Sparse 19 (juin 2017)

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sparse www.sparse.fr • gratuit • à lire dans tes chiottes magazine tiré à 1 million d’exemplaires

sparse | numéro 19 | trimestriel | juin. juil. aoû. 2017

guide moderne de la vie

chez les bikers de la bresse bon gamin vilains garnements du rap rnst le street art back in town les 40 piges du consortium rencontre avec le dernier pirate de loire ÉLECTIONS piège à cons ? turbo on a testé la course de côte mathieu sapin 5 ans avec depardieu + the blaze la gifle électro horoscope page shopping roman-photo les meilleurs spots naturistes du coin

gratuit.


5e rencontres littéraires

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23 Z 25 juin 2017

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Graphisme : studio Indélebil

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Cour de Flore et salle des États DU PALAIS DES DUCS ET DES éTATS DE BOURGOGNE BIBLIOTHèQUE CENTRE-VILLE LA NEF Bibliothèque patrimoniale et d’étude PLACE des cordeliers PLACE FRANCOIS RUDE hôtel de Voguë

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édito.

Salut les marcheurs, c’est Sparse. Tout va changer. C’est fait. On change d’ère... On nous annonçait un vent nouveau, il arrive. Un pur vent de liberté qui nous emporte tous et qui va révolutionner la France et ses habitus d’un autre âge. Vous le sentez aussi ? Non ? Vraiment ? Attends, ferme les yeux. Tu ne sens rien ? Si. Tu sens quelque chose. Une petite douleur, hein ? Oui. Une douleur anale... Petite certes, mais dérangeante, permanente. Alors faut-il se réjouir de subir ça plutôt qu’une grosse fissure au fion? Certes, mais ça fait mal quand même. Et ça n’a rien d’un vent nouveau. Bon courage à tous. Chablis Winston

« La seule monnaie qui paie c’est la sueur » Miss Bell, prof ’ de danse dans Fame, d’Alan Parker (1984)




ours Ce magazine est édité par Sparse Média. Siret : 750 725 806 00020 - APE : 9499Z www.sparse.fr - contact@sparse.fr Directeur de publication Pierre-Olivier Bobo rédacteur en chef Antoine Gauthier Contributeurs Aurore Schaferlee, Cédric de Montceau, Chablis Winston, Franck Le Tank, Jeff Buckler, Louise Vayssié, Martial Ratel, Mr. Choubi, Nicdasse Croasky, Simon Galley, Sophie Brignoli, Tonton Stéph, Doug Ritter, Riddimdim Selecta, Badneighbour, Victoire Boutron, Benjamin Moreux, Lilian Elbé, Ash, Augustin Traquenard, James Granville forever Direction artistique internetinternet

PhotographIes Alexandre Claass, Louise Vayssié, Vincent Arbelet, Édouard Roussel Illustrations Hélène ‘Microbe’ Virey, Mr. Choubi, Léa Zamolo, Michael Sallit DÉVELOPPEMENT COMMERCIAL Romain Calange COMITÉ DE RELECTURE Marion Godey, Aurore Schaferlee, Maria Mood, Chan Haut Les Badges Couverture Bress’Poulos, Louhans, 71. Photo : Alexandre Claass Imprimeur Chevillon Sens Dépôt légal : à la sortie du magazine ISSN : 2260-7617 La rédaction décline toute responsabilité quant aux opinions formulées dans les articles, celles-ci n’engagent que leurs auteurs. Tous droits réservés © 2017 Merci à nos partenaires ainsi qu’à celles et ceux qui ont permis la réalisation de ce numéro. Prochain numéro : septembre 2017 Sparse bénéficie du soutien du Ministère de la culture et de la communication, fonds de soutien aux médias d’information sociale de proximité

sommaire amuse-bouche 3. édito 8. guestlist 10. CONTRIBUTEURS 11. pulitzer session 12. courrier des lecteurs 13. LE BON COIN 14. l’essentiel reportage 16. avec les bikers dans la bresse entretien 22. the blaze, joyau électro portrait le dernier pirate de loire

24.

interview 30. et si on changeait les modes de scrutin rencontre bon gamin, le rap de maintenant

34.

diaporama 38. au musée des beaux-arts de dijon focus sur les traces de l’artiste rnst

42.

anniversaire 48. le consortium : 40 piges immersion course de côte à colombey

54.

interview mathieu sapin a suivi depardieu

58.

welcome to my hood place des grands hommes

64.

Dessert 70. la page mode 72. la cuisine de so fish 74. ROMAN PHOTO 78. SÉLECTION MUSICALE 79. crash-test 80. le coup de coeur de la rédac’ 81. HOROSCOPITONE 82. CARTOGRAPHIE


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Ouvert 7j/7 du midi au soir


guestlist PAR la rédaction photos : DR

meghane Schevenement

nicolas barral

Les Passagers du Zinc Besançon

Sceni Qua Non - Partie(s) de campagne, 13 au 16 juillet 2017 Ouroux-en-Morvan

Quel produit met François Fillon sur ses sourcils pour les rendre si soyeux ? De la vaseline.

Plutôt Lassale ou Cheminade ? Lassale, pour l’accent, le vin blanc et le béret qu’il faut libérer sans conteste.

Tu vas encore sur Chatroulette ? J’y suis jamais allée ! Par contre j’ai des copines qui m’ont raconté leurs petites mésaventures de mecs avec leurs bites, ben c’était pas joli joli !

Pourquoi sur Facebook les gens disent que McDo c’est des enfoirés qui paient pas leurs impôts en France, mais en fait ils se précipitent quand même dans leurs restaurants ? Ces genslà payent-ils leurs impôts en France ? Supposentils que manger McDo contribue à aggraver le trou de la sécu ? Pourquoi Facebook ? Être indigné et oublier. McDo doit contribuer à l’élan d’amnésie collective.

C’est quoi le plus la honte : être roux ou socialiste ? Ah facile ! Aujourd’hui la honte c’est d’être socialiste ! Le vrai socialisme est mort, c’est officiel. Par contre comme je me colore les cheveux en roux, je dis respect aux rouquins. Si y’a plus de papier toilette, tu t’essuies avec la main ? Ça va pas, non ! Je suis une meuf, j’ai toujours des mouchoirs avec moi. Erasmus en Corée du Nord, ou colo en Tchétchénie ? Erasmus en Corée du Nord. L’ordre, la discipline, ça me cause. Qui sera le prochain maire de Besac’ ? Benjamin Rogez de l’association bisontine Mighty Worm. Il est en campagne depuis des années avec le hashtag #rogez2010. Son projet est hyper cool : culture, santé, éducation, les concerts et la teuf ! Ton secret ultime pour un p’tit déj réussi ? Des flocons d’avoine avec plein de fruits et surtout du kiwi, le tout dans du lait d’amande. Des litres de café et du pamplemousse pressé. Quand on voit leurs gueules à tous les deux, tu penses pas que Joe Dassin est le père du petit Emmanuel Macron ? Il y a bien un truc au niveau de la bouche ! Du coup j’aurais préféré qu’il fasse carrière dans la chanson en tant que sosie officiel de ce bon vieux Joe.

Pour une Bourgogne-Franche-Comté plus calme, doit-on se séparer de la Haute-Saône ? Doit-on vraiment souhaiter une BourgogneFranche-Comté plus calme ? Vive la Haute Saône ! Le futur de la Nièvre passe par quoi ? C’est le futur qui doit passer par la Nièvre. Sinon, la ligne TGV, la forêt du Morvan, le cinéma de SaintHonoré-les-Bains, les festivals.

Pierre-alain nicole

Champion du monde 2016 de Xterra Triathlon Dijon

La mode de la Tektonik, tu sais, la danse… toi aussi tu es tombé dedans un jour ? Nan. C’est quoi selon toi la prochaine hype vestimentaire ? Short, chaussettes hautes et baskets blanches. La meilleure série TV de tous les temps ? Les frères Scott. Les mecs qui portent des rouflaquettes, sérieusement, ça serait pas des gros enculés ? Chacun son style ! Ton spot favori pour boire un coup à la cool ? Mac Callaghan l’hiver et Beer Country l’été… Tu préférerais vivre à Vesoul ou à Gueugnon ? Gueugnon… Plus proche du sud. Qu’y a-t-il de plus méprisant qu’un Dijonnais ? Un Parisien.

Un rade à nous conseiller fortement ? Chez Marilou à Villapourçon. Son blanc-cassis est une merveille.

Y’a quoi qui tourne dans ton smartphone ou ta bagnole ? The Chainsmokers, Vianney.

C’est le remaniement, tu prends quel ministère ? Le ministère des Affaires Populaires, ou le ministère des Merveilles et des événements heureux.

Doit-on interdire le port du pantacourt ? Arf, pas fan…

Tu manges la peau du poulet ? J’en reviens pas… Je suis de plus en plus végétarien… Mais oui, la peau c’est ce qu’il y a de meilleur ! Le festival de Cannes, c’est surfait. On devrait faire quoi pour célébrer le cinoche selon toi ? Aller au festival Partie(s) de Campagne, c’est là que ça se passe. Du court, du doc, des cinéconcerts, une garden party, des animations pour les enfants, un feu d’artifice… 8

Quel(s) magazine(s) traînent dans tes WC? Triathlète Magazine, Vélo magazine. Emmanuel Macron est au pouvoir, t’as pas envie de créer une start-up là tout de suite ? Nan pas trop. Pas fan.



contributeurs PAR chablis winston et Pierre-Olivier BOBO photos : DR

Hélène Virey « Microbe », comme on l’appelle aux Philippines, exerce ses talents d’illustratrice à temps partiel. Son activité, ce pour quoi elle est programmée, ce qui a fait d’elle ce qu’elle est aujourd’hui, c’est la boxe à mains nues. Des bidonvilles de Jakarta jusqu’aux bordels de Danang en passant par les faubourgs de Manille, de Paris ou d’Alger... Hélène écume les pires zones du globe pour gagner sa croûte avec ses poings. Contre des coqs, des ours, des hommes, des tigres et mêmes des anciens nazis... Peu importe l’adversaire, c’est toujours la même issue : une boucherie. Son histoire a inspiré Full contact, le film avec

Augustin Traquenard Un cavalier qui surgit hors de la nuit, court vers l’aventure en vélo... Depuis qu’il a arrêté de fumer, Augustin ne se déplace qu’en vélo. Pour éviter de grossir. Il est allé couvrir l’Impetus festival à Montbéliard, en vélo, l’Arrosoir à Nevers, en vélo. Tant et si bien qu’il a fini, par hasard, 1er d’une étape de Paris-Nice cet hiver alors qu’il allait seulement chercher du pain à Mâcon un dimanche matin. Balaise.

Tonton Stéph Enfin sorti de sa planque dans le maquis corse, Tonton est de retour. Et de manière fracassante. Il nous sort la totale, la complète, œuf, jambon, fromage : des interviews léchées, la une de tous les tabloïds, une candidature aux législatives sous l’étiquette La République en marche, la dictature en déchembre, un livre pour la rentrée et un sans-faute au mondial de flipper à Las Vegas. Il pète la forme. He’s in the game.

Martial Ratel Au fin fond de l’Univers, à des années et des années-lumière de la Terre, veille celui que le gouvernement intersidéral appelle quand il n’est plus capable de trouver une solution à ses problèmes. Quand il ne reste plus aucun espoir : Martial Ratel. Martial Ratel, tu n’es pas de notre BFC, tu viens de Seine-et-Marne, Martial Ra-tel. D’aussi loin que l’infini, tu descends jusqu’ici pour sauver toute la preeeessssse.

Anne-Sophie Lapix Non contente de chouraver la place de David Pujadas à la tête du 20h de France 2, Anne-Sophie estime avoir encore du temps et surtout n’a pas l’envie de se placardiser dans un truc aussi ringuard qu’un JT de service public. Elle propose quelques piges pour Sparse et vend de la pub. Parce qu’avec un mari président de Publicis, Anne-So’ a de la ressource. C’est bon pour nous ça.

Chablis Winston Diplômé d’un master en marketo-journalisme à la Burgundy School of Business, Antoine Gauthier alias Chablis Winston est le rédacteur en chef de ce magazine. Son job consiste à hurler sur ses rédacteurs qui ne rendent pas leur texte à temps et à changer les titres d’articles qu’il trouve en général « vraiment pourris ». Malgré son salaire à 5 chiffres chez Sparse, on l’annonce tous les étés partant pour intégrer la rédaction de France 3 Bourgogne et ainsi retrouver son idole de toujours : Lilian Melet.

Pierre-Olivier Bobo Armé de son seul peigne et de son pot de gel, Pierre-Olivier Bobo se bat pour l’égalité capillaire. Laisser toutes ces crêtes et ces teintures peroxydées envahir nos villes et nos campagnes est une vision qu’il ne peut pas supporter. Il ne peut abdiquer face à l’horreur que lui propose la jeune génération téléréalité/football. Sa mèche, c’est son atout majeur, Mason Capwell de Santa Barbara, son héros. Il va tenir. Ça va passer et il en sortira grandi. Tiens bon Pierro.

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courrier des lecteurs Merci pour toutes vos lettres d’amour ou d’insultes. contactez-NOUS sur facebook, twitter ou instagram

« Salut mon doudou T’es parti sans faire de bisous ce matin... Je voulais te dire que tu as oublié tout ton attirail sur ma table de nuit. Je l’ai lavé, tu peux passer le prendre quand tu veux. » Edith, Les Maillys (21)

« Salut my man, Vous n’êtes pas venus faire un article sur notre vente de charité pour le Burkina. C’est pas cool, bande de prétentieux bobos. » Gégé, Besançon (25)

« Bonjour mon magazine fraîcheur. Il parait que ça y est, tout a changé, on lave plus blanc que blanc ? C’est le renouveau depuis l’élection de Manu à la tête de notre beau pays ? » Sonia, Montchanin (71)

« Bonjour Messieurs-Dames, Vous m’avez l’air bien renseignés et j’ai souvent des infos grâce à vous que je ne trouve pas ailleurs. Alors, je vous demande : quand va-t-on enfin pouvoir licencier plus facilement pour que le pays aille mieux ? » Michel, Belfort (90)

« Salut. Au départ, je trouvais ça sympa mais maintenant j’hésite parce que je me fais disputer par mes amis. Peut-on se moquer de Brigitte Macron sans passer pour un misogyne gérontophobe ? » Mat, avallon (89)

« Re. Alors à ce compte-là, est-ce que je peux me moquer du fait que Macron est homosexuel ? » Mat, avallon (89)

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Réponse de la rédaction Merci Edith. Je passerai mais tu peux me contacter sur mon mail perso autrement. Ou m’envoyer un petit SMS, parce que là, bon, je suis au boulot quoi... ça fait pas sérieux. Bisou.

Réponse de la rédaction Non, c’est pas parce que tu m’envoies un message que je vais faire un article. Des messages, on en reçoit 50 par jour. Faut que ça nous intéresse un minimum quand même. Des événements humanitaires, il y en a 200 par mois. Rien qu’en BFC et ce depuis 40 ans. Des originaux, très peu. Donc bon... Essaye un titre original à ton message la prochaine fois, ou alors un événement original. Tu veux te barrer en vacances au Burkina en prétextant que tu vas construire une école en Afrique, c’est ça ? Ne compte pas sur moi. Réponse de la rédaction Eh oui, tu t’en es rendue compte Sonia. On ne peut pas te la faire. Tout a été bousculé ! Bayrou, Collomb, Le Drian, Lemaire... Que des nouveaux, des petits rookies prêts à tout bousculer. Et les plus obscurs sont de vrais rebelles. Je crois que le Premier ministre était ouvrier qualifié et qu’il a fait un peu de taule... ou alors qu’il est énarque. Enfin un truc bien alternatif dans le genre. Prépare-toi parce que là, tout va changer !

Réponse de la rédaction Rassure-toi, Michel, bientôt. ça paraît logique de licencier plus facilement pour embaucher plus facilement, non... ? Non ? Et même, pourquoi s’emmerder à embaucher franchement, Michel ? Hein ? Arrête d’espérer une réforme du droit du travail. Prends des auto-enrepreneurs, des prestataires. Ils paieront les charges eux-mêmes et tu pourras leur dire de se casser quand tu le voudras. Et le pire, c’est qu’ils ont l’impression d’être libres... Du pain béni pour toi.

Réponse de la rédaction Oui, bien sûr. C’est une vieille dame. Pourquoi ne pourrait-on pas se moquer ? Si c’est ça maintenant, on ne peut plus se moquer des vêtements, des coiffures et de l’âge des gens ? Vas-y.

Réponse de la rédaction Oulah non ! Déjà, on en n’est pas du tout certain. C’est pas parce qu’il n’est pas très viril qu’il l’est. Et en plus ça non ! Dans l’espace public, c’est pas possible. C’est pareil avec les Juifs et les Arabes. à la rigueur en France, tu peux te moquer des Chinois, ça passe. Oui je sais, les limites de la morale ne sont pas bien définies. Alors on reprend. Un vieux, un jeune, un roux, un pantalon slim, une teinture blonde : oui. L’orientation sexuelle, la religion ou la couleur de peau : non. Ok ? Je sais. C’est compliqué...


shopping PAR franck le tank Page spéciale véhicules. Ouvrez l’oeil et le bon, de vraies annonces se cachent dans cette page.

Pédalo de marque Mariner [sport/hobby] par Richard V.

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Barquette Formule 1

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l’essentiel par tonton steph & chablis winston

Dimanche 30 avril

Grotesque, la vie politique et l’honneur de Nicolas DupontAignan, qui décide de donner ses quelques pourcents à la Marine. RIP, la dignité. Une bonne nouvelle toutefois : Henri Guaino annonce qu’« il songe à arrêter la politique » – Ciao !

Jeudi 20 avril

Lundi 1er mai

On commence en fanfare à Besançon, où le client d’une boulangerie, tout de même vêtu d’un cache-sexe, aurait « frappé la vendeuse de brioche ».

Tour de magie, une grosse blonde arrive à transformer la fête du travail, du droit du travail et de la défense des travailleurs en journée anti-FN qui finira en plébiscite pour un candidat libéral. Quelle époque épique. Celle où un propriétaire d’une Porsche, sur le parcours du défilé à Paris, l’a retrouvée remplie d’autocollants de la CGT.

Dimanche 23 avril

François Fillon assure « rendre l’argent » s’il est élu par ses concitoyens. Plus de gens ont tenu à voter pour lui que pour Méluche. Justice distributive, toujours, un sans-papier, lui, prend quinze jours de prison ferme pour avoir volé des saucisses pour se nourrir. Il sera ravi de savoir que Macron est, pendant ce temps, quasiment déjà élu dès le premier tour.

Mardi 2 mai

Meudon. Une femme est arrêtée promenant en laisse un quinquagénaire nu avec une balle dans la bouche. Prenez ça, l’Yonne et La Crampe. Sinon on apprend que François Fillon, disqualifié pour le second tour, envisage néanmoins de garder pour lui le pactole de 3,3 millions d’euros liés à sa campagne. Rends l’argent, FDP !

Lundi 24 avril

Journée gueule de bois, évidemment, puisque entre lui et le FN... Ailleurs, l’Arabie Saoudite est élue à la Commission des... droits de la femme de l’ONU. Autant nommer Marine présidente de SOS racisme. Aussi, trois combattants de l’Etat islamique sont morts après avoir été attaqués, dimanche, par des... sangliers dans le sud de Kirkouk. Fake news, en fait. Les identitaires ont dû aimer.

Mercredi 3 mai

Une info qui ne plairait pas à notre collègue Benjamin, qui testait dans le dernier Sparse une boîte échangiste : en HauteLoire, une jeune femme se voit refuser un emploi en raison de son implication de la vie libertine locale. Merci qui ? Sinon, on apprend que par le biais d’un simple bouton au bureau ovale, Trump peut se faire amener du Coca. Au summum.

Mardi 25 avril

Des chercheurs détectent que des souvenirs épigénétiques pourraient se léguer sur quatorze générations. On imagine aisément que certains ont été transmis à quelques Français ces derniers jours, en particulier ceux de mamie Jeannine – oui, celle qui a été tondue en 44.

Dimanche 7 mai

Un Dijonnnais a résumé le sens de la journée par un graffiti clairvoyant et laconique : « 2017, MDR ». 16% des votants pour le président l’auraient fait au second tour par adhésion à son programme, et le total de l’abstention, des votes blancs et nuls atteint les 34% de la population en âge de voter. 22% pour les fachos.

Mercredi 26 avril

Tu pensais avoir l’air con avec ton sac bleu Ikéa lors de tes dernières courses ? Relativise : la marque Balanciaga vient d’en produire un identique, dans la même bâche immonde pour la modique somme de 2000 euros.

Lundi 8 mai

Samedi 29 avril

C’est toujours sympa de se rendre au marché des Halles de Dijon, le samedi matin, il fait beau et tout. Petit bémol dans le pays aux 2,6 millions de logements vacants (même hors résidences secondaires), un SDF est décédé en pleine rue à Dijon dans l’indifférence générale. Ouais mais t’avais aussi pris des radis cette année ?

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Gloire nationale à Ruffey-lès-Echirey, patelin de Côte-d’Or où les bulletins Le Pen ont été subtilisés pendant la nuit. Il n’y a pas de petites victoires. Pendant ce temps, la sémillante Christine Boutin s’inquiète de la victoire du candidat à... la pyramide du Louvre, et surtout de son score 66,06% affiché un moment. Putains d’Illuminatis.


