. Mec encastré contre la balustrade, palet virevoltant d’une crosse à l’autre, but en cascade et équipements de stormtrooper. Clairement le show sportif le plus fun de l’agglomération. Âme sensible s’abstenir. En 1992, la patinoire accueillait la flamme olympique en prémices des JO d’hiver d’Albertville devant deux mille spectateurs surchauffés. Les porteurs de flambeaux se nommaient Sophie Moniotte et Pascal

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Avec ces pompes, tu rentres tranquille en boîte.

Lavanchy, fers de lance de l’académie de patinage locale. Ils devinrent vice-champion du monde en 1994. Du lourd dans le monde merveilleux de Philippe Candeloro et Nelson Montfort. Une immense affiche à leur effigie habille toujours l’un des mur du palais des glaces. Photo frigo. À Dijon, les téméraires de la glisse peuvent également connaître leur heure de gloire. Un centre de haut niveau et un pôle Espoirs de patinage de vitesse furent créés en 1995. Ni une, ni deux, Bruno « Speedy » Loscos devint septuple champion de France au début du nouveau millénaire. Ça pèse.

Teenage movie.

Depuis la nuit des temps, la patinoire est aussi ce lieu de rencontres pour adolescents en recherche d’amourettes du samedi après-midi. Ici place à la vie réelle, t’impressionnes pas les filles avec ton nombre d’amis Facebook ou tes Snapchat pourris. Le jeune, tel un cygne au moment de la parade nuptiale, s’évertue à montrer à sa promise qu’il est né avec des patins aux pieds. Freinage borderline, slalom à deux mille à l’heure entre les novices de la glisse et tour de piste main dans la main avec sa

dulcinée. Combo ultime pour rouler un... patin. Le site ne désemplit pas de toute la saison. Climax pendant les vacances de Noël. 600 personnes recensées à l’entrée. C’est l’embouteillage sur le tour de piste. Toujours dans le même sens trigonométrique, toujours, toujours ? Attention aux fautes de carre dans cet univers impitoyable. Ta rencontre fortuite avec la glace pourrait te coûter un séjour imprévu chez les voisins idéalement placés du CHU. Bien vu. La sonnerie résonne. Pendant la pause des matchs de hockey. Quand la glace n’est plus praticable. Les immenses portes du fond s’ouvrent. Instant ultime de communion. Les yeux des petits et des grands s’écarquillent. Silence absolu. La dameuse entre enfin en piste. Reine des neiges. // G.D. 46

Trophée Andros pour la dameuse.



par laëtitia déchambenoit, à crissey illustrations : benjamin moutte

BFC Les voyants sont au vert

paranormal

Entre Madame Irma et Mère Teresa, il y a Suzanne Langlet à Crissey, en périphérie chalonnaise. 9ème d’une famille de 11 enfants, elle avoue volontiers qu’on a tous de l’intuition mais pour elle, c’est son métier. Elle se déplace dans toute la France, consulte à domicile ou par téléphone. Pas de boule de cristal mais 24 ans de voyance et de cartomancie au service de ceux qui veulent défier le temps et connaître l’histoire avant la fin du bouquin. Et grâce à ses super-pouvoirs, elle nous prédit l’avenir de la Bourgogne-Franche-Comté. Vous ne vous trompez jamais ? Il y a une marge d’erreur. Mais ce qui me rassure c’est que ma clientèle vient chercher du réconfort. Elle a besoin d’être rassurée, parce qu’on est dans un monde un peu « olé olé ». Je ne suis pas psy, je ne suis pas Pôle Emploi ou la Sécu mais je fais de mon mieux. J’ai parfois tout arrêté. Par exemple, quand ma mère est morte un mois après que je l’ai prédit. Je n’en pouvais plus, j’avais peur, ça devenait terrible.

Comment devient-on voyante, il y a des écoles pour ça ? Non, je suis autodidacte. Dès l’âge de dix ans, j’ai commencé à faire des rêves prémonitoires. Je ne savais pas quoi en faire et je me sentais un peu décalée, incomprise. Jusqu’à ce que les choses que j’avais vues se réalisent et qu’on me prenne plus au sérieux. Vers 16 ans, j’ai commencé à m’amuser avec des cartes. On me demandait si je pouvais lire l’avenir et je leur répondais sur la base de mes ressentis. Puis j’ai trouvé une annonce dans un journal. J’ai envoyé le coupon-réponse avec ma date de naissance et mon nom à quelqu’un dans le sud et cette personne m’a répondu que j’avais un don ! Je n’ai jamais rencontré cet homme mais il a suivi mon parcours et m’a dit de chercher ce qui me correspondait le mieux. J’ai testé le pendule, la radiesthésie, les cartes mais c’est dans la voyance que je me suis sentie le plus à l’aise ! Et ça fait 24 ans que c’est mon métier ! Quand j’étais ouvrière chez Schneider Electric, 1.000 emplois ont été supprimés. On m’a passée en VSD (vendredi-samedi-dimanche) et ça m’a permis de commencer à faire ma voyance le reste de la semaine.

Etre médium, c’est un don ? C’est un phénomène paranormal avant tout, une chose inexplicable. Tout au long de ma vie j’ai eu des manifestations invraisemblables. J’ai eu des visions et des intuitions précises, prédit des événements. Suite au décès de maman, on m’a contactée pour me dire qu’elle avait des messages à me transmettre. C’était une expérience de fou, j’ai fait venir des médecins, des kinés pour assister aux séances d’écriture automatique. ça fait peur parfois. Je suis très terreà-terre et on a tous plus ou moins de l’intuition. Mais parfois je suis contente de me lever et de ne plus me souvenir de mes rêves ! Des médecins m’envoient des patients. Je travaille avec des hypnothérapeutes, des magnétiseurs, des acupuncteurs. Je pense qu’il y a des choses impalpables et irrationnelles et qu’il faut les accepter. Et si c’est un don, j’ai envie de le partager avec les gens qui ont besoin de réponses.

Comment se déroule une séance ? Je travaille à la fois sur le passé, le présent et le futur, le fil se déroule ensuite. J’utilise des cartes, mais pas systématiquement. C’est en fonction de la personne, ça dépend de comment je me sens ou de comment la relation se met en place. J’aime écouter les gens, les voix me renseignent. Je ne sais pas exactement comment décrire ma pratique : clairvoyance, médiumnité, clairaudience… Je perçois des choses avec les dates de naissance et les prénoms, même par téléphone. Je vois parfois dans la pièce quelqu’un qui a compté pour la personne et je transmets des messages, je permets aux gens de faire leur deuil comme ça. Mais je ne suis pas Dieu et si je suis bonne pour quelqu’un, je ne le suis pas forcément pour tout le monde.

Qui vient vous consulter ? Il n’y a pas de règles, les gens viennent d’un peu partout. Beaucoup d’hommes d’affaires me consultent, il n’y a pas que des cas soc’ ! J’ai eu des politiques. Maintenant je refuse parce que ce ne sont pas les meilleures personnes que j’ai rencontrées. Certains attendent de nous qu’on soit des magiciens mais souvent, les gens connaissent leur problème. Comme je dis : « C’est pas quand on a fait dans la culotte qu’on demande à aller aux toilettes… » Le monde a changé. On sent de plus en plus de gens à la dérive. Je pourrais être pendue jour et nuit au téléphone. 48


On vous a déjà qualifiée de charlatan ? Non, mais de « sorcière bien-aimée ». On me demande parfois si je fais des travaux de sorcellerie et je réponds « le travail, c’est vous qui allez le faire ». Je vais juste vous accompagner avec mes éclairages. Je n’ai pas l’impression d’être une arnaqueuse. Je ne solutionne pas tout, mon job c’est d’aider les autres. C’est une sorte de thérapie d’accompagnement. Il suffit parfois de dire « il fait beau » pour que le monde apparaisse différent.

Et les sceptiques, vous leur dites quoi ? Libre à vous de croire ou non ! Je n’ai rien à prouver. Je m’amuse un peu du comportement de certains, parce que les gens qui n’y croient pas ne sont pas les derniers à venir me consulter. C’est un peu comme l’horoscope : les gens le lisent même s’ils ne sont pas convaincus et quand il annonce de bonnes nouvelles, ils y adhèrent ! 49


« J’ai eu des politiques, maintenant je refuse parce que ce ne sont pas les meilleures personnes que j’ai rencontrées »

Les nouvelles technologies vont servir de bonnes valeurs. Mais il faudra trouver les bonnes personnes et revenir à des choses simples et concrètes pour avancer. C’est un travail de fourmi qui va payer. Dans mes voyances, le travail revient souvent. Il va falloir former des gens et être prêt à bouger ! Il faudra du temps, le Français en a besoin pour s’habituer aux changements. Mais la BFC va refleurir, grâce aux mélanges des terroirs et aux échanges. Je ressens une grande reprise, même s’il y aura de nombreuses manifestations ou colères. Je ressens qu’on va avoir des talents dans le sport. Des champions de France. Et au niveau national, je sens qu’on va reprendre nos valeurs monétaires individuelles. L’Euro va se transformer. Ce ne sera pas un Brexit mais peut-être une nouvelle devise comme un Franc-Euro. On arrivera à des transformations au niveau européen. Des guerres civiles approchent sans doute mais nous sommes protégés. Attention néanmoins à une pollution des eaux, c’est quelque chose qui me travaille.

