magazine mieux
sparse Viande de bœuf, taxidermie Rebsamen, Lee Fields... 84 pages en connexion avec le seigneur + Psycho test • horoscope • roman photo
sparse | numéro 22 | trimestriel
mar. avr. mai. 2018 • www.sparse.fr imprimé à 200 millions d’exemplaires à lire aux cabinets
GRATUIT • BOURGOGNE-FRANCHE-COMTÉ
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George is Best Sparse is mieux
sparse magazine
Devenir beau et fort.
édito.
Par Chablis Winston Photo : Édouard Roussel
Relançons le processus de paix, donnons de l’espoir aux générations futures. « Oui ! C’est la faute aux Dijonnais si notre tram il est tout petit ! », « Nordahl Lelandais est né à Besac’, y paraît ». Ça avoine sec des deux côtés… Et ça commence à durer. Franchement, c’est quand même pas IsraëlPalestine ! Pas de colonie dans le Doubs et pas de checkpoint sur l’A39 en vue. Mais le plus important, c’est que ça n’intéresse pas les autres. À Auxerre, Belfort ou Mâcon, et ailleurs, ils s’en tamponnent. Pas vrai les gars ? Sparse a déjà proposé, pour créer du lien, d’envahir la Suisse ensemble, mais certains Bisontins auraient de l’affection pour les Suisses, alors on a abandonné. Il faut donc régler ça à l’ancienne. Au choix : - Obliger les lycéens dijonnais à faire 6 mois de cursus à Besançon, et inversement. - Organiser un fight sur l’autoroute façon hooligans. Sur l’air de Dole-Choisey. Le gagnant prend possession de la ville de l’autre. - Monter un match de bras de fer entre Rebsamen et Fousseret. Avec ce que Rebsamen dit dans ce numéro, on ne va pas en être loin... En fait, le plus simple, ce serait un chifoumi, un bon vieux pierre-feuille-ciseaux. De l’égalité pure. Et que j’en prenne pas un à faire le puits. Le puits, ça déséquilibre tout ! Qui fait le puits ? Seuls les enfoirés font le puits ! Faut pas avoir de race pour faire le puits ! La raison pour laquelle le chifoumi a été inventé est à l’exact opposé de la présence du puits dans ce jeu. C’est bien simple, c’est comme si au moment de se demander qui de Dijon ou Besançon a la plus grosse, Paris débarquait et déballait son paquet sur la table en nous disant : « et autrement vous, ça va les gars ? » Le puits, c’est pas du jeu.
sommaire ÉDITO CONTRIBUTEURS 8. GUESTLIST 12. LOSER/WINNER 13. GAUTEL & RATIER 14. MUSIQUE 3. 6.
ours Ce magazine est édité par Sparse Média. Siret : 750 725 806 00020 - APE : 9499Z www.sparse.fr - contact@sparse.fr
RENCONTRE FIELDS EN COULISSES
DIRECTEUR DE PUBLICATION Pierre-Olivier Bobo
16. LEE
RÉDACTEUR EN CHEF Antoine Gauthier
24. JOE
CONTRIBUTEURS Badneighbour, Pierre-Olivier Bobo, Sophie Brignoli, Nicdasse Croasky, Lilian Elbé, Nathalie Eyraud, Maître Fougnard, Axelle Gavier, Franck Le Tank, Mhedi Merini, Cédric de Montceau, Benjamin Moreux, Marion Payrard, Martial Ratel, Doug Ritter, Augustin Traquenard, Chablis Winston, James Granville forever DIRECTION ARTISTIQUE INTERNETINTERNET
PHOTOGRAPHIES Alexandre Claass, Raphaël Helle, JC Polien, Édouard Roussel, Louise Vayssié ILLUSTRATIONS Mr. Choubi, Yannick Grossetête, Juliette Payrard, Michael Sallit, Hélène Virey COMITÉ DE RELECTURE Alix Blk, Martin Caye, Marion Godey, Mhedi Merini, Aurore Schaferlee COUVERTURE Lee Fields, à La Rodia (Besançon) Photo : JC Polien IMPRIMEUR Est Imprim (25) Dépôt légal : à la sortie du magazine ISSN : 2260-7617 La rédaction décline toute responsabilité quant aux opinions formulées dans les articles, cellesci n’engagent que leurs auteurs. Tous droits réservés © 2018 Merci à nos partenaires ainsi qu’à celles et ceux qui ont permis la réalisation de ce numéro. Prochain numéro : juin 2018 Sparse bénéficie du soutien du Ministère de la culture et de la communication, fonds de soutien aux médias d’information sociale de proximité
DÉCOUVERTE LE TAXIDERMISTE INTERVIEW
30. REBSAMEN
DÉZINGUE
REPORTAGE COEUR DU CHAROLAIS
40. AU
RENCONTRE 48. GROSSETÊTE,
GROSSES COUILLES
ANNIVERSAIRE 54. FRANCE-ALLEMAGNE,
BIG LOVE
HISTOIRE 62. NAISSANCE
68. PSYCHO
D'UNE VILLE
TEST DE COEUR PARTENAIRE 72. AVOCATS ET ASSOCIÉS 74. ROMAN PHOTO 78. HOROSCOPITONE 80. COURRIER DES LECTEURS 82. FROM HELLE 70. COUP
Scène de musiques actuelles
Dijon
Ibeyi Camille Lomepal Girls In Hawaii General Elektriks Feu! Chatterton Hollysiz Omar Souleyman John Maus Bagarre Protomartyr Sonja Moonear Sweely Nimä Skill Fixpen Sill Dani Terreur Mortalcombat
VOTRE NOUVEAU POINT HDECONCERTS VENTE DE BILLETTERIE SPECTACLES H THEATRE À DIJON ! 17 RUE AMIRAL ROUSSIN - 21 000 DIJON 03 80 30 61 00 EVENEMENTS SPORTIFS H LOISIRS...
VENEZ NOUS RENCONTRER ! 17 rue Amiral Roussin, 21000 DIJON / 03.80.30.61.00 Lundi au Vendredi : 9h30 à 12h30 & 14h à 18h
lavapeur .com
contributeurs
Par Chablis Winston Photos : DR
Nom : Helle Prénom : Raphaël Âge : Hors d'. Fonction : carteblancheur. Signe particulier : une shootade chronique. Une espèce très rare de maladie. Dès qu'il prend son appareil photo, il shoote tout. Tout. Pendant des heures. Spécialité : le taxage de clopes. Fait de gloire : Le Monde, Libé, Society, Pélerin mag’, Bilto, Hot Vidéo...
Nom : Croasky Prénom : Nicdasse Âge : 三十九. Fonction : scénariste/producteur. Signe particulier : fait les choses et analyse ensuite à quoi ça peut bien servir. Spécialité : foutre des nains partout, dans toutes les scènes. C'est vrai que c'est drôle, un nain... C'est pas bien de se moquer, mais c'est rigolo quand même. Fait de gloire : le scénar' de Mookie, avec Cantona, et celui de Alibi.com.
Nom : Eyraud Prénom : Nathalie Âge : si tu te fies à son prénom, 41. Fonction : urgentiste de l'info. Signe particulier : ordi portable dans la poche intérieure. Spécialité : filer sur un scooter au moindre signal d'actu chaude. Fait de gloire : une enquête de 5 mois sur les secrets de fabrication du kebab à Istanbul. En scoot', ça fait une trotte.
Nom : Roussel Prénom : Eddy Âge : le même que sa bagnole. Fonction : photographe de guère. Signe particulier : se trimballe en Fiat Panda Fun 1988. Spécialité : la photo de guère. Il photographie presque rien. Des petits trucs quoi. Fait de gloire : le portrait d'un bol de Miel Pops, avec une cuillère et un peu de lait demi-écrémé, comme ça, sans chichi, à la fraîche, un matin d’août 2004. Nom : Barthès Prénom : Yann Âge : 1m45. Fonction : star de l'infotainement de petite taille. Signe particulier : seul Yann de France à ne pas être breton. Spécialité : la mauvaise interview. Comme il présente une émission quotidienne, il n'a pas le temps de la préparer, donc il fait de la merde, et pose des questions sans intérêt alors qu'il a des putain de stars à sa table. Fait de gloire : une formation à l'interview chez Sparse en mai 2018 : « Non Yann, on ne demande pas à l'invité de se présenter. On le connaît, c'est nous qui le présentons ».
Nom : Bobo Prénom : Pierre-Olivier Âge : 7. Fonction : supervision de camp de travail. Signe particulier : costume Hugo Boss cintré vert-de-gris. Spécialité : pardi, la mèche mon pote ! Ça fait 5 ans qu'on te le dit. Fait de gloire : s'est lavé les cheveux tous les jours pendant 2 mois en 2006.
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DIJON - LONGVIC
FESTIVAL BFC DES MUSIQUES ÉLECTRONIQUES
DU 3 AU 30 AVRIL 2018 CELLIER DE CLAIRVAUX / PÉNICHE CANCALE AÉROPORT DIJON BOURGOGNE LA VAPEUR / BOULODROME COUVERT
SONJA MOONEAR THE DRIVER MANU LE MALIN PHIL WEEKS - FEADZ VOISKI LIVE JAMES DEAN BROWN MARQUIS HAWKES SWEELY LIVE - PAUL CUT BRAQUE LIVE ALEX ET LAETITIA KATAPULT NIMÄ SKILL LOOP EXPOSURE LIVE SHEITAN BROTHERS PHIL RADIO MEUH AKA
BOYD GOOSMAN - BRAW SHELTER POPCORN PARTY - OSD OLIVIER GOMEZ - AYMAN LOST IN B. - DOCTEUR J - LUCIANO FABZEU - ANDREAS P’TIT LUC - KONIK PLUS D’INFOS : FACEBOOK.COM/LESIRKFESTIVAL RISKPARTY.COM
Mar. > JuiN. 2018
SALLE dE MUSIQUES ACTUELLES & dE dIVERTISSEMENTS
SAM. 10 MAR. SUR LA VAGUE : LES VENTURAS + CANNIBAL MOSQUITOS + SLOBOdAN ExpERIMENT MER. 14 MAR. ATELIER ÉCOLOGIE #5 JEUNE pUBLIC SAM. 7 AVR. ZONE’ZINE SALON dE LA MICRO ÉdITION #1 MER. 11 AVR. ATELIER ÉCOLOGIE #6 JEUNE pUBLIC SAM. 14 AVR. TREMpLIN EUROpOpCORN
27 > 28 AVR. LA CHApKA dU dAHUT
pRÉSENTE : FESTIVAL SUBMERSIF CONCERTS, ExpOS, THÉâTRE…
LE VEN. 27 SCRATCHOpHONE ORCHESTRA + NOON + UO LE SAM. 28 KAVIAR SpÉCIAL + LES FEMMES AUx FOURNEAUx VEN. 11 MAI LES FILLES dE ILLIGHAdAd AFTERwORK & BBQ’
VEN. 18 MAI SCRATCH BANdITS CREw
SAM. 02 JUIN dUB MEETING SOUNd SYSTEM #2 : KIRAdEN SS VS NATURAL HIFI
SAM. 09 JUIN BORN BAd RECORdS : USÉ + CANNIBALE ExpOS : ELZO dURT + BALdO
52 quai St CoSme 71100 Chalon-S/-Saône www.lapeniche.org | 03 85 94 05 78 | infos@lapeniche.org
guestlist
Par Pierre-Olivier Bobo et Chablis Winston Photos : DR
Hélène Fohr
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Co-fondatrice des Créatures, Belfort
L'asso Les Créatures a monté le Bar Atteint, à Belfort. Resto éco-responsable, bistrot alternatif. C'est bon et c'est cool. Des ateliers, des débats, des conférences, des concerts... Un vrai lieu de vie culturelle. En plus, ils tiennent la Char à Bia, une buvette/mangette itinérante, et organisent le Récitroc... Plus Belfort la vie.
Des collégiens qui font des guirlandes de slips à Poligny. C’est quoi la plus grosse blague que tu aies faite toi ? Faire croire que j’étais une voyante, dans la rue, avec un aquarium renversé en guise de boule de cristal. J’ai fait 5 consultations en une demi-journée.
Ton dernier coup de coeur musical ? Laura Cahen. La série télé la plus cool du moment ? Black Mirror. Une idée pour fermer la bouche de Christine Angot ? Éteindre la télé.
Ton festival coup de coeur dans la région ? Le FIMU, à Belfort, pour la gratuité et la diversité.
Quand la fessée sera interdite, comment on fera pour calmer les gamins ? On fera du yoga.
Quel conseil donnerais-tu à Marie-Guite Dufay pour la rendre cool ? Mettre des sandales en plastique avec des chaussettes.
Saucisse de Morteau ou jambon persillé ? Jésus de Morteau.
La prochaine mode capillaire, selon toi ? Des cheveux comme t’as envie grâce à une application sur ton téléphone.
Elen Bernard
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En dehors du Bar Atteint bien sûr, le spot le plus cool de Belfort ? J’adore l’apéro à l’Oasis.
Directrice de Plan 9, Dijon
Le festival Fenêtres sur Courts ? C'est elle et son équipe. Quand elle ne joue pas de basse, elle drive l’asso Plan 9 qui distille savamment du court-métrage et aussi du ciné-concert, à Dijon et ailleurs.
Tu aimerais être dans le corps de Laurent Wauquiez, juste comme ça, pour une journée ? Dans le corps d’un homme une fois, oui, mais alors sûrement pas celui-là… Tu as suivi les JO, sérieux ? Non mais j’ai regardé le documentaire Plus vite, plus haut, plus dopés. La future hype capillaire, selon toi ? Celle d’Eddy de Pretto, voyons.
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Un peu comme Les ch’tits à Ibiza, que penses-tu d’une télé-réalité Les Dijonnais à Besançon ? J’aime beaucoup Besançon. Eux, ils ont des berges, le Doubs qui passe… Ça, c’est la classe. C’est quoi ton filtre préféré sur Snapchat ? Je ne suis pas du genre filtré comme nana. Ton alcool préféré ? Le Martini.
Pourquoi les jeunes mettent-ils des pantalons qui laissent apparaître les chevilles, même en hiver ? Parce que les petits Pakistanais ont eu de mauvaises consignes de découpe de la part de Primark. Qui a demandé à Manuel Valls de rester en politique plutôt que de partir dignement ? Son égo, sûrement. Saucisse de Morteau ou jambon persillé ? Saucisse de Morteau. C’est pas un peu la honte, la vapoteuse ? C’est carrément la lose même.
Pourquoi tout le monde déteste les Suisses ? Parce qu'ils ne roulent pas en Twingo, mais ils ont Godard. Qui sera le prochain maire de Dijon ? Une femme, j’espère. Qui est Emmanuel Bichot ? Un être humain de sexe masculin. À partir de quelle heure a-t-on le droit de dire « bonsoir » à quelqu’un ? On peut dire « bonsoir » si on a la voix de Jean Rochefort, sinon on dit « salut ».
Antonin Borrie |
Patron de L'Antonnoir, Besançon
Après un exil en Suisse, cette figure emblématique de la culture bisontine est revenue dans le coin pour ouvrir L'Antonnoir (Antonin, Antonnoir, vous l'avez ?). Café-concert et bar de nuit à programmation léchée, la place est devenue incontournable à Besac’ en quelques mois. Accessoirement, le taulier est le plus bel adepte du Dijon bashing de tout le 25.
Conseille-nous un compte Instagram trop cool à suivre. Le nôtre, parce qu’il n’est pas encore bien géré… Mais ça va venir. Ton dernier coup de coeur musical ? Knives, découvert chez nous grâce au Festival GéNéRiQ (merci Kem et Tico) et Viagra Boys, découvert aux dernières Transmusicales de Rennes (Merci Jean-Louis). Comment tu fais pour ne pas puer de la gueule le matin ? Simple, je ne me couche pas… À Dijon, il existe une marque qui s’appelle Just Dijon, pour faire rayonner la ville. Ça devrait être quoi pour ta ville ? C’est là qu’on voit la différence de budget entre nos deux villes… Je crois qu’ils ont sorti des briquets ici. Mais une marque Ici mieux qu’à Dijon pourrait cartonner en ce moment.
L’affaire des slips à Poligny, c’est un coup de la CIA ? Il est clair que c’est en lien avec les Twin Towers, l’assassinat de Kennedy et probablement aussi le Watergate. Mais je soupçonne aussi la franc-maçonnerie. Elvis ou Roméo Elvis ? Je dirais bien Roméo Elvis pour faire plaisir à leur manageuse (de Besac à l’origine… bisous Toupette) mais quand même : le King restera toujours le King, merde. C’est pas Johnny (oups, je vais me fâcher aussi avec des Bisontins et le reste du pays). Que deviennent les vieilles cabines téléphoniques ? Dans mon bled (de 200 âmes) il en reste une (à pièce), elle me sert à indiquer ma maison à mes visiteurs. J’habite donc à 50 m de la cabine pour celles et ceux que ça intéresse.
Pourquoi les Dijonnais sont si condescendants ? Aaah... c’est ça le mot ?! Ici on l’abrège un peu je crois.
Le Chinois qui a repris le FC Sochaux, il se casse quand? Encore une bonne question. Mais la vraie question, c’est « Quand est-ce que Peugeot reprend ses parts ?! » et « Allez SO-Chaud » bien-sûr.
Pourquoi les Bisontins ont-ils l’impression d’être assiégés par la Bourgogne ? Pas assiégés, mais pillés plutôt. Enfin il est clair que le rapprochement des régions n’est pas bénéfique aux deux parties.
À part L’Antonnoir, tu nous conseilles quel rade à Besançon ? Aïe, la question qui risque de me fâcher avec pas mal de potes qui tiennent des lieux bien cools. Mais si je ne dois en citer qu’un seul, ce sera les Passagers du Zinc.
File-nous un bon plan pour une balade printanière dans le coin ? Vallée de la Loue et/ou Lison, quelle que soit la saison d’ailleurs !
Une idée d’animal totem pour la grande région BFC ? Oui, mon chien. « Petit Gros » a plus d’amis sur Facebook que la plupart des gens de cette grande et belle région.
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la hype
Par Augustin Traquenard Photos : DR
LE LOSER DE L'HIVER Nicolas Hulot (ministre et businessman) Après avoir refusé le ministère de l’Écologie sous Chirac, Sarkozy puis Hollande, Nico Hulot s’est finalement lancé dans le grand bain. Quand Manu lui offre le ministère de la Transition écologique, il se dit que c’est une bonne occas' de chambrer Ségo, mise au placard aux négociations des pôles arctiques et antarctiques. Passé la rigolade, Nico se rend vite compte qu’il a été engagé pour faire avaler des couleuvres aux écolos : suppression des aides au maintien de l'agriculture biologique, fin de celles pour le vélo électrique, prolongation d'un permis d'exploration d'hydrocarbures au large de la Guyane. La louze. Chirac l’avait prévenu : « les emmerdes, ça vole toujours en escadrille ». En plus de ne pas avoir la main verte, on apprend qu’il aurait également la main baladeuse. Oui mais la présomption d’innocence ? Dominique Strauss-Kahn et Georges Tron lui auraient manifesté leur soutien. En Argentine, une dizaine de demandes de reconnaissance de paternité ont été déposées à la mairie de Ushuaïa.
R DE L'HIVER U E LE N IN W
Thibaut Fauconnet (champion de short-track et d'interview)
Le short-track consiste à tourner comme une hélice sur un petit anneau glacé pendant plusieurs tours dans une combi moulante. Le but est de franchir la ligne d’arrivée avant les autres concurrents sans se gaufrer dans les virages serrés. Multiple champion d’Europe, le Dijonnais Thibaut Fauconnet était remonté comme un coucou pour sa troisième participation aux J.O. À Pyeongchang, Thibaut s’est battu comme un beau diable dans la finale du 1.500 m. À quelques tours de l’arrivée, la médaille lui tend les bras. Le problème, c’est que les Coréens maîtrisent à la fois le short-track et le taekwondo. Victime d’un high-kick au visage, Thibaut est éjecté de la course, le visage tailladé par le patin de son adversaire. « Je l’ai dans le cul », a-t-il déclaré aux journalistes après sa chute, car Thibaut est le plus cool de tous les athlètes français, le plus "vérité" en interview, dans son style. C'est pourquoi, dans nos cœurs, Fauconnet est un winner. Nul doute qu’il sera en décembre prochain sur la patinoire de Noël, place de la République à Dijon, pour nous donner des cours de self-défense sur glace.