Jeudi 18 mai

« Un homme déguisé en asperge déclenche un scandale dans une église anglicane », titre Slate. Putain, il devient cinglé, Attali. Peut-être pas autant que ce pasteur du Zimbabwe, désireux de montrer à ses fidèles l’étendu de sa foi, qui s’est fait dévorer par trois crocodiles alors qu’il essayait de marcher sur l’eau.

Mardi 9 mai

Visiblement éméchés, deux individus sont mis en geôle à Amiens après avoir « fait l’hélicoptère avec leurs attributs devant des forces de l’ordre ».

Vendredi 19 mai

Les joyeusetés continuent avec ce navigateur du Morbihan qui a jeté sa femme par dessus-bord, ce « gendarme libertin qui s’exhibe en pleine patrouille» dans les Bouches-du-Rhône ou ce dealer stéphanois qui s’est endormi devant le commissariat avec ses 10 kilos de cannabis. Une belle journée.

Vendredi 12 mai

Le maire de Luxeuilles-Bains, en HauteSaône, fait la chasse aux corbeaux à l’aide de buses américaines. Ne pas y voir d’allégorie concernant la victoire du néo-libéral Macron : il se trouve que c’est un des 10 départements où Le Pen a précisément fait son plus haut score (81,82% à Tartécourt). Prends ça, Brazey-enPlaine.

Dimanche 21 mai

On apprend que les électeurs de la 3ème circonscription de Côte-d’Or pourront voter pour B. Obama aux législatives. Génial. Bon, c’est un certain Boris Obama, aucun lien. Mais on l’adore.

Samedi 13 mai

Ailleurs, un homme est arrêté en plein go-fast, et affirme qu’il pensait livrer du sucre. Ben voui. Y’a combien entre ici et Maastricht ? Français de l’étranger, toujours : on apprend que le pays dans lequel Marine Le Pen est arrivée en tête est la Syrie. Plus que la Haute-Marne...

Mardi 23 mai

Un Jurassien se lance dans la traversée Prémanon-île de Ré en rollerski, soit 729 km en 48h... Visiblement, y’avait plus de Blablacar dispo. Et le train, c’est trop cher.

Dimanche 14 mai

USON, club de Nevers de rugby, se qualifie pour la pro D2. La ville boit pendant 5 jours.

Jeudi 25 mai

On annonce Igor et Grishka Bogdanoff au Bloody week-end d’Audincourt (25), ils vont, paraît-il, lever une partie du voile sur les mystères de l’univers. Et le mystère de leur menton, on dévoile ça quand ?

Lundi 15 mai

Sens de la mesure, encore : Donald Trump affirme qu’aucun politicien ne fut davantage harcelé que lui dans l’histoire. Prends ça, Nelson Mandela.

Lundi 29 Mai

Mardi 16 mai

Nemesis et justice immanente, toujours, Dupont-Aignan aura un candidat FN en face de lui dans son fief de l’Essonne. HAHAHA. Lumières, encore : un grand débat fascinant est proposé par le Bien Public, journal de Côte-d’Or, sur la meilleure façon d’éclairer la rue de la Liberté à Dijon. Putain et si on mettait un arbre qui tourne mais genre super lumineux !? Ou des LED à la con comme sous la Fuego ?

Licencié au club de Babysontin à Franois, Loïc Delalande, 17 ans, a décroché la troisième place aux championnats du monde de babyfoot en double (catégorie espoir). Y’a quelques jeunes dans la région auxquels il reste de vraies valeurs. // T.S. & C.W.

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los poulos hermanos Tonnerre mécanique dans la Bresse reportage par sophie brignoli, à louhans photos : alexandre claass

À travers les films L’équipée sauvage, Easy rider, le livre Hells Angels de Hunter S. Thompson et plus récemment, la série Sons of Anarchy, l’univers des bikers fascine. Une vision fantasmée dans laquelle on imagine des motards libres de toutes contraintes, mi hommes – mi loubards, parcourant à longueur de journée les routes du sud-ouest américain, cheveux au vent et couleurs sur le dos. Mais que reste-t-il de ce mythe en 2017 ? Qui sont les bikers en France et en Bourgogne ? Nous sommes allés au cœur de la Bresse, à Louhans, lors du 8ème rassemblement organisé par les Bress’Poulos en mai dernier, pour tordre enfin le cou aux clichés. Ou presque. Le rassemblement qui réunit près de 12.000 personnes sur un week-end est installé au centre-ville de Louhans, place de la Charité. L’endroit qui accueille aussi chaque semaine le grand marché agricole avec ses volaillers professionnels et ses cages à pigeons, lapins, canards et autres oiseaux ronronne cette fois au rythme des motos. La Bresse, c’est un peu le midwest américain ; c’est plat, les routes sont longues et droites, et on y croise plein de bikers. Gratuit, l’événement des Bress’Poulos se veut convivial et réunit tous types de publics et de grosses cylindrées venus des quatre coins du pays. Familles et habitants, vieux motards et néophytes déambulent tranquillement entre les stands entre deux animations. L’ambiance est plutôt bon enfant ; sur le parking les badauds se pressent au milieu des centaines de motos garées, admirant les carrosseries impeccables des customs

(comme les chopper ou les dragster) et prenant des photos des bolides. Plusieurs d’entres elles sont customisées à l’extrême ; l’une traînant un cercueil, une autre un tonneau de Jack Daniels. Quelques voitures de collection et de gigantesques pick-up sont également de sortie. Côté stands, on trouve ici tout ce qui se rapproche de près ou de loin de l’univers des bikers : casques, couteaux, gants de moto, écussons en tout genre, vestes en cuir, lingerie cuir et dentelle sans oublier la traditionnelle buvette et le stand de saucisses. En entrant sur le site, on peut aussi admirer des véhicules militaires américains de la Seconde Guerre mondiale, collection privée appartenant aux membres de l’association Memory Bresse Revermont 44, qui perpétuent ainsi le souvenir civil et militaire de la période 39-45. Et plus on s’approche de la scène, plus on 16

entend distinctement les enceintes cracher les blagues grivoises de notre animateur pour la journée : Yannick « Bad boy » Fanet. « J’espère que vous avez pris vos lunettes de soleil messieurs, parce que ça va être compliqué de mater discrètement pendant le show sexy avec madame à côté ! Il est possible que vous finissiez sur le canapé ce soir... ». Un brin misogyne, parfois même carrément homophobe, Yannick a l’ingrate tâche d’animer les temps morts et certaines des animations de la journée. Et entre le rappel des différents partenaires et la publicité pour la tombola, avec à la clé une Iron HD (Harley Davidson) à gagner, on ne sait plus trop si on est sur un rassemblement ou dans un Colryut de campagne. Les pires instants sont ceux où il se met à parler des filles sexy de l’événement : Blandine et Léna. À notre arrivée, on les découvre perchées sur des échasses, vêtues d’un body échancré et de


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Fais pas ton timide, touche !


Hey Bernard, regarde-le moi celui-là, il est venu en tricycle.

« Les filles, la moto et les groupes, c’est un package, ça va bien ensemble. Mais faut que ça pue sous les bras un peu... » Mitou, fondateur des Bress’Poulos 18


La Bresse, c’est un peu le midwest américain : c’est plat, les routes sont longues et droites et on y croise plein de bikers.

plumes dans le dos, façon carnaval de Rio. Elles s’arrêtent tous les deux mètres pour se faire prendre en photo aux côtés de motards et de familles. C’est d’ailleurs elles qui rythment véritablement la journée ; en 6 heures de temps nous les aurons vu trois fois, sur des échasses, lors d’un défilé de lingerie et pour finir en train de « laver » des motos. Pourtant, qu’elles soient en string sur scène, ou en t-shirt blanc mouillé et shorty sur une selle de moto, la blonde et la brune gardent toujours le sourire. Et alors que dans l’audience, leurs shows captivent aussi bien les hommes que les femmes, et même les enfants, on s’interroge sur le lien entre ces petites pépées et les grosses motos. Dans le genre cliché, on ne fait pas mieux. La moto et les filles. Nous tombons alors sur Mitou, ancien président et fondateur du club des Bress’Poulos en 1993. À 70 ans, il fait toujours de la moto avec les 80 autres membres du club et il se déplace encore régulièrement sur des concentrations (les motards parlent de concentration plutôt que de rassemblement). « Parce que la moto, c’est un way of life, c’est incomparable... Ride free ! Et puis il y a le mythe américain aussi. » Le retraité, qui est déjà allé plusieurs fois aux Etats-Unis en Californie, n’a jamais mis les pieds à Milwaukee (où se trouve le siège de Harley) : « Ah non les usines c’est pas mon truc, sinon j’irais à Amora ou chez Seb ! » En confiance, le vieux biker nous fait des blagues sur Dijon et se permet même quelques sous entendus, notamment quand on lui demande si les filles font partie du way of life. « Les filles, la moto et les groupes, c’est un package, ça va bien ensemble. Mais faut que ça pue sous les bras un peu... non ? Enfin, faut pas que ça sente trop la savonnette non plus. D’ailleurs on vous attend. » Comme on le sent à l’aise, on lui pose cash la question qui nous anime : « Et vous en pensez quoi des

Hells et des Bandidos ? » Interloqué, Mitou se renfrogne avant de nous répondre : « Si vous posez la question comme ça, personne ne vous répondra. Il faut savoir que la réussite d’un club dépend principalement des relations que celui-ci va entretenir avec les Hells et les Bandidos. Ce sont des MC (motos clubs) qui existent au niveau international et qui sont divisés en chapitre, leur réseau est impressionnant. Nous on a eu ce soucis là, il y a trois ans et on a réglé le problème en montrant comment on s’appelait, et en prouvant qu’on n’avait pas de velléités particulières avec eux. On pourrait passer une journée entière à parler de ça... Une soirée tant qu’à faire, c’est mieux. »

puisqu’on ne fait pas payer l’entrée. Il arrive que sur certains rassemblements payants, ces motos clubs imposent de faire la sécurité et récupèrent ensuite les entrées à leur compte. Leurs métiers, c’est le recouvrement de créances ou la sécurité, en général. En Saône-etLoire, un club a proposé à une commune et à la gendarmerie de faire la sécurité d’un commerçant qu’ils rackettaient régulièrement. Aux Etats Unis, c’est monnaie courante. Dans les grandes villes en France aussi, les Hells font des recouvrements. Ils font le travail que la police ne ferait pas de toute façon. Mais nous, on est à 100.000 pieds de ça, on a besoin de montrer qu’on est structuré et qu’on est costaud face à eux. On résiste. »

Bien que peu nombreux en France, les MC se différencient des simples clubs de motards notamment au niveau des règles qu’ils appliquent. Avec une organisation très pyramidale et des fonctionnements quasi militaires, les jeunes recrues des MC, appelés prospect, se voient mettre à l’essai parfois plusieurs années durant pour prouver leur loyauté au groupe. « Quand un prospect rejoint un MC, il lègue sa moto au club, ce n’est plus la sienne. Parfois même sa femme ou sa copine d’ailleurs... Ne me regarde pas comme ça ! Et si un membre tombe en panne à Valence, un prospect de Besançon peut être envoyé pour le dépanner. Il n’aura pas le choix. À la limite il va même lui donner sa moto et remonter autrement. Faire partie d’un MC, c’est contraignant et ça peut être très dangereux. Nous on a de la chance ici

LÉGION ÉTRANGÈRE. Mais tous les MC ne sont pas des clubs de bandits. Sur le rassemblement, on tombe notamment sur le stand des Brothers in Arms, un MC de bikers militaires ayant une portée humanitaire. Avec une trentaine de membres actifs en France, les bikers récoltent des fonds pour les blessés au combat. Pour l’ex-commandant en second d’un régiment de la légion étrangère avec qui nous discutons, et qui a perdu cinq hommes entre le Mali et l’Afghanistan, ce loisir a toujours été une évidence : « La moto c’est la liberté, la prise de risque, c’est l’engagement aussi. C’est un sport d’audace, ça nous parle en tant que militaire ». Il estime que les « méchants » MC sont ceux qui arborent l’insigne 1%, qui fait référence à tout un pan de l’histoire des Hells et des Bandidos. « Il faut remonter à la fin de la Seconde Guerre

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« Maman, on mange quoi ce midi ? »

mondiale au moment de la création des premiers MC composés essentiellement d’anciens militaires livrés à eux-mêmes au retour de la guerre et qui commençaient à vivre de racket et de petits délits... Les incidents suite à un rassemblement de bikers à Hollister en Californie en 1947 sont à l’origine du terme 1%. L’AMA (American Motorcycle Association) ayant déclaré à l’époque que 99% des motards étaient respectueux de la loi. Ils sont toujours marginaux avec une particularité aujourd’hui, puisqu’ils sont très surveillés et peuvent être interdits de séjour. » Comme chez les Hells, les recrues des Brothers in Arms doivent prouver leur valeur et leur intérêt aux membres du clubs et se voient attribuer un parrain. La fin de cette période d’essai d’un ou deux ans est marquée par une cérémonie très officielle où l’on remet ses couleurs au membre qui prête alors serment devant ses frères, comme chez les 1%. SONS OF ANARCHY. Le vestiaire de la concentration est lui aussi tenu par un MC, de pompier cette fois, les Wind & Fire. Eux non plus n’ont pas l’air de vilains gros durs, ils sont pompiers après tout. Et comme pour Hugues Aufray vient du Val-de60 Saône.


« Quand un prospect rejoint un MC, il lègue sa moto au club, ce n’est plus la sienne. Parfois même sa femme ou sa copine d’ailleurs »

Monsieur Buldozer est venu avec sa maman. C’est mignon.

les militaires, ils ne semblent pas rencontrer de problème particulier avec les factions de rebelles. « On n’emmerde personne et surtout les mecs partent du principe que le jour où ils se cassent la gueule, et ben c’est nous qui allons les ramasser ! Nous avons des valeurs intrinsèques, comme les Brothers in Arms. Après on est comme tout le monde ; faut pas venir nous pisser sur les pompes ! Mais le respect est une notion importante pour nous. » Les pompiers semblent même au dessus du lot pour ce qui est de la place réservée aux femmes : « Nous avons des bikeuses dans l’asso alors qu’il y a encore plein de clubs Harley qui leur sont interdits, à tort ou à raison. Ici, on les considère comme nos frères, sans distinction de genre. C’est comme avec les Niglo, c’est pareil. » Les Niglo, un autre club présent sur le rassemblement, sont constitués en HDC (Harley Davidson Club), l’échelon intermédiaire entre un club et un MC. Niglo, qui signifie hérisson en gitan, est

un club de forains, tous les membres possèdent une Harley. « Nous sommes 13 chapters dans le monde, avec près de 1.200 membres » m’explique l’un d’entre eux. C’est le sosie bressan de Jax dans Sons of Anarchy. Eux aussi organisent des rassemblements, notamment à Gueugnon et sont ouverts à toutes les motos. « Ce qui nous plaît sur ces événements, c’est d’abord l’ambiance, le contact avec les gens. On n’est pas bornés HD non plus, on est ouverts aux vieilles voitures, même françaises, on accepte tout le monde ! On rencontre ici les autres clubs, on parle de notre passion, même à des gens qui n’ont pas de motos. Les motards, c’est aussi beaucoup de tatoués donc on va aussi parler de ça... » Quand on évoque la série Sons of Anarchy, le Jax bressan rigole franchement : « C’est pas du tout réaliste... À part le côté fraternité, la représentation d’un groupe très soudé, le reste c’est Hollywood. C’est pas parce qu’on fait partie d’un club qu’on va tuer 5 gars dans la journée ! Par contre, comme 21

dans la série, on est tous frères, on partage des valeurs communes ». Traîner entre potes, boire quelques bières et parler méca’, il semblerait que la plupart des motards vivent leur passion comme n’importe quel autre bénévole d’une quelconque association. On doit être finalement pas très loin des 99% de bons gars. À noter que nous n’avons d’ailleurs croisé aucune personne éméchée sur la journée. Les motards savent bien que bécane et beuverie ne font pas bon ménage... Mitou a d’ailleurs lourdement insisté sur le fait qu’ils faisaient gaffe avec l’alcool, ayant pour la plupart déjà enterré des amis bikers... Quelques concerts étaient également programmés sur le weekend, notamment le one man band Dhead Shaker, et son dirty blues rock, avec des titres accrocheurs comme Shrinking vagina (littéralement le vagin qui rétrécit). Car le mythe américain, c’est aussi la musique et le rock qui racle. Comme le bruit d’une Harley au démarrage. // S.B.


interview par chablis winston et augustin traquenard illustration : léa zamolo

The Blaze

se fait un nom Jonathan et Guillaume Alric, les deux cousins de The Blaze ont retourné le petit monde de la musique ces derniers mois en passant, comme ça se fait souvent, par Internet. à base d’électro planante et de clips léchées, beaux et fous, dont on ne ressort pas indemne du visionnage. Ils ont tellement foutu le bordel sur la toile que tout le monde les attend au tournant du live. Petit entretien exclu avec un duo qui maîtrise son temps et qui essaie de se faire discret dans les médias pour garder son intimité. On fait le point avec eux au moment où ils s’apprêtent à passer des écrans d’ordinateur aux scènes des grands festivals d’Europe. The Blaze, next big thing ?

par cœur mais pour les faire, ils ont forcément besoin de la musique qui vit aussi de son côté en étant diffusée sur les radios ou dans les soirées.

Le thème de la virilité et de la bromance sont centraux dans le clip Virile mais aussi dans Territory. Il y a un problème avec les filles ? Pas du tout, on s’est juste intéressé au thème de la masculinité sur ces deux clips et à comment faire ressortir une certaine part de féminité qui existe chez les hommes. Ce sont souvent des choses que l’on oppose dans nos sociétés, nous essayons de les réunir avec poésie.

Alors, qu’est-ce que ça donne en live, le côté vidéo ? C’est encore secret, on vous invite chaleureusement à venir le découvrir à nos concerts ! Vous n’avez pas l’impression qu’en ce moment, on ne peut rien vous refuser, que vous pourriez tenter ce que vous voulez. Vous le sentez comme ça ? C’est allé trop vite ? Les choses sont allées vite, c’est vrai. Mais on garde la tête froide en restant concentré sur notre musique et notre cinéma. Il n’y a que ça qui nous importe. On tentera toujours des choses quoi qu’il arrive.

Le projet The Blaze, c’est deux cousins. Les thèmes de la famille et des retrouvailles sont abordés dans le clip de Territory avec beaucoup d’émotions. C’est inspiré par vos histoires personnelles ? Oui, beaucoup. Le clip de Virile pourrait être une allégorie de ce qu’on vit quand on est en studio, en dansant, fumant, etc. Et pour Territory, par exemple, la scène du gorille est directement inspirée de ce que nos grands frères nous faisaient pour jouer avec nous quand on était gosse. Vous avez marqué les esprits avec vos vidéos. Vous n’avez pas peur que ça fasse passer la musique au second plan et qu’on ne retienne que ces vidéos ? Pour nous, les deux sont indissociables car on travaille les deux en même temps. Ce qui nous offre le luxe de pouvoir revenir à tout moment sur l’un ou sur l’autre. Beaucoup de gens nous disent connaître les chorégraphies de nos clips

« Beaucoup de gens nous disent connaître les chorégraphies de nos clips par coeur » 22


« Le clip de Virile pourrait être une allégorie de ce qu’on quand on est en studio en dansant, fumant, etc. » Guillaume, tu viens de la Nièvre, tu as vécu un moment sur Dijon, on te connaissait. Tu es aussi reconnu dans le milieu dub sous le nom de Mayd Hubb. ça marchait fort pour toi. Tu continues à produire et à tourner ? Aujourd’hui The Blaze me prend tout mon temps donc mises à part les quelques dates qu’il me reste, je mets Mayd Hubb en pause pour quelques temps. Je pourrais produire ou jouer ponctuellement mais rien de plus pour l’instant.

On a l’impression que ça bosse pas super vite, que vous prenez votre temps. C’est juste une impression ? Vous êtes des gros feignants ? On est au studio tous les jours et on travaille beaucoup ! Le temps que l’on prend est le temps dont on a besoin pour faire ce que l’on fait. Entre le son, les clips et le live, c’est énormément de boulot et surtout, avant de sortir quoique ce soit, on veut être certains que c’est exactement ce que l’on cherche. On se remet énormément en question.

Passer du dub à l’électro, c’est une question de maturité dans ton parcours de musicien ou c’est juste pour gagner plus de pognon et serrer des meufs ? C’est surtout quelque chose que je n’ai pas calculé. J’ai toujours avancé en faisant ce que j’aime et en essayant de rester un maximum ouvert à de nouvelles expériences. The Blaze est né d’une vraie rencontre mais aussi d’une histoire d’amour avec l’électro et le cinéma. // C.W. et A.T.

Vous avez dû en faire des conneries pendant les week-ends et les vacances quand vous étiez mômes. Ça se passait dans quel coin ? On s’est toujours vu chez notre grand-père dans le sud pour Noël et pendant les vacances d’été. Des conneries, on en a fait un paquet, mais on ne vous dira rien ! 23



Le dernier pirate dde Loire portrait par victoire boutron et benjamin moreux, à nevers illustrations : michael sallit

Jean-Marc Benoit, Bibi ou Bineuil, au choix. Dans tous les cas, vous évoquez le spécialiste de la Loire, pêcheur, charpentier de marine et passionné par ce qu’il appelle « la rivière » pour désigner les deux fleuves de la région, la Loire et l’Allier. Il connaît ces derniers en long, en large et en travers. Nous avons eu envie de découvrir cet homme authentique qui rend nos paysages de Loire encore plus beaux et qui est devenu l’une des figures phare de la marine. Rencontre avec l’un des derniers pirates de Loire.