Mais vous êtes payée pour vos voyances ? Je dois vivre, comme tout le monde. Mais je suis une mauvaise commerciale, je ne fais pas revenir les gens à tout prix. Il faut qu’ils prennent le temps de comprendre les choses. Si on mettait plus de bienveillance dans le monde actuel, ça irait peut-être mieux. Je préfère qu’on vienne me voir en me disant qu’on n’a pas d’argent pour la consultation plutôt que les gens peu scrupuleux qui partent en prétextant qu’ils ont oublié leur portefeuille.

On peut s’attendre à des scandales en BFC ? Il y en aura des scandales, pas d’inquiétude. On en parle peu mais vous serez surpris. Des coups de théâtre politiques. // L.D.

Vous vous sentez responsable des prédictions que vous annoncez ? Je ne suis pas un miracle ambulant et je ne suis pas là pour aller dans le sens des gens, je leur dis seulement ce que je ressens. Ceux qui me consultent sont à l’affût du moindre détail. Souvent ils parlent plus que moi ! Ils me demandent quand les prédictions vont se réaliser précisément mais on ne palpe pas l’espace temps ! Je me suis retrouvée parfois dans des situations étranges : au commissariat de police, sur table d’écoute ou consultée dans des cas de disparitions.

« L’avenir de la BFC ? Il y aura des impossibilités et de nombreuses manifestations ou des colères »

On aimerait bien savoir ce qui va se passer pour la Bourgogne-Franche-Comté. Vous savez quelque chose? On est sur des grands bouleversements. Chez nous, on est entre deux sphères : l’ancienne, ancrée dans le passé, restée sur des lois napoléoniennes obsolètes et archaïques, et la nouvelle génération, une jeunesse créative et qui veut s’en sortir. On n’était pas prêt pour la fusion des régions.

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VOS ÉMOTIONS

EN LIVE

Le Cèdre - Chenôve Samedi 1er avril - 20h Dimanche 2 avril - 17h

Opéra de Dijon - Grand Théâtre Vendredi 9 juin - 20h Dimanche 11 juin - 15h

porté par le

: 7 1 0 2 EN

É JULIEN DORFRANÇAIS DU RAP L’AGE D’OR ENCE SOPRANO QUINTESS FERRARI PLACEBO MY SAEZ JERE BONAMASSA JOE BLACK M S IR A S E D CAPÉO IO BOULEVARD D U A L C M VIANNEY IA ...

/zenithdijon

@ZenithDijon


diaporama par MARTIAL RATEL, à dijon PHOTOS : alexandre claaSs

play again Billard électrique. Comment, dans les années 1950, a-ton eu l’idée de traduire le mot « pinball » par « billard électrique » ? En même temps, dans cette dénomination assez approximative se trouve toute la saveur vintage de cet objet en voie de disparition. Les années 1980 et la découverte du monde numérique de bistrot, via les arcades Pacman, ont fini par ringardiser l’objet. Les années 2000 sonnent le glas de la machine à quatre pattes, gloutonne de pièces de 5 F et 10 F. Dorénavant, on fera du LAN et du FPS à la maison. Pourtant, de petits espaces de résistance existent encore. Des endroits où l’on peut toujours donner des coups de savates dans la machine, secouer les bumpers, claquer, tilter… Essayez de faire ça avec votre console. À côté des baby-foot, le flipper était le prince des rades années collège et lycée. Qui n’a pas

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séché pour ou à cause d’une extraball ou d’un highscore espéré ? Les highscores d’ailleurs, ce listing énigmatique en avance sur Twitter : trois lettres seulement pour trouver un blase, passer un message... On a traîné quelques bars à Dijon qui ont le bon goût d’offrir ce plaisir à leurs clients. On aura croisé quelques passionnés qui pratiquent encore très régulièrement, ceux-là mêmes qui trustent les tableaux d’honneur, et qui nous ont donné de bons conseils pour dompter les machines. En moyenne, ce reportage nous a coûté 5 euros de consommation, pour une demi-heure par établissement. On aura claqué 5 ou 6 fois, chopé une loterie et tilté 2 fois. Mais surtout on aura retrouvé le goût de la fourchette et la beauté des leds et diodes de ces billards dorénavant... électroniques. Winner don’t use drugs. // M.R.


Le Point d’eau, 71 rue jeannin Game of Thrones. Flipper d’un certain niveau. Le principe : clôturer toutes les familles de la série. Le flipp’ est doté d’un gros bouton supérieur pour augmenter son bonus et d’un jeu de baston 2D, épée contre hache. Le higshcore, c’est le patron qui le détient à plus de 2 milliards. 1 euro 1 partie. 2 euros 3 parties.

Eden Bar, 12 rue des perrières Shrek. Le gros truc vert et son bourricot vous offrent un espace de jeu assez simple avec cette petite nouveauté, un mini pinball supérieur. En montant tout en haut de cet eden, on fait du gros score. Joe est au top avec 282 millions. 1 euro 1 partie. 2 euros 3 parties.

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O’Zaviat, 15 place Émile Zola Royal Rumble. Hulk Hogan et Macho Man ont été bien plus forts que nous. En même temps on s’en fout. Depuis qu’on sait qu’Hogan est un sale con raciste, on ne le respecte plus. On s’est pris pas mal de airball. Il a un mini pinball supérieur, un jeu vidéo et surtout un bouton à la place du lanceur de bille à ressort. 1 euro 2 parties. 2 euros 5 parties.

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Deep Inside, 16 rue Victor Dumay Metallica, forcément dans le bar rock de Dijon. L’alcool aidant, c’est celui sur lequel on a le plus assuré et choppé une lot’. Ambiance Metallica toon, comics. Il faut dégommer le snake et monter sur les rampes. Le patron tient le highscore et comme la musique du rade est meilleure et bien plus forte que celle du flipp’, on a eu le bonheur de ne pas entendre Enter Sandman et compagnie. 1 euro 2 parties. 2 euros 5 parties.

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Merde, la piscine est rĂŠservĂŠe aux moines

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immersion

Si la plupart des gens n’en a rien à carrer de Jésus aujourd’hui, il reste tout de même des irréductibles qui lui consacrent leur vie. J’ai décidé d’aller voir si les voies de Dieu sont réellement impénétrables pendant quelques jours à l’Abbaye de Cîteaux.

par ted may, à cîteaux photos : t.m. illustration : hélène virey

Avertissement - Ce petit Jean-foutre de Ted May a voulu savoir pourquoi les gens pouvaient bien venir en retraite dans une des Abbayes les plus réputées du monde. Le problème ? Il a oublié de trouver une réponse à ses questions pendant son séjour à haute portée spirituelle. Il a trop fumé. Y’a vraiment plus de respect pour la foi des autres...

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L

a fondation de l’Abbaye de Cîteaux remonte au Xème siècle, avant l’invention du smartphone je crois. Les mecs s’emmerdaient pas mal à l’époque et ils ont décidé de se réunir pour prier Dieu, qui était une sommité à l’époque. L’ordre cistercien devient même très influent au XIIème siècle dans tout l’Occident grâce à Bernard de Clairvaux, quelqu’un que Wikipédia présente comme un keum « d’une personnalité et d’un charisme exceptionnels. » Ma connaissance de Jésus et de tout le folklore du christianisme se borne principalement à la tirade de Jules Winnfield dans Pulp Fiction et à la crèche sous le sapin de mes grands-parents à Noël. Je n’ai jamais été au catéchisme, ni à la messe et j’ai probablement enfreint toutes les règles en matière de péchés capitaux. C’est comme ça que je me suis pointé à l’Abbaye de Cîteaux, où une vingtaine de moines cisterciens vit recluse du monde extérieur pour prier son Dieu toute la sainte journée, oklm. « Venez avec moi dans un endroit isolé pour vous reposer un moment. » Marc, VI, 31

JOUR 1 Je suis censé arriver à 9h30 à l’Abbaye mais ça commence mal vu que c’est l’heure à laquelle je me réveille à Dijon. Il faut dire que je me suis envoyé quelques pintes la veille et que le réveil n’est pas évident. J’appelle rapidement pour prévenir de mon retard et je prends la route. L’Abbaye est à une trentaine de minutes de Dijon. C’est quand même bien bien paumé. En arrivant à l’entrée, je coupe l’autoradio alors que le rappeur ScHoolboy Q braille « motherfucker, motherfucker yeah, fucking is my favorite word, reason why i’m fucking her », ça fait désordre. L’enceinte dispose d’un parking intérieur parce qu’il y a eu « quelques problèmes » avec le parking extérieur. Dans ce trou, sans doute des romanichels à la recherche de pots catalytiques. Puis c’est l’heure de la visite avec un groupe d’une dizaine de pèlerins, même si on m’explique plus tard que c’est plutôt rare d’avoir des groupes. À l’immatriculation des bagnoles, je me rends compte que mes compagnons viennent des quatre coins de la France. Le groupe en question se réunit de temps en temps pour se retrouver et partager sa passion de la Bible. En fait, l’Abbaye accueille des visiteurs dans une hôtellerie pas trop reuch, à quarante-cinq boules la nuit environ mais on peut négocier comme

au souk pour faire baisser le prix. L’hôtellerie est plutôt balèze et ressemble à une maison de retraite. Assez révélateur du type de visiteurs. Les chiottes sont super haut, la douche est à même le sol de la salle de bain pour éviter les accidents et les couloirs rappellent carrément un hosto. Pour quatre balles, on me prête des draps. Je descends fumer une clope en attendant la prochaine messe, celle de midi. Il y en a sept par jour avec la première à 4h du mat’. Direction l’église où l’office va débuter. La vingtaine de frères débarque chacun leur tour puis quand tout le monde est là, ils font leur truc : ils lisent des prières, sans doute des passages de la Bible mais je ne saurais dire vu que je ne l’ai jamais lue, et ils chantent aussi. Heureusement, ça ne dure qu’une quinzaine de minutes. Je m’attendais à ressentir une forme de sensation mystique mais que dalle. Bon, c’est vrai que Cîteaux, c’est pas Jérusalem non plus. 58