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&
n o i t i 8 éd e
E L O D 0 mai
19 & 2
2 018 F
www.cirqueetfanfaresadole.com Festival cirque et fanfares
TU L GRA A V I T S E
IT
DISKO CORINE
EN CONCERT
BOXE ANGLAISE 3 COMBATS
Direction Communication, Ville de Besançon – Visuel d’après une photographie de Laurent Thessier
Mohammed BAHRI • Féhiçal RADOUANE • Tommy SILVA
VENDREDI 16 MARS 2018 LA RODIA BESANÇON 4 AV. DE CHARDONNET OUVERTURE DES PORTES À 20 H 30
musique
Par Doug Ritter Photos : DR
les plus belles pochettes de l’histoire R-GO - AMULETT (1984)
On connaît tous quelqu’un ayant un tatouage moche, et même si on n’ose pas se le dire, je le répète : on connait TOUS quelqu’un ayant un tatouage moche. En Hongrie, le groupe R-GO en a mis un directement sur la pochette de son deuxième album, sorti en 1984 et dévoilant aux auditeurs une sorte de synth-pop tout en variété. Comme celle que l’on a eue en France au même moment, oui. En plus d’être un enchevêtrement de dessins rappelant les pires tatouages de tes meilleurs copains, la pochette d’Amulett - c’est le nom de l’album - offre aux yeux du monde (ou de la Hongrie) quatre gueules collector et une composition digne de la couverture VHS d'un nanar oriental. De la panthère lépreuse qui semble avoir perdu ses deux oreilles après une soirée très sale, au (z)héro constipé au regard de vache morte, en faisant un crochet par la femme à demi-nue sans nez ni traits mais au sourire éclatant, pour finir par ce qui ressemble très visiblement à un méchant dans James Bond de contrefaçon turque (ou dans Mad Max ou dans un mix des deux) nous délivrant la recette sans sel ni poivre de sa technique secrète de manchette shintoïste. Sympa. Pour faire passer le tout, le gars derrière la pochette nous a mis un beau coucher de soleil sur le palmier le plus seul au monde, paumé entre mille dunes et une ville fantôme. Oh, et l’intérieur de l’album nous montre une photo du groupe à mi-chemin entre Predator, Jurassic Park et les Flintstones.
chacun son métier ! JEANNE CALMENT - 121 (MAÎTRESSE DU TEMPS) (1996)
1996, c’est l’année des 121 ans de la Française Jeanne Calment, alors déjà doyenne de l’humanité depuis plus de 8 ans. C’est aussi l’année choisie par un producteur malhonnête, aux choix douteux et au mauvais goût certain pour proposer à cette dernière de sortir un album de musique eurodance sous son propre nom. Elle qui avait déjà prêté sa voix sur le titre d'un obscur album de musique électronique expérimentale dans les années 80 (en 1988, soit l’année de sa nomination comme « Doyenne de l’humanité ») a réitéré donc l’expérience, mais cette fois avec un quatre titres en son honneur. Nommé 121, comme son âge, et sous-titré Maîtresse du Temps, comme dans Fort Boyard, le CD (technologie ultra-moderne pour quelqu’un étant né avant l’invention du gramophone) offre trois titres techno-cheapos forcément très bas de gamme sur lesquels Madame Jeanne pose simplement sa voix frêle et âgée - car soyons clair, elle n’a bidouillé ni les prods ni la boîte à rythmes. Trois titres aux noms délicieux, proches de l’expérience « bides et jeux de mots » offerte par nos coiffeurs français avec, dans l’ordre Historycalment, La Farandole De Jeanne, dont certains éclats de voix sont source de cauchemar même chez les adultes les plus avertis, et Transcalment. En cadeau, un quatrième titre qui est en fait une version club (oui) de La Farandole De Jeanne pour faire durer le plaisir d’au moins une minute de plus, soit jusqu’au bout de la nuit… ou de l’après-midi. Au moins, à la sortie de l’album, une partie des fonds récoltés a servi à payer un bus pour les camarades de pension de Jeanne Calment, probablement en vue d’un road trip des enfers en Ardèche.
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Par Sophie Brignoli et Chablis Winston, à Besançon Photos : Raphaël Helle / JC Polien pour Riches et Célèbres
LEE FIELDS SOUL SURVIVOR
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Jacques Martin, en direct du thÊâtre de l'Empire.
Elmer “Lee” Fields a quitté sa ville natale de Caroline du Nord à l'âge de 17 ans pour faire carrière dans la musique à New York. Longtemps surnommé “Little JB” à cause de sa tessiture et de sa ressemblance physique troublante qu'il entretenait avec James Brown, il aura passé près de 50 ans sur scène. Pourtant, ce n'est qu'au tournant des années 2000, et grâce à sa rencontre avec les fondateurs des labels Desco et Daptone, qu'il va connaître un véritable succès international. Depuis le départ de ses amis et alter ego Sharon Jones et Charles Bradley l'année dernière, Lee Fields peut être considéré comme le dernier survivant de la soul music originelle. Invité par la Rodia de Besançon en février dernier, le vieux crooner, accompagné de The Expressions, nous a offert, à 67 ans, une heure de show époustouflant et terriblement émouvant. Rencontre avec une âme soul aussi talentueuse... que pieuse. Mais alors très pieuse...
Vous avez débuté à la fin des années 60 et n'avez jamais cessé de produire depuis, à part dans les années 80... Que s'est-il passé ? Dans les années 80, les choses ont beaucoup changé par rapport à la décennie précédente. La musique s'est tournée vers des esthétiques plus dansantes donc j'ai eu le besoin de me réinventer. Et comme j'ai toujours été un lecteur avide, j'ai passé beaucoup de temps à lire la Bible. J'avais perdu confiance en moi à l'époque et je ressentais le besoin d'étudier ce livre qui avait bercé mon enfance. Mais j'ai aussi eu envie de lire une version ancienne, histoire d'en approcher le sens véritable plutôt que de prendre une traduction récente. Donc il a fallu que je fasse des recherches sur le sens de ces vieux mots d'anglais que je ne connaissais pas. Cette expérience a été très enrichissante et m'a permis de retrouver la confiance et de croire en l'existence de Dieu et en l'Esprit. Pour moi Dieu est un esprit qui parle à travers son fils, le Christ. Mais j'ai aussi réalisé en lisant la Bible qu'aucun homme n'a jamais vu Dieu. Car si on le voyait ça nous serait probablement fatal, il projette tant d'énergie...
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«
Il n'y a pas de musique noire et de musique blanche, c'est juste de la musique. Soit c'est un bon morceau, soit c'est un mauvais morceau mais il n'y a pas de notion de couleur. »
La sublime veste-tapisserie de l'empereur.
Est-ce la raison pour laquelle vous êtes si optimiste dans vos chansons ? Oui. Quand je doute, la lecture de la Bible me rassure et je suis persuadé que tout ce que tu demandes dans tes prières, tu peux le recevoir. Les quatre années que j'ai passées à lire m'ont permis de réaliser que l'Amour et la considération pour autrui sont les seules réponses possibles à notre survie sur cette planète. Quand on a commencé à découvrir et coloniser le monde, on a fait énormément de choses au nom de la technologie. Aujourd'hui, avec tout ce qui est désormais disponible et accessible, je pense qu'une révélation divine est possible. De temps en temps, on peut voir quelqu'un à la télévision nous parler de l'Apocalypse et c'est un concept bien réel. On n'en est plus très loin. C'est la raison pour laquelle je veux répandre l'Amour autant que je peux, c'est la seule façon de repousser cette échéance. Plus qu'un message, c'est un état d'esprit... Tout à fait. Si les gens pouvaient faire attention les uns aux autres et essayer de résoudre les problèmes plutôt que de ne percevoir que l'aspect financier des choses... Je pense sérieusement que le monde comme on le connaît pourrait alors continuer éternellement. Hélas, nous sommes bien conscients que tout s'arrêtera un jour. Mais en attendant, comme un jour passé avec Dieu équivaut à 1.000 ans, nous sommes probablement en train de vivre les derniers instants. Difficile de dire si la fin surviendra dans 10 jours ou dans 1.000 ans. Si l'on s'aime et que l'on réalise qu'il faut prendre soin de la Terre, dont nous sommes les gardiens, de terribles gardiens... Les gens pourraient alors se réunir et faire passer ce message à tellement de monde. C'est le devoir de chacun de faire de cet endroit un monde meilleur ! Il y a eu une renaissance dans votre carrière au début des années 2000. Est-ce la conséquence de votre rencontre avec Leon Michels, le label Desco et tous ces jeunes gens qui voulaient travailler avec vous ? Oui sans doute. C'est en partie à cause du morceau Meet Me Tonight. C'est une chanson bluesy qui marchait bien auprès du public et que j'ai fini par enregistrer en studio avec du matériel spécialement acheté pour l'occasion. Je me rappelle avoir acheté un Yamaha et un ordinateur dont je ne maîtrisais pas du tout l'utilisation à l'époque. Et puis un soir où je jouais à Newark, je me produisais avec ce DJ qui a joué Meet Me Tonight et les gens sont devenus fous. Tout le monde voulait l'acheter, alors j'ai recommencé à en vendre, sur mon propre label BDA. Et puis un exemplaire est allé jusqu'à Jackson, Mississippi, où Johnny Vincent l'a entendu. Il m'a proposé de signer sur ACE Records et j'ai travaillé pendant 5 ans avec eux. C'est à cette époque que j'ai rencontré Gabriel Roth et Philippe Lehman (qui ont monté le label Daptone, ndlr). En 1996, mon contrat avec ACE était sur le point de se terminer et ils m'ont proposé de faire
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Olé !
« Tu sais ce que ça veut dire ça en Angleterre ? »
Ça le fait pas pareil, sans la veste bleue...
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«
On a commencé à tourner en Angleterre avec Sharon Jones en choriste, tout est parti de là. » un morceau avec eux. C'est marrant parce qu'on avait juste discuté au téléphone, on ne s'était même jamais rencontrés... Et comme ils étaient très calés en soul, en blues et en funk, je m'étais imaginé qu'ils avaient au moins la quarantaine. Un jour je vais les voir à Long Island et à la porte, ce sont deux gamins qui m'ouvrent. Je leur demande de m'emmener auprès de Gabriel Roth et le gamin me répond que c'est lui. J'étais sidéré. On a commencé par enregistrer Steam Train et à tourner en Angleterre avec Sharon Jones en choriste. Tout est parti de là. On avait monté un super groupe, on commençait à faire de l'argent mais ça n'a pas duré, on était nombreux et ça coûtait cher à faire tourner. Quand je tournais avec les Soul Providers qui sont devenus ensuite les Dap-Kings, on était souvent accompagnés par The Sugarman 3, un autre groupe du label dans lequel Leon Michels jouait. Jusqu'à ce qu'il quitte la formation et monte son propre label au début des années 2000. Leon m'avait proposé de prendre quelques-uns de mes morceaux pour les présenter à des gens, je pensais qu'il voulait essayer de les vendre mais il avait en fait autre chose en tête. Je me suis retrouvé à de nombreuses reprises en studio avec lui et en 2006, il a fini par m'annoncer que l'album était prêt. C'est ainsi qu'on a sorti My World en 2009. Vous avez collaboré avec de nombreux artistes, entre autres Martin Solveig et Dan Auerbach des Black Keys. Ils sont tous deux très différents musicalement, qu'est-ce qui vous a plu chez eux ? Je reçois beaucoup de coups de téléphone pour faire des collaborations et encore maintenant. À l'époque, mon contrat avec Leon Michels n'était pas exclusif, raison pour laquelle j'ai pu travailler avec ces gens. J'aime écouter le travail des autres, avec cette idée qu'on peut toujours prendre une nouvelle direction. C'est un vrai défi dont le résultat est incertain. Martin par exemple, il a un projet de dance et d'électro assez inspiré par le disco. Et comme j'avais passé pas mal de temps à observer ce qui se tramait dans les années 80, quand il est venu me chercher j'étais prêt. Je savais exactement quoi faire pour qu'il soit content du résultat. On a enregistré Everybody, Jealousy et I Want You ensemble entre 2000 et 2008 ; ça fait un p'tit paquet d'années tout de même. On tournait pas mal en festival et je m'amusais beaucoup : je continuais à chanter de la soul sur un style de musique différent, plus rythmé. Dan Auerbach est aussi un chouette type. J'ai beaucoup aimé collaborer avec lui aussi, car il a une approche et un style très différents du mien.
Vous parlez surtout d'amour et des relations dans vos chansons, jamais de politique. Pourtant quand vous avez débuté c'était en pleine période de revendications sociales, notamment avec James Brown et son I'm Black And I'm Proud ou le Stand de Sly Stone. Que pensez-vous de l'évolution de la musique noire ? Je ne regarde pas la musique à travers ce prisme, pour moi il n'y a pas de musique noire et de musique blanche, c'est juste de la musique. Soit c'est un bon morceau, soit c'est un mauvais morceau mais il n'y a pas de notion de couleur. La concevoir ainsi, c'est déjà prendre partie, ne pas être partial. Soit c'est bien et je vais creuser un peu pour en savoir plus, soit ça ne me plaît pas et ce n'est pas si grave. Il y a un seul monde, une seule musique, bien qu'il existe de nombreux styles. Avez-vous déjà pensé à arrêter la scène ? Non. Pour moi la vie c'est prendre du plaisir, s'amuser et je le fais grâce à la musique. Alors si un jour je n'ai plus l'énergie pour faire ça, je tenterai autre chose. J'aime voyager, rencontrer des gens alors pour l'instant prendre ma retraite c'est hors de question. Rester à la maison... très peu pour moi ! Je veux apporter ma pierre à l'édifice et si un jour je dois arrêter les tournées, j'espère pouvoir continuer de produire et d’enregistrer des choses, de rester productif ! Le temps est une des choses les plus précieuses pour l'Homme, il faut en faire bon usage et l'utiliser pour redonner au monde. // S.B. & C.W.
«
L'Apocalypse c'est un concept bien réel. On n'en est plus très loin. C'est la raison pour laquelle je veux répandre l'amour autant que je peux. » 23
« On est lié à la mort. Mais c’est tabou. » Cyril Guillin, taxidermiste
Un taxi pour Mabrouk.
Par Nathalie Eyraud, à La Loye (Jura) Photos : Alexandre Claass
De Psychose d’Alfred Hitchcock aux séries US type Les Experts, le taxidermiste, c’est toujours le psychopathe prêt à empailler tout ce qui bouge. Cet art, qui consiste à donner l’apparence du vivant à des cadavres d’animaux, fascine, intrigue et révulse en même temps, en raison de son lien avec la mort et de la relative méconnaissance qui entoure la profession. Alors, les taxidermistes, tous des serial killers en puissance ? Pour faire la peau aux clichés, on s’est rendus dans le Jura, rencontrer Cyril Guillin, maître-artisan taxidermiste depuis vingt ans. Des techniques de fabrication aux préjugés, portrait à cœur ouvert d’un empailleur blagueur.
« Si les enfants le veulent, on empaillera le chat », lance Cyril Guillin lorsque la chatte de compagnie de la maison fait son entrée dans le pièce. Rieur, il ajoute : « d’ailleurs, les enfants aussi vont y passer ». Le ton est donné. Le gars a de l’humour, et c’est peutêtre donc pas aujourd’hui qu’on va finir scalpés la langue pendante accrochés au-dessus de la cheminée du salon. Cyril Guillin est taxidermiste. Plus surprenant comme job, tu meurs. Quand il l’annonce, les gens lui demandent souvent quelle voiture il conduit : « taxi quoi ? ». Les mecs ne comprennent pas. En même temps, quand on voit ce grand gaillard jovial d’un bon mètre quatre-vingt, on ne s’imagine pas trop que son truc à lui, c’est peler des animaux et foutre ses mains dans des entrailles fumantes. « À chaque fois que les gens font une sale tête quand je leur raconte que je naturalise des animaux, je leur dis de passer dans mon atelier, qu’ils viennent constater par eux-mêmes ! Si les gens prennent leur courage à
deux mains et passent chez moi, quand ils sortent, eh ben ils sont contents. » Et en effet, son atelier, collé à sa maison à La Loye, commune paumée au milieu de la forêt à une quinzaine de minutes de Dole, est étonnement clean : pas de boyaux éclatés sur la table, pas de sang sur les murs, pas d’odeur de cadavre en décomposition. « Tout est nettoyé, désinfecté, c’est moins sale que chez le boucher où il y a toutes les carcasses », admet sa femme Ophélie qui gère toute la partie administrative du boulot de son mari et sert aussi de petites mains sur certaines naturalisations. « Nous, dès l’instant où la peau est enlevée de la bête, elle part directement au congel’. Après, tous les taxidermistes sont pas forcément à cheval là-dessus.» Aux murs, il y a tout un tas de trucs accrochés partout : des bois de cerfs, des « massacres » comme on appelle ces demi-crânes de cerfs ou de daims blanchis montés sur des socles, une scie pendue au plafond, des perceuses posées çà et là. La passion, elle lui est venue depuis tout petit. Ambiance : « À 6 ans,
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« Les clients ? Ça peut aller du petit chasseur local qui n’a pas un rond mais qui va se saigner pour avoir sa tête de cerf dans la cuisine, au milliardaire français, suisse ou belge qui veut se faire une belle collection. » Cyril Guillin
je commençais à faire sécher des insectes sous mon lit, puis des petits animaux. Mes parents n’étaient pas du tout d’accord, ils m’engueulaient parce que ça commençait à puer dans ma chambre. Ils me disaient : « pas d’animaux ! Pas d’animaux !» Mais moi les animaux, c’était ma passion. » Bordel. Jeffrey Dahmer a commencé comme ça. Ed Kemper a commencé comme ça. Même Ted Bundy a commencé comme ça avant de devenir un serial killer psychopathe nécrophile. On peut comprendre les réticences des parents face aux lubies de leurs rejetons. Mais Cyril Guillin ne lâche pas l’affaire. Pourquoi choisit-on de devenir taxidermiste et pas plutôt véto si on aime les animaux ? Cyril y a bien pensé à un moment mais le nombre d’années d’études l’a vite refroidi et c’est vers les animaux morts qu’il se tourne. Un comble pour un gars qui voulait les soigner à la base. Il a appris le boulot sur le tas, avec des bouquins et des vidéos, et en se formant auprès d’autres taxidermistes du coin. Au début des années 1990, il apporte son portofolio à l’École de Meaux pour s’inscrire au CAP Taxidermie (fermé depuis). Son maître d’apprentissage est tellement impressionné par sa technique déjà bien rodée qu’il lui suggère de ne pas assister aux cours et de passer le diplôme en candidat libre. Ce qu’il fait. Il finit deuxième de promo. Le gars a le talent dans la peau. Vous l’avez ?
Chasse, pêche et traditions. Cyril Guillin vient d’un milieu rural porté sur la chasse, activité qui constitue à 95 % sa clientèle et est elle aussi bien mal vue. « Avant, la chasse, c’était seulement pour 26
le plaisir, on n’avait pas d’obligation de chasser, maintenant on est obligé par les préfectures, il y a des quotas : pour la sécurité de la route et pour la santé publique. Faut rappeler ça aux gens. […] Vis-à-vis du citadin, c’est mal vu, mais nous dans nos campagnes, la chasse, ça fait partie de nos habitudes. » Son job lui a déjà valu quelques mésaventures notamment à l’occasion de salons dans lequel il exposait ses créations : « je ne fais plus que des salons sur le thème de la chasse maintenant. Avant, je faisais des expos sur le thème de la nature, et puis là je me trouvais confronté à des écolos, et pour eux c’était moi qui tuais les bêtes. Moi je tue personne. » Pris à partie par des visiteurs, Cyril se défend : « La bête, elle est morte. Qu’elle soit tuée à la chasse ou tapée par une voiture, soit elle part à l’équarrisseur et elle est brûlée, soit elle passe dans mon atelier et vous la gardez. Un bon chasseur, il garde son trophée. Il a pas tué la bête pour rien. Pour moi, la taxidermie, c’est un hommage à l’animal.» Avec seulement 170 taxidermistes déclarés en France et 60 à peine capables de travailler avec des bêtes de safaris style lions, tigres, voire même éléphants, la taxidermie est un art prisé qui évolue en circuit clos. Le carnet d’adresses lui vient du bouche à oreille. Qui achète ça ? « Ça peut aller du petit chasseur local qui n’a pas un rond mais qui va se saigner pour avoir sa tête de cerf dans la cuisine, au milliardaire français, suisse ou belge qui veut se faire une belle collection. C’est marrant parce que je peux avoir en même temps dans mon atelier la commande d’un mec du village comme celle d’un autre qui arrive avec sa Porsche Cayenne. » Le reste de sa clientèle, c’est des particuliers qui viennent faire empailler leur animal de compagnie. Sympa le souvenir. Sauf que bien souvent, Cyril a eu des mésaventures avec cette clientèle. « Dans le feu de l’action, les gens veulent garder leur chien, après ils l’ont oublié. » Ils sont passés à autre chose, ont acheté un nouveau chien, tourné la page et ne viennent pas récupérer leur animal. Maintenant, Cyril ne s’emmerde plus : les animaux domestiques sont payés à l’acompte. Plus de risque de se retrouver avec Choupi le Yorkshire terrier sur les bras. Niveau tarif, comptez 60 euros pour un « massacre » (hmm), 200 pour juste la tête montée sur socle, 1.000 pour le bordel entier. Pour les lions ou les ours, ça peut taper dans les 5.000. Bling bling. Ça doit rouler niveau finances pour Cyril ? Eh bien pas tant que ça finalement. Le boulot est contraignant, monopolise quasi 100 % de son temps libre. « J’en vis, mais je fais 14 heures par jour », ce qui implique pas de week-end, peu de sorties, et pas de vacances pour la petite famille depuis presque 20 ans. Au final, en rapportant le prix au temps de travail consacré,
Pauvre Némo... :(
La cuisine de Dexter.
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jusqu’à 6 mois pour les plus grosses bêtes, Cyril Guillin ne tire pas plus de 14 euros de l’heure. On lui a bien proposé un jour un beau paquet d’argent pour devenir le taxidermiste à temps plein du museum de Genève, mais la vie suisse, très peu pour lui. Cyril est un homme de la terre. Et puis les museum d’histoire naturelle n’ont généralement besoin que de travaux de restauration sur les collections qu’ils ont déjà. Pas de nouvelles naturalisations. Et lui, c’est ce qui le botte. On vit de la taxidermie, mais pas moyen de se la jouer Duc de Boulogne avec ça.
Saga Africa. Dans un coin de l’atelier, il y a un
énorme lion du Burkina Faso dressé sur ses deux pattes arrières en attente de finitions. Mais où est-ce qu’il chope ces lions ? Ça court pas les rues dans le Jura. Et c’est pas censé être interdit de chasser des espèces protégées ? Apparemment non. En échange de 20.000 balles de taxe d’abatage, de riches français, belges ou suisses peuvent aller se faire un petit kiff safari en Afrique et buter un lion. Pour 5.000 balles de plus, la bête est dépecée sur place et la peau est envoyée chez Cyril. Ça fait un trophée sympa à foutre dans son salon en mode narcotraficant-style. Mais incisons dans le vif du sujet : comment on naturalise un animal ? Place au hardcore : après avoir été tuée, la bête doit être mise au frais le plus rapidement possible. Faut que ça « réssuie » comme on dit tendrement dans le jargon. Que ça refroidisse. Comme un bon pastis. Sinon ça fermente. Le mieux, c’est d’envoyer la bête à Cyril dans les trois jours après l’abattage. Là, il incise, il vide, enlève les yeux, prélève la peau et les bois si c’est une bête à corne, et envoie tout le reste chez l’équarrisseur. La peau, c’est le cœur du travail. Trois semaines dans des bains de tannages réguliers. Retournées deux fois par jour, puis séchées, l’une des étapes les plus cruciales du job puisqu’elle va déterminer la réussite de la naturalisation ou non. Cyril se sert de moules en plâtre pour donner sa forme future à l’animal.