« J’enfante à chaque fois que je fais un bateau » Jean-Marc Benoit

Héritier d’un père pêcheur de concours dans sa jeunesse, puis professionnel, et d’une mère tenancière de l’Auberge des Pêcheurs au Guétin (là où se trouve le Pont Canal qui permet au canal latéral à la Loire de passer au-dessus de l’Allier), Jean-Marc a toujours traîné la rivière: « J’ai vu la richesse de mon père, sa qualité de vie, obligatoirement ça te prend. Puis j’ai voulu la reproduire ». En commençant par quelques parties de pêche à la ligne avec ses copains, il a obtenu à l’âge de 15 ans sa première carte professionnelle qui lui a donné le droit de manipuler tous les engins de pêche. « Gamin, je me suis beaucoup épanoui au bord de l’eau. » Sa passion, il la tient principalement de son père, le prédateur de la Loire qui connaissait toute la faune et la flore du coin, et qu’il observait à longueur de journée. La connaissance de ce dernier provenait de sa capacité à mettre en éveil le moindre de ses sens pour être le plus performant possible. « La pêche, c’est 90% d’observation et 10% pour le reste. » Il nous explique alors comment il a appris à adopter les réflexes et l’œil de lynx d’un pro : « Par exemple, 25

pour la pêche à la truite, tu regardes à la surface de l’eau quelle mouche vole pour ensuite la reproduire et devenir hypothétiquement le roi du pétrole ! »

Rugby et Donald’s Pub Sa vie lycéenne fut compliquée, Bibi était un bad boy qui rêvait des prochains courants d’eau à explorer. Plus tard, son expérience dans le rugby lui permettra de s’ouvrir au monde et de lier des contacts. JeanMarc faisait partie de l’équipe de l’USON de Nevers, que l’on connaît, entre autres, pour son penchant festif. Bibi commence alors à sortir et à découvrir l’incontournable Donald’s Pub de Nevers et son ancien propriétaire Donald qui détenait aussi les pubs de Tours et d’Angers. « Quand ils ont ouvert le pub d’Angers, ils avaient besoin de quelqu’un et voilà, ça s’est fait ». Devenu l’un des piliers des différents pubs, Jean-Marc y est resté trois ans, de janvier 91 jusqu’à août 94. « L’expérience au pub a été une vraie transition dans ma vie, c’était la découverte des gens, de la musique, du monde qui m’entoure ». Ces années


« Quand ils ont ouvert le pub d’Angers j’avais l’idée d’y aller par l’eau. Un soir à la fermeture, on a construit un radeau avec des vieux volets. On a mis une quinzaine de jours à y aller, ça nous a permis de découvrir la Loire ailleurs » Jean-Marc Benoit

de barman lui ont permis de revenir sur la Loire et ont été le début des trois années consécutives des fameuses et démentes Trans Pub. « Quand ils ont ouvert le pub d’Angers, j’avais l’idée d’y aller par l’eau. Un soir à la fermeture, on a construit un radeau avec les volets d’une vieille maison du Pont Canal, avec comme mission de ramener un fût de Guinness à Angers. On a mis une quinzaine de jours à y aller, ça nous a permis de découvrir la Loire ailleurs. » Le lendemain même, cette folle expérience prend une tournure plus importante : le premier équipage de 5 personnes s’élargit vite à 5 radeaux. On y retrouve les figures incontournables des alentours, composées à 90% de musiciens des Tambours du Bronx. « On était suivi médiatiquement, tous les ans on vivait l’aventure à fond. Les Trans Pub se finissaient généralement par la venue des pompiers, des hélitreuillages... On n’a pas eu de mort, par chance, mais ça sentait la fin. » Ces descentes devenues mythiques sont arrivées au moment du renouvellement de la marine de Loire, ce qui a alors permis à Jean-Marc de développer son attrait quant à cette dernière. « Je voyais chaque jour des nouveaux bateaux neufs, des tôliers de la marine, je n’avais qu’à ouvrir l’œil et à en tirer des leçons. » On assiste alors aux prémices de la naissance du charpentier de marine.

La construction de bateau Dans les années 90, cet autodidacte s’amusait à se faire des barques pour l’association des Méandres qui a pour mission de promouvoir l’histoire et le patrimoine de la Loire. Lorsque son père prend sa retraite, Bibi reprend la pêche professionnelle. Cette activité, il ne peut l’exercer sans bateau comme moyen de locomotion. Il achète alors son premier bateau. Le Courlis passe d’outil de travail à maison avec le temps : « Ma femme et moi, on a vécu dans ce bateau pendant 6 saisons. » La pêche devient de plus en plus aléatoire, les nouvelles espèces végétales ou animales venues dans la Loire affectent l’activité et Bineuil se tourne alors définitivement vers la construction de bateau. Ses premières propres créations, le Tibec 1 et le Plogi, étaient des petites coques faites de contreplaqué avant de commencer à ne faire que des bateaux en bois de fil. « Je regardais faire les charpentiers ainsi que des photos pour apprendre les gestes qui ensuite ne se perdent plus. » Si vous souhaitez vous procurer un bateau, Jean-Marc insiste d’abord sur la nécessité de déterminer les usages, d’établir un cahier des charges pour enfin produire un plan en fonction 26

du budget. Ce maître d’œuvre travaille avec son acolyte et soudeur Sébastien Boudin, qui s’occupe de toute la partie métallique et de l’assemblage, tandis que lui s’occupe de tout le bois. Pour les fournitures de bois, les deux hommes sont désireux de travailler au niveau local, « d’une part pour réduire l’empreinte carbone car on achète pas loin de chez nous et d’autre part car cela nous permet de connaître l’historique du bois, quand il a été abattu, depuis combien de temps etc. »

Maison flottante L’usage de ces bateaux varie selon les envies : pour des associations de bateliers, pour des privés, pour des balades… « Ça va de la petite barque pour aller à la pêche jusqu’à la maison flottante. » Une maison, c’est justement l’objet de sa dernière création, pour un étudiant d’Orléans désireux de vivre sur l’eau. « Il a toujours vécu au bord de la Loire avec ses parents et a voulu y habiter. On lui a construit le Skidbladnir, bateau assez grand pour contenir tous les dieux, et qui a comme caractéristique de pouvoir se démonter et de rentrer dans une poche... » Après 5 mois de travail, l’étudiant se voit doté d’une maison sur l’eau de 30m2 habitables, d’un toit-terrasse de la même dimension, une plage avant de 15m2 et une plage arrière de 12m2. Ce bateau fait partie des 9 engins déjà fabriqués depuis le début de l’année par Bineuil et Sébastien, ce qui leur demande un travail à plein temps. « J’enfante à chaque fois que je fais un bateau ». Les deux hommes vivent aujourd’hui de cet artisanat dont les prix varient de la petite barque qui peut valoir de 1 500 à 2 000 euros jusqu’aux bateaux plus importants qui peuvent monter jusqu’à 80 000 euros. Jean-Marc vit dans la plus grande sobriété, dans la vie privée comme dans la vie professionnelle. Sans carte de visite ni site Internet, son show-room à lui, ce sont les événements auxquels il participe.


Quand nous l’avons vu, il s’apprêtait à partir en tant qu’ambassadeur de la Loire à Ostende, au Festival de navigation et du patrimoine maritime qui a étendu sa renommée sur toute la côte belge. À l’automne, il naviguait sur le Vistule en Pologne, en septembre il se représentera au Festival de Loire d’Orléans, le plus gros rassemblement d’eau intérieure d’Europe, où les passionnés comme les passants s’arrêtent devant ses bateaux. « On me propose des événements, on me démarche et je largue les amarres. Ma carte de visite, c’est moi sur la Loire.» Nous voilà tous partis pour voir cette carte de visite de plus près, au Bec d’Allier, lieu de point de rencontre de la Loire et de l’Allier qui vous en met plein les yeux avec les bancs de sable, les forêts alluviales, et avec maintenant la nouvelle toue cabanée de Bineuil. Cette toue cabanée est un bateau composé d’une coque

et d’un abri sur le dessus, dit « cabane », qui offre un hébergement avec une vue imprenable sur son environnement naturel. L’heureux propriétaire de ce bateau nous explique même penser vendre sa maison afin de s’y installer définitivement.

« Si j’avais les moyens, je ferais tous les fleuves du monde » Aujourd’hui, Bibi connaît la Loire du Mont Gerbier jusqu’à l’estuaire et tout l’Allier. Mais ce contemplatif ne veut pas s’arrêter là et est attiré par tous les fleuves. « Tous les jours, je découvre un nouveau vin, un nouveau fromage, c’est le pied ! Si j’avais les moyens, je ferais tous les fleuves du monde. » Sa vie sur l’eau l’amène à devenir sensible à l’environnement. Les fleuves ont été victimes de l’action de l’homme et notamment 27


« Ma carte de visite, c’est moi sur la Loire » Jean-Marc Benoit, spécialiste de la com’

des produits phytosanitaires. La multitude de déchets plastiques le sidère : « De la bouteille de pisse du routier jusqu’aux serviettes hygiéniques de la nana de Bourges, tout y passe et c’est lamentable. Il faut en prendre conscience. » Ce nostalgique du temps d’avant nous explique la fréquentation d’antan sur la Loire, et nous passionne : « Les plus gros bateaux étaient les trains de bois de 75 mètres de long puis les bateaux à vapeur sur la basse Loire près de Tours. Ils faisaient 45 mètres, chez nous sur l’Allier, et naviguaient 180 jours par

an. Aujourd’hui, la Loire est plus domestiquée qu’avant, elle est soumise au drainage, aux usages d’eau. Quand on la regarde à Nevers on s’imagine difficilement les bateaux à vapeur qui passaient sous le pont. » Si pour lui la rivière devrait être plus jolie que ça, cela ne l’empêche pas de se projeter dans 10 ans au bord de l’eau, encore et toujours. Son rêve ? « J’aimerais que quelqu’un mette un coup de frein à main qui puisse arrêter le monde et que je descende. J’aimerais être avant tout ça, c’était merveilleux. » // V.B. et B.M. 28


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sparse

guide moderne de la vie

« Depuis que je lis Sparse, je défonce tout le monde au Trivial Pursuit. Et ça c’est important pour pécho des gonzesses » Sparse, le magazine qui rend attirant.


interview par tonton stéph, à dijon photos : DR

Bourre mon urne Quoi ? Encore de la politique ? Entre la présidentielle et la legislative, le lecteur sature et ne souhaite plus forcément qu’on évoque ce qui l’a crispé pendant des semaines. Sauf que Sparse n’a pas envie de te bassiner avec les petites mesquineries politiciennes, mais plutôt de faire le point sur ce que devrait être une authentique approche de ce qu’est la démocratie : une approche réflexive. Pour ce faire, nous avons donné la parole à Guillaume Coqui, maître de conférences en philosophie à l’université de Bourgogne, qui s’intéresse aux modes de scrutins alternatifs.

« Les mécanismes plus ou moins tordus du vote pseudoutile et du coup stratégique de billard à trois bandes, qui ne donnent à peu près jamais le résultat souhaité »

Pouvez-vous expliquer aux profanes en quoi consisterait l’élection présidentielle au scrutin et jugement majoritaire, organisé par le site laprimaire.org, en partenariat avec le CNRS, l’Université de Paris-Dauphine et l’Ecole Polytechnique ? Elle se déroulerait en un seul tour. Actuellement, avec le scrutin uninominal majoritaire à deux tours, on demande à chaque électeur de choisir un candidat et un seul à chaque tour. Cela fait des siècles que l’on s’interroge sur des méthodes d’élection alternatives: Condorcet a élaboré un type de scrutin à un seul tour où chaque électeur doit classer les candidats (on calcule ensuite quel candidat gagnerait le plus de « duels » contre les autres candidats, c’est long et un peu compliqué, sauf à le confier à des machines en lesquelles tout le monde n’aura pas confiance, et il peut y avoir des cas dans lesquels aucun candidat n’émerge de cette procédure). Le jugement majoritaire fait un petit pas de plus, en demandant aux électeurs de les évaluer plutôt que de les classer : l’électeur attribue aux candidats qu’il veut classer l’une des six mentions « très bien », « bien», « assez bien », « passable », « insuffisant », « à rejeter ». S’il n’évalue pas un candidat, on considère qu’il 30

l’évalue « à rejeter ». On regarde ensuite pour chaque candidat quelle est la plus basse mention que lui attribue la majorité des électeurs (on additionne les scores de ses mentions en partant de la plus haute). Ainsi, si un candidat n’est jugé « très bon » que par 10%, mais au moins « assez bon » (« très bon » + « bon » + « assez bon ») par 60% des électeurs, il sera mieux classé qu’un candidat jugé « très bon » par 25% mais au plus « passable » (« à rejeter » + « insuffisant » + « passable ») par 60% des électeurs. Toute la procédure est expliquée en détail sur le site jugementmajoritaire2017.com. C’est original. Mais en quoi les électeurs s’y retrouveraient-ils davantage ? Un des intérêts de ce système, c’est qu’il est sans intérêt de voter contre ses convictions, ou en dépit d’elles. Les mécanismes plus ou moins tordus du vote pseudo-utile et du coup stratégique de billard à trois bandes, qui ne donnent à peu près jamais le résultat souhaité y compris par ceux-là mêmes qui y ont recours, n’ont pas lieu d’être avec ce système. L’autre intérêt, c’est que le corps électoral a de bien plus grandes chances d’élire le candidat qu’il souhaite élire, alors qu’avec notre mode


Et hop-là, tout le pognon a disparu. Bravo Silvio.

Hugues Aufray vient du Val-deSaône.

« Nous sommes habitués à déléguer le pouvoir plutôt qu’à l’exercer. Ces habitudes-là ne se perdent pas d’un claquement de doigts » Guillaume Coqui, maître de conférences en philosophie à l’université de Bourgogne

actuel de scrutin, c’est tout sauf garanti: les deux candidats qui survivent au premier tour ne sont pas forcément ceux que le corps électoral jugerait dans l’ensemble les plus satisfaisants, mais ceux qui ont ramassé au premier tour le plus d’électeurs les préférant à tous les autres (ou bien, perversité du système, s’étant persuadé de voter utile en leur donnant leur voix). On pourrait même réfléchir à des clauses du type : on ne peut être élu qu’avec la mention majoritaire « passable » (si tous les candidats ont la mention majoritaire « à rejeter » ou « insuffisant », on revote, avec d’autres candidats). Est-ce que de telles nouvelles modalités seraient suffisantes pour pallier les défauts de la cinquième République et de son régime semi-présidentiel ? Mélenchon en appelait en à une sixième, ce nouveau mode de scrutin serait-il préférable ? À mon avis il n’y a pas de lien direct, et en tout cas pas d’incompatibilité. On peut tout à fait juger que notre régime accorde trop de pouvoir au président de la République et à l’exécutif en général, d’ailleurs je le pense. Mais c’est du fait des types de mandat (mandats représentatifs : l’élu fait ce qu’il veut, et ce en ton nom, aussi longtemps qu’il est élu), et de la façon dont les pouvoirs sont distribués sous la Vème République, pas vraiment à cause des modes de scrutin. On pourrait imaginer que la Vème continue avec un scrutin comme le jugement majoritaire; on pourrait très bien imaginer aussi qu’une Constituante, en fondant la VIème République 31

(que personnellement je souhaite), prévoie de changer de mode de scrutin. Plus généralement, la frustration ne restera-t-elle pas forcément la norme, en démocratie ? Le rôle du legislateur n’estil pas de faire en sorte que celle-ci baisse au maximum, sous peine de prendre des risques en terme de défiance à l’égard de la représentation ? Je ne pense pas non plus qu’on puisse échapper complètement à la frustration. Les lendemains d’élection ressemblent inévitablement aux lendemains de cuite : le ricanement de celui qui n’a pas la gueule de bois parce qu’il n’a rien bu est un rire jaune. Ce n’est pas demain la veille que nous élirons quelqu’un qui fera l’unanimité, c’est sûr ; ça n’empêche pas de chercher à éviter d’élire des gens qui ont la majorité contre eux. Or c’est ce que notre mode actuel de scrutin parvient à faire. Quitte à ce que les citoyens soient mieux « compris » – qu’il ne soit pas question de seulement les laisser s’exprimer – devrionsnous être favorables à plus de référendum dans ce pays ? Honnêtement, ça je n’en sais rien. J’ai beaucoup d’amis qui sont partisans d’un contrôle citoyen beaucoup plus strict sur la politique, mais je doute qu’on trouve longtemps des citoyens assez nombreux et qui soient prêts à y consacrer une part énorme de leur temps. Nous sommes habitués à déléguer le pouvoir plutôt qu’à l’exercer. Ces habitudeslà ne se perdent pas d’un claquement de doigts.


Le retour de la momie.

Cela dit, un référendum révocatoire à mimandat, pourquoi pas ?

« Les lendemains d’élection ressemblent inévitablement aux lendemains de cuite : le ricanement de celui qui n’a pas la gueule de bois parce qu’il n’a rien bu est un rire jaune »

Un mot sur l’idée qu’il pourrait y avoir un « vote utile », tu y vois une aberration ? Franchement, j’y verrais plutôt la norme, en fait. Tout dépend ce qu’on appelle vote utile. Un bulletin n’est pas une déclaration d’amour ni un bout de l’âme de chaque électeur, c’est une petite partie du mécanisme par lequel nous mettons telle personne plutôt que telle autre à tel poste. Du coup, d’une part, ne pas voter pour quelqu’un dont on estime qu’il n’a aucune chance d’être élu, je le comprends très bien. Si l’on veut diffuser des idées, on milite, et ça se fait bien avant l’élection. D’autre part, voter pour « le moins pire », ce n’est pas voter utile, c’est voter tout court ! Ce que je comprends moins bien, c’est des calculs qui confondent des résultats de sondages avec des certitudes, ou bien les déclarations de types qui affirment voter comme ils votent aujourd’hui en prévision des élections de 2022 : c’est du charlatanisme, c’est aussi stupide que d’affirmer que voter blanc c’est voter pour X ou Y. De la même façon, les types qui ont voté pour tel candidat parce qu’ils le pensaient plus capable qu’un autre de battre au second tour MLP ont fait un calcul absurde : presque n’importe quel candidat l’aurait battue au second tour. Que ce soit avec 55%, avec 60% ou avec 65% ou 82% des voix n’a aucune espèce d’importance ni d’intérêt. Les Français sont-ils des veaux ? T’es pas tenté de détester les démocrates, comme Platon. 32

Je veux dire : concernant le jugement et le scrutin majoritaire, n’as-tu pas le sentiment que c’est le genre de projet qui circule parmi les élites qui désirent changer les choses, alors qu’immanquablement la multitude continuera de voter pour des profils plutôt que pour des programmes, par exemple ? Tenté de détester les démocrates ? Oh si, régulièrement, mais je résiste à cette tentation comme à d’autres ! Concernant l’opposition entre les élites et la multitude, je vois ce que tu veux dire, mais à un moment, il faut savoir si nous sommes une démocratie ou non. Si oui, et que le peuple veut voter pour un rofil, très bien. Après tout, nos institutions le justifient : on élit une personne et celle-ci n’est pas légalement tenue de faire ce qu’elle a promis ; c’est seulement si elle souhaite être réélue qu’elle ne doit pas faire, en tout cas pas trop ouvertement, complètement n’importe quoi. Un changement de scrutin ne risque pas de l’empêcher, mais ce n’est pas le but recherché. Si une face ou un profil plaît plus que les autres à la majorité, ainsi soit-il ! La réflexion sur les modes de scrutin a un objectif beaucoup plus modeste, elle se contente de chercher un système dans lequel le corps électoral élit réellement le candidat que le plus grand nombre, même si c’est sans enthousiasme délirant, juge satisfaisant (même si, dans ce plus grand nombre, il y a des gens pour qui ce candidat n’est qu’un deuxième choix). Le jugement majoritaire, je trouve, est un bon système de ce point de vue, sans doute le meilleur qu’on ait concocté : il est assez simple à mettre en place, simple à comprendre et à utiliser pour l’électeur, et il remplit son but. Y a-t-il une mesure présente dans une autre démocratie dont tu espères qu’elle pourrait être importée dans l’hexagone ? Ce qui serait démocrate, pour le coup, ce serait un système de mandats impératifs, au moins pour certaines charges. Tu ne mets pas simplement ton élu à telle place, tu lui donnes un ordre de mission, à lui de le remplir. Mais c’est compliqué : il faut prévoir de contrôler l’action de l’élu, et s’assurer que les missions ou les ordres ne sont pas irréalisables. L’article 27 de notre actuelle Constitution frappe tout mandat impératif de nullité ! Merci pour ces éclaircissements, et aussi pour avoir relayé, à l’époque du débat présidentiel, cette punchline : « Débattre avec Marine Le Pen, c’est comme jouer aux échecs avec un pigeon. Quel que soit ton niveau, elle va faire tomber les pièces, chier sur le plateau et se pavaner comme si elle avait gagné. » Avec plaisir, dans les deux cas! // T.S.