« C’est incroyablement chiant. On est loin des Bouddhistes qui apprennent à casser des pierres à main nue ou des Ricains possédés qui braillent en dansant »


Direction la salle à manger pour le repas de midi. Le groupe a une salle réservée et je partage ma table avec deux types, solos comme moi. Afin de protéger l’anonymat des gens, et surtout parce que je ne me rappelle d’aucun prénom, je vais en inventer aux gens que j’ai croisés. Je suis donc avec Benicio, que j’appelle comme ça parce qu’il ressemble au tueur à gages d’un film des frères Cohen, et Roger-Serge, parce qu’il ressemble un peu à Navarro et à Serge Lama et que j’arrive pas à me décider. Là, c’est le gros malaise. Un frère se pointe pour le bénédicité, comme dans les films ricains, genre on bénit la bouffe et on remercie Dieu, le traiteur on s’en branle. Des fois il faut dire Amen et faire le signe de croix, je m’embrouille à mort et mon signe de croix ressemble à une crise d’épilepsie mais heureusement personne ne me capte vu que tout le monde est en communion avec Dieu pour le remercier d’avoir râpé les carottes. Ensuite on s’assoit, personne ne cause. Je tente mais mes deux compagnons ne sont pas trop réceptifs. Ils se mettent quand même deux verres de pinard chacun mais ça les déride pas pour autant. Je teste le vin rouge mais il est coupé avec de l’eau, pas étonnant que ça n’aide pas mes compagnons de table à s’enivrer. J’apprends plus tard qu’on doit faire silence à table. Il y a quand même une chaîne hifi qui crache un essai

sur la souveraineté de l’Europe, c’est plus intéressant que les 12 coups de midi mais ça ambiance pas tellement Roger-Serge et Benicio. Au moins la bouffe est grave bonne, on bouffe bien dans un silence de mort. Le fromage, celui que les moines produisent, défonce. Arrivé au dessert, je me rends compte de mon erreur avec le choix d’une banane, trop tendancieux. Les visiteurs n’ont pas accès à la majeure partie de l’Abbaye mais une grande partie du parc est accessible. Le paysage est stylé, et surtout c’est bien tranquille pour aller fumer et méditer un peu. Le chant des piafs est plutôt apaisant, loin de l’agitation de la ville. Après avoir fini mon affaire, je retourne à l’hôtellerie. Et c’est là que la paranoïa post-joint me prend. Est-ce que c’est moi ou est-ce que tout le monde me fixe en se disant : « regarde, il est raide défoncé ». Heureusement, les portraits de la Vierge dans les couloirs fixent le ciel pour me montrer la voie plutôt que de porter un regard accusateur. Je rentre et je me mets à lire Tintin, chacun sa Bible, chacun son barbu. Faut dire que le Capitaine Haddock est bien plus fendard que Jésus. Ça se 59

Y’a pas Newlook ?

« Je suis à deux prières exaucées en étant fonfon et zéro en étant clean »


La suite nuptiale.

confirme à la messe du soir. C’est incroyablement chiant. On est loin des Bouddhistes qui apprennent à casser des pierres à main nue ou des Ricains possédés qui braillent en dansant comme dans Borat. Pourtant, avec cet amour de système son et cette acoustique, on pourrait faire du bon. J’ai du Kirk Franklin dans mon MP3 si jamais. L’office du soir est plus long. Surtout que je suis raide. Il faut rester debout pendant les chants et je prie Dieu pour qu’on s’assoit. Je suis exaucé presque dans la seconde, merci gros. Je me dis que les chants religieux sont à la musique ce que le casque de chantier est à la mode. À la fin, on bascule dans le noir. Je me barre c’est trop long pour moi. En plus j’ai la foncedale et je prie Dieu à nouveau pour avoir un gros plat bien stock. Exaucé encore avec un genre de lasagne/hachis parmentier. Je suis à deux prières exaucées en étant fonfon et zéro en étant clean, il va falloir creuser de ce côté-là. Nouveau gros malaise à table, personne ne parle ou ne se regarde sauf pour se passer les plats avec un sourire mielleux qui me fait frémir. Je me sers quand même une part d’enculé et je me dis qu’ils doivent me prendre pour un gros bâtard mais bon j’ai faim. Et puis on ne juge pas son prochain. Bon mon premier jour n’est pas glorieux. À chaque jour suffit sa peine, comme c’est marqué dans la Bible. Demain je vais essayer d’être le meilleur moi possible. Promis.

JOUR 2 Le lendemain, c’est un peu la même routine. Mais comme j’ai aucune obligation et que la veille je me suis couché tôt vu que je me faisais royalement chier, je suis gavé de sommeil. Ça fait du bien. Je retourne à l’office du midi, puis c’est encore repas

dans le silence, puis quelques clopes dans le parc, puis je zone sur Facebook alors que je m’étais promis de ne pas y aller du séjour pour me déconnecter. J’essaie de mendier un entretien avec un frère pour lui poser quelques questions mais ils sont assez busy donc je dois prendre mon mal en patience. Finalement, le soir, Benicio s’est tiré et Martine est arrivée. Prototype de la ménagère de cinquante ans, elle est un peu plus opé pour la discussion. On papote. Martine vient de Nancy, elle vient à l’Abbaye de Cîteaux trois à quatre fois par an pour se ressourcer, prier God et se détacher de l’encombrant quotidien du métro-boulot-dodo. Elle me sort qu’« en voyant des gens qui consacrent leur vie au Seigneur, on ne peut pas douter qu’il existe. » Ah bon. Elle vient aussi ici pour trouver sa voie dans les Écritures. Ma comparaison avec les horoscopes ne la fait pas rire. Après avoir bien traîné à table pendant une heure parce qu’on a tchatché à fond alors qu’on était censés la boucler pendant le repas, je vais me fumer un monstrueux joint dans le parc pour échapper à tout ce délire qui me ferait presque flipper. Sauf que, quand je reviens, Martine a trouvé Frère Robert (parce qu’il ressemble à mort à ce

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La route du paradis.

« L’hôtellerie ressemble plutôt à une maison de retraite. Assez révélateur du type de visiteurs »


Vous avez le dernier Marc Levy ?

bon vieux Robert Hue), qui est prêt à répondre à mes questions. Je me retrouve donc en face de lui pendant trente minutes à discuter de religion alors que j’y connais que dalle et que je suis complètement laminé. Frère Robert m’explique un peu le fonctionnement de l’abbaye. En fait, les moines cisterciens vivent reclus ici avec un emploi du temps bien rodé : lever avant 4h pour la première messe, étude des Écritures, messe, un peu de boulot du genre fabrication du fromage avec le lait des vaches de l’abbaye, messe puis repas, retour au travail, messe, etc. Jusqu’au coucher à 20h30 environ. Frère Robert est arrivé ici à 21 ans et il a carrément l’air d’en avoir pas loin de 60. Il est venu ici après son service militaire, a kiffé le lifestyle de moine cistercien et a décidé de rester. Il a quand même rencontré le Dalaï Lama, qui s’est rendu à Cîteaux il y a plusieurs années, a voyagé en Belgique, en Italie, en Espagne, en Pologne et au Canada dans le cadre de la religion et il occupe une fonction de conseiller municipal au village à côté de l’abbaye. Le gars pèse dans le milieu. Il m’explique que les frères qui rejoignent l’ordre cistercien doivent faire leurs preuves, sous forme de plusieurs contrats, un peu comme des CDD : « On ne s’engage pas si on n’est pas sûr. C’est comme le mariage, ça ne sert à rien si c’est pour divorcer après. » Car la vie monastique n’est pas faite pour tout le monde, même pour les hommes de foi. Je profite du tête-à-tête pour demander si des croyants d’autres religions viennent parfois séjourner à l’abbaye. Effectivement ça arrive, mais surtout des protestants. Je dérive justement sur ces autres religions et Frère Robert, tolérant, m’explique qu’il croit en Dieu d’amour et que « si je trouvais plus d’amour dans l’Islam je me ferais musulman. » Il existe d’ailleurs une communauté musulmane à quelques kilomètres depuis plusieurs années. Comme quoi, le bled est presque aussi cosmopolite que Manhattan. Finalement, la cloche

La tess’ de Cîteaux.

qui envoie les moines se coucher signe la fin de cet entretien. Chic.

JOUR 3 C’est mon dernier jour au pays des bisounours. On m’a promis une messe plus « festive » puisqu’il s’agit du jour de présentation du Seigneur, ou de la chandeleur pour les mécréants comme moi. Mais il ne faut pas s’attendre à des crêpes non plus. Les moines se contentent de se trimballer en procession dans l’église avec des cierges et des bougies en chantant. C’est pas encore du gospel, ça reste chiant. Sur ce, je mets un terme à mon aventure monastique. Un peu déçu parce que je n’ai pas réussi à lire la Bible, qui m’a gonflé au bout de quatre pages. Aussi parce que je n’ai pas vraiment pu visiter l’abbaye, qui reste réservée dans sa majorité aux frères, même si j’ai essayé de visiter un peu pendant la nuit pendant que tout le monde dormait mais il faisait trop sombre pour que je vois à un mètre devant moi. Et je n’ai rien ressenti de particulier, ni la présence de Dieu, ni aucun courant mystique. C’est clair que j’irai en Enfer. // T.M.