American paille. Une fois la peau prête, il
faut désormais fourrer le bordel pour lui redonner l’apparence d’un animal vivant. Chose à savoir : la paille, c’est totalement has been. Ça se déformait avec le temps. La tête de sanglier finissait par ressembler à Lindsay Lohan un lendemain de cuite, ce qui n’est vraiment pas la déco idéale à foutre dans son salon. Maintenant, le petit chouchou des pros, c’est la mousse polyuréthane extensive, qui s’achète déjà moulée à la forme de l’animal. T’en trouves chez des fournisseurs du coin. Mais vu qu’il n’y a pas grand choix niveau position de l’animal, soit couché soit debout, Cyril se fournit aussi sur catalogue ricain style
« À 6 ans, je commençais à faire sécher des insectes sous mon lit, puis des petits animaux. Mes parent n’étaient pas du tout d’accord, ils m’engueulaient parce que ça commençait à puer dans ma chambre. » Cyril Guillin
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« Cyril et Simba, fourré à la mousse polyuréthane ».
La Redoute. On trouve des moules de tout, même de crocos ou de tatous, et dans toutes les positions. Le matériau a l’avantage de se sculpter, ce qui permet de l’adapter complètement au gabarit de l’animal. On enfile ensuite par-dessus la peau préalablement séchée et tannée de Médor. Aussi simple que mettre un slip. Les yeux sont remplacés par de faux yeux en verre que Cyril garde dans un petit tiroir. Il y en a de toutes formes : des yeux de chèvre, des yeux de chats, même des yeux de hiboux. Après le plus gros du travail, place aux finitions : couture des peaux, peinture pour les poissons, afin de reproduire la couleur de leurs écailles… Faut que l’animal ait l’air le plus naturel possible. La taxidermie a même des tendances : il y a quelques dizaines d’années, la mode était aux animaux avec l’air méchant, agressifs, style renard vener, lion à l’attaque, etc. Maintenant, la tendance est aux animaux ayant l’air détendu. À la Doc Gynéco. La taxidermie fait flipper les gens. Le rapport à la mort sans doute. C’est clair que le commun des mortels n’est pas très chaud à l’idée de voir des viscères et manipuler des cadavres. Cyril, lui, ça le choque pas : « On est liés à la mort. C’est tabou. […] Moi j’ai pas cet a priori du sang et de la mort. Je suis aussi pompier volontaire depuis 15 ans, alors quand il y a un truc bien dégueulasse,
« Baisse les yeux je te dis ».
c’est pour moi. » Il faut bien que quelqu’un se tape le sale boulot. Ce manque de dégoût nourrit les fantasmes autour du métier, largement alimentés par la fiction. « Dès qu’il y a un personnage un peu glauque dans un film, c’est tout de suite le taxidermiste », reconnaît Cyril. Sa femme Ophélie ajoute : « Y’a pas longtemps, ils ont passé un épisode des Experts à la télé, et c’était le taxidermiste qui tuait tout le monde. » Et les gosses dans tout ça ? On leur demande souvent s’ils sont pas choqués que papa mettent les mains dans les viscères. Pas du tout. Ils sont nés dedans. L’aîné en 6e veut devenir taxidermiste comme son père et commence déjà à l’aider pour certains petits travaux. Tandis que le benjamin encore en primaire veut être pompier. Comme son père aussi. Sacré modèle familial. Il nous montre un chat naturalisé au-dessus d’une des vitrines du salon. « C’est le petit frère de Lia (la chatte de compagnie). Elle a eu moins de chance ! » C’était une blague. Le chat en question avait juste été trouvé sur la route, probablement percuté par une voiture. Les clichés, Cyril en rigole. En joue même. On s’apprête à partir, rassurés par l’étonnante normalité de la situation, Quand Cyril nous jette : « Vous êtes pas encore partis. D’ailleurs, Léo, vérouille la porte ! » Quel farceur ce Cyril... On l’a échappé belle. // N.E.
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LE DUC Par Chablis Winston et Pierre-Olivier Bobo, à Dijon Illustrations : Michael Sallit
Depuis 18 ans, il est indétrônable à Dijon, qu’il aurait choisi plutôt que les ministères parisiens. Il a transformé la ville en « métropole » et a su garder sa mèche toujours impeccable. Qu’est-ce qui fait marcher le Duc de Bourgogne ? On a taillé une bavette dans le bureau de Rebsamen, à parler de François, à la cool. La jeunesse dijonnaise, le passé trotskiste, Joxe, Mitterrand, les défaites, la retraite, la passion pour le foot, ce bon vieux rock & roll, les clashs avec Besançon… Il n’esquive rien et attaque avec quelques uppercuts bien placés.
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V
ous êtes Dijonnais depuis toujours ? Oui, je suis né à Dijon, j’ai grandi ici. J’étais au lycée Carnot, au « P’tit Carnot » comme on disait à l’époque.
Vous habitiez dans quel coin ? Mes parents habitaient rue Montmartre. Je me rappelle, il y avait deux platanes qui servaient de buts déjà à l’époque, on jouait au foot. J’étais en 6ème à Carnot, puis ils ont créé un nouveau lycée qui s’appelait le lycée Montchapet, et ils ont décidé de couper Dijon en deux : tous ceux qui étaient à l’ouest sont montés à Montchapet, tous ceux qui étaient à l’est sont restés à Carnot. Pendant un trimestre, le lycée n’était pas prêt, donc on est allé au Castel. Puis enfin on est arrivé au lycée Montchapet, au milieu des jardins, des vergers, et on jouait à la « sioule ». La sioule ? Une sorte de rugby méchant. On s’affrontait, c’était assez sympa. Puis voilà, j’ai fait mes études à Montchapet. Ensuite, fac de droit ici… C’était comment Dijon à cette époque ? C’était très chaud quand même, on était après 68 donc c’était les manifs. On faisait la révolution. Les fafs de la corpo débarquaient donc toute l’extrême gauche se regroupait pour se battre contre eux. À l’époque vous vous considériez comme d’extrême gauche ? Ah ben j’étais à la Ligue communiste… Après ça je suis parti car en même temps, j’étais surveillant. J’étais pion pour payer mes études, à Mâcon, à Tonnerre. Dans toute la région… Sept années d’études, sept ans pion. Votre envie de politique ça a démarré à quel moment ? C’était en terminale. D’ailleurs, classe de terminale qui ne va plus s’appeler comme ça mais qui va s’appeler « classe de maturité ». (Ironique, il fait référence à la réforme actuelle, ndlr) Effectivement, c’était avec un prof de philo, un maoïste d’extrême gauche. On lisait Althusser, Lénine et la philo… Avec vos parents, vous baigniez déjà un peu dedans ? Ma mère avait peur quand j’allais aux manifs. Mon père était plutôt de gauche donc ça le dérangeait pas particulièrement… Mais ce ne sont pas eux qui vous ont donné la fibre ? Non, c’était les écoles, le lycée. Et puis en 1965-66, c’était la guerre du Vietnam. Les régimes fascistes en Espagne, en Grèce. Les films comme Z de Costa Gavras. Enfin c’est assez classique ce que je raconte ! Ça a du arriver à des milliers de jeunes de cette génération. J’ai manifesté, on était au secours rouge,
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on allait à Paris… Du coup on m’a toujours traité de Trotskiste. C’est drôle car j’ai quitté ça en 1972 ou 73. J’ai rencontré Pierre Joxe et je me suis dit que, bon, la révolution ce serait pour un autre jour. Il fallait réfléchir à comment exercer le pouvoir, ce n’était pas par la révolution qu’on y arriverait. C’est quand vous rencontrez Pierre Joxe que vous vous dites : mon métier ça peut être de faire de la politique ? Non je ne pensais pas que ça pouvait être mon métier. Pas du tout… Je n’imaginais pas ça à l’époque. J’aimais la chose publique, la politique, le journalisme. Depuis l’âge de 15 ans je lisais Le Monde tous les jours, j’adorais suivre les élections. Ça me passionnait, mais comme un étudiant ! C’est avec Joxe, avec des amis comme Didier Mathus (ancien député PS et ancien maire de Montceau-les-Mines, ndlr) que ça a pris forme. J’étais à la fac avec Mathus, lui il était dans l’autre branche du trotskisme, à l’OCI (Organisation communiste internationaliste, ndlr), alors que moi j’étais à la Ligue communiste. Mais on était des potes. Je me souviens aussi, quand j’étais pion à Mâcon, je participais aux discussions sur le programme commun, je m’informais, j’allais aux réunions où il y avait le PS, le PC. En 1974, quand Mitterrand est venu, j’ai quitté la Ligue communiste définitivement et j’ai appelé à voter Mitterrand au deuxième tour. J’avais du voter Krivine au premier tour… classique ! En 1970, j’avais fêté les 100 ans de la Commune, on avait fait une grande manif’ à Paris, avec Henri Weber, avec tous les copains du PS aujourd’hui d’ailleurs, c’est drôle. Grande manif’, on était 40.000, on était fiers. On a défilé au mur des Fédérés, on a sifflé dans le cimetière du Père Lachaise parce qu’on n’avait pas le droit de chanter. J’ai quitté tout ça après. C’était ma période révolutionnaire... Bon, après, ah la la… Les journalistes - pas vous pendant toute ma vie publique jusqu’à aujourd’hui, quand ils veulent m’épingler c’est : « cet ancien trotskiste ». Donc je leur conseille la lecture d’un magnifique livre, L’Homme qui aimait les chiens, de Padura. Quel rapport avec le Trotskisme et vous ? Ben il faut lire le livre ! C’est un formidable roman. Vous devenez la tête de file de la gauche à Dijon ? Non pas du tout à ce moment-là. D’abord, je suis embauché sur titre à la « mission régionale » à la préfecture, en 1978-79. Je rentre dans la fonction publique à ce moment-là, comme chargé de mission. Mitterrand et la gauche gagnent le conseil général, le conseil régional. En 1981, après l’élection de Mitterrand, Joxe m’appelle et me demande de rentrer dans son cabinet. Mais en 1981 je n’imagine pas être candidat à quoi que ce soit.
Durant les années Poujade à Dijon, aller contre lui aux municipales c’était comme aller au casse-pipe. En 1988, je suis encore au cabinet de Joxe, donc je suis au ministère de l’Intérieur, je suis sous-préfet, et Mitterrand dit à Joxe : « Mais, vous avez un jeune sous-préfet, Rebsamen à Dijon, pourquoi il n’est pas candidat ? ». Donc Joxe me dit : « Pourquoi t’es pas candidat à Dijon ? ». Je ne sais pas, je ne m’étais pas programmé pour ça. Et je me laisse tenter comme un con… Est-ce que vous saviez que c’était perdu d’avance à cette époque-là ? Non pas du tout, j’étais persuadé que j’allais gagner dès la première fois. Les municipales en 1989, Pierre Mauroy vient, il y a 2.000 personnes, on fait des étiquettes, des bouteilles de vin avec « Rebsamen », c’était la fête. C’est marrant, mon slogan, c’était « La jeunesse est en marche ». (rires) Vous étiez en avance, faudra qu’on retrouve ces étiquettes… Non ça va ! N’allez pas en tirer des conclusions… L’image qu’on a de ces années-là, c’est que c’était ingagnable pour la gauche, ici. Oui ! Ça ne se bousculait pas au national pour venir ici. Mauroy, je m’entendais bien avec lui, c’était un mec sympa, un vrai mec de gauche. (Il s’arrête et s’adresse à nous) Bon, faudra excuser le mot « mec », hein, faudra reprendre… Un homme de gauche, sincère, un vrai. Pas de calcul politicien. Moi j’étais très fier que Mauroy soit venu me soutenir. Et Joxe, il était venu mais il m’avait refroidi quand même, il m’avait dit : « Mais tu comptes pas gagner en face de Poujade ». Si, je comptais gagner. Et Mitterrand il m’a douché, vraiment. Il est venu en 1989 ici et il m’a ridiculisé devant tout le monde. « Vous ne comptez quand même pas gagner la première fois ? » (imitant la voix de Mitterrand) Je lui dis : « Si, si, monsieur le président ». Mitterrand répond : « Peut-être la deuxième… Sûrement la troisième, encore faut-il que vous soyez là ». D’un air de dire, « va falloir t’accrocher ! » Alors j’ai répété cette histoire la troisième fois, je me suis dis que si je ne gagnais pas cette fois-ci, j’arrêtais. J’avais un plan professionnel, j’arrêtais la politique si je ne devenais pas maire de Dijon. J’étais à la quête du Graal. J’aurais pu avoir la région en 1998, mais Soisson avait passé un accord avec l’extrême droite. Donc en 2001, ma fille avait 10 ans, c’est pas facile pour les enfants d’avoir un père qui perd tout le temps, j’ai dit : « je ne perds plus ! » Nous, on s’est dit que c’était l’effet de votre moustache. Le jour où vous vous êtes mis à la raser, vous avez gagné. Exact ! Non mais j’avais gagné
« En 1989, Mitterrand m’a douché. Il est venu ici et il m’a ridiculisé devant tout le monde. ‘ Vous ne comptez quand même pas gagner la première fois ? ‘ (...) ‘Peut-être la deuxième… Sûrement la troisième, encore faut-il que vous soyez là’ »
quand même avant. J’avais gagné au conseil général. Je pensais dès 1998 que j’allais gagner. Et en 2001 contre Bazin, ça a été très violent, mais j’étais sûr que j’allais gagner. C’était une histoire de fou, mais je savais à 0.1 point près le score que j’allais faire. J’ai fait 51,5. Si on vous parle de la moustache, c’est aussi parce qu’on a l’impression que vous faites attention à votre style. On vous a vu l’autre jour au Consortium pour le festival GéNéRiQ, vous aviez une petite veste en cuir. (Il coupe) Ah mais j’étais rockeur avant ! Ça, vous l’avez dit lors de l’inauguration de la nouvelle Vapeur le 7 février dernier : « J’étais rockeur mais tout le monde l’ignore ». On a du mal à s’imaginer. Oui oui, mais bon c’est pas la peine de… J’avais un perfecto, j’avais des ‘tiags. Je faisais des chroniques sur les concerts pour je ne sais plus quel canard, des piges comme on dit. J’avais des chaussures bleues, blue suede shoes. Et en 1983, Cabu avait fait un jeu de l’oie du Parti socialiste. Dans la case Joxe, il y avait « Joxe et ses rockeurs ». C’était moi et Mathus. Mathus était un chanteur de rock & roll formidable. Le groupe s’appelait Rocky Shalatoune et les poilus d’Orient (allez écouter le titre Le Twist du père noël rasta, un bijou, ndlr). Moi je gratouillais de la guitare, mais lui avait une voix formidable ! Vous aimiez quoi par exemple à cette époque-là ? Tout, tout, tout ! Moi j’ai commencé avec les Yardbids, vous voyez c’est pas d’aujourd’hui ! Puis après, les Stones comme tout le monde. Même les punks dans les années 1978 à 82.
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Et aujourd’hui vous écoutez toujours du rock ? Dans la bagnole ? Bien sûr. Les Flaming Groovies, un truc qui pète ! Vous avez le temps encore d’en écouter ? Dans le train. L’autre jour j’entendais aux infos... Vous savez parfois pendant 1 minute après ou avant le flash, ils parlent d’un disque. J’ai noté, c’est pas mal, c’est Django Django. Bon, j’essaie de rester un peu branché, j’adore le jazz, les belles voix, j’adore l’opéra aussi. Je suis assez éclectique finalement. Quand j’étais petit, ma grand-mère m’amenait écouter l’opéra. Elle était présidente des Amis du Théâtre de Dijon… (il sourit) Donc j’allais au théâtre municipal. J’ai aussi fait le figurant, je faisais le Romain. (il se marre) Puisqu’on parle de musique, ce concert de rentrée, c’est vous qui l’avez imaginé. C’est une vitrine de Dijon. Attention à ne pas être débordé par le succès ! Ce n’est pas un festival. Je sais que ça déplaît aux jeunes, mais je veux que ça reste familial. Alors, plus tard dans la soirée ça peut être plus chaud. Tiens, vous voulez une anecdote drôle ? Je suis copain avec Jacques Higelin. Il passe il y a quelques années, je vais le voir à la fin du spectacle, il m’embrasse et me dit que c’est formidable de jouer ici, que c’est beau, que j’ai transformé cette ville. On admirait ensemble le Palais des Ducs et il me dit : « Oh la vache, t’as mis combien de temps à construire ça ? » (il se marre) Vous avez votre mot à dire sur la programmation de ce concert ? Bien sûr. Bon, aujourd’hui ce n’est pas moi qui fais la proposition, mais au départ c’était le directeur de cabinet et moi, on testait auprès des amis, on proposait des noms… Aujourd’hui, c’est Christian Allex qui fait la programmation. Il aimerait que ça devienne un peu plus gros. Oui oui, mais on est dans des contraintes importantes en terme de sécurité. Si ça devenait un festival, ça irait ailleurs. Moi j’aime le côté « place de la Libération ». Bon, je quitte mon bureau pendant deux jours parce que c’est insupportable le bruit pour travailler, mais c’est sympa d’avoir 20.000 personnes. Ça me plait. Mais bon, l’année dernière c’était borderline. Il faut faire attention… Il faut garder des artistes locaux à promouvoir, et il y en a des très bons. Et puis des artistes nationaux, internationaux, des artistes qui sont en train d’exploser. J’étais au Consortium pour GéNéRiQ l’autre soir, c’était vraiment sympa. Je n’ai pas pu rester pour Lysistrata, j’étais là avant pour le petit jeune qui se prend pour Mick Jagger (le chanteur de Sports Team, ndlr), c’était super bien. On parle foot ? (Il coupe) Allez foot, j’ai une anecdote ! Je plaisante et j’exagère à peine, mais
« La fac, c’était chaud (...) On faisait la révolution. Les fafs de la corpo débarquaient donc toute l’extrême gauche se regroupait pour se battre contre eux »
aujourd’hui il n’y a pas une personne que je croise dans la rue et qui n’a pas joué au foot avec moi ! Je me dis : « Mon dieu, l’équipe elle devait faire 1.000 personnes ». C’est incroyable. Alors je réponds : « Peut-être contre moi ». Moi j’ai fait mon dernier match avec les anciens du DFCO contre les anciens de Saint-Etienne, il y a environ 8-10 ans. Maintenant je fais du tennis, car je ne veux pas me blesser… Je m’amuse encore avec les copains ici, Hamid El Hassouni (son adjoint délégué à la jeunesse et à l’enseignement supérieur, ndlr), il jouait très bien, de temps en temps on tape dans la balle quand on a l’occasion, mais maintenant quand je shoote j’ai l’impression de faire une passe. Les muscles, c’est plus pareil. Vous étiez comment comme joueur ? Plutôt technique ? Oui plutôt technique, en 8 ou 10. J’ai fait ma dernière saison à l’USCD. J’ai joué à Messigny aussi. Et j’ai commencé au Cercle de Dijon quand j’étais gamin. Comme je me suis baladé j’ai aussi joué un peu en Saône-et-Loire. Bon, j’avais un petit niveau de promotion d’honneur. Pas mal quand même. Oui, Mais bon, on s’entraînait pas autant que maintenant. On s’entraînait deux soirs par semaine. Le foot, c’est votre grosse passion. Le DFCO a grandi un peu en même temps que vous. C’est un accord que j’ai passé avec Bernard Gnecci (ancien président du club, ndlr) en arrivant, en 2001 ou 2002. On disait que Gnecci était un type de droite, enfin bon quand je suis arrivé tout le monde me disait qu’ils étaient tous à droite ici… Accompagner le foot, pour la ville c’est bien. Au détriment de la JDA ? On a un peu cette image : la JDA, c’était le club de la droite, de Poujade. Ça
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c’est totalement injuste ! Je vais vous dire un truc, le foot il ne coûte rien, quand ils sont en Ligue 1. La JDA nous coûte 900.000 euros par an. Le foot nous paie un loyer pour le stade. La JDA devrait nous payer un loyer pour l’utilisation du Palais des sports. Il faudra quand même bien faire attention à ça, mais la chambre régionale des comptes vérifie que les clubs sportifs professionnels paient bien l’utilisation de l’espace. Donc je verse la même subvention, à 10.000 euros près, à la JDA et au foot depuis toujours. Il y en a un qui paie un loyer pour l’utilisation de l’espace, et les autres… Ils vont le faire. Il ne devait pas être fait ce Palais des sports ? Comme le stade de foot… Il faudrait tout refaire. Le foot, on a construit un stade, il n’y avait rien. Tandis que le Palais des sports, il est là. Vous êtes fier maintenant ? Parce que Dijon n’a jamais été une ville de foot. (Il coupe) On disait toujours ça, mais je rappelle qu’en 1991-92 - ça m’avait énervé d’ailleurs - Poujade avait fait une grande affiche 4 par 3 : « Dijon en D1 ». Quand on gagne, il y a du public, quand on joue bien il y a du public. En ce moment, on ne gagne pas tout, on prend des volées, mais on marque des buts, ça joue bien, les gens sont contents. Ça serait bien qu’ils fassent un tout petit peu mieux à l’extérieur… À Paris, là, je pense que l’entraineur - qui a souvent plein de qualité - avait fait une petite erreur (Dijon avait perdu 8-0, ndlr). Contre le PSG, à Paris, on ne se prive pas des meilleurs joueurs de l’équipe. Vous en discutez avec le président, vous donnez des conseils ? On vous a vu dans une vidéo où vous êtes au téléphone avec François Hollande, on sent que vous êtes proche du vestiaire. Bien sûr. Je le dis en rigolant mais je me prends souvent pour l’entraîneur. Je vais souvent dans le vestiaire après les matchs. Je donne des conseils tactiques tout le temps, je sais toujours ce qu’il faut faire ! Je plaisante hein, avec vous je peux le faire. Quand c’est dans la presse on dit de moi : « Ah il est vantard, il fait l’équipe… » Le nom de ce stade, Gaston Gérard, un ancien collabo pendant la guerre. Il faut faire un truc,