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rencontre par tonton stéph, à dijon photos : vincent arbelet, alexandre Claass

de bons gamins Sensation dans le petit univers finalement assez policé du hip-hop français : un duo de rappeurs supervisé par un producteur déter’ semble faire l’unanimité. Comme Ill & Cassidy des X-Men longtemps avant eux avaient leur producteur génial Géraldo, Ichon et Loveni sont propulsés par Myth Syzer, qui a déjà bien fait ses preuves outre-Atlantique. Ce dernier était absent lors d’une rencontre menée par votre serviteur. On s’est donc concentré sur les deux autres loustics du crew Bongamin de Montreuil, nouvelle capitale du rap jeu.

M

ontreuil en effet, c’est aussi d’où vient Prince Waly, un associé de cette entreprise de malfaiteurs consistant à mélanger – ce qui ne manque pas de faire enrager ceux qui méprisent celle-ci – la trap avec des sons bien connotés 90’s – qui eux reçoivent bien entendu les suffrages de ceux qui ne jurent que par leurs classiques. Piochant autant du côté de Hi-fi du 45 Scientific et du Time bomb d’Oxmo q ue de gros sons d’Atlanta ou de Memphis – voire de Bruxelles (Damso et Hamza, que Myth Syzer produit aussi), les Bon Gamin réussissent la synthèse parfaite. Quand au concept Pour la nuit de leur tournée, il annonce la couleur dès l’affiche, électrique, montrant les trois comparses avec des masques d’assassins prêts à foutre la merde pour quelques heures. Et c’était un sacré jour d’orage, alors, à la Péniche Cancale, lorsqu’ils sont arrivés quelque peu fatigués de la date précédente, la veille à Nantes ; Ichon et Loveni se sont tout de même prêtés au jeu des questions-réponses, malgré l’évidente lassitude que peut procurer le besoin d’avoir à s’expliquer sur quelque chose qui repose avant tout sur du vécu, de la spontanéité. C’est ce qui est revenu le plus souvent lors de 34

cet entretien où il était question d’authenticité de la démarche dans l’atmosphère à la fois pesante et frustrante de l’industrie du spectacle : les meilleures productions ne sont pas forcément calculées, tout comme les featurings qui, précisent Ichon, ne sont en aucun cas recherchés : ils viennent d’eux-mêmes en fonction des rencontres, connivences et convergences momentanées.

Polyvalence et spécialisation Certes, les deux MC’s se verraient bien, pourquoi pas, collaborer avec un artiste américain que produit leur DJ de la Roche-sur-Yon (prends ça, Genlis), mais à aucun moment cela ne constitue un projet en soi, même si c’est une question rebattue sitôt que des rappeurs sont quelques peu talentueux ; on est tenté de les confronter à leurs confrères. En la matière, j’avais comme beaucoup découvert les Bon Gamin dans leur titre complètement obsédant Louper, qui a déjà bien deux ans, en compagnie de Joke, l’ancien prodige


de Stunts, de Montpellier. Le petit protégé de Teki Latex de TTC, managé depuis par Def Jam France, a un peu disparu des radars. Interrogé sur le sujet, les deux compères ne se disent pas du tout inquiets pour lui, tout en reconnaissant que les logiques de hype et de ringardisation se sont quelque peu radicalisées, l’éviction des projecteurs se faisant toujours plus rapidement. C’est là que le profil d’Ichon attire quelque peu l’attention du connaisseur du milieu, lui qui est également... Mannequin. Oui, oui, pendant la Fashion Week et tout ! Il lance même une marque de fringues, c’est dire. Tout ceci, comme son inspiration avouée – le groupe de trip-hop Portishead, c’est complètement inattendu – n’est pas spécialement marqueur de virilité, dans un rap-jeu largement plombé par la redondance des clichés. Les Bon Gamin s’insurgent

contre ceux-ci, entendant bien revendiquer la multitude de leurs inspirations, même si Loveni admet être plus clairement branché hip-hop. Ichon a, à côté, tout de l’animal inclassable. Il est également frappant qu’à l’instar de Metek, le bougre a un talent d’acteur indéniable. On vous laisse mater le clip du titre éponyme de son album, FDP, où, plus insolent que jamais, il se fait démolir le portrait dans un commissariat par les kissdés, sourire aux lèvres. Mais il ne faut pas en rester à tous ces apparats. Ecouter les divers sons présents sur le Soundcloud des uns et des autres renseigne vite sur la qualité principale de ce groupe : phrasé au cordeau, rimes complexes, pas de refus de l’introspection, sans pour autant tomber dans les niaiseries pour midinettes. Il y en avait pourtant quelques-unes, ce soir-là. 35

Didier Bourdon, Bernard Campan et Pascal Legitimus.


Allez, cul-sec gros.

Un son qui brasse Three 6 Mafia et Lunatic, en passant par le label Death Row ou la trap la plus soignée et actuelle

Du bar Le Jeune (Paris X) à Dijon On n’a pas trop compris pourquoi la salle s’est vidée en plein show bouillant. En fait si : puisque c’était en fait rempli de kids, ceux-ci devaient avoir au mieux la permission de minuit, et ont dû rentrer fissa sous la couette rêver de biatch, de flingues et de grosses voitures. Loveni s’est tout de même largement plus attaché qu’avant à faire attention à ce qu’il raconte, lui qui a un petit frère et une famille qui écoutent ses productions. Là-dessus, un débat a amené un clivage entre les deux compères, Ichon estimant que ce n’est pas grave si certains rappeurs (genre : Ali, Kery James, Médine) se servent du mic’ pour faire de la prédication morale, voire moralisante. Pour lui, il en faut pour tout le monde, pour tous les goûts. Il y a assez de place pour tous les styles et les publics. Je lui ai d’ailleurs fait remarquer que toute la salle n’était remplie que de petits

Les meilleurs moments de leur passage à Dijon

blancs de la classe moyenne locale – et ça ne lui a pas échappé – ainsi qu’à Loveni : mais ne s’adresser qu’au public du Lumpenproletariat en Lacoste des banlieues, là-aussi, c’est un lieu commun qui a fait long feu. Pourtant, force est de constater que l’imagerie gangsta est omniprésente chez un groupe qui puise son inspiration aussi bien du côté de Three 6 Mafia que de Lunatic, du label Death Row que de la trap la plus soignée et actuelle. L’alchimie détonne aussi lorsque Myth Syzer fait péter un boulon à la Péniche Cancale en proposant un remix survitaminé de Civilisé que dans des titres comme Bon Jeune, où le propriétaire du super bar Le Jeune, dans le Xème, à Paris, l’excellent rappeur Jeune L.C., vient leur prêter main forte. Cet établissement passe tout le son dont peut rêver le bicraveur de trap en ce moment. Et c’est peu dire qu’il s’est symboliquement délocalisé ce soir-là, grâce aux bons soins de La Vapeur et de l’assoc’ Sabotage. // T.S. 36

• La fin de l’interview, où il était question de featurings avec des Ricains, et qui a donné lieu à l’évocation de celui de Rohff avec… Pharrell Williams sur la B.O de Taxi 3. Hilarité générale quand il a été question de la distance abyssale entre la balourdise du premier et la finesse du second, à qui il aurait demandé de « virer les vocalises de gonzesses » pour faire plus ghetto. • La découverte de la veste d’Ichon, mannequin à ses heures, sur laquelle sont brodées partout les trois lettres « FDP », nom d’un de ses futurs projets. • L’annonce d’un album à venir de Loveni et d’une mixtape de 18 titres d’Ichon. Lourd. • Un gimmick sous forme de cris de corbeaux complètement what the fuck : hommage à Games of throne, ou à The Crow ? • Un renoi complètement zinzin sur scène pour pogoter au nom du groupe, avec une coupe de cheveux douteuse. Après vérification, il semblerait que son enthousiasme débordant accompagne le groupe dans la tournée, il s’agirait d’un obscur MC auquel ils ont dû s’attacher. • La punchline de départ de Myth Syzer : « la prochaine fois, on revient avec DJ Mustard ! » Pitié... // T.S.


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en chantier de faire cette visite Il faudra bien attendre courant 2019 pour découvrir le nouveau musée des Beaux-Arts de Dijon. Comme on est super impatients chez Sparse, et comme on adore les casques de chantier et les pompes de sécu, on s’est offert une petite balade sur le chantier. En compagnie de Sandrine Balan, coordinatrice de la partie artistique du musée et Gérard Gombert, l’ingénieur en charge des travaux pour la ville. Le chantier est titanesque. Deux heures et demie nous ont été nécessaires pour faire le tour du propriétaire, de la cave à ce qu’il reste parfois de plafond. 35 personnes, des « bétonneux » aux couvreurs, s’affairent chaque jour pour tenir les délais. « Comme on a un timing très précis, pour l’instant nous n’avons pas de retard, et la place manquant parfois sur le chantier, la cadence est extrêmement soutenue. Tout le monde doit respecter son calendrier. Parfois, sur la réunion de chantier hebdomadaire, ça gueule, mais c’est bon signe » se félicite Gérard. Véritable passionné de sa partie, sa connaissance historique et technique est livresque, grâce à lui nous sommes désormais capables de tenir une conversation sur les avantages et inconvénients de l’ardoise espagnole Cupa 4 ou sur les gisements de

Propreté. Tranquillité. Un chantier sûr. Les statues veillent.

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pierre de Bourgogne extraites au XVIème à Talant ou à Plombières. Pas de trésor caché retrouvé entre les vieilles pierres mais des traces d’installation vieilles de 1 000 ans, une amphore antique et des cadavres d’animaux. Pas de quoi payer une partie des 60 millions d’euros nécessaires au financement des deux tranches de travaux, répartis entre la ville, l’État, le Grand Dijon et la région. En tout, 50 salles d’expo auront été rénovées pour accueillir 3 millions de visiteurs à l’année. Quand on regarde les éléments de promo du futur musée, on découvre que la mairie ambitionne tout simplement d’avoir un des très grands musées de France et de peser à l’échelle internationale. Dans l’immédiat, hormis la toiture qui ressemble un peu à une toiture, le chantier demande un effort de concentration et une imagination féconde pour se figurer l’installation des œuvres qui viendront s’ajouter à celles déjà visibles, pour un total supérieur à 1 500 œuvres exposées. Le tout devrait ressembler à un savant mélange de techniques de pointe de construction et de scénographie muséologique du XXIème siècle dans un écrin du XVIIème/XVIIIème. Attention, mettez votre casque, la visite commence. // M.R.


diaporama par MARTIAL RATEL, à dijon PHOTOS : alexandre claaSs

19 mai, derrière les palissades, le festival de Cannes répétait la cérémonie d’ouverture.

Grandiose, le toit version Christo

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Oui, il y avait un toit, avant. L’alambic des Ducs de Bourgogne.

Joli, impressionnant, mais il y a comme un souci quand il pleut.

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Joli, hein ! Façade rue Rameau. Cette sculpture, vous ne la verrez jamais aussi bien. Elle est perchée à 10 mètres au dessus de votre tête.

Loue appart bien situé. Travaux à prévoir.

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rencontre

« we want… …RNST »

par martial ratel photos : alexandre claas

C’est un retour qui ne passe pas inaperçu. Bien sûr, d’abord dans les rues puis sur les réseaux sociaux et enfin dans les galeries. RNST est back in town. Le serial graffeur se colle aux murs de Dijon, se répand sur les placards électriques et s’accroche dans les lieux d’expos et autres concept stores.

Le bonhomme Première mise au point. RNST, sa signature doit se lire R. N. S. T., les trois lettres bien détachées, et non « Ernest » comme il semble évident de le lire. « Ernest, ça fait trop référence à Ernest Pignon Ernest. J’adore le travail de cet artiste. Il travaille aussi dans la rue comme moi, avec du collage. Nos univers peuvent sembler proches » mais la référence serait bien trop lourde à porter. D’autres filiations de l’art « sérieux » ressortent de la discussion : la figuration libre ou la figuration narrative. « J’ai pas mal traîné dans les musées mais mes premières claques, mes premières envies de dessins me viennent des pochettes des Bérus et de Mode2 ». Ado, RNST décalquait les dessins de Laul, illustrateur punk, et découvrait l’univers hip-hop du graffeur britannique, hyper actif en France au début des années 1990 aux côtés de NTM. Deux mondes, deux univers visuels, issus de musiques des bas-quartiers, qui allaient plus tard fusionner dans le style de RNST. La découverte du graff et de l’art de rue, RNST la fait en grande partie à la fin des années 1990, à Dijon, aux côtés de Cynik et de toute une clique locale qui couvre la ville de ses signatures. Forcément, l’aventure picturale se termine lorsque les brigades anti-tags et autres BAC leur tombent dessus. Après un passage aux Beaux-arts, il s’installe dans le sud et pendant une vingtaine d’années, il y côtoie d’autres artistes de rue. Là-bas, il passe à la toile, délaissant la rue. «Pour des raisons familiales et politiques, j’ai décidé de revenir à Dijon. Dans le sud, c’est vraiment tendu quand tu vois les derniers résultats des élections. Mais si tu veux bien on va arrêter de parler de moi. » Ok, mais on va quand même se permettre d’ajouter que le type est très sympathique, accessible et volubile quand il s’agit de parler de ses productions. 42


Pont-de-Pany, 2017. Aussi connu sous le nom de ÂŤ P2P Âť.


Le boulot RNST, un peu à l’image de ses personnages, préfère avancer masqué. On imagine facilement que la part d’illégalité inhérente à son œuvre l’oblige à rester dans la pénombre. Pas seulement. « Ce qui compte, ce n’est pas moi mais ce que je peins et les idées que véhiculent mes dessins ». Son retour à la rue est hautement politique. « C’est la répression policière sous Sarko qui m’a poussé. Tu voyais ces mômes qui manifestaient et se faisaient arrêter. » Un retour forcément revendicatif. Ses dessins montrent des enfants, souvent visages en partie dissimulés sous un foulard ou un masque, bombe de peinture à la main ou le cas échéant avec une batte de base-ball. Un style réaliste, des portraits hilares,

Un style réaliste, des portraits hilares, souvent narquois, un défi enfantin à l’autorité.

souvent narquois, un défi enfantin à l’autorité. Le masque, donc le graff, comme un jeu des « bons contre les méchants » ou Zorro contre Garcia et Monastorio (le méchant des 13 premiers épisodes, une des pires raclures !). Visuellement, c’est chouette, ça porte une violence latente, ça détourne des codes et le message est relativement clair. « J’aime le hacking et le situationnisme. Être à la fois poétique et revendicatif. Ce style, j’ai commencé à le construire à partir de 2009, pas forcément pour la rue. Il y a à la fois une fragilité et une rébellion chez mes personnages. Le masque, c’est simplement pour se protéger des gaz pendant les manifs. »

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ici, s’expose aux murs de nombreux collectionneurs et autres lieux de monstration. Dix-huit événements et expos sont prévus pour l’instant dans l’année. « Pour moi, il n’y a pas de problème. J’emmène mon art et mes idées dans différents lieux. Je peux très bien travailler pour une commande de fresque murale comme récemment à Bayonne. Sauf qu’à la fin à Bayonne, mon travail ne plaisait pas à la municipalité. Tu te rends compte ? On fait appel à moi et comme ça risque de choquer des gens, ça ne passe pas ! » Et les galeries, l’argent, l’éventuelle spéculation générée par ses œuvres ? « Je fais ça pour manger. Il faut que moi aussi je me nourrisse. Je travaille avec certains galeristes. Je ne fais pas de démarchage, ce sont eux qui viennent à moi et ensuite on discute. Si je sens qu’on ne partage pas les mêmes valeurs, si le principe de business est trop présent, on ne fait rien ensemble. Et puis, si je peux utiliser les mécènes pour niquer la société... »

La contre-culture portée par ses œuvres, RNST la situe du côté de ses amours punk, plus que dans le rap. « J’ai une culture rock. Je ne connaissais pas grand-chose au rap jusqu’à ce que je découvre Public Enemy. J’aime bien le rap conscient ». Mais on comprend que la dimension libertaire de sa démarche dépend plus des Bérus et consorts que du rap bling-bling. Ses techniques en attestent : pochoirs et collages qui, pour lui, s’inscrivent dans la droite ligne de l’utilisation des murs faite à partir de 1968, slogans et messages sociaux. Le pochoir comme outil privilégié. On comprend le plaisir du travail au crayon de celui qui compose ses œuvres comme des BD. Mais il y a aussi le pochoir pour lui-même. « Je travaille parfois sur support métallique. Je taille des pochoirs dans des feuilles d’acier. C’est comme de la sculpture et ça me permet de travailler des surfaces comme le béton, c’est intéressant pour le côté volume/sculpture. » Et d’accompagner le mot par le geste du bonhomme qui maîtrise la taille de pierre. « J’aime bien expérimenter les techniques. Par exemple, pourquoi ne pas faire une expo juste avec des pochoirs comme œuvres d’art ? » Le collage d’affiches comme support d’œuvres sur les murs, les barrières de chantier ou les devantures de magasins vides, c’est ce juste milieu entre l’action du colleur d’affiche politique, de nuit de préférence, et la réappropriation de l’urbain par les artistes de rue. Inconvénient, au contraire de la gravure : c’est éphémère, ça se décolle, ça s’arrache. La théorie des trois jours de RNST, soit le temps moyen avant qu’une œuvre ne soit abîmée ou effacée. Dans les pratiques de RNST, il y a pas mal de mouvements dialectiques, des contradictions qui se retrouvent aussi dans son activité en galerie. Celui qui s’amuse à se revendiquer #inencadrable, suite à une mésaventure récente inracontable

Dijon sous les bombes.

Le débat Au-delà de la véracité de ses propos et du récit de son activité, tout ce qui vient d’être raconté jusqu’ici n’intéresse que très peu RNST. Lui souhaite utiliser son art pour ouvrir le débat. Et ça tombe bien, en ce moment il a un gros sujet de discussion avec les autorités de la ville. En trois mois de présence dans Dijon, il aura réussi à ouvrir la problématique de la place des arts urbains dans la ville. Une ville dans laquelle, il faut l’avouer, hormis durant de courtes périodes

« J’aime bien expérimenter les techniques. Pourquoi ne pas faire une expo juste avec des pochoirs comme œuvres d’art »

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Ça ouvre à quelle heure ?

ou dans des endroits circonscrits, les graffeurs et artistes des murs ont rarement agi. Une ville aux murs longtemps vierges, l’activité artistique restant cantonnée aux espaces d’exposition. Tout démarre par l’effacement. Alors que la ville, classée à l’UNESCO (on va finir par le savoir), bichonne son centre historique au risque d’en faire une immense galerie commerciale à ciel ouvert ou une ville musée, les œuvres sauvages de RNST sont rapidement et impitoyablement effacées. Après tout, c’est le jeu. Sauf que… « Quand tu fais attention, tu remarques que si je colle ou fais un pochoir à côté de tags dégueulasses, les mecs n’effacent que mes dessins. Pourquoi ? J’ai ma théorie. La ville ne veut pas que les graffs se répandent et mes dessins montrent que l’on peut faire autre chose que des trucs moches sur les murs. Ça risque de créer des vocations. Alors, vite, ils les enlèvent et en laissant le reste, ils peuvent dire “Voyez les tags et tout ça, ce n’est rien que des trucs moches.” Ces dessins dans la ville évoquent trop la question de l’insubordination. Je fais attention à ne pas faire n’importe quoi n’importe où : je ne vais pas poser de pochoir sur des vieilles pierres. » Premier étage de la fusée à débats.

« La ville ne veut pas que les graffs se répandent et mes dessins montrent que l’on peut faire autre chose que des trucs moches sur les murs »

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Le deuxième temps se déroule sur les réseaux sociaux. Christine Martin, l’adjointe à la culture de la ville de Dijon, partage le 10 mars dernier une photo d’une œuvre de RNST avec le texte « #Dijon Rencontre du jour « we want U» -RNSTSurprise sur une palissade... j’ai failli le manquer ! Eyes wide open - gardons les yeux ouverts - #Streetart ». Cool, Christine Martin, qui est une femme de goût, une amatrice d’art, flashe sur l’œuvre. Elle détecte le talent de l’artiste et devrait assez vite prendre sa défense dans les plus hautes sphères municipales. RNST entend parler du message de l’élue et une rencontre s’opère. Le débat tourne autour de la supposée volonté de la mairie d’effacer à tout prix les traces urbaines de RNST. Il est alors question de prestataires, l’entreprise Le Signe de l’environnement 1 qui bosse pour la ville, de la volonté de garder un centre clean mais absolument pas de chasse ad hominem ni d’effacement ciblé. Troisième et dernier round. RNST propose alors que la ville mette à disposition un mur. Un spot libre pour les pratiques sauvages comme cela se fait ailleurs. Ni une ni deux, on contacte l’adjointe à la culture. « Son travail est juste magnifique. Je lui laisse le temps de monter une association et après, ensemble, on ira voir la première adjointe pour lui expliquer le projet. Il y aurait un mur sur lequel des street artistes seraient invités à produire une œuvre. Et un autre en accès libre. J’espère que ça se fera. On peut aussi imaginer dans le cadre de la démocratie locale, avec les commissions

de quartier, des créations de fresques. Ce qu’il vient de réaliser dernièrement sur une écluse à la demande des Voies Navigables de France est très chouette. » Là, on sent poindre la jalousie chez l’élue. Tiens et pendant qu’on y est, l’effacement systématique par la ville ? « Bien entendu qu’il n’y a aucune volonté de cibler RNST. Je ne sais pas pourquoi par exemple son « we want U » a été enlevé. Un sticker sur une palissade… Après, les œuvres d’art dans la rue, quelque soit la renommé de l’artiste, c’est forcément éphémère. » Le dialogue n’est donc pas rompu et l’élue se dit impatiente d’être recontactée pour proposer son projet en mairie, où différentes tendances s’opposent : d’un côté la propreté urbaine et la tranquillité publique, et de l’autre l’art et la culture. Et à la manière d’un Delon, de se lancer dans une punchline à la troisième personne (on aime !) : « La Christine qui admire les œuvres de RNST aide Christine Martin, l’élue, à faire apprécier son travail à la ville. » Le débat est lancé. L’issue, bien qu’encore incertaine, laisse espérer l’arrivée de ces fameux murs et clairement on espère encore croiser ici et là les marques de l’artiste dans la ville. Pour vous tenir au jus de l’éventuelle avancée de ces débats théoriques et politiques, surveillez l’arrivée en ville d’un fanzine ou d’une feuille d’info que RNST ambitionne de produire. Nous, on espère juste que son travail s’inscrira dans la continuité de tout ce qu’il a déjà fait en quelques mois. Et enfin, si vous appréciez l’art de rue, RNST a un dernier conseil à vous donner : « Les gens appellent la mairie pour se plaindre, pour dire qu’il faut venir effacer les graffs sur leurs murs. Il faut retourner la chose. Ceux qui aiment ça devraient appeler la mairie pour dire qu’il faut les conserver... » // M.R. Évidement, on a contacté l’entreprise. On attend encore qu’ils nous rappellent.