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« En fait, les moines cisterciens vivent reclus ici avec un emploi du temps bien rodé »


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Salles obscures 120 ans d’histoire de cinémas à Dijon, des premières projections au futur multiplexe...

par lilian elbé, à dijon photos : alexis doré Sources illustratives : dijon1900.blogspot.com

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Le Darcy, à l’époque casque à pointe.

A

Dijon, c’est l’inquiétude. Un projet de cinéma multiplexe à la future Cité de la Gastronomie viendrait menacer les salles du centre-ville. Le spectaculaire, le grandiose, les écrans géants, bref, l’attraction pour les yeux pourrait bien tuer les petits établissements historiques, comme il les a fait naître il y a un siècle. Car on l’oublie trop, mais il y a un peu plus de cent ans, ce sont ces mêmes arguments forains qui ont donné naissance à ces salles, par la promesse d’une curiosité pas chère offrant une véritable claque visuelle au public. À l’époque, les Dijonnais ont été tellement clients qu’en quelques années, on leur a construit plus d’une dizaine de cinémas. Aujourd’hui, la plupart a

disparu, devenu magasins ou friches urbaines moisissantes, au passé souvent trop insoupçonné. Les dernières salles ouvertes témoignent d’un phénomène passé d’une ampleur qu’on ignore : l’arrivée et le développement du cinéma en province, à l’aube de son histoire...

Une affaire de forain Six mois seulement. C’est le temps qu’il aura fallu pour que le cinématographe des frères Lumière, de sa première présentation publique mondiale à Paris en 1895, débarque à Dijon au printemps 1896. Il faut imaginer qu’avant cette date, aucun Dijonnais ni provincial du monde entier n’a vu de ses yeux une image animée projetée sur un écran. Et c’est bien là-dessus que comptent les forains de l’époque... L’invention du cinématographe, présentée en 63

grande pompe à la capitale à un public de scientifiques, tape immédiatement dans l’œil des promoteurs de spectacles itinérants. Coup de chance, les brevets ne sont pas bien déposés, et la machine, si elle est révolutionnaire dans son concept, n’est pas si compliquée à reproduire, voire à améliorer. L’idée est simple : le fait de projeter quelques secondes des « photos qui remuent » sur une toile blanche fascine tellement à la capitale, qu’il n’y a aucune raison pour que cela ne fonctionne pas en province ! Dans toutes les préfectures de France, on organise alors l’arrivée du phénomène. À Dijon, la première projection de ces pastilles a lieu le 19 mai 1896 dans la salle de bal de l’Alcazar, rue des Godrans. La veille, une avant-première avait été proposée en privé pour la presse et les notables, quand même. Ce n’est certes pas le vrai cinématographe,


« À Dijon, la première projection a lieu le 19 mai 1896 dans la salle de bal de l’Alcazar, rue des Godrans”

mais un « chronophotographe », une copie américaine du modèle inventé par les Français. Un journaliste du Petit Bourguignon en fait la critique, parlant du « spectacle le plus merveilleux qu’il nous ait été donné de contempler jusqu’ici ». Il ajoute être « sorti de là en se frottant les yeux », « pas bien certain de ne pas être le jouet d’un rêve ». Le ciné, c’est magique. Mais qu’est-ce qui est projeté à l’écran ? Tout simplement de petits films, fragments de vie d’une minute tournés quelques mois auparavant, dans la région ou ailleurs. L’idée est d’offrir une réalité brute calquée sur la fameuse « Arrivée d’un train en gare de la Ciotat »1, ou de l’exotisme bon marché, donnant au spectateur la possibilité de voir l’ailleurs, les fesses assises sur un banc. Les concurrents et plagieurs des frères Lumière tournent eux-mêmes leurs petits films, et la gare de la Ciotat devient pour les bourguignons l’« Arrivée d’un train en gare de Velars-sur-Ouche ». Pour l’exotisme, une « Danse du nègre Bamboula » suffira à faire son petit effet et remplir la salle. Quant au cinématographe original, il arrive deux mois plus tard à Dijon, projeté dans une boutique de la rue des Forges louée et transformée temporairement en salle de projection. Mais c’est déjà l’été à Dijon ; le beau temps est ainsi parfait pour organiser des projections foraines en plein air, à grands coups de tracts distribués partout dans la ville. Tous les curieux affluent, s’entassent sur les bancs pour voir

l’avenir. Rapidement, les propriétaires de brasseries et lieux de spectacles d’alors qu’étaient le théâtre, les tours de chant ou le cabaret flairent à leur tour le filon. Les cafés de chaque grande place dijonnaise s’empressent d’inviter un projectionniste à résidence et tendent dehors une grande toile sur deux mâts de bois. Une grande brasserie de l’avenue Foch dirige son projecteur contre le mur du jardin Darcy, le café Le Glacier possède son propre écran, monté sur une structure en bois, directement sur la place Darcy. Le patron de la Comédie, lui, étend directement son drap sur les colonnes du Grand

Théâtre. Tant qu’à faire. Toutefois, au bout de quelques jours, chacun opacifie sa toile pour s’assurer que les spectateurs s’assoient bien en terrasse et paient bien leur verre, au lieu d’aller tenter de regarder le verso de l’écran, de l’autre côté de la rue. C’est dix sous la conso’, point barre.

Les adieux au music-hall Après l’engouement fou lié au caractère nouveau de l’invention, le cinéma s’installe peu à peu comme un loisir à proprement parler. Mais il ne possède toujours pas d’établissement propre. D’attraction de foire, il devient événement au programme des cabarets et lieux de bal de la ville. À Dijon à la Belle Epoque, pour voir des spectacles, on se rend à la

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Place Darcy, 70’s.

Le Cirque, rue de Tivoli.

Grande Taverne, ou au Cirque, ce grand chapiteau de bois permanent monté rue de Tivoli – aujourd’hui disparu, il était construit à l’emplacement du petit square Gaston Roupnel. Un soir, c’est théâtre, le lendemain tour de chant, et le surlendemain projection de cinéma. Chaque organisateur joue la surenchère, d’autant qu’au fil des mois, le matériel de projection s’améliore. On diffuse des vinyles pour offrir une ambiance sonore par dessus l’image, priant pour que la bobine ne saute pas, au risque de désynchroniser tous les effets. Sur les tracts publicitaires distribués dans la rue, chacun assure que son procédé technique de projection est le plus sophistiqué, qu’il offre un spectacle encore plus ébouriffant que le confrère, pour des spectateurs davantage en quête d’une expérience visuelle que d’une fiction à l’intrigue


élaborée. À l’image, ce sont toujours des scènes de la vie réelle, des actualités ou des défilés militaires. On est loin des blockbusters. Petit à petit, les patrons de salle réalisent que les soirs de cinématographe, il y a salle comble. Alors les investissements de modernisation des lieux vont dans ce sens, on électrifie, on adapte les fauteuils, on crée des salles des machines, on sert à manger, dans le noir, pendant la diffusion. Et surtout, on fait du cinéma le spectacle principal, quasiment chaque soir, poussant petit à petit le music-hall dehors. C’est le cas de la Grande Taverne, face à la gare de Dijon aujourd’hui, l’entrée est à l’abandon, et les étages sont celui d’un hôtel. La salle de 500 places, très en vogue à l’époque, devient au fil des premières décennies du 20ème siècle un cinéma, des programmes jusqu’à la décoration. Si en 1896 on n’y propose que des opérettes, des revues et autres concerts, 25 ans et un nouveau propriétaire plus tard, on n’y propose que des films.

D’extérieur en intérieur

Maintenant, c’est la Fnac, rue du Bourg.

« En dix ans, entre 1910 et 1920, pas moins de cinq cinémas ouvrent à Dijon »

Le 28 avril 1910 voit ouvrir à Dijon le premier établissement cinématographique à part entière, « Le Pathé », à l’angle des rues des Perrières et Guillaume Tell (aujourd’hui détruit, à l’emplacement d’Europcar). Un grand hangar de plus de 1000 places, un guichet à l’entrée, et surtout, une programmation nationale franchisée : c’est le début de Pathé – dont l’établissement, Gaumont, avec des bandes de films plus chères, au contenu de meilleure qualité et pas uniquement de fiction, les actualités

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occupant une bonne place dans le programme de la soirée. C’est l’ère du ciné à la « Cinéma Paradiso »2, lieu de sortie et de rencontre pour les habitants en fin de semaine. On vient se montrer, se divertir, se tenir au courant. Mais, bon joueur, le cinéma n’est ouvert qu’en basse saison, laissant toujours la période d’été pour les projections plein air des brasseries qui continuent d’avoir lieu dans la ville, toujours notamment au Cirque, rue de Tivoli. Face à la preuve qu’un établissement peut vivre de la seule diffusion de programmes cinématographiques, les entrepreneurs de spectacles s’engouffrent alors dans la brèche. En dix ans, pas moins de cinq cinémas ouvrent à Dijon. L’OlympiaGaumont, ouvert en 1920, fait la guerre à sa voisine la Grande Taverne. L’Alhambra, construit en 1919 fait belle figure place de la République, et surtout, en 1914, le Darcy Palace fait monter en gamme la sortie-distraction qu’est le cinéma : sur la place Darcy, un vieil hôtel est détruit au profit d’une salle immense : 40 mètres de longueur et 1100 places assises. Il y a un orchestre, et même des WC. Dès l’extérieur, les moulures en stuc de la façade annoncent le tableau, c’est classe. Pendant de longues années, l’établissement ne désemplit pas. Rapidement, il semble qu’à chaque coin de rue un cinéma se construise. Le Grangier, place Grangier évidemment, l’Alhambra place de la République, l’Olympia avenue Foch, le Paris rue de la Liberté (aujourd’hui les chaussures Eram), l’ABC rue du Chapeau rouge, le Star rue du Bourg (aujourd’hui la Fnac), le Casino rue Jean-Jacques Rousseau, et le premier cinéma de quartier de Bourgogne, l’Eldorado, proche de la rue d’Auxonne. Le cinéma devient la sortie obligatoire pour se tenir informé de façon plus ludique qu’avec le journal, et aussi pour voir l’Amérique. Il fait la fortune des promoteurs de salles... jusqu’à l’arrivée de la télévision dans chaque foyer français, à la fin des années soixante.