« Je suis allé voir AC/DC en moto à Besançon, parce qu’il n’y avait pas de salle ici »
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non ? C’est un vrai sujet. Hier soir j’en discutais avec le président Delcourt. Il me dit : « On ne va quand même pas garder ce nom-là tout le temps ». Mais c’est toujours dur de débaptiser quelque chose… Ça peut arriver quand il y a un investisseur… Oui, du naming, on y réfléchit un peu, mais c’est pas simple. Je ne pense pas que ce sera moi qui le fera. Il va falloir faire la quatrième tribune un jour. Quand on aura fini le stade, il faudra changer de nom à ce moment-là. Vous ne voulez pas prendre la responsabilité de le changer maintenant ? Mon idée, c’est de laisser ça à celui ou à celle qui me succédera. Il ou elle - elle, j’espère - aura à faire cette tribune un jour. Encore faut-il avoir les moyens, ça coûte cher ! … Et on pourra l’appeler Stade François Rebsamen. Non non ! Je n’ai jamais pensé ça. Je n’étais pas un grand footballeur. Il faudrait l’appeler à ce moment-là Stade Dijon Métropole, faudrait trouver un truc... Sur notre site web, on a fait un sondage pour lui trouver un nom. Le nom qui l’a emporté, c’est « Stade Félix Kir ». Ah, c’est mieux mais c’était pas un grand sportif, et puis les chanoines c’est pas trop mon truc. Pour la buvette sinon. La buvette « Félix Kir ». Ça je suis d’accord ! On voudrait prendre le temps de parler de la grande région et de Besançon. Notre magazine est diffusé un peu partout, on trouve qu’il se passe plein de belles choses à Besançon. Mais eux, on sent quand même qu’ils ont un problème avec ce que vous dites... Ils ont un problème psychologique. Ils se vivent en assiégés ! Est-ce que ça tient à l’histoire ? À Vauban ? À la configuration géographique ? Pour moi, contrairement à ce qu’on imagine, Besançon est une ville que j’apprécie. C’est une jolie ville, j’y suis allé sans le dire à personne pour me balader. Parce que quand j’avais 20 ans, les concerts on allait les voir à Besançon. Je suis allé voir en moto AC/DC à Besançon, parce qu’il n’y avait pas de salle ici. Voilà, c’est une jolie ville. Alors, ils ont transformé des propos que j’avais tenus, ils se sont donnés une raison de vivre contre Dijon. C’est comme si nous on vivait contre Lyon. C’est Dijon qui a le leadership de facto ? Dijon est une ville qui se développe, j’y peux rien. Enfin si, j’y peux quelque chose… J’en suis fier. C’est une ville qui gagne des habitants, qui est plus rayonnante. J’ai dit à Fousseret : « Tu sais, pour qu’on reparle de Besançon, autrement que les micro-techniques… » (il
« Emmanuel Bichot, je l’envoie faire le tour des caméras vidéo, on est tranquille. Il en a trouvé une qui ne marchait pas... Il a le temps lui, je ne sais pas ce qu’il fait dans la vie. On va l’appeler Inspecteur Gadjet. Il va me donner les bonnes infos… »
coupe) Parce qu’il commence à nous prendre la tête avec les micro-techniques ! Je lui dis : « Pour qu’on parle de Besançon, tu devrais faire un téléphérique pour monter à la Citadelle ». Elle est classée au Patrimoine mondial. (Il imite Fousseret) « Tu crois que je n’y ai pas pensé ! » Bon ok, allez, on s’arrête là, tu fais ce que tu veux. Il a l’impression qu’on lui donne des leçons. Oui. Ils ont essayé de piquer à Dijon les grandes affaires du tribunal de commerce. Mais il y a 18 juges au tribunal de commerce de Besançon et ils ne sont pas à même de traiter les très grandes affaires. Y’en a quasiment jamais, mais on ne sait jamais. Dijon, il y a 25 juges consulaires. Ils ont essayé de me faire un coup de vache en prenant ça. Evidemment, tout le monde économique est venu me trouver. « Faut se défendre, faut faire ci, faut faire ça ». Vous êtes montés plusieurs fois au créneau, pour le tribunal de commerce ou le CROUS. Oui, je n’ai pas été très méchant sur le CROUS. Mais Dijon a quand même récupéré les 3/4 des choses, ça peut vexer. Oui, mais je continue mon histoire. Donc, je suis interrogé par le journaliste du Bien Public qui transforme mes propos comme d’habitude. Je dis que je m’entends bien avec Besançon, mais qu’il ne faudrait pas qu’ils se comportent comme des gougnafiers. Je sais très bien ce que j’ai dit. Je n’ai pas dit : « Ce sont des gougnafiers ». Évidemment le lendemain, c’était « Nous sommes des gougnafiers ». Parfois il y a des mots qui font sourire, qu’on aime bien utiliser… Mais je ne les ai pas traités ! Quand j’étais ministre, j’ai mis la Direccte (la direction du ministère du travail) à Besançon, signe de bonne volonté et de
paix. C’est là que j’ai découvert qu’avec les Bisontins et les Franc-comtois, c’est assez simple la logique : tu me donnes ce que t’as et j’essaie de te prendre le reste. C’est toujours comme ça : « Dijon nous prend tout » alors que c’est pas vrai du tout. Dans les discours à Dijon, on entend souvent dire de Besançon : « c’est notre petite soeur ». C’est pas un peu condescendant, ça ? Ah oui, oh, moi j’ai pas dit ça. On pourrait dire « grande soeur » mais bon c’est pas vrai. À Dijon il y a 160.000 habitants. 117.000 à Besançon, ce n’est plus la même histoire. Vous dites aussi que Besançon doit devenir une métropole. Moi je me suis battu pour qu’il y ait une métropole à Dijon. Elle l’est de par les infrastructures dont elle dispose, parce qu’elle a un Zénith, parce qu’elle a une piscine olympique, un CHU de pointe, etc. Je me suis battu pour ça. Il y a 20 ans, on était des communautés d’agglomération. J’ai fait évoluer la communauté d’agglomération. C’est devenu une communauté urbaine, j’ai intégré les communes autour, on a pris des compétences. Et puis après on est passé métropole. On n’a pas eu la même stratégie ! Je ne vais pas dire du mal, chacun la sienne, il a fait ce qu’il a voulu Fousseret. Moi j’ai fait un projet, les communes autour, celles qui sont d’accord avec ce projet, venez avec moi ! C’est pour ça que ça fonctionne bien. J’ai pas voulu essayer d’englober tout le monde, par exemple Messigny, j’ai dit au maire Vincent Leprêtre, avec qui j’ai joué au foot, il était arrière-centre : « Tu ne veux pas venir dans la métropole, tant pis on ne veut pas de toi non plus, c’est simple ». Alors qu’il devrait être avec nous, tous les gens qui habitent Messigny bossent à Dijon… Asnières-les-Dijon ils ne veulent pas venir avec nous… Je n’ai pas essayé d’agrandir de force la métropole. Ce qui fait qu’on a une unité, à part Talant, toutes les communes travaillent ensemble. À part Talant, et à part Michel Rotger (maire LR de Chevigny-Saint-Sauveur, ndlr), qui a été condamné - qui n’a pas été condamné lourd - à qui j’ai demandé de démissionner de ses fonctions à la métropole. (il s’agace) L’autre jour quand Bichot (Emmanuel Bichot, conseiller municipal d’opposition à Dijon, ndlr) m’a interrogé en me disant : « Attention à ce qu’il n’y ait pas de harcèlement sexuel dans les services », je lui ai dit : « Vous vous permettez de me dire un truc comme ça devant tout le monde alors que vous étiez amis avec quelqu’un qui a été condamné pour aggression sexuelle. Et vous n’avez rien dit. » Il l’a fermé, terminé. Maintenant je l’envoie faire le tour des caméras vidéo, on est tranquille. (rires) Il en a trouvé une qui ne marchait pas, il a le temps lui, je ne sais pas ce qu’il fait dans la vie. On va l’appeler Inspecteur Gadjet. Il va me donner les bonnes infos…
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Dijon Métropole, vous l’avez monté. À Besançon ils n’ont pas réussi à le faire mais en gros vous leur dites que c’est pas la peine d’en vouloir à Dijon pour ça ? Exactement, et puis il a une autre stratégie. C’est la grenouille qui voulait se faire plus grosse que le boeuf. Il a pris des tas de communes assez loin de Besançon, il n’arrive pas à passer en communauté urbaine. La communauté urbaine, c’est des compétences intégrées. La voirie des communes par exemple. En plus en FrancheComté il fait plus froid qu’ici. Il y a des projets communs, éventuellement, qui sont faisables ? Oui on l’avait fait dans le temps, par exemple les CHU, dans des spécialités très en pointe. Dans les greffes du coeur c’était très bien à Dijon, les greffes du foie, c’était Besançon. Mais il y a des coopérations à imaginer ? Bien sûr, mais maintenant j’ai appris à me méfier parce que quand on leur donne ça, ils prennent ça. (il mime avec le bras) On n’est donc pas dans une relation de confiance d’après vous... Non, je le regrette car on pourrait avancer ensemble, mais il ne faut pas qu’ils nous perçoivent toujours comme l’ennemi. Moi je ne les perçois pas comme l’ennemi, voilà. Mais c’est parce que c’était une petite région, par le nombre - ce n’est pas péjoratif -, ils vivaient ensemble et les Franc-Comtois ont peut-être une solidarité de « montagnard », je ne sais pas… Et tout ce qui se fait à Besançon, c’est mieux que Dijon. Bon voilà, à un moment ça suffit. Si on parle du futur. Vous avez 66 ans, vous pensez à la retraite ? J’avais dit à Poujade : « Il y a une vie après la vie de maire ». C’est ce que je pense. Qu’est-ce que vous aimeriez faire ? Oh, ça, je ne vais pas le dire. Continuer à travailler ou prendre du bon temps ? L’un n’empêche pas l’autre. Je n’imagine pas ne plus rien faire, me mettre dans un fauteuil ou cultiver mon jardin. Non, j’ai des choses à faire, j’ai des livres à écrire. Le livre sur le foot qui aurait dû sortir ? J’ai 3 livres à faire. Un livre sur 20 ans de socialisme. Un livre sur Dijon. Et puis un livre pour une coupe du monde, mais je vais encore attendre. J’avais effectivement écrit un livre sur le foot, il était prêt. C’était pour la coupe du monde au Brésil, mon histoire personnelle du foot avait commencé avec un France-Brésil en 1958. Ça m’avait marqué, j’étais gamin et on s’appelait tous par des noms de joueur. Moi c’était Vavá. Cette coupe du monde au Brésil, c’était l’occasion de faire « mes coupes du monde ». Ça ne s’est
« Avec Besançon, j’ai appris à me méfier parce que quand on leur donne ça, ils prennent ça.» pas fait car j’étais ministre, j’ai fait une erreur. Pourtant il était écrit à 80 %. Je passais au Grand Journal un soir, et moi je suis plutôt franco, je tourne pas autour du pot. Donc je dis que je vais sortir pour la coupe du monde un livre, Mes France-Brésil, c’était le titre. Oh la la, sur les réseaux sociaux, ça a été l’enfer. Pendant 10 jours ça a été : « il a que ça à foutre, il est ministre du Travail ». J’ai vu François Hollande, j’ai dit « hop, on arrête ». Et du coup, cette retraite ? Ça… (amusé) Moi seul le sais. Vous nous avez glissé tout à l’heure : « il ou elle reprendra ma succession - elle j’espère ». Oui, j’aimerais bien qu’une femme me succède, c’est vrai. On pense à Nathalie Koenders. On peut penser à elle, oui. J’aimerais bien, j’aimerais bien… Parce que j’aimerais que l’histoire continue. Quand ? J’en sais rien, mais j’aimerais bien que ce soit elle. Enfin, pas dans 15 ans ! Laurent Grandguillaume, qui à l’époque était votre protégé, vous reproche beaucoup de choses en ce moment. C’est une histoire triste, comme les histoires d’amitié qui se fracturent. Je sens un peu d’aigreur dans ses propos. Je lui ai donné tout ce que je pouvais lui donner. Il a beaucoup travaillé pour moi, donc on était quitte on va dire. Ce que j’aime moins c’est quand il dit : « J’espère que ce n’est pas avec des fonds publics qu’on a payé un sondage électoral ». Vu qu’il a travaillé avec moi pendant 15 ans, il sait très bien que ce n’est pas possible que ce soit payé par des fonds publics et par la ville en l’occurence. Il le sait très bien. Donc de poser la question, comme le fait Bichot, c’est pas bien. Vous n’avez plus du tout de contact avec lui ? Non. Si je le vois je lui dirais bonjour, je suis poli, mais il a voulu changer de vie. Il faut respecter ça. De temps en temps je vois passer un petit billet d’aigreur. Bon, j’espère que ça lui passera. Mais, on apprend des choses comme ça. Moi je marche à la confiance, je fais confiance a priori. Ça permet de vivre mieux. On est parfois déçu, mais on a beaucoup de satisfaction à ne pas être dans la suspicion. Vous savez, ça évite l’eczéma, ces choses-là. Je suis bien dans ma peau, je fais confiance, après ça marche ou ça ne marche pas. // C.W. et P.-O.B.
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Par Mhedi Merini et Benjamin Moreux, dans le Brionnais Photos : Edouard Roussel
LE VEAU DE WALL $TREET Entre la crise des éleveurs et les végans qui veulent qu’on bouffe des feuilles, on a eu envie de dévorer la culture de la bonne barbaque. Cap sur le Charolais, l’eldorado du genre, et son marché aux bovins de Saint-Christophe-en-Brionnais, histoire de respirer un peu d’authenticité dans ce monde bourré d’OGM. Immersion saignante au coeur du business de la viande rouge.
7 heures. Il fait encore nuit sur le Brionnais. Bonnets, gants, écharpes ne sont pas de trop, on discerne à peine ce qui nous précède tant le brouillard est dense. Un stand de bottes s’installe à l’entrée du marché. Les convois sont arrivés très tôt. Les meuglements résonnent déjà bien fort et l’odeur assiège progressivement nos narines. Elles sont là, en coulisses, par centaines et parquées dans des enclos numérotés. La majorité est crème, mais tu en as des marrons, quelques-unes sont tachetées même. De loin, on entrevoit des cornes, plus ou moins prononcées, des mamelles, plus ou moins opulentes ou des testicules, toutes bien pendantes, elles. Les bovins sont dans la place, ils patientent tour à tour dans les couloirs qui mènent jusqu’à la scène. Les bouviers* organisent leur entrée dans un amphithéâtre bondé d’éleveurs, tous prêts
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à se livrer au jeu des enchères. Les portillons claquent, s’ouvrent, se referment. Ça crie, ça s’agite, ça meugle, ça cogne, ça fulmine, c’est l’usine. L’agitation à l’arrière tranche sérieusement avec l’atmosphère taiseuse qui règne au sein de la salle aux enchères. On aperçoit des hommes en bottes, pas tout à fait décrottées, vêtus de blouses de maquignon*, unanimement portées ce jour-là et qu’on appelle aussi la biaude*, téléphone à l’oreille, le visage grave et alerte. Sans oublier le bâton ou les cannes colorées qui accompagnent leur marche. Chaque détail vestimentaire a un sens ici. Mais on est clairement aux antipodes du costard cintré, de la mallette en cuir, et des pompes cirées qui font le folklore des affaires et de cette finance à la con. Même si plusieurs gros 4x4 bien polluants de vrais garçons de ferme couvrent le
* Les mots étranges suivis d’un astérisque seront expliqués dans le lexique présent en fin d’article. Ouf.
parking. Bienvenue à Saint-Christophe-en-Brionnais. Visiter les arcanes de ce marché aux bestiaux, ça se mérite, il a fallu se lever tôt. Rendez-vous 5h. Ambiance petits yeux et haleine fraîche. La face ingrate du journalisme
Le marché bombe fièrement le torse du fait de ses 7 siècles d’existence. d’investigation. C’est le terrain. Celui d’aujourd’hui porte un nom qui nous est peu familier : Saint-Christophe-enBrionnais. Une petite commune du Brionnais-Charolais, une enclave située aux confins de la Bourgogne, à l’extrême sud-ouest de la Saône-et-Loire. Le Brionnais ? C’est le berceau originel de l’élevage de la viande charolaise. SaintChristophe ? Sa plaque tournante, installée ici depuis belle lurette. La viande charolaise est la bête sacrée du coin, qui termine quand même dans l’assiette. On arrive enfin. Il ne nous faut pas 40 ans pour le trouver le marché. Il se situe au « Mur d’argent ». Autrefois, l’intégralité des transactions se faisait en direct, entre éleveurs, des épaisses liasses de
billets étaient posées sur ce vieux mur, lestées d’une pierre pour ne pas que les biftons s’envolent, d’où le nom. Mais on vous parle d’un temps que les moins de 20 ans ne peuvent pas connaitre. Si ce « Money Wall » ne parle à pas grand monde, faut savoir que le marché aux bovins de Saint-Christophe-enBrionnais est fort d’une réputation qui dépasse les simples limites de la région. L’internationale sera le genre bovin. Saint-Christophe-en-Brionnais. C’est 500 habitants à tout casser, des prairies vallonnées et du vert à l’infini. L’idée du calme qu’affiche le village en apparence, s’efface progressivement à mesure qu’on l’arpente, car oui, les commerces pullulent le long de l’artère principale. Boulangeries, boucheries, restaurants, banque, assurance etc.. L’économie locale tourne en bonne partie grâce au marché qui prend place chaque mercredi. « Ça arrive de faire 400 couverts certains jours de marché » nous confie Richard, un restaurateur du village chez qui on a émergé en arrivant à 7h au milieu des premiers acheteurs stupéfaits de voir nos tronches de citadins. Maintenant, faut se grouiller, on a rendez-vous avec Gérard. Un grand élancé au savoir abondant, et accessoirement frère du
Alcatraz-en-Charollais.
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Intervilles : Guy Lux vient de lancer la vachette.
maire du village qui va nous aider à percer le mythe du microcosme charolais. Son local dégueule de produits dérivés : t-shirts, tasses, figurines, DVD, tout est à l’effigie de la charolaise. Le marché de Saint-Christophe-enBrionnais peut se vanter d’avoir une histoire très ancienne qui remonte à la fin du Moyen Age (peut-être même bien avant, certains disent au Xe siècle). Ce qui est sûr, c'est qu'en 1488, Charles VIII institua trois foires à Saint-Christophe. Le registre écrit est religieusement conservé à la mairie. Des historiens ont même planché sur le sujet. Voilà qu’en 2018, le marché du Brionnais bombe toujours fièrement le torse du fait de ses 7 siècles d’existence et fait partie des 6 plus gros marchés aux bestiaux français reconnus comme tels à ce jour. Saint-Christophe, c’est la référence ultime de la viande charolaise. La viande charolaise est une race à viande par excellence. Faut savoir aussi que le cours des prix de la viande bovine pratiqués ici a valeur de référence pour tous les marchés européens. Ils sont évalués et fixés par une commission de cotation, composée d’acheteurs et de vendeurs. Elle se réunit à chaque fin de marché et observe les transactions de la journée, qui varient selon l’offre et la demande. Des foires médiévales au libre-échange mondialisé, le marché pèse plus que Jeanne Calment et Drucker réunis niveau longévité. Le marché de Saint-Christopheen-Brionnais, c’est la rase campagne intégrée à l’économie monde. Pas forcément ce qu’on imagine en débarquant. Les ventes à l’export se scellent très tôt le matin, à partir de 7h. Un jour de marché à Saint-Christophe, c’est l’Eurovision, sauf qu’ici ce ne sont pas les chansons qui puent. Il n’y a pas que les paysans du coin qui roulent les ‘r’, suffit d’entendre les chauffeurs espagnols pour s’en rendre compte. Ces derniers importent de la charolaise jusque dans les terres de la région de Murcie, se tapant ainsi 2.600 bornes aller-retour, chaque mercredi. D’ailleurs, la viande charolaise s’exporte très bien dans les pays du sud, l’Italie et l’Espagne en tête. D’autres passent même la Méditerranée pour brouter en Turquie, Tunisie, Libye, Algérie. Voire même en Belgique, en Allemagne, dans une moindre proportion. Pas sûr que l’herbe soit plus verte ailleurs. Les ventes à l’export de viande charolaise représentent une part importante, environ 40% des ventes totales. Saint-Christophe attire aussi les curieux avec près de 8.000 visiteurs à l’année. Français, Belges, Allemands, Hollandais ou Suisses, des gens du nord quoi, s’aventurent
Le marché au cadran représente l’essentiel des ventes réalisées à Saint-Christophe, environ 1.000 bovins par jour.