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40 piges En Bourgogne, le mot “Consortium” ne désigne pas un groupe de musique, pas une équipe de basket, pas un groupuscule politique ni même une secte - ou pas vraiment. Et même si peu de gens peuvent se vanter de connaître parfaitement chaque minuscule recoin de leur propre ville, le nombre de Dijonnais ignorant tout de l’existence de ce bâtiment demeure affolant, alors qu’il est pourtant question d’une véritable machine de guerre au rayonnement et à la réputation mondiale. La plupart de ceux qui connaissent l’endroit l’ont surtout fréquenté pour les différents concerts, organisés par une poignée d’associations, sans vraiment toujours réfléchir à ce qui se cachait autour et au-dessus de la scène. Mais au delà de ça et sachez-le, le Consortium est l’un des plus gros lieux de l’art contemporain (soit tout l’art produit après la Seconde Guerre mondiale, pour résumer grossièrement) de la région. À l’occasion de ses quarante ans, conjointement au Centre Pompidou, à Paris, retour sur une institution qui a placé Dijon sur la carte mondiale de l’art actuel.

anniversaire par doug ritter et ash, à dijon photos : le consortium

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L’Usine, avant le Consortium. La rotonde est encore visible dans la cour. 23 49


«

Ah ouaiiiis, c’est le musée tout blanc à côté du Casino rue d’Auxonne ? » Pour commencer, interdiction absolue de parler de musée, sinon passage à tabac direct. On parle ici d’un centre d’art contemporain. Niveau statut administratif, paperasse et compagnie, c’est quand même pas la même chose : un centre d’art, car c’est un statut particulier, qui fonctionne à environ 70% de subventions (ville, région, ministère de la culture, etc.). Le reste est basé sur différentes missions extérieures que peuvent mener les directeurs, et la location des salles (dont celle de concert au sous-sol du Consortium) à des particuliers ou associations pour différents événements. Le Consortium est, comme beaucoup d’autre centres d’art contemporain en France, géré par une association loi 1901. Il s’agit en l’occurrence du Coin Du Miroir (en référence à un lieu-dit du centre-ville dijonnais), fondé en 1977 par un groupe d’une dizaine d’étudiants en fin de cursus, majoritairement en Histoire de l’art et accompagnés d’autres personnes, dont un dénommé Jean-Luc Alexandre. Ce dernier était alors correspondant français pour le magazine Flash Art dédié à l’art contemporain international et, connaissant déjà quelques artistes, il permet à l’association de se constituer rapidement un réseau solide. De ces étudiants, il ne reste aujourd’hui que Xavier Douroux et Franck Gautherot, toujours à la tête du Consortium et épaulés depuis 1996 par le commissaire et critique d’art Eric Troncy. L’aventure démarre à Dijon, et non à Paris qui semblait pourtant être alors un choix évident pour l’art contemporain. Franck Gautherot, qui répondra à nos questions tout au long de ce dossier, justifie ce choix pour des raisons pratiques : Dijon était leur lieu de résidence, s’envoler pour Paris était aussi plus coûteux. Selon ses propres mots, il y avait aussi une petite part d’égoïsme : « On veut les œuvres pour nous (…), il n’y a pas de raison d’obéir au centralisme parisien ! ». Ce fut d’ailleurs un pari au départ difficile : « À cette époque, les lieux d’art contemporain c’est seulement quelques musées : celui de Toulon, celui de Grenoble, à Marseille (...), à Bordeaux, à Villeurbanne il y a ce qui est devenu l’IAC, Institut d’art contemporain... ». C’est donc dans ce contexte que débute le périple du Coin Du Miroir. Avant de devenir ce qu’ils sont aujourd’hui et d’avoir un tel espace d’exposition, les commencements étaient plus modestes : dans un premier temps installée dans un petit appartement au-dessus d’une librairie alternative (celle de Bernard Zekri, l’actuel boss de Nova) rue

Chabot-Charny, l’association va voguer de lieu en lieu en passant, en 1982, par l’emplacement où se dressaient encore les restes d’une boutique d’électroménager, « Le Consortium », place du marché à Dijon, ancrée dans d’anciens bains publics – les Bains du Nord – aujourd’hui lieu d’exposition du FRAC Bourgogne. Par la suite, elle occupera – communément avec d’autres associations et l’ENSA (École Nationale Supérieur d’Art, ou plus communément l’école des Beauxarts) de Dijon – une ancienne usine au 37 rue de Longvic, dénommée très originalement l’Usine, et ce jusqu’en 2011, date à laquelle le Coin Du Miroir, désormais proprio, y posera définitivement ses valises et choisira de revenir au doux nom du Consortium. « Ce nom nous plaisait, commente Franck Gautherot, on l’a gardé ». Le bâtiment est alors totalement rénové avec l’aide d’un architecte japonais, Shigeru Ban, qui, en plus de créer d’immenses salles totalement blanches, ajoutera toute une aile à l’usine déjà existante, surélevant aussi le sol à l’extérieur et aménageant les sous-sols en salle de concert, loges, cuisine et atelier, entre autres. Au fil du temps, avec l’aide d’un réseau de plus en plus dense et de multiples rencontres, la popularité du Consortium évolue. Par des prédictions justes et un goût certain pour l’avant-garde leur octroyant toujours un coup d’avance, ils attirent l’attention d’artistes à la renommée internationale qui retrouvent en ces lieux un outil de travail et d’exposition, ouvert aussi bien aux artistes confirmés qu’à ceux émergents, qui y trouvent un sérieux coup de pouce pour leur carrière.

Les Presses du Réel Les têtes pensantes derrière le Consortium œuvrent également dans le domaine de l’édition. Dans un premier temps, dans un souci pragmatique de donner les moyens ou les connaissances nécessaires pour accompagner et apporter un support texte aux expositions, l’association publie quelques catalogues dès 19811982. Les produire est une chose, les vendre en est une autre : il s’agit d’abord de convaincre les libraires, et pour ce faire la structure associative apparaît alors moins crédible. C’est ainsi que naissent Les Presses du Réel, en 1992. La nature commerciale de ce type de structure dépend d’un processus économique bien différent de celui d’une association et pose alors à la fine équipe un souci d’indépendance vis-à-vis du Consortium : celui d’être à la fois actionnaires privés de la première, en restant à la direction de la seconde. Par souci d’éthique et par choix personnel, la gestion de la maison d’édition est confiée à une autre association, sur laquelle le Coin Du Miroir garde toutefois un œil attentif. « Cela limite nos 50

« On veut les œuvres pour nous (…), il n’y a pas de raison d’obéir au centralisme parisien ! » Franck Gautherot, co-directeur du Consortium


Dans les années 70. Ambiance club échangiste.

Régis, t’as dépassé là.


18 250 000 euros, et c’est à toi.


responsabilités en cas de faillite », s’amuse Franck, ainsi qu’un éventuel enrichissement personnel - bien que cela soit rarement le cas avec une maison d’édition. Malgré une structure économiquement fragile, l’association parvient toutefois à maîtriser financièrement la bête et diversifie ses activités. À l’heure actuelle, les Presses du Réel comptent 6 salariés, publient 60 livres par an - des écrits sur des artistes, parfois par des artistes, ou encore des catalogues d’expositions et des ouvrages philosophiques. Les publications sont distribuées dans 60 points de vente et distributeurs, faisant figure de référence dans l’édition d’ouvrages d’art contemporain.

Les 40 ans Pour en revenir à l’activité principale du Consortium, l’exposition pour le quarantenaire commun avec le Centre Pompidou est donc nommée Truchement. Sa genèse est à chercher du côté de quelques petits malins du Centre Pompidou ayant eu l’idée astucieuse de célébrer leurs 40 ans non pas dans leur propre espace, mais chez les autres. Au Consortium, personne n’est véritablement emballé : « On avait fait les 20 ans, ça nous suffisait ». Quelque peu réticente au premier abord, la direction entame une réflexion autour de récits et d’artistes communs et envisage d’exposer quelques productions d’époque, exposées par Pompidou dans le passé, ou des œuvres produites par le Consortium et rachetées par le centre parisien ensuite, datant pour la plupart des années 80 et 90. Un tri s’opère pour ne garder qu’une sélection d’œuvres et d’artistes, témoignant d’un passé commun aux deux structures. Ces temps forts le sont aussi pour avoir été partagés avec une multitude d’individus : des visiteurs assidus aux curieux de passage, en passant évidemment par les membres de l’équipe du centre d’art et ceux qui les suivent depuis le début de l’aventure. On retrouve, entre autres, pour cette exposition au Consortium les travaux d’Hans Haacke, dont l’installation complexe d’un bunker de béton comme coffrage d’une devanture de boutique de luxe se veut aussi visuelle que dénonciatrice ; ceux de Maurizio Cattelan et de sa tombe, vide, petit pied de nez à ses détracteurs et creusée à même le sol froid en béton ; l’immense toile de Frank Stella, entre jeux de couleurs et de profondeur ; les date painting d’On Kawara, peintures représentant des dates et réalisées les mêmes jours que ceux indiqués sur les toiles et qui répondent, au centre, à une statuette d’Alberto Giacometti les deux artistes sont d’ailleurs représentés en portrait par Yan Pei-Ming, gloire dijonnaise que l’on ne présente plus, dans la même salle. Sont également mis à l’honneur Rodney Graham,

Ces 40 dernières années, c’est une tranche d’histoire au cours de laquelle le monde était en constante mutation

qui y expose un énorme et ancestral système de projection de vidéos qui anime des gros plans enneigés sur une vieille machine à écrire. Plus loin, Bertrand Lavier joue aussi de la projection mais cette fois avec de célèbres œuvres picturales, comme autant de mises en abîme. À l’étage du bâtiment, des compressions de squelettes de voiture de César (oui, celui de la statuette de la cérémonie du même nom) côtoient un long tunnel gonflable rythmé par des vidéos de plans de paysages, prises à l’intérieur d’un train, ponctuées de très courtes scènes de films cultes, telles des apparitions fantomatiques. Autant d’histoires croisées qui forment une vision des deux institutions, à la fois globale et multiple, portée vers le passé. Car ces 40 dernières années, c’est une tranche d’histoire au cours de laquelle le monde était en constante mutation et où plusieurs événements majeurs se sont succédés, y compris sur le plan technique. Cet aspect n’a pas été négligé au sein de Truchement, avec par exemple l’activation de films 35 ou 16 mm au sein des productions de Rodney Graham et de Bertrand Lavier ; à l’ère du tout numérique, ces formats désormais désuets, sont voués à la disparition. Parallèlement à Truchement se déroule également une autre exposition, Jpeg, dont la mise en place n’est pas anodine car elle aussi porteuse d’un récit du temps qui passe. L’artiste Alan Belcher, qui a fait ses débuts à New York dans les années 80, expose des objets en céramique présentant toujours strictement le même visuel : le logo d’un format d’image informatique, le fameux « jpeg », accroché aux murs de différentes façons, comme si les icônes représentaient de réels tableaux avec un accrochage conventionnel de musée ou de galerie d’art. Il est donc aussi question d’histoire, dans cette seconde exposition, qui témoigne du remplacement des images réelles et des objets par le numérique. Bien au-delà d’une simple exposition, la célébration des 40 bougies du Centre Pompidou et de l’association derrière le Consortium présente un véritable parcours dans l’histoire de l’art contemporain, à travers une institution dijonnaise qui a su se pérenniser et devenir un sérieux concurrent face à d’autres structures de la capitale, leur subtilisant au passage l’exclusivité de certains artistes de renom. Il est vrai que, face à un public peu familier du monde de l’art contemporain, certaines choses exposées peuvent paraître étranges, inesthétiques, dérangeantes, et confrontent à l’éternel débat de ce que propose ce monde de l’art si particulier - qui s’avère aussi singulier et vaste que le monde lui-même. Mais en s’y penchant davantage, on peut y déceler la résonance que certaines œuvres entretiennent avec des évènements historiques ou des éléments plus concrets susceptibles de toucher chacun d’entre nous. Quel futur se réserve le Consortium ? Quels mouvements ou artistes vont encore en émerger et avec quelles techniques ? On se retrouve ici dans 40 ans ? // D.R. et A. 53


immersion par franck le tank photos : édouard roussel

Pente,Côte Match

&

La course de côte, qu’on appelle la côte chez les puristes, c’est une course automobile qui consiste à parcourir un tracé dénivelé le plus rapidement possible. Jusque là tout va bien, j’ai juste recopié la définition Wikipedia. Rien de sensationnel, seulement ça se corse quand je me retrouve sur ladite course, à côté de Josué, un 25 mai à Colombier-Fontaine, dans l’habitacle d’une 911 Sport GTI 2 double turbo de 1983 avec un V8 en étoile.

Avant de s’aventurer dans le journalisme à sensation, permettezmoi de faire un flashback sur notre arrivée, à ColombierFontaine. En tant que Uber du journalisme, on doit justifier notre activité en trouvant du sensationnel pour le magazine, comme on a perdu l’exclu du mec qui a frotté son sexe sur la joue d’une nonagénaire le mois dernier, on s’est creusé la tête pour trouver un sujet puissant, d’où la course de côte. évidemment. Pour arriver à Colombier, il faut se perdre en traversant des vertes forêts du Doubs, arpenter des villages enchanteurs tel que l’Isle-sur-le-Doubs avant d’arriver à bon port, c’est un peu comme la comté dans Le Seigneur des anneaux mais sans les Hobbits. Ce qui étonne dans un premier temps, c’est que la course de côte n’est annoncée nulle part. Pas de cartons sur les feux rouge, ni d’affiches ou de banderoles dans le village. Rien, nada, wallox. Après quelques minutes de doutes intenses sur la date, on croise enfin un homme en gilet jaune obtenant ainsi la confirmation que nous touchons au but. Enfin, pas exactement. Le passage de sécurité est assez tendax. On bataille sec car Hubert, notre interlocuteur, le président de l’association ASA, nous a pas vraiment annoncés en tant que journaleux. à la caisse, ils veulent nous faire raquer ou qu’on leur file notre carte de presse. On leur montre notre carte de bibliothèque, ça ne marche pas, et on doit jouer des coudes pour pouvoir rentrer. à partir de ce moment, le decorum est posé : une ligne droite au milieu de la forêt qui commence à méchamment monter, des habitations encore sur notre gauche jusqu’au bout dans le virage, au fond des bruits de moteurs qui pétaradent. On y est. 54


Le fameux Hubert nous attend sur la ligne de départ pour qu’on cause de la côte. Enfin qu’on cause, c’est un bien grand mot, car le bruit des voitures couvre à peu près toute notre discussion. Hubert, c’est un personnage atypique : cigarillo à la bouche, accent franc-comtois bien prégnant et plus de cent kils sur la balance. Il nous reçoit gentiment alors qu’il n’a clairement pas le time. C’est lui le boss : « On est là depuis hier matin, à préparer les routes, mettre des bottes de pailles afin de sécuriser le terrain pour que ce soit homologué par la préfecture. » Cet entretien, c’est pour moi l’occasion de revenir sur un point essentiel, un truc que je ne capte pas, et que probablement vous n’ont plus, c’est quoi la p***** de différence entre une course de côte et un rallye ? Et pourquoi on retrouve des véhicules aussi différents qu’une formule 2000 à côté d’une 206 trafiquée ? Facile, le rallye et la côte ça n’a rien à voir ! Le premier se concourt en spéciales sur des trajets souvent bien plus longs (disons une vingtaine de kilomètres en moyenne) contre la course de côte, qui ici fait 1 kilomètre 800. Le rallye se pratique à deux avec un copilote (qui indique la marche ou plutôt le chemin à suivre). Alors que dans la course de côte, le concurrent court tout seul. Il fait son propre repérage pendant les essais du matin puis va chercher son chrono, l’après-midi, son parcours bien en tête. Bien que les activités soient différentes, les disciplines sont cousines. Les passionnés se retrouvent bien souvent sur les deux types d’événements que ce soit sur la grille ou dans le public d’ailleurs. Concernant les catégories, j’avoue cependant ne pas avoir bien compris. Effectivement, les formule 2000 (une formule 1 moins puissante) ou les barquettes (surnom donné à des voitures super puissantes et super légères type 24h du Mans) concourent dans une

« Le decorum est posé, une ligne droite au milieu de la forêt qui commence à méchamment monter, des habitations encore sur notre gauche jusqu’au bout dans le virage, au fond des bruits de moteurs qui pétaradent. On y est. » autre catégorie qu’une AX GTI ou une Clio Williams. Mais il existe tout de même un classement général à la fin de la journée, toutes voitures confondues. Bizarre. Les 69 participants de cette 40ème course de côte monteront 5 fois, histoire de décrocher le meilleur chrono possible et une bonne place au classement qui comptera pour la sélection en coupe de France. Après ces quelques explications, je demande à Hubert si je peux monter dans une voiture, afin de vivre le parcours in situ. J’arrive pile au bon moment apparemment, car Josué est en train de se préparer pour monter dans sa Porsche. Il est venu avec son copain qui,

Pomme granny.


gaufrettes. Notamment sur une des courses du coin qui a été fermée puisque la gendarmerie a été construite sur le tracé de la course. Effectivement, ça fait tâche… En redescendant derrière la voiture balai, mon chauffeur me pose pas loin de la grille de départ, là où les pilotes qui concourent se préparent à monter pour la seconde fois. Je tombe sur un jeune pilote, Matthieu, qui me confie son ressenti. C’est la première fois pour lui qu’il part en course comme ça avec son véhicule, une Clio modifiée par ses soins. Il n’est toutefois pas un rookie de ce genre de course. L’entourage familial, selon lui, est souvent un catalyseur pour ce genre de pratique et il a déjà plusieurs rallyes à son actif en tant que copilote. Je n’ai pas le temps de lui demander s’il est satisfait de ses temps que le speaker hystérique somme déjà les pilotes de taper un nouveau chrono. Je décide de remonter vers la ligne de départ afin de voir la course au niveau du public cette fois-ci. Avant de venir faire cette course de côte, je dois dire que j’avais une image d’épinal du départ, un beau drapeau à damier porté par une fille plantureuse, et au-dessus, une structure gonflable grandiloquente. Je dois dire qu’en terme de photofinish, ce n’est pas ça qui est ça. Au départ, on retrouve Micheline,

lui, possède une Renault Dauphine Gordini surboostée. Les deux compères roulent dans la catégorie VH (véhicules historiques) mais ne sont pas inscrits en compétition aujourd’hui et font le trajet de façon chill. Après une rencontre sommaire, je pénètre dans le monstre mécanique. Le confort de sa Porsche est très spartiate. Normal, il n’y a plus d’habitacle. Ce dernier a été désossé en intégralité pour gagner du poids. Seul des arceaux de sécurité ont été installés pour protéger les occupants. Les sièges baquets sont peu confort mais, ici, seul la performance compte ! Au niveau sécu, c’est un peu yolo : pas de casque, pas de grosses ceintures ventrales, trop chiantes à mettre. Je me dis : « Pas grave, il sait ce qu’il fait, il va surement pas trop avoiner vu que sa voiture doit coûter au moins 80 000 boules ». Le départ en fanfare me fait chavirer puis changer d’avis. On arrive dans la première épingle à 150 km/h, mes genoux se crispent et je commence à serrer les fesses. Fesses qui ne se desserreront qu’à la fin des 1 800 mètres. J’aime bien la vitesse mais je dois le dire, sur le coup j’ai un peu les chocottes. Le parcours est assez sinueux et Josué a une forte tendance à accélérer comme un beauf dès qu’il y a un semblant de ligne droite. Résultat, j’appuie frénétiquement

Photo prise en 2017.