Du porno à l’empire Massu Dès lors, tout se complique. La télé vole la primeur des informations et des images exotiques, les cinémas doivent alors se réinventer. Comme ils datent presque tous de la même époque, ils se


« Le bâtiment que lorgnent tous les investisseurs depuis une quarantaine d’années, c’est l’Alhambra, place de la République, fermé depuis 1979 »

font vieillissants, de moins en moins fréquentés. C’est à ce moment qu’un entrepreneur de Côte-d’Or, Marcel Jean Massu, débarque dans l’histoire du cinéma dijonnais, pour en devenir l’acteur principal de la deuxième moitié du XXème siècle. En 1961, après avoir ouvert un petit cinéma à Mâlain, il commence par racheter le Darcy-Palace, dont il tombe clairement amoureux. Puis peu à peu il acquiert la plupart des établissements dijonnais : l’Alhambra en 1976, le Star, mais aussi l’ABC rue du Chapeau Rouge, le Grangier, la Grande Taverne en 1996 et le Gaumont (Olympia) en 2003. En parallèle, président du syndicat des

cinémas de Bourgogne, il investit dans les mêmes proportions à Saint-Etienne. Des années 1980 aux années 2000, Marcel Jean Massu accompagne la déshérence des cinémas, impuissant face aux fréquentations en baisse, mais tablant sur le potentiel immobilier de ces lieux. Certains sont rachetés pour être fermés quelques années plus tard seulement, comme l’Alhambra, clôturé trois ans après son rachat. D’autres, comme le Grangier et la Grande Taverne, restent ouverts tant bien que mal. Au tournant des années 70-80, ils changent de registre : si le cinéma ne peut pas concurrencer la télé, il y a un type de programmation qui n’y passe pas : le porno, dernier souffle avant le satellite et Canal+. Mais l’entrepreneur Massu se retrouve tout de même, l’air de rien, à la tête d’un patrimoine immobilier considérable. Pour survivre, il se replie sur le Darcy, le premier et son favori. Au fil des années, la vieille salle pionnière se modernise, des nouvelles salles sont creusées à coups de bulldozers en sous-sol et la façade monumentale est rénovée avec le soutien de la ville dans les années 1980.

Tel père, telle fille Aujourd’hui, il ne reste que trois cinémas ouverts au centre-ville, auxquels il faut ajouter l’Eldorado dans le quartier de la

rue d’Auxonne : Le Darcy, l’Olympia et le Devosge. Si ce dernier est géré par le gérant du multiplexe du Cap Vert à Quetigny, les deux premiers appartiennent toujours à la famille Massu. Famille, car depuis une dizaine d’années, c’est Sylvie Massu, la fille de Marcel Jean, qui est aux commandes de l’antique empire cinématographique. Le père, d’ailleurs mort en décembre 2016, a laissé à son héritière un catalogue immobilier impressionnant... mais pour le moins défraîchi. En bonne fille, Sylvie Massu poursuit la stratégie de son défunt père : oublier les dents creuses et tout investir sur les bijoux de famille, le Darcy et l’Olympia. Papa aimait le Darcy, elle, son favori, c’est l’Olympia. En 2007, il est entièrement refait, et même agrandi, avec une percée jusqu’à l’ancienne salle de la Grande Taverne, jumelant ainsi les deux cinémas historiques, L’Alhambra, dans son jus depuis 1979.


Un épisode de C’est du propre à l’Alhambra !

concurrents un siècle plus tôt. Toutefois, si Marcel Jean Massu a su vendre en 1984 le cinéma Star rue du Bourg (devenu Manufrance puis la Fnac) ou encore l’emprise du Grangier pour qu’y soit reconstruite en 2000 la librairie Grangier, Sylvie Massu possède toujours de vieilles pépites dans son portefeuille. Notamment l’ABC rue du Chapeau Rouge, idéalement situé, fermé depuis 2011. Mais surtout, le bâtiment que lorgnent tous les investisseurs depuis une quarantaine d’années, c’est l’Alhambra, place de la République. Fermé depuis 1979, le cinéma est depuis caché derrière un immense panneau publicitaire au profit de la ville de Dijon. La propriétaire assure avoir reçu pour le bâtiment plus d’une centaine d’offres de rachat, refusant quasi systématiquement. En 2014, Le Point a d’ailleurs montré du doigt les « friches de la famille Massu », comme d’autres Dijonnais dénoncent l’existence de ces dents creuses dans un centreville ou l’immobilier commercial est si prisé. Pour se défendre, Sylvie Massu a toujours répété qu’elle exigerait une reprise à des fins culturelles ou bénéfiques pour l’animation du centre-ville. Une défense qui lui vaut

désormais une position bancale et militante, en conflit de plus en plus ouvert avec la municipalité en place...

Multiplexes VS petites salles Alors lorsque la ville de Dijon annonce la création d’un multiplexe sur le futur site de la Cité de la Gastronomie, Sylvie Massu, appuyée par l’opposition de droite, dénonce la mort annoncée de ses deux vieux cinémas du centre-ville, arguant une concurrence déloyale. Consciente, elle décide au même moment de mettre enfin en location l’ABC et l’Alhambra, sarcophage inviolé depuis 1979. Rouvert le temps d’une petite sauterie privée du cercle des communicants dijonnais secrètement organisée il y a quelques mois dans le décor post apocalyptique de la salle au balcon à l’italienne, le bâtiment de la place de la République est en cours de rénovation pour ouvrir une brasserie nationale franchisée, l’enseigne Au Bureau. De la dizaine d’établissements que comptait le centre-ville à la grande époque du cinéma de province, Dijon ne compte donc plus que trois établissements, dont deux gérés par l’héritière d’un empire inévitablement 67

déchu. Aujourd’hui en conflit avec le projet de la Cité de la Gastronomie, elle s’oppose à Ciné Ducs, un multiplexe de neuf salles dont le dossier est porté par son principal concurrent, le cinéma Cap Vert à Quetigny. Elle en est certaine, même rénovées, ses anciennes salles ne feront pas le poids face aux prouesses technologiques d’un multiplexe et joue désormais clairement de sa nouvelle position de David face au grand Goliath. L’équipe du petit cinéma Art et Essai l’Eldorado a, quant à elle, préféré s’associer au projet. Elle qui endossait clairement le rôle de David face au Goliath Massu et Cap Vert il y a quelques années, communiquant sur son indépendance et sa proximité, propose désormais le concept Supernova, un multiplexe de quatre salles construit juste à côté de Ciné Ducs, sur la même emprise de la Cité de la Gastronomie et associé au groupe propriétaire du Cap Vert... Nul doute que les craintes de Sylvie Massu sont toutefois fondées, la promesse du spectaculaire que formule le multiplexe étant à coup sûr génératrice d’affluence. Mais le comble reste là, cette même promesse, qui a fait la gloire des vieux cinémas du centre-ville à leur création, pourrait justement, un siècle plus tard, avoir définitivement raison d’eux... // L.E. 1 Un des premiers films de l’Histoire, tourné par les frères Lumière eux-même. 2 Film de 1988 de Giuseppe Tornatore avec Philippe Noiret, racontant le quotidien d’une petite bourgade vibrant au rythme des soirées cinéma dans les années 40.

Pour plus d’informations, notamment sur l’histoire du cinéma dans les autres grandes villes de Bourgogne : 1895-1995, 100 ans de cinéma en Bourgogne, édité par le conseil régional de Bourgogne (1995). Merci à Laurent Popovitch (dijon1900.blogspot.com)


la page mode Photos : Vincent Arbelet Série réalisée à Paris Modèle : Chloé Cheveux : de feu. Sweat : de son grand frère. Manteau : j’ai des choses à planquer. Pantalon : pas besoin. Accessoire : paire de fesse en argent massif, classique. Pose : en fait, je suis à l’envers. Ambiance : fouilles archéologiques à Mykonos.

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Gilet : ça tombe bien Thérèse, je me disais encore hier soir qu’il me manquait quelque chose pour descendre les poubelles. Robe : Michelle Yeoh, les Oscars 2006. Pantalon : habillement caché. Accessoire : foulard qui vole ! Mais comment elle fait ça ? Pose : D. Copperfield Ambiance : le plus grand cabaret du monde.