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ici par curiosité. 8.000 personnes, c’est 16 fois la population de Saint-Christophe. Des chiffres et des boeufs. À Saint-Christophe, il y a deux marchés dans le marché. Un alliage contrasté entre modernité numérique et legs ancestraux qui caractérise quand même pas mal l’endroit. Le marché au cadran a pris racine ici depuis 2009. Il se déroule en intérieur, toute la journée, contrairement à l’autre de l’après-midi qu’on appelle « le gré-à-gré », le marché traditionnel, pour ne pas dire éternel, où vendeurs et acheteurs font leurs affaires directement, dehors, sous un
Avant.
immense hangar. Le marché vit et s’organise grâce à une trentaine de salariés, des secrétaires mais aussi des bouviers et bouvières qui prennent en charge les bêtes, une fois que ces dernières posent un sabot sur le sol du marché. Le marché dépote, près de 1.200 bêtes sont présentées chaque mercredi, près de 60.000 à l’année. 80% de bovins sont vendus. 1.600 éleveurs sont susceptibles d’apporter leurs bovins à Saint-Christophe, 500 sont de potentiels acheteurs. Un bovin coûte 1.000 euros en moyenne, certains peuvent valoir jusqu’à 3.000 euros… Chaque éleveur a un numéro, il faut que l’administration du marché vérifie que l’acheteur soit solvable auprès de sa banque pour que la transaction soit validée. Le paiement est sécurisé et se fait dans les 48h, « C’est pour cette raison que les gens continuent à venir ». Evidemment, le marché se fait une commission sur chacune des transactions. Après avoir refoulé l’idiot du village en lui sermonnant bien gentiment « d’aller boire un cacao », Gérard débute le gros de la visite du marché aux cadrans. « Je vous préviens, à la fin de la journée, vous allez sentir, ma femme m’engueule un peu pour ça parfois ». Message reçu et en effet, on n’entre
«
pas dans Séphora. Gégé nous explique le moindre rouage. Il maîtrise le sujet à la perfection, on se noie parfois dans le flot d’informations qu’il nous déverse, surtout qu’on a encore la tête à notre plumard. Gégé c’est BFM en beaucoup plus instructif. Le cadran, c’est la compétition et des nombres à gogo. La salle des ventes est un amphithéâtre, ça ressemble à l’Assemblée Nationale sauf que ce n’est pas sur les banquettes que ça braille le plus. Tout se passe sur le cadran, le gros tableau électronique qui domine la salle. Le marché au cadran représente l’essentiel des ventes réalisées à Saint-Christophe, environ 1.000 bovins par jour. Ce sont seulement les jeunes bovins ou les bovins maigres qui y sont vendus, ceux qui n’ont pas encore fini leur carrière et qui vont poursuivre leur vie en France ou à l’étranger. Le matin, c’est les ventes à l’export, les bêtes sont présentées par lot. L’après-midi, les bêtes sont vendues à l’unité. Il dure toute la journée, jusqu’à ce que tous les bovins soient exposés, de 7h à 18h, voire plus… « C’est arrivé qu’on termine très tard, on a eu jusqu’à 1.600 bovins à la journée, uniquement au cadran » nous glisse Gérard. Les bêtes sont lâchées dans l'arène, à la merci des acheteurs qui nourrissent les bancs d’un amphithéâtre comptant une centaine de places assises. « Allez ! On avance ! Allez ! », les bouviers ne murmurent pas vraiment aux oreilles des
Je vous préviens, à la fin de la journée, vous allez sentir, ma femme m’engueule un peu pour ça parfois ! »
Gérard, fixeur
Après.
bêtes, ils leur pètent le tympan. Elles doivent se magner sous peine de recevoir un coup de bâton, les enchères n’attendent pas. Une fois la bête entrée, le sol fait balance, son poids s’affiche immédiatement. « Toutes les infos qui concernent la ou les bêtes s’affichent sur le cadran » nous montre Gérard. Effectivement, on aperçoit pas mal de chiffres qui renvoient à des caractéristiques particulières du bovin : sa race, son code génétique, limite ses antécédents psychiatriques et son numéro fiscal. « Regardez, ici, vous avez les catégories de bovins, avec cela les acheteurs savent si le bovin correspond à un veau de plus ou de moins de 80kg, un broutard*, une laitonne*, un taurillon*, une
génisse* ou encore des bovins sans garantie* ou un bovin à problèmes* ». Ce jour-là d’ailleurs, on a croisé la route d’un bovin à problèmes. Ça ne veut pas dire que ce bovin n’est pas fréquentable ou qu’il a une influence néfaste sur ses potes. Un petit veau handicapé, sur 3 pattes, et qui malheureusement ne coûtait pas beaucoup de dollars et encore moins d’euros… Personne ne l’a choisi, aucun élan de compassion en vue. Plus victime qu’élément perturbateur. Il est reparti au stand en boitant, le pauvre... Les bovins entrent dans l’arène, parfois seul ou à plusieurs, ça dépend. Certains sont excités, cavalent et tournent en rond d’autres sont plus intimidés, sans doute incommodés de capter autant de regards. La lourde bataille des mises successives débute alors. Chaque acheteur a un bouton planqué sous son pupitre, ou une zapette. Ils sont imperturbables, ça se jauge. Par moment, les débats s’enflamment et la carte bleue chauffe. Le speaker, placé en cabine, annonce l’évolution des enchères en même temps qu’elles s’affichent sur le cadran avec un débit aussi frénétique qu’insupportable: « Sept-cent-quatre-vingt-cinq euros, sept-centre-quatre-vingt-dix…huit-cents…huit-centvingt-cinq…huit-c…huit-cent-trente-cinq euros… ». Le vendeur, lui, est retranché seul dans une autre cabine pour valider ou non le prix de vente déterminé à la fin des enchères. Dans la salle des ventes, l’ambiance est mesurée, bien sage, on a du mal à discerner un sourire ou une voix dans les mélis-mélos du speaker. C’est le boulot en même temps. Cette atmosphère feutrée ne nous met pas franchement en confiance. Heureusement qu’il est là pour nous causer le Gégé ! Les quelques regards essuyés ne nous incitent guère à entamer un échange. Ils ont les yeux revolvers. On pensait limite qu’on allait finir aux enchères, nous aussi. Veaux, vaches, boeufs défilent tour à tour, les quelques chuchotements et le sérieux font toujours autorité au milieu de cet univers essentiellement composé de mecs, parmi lesquels certains sont venus accompagnés de leur dame. On se dirige d’un pas décidé au gré-à-gré. C’est l’aprèsmidi, le soleil tape mais on se caille toujours autant les meules. Le gré-à-gré, c’est le retour aux sources du marché, la tradition à l’état pur. On y vend les bêtes grasses, considérées comme bonnes à manger et achetées principalement par des chevillards*. Pas un mercredi ordinaire, c’est la toute dernière étape avant l’abattoir.
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En général, le jour d’après. Les bovins sont alignés en rang d’oignons, dans des enclos. On aperçoit de majestueux taureaux, des armoires à glace sur pattes avec des baloches énormes, comme tu-sais-qui quand sa meuf part un an à Bucarest en Erasmus. Ici, les négociations
Saint-Christophe, c’est la référence ultime de la viande charolaise. Le cours des prix de la viande bovine pratiqués ici a valeur de référence pour tous les marchés européens. se font directement, entre le vendeur et l’acheteur, pas d’intermédiaire. Les transactions sont scellées dès l’instant où on marque le cul de la bête à la craie ou qu’on lui cisaille les poils. Comme dans l’temps. Les paiements sont différés car ils se réfèrent au poids de la carcasse, une fois que la bête a été tranchée. Impossible pour nous d’errer à l’intérieur de ce marché qui n’est réservé qu’aux professionnels. Des fleuves de pisse ruissellent de partout, on a le droit à des geysers de bouse aussi. Certaines bêtes glissent et finissent sur le côté, d’autres se prennent de bons coups de cannes car visiblement trop dissipées. La vie de rêve juste avant la mort. On a assisté à d’autres trucs de dingue. En observant tout ça d’un peu loin, on a pris en flag’ un gars fourrer sa canne dans une vache, par un endroit peu conventionnel. On te fait pas de dessin. Un test classique paraît-il. Une autre idée de la France profonde qui ne tardera pas à voir un #balancetonéleveur jeter l’opprobre sur toute une corporation. La mort est dans le pré. Les bêtes circulent sans cesse, entrent, ressortent, se cassent la gueule, repartent, tombent nez-à-nez avec le cul du voisin. Puis d’autres arrivent et se succèdent. Certaines pissent le sang, car elles se sont pétées une corne. « On a connu meilleur mercredi » doivent-elles meugler entre elles. Au final, c’est encore un peu de vie ou la mort. Le flux est ininterrompu. Le rythme ne faiblit pas. On se demande aussi comment les bouviers font pour ne pas avaler la trompette*. On rencontre Alexis, courtier du bovin et éleveur à Oudry, un bled à une trentaine de bornes au nord. Le mec est une bûche avec de sacrées paluches qui ne jure que par la charolaise et l’entrecôte. Il a choppé le virus familial de l’élevage et travaille encore avec son père. Alexis patrouille les allées du marché depuis déjà pas mal de temps du haut de sa vingtaine d’années : « Ici, je vends mes bêtes grasses au gré-à-gré mais j’achète aussi ».
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Alexis et sa canne jaune.
Les bêtes achetées à Saint-Christophe ne choppent pas forcément le ticket gagnant pour l’abattoir tout de suite. Certaines bêtes peuvent même être achetées pour ensuite être bichonnées et figurer à des concours. Alexis, lui, fait de l’achat-revente au marché chaque semaine. Il achète des veaux dit maigres puis les nourrit dans ses pâturages pour en faire des festins. Il est ce qu’on appelle dans le jargon : un engraisseur. Au marché, on les reconnait à leur canne jaune ou au simple bâton en bois, l’emblème du gang en quelque sorte. Alexis sillonne également toute l’Italie du nord pour vendre certains de ses bovins, en compagnie du père et des associés. On aperçoit les semi-remorques dans la cour, prêts à être chargés. La ferme familiale est isolée, elle compte près de 500 bêtes dont 100 vaches destinées au vêlage*. Alexis achète, vend ou revend 300 à 400 bêtes par semaine en moyenne ! Quand même ! Il est en plein travail. La mine inquiète, ce grand gaillard nous explique aussi que les prix du marché sont à la baisse depuis 5 ans, presque 1€ d’écart sur le kilo de carcasse qui s’échange à environ 3,5 € quand il est vendu une douzaine de balles en grande surface. Et les accords de libre-échange ? Le CETA ? Le projet d’Accord entre l’Union Européenne et le Mercosur ? N’en parlons pas… « La suite ? On sait pas trop, c’est compliqué, même les grands groupes se rachètent entre eux, ils achètent tous les abattoirs ». À l’aise et pédagogue quand il s’agit de parler de son métier, le regard change un peu quand on parle chiffre d’affaires. On essaye de l’amadouer avec des sommes au hasard. « 500.000 euros ? Tu sais sur 1.000 euros parfois on n’en gagne qu’un… ». Alexis n’est pas plus bavard quand on lui demande comment il choisit ses bovins. La nécessité du secret des affaires ? Il nous révèle quand même avoir acheté 80 bêtes à environ 1.000 euros pièce. Moins que le salaire journalier de Neymar. Ainsi va la vie pour un bovin à Saint-
Christophe. De toute façon, le seul boeuf qui s’en sort plutôt bien dans la vie, c’est Franck Leboeuf. C’est tout naturellement qu’on s’est rendu Chez Bruno pour dévorer de la charolaise, sur les bons conseils d’Alexis. Rien à battre d’Aymeric Caron et de son manque de fer, on ne pouvait pas effectuer ce pèlerinage sans ce passage obligé. Le restau est immense et a des faux airs de salle des fêtes. Plusieurs portraits de charolaises habillent les murs. Il est 11h30 et c’est déjà bien blindé, tous les carnivores sont à table, quasi que des éleveurs. Les serveuses courent dans tous les sens pendant qu’on guette les assiettes tels des charognards. Dedans ? De la viande charolaise. On devine qu’être végétarien à Saint-Christophe, c’est comme être Rohingya en Birmanie ou gay en Tchétchénie, en pire. Ici, ça déconne un peu plus que dans les entrailles du cadran, les gens parlent fort et ont le souci d’être audibles : « Hé Cocotte, tu me mets pas de frites dans le bifteck ! Et tu nous remets une bouteille s’te plait ! » lâche un éleveur à une serveuse en plein effort et désabusée. Entrecôtes, steaks, pot-au-feu, pavés, Buffalo Grill se fait dessus rien qu’en lisant la carte. De même pour notre cholestérol par la même occas’. Chacun hésite avant de faire part de son choix à la serveuse, on dirait qu’ils vont acheter une baraque. La barbaque est tellement tendre qu’on pense s’être fait enflés en s'étant déjà fait servir le dessert. La journée se termine, loin du tumulte et de ces allers-retours incessants. On est sur les rotules, usés, certains pioncent dans la caisse, on sent la vache beaucoup...et la mort un peu. On repart instruits, repus et satisfaits, mais aussi avec un étrange sentiment de culpabilité. On fait partie de la bande des carnivores, de la race des salauds. Mais putain, c'est tellement bon. Saignante, bleue ou à point. La destinée est vache. // M.M. et B.M.
Au marché de gré-à-gré, les transactions sont scellées dès l’instant où on marque le cul de la bête à la craie ou qu’on lui cisaille les poils. Comme dans l’temps.
Lexique des mots trop compliqués de cet article Avaler la trompette : Ne plus avoir de jus. Rien à voir avec le milieu bovin. Biaude : Blouse de paysan, très tendance. Bouvier / Bouvière : Celui ou celle qui s'occupe des bœufs, les garde, conduit leur attelage. Synonyme : Assistante sociale. Bovin à problèmes : Bovins qui ont des soucis de santé variés et qui, en général, ont une mutuelle de merde. Des gros fragiles de la vie qui boiteront pour toujours. Bovins sans garanties : Ce qualificatif renvoie à tous les bovins qui, par exemple, n’ont pas certaines vaccinations à jour, ou sur lesquels on émet des doutes quant à l’origine de leur race car il y a eu trop de croisements. Pas un bon argument de vente pour les bovins du métissage. Broutard / Laitonne : Lorsque le veau est sevré et qu'il se nourrit complètement à l'herbe, il est alors appelé broutard pour un mâle ou laitonne pour une femelle. Guide du broutard. Chevillard : Un grossiste habilité à abattre des bêtes. Il revend ensuite les carcasses. Génisse : Jeune vache de plus d’un an qui n'a pas encore mis bas. Maquignon : Marchand de boeufs, courtier en chevaux ou bêtes de somme. Taurillon : Jeune taureau de plus d’un an qui ne s'est pas encore accouplé. Un puceau qui va parfaire son apprentissage sur quelques bonnes adresses internet. Vêlage : Mettre bas, faire son veau.
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Par Martial Ratel, à Dijon Illustrations : Yannick Grossetête
YANNICK GROSSETÊTE PLONGEANTE Le jeune espoir de la Ligue 1 de la bande dessinée est du Morvan.
Il est jeune, 25 ans, a tâté du ballon du côté de Saulieu (21) à L'Entente Sportive Morvandelle mais finalement entre le tabac des parents et une vie désœuvrée dans l’est de la France, Yannick Grossetête a choisi de faire de la BD. Il est installé depuis plusieurs années en Belgique et entre deux planches publiées dans Fluide Glacial, il vient de sortir 90 Minutes, une série d’histoires courtes autour du football, de la Ligue 2.
« La Ligue 2, il y a
des trucs marrants comme ces noms... Les Chamois Niortais, ça c’est classe ! » 48
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on livre s’adresse autant à ceux qui n’en ont rien à cirer du football mais qui veulent rigoler, qu’à ceux, supporters hardcore, qui se souviennent du tacle de machin à la 87ᵉ durant le match Stade Brestois 29-Dijon FCO. Le livre recèle des petites pépites ‘d’Umour’ en s’appuyant sur l’absurde de situations footballistiques bien connues : le joueur à peine touché qui se tord de douleur au sol, ou ces stadiers qui passent leur match dos au terrain. Yannick Grossetête s’amuse aussi à imaginer des vies intimes aux joueurs et arbitres qui, souvent pour leur plus grand malheur, resurgissent sur le terrain au plus mauvais moment. Un livre entre blagounettes potaches et délicatesse, par un vrai amateur de foot.
Comment t’es venue cette idée de raconter des histoires autour de la Ligue 2 ? D’abord, je suis supporter de l’A.J. Auxerre. Le club est descendu en Ligue 2 en 2012 et du coup, je me suis mis à regarder le multiplex du vendredi soir. À l’époque pendant le multiplex, tu ne pouvais pas regarder les matchs en entier. Il y avait un mec, le présentateur, qui dirigeait l’émission et il passait la parole d’un match à l’autre. Et parfois ça ressemblait à ça : « - On va à Sochaux. - Oui, bah ici, il ne se passe rien... - Bon, on va à Nancy. - Oui ? Ici, il ne se passe rien non plus... ». Le mec pouvait avoir fait le tour des stades en France et il ne se passait rien nulle part ! (rires) Ça m’a fait rigoler, ça a commencé à me donner des idées de scénarios et puis c’était parti. Tes histoires te viennent justement quand tu t’ennuies devant ces matchs ? Ça t’aide à passer le temps ? J’avoue que ça aide ! C’est comme ça que c’est arrivé. Et oui, regarder les matchs ça donne des idées.
«
En Belgique, il y a une super ambiance dans le stade, pour un match de Ligue à Liège, tu vas avoir plus d’ambiance que quand j’ai vu l’équipe de France au Vélodrome. »
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Pour 90 Minutes, ton dessin est épuré. Tu as une autre manière de dessiner, plus complexe, que tu utilises dans Fluide Glacial. Comment as-tu choisi cette forme épurée ? Pour mes autres dessins, c’est de la peinture numérique, ça prend 15 plombes à faire et je me suis dit que ce serait cool de trouver un petit style de 'récréation'. Un truc où tu fais une page en 40 minutes, pour souffler un peu. J’avais toutes ces idées de scénarios de foot et j’avais commencé à les dessiner de manière réaliste mais ça ne donnait rien. Alors je me suis dit que j’allais aller à l’essentiel. C’est mon petit coté graphiste aussi, j’ai fait une école à Chaumont, c’est mon métier. C’est peut-être plus simple mais ça ne doit pas être moins exigeant car tu as moins d’outils à ta disposition. Il faut que ce soit directement juste, tu ne peux pas camoufler les choses. Il faut que les traits soient vivants. Ça m’a vachement appris à bosser les attitudes. C’est très documenté aussi : tu reproduis très précisément les maillots, les écussons, les groupes de supporters avec leurs écharpes et leurs drapeaux dans les tribunes. Je suis allé sur Internet et puis aussi j’avais les FIFA 15 et 16 qui m’ont permis de trouver tous les maillots (rires).
Extrait de 90 Minutes (Delcourt, 2018)
Côté club, on sent que tu t’es fait plaisir à citer des noms comme Créteil-Lusitanos ou les Chamois Niortais. Ce sont des noms mythiques dans le foot. Il n’y a pas deux clubs comme ça. C’est clair ! Ce qui est bien avec la Ligue 2, c’est que c’est un peu le foot moisi, quand des joueurs n’arrivent pas à aligner trois passes mais il y a des trucs marrants comme ces noms. Les Chamois Niortais, ça c’est classe ! Tu vas souvent au stade ? J’essaye ! J’ai vu des matchs de la France pendant l’Euro. À Bruxelles, j’ai vu des matchs de la Belgique et pas mal de matchs au Standard de Liège. Les matchs ne sont pas toujours d’un super niveau mais il y a une super ambiance dans le stade, pour un match de Ligue à Liège, tu vas avoir plus d’ambiance que quand j’ai vu l’équipe de France au Vélodrome. 90 Minutes repose aussi énormément sur tes dialogues. Dans l’idéal, j’essaye de faire des trucs assez proches des conneries que je pourrais dire avec mes potes. Ça vient assez facilement.
On sent aussi que, parfois, les histoires font une place importante à des plaisirs graphiques, pour toi et pour nos yeux, comme lorsque tu dessines un labyrinthe avec les lignes blanches des pelouses. J’ai fait du foot pendant 9 ans à Saulieu et j’ai toujours calé sur les mecs qui traçaient les lignes. Et je me suis dit que ce serait cool que ces mecs puissent dessiner une connerie. Tu as joué gardien. C’était par choix ou par défaut ? Par choix ! J’étais fan de Fabien Cool et mon père était goal aussi ; je me suis dit « je vais faire comme le père ». Ah, avec ce genre de réflexion, tu aurais pu finir buraliste comme lui. Oui, c’est vrai mais j’ai préféré partir de Saulieu ! Tiens, d’ailleurs, c’est comment de grandir à Saulieu ? Franchement, c’était quand même assez cool. Il n’y avait pas grand-chose à foutre du coup on était une bonne bande potes et on faisait plein de conneries. Il y avait plein de bâtiments abandonnés et vers 14-15 ans on allait dedans.
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Extrait de L'Étang, primé à Angoulème en 2017.
Tu faisais du collage sauvage dans la ville. C’est vieux ça ! Je faisais aussi du pochoir, des pochoirs de chats. J’en mettais un peu partout. En fin de soirée, vers 3 heures, je sortais et je mettais des pattes de chat entre deux bouches d’égout. Le lendemain, je repassais et je voyais les gens qui regardaient en se demandant ce que c’était.
«
J’essaye de faire des trucs assez proches des conneries que je pourrais dire avec mes potes. »
En 2017, tu as eu le 3e prix Jeune Talent à Angoulême. Qu’est-ce que ça t’a apporté ? Ça t’a ouvert les portes de maisons d’édition ? Non, pas vraiment. Je bossais déjà chez Fluide Glacial, chez AAARG et chez Groom. Ça t’a apporté une statuette de chat. Parfait pour tes pochoirs. J’ai mis la statuette à côté de ma coupe de la Fête des sports gagnée à Saulieu en 2006 au concours de lancers francs ! La suite ? J’ai une trentaine d’histoires sur le modèle de 90 Minutes mais sur des histoires d’amour. Tes influences au niveau scénaristique et dessin ? C’est assez spécial, j’y connaissais rien du tout en BD, il n’y a pas longtemps encore. Après mon bac et mon BTS en Arts Appliqués à Chaumont, je ne savais vraiment pas quoi faire de ma vie. J’avais un pote en école de BD à Liège. Je me suis dit « comme je ne sais pas quoi foutre, autant aller là où il y a des potes » (rires). Je me suis inscrit à l’école, je me suis trouvé un appart’, j’ai passé le concours section 'illustration', parce que la BD ça ne voulait pas dire grand-chose pour moi, je n’avais jamais rien lu à part les Petit Spirou, quand j’étais p’tiot, ou les Tintin... Non pas les Tintin, j’aime pas du tout ça, mais les Astérix et ce genre de choses. Une fois en cours, ça ne m’a pas du tout plu, c’était vraiment axé enfance. Du coup… Je me suis dit « bon, je vais aller en section BD ». Vraiment comme la dernière solution, je ne savais vraiment pas quoi foutre. Si j’avais dit à mes darons que je ne voulais plus faire ça, ils m’auraient dit : « Tu retournes à Saulieu et tu reprends le bureau de tabac ! » (rires). Je suis donc allé en BD et j’ai trop kiffé ! J’ai découvert plein de trucs d’un coup. Un des premiers livres que j’ai lu c’était Blast de Larcenet. C’est un assez gros choc quand tu passes de tes souvenirs de Spirou à Blast ! Ensuite, je suis tombé sur tout Winshluss et j’ai enchaîné avec Vivès, les Gus de Blain. Tu passes de références très sombres, Blast, à d’autres, très colorées comme Gus, un peu à la manière de tes deux facettes, de tes deux façons de dessiner. C’est que tu veux tout essayer, tout expérimenter ? Je n’ai pas envie de me faire chier à faire un même style toute ma vie. J’essaye de trouver un style qui correspond à ce que j’ai envie de raconter, trouver un dessin qui va dans le sens de l’histoire.