75 ans, commissaire de course qui joue au Sudoku, et l’équivalent d’un semi-remorque des Déménageurs bretons comme cabine de jury. Moins glamour que prévu. Au niveau de la buvette, même combat, les prestations Kronenbourg et sandwich à la saucisse étaient, ici encore, bien décevantes. Il y a d’ailleurs peu de public en ce jour ensoleillé. On peut penser que le manque de communication autour de la course, ainsi que le prix d’entrée fixé à 6 balles 50, en ont rebuté plus d’un. Les personnes du public que j’ai approchées sont soient des proches de compétiteurs, soient des fans « d’autos ». à midi trente, c’est la pause et tout le monde retourne au paddock. C’est l’occasion pour nous d’aller voir les coulisses de cette course. Cindy est affairée sur la pression des pneus de sa 206. Elle est prof d’histoire-géo dans un lycée pro spécialisé dans l’automobile et a obtenu le virus via son père qui concourt d’ailleurs avec elle ce jour-là. Je m’étonne sur la proportion de femme dans les courses de côte. Elles sont 6 sur les 69 à concourir aujourd’hui. Un ratio plutôt étonnant. Comme Cindy est affable, on commence à parler business. Je lui demande combien sa caisse lui a coûté : « ça dépend, ça

sur ma pédale de frein imaginaire, un peu comme un conducteur d’auto-école soucieux ou plutôt comme ta mère stressée par les heures les plus sombres de ton apprentissage en conduite accompagnée. On est très près du sol, on entend tous les cailloux rouler autour de notre engin de la mort. ça sent la gomme et l’essence. Même si le parcours ne dure pas plus de 2 minutes, ça envoie carrément plus que dans Space Mountain©. La course en sous-bois est impressionnante,

La côte c’est un bonheur familial et c’est bien ça le plus important. les épingles serrées et la proximité des arbres renforcent la sensation de vitesse. Quelques badauds - comprendre des mecs avec des packs de bières - sont posés dans les virages pour observer l’ascension. En arrivant en haut de la côte, je contiens mon état d’excitation mélangé à la peur pour tailler une bavette aux deux compères, jeunes retraités, qui ont l’air de faire ça tous les week-ends. On discute des différentes courses de côte et j’ai le droit à des anecdotes pas piquées des 56


« Le départ en fanfare me fait chavirer, puis changer d’avis, on arrive dans la première épingle à 150 km/h, mes genoux se crispent et je commence à serrer les fesses. »

peut être 1 000 euros pour juste faire la sécurité mais ça peut très bien aller jusqu’à 100 000 euros si on veut ». Le sienne lui a coûté environ 10 000 euros mais elle peut compter sur certains sponsors qui l’aident notamment à payer des pneus, nerfs de la guerre dans ce genre de pratique. La course aussi a un prix, et l’engagement pour venir concourir à ColombierFontaine représente tout de même 170 euros, répartis notamment entre la participation et les assurances. Les gens profitent de cette pause du midi pour affiner les performances de leurs bolides, mais aussi pour manger un bout. Les barbeuqs installés à droite et à gauche ainsi que les bouteilles de rosepaf sont monnaie courante et donnent un côté camping au village auto. La côte, ça creuse. En arpentant les travées remplies de voitures et de tonnelles jusqu’à notre départ, on remarque un paysage composé de famille et de groupes d’amis qui se sont transmis le virus. Ils profitent d’un moment de partage lors de ces courses. La côte c’est un bonheur familial, et c’est bien ça le plus important. // F.L.T.

« Pas foutu de démonter les jantes, faut tout faire soi-même ici »


entretien

Depardieu, Le dernier livre de Mathieu Sapin, Gérard, cinq années dans les pattes de Depardieu, est un vrai régal. Comme l’indique le titre, Mathieu Sapin a filé le train de Depardieu à l’occasion de tournages au Portugal, rendez-vous d’affaires en Russie ou tout bêtement dans son hôtel particulier à Paris. Rencontre dans l’atelier parisien de Mathieu où cet ancien Dijonnais partage le loyer avec l’auteur Christophe Blain.

de Hollande, ça l’a fait tiquer dès la première fois où on s’est rencontré. Comme il était très anti-Hollande, il n’arrêtait pas de me charrier. Et après c’était une espèce de jeu. Et puis, il me mettait dans le même sac que Libération1... ça l’amusait.

La figure médiatique monstrueuse, l’acteur gargantuesque, l’insupportable commentateur de la vie économique française disparaît dans l’intimité au profit d’un Gérard sensible, tragique, amateur d’art et de bonne bouffe. Attachant. Alors, non, le livre ne fait pas basculer du tout au tout Depardieu. Les faces sombres, irritantes, ne sont pas passées sous le tapis. Simplement, Mathieu Sapin les transforme et les rend sinon acceptables, en tout cas compréhensibles, à grands coups d’anecdotes racontées comme des gags. Une vie comme celle d’un personnage de bande dessinée. Après Le Château, Campagne présidentielle ou Feuille de Choux, Mathieu Sapin s’impose une fois de plus en tant qu’auteur/dessinateur/ reporter spécialiste des coulisses des pouvoirs. On a réussi à le capter dès potron-minet, juste après une interview nocturne pour France TV, avant un rendez-vous dans une boîte de prod ciné et entre deux livraisons de ses pages hebdos dans Libé. Oui, le type a un agenda rempli jusque là mais comme aux premiers jours de sa carrière, il reste disponible, sympathique et enthousiaste. Ah, et puis, il a toujours cette petite voix de fausset très drôle qui renforce le comique de ses propos…

Je trouve que tu as réussi à créer un personnage Depardieu, quasiment un super-héros. Il est plein d’énergie, il peut tout se permettre, il échoue rarement... Il a une telle vitalité qu’on a envie d’être Gérard Depardieu. Je suis content que tu dises ça puisque je l’ai traité comme tel. J’avais l’impression d’accompagner un personnage hors norme. J’étais aux côtés du super-héros comme une espèce de... Robin avec Batman (rires). Et quoi qu’on en dise, il fait des choses que les autres ne font pas. Par exemple, une séquence que j’aime beaucoup, quand France 2 a retiré le financement d’un film, il déboule au siège de France Télévisions sur son scooter, il passe l’accueil, il arrive en pleine séance de réunion et il attrape le président de France Télé, Rémy Pflimlin. Et à la fin, il obtient le financement de son film. Personne ne fait ça ! Personne ne peut se permettre de faire ça ! En France, il n’a aucun équivalent. Dans ce senslà, il est une sorte de super-héros.

T’attendais-tu à un tel succès pour ton Gérard, 50 000 albums vendus en 3 mois ? Tu reçois un accueil comme jamais. Ce qui est rigolo, c’est que Depardieu lui-même m’a dit vers la fin de l’album : « Tu vas voir, ça aura plus de succès que Le Château, ton bouquin sur l’Élysée. » Il ne le disait pas pour frimer. Parfois, il a une sorte de clairvoyance.

Il est vraiment chargé de la vitalité que tu décris ? C’est surtout mental. Il a un mental de malade sinon il n’aurait pas fait toute la carrière qu’on lui connaît. C’est quelqu’un qui vient d’un milieu extrêmement modeste. Il n’avait pas d’éducation du tout, il ne connaissait personne dans le milieu, vraiment zéro contact. Il a une telle détermination, et parfois une forme d’inconscience, que toutes les barrières se lèvent. Aujourd’hui, il est très abîmé par la vie, par les excès, mais il a un truc mental vraiment

Il te dit ça un peu aussi pour le challenge. On voit bien dans le livre que Hollande n’est pas son ami. Il te chambrait souvent sur l’air de «ton copain Hollande». Oui, il me prenait souvent à parti là-dessus, ça l’amusait beaucoup, et dès le début. Le fait que j’ai suivi la campagne

En 2012, Depardieu s’installe à Néchin en Belgique pour « changer d’air » fiscal. Libé flingue et titre en couv’ : Le Manneken fisc.

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par martial ratel dessins : mathieu sapin

ce hĂŠros.


impressionnant. Il en parle dans le bouquin : «Quand mon genou ne veut plus répondre, et bien c’est pas lui qui commande. Je vais lui montrer que c’est moi qui décide !» Et puis, il a aussi une espèce d’aplomb. J’ai fait un dessin à partir d’une photo où il écrase son nez sur la joue de Poutine. Mais quel est le malade qui ferait un truc pareil ? Même si tu as de bonnes relations avec Poutine, tu ne fais pas ça ! Tu n’imagines pas Mélenchon faire ça. (rires) Il a un truc et très peu lui résistent. Parlons de ton dessin. Ton Depardieu évolue durant ces 5 années. Au début, il n’est pas dessiné de la même manière qu’à la fin. On sent qu’à un moment, tu sais comment le croquer et il est là : le dessin n’évolue plus. Il est compliqué à dessiner Depardieu ? Oui, c’est assez juste. J’ai mis beaucoup de temps à faire, à écrire ce livre. Beaucoup de temps à observer. C’est vrai qu’au début, comme pour n’importe quelle série, le personnage est là, il commence à exister mais la forme définitive ne se fixe qu’au bout de quelques pages. Cela dit, il est assez facile à dessiner parce qu’il a des traits très caractéristiques. C’est même un plaisir, j’adore le dessiner. Je l’ai beaucoup dessiné dans mes carnets. Et au bout du compte, j’ai fini par apprivoiser le sujet. Au bout d’un moment, je n’ai plus eu besoin de le regarder pour le dessiner. Tu as justement travaillé ton livre à partir de ces carnets. Comment fais-tu ? Tu re-dessines tes carnets, tu les scannes ? Je re-dessine tout. Je fais aussi beaucoup de photos. Mais ce n’est pas du tout la même chose. Quand tu dessines, tu fixes un moment. C’est comme une photographie sensitive. Dans le livre, j’ai parfois re-dessiné quasi à l’identique mais de manière plus synthétique. A la fin du livre, je montre des images de mon carnet, certains me disent qu’ils préfèrent ces dessins : c’est plus fin, c’est plus proche de la réalité... pour eux. Mais ce n’est pas la même chose qu’une BD. Pour une BD, il faut au contraire que ton trait soit synthétique pour que la lecture se fasse facilement.

... Oui, mais des dessinateurs talentueux, virtuoses, il en a déjà rencontrés. Comment toi, Mathieu, qui est quelqu’un d’assez discret, pas excessif - tu n’es pas une grande gueule tu as réussi à trouver ta place ? Oui, c’est vrai, je suis assez discret mais malgré tout, quand il disait une connerie, je me permettais de le contredire. Ça lui a plu que quelqu’un n’abonde pas systématiquement à ce qu’il dit. Le fait qu’il soit extrêmement impressionnant n’incite pas les gens à le contrarier. On lui dit tout le temps ok à tout. Moi, j’étais finalement dans un dialogue assez normal avec lui. Et je pense qu’il souffre aussi de ça, que tout le monde s’adresse à lui comme à une espèce de demi-dieu sur terre. Et à force, ça le saoule. Je me rappelle d’un moment qui n’est pas dans le bouquin. On est allé dans un restaurant au Portugal. C’était un peu improvisé, j’étais avec ma belle-sœur qui n’en pouvait plus parce que j’étais avec Depardieu. Et lui, il lui disait : «Ta gueule !». Ce qu’il voulait, c’était aller dans un resto et passer une soirée «normale». (rires) On ne se figure pas ce que c’est qu’une ultra-célébrité. Tu croises des gens qui n’en reviennent pas d’être là avec toi. Et il t’appelait «Tintin» du début à la fin ? Non, juste au début parce qu’il ne se rappelait pas de mon prénom. (rires) J’ai gardé cette référence dans le livre parce que j’aime beaucoup Tintin. Lui, il déteste, et aussi parce que je lui vois beaucoup de points communs avec le capitaine Haddock : le côté injurieux, toujours de mauvais poil et en même temps très émouvant, le rapport à l’alcool, le fait qu’il ait un château... Plus qu’Obélix, il me fait penser au Capitaine Haddock.

Est-ce que Depardieu est un bon client de l’humour ? Parce qu’il a ce côté très dramatique. Ce que j’ai constaté, et encore plus après avoir terminé le bouquin, c’est à quel point le personnage est paradoxal : la force et la douceur, le masculin et le féminin, etc. Et donc sur l’humour, il a des saillies, des inventions langagières et des fulgurances, c’est quelqu’un d’extrêmement drôle. Il imite très bien les gens et il est très insolent. Je me souviens encore que lorsque que nous étions dans le Caucase, j’avais des courbatures aux abdos à cause des crises de rire. Et, en même temps, c’est quelqu’un de plombé par la vie, parfois il est très déprimé... Il souffre. Il dit : «Je ne m’aime pas», «je me déteste». Il a vraiment ces deux aspects. Comment est-ce que tu as trouvé ta place à ses côtés, toi petit Mathieu Sapin, comme tu te dessines, à côté de l’énorme ogre? De manière assez naturelle. D’abord, le fait que je dessine. Il est très sensible à cela et à l’art en général...

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Supermurgeman et Mathieu Sapin comme il se dessinait en 2005.


Oui, mais là, je pense que les livres comme le tien, racontés de l’intérieur, qui s’attachent au temps politique, à la République, serviront plus tard les chercheurs, les historiens qui travailleront sur cette période. Ça on verra, mais ça me fait plaisir quand je suis invité dans une école de journalisme ou Sciences Po... Moi, je me définis comme un guignol. Je fais de la bande dessinée, je n’ai pas abandonné les livres que j’ai faits avant ; et je vais bientôt retourner aux aventures de Supermurgeman. Je suis un amuseur. Une porte s’est entrouverte et moi je la pousse, j’avais envie de voir ça. Concernant la politique, je ne suis pas au clair : j’ai très envie de passer à autre chose et en même temps, il y a ce moment un peu terrible de fin de présidentielle avec l’extrême droite qui est à deux doigts d’être au pouvoir 2. Et du coup, je ne sais pas si c’est le bon moment d’arrêter. Je suis accroc mais j’essaye de me soigner. Je prépare un carnet pour L’Association, qui va s’appeler Docu Fiction sur mon rapport ambigu à ces deux termes. C’est venu d’un film auquel j’ai participé et qui s’appelle Macadam Pop-corn, il sort le 21 juin. Dans ce film, je suis à la fois moimême Mathieu Sapin, personne que le réalisateur a voulu suivre dans son boulot d’enquêteur, et à d’autres moments je récite du texte sur des parties totalement fictionnées avec des parties animées. Le sujet, c’est les salles de cinéma. On fait un tour de France des salles de cinéma, on a d’ailleurs tourné à Dijon, et on a rencontré les gens dont c’est le métier de projeter des films. Ils ont tous un discours intéressant mais différent. Et l’ensemble fait une espèce de portrait de la France vu des cinémas. Donc, le point de départ du livre pour L’Association c’est ça, cette chose étrange : depuis 5/6 ans ma vie est devenue un peu n’importe quoi. La semaine dernière, j’étais à l’Élysée et il y avait Arnold Schwarzenegger qui recevait une Légion d’honneur (rires) et j’étais là à discuter avec lui ! Si je raconte ça dans une BD, on peut facilement croire que je me la raconte, que c’est un gros délire... J’aime bien tester les limites de la réalité, et je me rends compte qu’il n’y en a pas, parce qu’on peut aller très loin dans une forme de délire.

J’ai l’impression que tu deviens un dessinateur naturaliste dans le sens où de plus en plus dans tes livres comme Le Château, il y a un décor absolument précis et incroyable. Tu t’attaches à bien représenter les palais, les hôtels... Les décors prennent une place de plus en plus importante. Dans les albums de Supermurgeman, les décors sont assez succincts : c’est la jungle. Là, tu retranscris à l’identique ce que tu vois. Et ce décor fait sens. Oui, c’est une des choses qui m’ont beaucoup excité en suivant le monde politique et Depardieu, c’est la richesse de la réalité des décors et des personnages. Je pense aux personnages

Ce n’est pas moins excitant de faire l’Élysée que Supermurgeman. La différence, c’est la pression. secondaires. Quand on invente une histoire, on n’a pas la richesse nécessaire pour inventer tous ces personnages. Là, il y a des personnages qui apparaissent avec des traits particuliers. Ils ont tous leur propre motivation. Et puis, il y a aussi les décors. J’ai choisi des sujets qui vont dans des endroits pas banals. Des endroits où l’on n’a pas l’occasion d’aller. C’était très excitant. Après, je prends des photos. J’aimerais passer du temps et dessiner des résidences ou des palais d’État mais c’est impossible. (rires) J’accorde beaucoup d’importance à dessiner de la manière la plus descriptive possible pour que... tout simplement on y croit. Avant, j’étais beaucoup plus collé aux photos et pour ce livre, plus que d’habitude, j’ai fait appel à ma mémoire. C’est la première fois que je travaille comme ça. J’ai consulté les photos au minimum. J’essayais de me rappeler ce qui m’avait le plus marqué.

Il a un mental de malade sinon il n’aurait pas fait toute la carrière qu’on lui connaît.

Depuis quelques années, vous êtes nombreux à suivre, à dessiner les hommes politiques et leur decorum. D’abord, Quai d’Orsay est un préalable. Je n’aurais pas fait Campagne présidentielle et Le Château si Christophe Blain n’avait pas fait Quai d’Orsay. Il a brisé un tabou. Il a démontré qu’on pouvait traiter ce milieu en bande dessinée, de manière intelligente, et avoir une grande audience. Par la suite, il a été énormément contacté, par plein de chefs d’État, parce que tout le monde voulait sa bédé. (rires) Il y aussi ce mouvement que j’ai du mal à appeler « bédé-reportage », je préfère bédé du réel. Le public BD, mais aussi le grand public, est habitué aux livres de Guy Delisle ou Étienne Davodeau. Tu peux citer aussi L’Arabe du futur ou Persepolis. Il y a 15 ans, c’était impensable de faire une bédé sur l’Élysée ou sur les hommes politiques.

Dimanche 30 avril, à l’occasion du premier tour de la Présidentielle, tu as passé la journée avec François Hollande. Raconte-nous, la surprise, l’horreur au sommet de l’État de voir Le Pen au second tour. J’avais envie de passer cette journée avec Hollande, de Tulle à l’Élysée, parce que j’avais couvert la campagne de 2012, 2

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L’interview a eu lieu entre les 2 tours de l’élection présidentielle.


« Le côté injurieux, toujours de mauvais poil et en même temps très émouvant, le rapport à l’alcool, le fait qu’il ait un château... Plus qu’Obélix, il me fait penser au Capitaine Haddock. »


puis j’avais passé environ 2 ans à suivre l’exercice du pouvoir à l’Élysée et ça me semblait dommage de ne pas assister aux derniers jours. À l’Élysée, il y a une ambiance totalement plombée. En terme de romanesque c’est super intéressant, tu assistes à une espèce de fin de règne. Il y a une sorte de vide que je voulais raconter. Je ne sais pas encore si je vais en faire un livre ou quelques pages. J’ai pu prendre toutes les notes possibles et être présent dans le bureau de Hollande au moment des résultats. C’était évidemment passionnant parce que j’étais dans les mêmes conditions 5 ans plus tôt et on ne peut pas s’empêcher de faire le parallèle entre une ascension et la déconfiture, la déception. C’était le grand écart pour Hollande : la défaite du Parti Socialiste, une catastrophe, et en même temps Hamon, pendant son quinquennat, a toujours été un caillou dans sa chaussure, donc il n’allait pas pleurer pour lui. Macron, au contraire, c’est quelqu’un qu’il a poussé mais qui l’a trahi sur la fin, donc il ne pouvait pas être content pour Macron. (rires) Je pense qu’il a surtout regardé le score de l’extrême droite. Le fait que Marine Le Pen soit en deuxième position, et non en tête, c’était une forme de soulagement. Idem pour Fillon qui n’est pas au second tour. Hollande ne montre pas les choses, il... hoche la tête. (rires) Ce sont des moments incroyables à vivre. Je vois ça surtout en termes romanesques. Je m’extrais un peu de mon rôle de citoyen. Comment est-ce que tu ressens le fait que tes BD documentaires aient plus de succès que tes BD de fiction ? Évidemment ça fait plaisir quand les livres ont du succès. Je suis très heureux parce que je suis libre de faire ce qui me plaît. J’ai toujours attaché beaucoup d’importance à cette liberté. Je connais des auteurs qui sont «prisonniers» d’une série à succès et qui peuvent difficilement s’en écarter. Moi, j’ai l’énorme chance de travailler assez vite et d’être toujours dans une forme d’enthousiasme, de toujours m’éclater à faire mes livres. Ce n’est pas moins excitant de faire l’Élysée que Supermurgeman. La différence, c’est la pression. Quand tu fais une BD sur des gens qui existent, il faut faire gaffe à tout ce que tu dis. Il faut se préparer à d’éventuelles conséquences. Il faut être très exact. Et du coup, quand tu fais une BD plus légère comme Akissi, tu respires. Je fais des BD avec une audience importante de par leurs sujets. Je ne suis pas naïf, ce sont les sujets qui font le succès de ces livres, je suis très à l’aise avec ça. Mais je suis très heureux de faire Le Journal de la jungle qui n’a pas dû dépasser les 500/1000 exemplaires. Ces livres n’ont pas forcément été conçus pour toucher un large public. Je les fais parce que ça m’éclate et parce que j’en ai besoin. Je sais que ça plaira beaucoup à quelques personnes et ça me suffit. Ça voudra dire que je ne suis pas tout seul à prendre du plaisir. (rires) Un conseil que t’a donné Depardieu et que tu appliques ? D’une manière générale, c’est quelqu’un qui t’oblige à ne pas avancer masqué, à t’assumer comme tu es et à avoir confiance en toi-même. C’est un peu un discours à la Nike (rires) mais en l’occurrence avec lui rien n’est frelaté. C’est un conseil qu’il m’a donné pour le cinéma. Il faut faire confiance à sa vision, à ce que l’on veut raconter sans se faire polluer par tous les gens qui vont te donner des conseils et affadissent ton propos. Il faut être maître de ce que l’on veut faire... Mais en gardant les oreilles ouvertes quand même, hein ! // M.R.