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la cuisine de sparse

les

parias

par so fish illustration : mr. choubi

à table ! Lundi 13 mars à 8h30. Confiant, tu entames ta deuxième semaine dans ton nouveau job, au troisième étage d’un modeste immeuble de verre. Avant tu étais chez les concurrents, en face. Et maintenant tu as un nouveau pot à stylos, une nouvelle salle de repos avec distributeur de friandises, une plus grande place de parking, plus de pognon et bien sûr des nouveaux collègues. Karim, Virginie et Thierry du service compta. Ils sont vraiment sympas. Du coup, dès la deuxième semaine à la machine à café, tu fais péter l’invit : « Ça vous tente un petit dîner cette semaine, juste entre nous ? » Ouverture de l’appli agenda, ok pour jeudi 19h30. « Au fait, vous mangez de tout ? » WRONG ! Karim est allergique au lactose, Virginie est gluten free et Thierry, il aime pas trop les fruits et les légumes. T’inquiète, on va t’aider à ne pas tuer tes nouveaux copains. Ce qu’il y a de bien avec tes collègues, c’est que dans le genre allergique, ils se connaissent plutôt bien. Sans amertume, ils ont appris à devenir des rebuts de la société, ceux qu’on a peur d’inviter chez soi. D’un côté, c’est vrai que c’est compliqué de faire à manger à des allergiques ! « Non mais ne vous tracassez pas la tête, un peu de salade et ça ira. Au pire, je mangerai en rentrant tout à l’heure. » C’est pas si simple de faire partie d’une minorité... Hein Marine ? Mais bon passons, toi, c’est pas ton genre, tu adores les défis. Chez toi, c’est pour tout le monde la même gamelle. Il faut quand même savoir que l’inconvénient avec les allergies, c’est que ça peut tuer. Et que la mort, c’est quand même pas drôle. Attention, on ne te parle pas des nouveaux slogans en vogue à Brooklyn et Berlin Est. Gluten free, tofu free, cannabis free, marmottes free... On te parle d’une certaine forme de maladie, alors on déconne pas. Et pour corser un peu le jeu, pour Karim, une trace de lait en poudre dans un BN, et c’est fini. Alors d’abord la liste : www.allergenequitue.com. Ensuite, pour éviter tout problème, il faut bien lire les petites étiquettes au dos des produits transformés que tu achètes, tu vas

vite constater qu’un allergique à l’arachide a du souci à se faire quand il rentre à Carrefour. Et enfin, tu fais appel à nous ! Pour t’en sortir lors de ton dîner et finir cette petite sauterie à 4, il va falloir être astucieux. Que faire sans farine, sans lait de vache et donc sans beurre ? Hé bien il suffit d’utiliser des substituts qui produisent les mêmes effets dans la cuisine et qui peuvent même varier les plaisirs. Le seul problème, c’est que tu y laisses un bras à chaque course. Sélectionne un peu tes amis. Cette fois-ci, pour le menu de jeudi, on te propose une petite soupe de pousses d’épinard et panais au lait de riz en entrée, un joli mafé de poulet (on n’a pas dit VG) pour continuer, un crumble butter free, farine de châtaigne et un peu de fruits pour Thierry.

La fishstory 70


Pour la soupe et le plat, c’est principalement sur ton marché pour choper des pousses d’épinards bien fraîches et du coin, avec de beaux panais sortis tout droit d’une terre maraîchère des alentours. Prends aussi une dizaine de pommes si tu trouves. Pense aussi aux légumes, ça c’est selon ton envie : oignons, ail, carottes, chou frisé, navet, courge... Pour le poulet, va chez ton volailler et prends des cuisses fermières. Tu vas être obligé de prendre la direction d’un magasin bio. En vrai on n’aime pas ça ! Les gens ont le teint de la couleur des 3 graines germées qu’ils bouffent en guise de repas et il y règne une odeur

La shortfish proche de celle de l’hosto ! Mais pour choper de la purée de noisettes y’a pas mieux ! En plus c’est super bon tu verras ! Prends aussi un litre de lait de riz (de Camargue bien sûr, on n’est pas si irresponsable). Au supermarket, prends de la farine de châtaigne, de la poudre d’amande et du sucre roux (ben ouais, le sucre blanc, ça marche pas, c’est bourré de gluten !) de l’huile d’arachide, du concentré de tomates, une boîte de tomates pelées (ben ouais les vraies tomates en hiver ça existe pas) et 2 pots de beurre de cacahuètes (l’américain bien sûr).

Le fishmeal • D’abord tu lances ton poulet mafé ! Émince des oignons, de l’ail et du gingembre. Fais revenir tout ça dans de l’huile d’arachide et ajoute tes cuisses de poulet que tu fais bien revenir. Ensuite, déglace avec du vinaigre, sale et ajoute le concentré, la boîte de tomates et du laurier. Laisse réduire un peu et pendant ce temps, coupe tes légumes. Jetteles dans la casserole et remue bien. Laisse cuire environ 45 min à feu moyen, avec un couvercle. Quand c’est cuit, ajoute le beurre de cacahuètes et un peu d’eau pour que ça se dilue bien. Laisse encore mijoter au moins une demi-heure, et ensuite sur feu très doux jusqu’au moment de servir, mais pense à bien remuer ! • Pour ta soupe, tu épluches les panais, tu les laves et tu les coupes grossièrement. Les pousses d’épinards n’ont même pas besoin d’être équeutées, la magie de la soupe, c’est qu’on y met tout dedans ! Lave-les simplement ! Émince 2 oignons, fais-les rissoler avec les morceaux de panais, ajoute les pousses et après 5 min, le lait de riz. Faut que le liquide recouvre tous les légumes, si besoin ajoute un peu d’eau. Une cuillère de gros sel et hop, tu couvres et tu laisses cuire 30 min !

Pendant que ça cuit, tu épluches les pommes, et tu les mets dans une casserole avec du sucre (roux, hein, t’as suivi ?!) et un peu d’eau, une gousse de vanille coupée en 2 ou un bâton de cannelle. Tu recouvres d’un papier sulfu, et laisse cuire sur feu moyen pendant 30 min. • Check ta soupe, si c’est cuit, tu mixes bien, tu rectifies l’assaisonnement et le tour est joué ! • Sinon tu peux attaquer ta croûte à crumble. C’est supra simple. Mélange dans un cul de poule 60gr de farine de châtaigne, 20gr de poudre d’amande, 80gr de purée de noisette et 20gr de sucre roux. Ensuite tu mets dans un plat, tu fais cuire au four environ 10-15 min et tu remues de temps en temps. Faut que ça soit croquant, tu fais gaffe, ça peut vite cramer ! • Au moment du dessert t’auras juste à mettre au fond d’un verre 3 cuillères de pommes cuites encore tièdes, et une bonne cuillère de crumble. Voilà, t’as plus qu’à lancer un riz pour accompagner le mafé qui mijote tout doux ! Le dîner complètement free est prêt. Tu peux dresser sans crainte, tout le monde mangera à sa faim !

La happyfish Après t’être tapé du pain complet pendant tout le repas, tu surprends Virginie qui descend ta baguette pour demain en douce dans la salle de bain. Tu as perdu Thierry, allongé sur le canap’, 25 kg de joues en plus, qui n’avait jamais mangé de cacahuètes jusque-là et Karim, dégustant son crumble et finissant son verre de rouquin, peinard. Tu te fais virer le lendemain.

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la sélection musicale

La vieillerie Robert Mitchum – Calypso Is Like So (1957). Acteur dans le meilleur film du monde, mauvais garçon, alcoolique, les raisons ne manquent pas d’être robertmitchumophile. Comme cet album, qui plaira autant aux rockeurs nostalgiques des 50’s qu’aux grooveurs invétérés ou aux diggers amateurs de kitsch. Après être tombé en extase devant un orchestre de calypso à la Trinité, le Bob décide d’enregistrer cette merveille une fois rentré aux States. Miracle. Ça sent bon les tropiques, ça chaloupe, ça cha-chate, tout en donnant envie de picoler. Du rhum, bien entendu. Mitchum imite l’accent créole et touche du doigt le paroxysme du cool. Y’a qu’à mater la pochette, magnifique. Devenu complètement culte, incontournable à l’apéro ou pour tout bbq qui se respecte, Calypso Is Like So est sans aucun doute l’abum pré-60’s le plus savoureux qui soit. // M.C

À éDe grande qualiteé Chinese Man - Shikantaza. Il était une fois trois Chinois (qui sont en fait Marseillais) qui décidèrent de mettre leur talent et leur vibe en commun pour redonner des couleurs à l’abstract, style désuet et oublié, et à la French Touch, surfaite et artificielle. Après plus de dix ans de carrière, la mission est largement réussie et ce nouvel album marque un petit retour aux sources avec des prods tribales et moins électros, plus abstracts et sombres. Chinese Man sait se réinventer, s’adapter à son époque sans délaisser les fans de la première heure ! Shikantaza en japonais veut dire adopter une position assise et ne rien faire, et c’est parfait pour écouter ce disque bien que de nombreux morceaux vous donneront des fourmis dans les jambes et l’envie de vous lever ! // R.S. CASUAL GABBERZ - Inutile de fuir. La tendance qui consiste à réutiliser les codes des années 90 est toujours aussi forte en 2017, la preuve avec le crew parisien Casual Gabberz et sa première compilation Inutile de Fuir, dédiée à un genre qui, à mi-chemin entre la Belgique et les Pays-Bas, a fait danser des tas de jeunes aux crânes rasés et aux survêtements colorés terminés, aux pieds, par des grosses paires de Nike Air. Ornée d’un crâne - objet iconique de la culture techno hardcore - la compilation reste tout à fait « accessible » pour le genre et présente un roster d’artistes aussi connus (Krampf, Orgasmic, Panteros666) qu’inconnus. Beaucoup de morceaux utilisent des samples de rap français, et l’ensemble de 51 titres - tout de même - arrive à proposer des choses assez différentes, pour vous aider à passer un bon moment à dodeliner des fesses avec vos amis chauves en rendant hommage au deuxième pays du fromage. // D.R.