Comment est-ce que tu as intégré la team Fluide Glacial ? J’avais fait le concours Jeune Talent du festival Quai des Bulles à Saint-Malo, en 2015. Il y avait une grande exposition-rétrospective pour les 40 ans de Fluide. J’avais fait dédicacer un Shark Book par Julien Solé et il m’avait dit que toute l’équipe Fluide irait boire un coup, en mode juste entre eux, plus tard à l’expo. Je suis allé à l’expo, au moment où ça allait fermer, je me suis planqué derrière un panneau. La sécurité a fait sortir tout le monde et moi, je suis resté planqué à l’intérieur ! J’ai attendu 20 minutes, la team Fluide est arrivée, ils étaient une vingtaine, ils ont bu du rouge, ont fait le tour de l’expo. Je suis allé vers eux, je me suis fait tout petit. Tout le monde me regardait bizarrement (rires). J’ai attendu que le rédac' chef, Yann Lindingre, ait fini de dire bonjour à tout le monde et je suis allé le voir pour me rencarder avec lui le lendemain. Il était d’accord. Le lendemain, je lui ai montré mes planches, ça ne l’intéressait pas trop pour Fluide mais il m’a conseillé de les présenter au concours Jeune Talent d’Angoulême, qui avait lieu quelques semaines après. Je suis sélectionné et je revois Lindingre là-bas. Il arrive, il me traîne dans un endroit où il y avait tous les dessinateurs de Fluide. Et il faisait comme ça : « Tiens Édika, tu connais pas ? Je te présente Yannick Grossetête. Tiens Solé... » Il me présentait à tous les auteurs que je kiffe trop. (rires) Après seulement, il me dit : « En fait, tes trois planches, je vais les prendre pour le magazine. » Et on a fini par se bourrer la gueule avec Winshluss ! Tu as un rapport avec Tony Chapron, c’est toi qui a scénarisé sa balayette ? J’avoue, ouais… c’est génial ce qu’il a fait : le mec tacle le joueur et lui fout un carton rouge après ! C’est quasiment une histoire que tu racontes dans ton livre, lorsqu’un arbitre colle un coup de tatane à un joueur pour être certain qu’il est blessé. Oui, c’est vrai j’ai pensé à ça. Si ça se trouve Tony Chapron l’a lue… // M.R.
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L’AMI FRITZ 60 ans de bières, grosses saucisses et transition énergétique entre Bourgogne et Rhénanie-Palatinat. Par Marion Payrard et Axelle Gavier, à Dijon Photos : Maison de Rhénanie-Palatinat Illustration : Juliette Payrard
L’année 2018 n’est pas seulement celle de la Coupe du monde en Russie ou des JO d’hiver. C’est aussi, et surtout les 60 ans de jumelage entre Dijon et Mayence. 60 ans d’amitié et de ripaille, qui ont engendré la création de plus de 200 alliances entre communes, régions, écoles, institutions… Sparse fait le point et te livre les témoignages des plus fins connaisseurs sur le sujet.
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oi aussi, tu éprouves une pointe de nostalgie au souvenir brumeux de ces cours d’allemand où tu somnolais discrètement, le dos collé au radiateur au son des der, die, das, die ; ou de ce frisson d’excitation ressenti face à Gretchen, ta correspondante allemande de 4ème, blonde et charnue. Toi aussi tu te souviens de
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Good bye Lenin, visionné à chaque fin d’année et seul film germanique que tu serais capable de regarder en VO encore aujourd’hui. Ton estomac se rétracte légèrement quand tu revois le käse et la charcut, présentés dès le réveil lors de tes voyages au pays de la Mannschaft et de l’Oktoberfest. Et c’est avec un léger haut-le-cœur que tu te remémores le
goût des würste sauce moutarde cheloucurry-choucroute mangées avec les doigts et arrosées de bières dans les rues de Mayence, Trèves ou Kaiserlautern. Eh bien sache que ces joyeusetés, tu les dois à une histoire d’amour vieille de presque soixante ans entre la France et l’Allemagne, entre la Bourgogne et le Land (une région administrative) de
Peter Altermeier, ancien ministre-président de Rhénanie-Palatinat et le chanoine Kir.
BFC - RHEINLAND-PFALZ : UNE VIEILLE HISTOIRE D’AMOUR. WEIN SAGT DIE WAHRHEIT (LA VÉRITÉ EST DANS LE VIN). En effet, il semblerait qu’après trois guerres en moins d’un siècle, les États français et allemand aient finalement renoncé à répondre à la question : « qui a la plus grosse ? ». Ainsi, les jumelages entre les villes/départements/ régions des deux pays sont le fruit d’une politique commune d’après Seconde Guerre mondiale. Dans un premier temps, ils sont établis pour créer un rapprochement entre la France et l’Allemagne. On envoie alors des Allemands et notamment des Rhéno-palatins dans l’héxagone afin qu’ils rencontrent des Français dans un contexte n’impliquant pas
1946 : Création du Land de Rhénanie-Palatinat par le pouvoir français occupant la zone sud-ouest de l’Allemagne. 1950 : Montbéliard est la première ville française à établir un rapprochement avec une cousine allemande. 1953 : Premières étapes du rapprochement entre la Bourgogne et la Rhénanie-Palatinat. 1957 : Création de l’Amicale Bourgogne/RhénaniePalatinat sous l’égide du chanoine Kir et de son légendaire penchant pour la boisson. 1958 : Les deux capitales régionales, Dijon et Mayence, sont jumelées. 1962 : Signature d’une charte officialisant le jumelage entre Bourgogne et Rhénanie-Palatinat, alors même que la région Bourgogne n’existe pas encore en tant qu’entité administrative. 1990 : Création de la Maison Rhénanie-Palatinat à Dijon, dirigée par Till Meyer. 1997 : Une déclaration commune pose l’intensification de leur coopération dans le contexte d’une Europe des régions. 2016 : Fusion entre la Bourgogne et la Franche-Comté, qui intègre le jumelage.
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le port du casque à pointe. Une zone importante située dans le sud-ouest du pays échoit à la France qui y crée notamment, en 1946, le Land de Rhénanie-Palatinat. Rheinland-Pflaz en VO. Progressivement, les relations entre les deux pays se resserrent et aboutissent au traité de l’Élysée en 1963, qui les entérine et les encourage. Le premier couple franco-allemand est né, et il est plutôt sexy. Pour Nathalie, professeure d’allemand, « l’idée d’Adenauer et de Charles de Gaulle est à la fois très simple – parce que nous n’avons pas connu la guerre – et évidente, mais surtout extrêmement audacieuse et courageuse pour l’époque, étant donné les circonstances : faire se rencontrer des jeunes afin d’éviter de futurs conflits. Qui aurait envie de prendre un fusil pour aller tirer sur ses amis ? ». Mais bien avant les soirées schnitzel-potau-feu à l’Élysée, c’est d’abord sous le signe de la saucisse que les liens se sont resserrés. Montbéliard est en effet la première ville française à avoir établi un jumelage avec une cousine allemande : Ludwigsburg dans le Bade Wurtemberg – un gros Land situé le long de la frontière alsacienne –, grâce à l’initiative de Lucien Tharradin,
alors maire de la ville et sénateur du Doubs. À l’heure où la question de la décentralisation est loin d’être à l’ordre du jour, cet ancien résistant déporté est l’un des premiers a avoir fait la promotion d’une amitié naissante entre les États français et allemands à l’échelle locale. Suite à la rencontre avec son homologue germanique de Ludwisburg, les deux hommes établissent un partenariat entre leurs villes en 1950, malgré les réticences de leurs concitoyens. Et c’est finalement le ballon rond qui fait fondre la glace, puisqu’en 1951 les équipes junior et vétéran du FC-Sochaux-Montbéliard et de la Sportvereinigung 07 s’affrontent d’abord à Ludwigsburg puis au stade Bonal de Montbéliard. Depuis, c’est l’amour fou et les projets continuent encore aujourd’hui à fleurir entre les deux villes. Si le sport apporte la première pierre à l’édifice de la collaboration entre BourgogneFranche-Comté (BFC) et le Land allemand, c’est indéniablement une passion commune pour la bibine qui pose la deuxième. En 1953, le chanoine Kir, alors maire de Dijon et désormais mondialement (et nommément) reconnu pour son lever de coude, reçoit un comité de journalistes de Rhénanie-
Palatinat, puis le maire de Mayence. S’en suit la visite d’une délégation de pas moins de 28 maires bourguignons outre-Vosges et la venue en Bourgogne de Peter Altmeier, ministre-président de Rhénanie-Palatinat, qui est intronisé Chevalier du Tastevin au Clos de Vougeot (comme quoi…). Ces premières amorces débouchent sur un ensemble d’initiatives et de nombreuses réjouissances toujours largement arrosées. Selon Till Meyer, directeur de la Maison RhénaniePalatinat à Dijon – qui préfère le Gevrey-Chambertin rouge et le Meursault blanc mais n’est pas contre un petit Riesling – le premier point commun entre les deux régions est lié à leur caractère viticole. « Ce qui a aidé c’est aussi qu’ils ont picolé ensemble » appuie-t-il. Sans blague. Félix Kir à l’initiative d’un jumelage centré sur deux régions de vin, c’est le top de la Glaubwürdigkeit (crédibilité dans la langue de Goethe). Et c’est en grandes pompes, dans ce terreau offrant un terrain fertile aux gammas GT qu’en novembre 1957, l’Amicale Bourgogne/Rhénanie-Palatinat est fondée, entérinée en 1962 à l’occasion du bimillénaire de Mayence.
LES BASES DU JUMELAGE, WAS IST DAS RUE BUFFON? Depuis, de nombreuses actions de partenariat ont été mises en place auxquelles participent activement des dizaines de villes et de villages de Bourgogne et même de FrancheComté, puisque depuis la fusion avec la Bourgogne en janvier 2016, celle-ci a rallié le partenariat avec la Rhénanie-Palatinat. Au total, plus de 200 communes de la nouvelle région sont désormais jumelées avec des Städte et Dörfer rhéno-palatins. C’est par exemple le cas de Blaisy-Bas en Côte-d’Or, qui honore chaque année son alliance avec Undenheim à travers une foire franco-allemande célébrant le meilleur et le pire du folklore des deux
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régions. Mais le lien établi ne se traduit pas uniquement par l’organisation de festivités. De nombreux programmes d’échanges scolaires, universitaires, linguistiques, politiques, écologiques ont été instaurés. Et le premier lieu à faire la synthèse des ambitions bourguigno-rhéno-palatines, c’est la Maison Rhénanie-Palatinat, fondée en 1990 et dirigée donc par Till Meyer, européen convaincu et consul honoraire d’Allemagne depuis 1994. Ce lieu, tu le connais certainement pour son initiative annuelle dont le doux nom de « Was ist das rue Buffon ? » a laissé la place dans l’esprit de certains au titre de « fête de la saucisse et de la
bière ». Mais laissons une fois encore de côté la question des réjouissances alcoolisées pour se pencher sur ses autres missions. Hébergé rue Buffon dans un hôtel particulier prêté par la région, ce parangon de Heimat pour expatriés propose donc, entre autres, une aide à ses concitoyens installés dans la région, mais aussi des cours d’allemand, une bibliothèque bilingue, un programme de manifestations culturelles et un concours d’histoire centré sur la question des conflits franco-allemands et leur résolution. Comme quoi, même 70 ans après, on continue à éprouver le besoin de se dire pourquoi on s’aime.
Décembre 1995, l’équipe de la Maison de RhénaniePalatinat, boulevard de Brosses à Dijon. Till Meyer, le consul, au fond à droite. Wunderbar !
QUOI DE NEUF APRÈS 6 DÉCENNIES D’AMOUR ET DE BIÈRES FRAICHES ? En l’espace de bientôt 60 ans, les coopérations entre le Land de Rhénanie-Palatinat et la Bourgogne ont bien évidemment subi quelques mises à jour. C’est notamment le cas avec la Maison de la Bourgogne à Mayence : celle-ci relevait davantage d’une « émanation de la Bourgogne »
nous rappelle Meyer, et si des actions ont été mises en place pour valoriser la région, elles n’étaient pas équivalentes aux initiatives de la Maison RhénaniePalatinat à Dijon. Quelque peu à l’étroit à son arrivée en 1994 et écrasée par l’Institut Français déjà en place, la structure bénéficie depuis septembre
2017 de nouveaux locaux et de la glorieuse dénomination de Maison de la Bourgogne-Franche-Comté. C’est lors de son inauguration, face à 250 personnes, que Hendrik Hering (président du Landtag) confiait les clefs symboliques aux bons soins de Marie-Guite Dufay (présidente de la région Bourgogne-Franche-Comté) tandis que la seconde remettait au premier un drapeau avec le blason de notre région. Hé oui, la BFC a désormais des armoiries (conçues par l’historien héraldiste Rémi Mathis), qui flottent d’ailleurs glorieusement sur l’hôtel de région à Besançon. Un nouveau point s’ajoute à la liste déjà fournie des échanges existants, autour d’une problématique phare de cette dernière décennie – n’en déplaise à la limace orange siégeant à la Maison blanche et autres climatosceptiques : les enjeux climatiques. Transition énergétique et protection du climat via le renforcement des énergies renouvelables constituent désormais une priorité pour la région. Une délégation se rend à Mayence fin mai 2017 et signe dans la foulée une déclaration commune en présence d’Hendrik Hering – décidément toujours là où il faut être. La Maison Rhénanie-Palatinat a de son côté mis en place un volontariat écologique franco-allemand.
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ET L’EUROPE DANS TOUT ÇA ? La question de l’Europe a également été abordée lors de l’inauguration de la Maison de la BFC avec l’idée de mieux « associer les citoyens à la construction européenne ». Cette thématique fait l’objet d’un dialogue citoyen pour l’année 2018 et les propositions qui en découleront seront normalement rendues publiques le 9 mai, à l’occasion de la journée de l’Europe. On tient là le tout premier débat citoyen binational organisé sur
le vieux continent, « voire le premier en général » se réjouit Marie-Guite Dufay. Une nouvelle preuve que ce partenariat est définitivement à l’avantgarde. À un level supérieur en terme de médiatisation, Macron et Merkel présentaient un discours similaire pas plus tard qu’en janvier dernier (à l’occasion du 55ème anniversaire du Traité de l’Élysée), en réaffirmant leur détermination à approfondir la coopération entre les deux États. Cette
volonté de valoriser l’Europe n’était d’ailleurs pas passée inaperçue auprès des citoyens allemands au cours des élections présidentielles, et semble bien s’accorder avec les initiatives du Printemps de l’Europe – lancé il y a 10 ans par la ville de Dijon dans le but de « placer l’Europe et sa construction au cœur des priorités de la capitale de la Bourgogne-Franche-Comté » et qui célébrera justement cette année les 60 ans de jumelage avec Mayence.
ALLEMAGNE UN JOUR, ALLEMAGNE TOUJOURS On ne pouvait parler de cette union sans évoquer les liens qu’elle a contribué à tisser au sein de plusieurs écoles des deux régions. Et ce à tout âge (ou presque). En plus d’enseigner
l’allemand au collège Marcelle Pardé depuis 16 ans, Nathalie est aussi en charge du jumelage depuis autant d’années. L’échange permet notamment aux élèves d’accueillir
un correspondant allemand pendant une semaine et vice-versa. « Une expérience dont ils se souviennent », assure-t-elle, et qui booste l’apprentissage de l’élève lors de son
1996, inauguration des locaux rue Buffon à Dijon. Wo ist Walter ?
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1950 : Montbéliard est la première ville française à établir un rapprochement avec une cousine allemande.
propre séjour. « Apprendre l’allemand entre quatre murs n’est pas chose aisée… (...) Même si nous nous évertuons à rendre l’apprentissage très concret, j’imagine que beaucoup se demandent à quoi ça sert. Mais, lorsque cet élève se retrouve dans une famille – et j’insiste sur cette particularité de l’échange, par rapport aux voyages organisés –, seul, avec des difficultés à comprendre et, pire encore, à s’exprimer, il y a une prise de conscience, c’est indéniable. » Du côté des facultés, l’université de Bourgogne et l’université Johannes Gutenberg de Mayence proposent des cursus intégrés bi et trinationaux depuis 2001, sous l’égide de l’université franco-allemande. L’obtention du
double diplôme – et la possibilité de voyager au Canada qui fait partie du cursus – est un argument de poids pour de nombreux étudiants. Ces derniers choisissent alors de privilégier ce cursus à Erasmus, puisqu’il n’est pas possible de bénéficier des deux programmes au cours d’une même scolarité. Pour d’autres, la question ne se pose même pas. Pour Mélissa, française et étudiante en double licence Histoire et Lettres modernes, il s’agissait d’une suite logique : « j’ai fait un Abibac (abitur, bac allemand + bac français) au lycée, j’étais constamment baignée dans deux langues. Le programme de l’université franco-allemande me convenait donc parfaitement. » Après avoir étudié à
Mayence d’octobre 2016 à août 2017, elle projette d’y retourner pour une année complète dès avril prochain. Güdrün, native d’Allemagne, est présente à Dijon depuis septembre 2016 et ne montre aucune hésitation à ce sujet : « comme le cursus intégré existe seulement entre Mayence et Dijon (pour la France ndlr), j’ai absolument voulu le faire dès que j’ai su qu’il existait, je n’ai même pas réfléchi à partir dans d’autres villes (...) je ne regrette rien. Pourtant j’ai déjà vécu trois mois dans la région parisienne et un an en Alsace. »Dans les dents, Paris. La jeune Allemande qui ambitionne de travailler dans l’enseignement songe même à revenir en Bourgogne pour son master.
GÉNÉRATION ERASMUS En 2014, un article de Libération portant sur les 25 ans d’Erasmus était joyeusement relayé sur la toile. Celuici évoquait les bénéfices du programme d’échanges au profit de plus de 3 millions d’étudiants, notamment sur le plan professionnel – en favorisant esprit d’entreprise, mobilité, maîtrise des langues – mais aussi, plus étonnant, sur le plan sentimental. En effet, selon la Commission européenne, le programme aurait contribué à la naissance de plus d’un million de bébés depuis sa mise en route. À l’occasion des 30 ans d’Erasmus, célébrés à l’automne 2017, ces chiffres étaient abondamment repris à travers plusieurs
médias, et à nouveau mis en avant par le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker. On a même eu droit à une sublissime exposition dans les couloirs de la gare Montparnasse, portant le doux nom de Union(s) européenne(s) et célébrant l’amour sans frontière via quelques portraits de famille et des témoignages non moins sirupeux. Point intéressant, bien que purement subjectif : la plupart des photos laissait entrevoir que pas mal de Français au physique ordinaire avaient trouvé le moyen de s’acoquiner avec des étrangères autrement plus sexy. Aussi ridicule soit-il, il semblerait que l’accent français fasse
toujours autant de ravages parmi la gent féminine internationale. On ne saurait trop recommander aux forumeurs de jeuxvideo.com de tenter leur chance hors du territoire français mais on doute fort qu’ils nous lisent. Quoiqu’il en soit, personne, ni M. Juncker, ni les nombreux médias qui se sont fait l’écho de la bonne nouvelle n’ont rappelé que Libération avait entrepris de nuancer ces propos : l’estimation chiffrée était en fait l’extrapolation d’une donnée piochée dans l’étude, et le fameux « million » de bébés Erasmus n’y figuraient pas à proprement parler.
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Was ist das rue Buffon, meilleur biergarten de la ville.
AMOUR, GLOIRE ET SPÄTZLE La France est dans le top 3 des destinations Erasmus, précisément derrière l’Espagne, et l’Allemagne. Les étudiants de ces trois pays sont donc ceux qui voyagent le plus à l’étranger. Et si on suit la merveilleuse logique de l’étude susmentionnée, ceux qui sont les plus amenés à se reproduire entre eux. Est-ce également le cas pour le cursus intégré à l’échelle BourgogneFranche-Comté/RheinlandPfalz ? Dans certains cas, c’est l’association des deux qui permet les coups de foudre impromptus. Leona séjournait à Dijon dans le cadre du cursus intégré lorsqu’elle
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a rencontré celui qui est devenu son mari lors d’une soirée quizz (arrosée ?) à la Maison Rhénanie-Palatinat. Comble de l’ironie : « J’étais partie à Dijon dans l’espoir de rencontrer un Français, mais voilà je suis tombée amoureuse d’un étudiant allemand qui passait une année Erasmus à Dijon ». Pour ce qui est du cursus intégré, il a profité à Mélissa et Güdrün, toutes
les deux en couples, avec un Allemand depuis mi-juin pour l’une, et un Français depuis avril 2017 pour l’autre. Si Mélissa, très pragmatique, considère que le partenariat n’a joué aucun rôle dans cette rencontre, Güdrün adopte la position inverse et se montre beaucoup plus enthousiaste. La rencontre s’est d’ailleurs faite via une application. Tinder ? Happn ? Raté.
Aussi ridicule soit-il, il semblerait que l’accent français fasse toujours autant de ravages parmi la gent féminine internationale.
L’élu de son cœur était présent sur Jodel (à prononcer Yodel). Créé en 2014 en Allemagne, ce réseau social ne nécessite ni profil ni inscription, et permet de commenter ce qui se passe autour de vous. Et sur les campus, la matière ne manque pas, d’où peut-être la grande popularité de Jodel auprès des étudiants. S’il y a une chose sur laquelle les deux jeunes femmes s’accordent, c’est bien la richesse que cette relation binationale leur apporte. « Ce n’est pas un obstacle, cela apporte même quelque chose de
plus » avance Güdrün. Et Mélissa de renchérir : « c’est un échange culturel à chaque instant, un échange extrêmement riche. (...) Notre relation nous permet d’avoir un point de vue ouvert sur les façons d’être, de se conduire, d’avoir, qui existent entre l’Allemagne et la France. » Du côté du collège de
Nathalie, il se dit qu’une ancienne amourette, née lors d’un échange entre deux élèves de Marcelle Pardé et du Schlossgymnasium de Mayence, a même abouti à un mariage… Preuve ultime que même les flirts adolescents peuvent tenir la route.
Une saucisse.
Même 70 ans après, on continue à éprouver le besoin de se dire pourquoi on s’aime.