Les places. Il n’y a bien que les touristes pour s’intéresser aux places publiques dans une ville... Le temps de faire quelques photos, ou d’acheter sous forme de carte postale un souvenir, résumé visuel rapide de la ville qu’on a visitée. C’est pourtant vrai. Des villes qu’on ne fréquente guère, on n’a en tête que leurs quelques grandes places majeures, et le monument artistique qui y trône au beau milieu. Bien pratique, mais un peu réducteur pour bien cerner l’histoire complexe d’une ville. Il y a les vieilles places, les médiévales, zones d’échanges et de rencontres, mais il y a aussi les plus récentes, celles aménagées pour faire propre, pour pouvoir se garer ou tout simplement pour faire classe. Toutes sont nées d’une volonté politique ou d’un besoin pratique, aujourd’hui très largement oubliés. Alors Dijonnais d’origine ou non, refaisons en bon touriste le tour des places de la capitale bourguignonne, avec un œil averti, pour comprendre un peu mieux ce que l’on prend en photo...

Welcome to my hood par lilian elbé, à dijon PHOTOS : archives municipales de dijon

Place des grands hommes

En bas, en jaune, la CX du Chanoine Kir.

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Les places anciennes

Place Bossuet

Dans une ville, une place ancienne est une zone dont l’espace est resté non bâti. On imagine en s’y promenant que l’espace est comme tel depuis toujours, datant même de l’époque médiévale. à Dijon, des places de ce type, il n’y en a pourtant pas beaucoup... Mise à part la place Bossuet. C’est historiquement, depuis des siècles, l’ancien parking d’entrée sud dans la ville. C’est en effet là que tous les visiteurs et marchands venus du sud de la Côte-d’Or débarquaient à cheval ou en calèche depuis la porte du bas de la rue Monge. Quand on était place Bossuet (autrefois appelée place Saint-Jean), on était arrivé à Dijon. Une sorte de grand parking à chevaux. Lieu d’arrivée, donc lieu de rencontres et d’échanges, c’est là que beaucoup de marchés s’organisaient. Toutes les places étant plus tardives, les rares œuvres anciennes illustrant une scène à l’intérieur de Dijon choisissaient comme décor la place Saint-Jean, alors qu’aujourd’hui elle n’est plus qu’un couloir de circulation.

Place Bossuet, début XXème siècle.

Place Emile Zola, Y’avait la guillotine ici autrefois...

Place Emile Zola

La place de l’été, la place des terrasses, avec l’ombre de ses arbres et sa jolie fontaine. Difficile d’imaginer dans cette ambiance qu’au Moyen Âge, et jusqu’au XIXème siècle, c’était la place des tortures et exécutions publiques. Rebaptisée place Emile Zola en 1921, elle s’était toujours appelée auparavant place du Morimond. Toute l’année, les machines de mise à mort trônaient là, pour avertir les passants ou les inviter au prochain spectacle morbide. Et il y en avait pour tous les goûts : gibet pour la pendaison, roue et plus tard guillotine. Comme les jours d’exécution étaient des jours de fête, de spectacle, la place était souvent décorée pour l’occasion. 65


Les places pour s’ouvrir

Place Darcy

La place Darcy connaît une histoire similaire et contemporaine à celle de la place du président Wilson. Pour débastionner la ville, les remparts tombent, plus besoin de barrer l’arrivée de Paris, où au Moyen Âge il fallait frapper à la porte dite « Guillaume », voisine du château de Dijon (aujourd’hui rasé) pour pouvoir entrer dans la ville. Aujourd’hui, le petit arc de triomphe provincial que tout le monde prend en photo place Darcy n’est qu’un hommage décoratif datant de 1788 à cette ancienne porte médiévale disparue, autrefois construite à cet emplacement même. Quant à la géométrie de la place et ses façades, toutes datent de la deuxième moitié du XIXème siècle, fameuse ère du style Haussmannien. Bref, un petit Paris bourguignon bourgeois, concentré sur une place et un jardin Belle Epoque, qui sont avant tout la face émergée du premier grand réservoir d’eau potable de la ville inventé par Henry Darcy. D’où le nom...

Place Wilson

Dijon est de ces villes autrefois fortifiées qui ont dû se repenser l’époque moderne venue. Au XIXème siècle, plus besoin de se cacher derrière de hautes fortifications et d’offrir aux étrangers un comité d’accueil fait de remparts, grilles, de tours et de sentinelles. Politiquement, urbanistiquement, après la Révolution, Dijon s’ouvre, d’autant que les faubourgs, à l’extérieur des remparts, commencent à se peupler. Alors pour montrer qu’elle sort de son cocon à meurtrières, la municipalité décide de casser ses grandes portesbarrages et de réaliser des places plus accueillantes. à l’image de la place Wilson (autrefois place SaintPierre, ou place du peuple). Là où autrefois l’accès aux allées du parc de la Colombière et le parc lui-même étaient privés et réservés aux nobles (les deux piliers nus à l’entrée des allées symbolisent d’ailleurs cet accès restreint), les murs tombent et la ville fait construire une grande place circulaire, avec des jets d’eau en son centre. La forme circulaire est tout simplement la résultante d’un projet finalement déplacé : le port du canal. En rond pour permettre les demitours, le port dijonnais du canal de Bourgogne était initialement prévu à cet endroit sur les plans, avant d’être déplacé là où l’on sait pour des raisons de budget. Pour ceux qui regretteraient la présence d’eau, il y aura des fontaines à jets de presque 30 mètres de hauteur.

Place Darcy (90’s) - Mon dieu, c’est kitch...

Place Wilson (80’s), meilleure place pour boire une 8-6. 66


Place de la Libération

Une des plus vieilles places de Dijon, datant pourtant seulement de la fin du XVIIème siècle. Auparavant, c’était une placette et des dépendances du Palais des Ducs. Dans les premières décennies, la suite d’arches formant le demi-cercle de la place était livrée nue. Ce n’est que par la suite que des bâtiments ont été construits contre les arches. L’idée de cette forme était d’en faire un décor luxueux pour une gigantesque statue équestre du roi Louis XIV : la place Royale. Mais elle n’y restera qu’un siècle, faisant les frais de la Révolution qui détestait tout ce qui a trait à la royauté, pour devenir place d’Armes. Son nom a ensuite changé au fil des rebondissements de l’histoire politique. Gloire au roi, gloire à l’empereur en 1804 quand elle s’appelle place impériale, puis à nouveau place Royale à la Restauration, place d’Armes derechef pour la monarchie de Juillet, et même place du Maréchal Pétain pendant l’Occupation... L’origine de son nom actuel est donc facile à déduire, surtout quand on a vu les images des chars américains la traversant en 1944. La plupart des Dijonnais du XXème siècle l’ont connue avec moins de faste que son nom n’en a prétendu, la place étant un peu considérée comme le parking de la mairie jusqu’en 2005, où les emplacements de voitures sont remplacés par des pavages en pierre de Comblanchien.

Les places pour faire classe

Place de la Rep’ avant les discothèques.

Place de la République

La République, en voilà une belle valeur à défendre... quitte à en faire un peu trop à la fin du XIXème siècle, il faut défendre la République contre un éventuel retour de la monarchie. Toutes les grandes villes du pays se font construire une place de la Rep’ sur le même modèle. La place de la République, achevée seulement en 1888, est de celles où la municipalité a vu un poil grand quand elle a voulu « débastionner » le centre-ville, créant de larges boulevards extérieurs le long des remparts tombés, pour ouvrir une fois de plus sur les faubourgs extérieurs qui s’étalent. Là, c’est le faubourg Saint-Nicolas, l’ancêtre du quartier Clémenceau. La place de la République, c’est 250 mètres de long de pur style Haussmannien, mais au sol seulement. Car les façades qui l’entourent ne sont pas du même standing. Elle est tellement grande qu’on ne peut pas la prendre en photo, raison pour laquelle on ne trouve pas d’image ancienne de son ensemble. On imagine organiser là des foires, des marchés, des défilés militaires, bref une agora de cité parfaite, républicaine. Six ans après, le président Carnot se fait assassiner, l’endroit est parfait pour lui ériger au milieu une statue allégorique en son hommage. Mais au fil des décennies, la place de la République n’échappe pas à l’érosion de son standing. C’est toujours ainsi que vieillit une place : d’abord elle a un sens politique - à l’échelle municipale surtout - puis on la relègue à des fonctions plus pragmatiques, comme pouvoir garer sa voiture, avant de la rénover et d’en faire un atout touristique simplement parce que c’est grand, ancien et en pierres. Beaucoup se souviennent en effet des deux demi-parkings au beau milieu de la place, pratiques pour accéder à la préfecture et faire refaire ses plaques d’immatriculation. Aujourd’hui, la surface a été retransformée en grande esplanade, et a quelque peu repris de sa grandeur souhaitée à l’origine.

Place de la Lib’ (60’s) : c’est vraiment trop bien de pouvoir garer sa caisse en ville ! Maintenant ils nous y interdisent les salauds !

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Les places pour faire propre Place François Rude, dite du Bareuzai

Place du Bareuzai, vers 1900. Un p’tit café en terrasse ?

Certainement la place la moins historique alors qu’elle est peutêtre la plus considérée comme telle. Car ce petit espace au look de décor médiéval date seulement du XXème siècle. De 1904 précisément, lorsque la municipalité a jugé vraiment trop insalubre les vieilles maisons du coin entre la rue François Rude et la rue des Forges. A cette époque, le centre-ville en a bien besoin, la rue de la Liberté est loin d’avoir le visage qu’on lui connaît : tout le front des façades des grands magasins dits « parisiens » ne sont encore que des échoppes ou hôtels de fortune plutôt rustiques. Dans les années 1910 seulement, les Nouvelles Galeries, à la Ménagère et autres Pauvre Diable, viendront ainsi écraser tout un pan vieillissant de la rue de la Liberté, qui obtient alors son statut d’artère principale du centreville. La création de la place François Rude, dans une volonté de moderniser le centre-ville, contribue ironiquement aujourd’hui à lui donner cette image rustique, terroir. C’est en raison du rasement des maisons anciennes : construites les unes contre les autres, les premières supprimées ont contribué à mettre à jour de vieilles façades du XVIème et XVIIIème siècle autrefois cachées contre d’autres murs, parfois à colombages, ces structures de bois qui font justement le bonheur des touristes. La statue n’a pas été réalisée par François Rude, c’est simplement que l’artiste est né dans la rue voisine. C’est une œuvre offerte par l’Empereur cinquante ans auparavant à la ville, on a jugé qu’elle ferait bien là, avec une fontaine comme piédestal. Pour ceux qui ne se souviendraient plus de leurs sorties scolaires : la statue représente un vendangeur foulant le raisin au pied, teignant ses jambes nues d’une teinte violacée. Il en ressort donc avec le bas du corps rosé. Le bas rosé. Le Bareuzai. Voilà comment une ville se rend complice de véhiculer des clichés régionaux. 68


Place Grangier

Encore plus récente, la place Grangier est aussi le résultat d’un programme d’assainissement par la destruction totale de pâtés de maisons entiers du centre-ville début 1900. Le quartier était plutôt populaire, les maisonnettes et petits ateliers détruits sont devenus un immense terrain vague, bordant le tout nouvel Hôtel des Postes, gigantesque, construit sur les ruines du Château de Dijon. Par quoi remplacer ce terrain vague ? Un temps, on a parlé de la construction d’un grand magasin parisien, puis la ville a finalement récupéré le terrain pour en faire en 1911 une grande place. Les époux Grangier étaient de généreux donateurs à la ville, on la baptise en leur honneur et on pose une petite statue dans un square. Puis les années passant, la place Grangier connaît le même sort pragmatique que sa voisine place de la République : adieu la petite fontaine, bonjour les voitures ! Cette fois, le parking est sur plusieurs niveaux en sous-sol. A la surface, il y a même une station-service avec plusieurs pompes, devenue plus tard le point d’accueil Divia et Shop-in Dijon aujourd’hui. L’idée de grands travaux de rénovation est d’ailleurs dans les projets municipaux depuis plusieurs années, au sein du programme de piétonnisation du centre-ville, parce que là, c’est une des moins jolies places de la ville.

Parking + station service : combo gagnant.

La place qui n’en est plus une Place du 1er Mai

Place du 1er Mai (40’s) : on aurait du garder les rails du tram, c’est con.

Enfin, si la plupart des places sont des constructions urbaines très récentes dans l’histoire de la ville, il en est parfois qui disparaissent totalement. Ainsi la place du 1er Mai, aujourd’hui simple carrefour routier entre voitures et tramways, était autrefois la place animée des faubourgs d’Ouche, avec de nombreux commerces alimentaires et un petit parc en son centre. On l’appelait la place Crébillon. à la fin de la guerre, le char d’assaut de l’avenue du Drapeau a pendant quelques années été érigé au centre de cette place, avant qu’elle ne soit emportée par le programme de destruction des « taudis des faubourgs d’Ouche » dans les années 1960. La mode architecturale s’inspirait alors des réalisations du bloc communiste, dont on retrouve bien ces influences sur le massif bâtiment des Postes flanqué en bordure de la place. // L.E.


la page mode Photos : Louise Vayssié Série réalisée à Dijon, au bar L’Équipe Modèle : Thomas

Chapeau : offert par une hôtesse Bacardi pendant une feria à Dax. Lunettes : anti-brouillard, c’est plus stylé. Veste : équipe de France 82 original, collection Maxime Bossis. Tatane : en pneu. Ambiance : L’Équipe, c’est la maison. Pose : j’ai pas mis de slibard, ça collait.

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Costard : offert à François Fillon par Robert Bourgi, récupéré sur Le Bon Coin. Cigare : Cohiba, que quand je vais l’allumer, je vais bien m’étouffer. Bière : Kro, what else ? Ambiance : « Gros t’as vu page 2 ? Y’a encore eu une agression à Chenôve, on vit dans la peur ». Pose : « Patron, une Suze et des jetons pour le flip’ !»

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la cuisine de sparse

Promotion

par so fish illustration : mr. choubi

Jeudi 22 juin, 10h. Tu as rendez-vous dans le bureau de ton chef. Il a mis sa cravate à motifs et porte son sourire le plus affable. Serge est un homme de 53 ans, il est entré en 1992 chez Plaq & Inox Industrie et il a gravi les échelons à la sueur de son front, pas comme tous ces jeunes diplômés qui croient tout savoir en arrivant. Aujourd’hui il est directeur du service marketing. La vieille école. Toi, tu es jeune, discrète, bosseuse et en tailleur. Tu as fait tes études à Paris et tu es arrivée, il y a 2 ans, en province. Quand tu passes le seuil de la porte, tu sens comme une odeur de bonnes nouvelles qui traverse la pièce. Serge, il t’aime bien, tu le sais. Parce que tu es douée bien sûr et surtout parce que tu ne fais pas de vagues. Tu es mignonne aussi, mais ça ne compte pas, hein ? « Vous vouliez me voir Mr Dumoulin ? - Oui, entre Sarah, j’ai quelque chose à te proposer... » C’est là que tu apprends que le responsable du service marketing Inox quitte l’entreprise. Serge pense à toi pour le poste. Plus de responsabilités, un meilleur salaire, une voiture de fonction et quelques déplacements dans le grand est. C’est paillettes dans tes yeux, tu écoutes rêveuse les différentes clauses correspondant à ce nouveau contrat, tu es heureuse. Enfin un peu de reconnaissance bordel ! Je suis d’accord que dire oui au moment de la proposition est quelque peu hâtif dans la vraie vie, mais pour le bon déroulement de cette chronique, tu acceptes directement. Ton boss te propose alors de fêter cette bonne nouvelle dans un autre cadre. Toi, mêler boulot et vie personnelle, c’est pas trop ton truc et ton mec n’a pas forcément envie de rencontrer tes collègues du service qualité, ou de se taper un bowling le vendredi avec les gars de la compta. Il faut dire que tu n’as pas forcément les mêmes centres d’intérêt. Toi c’est plutôt rando et pêche à la truite. Ton chef est plutôt oisif et un peu borderline. L’idée d’une soirée couple avec lui, ça t’enchante pas trop. Mais bon, tu sens que ce serait pas mal vu de balancer l’invitation : « Un dîner à la maison avec votre femme Pénélope ? - Avec plaisir ! Jeudi prochain ? - C’est parfait ! » Tu rentres à la maison heureuse d’annoncer la nouvelle à ton mec. Vautré sur le canap’, Guillaume t’accueille comme chaque soir : « Alors, cette journée au boulot ? Toujours aussi con, la Corinne ? ». Tu es amoureuse mais il est pédant et feignant. Tu redoutes un peu le choc des cultures avec ton boss : « Chéri, aujourd’hui j’ai eu une promotion ! J’ai invité Serge et sa

dîner femme à dîner jeudi prochain pour fêter ça ! - Je suis obligé d’être là ? - Ben oui, bien sûr ! - Ok. Mais il est pas un peu con ton chef ? » La soirée sera longue. Serge est un viandard, classique. On te propose donc de découvrir la viande rassise (et pas racie, ça ne se dit pas). Une entrecôte au four, c’est succès garanti. Et comme tu as envie d’y montrer aussi ton goût prononcé pour l’écologie, la verdure, les éoliennes, tout ça, tu prépareras un pesto de fanes aux amandes en guise de moutarde et une salade avec épinards, choux raves et vinaigrette estragon pour l’accompagner. Comme tout bon cliché qui se respecte Serge est complètement fan de sa femme, Pénélope, qui elle-même, tombe en extase devant tout dessert de bon aloi. Tu décides donc de sortir ta botte secrète, la tatin rhubarbe façon moelleux et son coulis de fraises du marché.

La shortfish Tu pourrais t’attendre à ce qu’on te dise, comme à chaque fois, qu’il faut que tu commences par aller au marché, pour chercher les produits frais du coin... Eh ben nan ! Cette fois tu vas aller à l’Inter, pour cherche une belle entrecôte bien rassise de 30 jours ! Certes l’odeur et la couleur pourront te rebuter légèrement mais t’inquiète, une fois dans l’assiette, ce sera un vrai bonheur. Après ça bien sûr, tu fonces au marché ! Ton gros challenge du jour : trouver de la verveine et de l’estragon ! Dans ton panier aussi : bottes de radis, ail frais, oignons nouveaux, jeunes pousses (épinards, moutarde, roquette...), batavia, carottes nouvelles (avec les fanes !), chou-rave, ​ céleri, petits pois... ce qui te fait plaisir à manger cru ! Chope aussi un morceau de parmesan ou de pecorino pour le pesto. Des œufs de la ferme, de la rhubarbe et des fraises du coin, te voilà paré !

La fishstory 72


Le fishmeal • Commence par le dessert, Prends un moule

rond ou rectangulaire, et recouvre-le de papier cuisson. Lave la rhubarbe et coupe-la en bâtons pour qu’ils recouvrent entièrement le moule. Ajoute quelques morceaux de beurre et un peu de sucre en poudre, enfourne à 180°C pour 20 min environ. Prends une petite casserole, et fais réduire pendant 10 min 150g de sucre avec 150g d’eau. Coupe le feu et ajoute 2 branches de verveine que tu vas laisser infuser pour parfumer le sirop. Pendant que ça cuit, prends un saladier et mélange vivement 200g de sucre avec 200g de beurre mou. Ajoute 4 oeufs, 200g de farine et une cuillère à café de levure. A la fin des 20 minutes, coule la pâte sur les bâtons de rhubarbe et enfourne à nouveau pour 15 min. Pique pour vérifier la cuisson, la pointe du couteau doit ressortir à peu près intacte. On passe aux fraises maintenant, lave-les délicatement sous l’eau froide, et coupe-les en mirepoix (maintenant tu sais, hein...). Réserveles, tu les mélangeras au sirop de verveine au moment de servir. Le dessert est prêt !

• Passons à la salade...

Lave bien tous les légumes dans un bac d’eau froide avec du bicarbonate et frotte-les avec une brosse. Garde bien les fanes de carottes et de radis. A l’aide d’un couteau excellemment bien aiguisé, émince finement tous tes légumes. Côté coupes, tu peux t’amuser : carottes & radis en rondelles, choux-raves en julienne, céleri en dés... Prends un plat et dispose toutes les pousses et les fanes de carottes, en essayant de créer un peu de volume. Sur le dessus, ajoute tous les légumes détaillés. Hop au frais !

d’ail, un peu de parmesan ou pecorino, quelques pignons, cajou ou amandes grillées et de l’huile d’olive. Mixe et mixe encore, jusqu’à ce que ça forme une pâte homogène. Goûte et assaisonne, ajoute un peu plus d’huile, d’ail ou de fanes si tu en as envie.

• Pour la vinaigrette, équeute l’estragon et cisèle-

• Voilà t’es presque prêt pour ce dîner de

le super super fin. Dans une petite casserole fais réduire pendant 10 minutes du vinaigre de cidre. Laisse tiédir et ajoute l’estragon pour qu’il répande tout son parfum. Ajoute un peu d’huile neutre et un peu d’huile d’olive, assaisonne, et goutte ! C’est pas bon ça ?!