On s’en carre la raie mais vive la pochetteé! Kane Roberts - Kane Roberts (1987). On sait que Kane Roberts est une sorte de guitar hero. Produit typique des années 80, il a accompagné Alice Cooper durant cette décennie et apparait sur trois des albums du roi du rock provoquant, au maquillage qui ferait pâlir le premier panda venu. Son album éponyme est dans une pure veine hard rock et… bon sang mais matez-moi cette guitare-mitraillette de malade ! Le gars, c’est John Rambo avec une énorme gueularde à cordes descendu tout droit des cieux pour négocier sagement dans la forêt avec du communiste ! Mais vous voulez être déçu ? Dans toute cette histoire, cette guitare est… factice, le gars ne s’en servait pas vraiment pour jouer ! Allez, rien que pour l’idée et les muscles, on lui pardonne. Make Hard Rock Great Again ? // D.R.

Caca dans les oreilles The XX - I See You. Au pays de l’ennui, les XX sont rois. Enfin, disons qu’il y a beaucoup de rois, mais eux se placent quand même plutôt bien. Non mais vraiment les gars, je ne comprendrai jamais la hype qu’il a pu y avoir autour de ce trio, beaucoup trop lisse et gentil pour être pris au sérieux par l’horrible personnage qui écrit ces quelques lignes et qui, deux ou trois jours passée l’écoute initiale, baille toujours. Les XX, c’est un peu le renouveau (depuis quelques temps déjà, en fait) de la musique d’ascenseur ou de salle d’attente chez le dentiste, donc un moment calme et angoissant mais finalement toujours sans vraie prise de risque ni danger, même si la panique peut se faire sentir. Rien d’intéressant à en tirer et rien d’original, surtout pas, si ce n’est un nouveau nom à placer sans se fatiguer pour remplir les listes des plus gros festivals de France cet été. Sans moi ! // D.R. 76


crash test par jeff buckler photo : dr

Tu t’es vu quand tu votes pour... ? Descriptif faussement sociologique et certainement caricatural de l’électorat français avant les échéances présidentielles et législatives de cette année 2017. Clairement subversif, de mauvaise foi, simpliste, moqueur et à la fois très très subjectif, ce point de vue n’a pas vocation à influencer vos choix. Garde ton vote pour les urnes et les meetings. C’est déjà pas mal. Que tu votes ou non, la politique c’est le futur. Prends ça le « Tous les mêmes ».

Le Modem

Parce que j’y vais, j’y vais pas. Parce que ni noir, ni blanc mais gris. Parce qu’il y a du bon et du mauvais partout. Parce que tu n’as jamais su choisir ton camp. Parce que t’aimes la solitude et l’indépendance. Parce que tu veux jamais rien faire comme tout le monde. Parce qu’une bonne claque à un gamin ça a jamais fait de mal. Parce que t’es quand même un peu refoulé de tes valeurs de droite. Tu es : un suisse. Ou un Luxembourgeois.

Les Républicains

Parce que t’as cru que c’était du tout cuit. Parce que ces enfoirés de journalistes gauchistes nous emmerdent avec leurs questions. Parce que pourquoi travailler plus quand on peut gagner plus. Tout simplement. Parce que tu payes trop d’impôts. Parce que t’as pas encore trouvé le moyen de filouter les impôts. Parce que la France tu l’aimes ou tu la quittes. Radical. Parce que t’as les moyens de la quitter pour des vacances en famille au soleil. Parce que travail, famille, patrie. Tu es : une Rolex. Ou une CB Premium.

Le Nouveau Parti Anticapitaliste

Parce que pour un monde plus juste. Parce que pour un monde plus social. Parce que pour un monde plus égalitaire. Parce que pour un monde plus solidaire. Parce que pour un monde plus fraternel. Parce que pour un monde plus tolérant. Parce que pour un monde plus libre. Parce que pour un monde meilleur. Parce que y’a pas que les grands qui rêvent. Bisous Melody. Tu es : Robin des bois. Ou un enfant.

Le Parti Socialiste

Parce que tu sais plus trop où tu en es. Parce que t’aimerais bien être accompagné pour un bilan de compétences. Parce que tu aimes tendre la main. Parce que tu tends aussi la joue. Parce que tu es « gentil » et ils sont « méchants ». Enfantin. Parce que tu crois toujours en l’état. Dingue. Parce que ça ira mieux demain. Tu es : un CDI. Ou un emploi aidé.

En Marche !

Parce que tu penses être un rebelle. Parce que c’est toi la Gauche. Parce que c’est quoi la Gauche ? Parce qu’un leader maximo ça te pose pas de problème. Parce que c’est certain qu’il faudra un peu de changement dans les pratiques politiques futures. Parce que tu es contre les fusions acquisitions. Parce que t’en as parlé aux communistes ? Tu es : un guérillero. Ou Debout la nuit.

Parce que tu profites du bordel général ambiant. Parce que t’es un opportuniste. Parce que t’es prêt à tout. Parce qu’un peu de populisme ne te dérange pas trop. Parce qu’à voile et à vapeur. Pourquoi pas. Parce que tu penses que la communication c’est le plus important. Parce que t’as oublié qu’il fallait quand même avoir des idées. Parce que t’as pas mis longtemps à t’affranchir de ta famille. Parce que t’as pas eu peur de griller les étapes. Tu es : Luke Skywalker. Ou Judas.

Europe Ecologie Les Verts

Lutte Ouvrière

Le parti de gauche

Parce que la lutte des classes. Parce que la lutte des classes. Parce que la lutte des classes. Parce que la lutte des classes. Parce que la lutte des classes. Parce que la lutte des classes. Parce que la lutte des classes. Parce que la lutte des classes... Tu es : un prolétaire. Ou Лев Троцкий (Léon Trotsky).

Parce que la pollution c’est mal. Parce que le gâchis c’est mal. Parce que le nucléaire c’est mal. Parce que la malbouffe c’est mal. Parce que l’individualisme c’est mal. Parce que la grande distribution c’est mal. Parce que la spéculation financière c’est mal. Parce que tricher avec la nature c’est mal. Parce que le chômage c’est mal. Parce que mentir à ses parents c’est mal. Parce que vous n’êtes plus que 8. Parce que « Noël Mamère les pieds sur Terre », meilleur slogan en 2002. Tu es : Gandhi. Ou Bouddha.

PS : Notre honneur nous a imposé de ne pas vous parler des partis d’extrême droite. Bien évidement.

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mots fleches

Niveau gringalet Solutions page 80

Sois flex et remplis sans complexe cette grille assez gentille.

PaR niko vayssié

DONC BIEN RENSEIGNÉE

BONNE RIGOLADE

TELle LA FLèCHE DE SAINT-BÉNIGNE

INAPTE AU CATCH

DIFFAMÈRENT

BELGE COURONNéE

UN BON TRUC POUR PLANER

FARCI AU BOUT

CONNAIS

ÇA TOUCHE DONC C’EST NUL

SERA BIEN SAGE

DÉVORA

NIQUA

DÉBARRASSÉE DE LA CAISSE

ASPIRA

 SE FERAIT DU BIEN

SPARSE N’EN EST PAS UN

ENVELOPPE JAUNE

DONC ACTIF

DÉCO ADO

S’ACCROCHE AU MARTEAU

À NE FAIRE QU’À MOITIÉ

ON NE LA PRÊTE PAS DISTRAITE

TOUT JOUR L’EST, EN FAIT

 CHEZ LE GROS VILAIN

SE PINCE EN AUTRICHE

UTILES AU POSTULANT

TACLERA

 FILS DE VÉNUS

CRAINT LE FER

UNE CUITE PEUT L’ÊTRE

TINTIN AVANT

ON ATTEND CELLE DU GROS VILAIN

RENDAIT TRANSPARENT

ACCUMULATION

ON PEUT Y ABRITER UN CHURCHILL

DANS LA MEHARI

PARFOIS FRONTALES

QUANTITÉ DE GNOUS EN BFC

PAS COMME FILLON, HÉLAS !

SE LE REGARDE-T-ON À LIVERPOOL ?

POISON MODERNE

COMME CE NUMÉRO

IL N’Y EN A QU’UN PAR AN

DEUXIÈME NIVEAU

N’IMPORTE COMBIEN

METTRAI LES VOILES

FAIT TREMBLER TOUT LE MONDE

ON S’Y RETROUVE QUAND ÇA VA MAL

PEUT VARIER DE NEVERS À PONTARLIER


par cédric de montceau illustrations : mr. choubi

horoscope

hFroscopitone Travail, Famille, Patrie, on vous révèle nos prédictions astrologiques. On a lu dans les étoiles d’une bouteille consignée vos rapports macabres à l’existence. Les roses de l’Europe sont le festin de Satan. Vous êtes certainement les seuls à vouloir aller à la piscine avec les natifs du signe de la Vierge. Talon d’Achille et verrue plantaire. Si vous êtes rose consultez un peintre en batiment ou postulez chez Jennyfer, ils cherchent des vigiles diplômés en physique quantique. Chance : congelez votre urine en prévision d’attaque terroriste.