Ce qui s’annonçait donc comme un moyen d’apaiser les cœurs et les esprits marqués par la Seconde Guerre mondiale a finalement ouvert l’opportunité, pour les représentants de près de trois générations, de se lier solidement les uns aux autres. Rhéno-palatins et BourguignonsFranc-Comtois ne considèrent plus la région partenaire comme
une destination touristique mais véritablement comme une seconde patrie, aux dires de Till Meyer, qui se décrit lui-même comme un enfant de l’Elysée. « Chaque action qui peut rendre l’Europe plus visible et compréhensible serait un grand pas » ajoute le directeur, confiant. Cependant, si le jumelage entre les deux régions semble aujourd’hui
gravé dans le marbre, il a déjà été remis en question, notamment par les partisans de la France aux Français (et de la Bourgogne aux Bourguignons). Alors, au lieu de franchir le point Godwin, continuons plutôt à traverser les Vosges et à cultiver ce que les Allemands appelleraient la Fremdenliebe : l’amour des étrangers. // M.P. et A.G.
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Plan Le Pautre, 1696.
Voilà un grand fantasme d’historien : à quand remonte précisément la naissance d’une ville ? On a envie d’imaginer que Dijon, puisqu’elle est devenue capitale, a toujours été des plus vieilles et des plus grandes cités de la région. Que son histoire remonte à la nuit des temps, ceux des tribus primitives, puis que s’est installé là un charmant petit village gaulois, transformé peu à peu, au fil de siècles de romanisation, d’évangélisation, d’industrialisation et de consommation...
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Dans les entrailles de la ville antique.
En vrai, ça date de quand Dijon ? Par Lilian Elbé, à Dijon Photos : Lilian Elbé et Bibliothèque municipale de Dijon
S
auf que de la véritable origine de Dijon, on n’a aucune information. La ville n’est même pas citée dans la Guerre des Gaules de César. Elle ne figure pas non plus sur les premières cartes de l’époque, alors que Langres, si. Dur. Ne serait-elle pas si ancienne ? En tout cas, il n’en reste rien, pas un vestige de construction gauloise ou antérieure n’a jamais été découvert dans les sous-sols de la ville... Mais la plus ancienne trace in situ connue à ce jour cache peut-être la réponse. Au beau milieu du cœur historique, à quatre mètres
sous terre, filent les vestiges d’un long rempart circulaire, d’1,2 km de long, qui mesurait autrefois 9 mètres de haut : le castrum divionense. Divionense1 → Divio → Dijon. Tu l’as. Problème, sur ce castrum, on n’a presque aucune information, et, très peu étudié, il n’est pas du tout préservé. On n’est même pas certain de son tracé global, du type de vie qui se déroulait en son sein, ni de quand il date très précisément. A-t-il été construit pour protéger l’hypothétique premier village de Divio ? Lui seul pourrait en tout cas livrer les réponses quant aux origines de la ville, en sous-sol. Avec sa lampe torche et son master d’archéologie, Clément Massus-Minvielle, jeune historien dijonnais, a fouillé pendant plusieurs années des dizaines de caves dijonnaises à la recherche des vestiges de ce castrum divionense, pour tenter de livrer enfin une date de naissance à Dijon. Nous, on l’a suivi dans quelques-unes de ces caves. Aujourd’hui, il publie un livre synthétisant toute son enquête, Les Mystères du Castrum de Dijon. Entretien.
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A
vant toute chose, qu’on soit bien d’accord, ce rempart n’est pas celui qui entoure l’actuel vieux Dijon, le centre-ville classé ? Non, c’est bien plus ancien que la construction de l’enceinte de 90 hectares dont on voit aujourd’hui les ruines rue de Tivoli, rue Berlier ou rue Diderot. Cette dernière a été construite suite à l’incendie de la ville en 1137, quand Dijon devient la ville médiévale qu’on connaît, riche, avec une vie civile intérieure. Le castrum, plus ancien, mesure seulement 11 hectares de superficie. La ville médiévale s’est construite plus tard dans, et autour de lui. Il part du palais des Ducs au nord et s’arrête au niveau de la place des Cordeliers pour la partie sud. Et qu’a-t-il de particulier, ce rempart ? C’est le plus ancien édifice visible connu aujourd’hui à Dijon. On a certes trouvé lors de fouilles d’autres morceaux d’édifices, des blocs de pierre taillés d’ornements, souvent des fragments de façades de bâtiments, qui datent du Haut-Empire2, donc du Ier, IIe siècle. Problème, ils servaient déjà à chaque fois de blocs de pierre de ré-emploi, pris dans les fondations d’une construction très ancienne. On ne sait donc pas du tout situer l’origine de ces blocs puisqu’ils sont totalement sortis de leur contexte archéologique initial. Impossible de prouver que les constructeurs de ces monuments se sont servis de ruines antiques trouvées sur place, dans Dijon, ou importées d’ailleurs ! Mais qu’y avait-il dans cette enceinte de 11 hectares ? On ne sait pas précisément. Mon interprétation est que le castrum est à l’origine, au IIIe siècle, un camp militaire plus qu’autre chose. Castrum tient d’ailleurs son origine des camps militaires romains.
IIIe siècle seulement ? C’est plutôt tardif... Il n’y aurait donc rien eu à l’emplacement de Dijon avant cette
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date ? Même pas un petit point sur une carte ? Effectivement, la ville n’avait pas à l’origine une importance très évidente. Tout ce qu’on sait de Dijon durant le Haut-Empire, c’est qu’à cet endroit il y avait une large voie romaine, la voie d’Agrippa, qui partait de Chalon. On trouve aujourd’hui les soubassements de cette voie au parc de la Colombière. Mais sur la carte, point de Dijon, ni même de castrum. Simplement, si on regarde de très près, son tracé semble dévier de 500 mètres pour se rapprocher de l’emplacement du castrum. De là à dire que c’était une cité étape, commerciale... On n’en a toujours aucune trace ! Alors quand on débarque sur le territoire vers le milieu du IIIe siècle, on se dirige vers quelle ville importante ? Vers Autun surtout. C’est LA ville capitale de l’époque, indépendante du territoire d’influence de celle de l’évêché de Langres, au nord. Autun se voulait à l’époque l’égale de Rome en France, avec énormément d’établissements gallo-romains. Sa muraille était grande, décorative, ostentatoire. Mais d’autres villages à quelques dizaines de kilomètres, comme Mâlain, même si on n’y trouve plus aujourd’hui une seule boulangerie, étaient des villes florissantes à l’époque ! Et dans les écrits, quand apparaît
Tour ancienne du castrum, dernière visible depuis l’extérieur. Dans celle-ci, Saint-Bénigne a célébré les toutes premières messes chrétiennes à Dijon, illégalement, en scred’, avant de se faire prendre et de mourir en martyr.
Dijon pour la première fois ? C’est Grégoire de Tours, évêque de Langres, qui mentionne pour la première fois Dijon au VIe siècle, sous l’appellation castrum divionense. Il fait le récit de son voyage, et décrit en arrivant une bourgade qu’il adore, entourée d’un castrum qui lui semble dater du IIIe siècle, avec 33 tours réparties sur le périmètre de l’enceinte, des murs de 9 mètres de haut, avec 4,3 mètres d’épais. À l’intérieur des remparts, il décrit une ville importante du VIe siècle, une grande ville chrétienne. Mais prudence, en tant que religieux, il a tout intérêt à insister sur le nombre d’habitants, chrétiens, au sein de celle-ci. En vérité, c’était plus
une grosse place forte. Maintenant, des témoignages de vie sur place antérieurs à ça, on n’en a jamais eu ; on a eu des faux, aux XVIIIe/XIXe siècles. Des traces authentiques in situ, non. Des faux ? Parce que c’était vintage l’Antiquité à ce moment-là, c’est ça ? Oui, à l’époque romantique, les premiers historiens étaient davantage des chroniqueurs, des antiquaires passionnés, dont les écrits parvenaient à faire en sorte que des débris d’Antiquité, des blocs de pierre taillée le plus souvent, valent beaucoup d’argent. L’Antiquité est alors tellement à la mode que
les blocs gallo-romains retrouvés en ré-emploi dans des fondations de constructions du Bas-Empire, ont été achetés puis déplacés chez des riches particuliers, et donc une deuxième fois sortis de leur contexte. Il n’y avait pas de réglementation archéologique à l’époque. Ce qu’on trouvait, on le prenait, en payant éventuellement les ouvriers. L’hôtel de Vesvrotte à Dijon par exemple, construit à cette époque, a sa façade entièrement recouverte de blocs qui proviennent de nécropoles galloromaines du Haut-Empire. On les avait tout simplement retrouvés lors de la déconstruction des fondations d’une des tours du castrum fin XVIIe ! Les brocanteurs avaient donc tout intérêt à fantasmer une histoire très ancienne à Dijon dès qu’ils trouvaient quelque chose, pour vendre des pierres comme étant celles, authentiques, des tout premiers murs de la ville... Avec la formation archéologique que j’ai eue, j’ai appris à être modeste dans mes interprétations. Moi je ne veux pas montrer que la ville de Dijon a été importante par le passé, je veux montrer ce qu’elle a été vraiment, sans chauvinisme. J’adore cette ville, c’est pas le problème, seulement on n’a pas aujourd’hui la preuve qu’elle était florissante au début de l’Empire Romain !
Certes, il y a ces blocs antiques en fondation du castrum, mais rien ne prouve, encore une fois, qu’on les a trouvés sur place. Alors comment en es-tu arrivé à t’intéresser de si près à ce mur de presque 1.700 ans ? Quand j’ai débuté mes recherches, on m’a mis en garde, parce que c’est un « sujet chaotique ». Mais j’étais fasciné par le fait que pour une ville comme Dijon, qui a aujourd’hui la taille d’une métropole, on oublie totalement le passé romain. Ça m’avait agacé, je l’avoue, à l’époque, et je voulais que ces vestiges soient visibles pour le grand public. C’est un mur en effet, mais quand on analyse sa structure, on se rend compte qu’après l’ère romaine on ne sait plus en construire de pareil pendant presque mille ans. C’est typiquement romain, et ça transpire de l’histoire des personnes qui voulaient se protéger à cette époque des premières invasions germaniques, sous l’instigation de l’Empereur. Des castrum comme celui-ci, on en retrouve un peu partout en France. À Dijon d’ailleurs, la zone la plus épaisse du mur était d’ailleurs justement la partie est, parce qu’elle donnait vers la Germanie. Et il ressemblait à quoi ce mur ? Le castrum est un mur avec des assises bien formées, des moellons de même taille et un mortier de couleur rougeâtre, sur tout le tracé de l’enceinte. Mais la véritable observation que j’ai faite pendant mes recherches a été de trouver une façade décorée côté extérieur de la ville, qui n’avait pas été découverte avant. Elle se caractérise par une alternance de bandes de petites pierres rouges et de plus grosses, blanches. C’est donc ce qu’on voyait en arrivant à Dijon vers 275.
Clément Lassus-Minvielle au milieu des ruines du castrum sur l’emplacement de l’église Saint-Étienne. On distingue que les blocs taillés utilisés comme fondations lors de la construction du mur proviennent de ruines de nécropoles païennes antiques.
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Il faut se former en maçonnerie classique pour être historien du castrum ? Ah oui, il faut étudier les murs avant tout. Ce n’est pas le genre de choses qu’on apprend à l’école. Un de mes professeurs de l’époque m’a appris à « lire les murs » du mieux que je peux - et je ne sais pas encore tout, loin de là. C’est une discipline très compliquée qui est née il y a 20 ans : l’archéologie verticale. Mais elle ne permet pas d’obtenir une date précise, surtout quand des styles se rejoignent. Mais alors, outre la technique d’empilement, les décors, la justification de sa construction en pleine période d’invasions barbares, comment prouver que le mur date du IIIe siècle ? On utilise le carbone 14 pour ça, grâce au charbon retrouvé dans les mortiers. Résultat, pour Dijon, on a obtenu une date de plus ou moins 50 ans, donc entre 250 et 350 de
notre ère. 275 correspond au pic des invasions germaniques. On imagine donc que c’est sous l’impulsion de l’empereur Aurélien que cette muraille a été construite, mais on n’en a pas la preuve. Par la suite, la prise d’ampleur de la ville se fait véritablement lorsque l’évêché de Langres vient se réfugier à Dijon, et qu’un groupe cathédral se construit durant le Haut Moyen-Âge, après la chute de l’Empire romain. Tu me confiais qu’il n’y avait eu que peu de recherches archéologiques sur le castrum en lui-même. Son périmètre est tout de même tracé sur des cartes anciennes, et des plaques délimitent son enceinte dans les rues de la ville. On peut aussi observer une de ses tours encore élevée au fond d’une cour rue Charrue, et les vestiges des fondations du mur (construites avec des restes de blocs de façades gallo-romaines) sont bien visibles, in situ, au musée Rude. Toi, tu as
donc retrouvé des occurrences supplémentaires au fil du tracé, où le mur est toujours là, présent ? Oui. On a longtemps pensé qu’il ne restait qu’une tour visible sur les 33 supposées, décrites par Grégoire de Tours : celle de la rue Charrue. Dans mes investigations j’en ai retrouvées trois autres, plus toutes les portions de murs, en élévation extérieure ou en sous-sol. Mais je n’ai pas encore fait tout le tracé ! D’autres tours existent toujours, ont été repérées par le passé, lors de travaux, mais elles sont aujourd’hui à nouveau masquées derrière des constructions récentes. Elles existent, mais on ne peut plus les voir. C’est là toute la complexité : le castrum ne passe pas par les rues actuelles, il passe à travers les maisons, qui sont en vérité appuyées dessus. Au fil des siècles, on a retrouvé des témoignages anciens d’ouvriers qui ne voulaient pas s’attaquer à la déconstruction de murs romains. Les bâtisseurs ont donc fait avec, lors de la construction de nouvelles maisons contre ! Ainsi, en utilisant les images satellites, superposées au cadastre et au tracé supposé, j’ai pu retrouver un liseré qui joint les structures de manière régulière dans cette zone de l’hyper centre. Le mur est donc encore bien là, surtout dans sa partie est et sud. Et ensuite, à partir de ce liseré, de ce tracé, tu t’es mis en quête de visiter personnellement chaque cave ou lieu en sous-sol correspondant au périmètre, à la recherche d’un morceau de mur ? D’ailleurs, pourquoi les caves ? Parce qu’il faut descendre à une certaine profondeur pour retomber sur le sol de l’époque, en raison des réaménagements, des remblais au fil des siècles. Pour tomber sur la base du castrum, il faut descendre à peu près à trois-quatre mètres. En soussol, le mur que l’on voit est donc la base de l’élévation de l’époque. Mais il ne suffit pas de toquer à la porte des résidences pour qu’on nous ouvre, il faut quand même se faire connaître. Dans le centre historique c’est très difficile, parce que ce sont souvent des personnes qui sont effrayées par
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Pompéi-lès-Dijon.
sont enduits. Le mur ne redevient alors visible que si l’enduit finit par s’effriter et tomber. Mais quand un élément du castrum apparaît derrière, cela signifie que la cave est abandonnée depuis des décennies, et j’ai peur que la structure du mur finisse par disparaître d’une manière ou d’une autre. Ces caves sont en état de délabrement total. J’espère pouvoir véritablement faire quelque chose pour celles-ci. Comme ? Maintenant, j’aimerais monter une association de sauvegarde des monuments les plus anciens de la ville, pour les rendre visitables. Je ne veux surtout pas me porter en découvreur ou quoi que ce soit, je veux juste que tout ça soit connu, préservé. Il y aurait aujourd’hui trois caves pertinentes à racheter, deux montrant une tour et pour la troisième le fameux mur décoré, les plus intéressantes à visiter. Et puis pourquoi pas donner des cours pour les adhérents à l’association, qui souhaiteraient connaître un peu plus l’architecture ancienne... les inconnus. J’ai alors utilisé une astuce qui consistait à me faire accompagner de ma femme pour me faire ouvrir la porte... On ouvre facilement à une femme, très difficilement à un homme ! D’autres fois j’ai procédé par courrier, en contactant les offices de notaires ou les syndics, et les gens m’ont répondu assez facilement. Mais dans le livre, je ne mentionne volontairement pas certains numéros de rue pour ne pas inciter n’importe qui à pénétrer dans des résidences privées. Et donc, sur place, dans ces dizaines de caves, quand tu
constates enfin la présence du mur, il y a quoi, un peu d’émotion ? C’est formidable oui ! Surtout quand on constate la présence effective d’un élément de mur ou de tour, présent sur le tracé et qu’on réalise que ça n’a pas été encore répertorié, on ajoute un pan de l’histoire locale ! C’est comme assembler des Lego, et finir par avoir l’image originelle de toute une structure totalement oubliée. Et constater l’alternance des couleurs rouge et blanc comme on pouvait le voir il y a 1.700 ans, ça, c’est aussi formidable ! Mais la plupart du temps je repars bredouille, car les murs des caves
Installé à son compte, Clément Lassus-Minvielle prépare actuellement un second ouvrage sur l’histoire de Dijon, toujours floue mais un peu moins, du VIIIe au XIIe siècle. En parallèle de ses recherches sur le reste du tracé du castrum, il propose aux amateurs des circuits de balades historiques dans toute la vieille ville. (→ dijonarcheo-tour.fr) // L.E.
Divionense : là où se rencontrent deux eaux, l’Ouche et le Suzon, en l’occurrence. Haut-Empire : période gallo-romaine prospère allant de 70 à 315 après Jésus-Christ, troublée par les invasions germaniques « barbares » vers 270. S’en est suivi le Bas-Empire, puis le Haut Moyen Âge en 476 après la chute de l’Empire Romain.
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psycho test
Par Nicdasse Croasky Illustrations : Hélène Virey
LE
CHOIX, C’EST
MOI ! Comme le réseau routier français, ta vie est blindée de ronds-points, avec des décisions à prendre à la pelle et aux conséquences parfois déterminantes pour le futur de l’espèce humaine ; genre, si tu as le doigt tremblant sur le gros bouton qui fait boum… Alors, avant que le glas ne sonne, Sparse te guide dans ce labyrinthe des carrefours de la vie et éclaire à la torche LED les méandres de ton inconscient : es-tu GPS tout tracé, fuite en avant ou à fond la caisse et on verra bien après ?
1. Comment choisis-tu ton candidat préféré à la présidentielle ? Δ Les promesses : y’a que ça de vrai. Tu votes pour le plus gros menteur, ton modèle. ■ 10 ans que tu tractes, dévoué pour ton parti. Quelle question ! ♦ Tu ne votes jamais. Le dimanche tu vas pêcher. Ο Tu votes blanc avec un bulletin signé de tes nom et prénom, qui rappelle que les politiques français sont de la merde, et qu’il faut tirer la chasse. 2. C’est la guerre et tu es résistant(e). Tu es choisi(e) pour LA mission suicide avec 0,5% de chance de revenir. C’est ça où le déshonneur. Que fais-tu ? Δ On t’avait promis une bonne planque, et on te demande de te suicider pour la cause ? À la faveur d’une pleine lune, tu te barres peinard(e). ■ Tu te vantes auprès de Cynthia/Kevin, qui, émoustillé(e), accepte enfin de coucher avec toi. En fait, c’est un(e) agent double. Tu es baisé(e) sur toute la ligne. ♦ Tu butes ton chef, sans doute un traître. Tu choisis Georges/ Josiane pour la mission, car trop proche de Cynthia/Kevin, ta/ton résistant(e) préféré(e). Ο Fan hardcore de Guy Moquet, tu pleures sur ta lettre d’adieu à maman et tu pars en souriant. 68
3. Ton voisin de métro, un papy, s’est assoupi. Il se fait braquo son portefeuille et toutes ses thunes. Δ En voulant interrompre les lascars, tu fais tomber le p’tit vieux qui se fracture les cervicales. ■ Tu finis de lui faire les poches discrétos, te rendant compte qu’ils en ont laissé. ♦ Tu pousses un cri porcin pour donner l’alerte, attirant sur toi l’attention des braqueurs. Ο Tu fais semblant de dormir jusqu’à l’arrêt suivant et tu te tires vite fait, bien fait. 4. Ta femme/Ton homme te tanne depuis des mois pour avoir un quatrième gosse. Elle/Il finit par te coller un ultimatum. Que faistu ? Δ Dans ton contrat de mariage, il est écrit en capitales « 4 GOSSES SINON DIVORCE ET FRAIS DE PENSIONS INDÉCENTS ». Tu l’aurais lu avant de signer... Mais tu n’as qu’une parole. ■ Tu sors acheter des cigarettes et tu disparais à tout jamais. ♦ Incapable de rester ou de partir, tu craques et sous forte pression, tu assassines toute la famille. Ο L’écran plat a dix ans. La prime de naissance tomberait à point. Tu dis banco, des étoiles 4K plein les yeux. En cas de divorce, tu gardes l’écran, elle/lui le gosse. 5. Génial, tes parents divorcent. Tu choisis de partir avec ton père
ou ta mère ? Δ Tu fugues loin de ce boxon et demande l’asile en Suisse, pays neutre.
■ Ta mère, pour l’aider à supporter la dépression dans laquelle elle sombre inexorablement. ♦ Ton père, car se sentant le plus coupable, tu sais qu’il achètera au prix fort ta loyauté. Ο Tu es en fait confié(e) à papy/mamy. Tu as révélé que papa roulait des galoches à la nounou… Tout le monde te déteste.
6. Tes meilleurs amis déménagent et ont crucialement besoin de
ton aide. Tu es : Δ En mode vengeance. En croisant leur nouveau proprio, tu lui racontes que c’est un miracle s’ils ont pu choper cet appart’ ! Vive Photoshop pour truquer les fiches de paye, et les clébards qui vont tout saloper… ■ Trop confiant(e) : tu fermes les yeux dans les escaliers, les bras chargés de cartons. Bim, la porcelaine de Limoges, héritage familial, finit en miettes. ♦ Malheureusement coincé(e) le jour J dans des bouchons. Placidement, tu arrives alors que le dernier carton est déchargé avec une bouteille de ton meilleur rosé. Ο Acharné(e) à la tâche ! Tu finis la journée cloué(e) au lit, le dos en vrac, quand les autres se tapent le barbeuq' de l’année.
> Maximum de A
Tu es un(e) (sale) traître
C’est ta nature. Si le vent change de sens, pourquoi pas toi ? Ton panthéon personnel est rempli des grandes figures historiques qui ont retourné leur veste pour leur profit personnel : Eric Besson, Judas, le capitaine du Costa Concordia, le Schtroumpf noir… En revanche, la culpabilité c’est pour les traîtres ratés : toi, tu ne regrettes jamais. La preuve : tu recommences dès que possible. En contrepartie, tu ne restes jamais plus d’un an au même endroit, vu que tu finis par te mettre tout le monde à dos. Comme Gérard Klein dans L’Instit, tu sillonnes les routes de France sur ta moto, en quête d’un endroit où te poser, et recommencer. Conseil code de la route. Les demi-tours dans les ronds-points, c’est dangereux, surtout par temps de brouillard. Allume tes feux et gaffe à tes arrières.