• Allez, on passe au pesto maintenant. Tu as

gardé toutes les fanes de radis ? On a une petite recette anti-gaspi. Dans un mixeur, tu plonges une bonne poignée de fanes, 1 ou 2 gousses

l’extrême ! Démoule le moelleux/tatin dans un grand plat, et au moment de servir, entoure-le du mélange sirop verveine/mirepoix de fraises. Maintenant que tout est prêt, ou presque, on passe à la pièce maîtresse, celle qui ne te donne nullement le droit à l’erreur, c’est bien pour ça qu’on s’y attaque en dernier, maintenant que tu es bien chaud... Préchauffe ton four à 240°C. Quand il est chaud, prends une poêle qui puisse accueillir la bête et sur feu vif, jette

Guillaume a finalement prétexté un vilain rhume pour rester dans votre chambre, c’est un lâche. Pénélope t’a demandée les restes de l’entrecôte à 50 balles le kilo pour son caniche Hector. Après quelques verres de rouquin, Serge t’a fait des avances dans la cuisine au moment de débarrasser. Le lendemain, tu refuses la promotion, démissionnes et quittes ton mec.

La happyfish 73

z’y un morceaux de beurre et un poil d’huile et saisis ton entrecôte 5 min de chaque côté, en l’assaisonnant bien. Mets tout ça dans un plat direction le four avec tout le jus et tout et tout. Ça va cuire 15 min par livre, donc fais le calcul. Évidemment, même pas la peine de préciser, ça se mange saignant ou ça ne se mange pas, sinon c’est gâcher ! Quand c’est cuit, mets la viande sur une planche et découpe-la en jolis morceaux. Avec ça, si elle est pas aux anges la Péné !





É


la sélection musicale

La vieillerie Grace Jones – Nightclubbing (Island Records - 1981). Attention, cet album est un disque majeur et populaire. Et comme le disait Paul, oui, les deux vont parfois très bien ensemble. Très bien ensemble. I love you, i love you etc. Disco, new wave, funk, reggae, electro, latin, pop. Nightclubbing est un mix foisonnant et délicat de ce que pouvait proposer de mieux l’énergie new-yorkaise au début des 80’s, dans lequel la grande navigue avec grâce (blague) proposant ainsi une sorte de sono mondiale parfaite. Enregistré aux Bahamas avec une bande de mercenaires, Sly & Robbie et Wally Badarou en tête, l’album alterne froideur, chic, élégance et danse, dans une classe intemporelle. Et réinvente tout bêtement la pop. Lady Gaga ou Rihanna doivent l’avoir en disque de chevet. Inégalable. Et résolument moderne. Allez mater la scène de boîte dans Frantic de Polanski avec I’ve Seen That Face Before (Libertango) en fond. Vous comprendrez. // M.C

À éDe grande qualiteé EL MICHELS AFFAIR - RETURN TO THE 37TH CHAMBER (2017). Fan du Wu-Tang, de funk et de breakbeat, cet album est fait pour toi ! Second volume de l’hommage rendu par Leon Michels et sa bande aux productions géniales de RZA, le résultat est parfait avec notamment le chanteur Lee Fields en featuring sur plusieurs morceaux. La playlist mélange classiques et titres plus rares, et laisse également la part belle aux albums solos. Un album idéal pour préparer la venue de l’été et pour se replonger dans l’univers très soul du Clan ! // R.S.

LOU PHELPS - 001 : Experiments (2017). Basse groovy mélangée à une ambiance psychédélique, hiphop classieux qui rebondit comme une passe au sol de Stephen Curry. Louis-Philippe Celestin aka Lou Phelps n’est autre que le frangin de Louis-Kevin Celestin aka Kaytranada. Le jeune rappeur originaire de Montréal s’affranchit, après avoir monté un projet avec son frère sous le nom de The Celestics. L’album de Lou Phelps comprend des featurings de Key!, Bishop Nehru, Kaytranada le frangin, et Innanet James pour le tube de cet album, What time is it, notamment. Du vrai hip-hop fresh & funky. // C.W.

On s’en carre la raie mais vive la pochetteé! Bobb Trimble - Iron Curtain Innocence (1980). Bobb Trimble, c’est génial, c’est fou, c’est n’importe quoi mais ça le fait très bien, et le monde entier s’en balance. Mais est-ce bien grave ? On s’en fout, non ? Oui, totalement, voilà une perle dont tout le monde se fout, et tant pis ! Le type se paie le luxe de poser avec une bonne Thompson des familles en plus de sa guitare, d’un micro sur pied et de sa gueule de dépressif bien déter’. Si vous poussez la curiosité à écouter l’album, surprise : une espèce de folk rock psychédélique sauce américaine avec des paroles totalement barrées (Killed By The Hands Of An Unknown Rock Star, Night At The Asylum) guidée par une voix fluette et rêveuse d’un Bobb Trimble au top de… Sa forme ? En bref, pas mal de bonnes idées pour un musicien énigmatique et snobé par le monde du bon goût. // D.R. .

Caca dans les oreilles Benjamin Biolay - Volver (2017). Si on m’avait dit, un jour, que j’écouterais un album de Benjamin Biolay en entier, et que j’adorerais ça, j’aurais probablement ri avant de me jeter par la fenêtre la plus proche, après m’être soigneusement pendu trois fois de suite. Bon, écouter un album en entier, hélas, c’est fait. Aimer ça ? Non, tout va bien, je reste encore sain d’esprit et de corps. Benjamin Biolay revient donc avec un nouvel album, Volver, et autant être franc tout de suite : c’est de la merde. Pardon, mais à un moment il va falloir arrêter avec les chanteurs fatigués parisianoparisiens (dans tout ce que ça implique de mauvais) et dont le seul talent est de parfaitement nous faire comprendre qu’en effet, il ne chante pas bien, et que bon sang, Hypertranquille est une espèce de mauvaise parodie de PNL et, oui, ça existe. Bref, il fait beau, donc sortez plutôt dehors, dans des endroits sans Biolay ni Benjamin. // D.R. 78


crash test par jeff buckler photo : dr

Tu t’es vu quand tu fréquentais certains festivals.... ? Descriptif faussement sociologique et non exhaustif de différents festivals de notre belle contrée. À boire et à manger. Divers et variés. Mastodontes ou intimistes. À portée de main et pour une bouchée de pain. Le plus souvent. Moment de partage et de communion. Bouffée d’oxygène pour les uns ou invasion pour les autres. Il restera toujours une faune interlope réunie autour d’une même passion. L’autre. Prends ça, le Temple Solaire.

No Logo, du 11 au 13 août Parce que Jah Rastafari. Brother. Parce qu’indépendant. Vraiment ?! Parce que si t’aimes pas le contretemps, oublie. Parce que t’es plus obligé d’aller en Ardèche pour un week-end de good vibes. Parce que t’es ghettoïsé. Parce que la ganja ça te parle. Parce que tu t’es jamais dit que tu pouvais y aller tout seul ? Parce que Bob Marley, man. Parce que ça pouvait pas se situer ailleurs que dans le Jura. Tu es : Naomi Klein.

Les Eurockéennes, du 6 au 9 Juillet Parce que perds pas ton verre consigné. Bourgeois. Parce qu’il n’y a pas beaucoup d’ombre. Misère. Parce que tu peux aussi prévoir tes bottes. Galère. Parce que sans téléphone tu peux oublier tes potes. Parce que tu verras pas la fin de... pour voir le début de... Dilemme. Parce qu’il y a ceux qui logent au centre de Belfort et ceux qui logent au... camping. Parce que t’attends encore la navette. Parce que la scène de la Plage. Superbe. Tu es : un coup de soleil.

Rencontres & Racines, du 30 juin au 2

Chalon dans la rue, du 19 au 23 Juillet

Parce que t’assumes ta 8-6 pépère. Parce que t’as forcément vu un spectacle génial et un spectacle pathétique. Parce qu’une ville entière à l’état sauvage. Parce qu’Alice au pays des Merveilles. Parce que c’est pas à Dijon que tu verrais ça. Parce que t’aimes les chiens. Parce que les afters aux Abattoirs. Parce que les afters au camping. Parce que les afters... Parce qu’il y a aussi un In ? Tu es : en camion.

Juillet Parce qu’il n’y a aucune autre raison d’aller à Audincourt. Parce que le stand des Antillais. Maman. Parce que tu passes forcément devant le stand des Antillais entre les deux scènes. Danger. Parce que c’est le meilleur festival de street food de la BFC. Point barre. Parce que tu t’es pas forcé à rater un concert. Parce que t’y vas pas pour la programmation. Parce que tu peux t’offrir le pass 3 jours à 25 € sans mettre à mal ton PEL. Tu es : du boudin créole.

Partie(s) de Campagne, du 13 au 16 Juillet

Catalpa, du 23 au 25 Juin

Parce que c’est une nécessité d’avoir un festival dans l’Yonne. Parce que construit sur les cendres de l’Arbre Sec et des Nuits Métisses. Pas facile. Parce que le festival évolue au fil des années et des problèmes. Surtout des problèmes. Parce qu’au bord de l’Yonne. Parce qu’au pied de l’Abbé-Deschamps. Bisous l’AJA. Parce que c’est fini la programmation totale en plein air. Prends ça le climat tempéré. Parce que t’as l’impression qu’il y a une malédiction. Quand même ? Tu es : en marge.

Parce que le maquis Bernard. Résistance. Parce qu’il n’y a pas que les festivals de musique dans la vie. Parce que c’est quand même super bucolique Ouroux-en-Morvan. Parce qu’une salle de ciné en plein été quand il fait très chaud c’est plutôt confort. Parce que les soirées sous le bal monté au cœur de la meule. Réalité. Parce que t’as jamais eu aucun scrupule à faire la sieste pendant la remise des prix. Tu es : un Hollandais perdu.

Les Nuits Bressanes, du 13 au 14 Juillet Parce que les Insus. Parce que Michel Sardou. Parce que les Insus. Parce que Michel Sardou. Parce que les Insus. Parce que Michel Sardou. Parce que les Insus. Parce que Michel Sardou. Parce que les Insus. Parce que Michel Sardou. Parce que les Insus. Parce que Michel Sardou. Parce que... Tu es : d’un autre monde. Ou un Ricain.

PS : Notre honneur nous a imposé de ne pas vous rappeler l’Oeno Music Festival.

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Steeve Guaifresne-lee un entrepreneur en forme

coup de coeur par chablis winston photo : dr

ils vont s’y mettrent ». « Et il avait raison ce con, dès la fin des années 2000, tous les gamins ont voulu se gonfler ». Steeve ouvre sa première salle dans l’ancien Brico-Déco de Pouilly. « à l’époque, on avait 2 haltères et une télé avec des clips qui tournaient en boucle, c’est tout ». Très important la télé dans les clubs. Tout s’emballe très vite pour celui qui ne se voyait pas comme un entrepreneur. « Moi au départ, je faisais plutôt dans la vieille dame qui m’entretenait, c’est pour ça que j’ai commencé à me muscler ». Déjà 80 clubs en France à l’heure où on se parle et 3 qui ouvriront avant la fin du mois. « Tu prends un hangar à 100 euros dans une zone commerciale toute pourrie, 6 tapis de courses et 2 vélos elliptiques, tu fous des télés, des couleurs vives, une gonzesse canon en stage à l’accueil. Tu proposes l’abonnement à 12 euros par mois, les gens deviennent fous. Tant qu’ils peuvent se garer c’est bon, c’est le plus important pour eux ».

Grâce à sa chaine Puissance Max’form, Steeve a réussi en quelques années ce que tous les Français devraient vouloir faire, selon le nouveau président de la République : devenir millionnaire. Fraîchement sorti de son SUV Nissan X-trail, Steeve nous accueille sur le parking de sa toute nouvelle salle Puissance Max’ form, dans une zone commerciale du fond d’un trou de banlieue quelconque. « J’ai eu cette idée de salle de sport à bas prix en Hongrie dans les années 90. Toutes les filles étaient bombardées aux UV, oranges, et tous les mecs étaient gonglés et tatoués, Il y avait une salle de muscu et un solarium tous les 20 mètres ». Au départ, ce culte du corps, Steeve ne le pense pas transposable ailleurs. C’est son ami Kévin qui le persuade. « Il m’a dit : les Français ne sont pas moins cons que les autres,

D’où vient, d’après lui, ce revival healthy ? Retour de la santé au premier plan ? Envie d’un mode de vie sain pour tous ? « Ahah, fais-moi rire, rien de sain dans tout ça. Avec Internet, les gamins veulent ressembler à des acteurs de film de fion, ou à Les Ch’tis vs les Marseillais et toutes ces conneries de téléréalité, c’est leur référence. C’est fini les acteurs et les sportifs. Pas un poil sur le corps et des abdos surdéveloppés. Et en plus, je crois qu’ils ont un peu peur de se faire taper par d’autres, donc ils se musclent trop, pour impressionner, ce qui n’a jamais empêché de se prendre une droite dans la gueule ». C’est ça, en fait, qui les motive : la peur. La peur, et le cul. « T’as beau leur expliquer comment faire ça bien, ils veulent tous prendre de la masse. Donc c’est gras et pas beau, rien à voir avec un corps bien dessiné. Ils ont des énormes bras et des toutes petites jambes, on dirait les mecs dans Astérix aux jeux Olympiques. Ils bouffent comme des porcs pour prendre, et le jour où ils arrêtent de pousser de la fonte, ben ils deviennent obèses ». Ils ne peuvent pas arrêter, alors ils gardent leur abonnement à la salle. « Et c’est moi qui récupère l’oseille, t’as tout compris ». La clientèle est de plus en plus jeune. La moyenne d’âge des clients des clubs Puissance Max’ form frôle les 17 ans, ces derniers temps. « Maintenant, je m’installe essentiellement en campagne et à côté des lycées, là-bas ils sont zinzins, j’ai tous les lycéens qui viennent à la pause déjeuner tous les jours ». Et Steeve a de la suite dans les idées : « Je vais ouvrir un salon de dé-tatouage. Aujourd’hui tout le monde est tatoué, ça n’a plus rien de subversif. Le vrai rebelle en 2017, c’est celui qui n’a pas de tatoo. En plus, quand tu vois les merdes que certains ont sur le corps, tu dis qu’il y a forcement un moment où ils vont redescendre et se rendre compte de leurs erreurs. Et là, je serais là, avec un terminal CB bien calé au comptoir : « Bonsoir madame, alors on veut enlever ce vilain dauphin qu’on a sur l’épaule ? C’est 2000 euros ». Allez hop terminé bonsoir ! » // C.W. 80


par cédric de montceau illustrations : mr choubi

horoscope

hFroscopitone Travail, Famille, Patrie, Sparse mobilise toute la force des étoiles pour satisfaire vos egos dégueulasses. Une demande officielle au Ministère de la propagande a été déposée par la rédaction pour la suppression de certains signes inutiles au développement normal de l’humanité glorieuse et créatrice. Vous foncez beaucoup trop ! C’est très déplaisant de rattraper vos conneries même si vous les regrettez lamentablement. Mettez un peu de vinaigre dans votre panna cotta, c’est pas en craquant votre slip que vous deviendrez Ministre de la buvette. Santé : portez des strings-muselières.

Les balances sont gentiment gentils, modestement modestes, raisonnablement raisonnables et habilement habiles. Le mot “chiant” a été inventé pour eux. Natif du 2ème décan, prenez un peu l’air. Vous aurez le vent dans le dos si vous courez à reculons. Chance : on n’enterre pas les oiseaux dans le ciel.

Votre gaieté sexuelle inquiète votre entourage, c’est plus la saison des escargots ! Vous êtes tellement têtu(e) que personne n’ose contredire votre amour pour le boursicotage. Si vous êtes en couple, votre moitié est très amoureuse, sans garantir que ce soit de vous. Amour : bifler n’est pas tromper.

Le tact, c’est la petite poudre qu’on met sur les fesses des phrases pour s’adresser à vous. Autant dire que votre humidité intellectuelle ne vous permet pas de pisser en poudre. Soyez aimable avec votre entourage, les gens vous détestent tellement. Santé : pour changer de vie, changer de coiffure.

Quelqu’un vous aime en secret, mais vous êtes trop con(ne) pour croire que la lune se dévisse comme une ampoule. L’imagination n’apporte rien à la réalité, elle la consomme et la consume. Si vous êtes relou, rapprochez-vous des balances. En marche ! Chance : patience, vous trouverez bientôt un moyen de vous détester.

Vous avez très bien compris qu’il est plus simple de gagner des cerveaux plutôt que des territoires. Vous avez raison, les mensonges ne sont que des faits alternatifs. Mais si vous avez 40 ans cette année et que vous êtes Président d’une République, ça risque d’être chaud patate ! Travail : emmenthal d’acier.

L’été, c’est le moment d’entretenir vos petits mélanomes ridicules, pour en faire de grands et beaux projets pérennes. Visez juste ! Si vous tenez à garder une vie sociale décente, évitez de pleurnicher vos souffrances, ça refoule un peu du goulot. Santé : bof.

Soit disant doté(e) d’un esprit critique, vous n’êtes en fait que des insatisfait(e)s, pourri(e)s et gâté(e)s qui méritent des coups de pied au cul. Dans toute l’histoire de l’humanité, il n’est jamais rien sorti de valable d’un Capricorne. N’oubliez pas que vous êtes une chèvre. Chance : possible que votre signe soit supprimé du zodiaque.

L’amour est aveugle mais vous dépassez les borgnes. Votre troisième oeil n’est dû qu’à l’état de grâce de votre taux de sébum. Premier décan : si on vous propose un emploi payé au SMIC, méfiez-vous, c’est probablement une arnaque. Amour : pratiquez plus car vous êtes en train de perdre la main.

Vous avez besoin d’être rassuré(e) sur les sentiments de votre partenaire et vous avez raison ! Il/elle développe des mœurs inavouables, surtout si il/ elle est du signe du Scorpion. La séquestration n’arrangera rien, préférez un trou et une pelletée de chaux. Santé : faites du sport en lisant le journal, utilisez des chiottes turques. D’après la NASA, si vous vous appelez Guy Georges, Emile Louis, Christian Jeanpierre ou Edouard Philippe, vous souffrez probablement d’une tendance boulimique au narcissisme morbide. Coïncidence ? Je ne crois pas. Si vous vous appelez Michel Michel ou Chantal Chantal, peut-être que vous êtes bègue. Chance : si vous êtes pané(e,) votre anniversaire est gratuit.

Le sérieux c’est l’adhésion au monde, le rire c’est l’inverse. En dilatant vos sphincters et en rééduquant votre périnée, vous trouverez la voie du salut. Soyez attentif(ve), la lumière divine se trouve certainement dans le panier de linge sale à gauche en sortant de l’ascenseur. Travail : la foi ne peut plus être une cirrhose mentale. 81


cartographie

À oualp’ En 2015, la France devenait la première destination mondiale des adeptes du naturisme. Véritable mode de vie, où le corps et l’environnement naturel ne font qu’un, le naturisme ne doit pas être confondu avec le nudisme, qui consiste à se désaper seulement de temps à autre. Une histoire de philosophie, en gros. Un peu comme si on comparait le Casanis avec le Ricard. État des lieux dans la grande région.

par pierre-olivier bobo

Banvillars Diénay

Club du soleil de Dijon Auxerre

L’Eau vive Club fondé en 1978. Séance naturiste au stade nautique d’Auxerre tous les samedis soirs. Randonues à la belle saison.

« Il y a une période d’essai, car ici, ce n’est pas le Cap d’Agde ! » clame Joël, président du club. 68 adhérents en 2016, pour une association née en 1953 ! Cessey-sur-Tille

Une légende du naturisme en Côte-d’Or, malheureusement de moins en moins fréquentée. Située à environ 200 mètres de la route, la « plage », c’est une végétation abondante et une eau à 18 degrés.

Club du soleil de Chalon-sur-Saône

Domaine de la Gagère Camping et centre de loisirs. Idéal pour profiter nue des activités naturistes pour enfants et adultes. Plusieurs terrains de golf aux alentours, mais pas naturistes, « il faudra donc s’habiller », précise le domaine.

« Nous recevons beaucoup de demandes d’adhésion d’hommes seuls, avec des motivations plus ou moins claires, alors nous filtrons », indiquent les membres. Dans les années 70, le club comptait 200 adhérents. Ils sont aujourd’hui une trentaine.

La « plage » de Cessey

Saint-Bérain-sur-Dheune

Luzy

Club du soleil de Belfort Montbéliard

« Pour être en contact avec la nature, au cœur de la Bourgogne sud, quoi de plus simple que le naturisme ? » prévient le gérant. En saison, un boulanger apporte le pain et les croissants chaque matin.

Osselle

Club naturiste de Besançon 20 emplacements adhérents et 3 emplacements pour le passage pouvant accueillir caravanes, camping-car ou tentes.

Fontenu (lac de Chalain)

Chalain Nature

Laizé

Club du soleil Mâcon Laizé Affilié à la Fédération française de naturisme, le camping propose des emplacements ombragés, tout près de la voie verte. Piscine, espace jeux enfants, baby-foot et terrain de boules sont à disposition.

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Les objectifs principaux de Chalain Nature sont la défense de l’environnement du lac de Chalain ainsi que la pratique du naturisme. Aucune activité ludique ou sportive particulière n’est proposée. Journée de nettoyage de la plage naturiste prévue le 18 juin 2017.


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Brunch concocté par le chef partenaire du jour, boissons à la carte à la Buvette et plein d’autres surprises savoureuses à glisser dans son panier. Fantaisies de rue, musique, rendez-vous ludiques pour les petits, un vrai clin d’œil à l’art de vivre du cœur de Dijon !

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