Jean-Pierre Pernaud n’est pas le cousin germain de Jean-Claude Suze, cessez vos amalgames, vous fatiguez votre entourage. Être raciste est une tendance qui justifie vos efforts d’intégration, mais comme toutes les modes, ça finit par passer et vous finissez comme un gland avec un t-shirt Waïkiki trop large. Amour : la musique adoucit les meubles. La Bourgogne, et en particulier le Charolais, ne favorise guère la longévité des natifs du Taureau. Sauvez votre peau, bouffez un con. En mai, méfiezvous de vos tendances anthropophages. Si vous êtes de sexe masculin, évitez les villes du sud de la France et les vacances en Espagne. Santé : le végétarisme n’est pas une discipline paralympique.

Vous êtes la petite vérole de l’astrologie, travailler votre thème astral est un calvaire intellectuel. Le professionnalisme de ce magazine hors-normes hésite entre le dégoût et l’extase. En mai, ne fumez pas le muguet et cessez le nihilisme démocratique. Travail : la pression sociale n’est pas pur malt.

Vous n’auriez jamais dû refaire votre garde robe pendant les soldes, parce que vous croiserez à coup sûr votre sosie H&M à La Poste ou votre double Primark au McDo. Si vous avez quelque chose à dire, c’est le moment de vous taire. Famille : renforcez vos frustrations, privilégiez les discussions désagréables.

Votre troisième œil n’est pas un orgelet, c’est un narval haut. Abandonnez la planète dès que vous le pouvez, ce monde n’est pas fait pour vous. En cas de relents mythologiques, flattez-vous la croupe et faites confiance à votre partenaire, il ou elle ne vous loupera pas. Amour : quand on pisse dans son froc, ça ne tient pas chaud très longtemps.

Si vous êtes mort, que faire de ces prédictions douteuses ? Si vous êtes au stade final, vous ne trouverez ici aucun faux espoir. Si vous êtes électeur FN, vous êtes scandalisé par ce genre de magazine inutile. Si vous êtes con, vous pensez que la poésie est un art mineur. Chance : la peste et le choléra ne vous trouvent pas fréquentable.

Si votre point G est un Godwin, laissez-vous aller à la délicieuse luxure de la frigidité. Croisez les doigts, serrez des fesses, le destin c’est ce qui vous arrive quand vous ne vous y attendez pas. En avril, ne soyez pas impatient, la bêtise pense aussi. Santé : rongez vos ongles de pieds pour renforcer vos défenses immunitaires.

Faites-vous plaisir avec un taureau soumis à vos caprices, mais évitez les week-ends en Andalousie. Vous êtes taiseux, ne vous étonnez pas de passer pour un psychopathe. Votre timidité et votre manque de confiance en vous, ne sont pas un ailleurs, vous êtes une fiotte tout simplement. Restez fort et humide. Santé : si vous êtes imberbe, changez de signe.

Vous penchez à droite, recentrez-vous, Macron est aussi une ligne de vêtements et d’accessoires de sport, homme, femme, enfant. En mai -26% sur le deuxième polo acheté. Ne tombez pas dans la caricature, la réalité se suffit à elle-même. Bisous. Chance : make humans great again.

Vivre ses rêves n’est pas un hobby de tire-au-flanc. Si vous avez décidé d’être libre, il va y avoir du pain sur la planche. Ne le laissez pas pourrir. Mocassins à gland, polenta et arrivisme, le soleil est peut-être caché sous le canapé. Travail : Apparatchiks, surveillez votre collègue Stérol.

On ferait volontiers de vous un ange, mais ça risque de se voir à terme qu’on écrit des conneries. Vous êtes quand même une sacrée belle salope ! Vous protégez le butin tout en mettant la carotte à votre voisin. Madame Boutin, combien ça coûte de changer une lettre à son nom ? Amour : gloire et la fin des idées. Amen. 79


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Pourquoi je décide de m’abonner à Sparse : (merci de cocher la bonne réponse) C’est le meilleur magazine de Bourgogne-Franche-Comté. C’est le meilleur magazine de France. C’est le meilleur magazine d’Europe. C’est le meilleur magazine du monde. C’est le meilleur magazine de cette putain de galaxie. Merci d’envoyer un règlement de 25 euros (ou 30 euros, hors France métropolitaine ) par chèque libellé à l’ordre de SPARSE MÉDIA, avec vos coordonnées à l’adresse suivante :

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Les solutions des mots fléchés de la page 78

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HABILLE TON KEVIN !

Sapon : 1 dose de Pontarlier, 1 dose de sirop de sapin, 3 doses d’eau de source, 2 glaçons.

PaR Jean-Paul goûter et Giorgio armagnac

Ce mois-ci, Kévin va aux Écran de l’Aventure, à Lons-le-Saunier, avec les potes de ses potes. Prêt à tout pour être le meilleur aventurier, il se prépare une gourde de Sapon à partager.

Fais gaffe, y a des trucs écrits au dos, tu viendras pas pleurer quand ton Kévin sera découpé et que tu pourras plus les lire.


www.

.org

MARS - JUIN 2017 Sam 18 Mars

WINTER FAMILY + KRAKENSTEIN Dim 26 Mars

RODOLPHE BURGER + JEKYLL

Sam 01 Avril

IMPETUS Festival

France & Jura Suisse du 5 au 8 mai 2017

Suicidal Tendencies • Alcest

Nostromo • Regarde les Hommes Tomber Heads • Herod • Deluge • Cendres

Nedgeva • Fractal Universe • France Mutant Tat2 Noise Act • Oruko • Matt Jencik • Pauwels

22 Below • Wendy’s Surrender • White Butchery Erwan Keravec • Aurélio • Gérôme Nox • Anne Zimmermann Azar et les Machinasons • Grand Orchestre Bruitiste International

WWW.IMPETUSFESTIVAL.COM

Ven 07 Avril

ARTÚS + LOLOMIS Cosmic Tour

SEX ORGANS + LEGENDARY SHACK SHAKERS Ven 28 Avril

JAMES LEG + 11 LOUDER Ven 12 Mai

Ven 19 Mai

FRUSTRATION HILIGHT TRIBE

Sam 03 Juin

SOIRÉE DUB MEETING SOUND SYSTEM Sam 24 Juin

SOIRÉE ARCADANSE


cartographie

bang bang ! Entre 2011 et 2016, le nombre de licenciés des clubs de tir sportif a augmenté de 38% en France. L’obtention de cette licence est le seul moyen légal pour pouvoir se procurer une arme à feu dans le pays. Panorama des stands de tir de la grande région, pour ceux qui aiment la pratique sportive et ceux qui vivent dans la peur.

par sophie brignoli

Sens

La Patriote Senonaise Créé en 1879. Le stand est ouvert à toutes les personnes désirant se détendre et oublier les tracas de la vie active en venant faire quelques cartons.

Offremont

Société de Tir « La Miotte »

Gomméville

Le club de tir châtillonnais Terrains permettant de tirer à 25, 50, 75 et 100m. Il possède également une section Ball Trap Skeet Olympique.

Vesoul

Malgré l’image qu’il peut avoir au sein du grand public, notre sport n’est pas plus dangereux qu’un autre, mais le fait d’utiliser des armes implique une parfaite connaissance et une stricte application des règles de sécurité. Néanmoins, comme dans toute activité humaine, les accidents peuvent se produire.

Société de Tir Vesoul Andelarre Vénaray-les-Laumes

Société de Tir de Vénaray-les-Laumes

Tir au pistolet, à la carabine sur cible fixe et mobile. Loisirs et compétition. À partir de 8 ans.

Tous les calibres d’armes sont autorisés (hormis ceux qui sont interdits par la législation).

Gevrey-Chambertin

Club de tir de Gevrey-Chambertin

Le club de tir de Gevrey est la plus vieille association sportive de Gevrey-Chambertin, créée en 1876 suite à la guerre perdue de 1870. À l’origine, le tir pratiqué était le tir au fusil de guerre à 200m. Decize

Tir Sportif Decizois Pour ceux qui désirent venir découvrir les disciplines dans notre stand de tir, les adultes peuvent venir les mardis de 18h à 20h et les vendredis de 17h30 à 20h. Les enfants sont accueillis tous les mercredis à partir de 14h.

Le Creusot

Besançon

Société de tir de Besançon Vous faites partie d’une collectivité, d’un comité d’entreprise ou plus simplement vous désirez découvrir le tir en famille. La STB propose à votre groupe des soirées découvertes du tir sportif à air comprimé et aux armes à feu.

Stand de tir du Gros Chaillot Son stand et ses équipements permettent aux tireurs de tous niveaux de s’entraîner ou de se distraire dans les conditions de leurs choix, avec leurs propres armes ou les armes prêtées gratuitement par le club.

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Les Rousses

Tir sportif du Haut-Jura Stand des Rousses Situé sous le gymnase du collège, il dispose de 7 postes de tir précision 10m, 5 postes de tir pistolet standard 10m et 1 poste de tir pistolet vitesse 10m. Fondé en 1874 à la suite de la défaite de 1870, car il fallait initier les Français au tir.


Sparse, le futur. instagram.com/sparsemagazine


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