> Maximum de B
Tu es le roi/la reine de la gaffe
Tout le monde te trouve très très gentil(le) mais tu finis toujours par faire LA grosse connerie. Dès qu’on cherche des responsabilités, ton nom finit toujours sur la liste, en très bonne position. Peut-être qu’un jour durant ton enfance, tu t’es identifié(e) très secrètement à Pierre Richard, sans comprendre que les films, ce n’était pas la réalité. Te connaître est annonciateur d’une catastrophe à venir ; comme les aveugles, tu comptes sur les bonnes âmes qui t’aident à ne pas trop partir en vrille. Conseil code de la route. Les deux mains à 10h10, faites toujours le contraire de ce que vous pensez.
7. Tu surprends le conjoint de ton/ta meilleur(e) ami(e) en train de le/de la tromper. Que fais-tu ? Δ Alors que vous dînez entre amis, tu proposes soudain de jouer au jeu de la vérité. Malgré les regards haineux que tu reçois, tu te ressers sans broncher du tajine. ■ Tu prends ton ticket : trompé(e) un jour, trompé(e) toujours. Et là au moins ça reste entre amis ! ♦ Tu lui racontes tout sans broncher. Il/elle doit savoir, même si ça doit vous éloigner. Ο Pour ne plus jamais les croiser, tu fais le mort. Tu choisiras mieux tes amis à l’avenir. > Maximum de C
8. Ton/ta patron(ne) se crashe en moto et finit en miettes à
l’hosto. Il/Elle te demande de tenir la boîte, vaille que coûte. Δ Tu lui promets les yeux dans les yeux, et tu donnes tout ! Ton/ta chéri(e) finit par se barrer, ta vie privée est un vieux souvenir… Tu finis en burn-out, mais au moins, ton/ta boss n’a pas tout perdu. ■ Tu démissionnes. Grâce à Pôle Emploi, tu espères trouver ta vraie voie. ♦ Tu dis oui, mais tu penses non. Paralysé(e) par la tâche, tu bois bientôt trois litres de vin par jour, et tu finis aux 3D : dépôt de bilan, dépression, disparition... Ο Tu te tapes déjà son mec/sa meuf. Tu vas jusqu’au bout en liquidant sa boîte et en raflant le pognon. Jackpot.
Pour chaque question, entourez votre réponse et faites le total de vos A, B, C et D. Puis reportez-vous aux résultats. Δ
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1
A
D
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2
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A
Tu es le roi/la reine de la fuite
Comme l’eau, tu es insaisissable, on pense t’attraper, mais tu réussis (presque) toujours à t’enfuir. Ton signe zodiacal chinois est l’anguille. Tu as des warning plein la tête qui s’allument dès que tu te sens acculé(e), forcé(e) de choisir. Victime du syndrome du Titanic, tu cherches des issues de secours et des canaux de sauvetage partout où tu es. Trop de responsabilités, de charges, de contraintes… Toutes les raisons sont bonnes pour fuir les emmerdes. On ne peut pas te faire confiance. Conseil code de la route. Votre système de siège éjectable pour scooter nous intéresse.
> Maximum de D
Tu es le/la sauveur/se sacrificiel/le
Enfant, tu fixais dans les nuits étoilées la galaxie d’Andromède, cette princesse qui s’était sacrifiée en se donnant en pâture à un gros monstre dégoûtant pour sauver ses congénères de la famine. Au fond de toi, tu as toujours su qu’un jour, tu serais confronté(e) à un cul-de-sac de ce genre, où tu irais conscient(e) et heureux/se, malgré l’issue fatale… Mais fièr(e) d’être le(la) seul(e) à être assez tanké(e) pour y aller. Le mot « Dévoué(e) » est gravé sur ton front et on t’use jusqu’à la corde. Tant que tout le monde est consentant. Conseil code de la route. Arrêtez le bouche-à-bouche aux sangliers que vous renversez. Trop dangereux.
coup de coeur partenaire en partenariat avec Wiko
Portrait de la BFC qui bouge. À la rencontre de Djaysie Cheugnard, l'influenceuse Instagram la plus puissante de l'est de la France. Cette belle histoire commence à Brazey-en-Plaine, où la petite Djaysie et ses 14 frères et sœurs coulent des jours paisibles jusqu'au jour où Brian, le père/frère de Djaysie lui offre un smartphone pour ses 5 ans. C'était un Wiko Lenny 16 Go Or double antenne à clapet. C'était il y a 6 mois déjà. Elle découvre Instagram et se crée un compte. C'est le déclic. « Les photos, c'était trop rigolo », nous avoue-t-elle. Son compte est désormais suivi par 63 millions de personnes. Les moindres de ses faits et gestes sont scrutés par le monde entier depuis sa première vidéo, celle où elle utilise une kalachnikov dans les bois de la plaine de Saône avec son tonton. Ce jour-là, elle tue 6 bébés chevreuils. « J'avais mis un petit filtre 'perpetua' à mes photos pour donner du relief aux bambis morts ». Depuis, c'est une pluie de likes à chaque publication sur sa story : 'Comment se coller des gommettes sur les ongles', 'Mon petit-déjeuner avec mon Nin-nin', 'La reine des neige, cette pouffe', 'Jeremstar
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Djaysie, à ses débuts
est-il coupable ?', 'Papa boit 40 canettes de suite', etc. Des débats et des pavés dans la mare qui soulèvent l'engouement de sa génération. « Je pense, et pis après je mets tout de suite sur Insta ». Grâce à ses contrats pub' exclusifs avec Mattel, Dior et la fondation Hulot, Djaysie touche 6.000 euros net par mois, bénéficie d'une voiture de fonction pour son père et de tickets de parking en centre-ville. «Maman, elle dit qu'on est étranglés par les impôts ». Elle est devenue chroniqueuse sur NRJ12 et dans Salut les terriens aux côtés de Raquel Garrido, et reçoit des centaines de demandes en mariage par jour. « Monsieur Ardisson, il sent pas bon de la bouche », disait-elle dans sa dernière story à 5M de likes postée grâce à son nouveau Wiko Sunny 2 double SIM 8 Go Bleen. Son livre Comment investir offshore dans un contexte de fragilité des marchés sort le 19 avril. Un très bel exemple pour la jeunesse. // C.W.
VISUEL CRÉÉ PAR L’ÉTUDIANT BASTIAN PEYROUX À L’ISSUE D’UN CONCOURS INTERNE À L’ÉCOLE NATIONALE SUPÉRIEURE D’ARTQRcode DE13DIJON Dec 2016 Contre-Courant (https://www.facebook.com/bastian.wade)
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ACHAT EN LIGNE
Avec la participation de Chenôve Chevigny-Saint-Sauveur Fontaine-lès-Dijon • Longvic Marsannay-la-Côte • Quetigny Saint-Apollinaire • Talant
13 Dec 2016 - Contre-Courant - http://www.contre-ourant.com Contre-Courant 12, rue Georges Bizot - 44300 Nantes - France
avocats et associés
Toujours plus « full client » et «global acting », Sparse a racheté une des top lawfirm de TartLe-Bas, Sparse Legal and partners, pour proposer à ses lecteurs une rubrique de conseil juridique, digne de celle d’Auto Plus. Tu poses ta question, et tu as ta réponse. Cash ! Salut man. Je surkiffe ta chronique qui est vraiment au-dessus de celle des autres. Bon, avec les affaires #MeToo, #BalanceTonPorc, Hulot et tout ça, comme d’autres personnalités de la politique, des médias, ou du business, je me dis qu’aujourd’hui, quand tu pèses un peu, sauf à la jouer à la danoise, tu ne peux plus aborder le dating sur Tinder sans te protéger des risques de dénonciation ultérieure, après dissipation des vapeurs matinales, en cas de malentendu regrettable ou carrément de tentative de dépouille. Tu pourrais me rédiger un bout de contrat à faire signer à mon rendez-vous Tinder de jeudi prochain à Sombernon avant tout déballage de contenu explicite de ma part ? Emmanuel M., 39 ans
Maître Fougnard vous répond. Cher président, tu as raison de poser la question du recueil du consentement préalable de ton match Tinder, Angela, qui doit dans le contexte actuel être suffisamment explicite pour éviter des conséquences fâcheuses pour les deux parties. Se contenter d’exiger un consentement implicite pourrait être dangereux pour Angela ; si tu as mal interprété les signes implicites de son consentement, pris tes désirs pour des réalités ; et pour toi aussi, si Angela décide d’aller plus tard sur le plateau d’On n'est pas couché pour se plaindre des problèmes de divergences d’interprétation entre elle et toi ou des signes implicites de son consentement. Certes, en tant que lecteur de Sparse, magazine hautement culturel, toujours tenté d’utiliser des adages latins du pape Boniface VIII (1235-1303) pour se la péter, tu pourrais dire à Angela : « qui tacet consentire videtur », « qui ne dit mot consent ». Après tout, on peut voir une relation sexuelle comme un contrat comme un autre avec un échange de consentements libres entre personnes capables, s’engageant à délivrer des prestations, pour une durée déterminée ou indéterminée, avec une possibilité de résiliation pour des motifs énoncés ou sans motif exigé, et, bien sûr, à titre gracieux ou onéreux. Or, la Cour de cassation applique aux contrats l’adage « qui ne dit mot consent » « lorsque les circonstances permettent de donner au silence la signification d’une acceptation » et le commencement d’exécution du contrat par le débiteur permet généralement d’inférer son acceptation. Mais je doute que tu arrives à convaincre Angela, un tribunal correctionnel voire une Cour d’assise avec ton poly de droit des obligations de seconde année de fac. Mieux vaut donc t’en tenir à un adage inverse en cas de relation avec une autre personne : « qui ne dit mot ne consent pas » ou comme on dit à Sombernon, « c’est oui que quand c’est oui ». Le Parlement suédois vient du reste de voter une loi créant un délit d’« outrage sexuel par négligence », qui s’appliquera à toute relation sexuelle avec une personne qui n’a pas expressément dit oui ou montré activement son consentement. D’un point de vue pratique, plutôt qu’un contrat à signer, old-fashioned, qui risque de faire fuir Angela, je t’invite plutôt à utiliser une appli développée par des startupers allemands dénommée LegalFling, qui permet d’enregistrer ses préférences sexuelles ainsi que les pratiques que l'on accepte ou non. En cas de rapport envisagé avec Angela, tu pourras lui envoyer un "Fling" par Whatsapp, SMS ou Messenger pour avoir son consentement. Une fois la demande acceptée, les deux parties auront accès au "contrat" et pourront ainsi consulter les préférences de l’autre. L’application étant sécurisée grâce à la blockchain, seuls toi et Angela, ou une autorité judiciaire en cas de litige, aurez accès au contrat, qui ne pourra être modifié ou consulté par autrui. Tu pourras ainsi sortir couvert. N’oublie pas ton chargeur.
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Si vous ne savez pas comment emmerder le monde, n’hésitez pas, nous pouvons vous y aider : posez votre question, nous vous y répondons (ou pas).
© Cyril DUC / cyril-duc.com
MARS. -> MAI 2018 FINALE TREMPLIN MUSIQUES DE R.U. 2018 PAR LE SERVICE CULTUREL DU CROUS
JEU.8 MARS 2018 | 18H30
En partenariat avec De Bas Étages
A LA CROISÉE DE LA MUSIQUE ET DU CIRQUE CAMILLE DESSEAUVES ET MARINE JOLY
DIM.25 MARS 2018 | 15H
En partenariat avec Or Piste et l’EMOHD
FESTIVAL ÉCLOSION 9ÈME ÉDITION LE THÉÂTRE UNIVERSITAIRE DE DIJON
DU MAR.3 AU SAM.7 AVRIL 2018
Festival de théâtre prometteur
CIRQUE BFC, ÉTAT DES LIEUX ET DYNAMIQUES D’AVENIR RENCONTRE PROFESSIONNELLE
JEU.19 AVRIL 2018 | JOURNÉE
En partenariat avec CirQ’ônflex, dans le cadre du Festival Prise de CirQ’
HERE AND NOW CIE INHÉRENCE
JEU.19 AVRIL 2018 | 20H30
En partenariat avec CirQ’ônflex, dans le cadre du Festival Prise de CirQ’
PILLOW CONCERT AVEC ENCORE
MER.25 AVRIL 2018 | 20H30
En partenariat avec De Bas Étages
AU SUIVANT ! CIRK’UNIV’BFC
VEN.18 MAI 2018 | 20H30
THÉÂTRE EN MAI LE THÉÂTRE DIJON BOURGOGNE
DU VEN.25 MAI AU DIM.3 JUIN 2018
| 03 80 63 00 00 || www.theatre-mansart.com |
11, rue du Docteur Chaussier 21 000 Dijon Tél. : 03 80 30 38 62 lateliercrea@hotmail.fr
Lundi-mercredi-vendredi 9h30-19h00 Jeudi 9h30-21h00 (nocturne) Samedi 8h30-17h00 Fermé le mardi
hFFroscopitone
Par Cédric de Montceau Illustrations : Mr. Choubi
Si tu lis cet horoscope, c’est que le monde réel ne t’offre pas assez de nourriture nécessaire à la bonne compréhension de ton existence inutile. Si tu ne valides pas cette analyse pertinente, tu n’es certainement pas fréquentable. Mais BRAVO, tu es presque à la fin de ce magazine unique.
En tant que premier signe du zodiaque, il serait temps d’épouser tes responsabilités. Impulsif et autoritaire, tu as le profil idéal pour devenir un ennemi de l’Humanité ou faire carrière en politique. Le monde a besoin de toi, la démocratie est une idée archaïque. Travail : Nordahl Leburgonde, ça sonne aussi !
Natif du Taureau, sois vigilant si ton/ta conjoint(e) est plus beau/belle que vous. Même si il/elle ne va pas voir ailleurs, ailleurs risque quand même de venir le/la visiter. Si vous vous mariez cette année, prends garde à ne pas être le mouton de la farce. Santé : si tu es à cheval sur l’optique, change de monture.
En tant que Gémeaux, ta liberté n’a pas de prix ! Même si ton indépendance princière compte, ce n’est pas une raison pour faire dans le discount. Sois indulgent avec toi-même, la liberté ne s’use que lorsqu’on s’en sert. Amour : cède à l'illusion, ça fait du bien !
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nom : prénom : adresse : code postal : adresse mail : téléphone :
ville :
courrier des lecteurs
«B
onsoir Madame, Quelqu'un peut-il m'expliquer cette histoire de clash entre Booba, Rohff, Seth Gueko et tout le tintouin ? Vous qui avez l'air de vous y connaître en réseaux sociaux. Je comprends rien. Pourquoi ils se disent des choses pas gentilles ? Ils se connaissent à peine et se permettent de se juger. C'est mal. Tant qu'à arriver à ce point-là, pourquoi est-ce qu'ils ne se foutent pas directement sur la gueule ? Patricia - Avallon (89)
réponse de la rédaction
Il faut tous trouver une raison d'exister. Les réseaux sociaux, ça sert beaucoup à ça. Certains mettent des photos de leurs enfants, de ce qu'ils bouffent ou de leur couple. Sont-ils plus amoureux que ceux qui gardent un peu de pudeur ? Je ne crois pas. Les rappeurs, c'est pareil, ils essaient d'exister. Et comme tu ne sors pas un album tous les deux jours, il faut bien entretenir le buzz autour d'eux (oui, on a encore le droit de dire ‘buzz’ en 2018). Ça ne veut pas dire qu'ils font plus de trucs. Juste qu'ils postent plus de trucs sur le net. Qui sont repris par tous les sites de news people. Booba, Rohff, La Fouine et compagnie, ils existent grâce à ça. Y'a bien une petite chicane de temps en temps, mais rien de méchant. Bon, là le truc c'est qu'ils ont du faire une erreur en mettant Seth Gueko dans la boucle. Parce que lui, je pense qu'il ne va pas rigoler longtemps. Ça va finir dans un coffre de bagnole, ça... Excuse-toi Booba.
«S
alut la Capitale, bandes de petits prétentieux, Avec mes potes, on a créé une asso qui a pour but de montrer par la photo le vrai visage de la Bourgogne-Franche-Comté. On a un petit litige : quand je leur dis qu'il faut qu'on aille à Nevers, mes amis me soutiennent mordicus que cette ville n'est pas en Bourgogne, et peut-être même pas en France. Pouvez-vous régler cette embrouille géographique ? Raphaël - Besançon (25)
réponse de la rédaction
Bérégovoy s'en retourne dans sa tombe... Oh les gars ! Si c'est dans Sparse, c'est BFC, ok ? Donc, Nevers c'est bien la région Bourgogne, donc Bourgogne-Franche-Comté. Alors certes, c'est le bout du monde, c'est le Far-West. Je mets moins longtemps à aller à Porto depuis l’aéroport de Dole (trajet Dijon-Dole et attente à l'aéroport compris) que pour aller à Nevers. Quand je fais la route, je prends des vivres. Et j'ai une balise Argos dans la poche. On est séparés par le Morvan. Mais ça, c'est parce que la région est énorme, c'est tout. Franchement, les gars de Nevers savent très bien que Montbéliard c'est en BFC, même s'ils n'y vont pas. Ils connaissent leur géographie, eux. En fait, ce qu'il faut, c'est imaginer la BFC comme les USA. Considère que Montbé c'est New York, et Nevers, Los Angeles ! Dijon, ce serait Washington, et Besac’, Chicago. Tu l'as ?
80
«B
onjour, Je ne sais plus vraiment à qui me confier. Donc je le tente anonymement dans votre magazine, en espérant avoir une réponse de votre part. Voilà, je me sens différent. Les autres jettent sur moi des regards inquisiteurs. Je mange de la viande. J'aime ça. Souvent je m'en veux. Dimanche, je me suis planqué chez moi pour dévorer de l'agneau... et après j'ai pleuré. Je n'ose plus manger devant les autres. Gérald – Champagnolles (39)
(Ah merde, j'ai donné mon nom)
réponse de la rédaction
C'est compliqué. Tu te rends compte de tout le mal que tu fais aux animaux ? Non, je déconne. Le problème, c'est qu'on mange trop de viande. Il paraît qu'on n'en a pas besoin. Ce qui doit être vrai. Mais si je fais ma vie en fonction de mes besoins, je vais bien me faire chier. À vivre à poil, à boire que de l'eau. Alors qu'on a le Charollais, cet Eden de la viande, à un jet de pierre de chez nous ?! Impose-toi Gérald ! Quand tu arrives en soirée, tu dégaines de ton sac à dos une cuisse de poulet, ou une andouillette si tu veux vraiment marquer le terrain au fer rouge. Soit les gênés s'en vont, soit ils se battent avec toi, mais dans tous les cas, c'est réglé en 10 secondes. On n'a pas de temps à perdre avec ces conneries.
«M
erci pour cette réponse, au vu de son contenu, j'en profite pour vous dire que c'est certainement encore plus dérangeant quand je fume. Là, je suis un vrai pestiféré. Une mère de famille m'a même craché dessus devant un café l'autre matin. Que dois-je faire ?
réponse de la rédaction
C'est fou Gérald, le magazine n'est encore pas sorti que tu as déjà vu la réponse, tu m'as envoyé une autre question, que j'ai eu le temps de publier. C'est beau la magie des médias. Bref... Tu aggraves ton cas. Tu fumes, et même si tu trouves que tu as trop de style quand tu le fais (moi aussi d'ailleurs), ça va te faire mourir plus vite. Mais là n'est pas ton problème visiblement. C'est le regard des autres qui est compliqué à assumer. Socialement, fumer en 2018, c'est comme porter encore un patte d'eph dans les 80's. La honte. Les anciens fumeurs sont des ayatollahs en puissance qui sont prêts à te pendre à une grue plutôt que de sentir ta fumée dans leur espace vital. Eux ont eu du courage, pas toi. Pour eux tu es faible. Un soushomme. Ma solution est simple : tu fais comme Lino Ventura dans Garde à vue. Tu gardes une clope à la bouche pour le style, mais tu ne l'allumes jamais. C'est moins mauvais pour la santé et pour le portefeuille, et ça daube moins. En plus avec la référence Ventura, les gens ne pourront rien te dire. Tout le monde aime Lino. Et à côté de ça tu vapotes en cachette. Parce que vapoter, ça, c'est vraiment l'antithèse de la classe.
«S
alut les pécores, Comme je dois m'éloigner un peu de la Seine-St-Denis, je cherche un coin peinard en France pour m'installer en attendant mon procès en appel. On m'a dit que la BFC c'était sympa. Je suis entrepreneur, j'ai des projets. Rien de bien foufou quoi, un point de vente de cocaïne, quelques apparts à louer. Le rêve des jeunes de mon âge en quelque sorte. Un coin à me conseiller ? Je vous renverrai l'ascenseur, parce que moi, on me demande de dépanner, je dépanne.
Jawad - St-Denis (93) réponse de la rédaction
Luxeuil-lès-Bains ? Ça peut être pas mal. Ou Bourbonne-lès-Bains, ou St-Honoré-lèsBains... une ville thermale pour toi je pense. Y'a de gros potentiels là-bas. Ça va marcher, j'en suis sûr. Bon courage, mais réfléchis avant Jawad. Pourquoi pas un petit bilan de compétences, hein ? Histoire de voir où t'en es. Parce que là ton projet, ton entreprise, c'est un peu brouillon tout ça.
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from helle Dans chaque numéro, carte blanche au photographe Raphaël Helle
Photographie extraite de la série Miss Orange et le grand dérèglement qui évoque les changements climatiques. Exposée aux Photographiques du Mans en mars 2018. (Miss Orange aka Caroline Amoros)
M O C . S M U O P C M . M S A O U C C P . N S M O J NCA MPU I D O IJO CA I D RADIODDIJON RAADIO R NOUVEAU SITE INTERNET
« 35 ANS DE PÉPITES SONORES » CONTRIBUEZ SUR grainesdactions.fr ET SUR radiodijoncampus.com